Notes
-
[1]
J’emploie ici ce mot au sens que lui donne l’histoire de l’art pour désigner une période qui débute à la fin du xixe?siècle et s’achève dans les années 1960.
-
[2]
Mallarmé, «?Crise de vers?».
-
[3]
J.-F. Lyotard, Discours, figure, 1971, rééd. Paris, Klincksieck, 2002, p. 11.
-
[4]
Id. p. 218.
-
[5]
Id. pp. 152-3.
-
[6]
J.-F. Lyotard, Chambre sourde. L’antiesthétique de Malraux, Paris, Galilée, 1998, p. 56.
-
[7]
J.-F. Lyotard, Discours, figure, op. cit., p. 13.
-
[8]
Husserl, Logique formelle et logique transcendantale, 2ème éd. Puf, 1965, p. 216.
-
[9]
H. Maldiney, «?Le Monde en avènement dans l’événement de l’œuvre. Cézanne et le paysage?», in Art et existence, Paris, Klincksieck, 1986, pp. 22-23.
-
[10]
J.-F. Lyotard, Discours, figure, op. cit., p. 28.
-
[11]
Id., p. 204.
-
[12]
J.-F. Lyotard, L’Inhumain, Paris, Galilée, 1988, p. 90.
-
[13]
M. Merleau-Ponty, Le Visible et l’Invisible, Gallimard, 1964, p. 166.
-
[14]
J.-F. Lyotard, Discours, figure, op. cit., p. 19.
-
[15]
Id. p. 21.
-
[16]
Id., p. 13.
-
[17]
Id. p. 271.
-
[18]
J.-F. Lyotard, «?Freud selon Cézanne?», in Dispositifs pulsionnels, Paris, C. Bourgeois, 10/18, 1973, p. 80.
-
[19]
J.-F. Lyotard, Discours, figure, op. cit., p. 238.
-
[20]
Id., p. 281.
-
[21]
Id. p.145.
-
[22]
Id. p. 386.
-
[23]
J.-F. Lyotard, «?Sam Francis. Leçon de ténèbres?» in Écrits sur l’art contemporain et les artistes, Louvain, Presses Universitaires de Leuven/Louvain, vol. 2, 2010.
-
[24]
J.-F. Lyotard, L’Inhumain, op. cit. p. 90.
-
[25]
J.-F. Lyotard, Discours, figure, op. cit., p. 28.
-
[26]
J.-F. Lyotard, Moralités post-modernes, Paris, Galilée 1993, p. 30.
-
[27]
M. Dufrenne, La Notion d’«?a priori?», 1959.
-
[28]
J.-F. Lyotard, Moralités post-modernes, Paris, Galilée 1993, p. 30.
-
[29]
J.-F. Lyotard, Discours, figure, op. cit., p. 15.
-
[30]
Id., p. 17.
-
[31]
L’Observatoire,, n°41, hiver 2012, p. 25.
-
[32]
C. Talon-Hugon, Goût et dégoût. L’art peut-il tout montrer??, Nîmes, éd. J. Chambon, 2004.
-
[33]
C. Talon-Hugon, Morales de l’art, Paris, Puf, 2009.
-
[34]
C. Talon-Hugon, Art versus esthétique, Paris, Hermann, sous presse.
-
[35]
J.-F. Lyotard, «?Réponse à la question?: Qu’est-ce que le post-modernisme???», in Critique, 1982, n°419.
-
[36]
Mais qui ne lui a pas pour autant donné son sens moderne de science de l’art?; il fallu attendre Sulzer pour cela.
1Comme ces étoiles mortes dont la lumière continue à nous parvenir, la pensée de Lyotard, vénérée par les uns, exécrée par les autres, continue à faire sentir ses effets dans le champ de l’esthétique aujourd’hui au sens où elle a légué une certaine manière d’entendre les rapports de l’art et de la philosophie et instauré dans la discipline « esthétique » des lignes de clivage souterraines mais décisives. Je commencerai donc par exposer ce que fut la pensée de l’art de Lyotard, en utilisant ici le « de » dans son sens de génitif subjectif (la pensée qui est celle de l’art), afin d’identifier et de cerner la position qu’il a léguée concernant le sens de la discipline esthétique. Je montrerai ensuite comment ce que je nomme « le paradigme artistique de l’esthétique » hérité de Lyotard a perdu en France sa situation dominante et est fortement concurrencé par une autre manière d’entendre les rapports de l’art et de la philosophie qui se décline de différentes manières relevant toutes de ce que je nomme le « paradigme philosophique de l’esthétique ». J’exposerai enfin comment les devenirs contemporains de l’art font du paradigme artistique de l’esthétique une réponse inappropriée à ces nouveaux objets.
La pensée de l’art chez Lyotard
2La pensée de l’art chez Lyotard fut un précipité de modernité [1]. Son esthétique, étroitement mêlée à l’ensemble de sa philosophie et évoluant avec elle, fut fortement marquée par le paradigme artistique et les débats théoriques de son temps. Elle est à la confluence de trois courants : l’aisthétisation de la scène moderne de l’art, la phénoménologie et la psychanalyse freudienne.
3Alors que l’ut pictura poesis entendait ennoblir la peinture et la hisser du rang d’art mécanique à celui d’art libéral en affirmant qu’elle est une poésie muette - autrement dit qu’elle appartient à l’ordre du discours - la modernité s’est efforcée de montrer que la peinture, et plus largement l’art, est le lieu par excellence de l’aisthésis. En se donnant pour tâche de fixer une impression optique subjective et momentanée, l’impressionnisme accomplit le triomphe de la sensation visuelle sur la perception. Manet fut l’icône de la modernité picturale pour avoir rendu la peinture à la picturalité et l’avoir libérée des fonctions du discours au profit de ce que Bataille nomme « l’‘horreur sacrée’ de la présence ». A la fin du xixème siècle, Konrad Fiedler déclara qu’il fallait en finir avec la transparence du contenu et défendit une théorie de la pure visibilité, fournissant par là le cadre théorique de la critique formelle qui triompha avec Roger Fry, Clive Bell ou Clement Greenberg. Cette aisthétisation de l’art ne concerne pas que la peinture. En 1854, Hanslick, en soutenant dans Du beau dans la musique, que la musique est seulement architecture sonore, combinaison de « formes sonores qui n’ont d’autre sujet qu’elles-mêmes » ôtait à celle-ci le caractère référentiel qui était le sien jusqu’alors et réalisait l’autonomisation du musical que poursuivirent Helmohltz et Stravinsky. Dans le domaine littéraire, Mallarmé fit de la poésie un état de la parole distinct de son état ordinaire, représentatif et communicationnel, le lieu d’une parole essentielle, qui, elle, est non référentielle. Dans cet « insolite vaisseau d’inanité sonore » le signifié disparaît au profit des signifiants qui, par le choc de leur rencontre, font que « s’allument de reflets réciproques comme une virtuelle traînée de feux sur des pierreries » [2].
4Lyotard s’inscrit dans la mouvance théorique qui accompagna ce moment moderne de l’art. Discours, figure se présente comme une « défense de l’œil [3] » et décrit la manière dont la peinture moderne a déjoué la ruse du logos pour asservir le visible en se débarrassant de l’espace homogène, rationalisé et faux qui était celui de la perspective géométrique instaurée par la Renaissance. La peinture moderne a fait « stationner l’esprit devant le sensible » [4]. On comprend l’éloge que Lyotard fait de la couleur qui est l’essence du pictural et qui, depuis le débat des coloristes et des rubinistes, représente un défi pour l’esprit. Qu’il parle de la peinture de Masaccio, de Cézanne, de Klee, de Sam Francis, de Barnett Newman, de Monory ou d’Albert Ayme, Lyotard retient la présence de la matière, l’événement de l’apparition sensible, le grand mutisme de la peinture. Cette matière dont il parle, écrit-il dans l’Inhumain, est « immatérielle, an-objectable, parce qu’elle ne peut avoir lieu ou occasion qu’au prix de la suspension [des] pouvoirs actifs de l’esprit » ; le mot « matière » signifie ici « ce ‘qu’il y a’, ce quod, parce que cette présence en l’absence de l’esprit n’est jamais que timbre, ton, nuance de l’un ou l’autre des sensoria dans l’une ou l’autre des passibilités par où l’esprit est accessible à l’événement matériel, peut en être touché : qualité singulière, incomparable – inoubliable et immédiatement oubliée – du grain d’une peau ou d’un bois, de la fragrance d’un arôme, de la saveur d’une sécrétion ou d’une chair, aussi bien que d’un timbre ou d’une nuance » [5]. En littérature, les choix de Lyotard se portent sur les auteurs qui se détournent de la narrativité et considèrent que l’enjeu de l’écriture est dans la littérarité, qui s’attachent aux mots « dans leur visage de chair » comme disait Sartre, plutôt qu’au récit : Butor, Gertrude Stein, Kafka, Joyce, Beckett, tous réunis sous la figure tutélaire de Mallarmé dont le Coup de dé occupe dans Discours, Figure une place séminale et emblématique. Ainsi donc, l’œuvre d’art n’est pas signifiante : elle est « agencement singulier, inattendu des éléments qui la constituent : les mots en littérature, les couleurs et les formes en peinture » [6], et l’art est « un démenti à la position du discours [7] ».
5Pour Lyotard, dire que cette aisthétisation est la riposte victorieuse de l’art contre la rationalité occidentale qui voudrait le tuer, n’est pas dire que le combat est celui du sensible contre toutes les formes de sens. Ce que Lyotard rejette, c’est le sens du logos, autrement dit la signification. Ce qu’il admet et qu’il célèbre c’est une autre forme de sens qui, lui, est du côté de l’art, de l’œil et du sensible. Par cette affirmation d’un sens des sens, Lyotard met ses pas dans ceux de la phénoménologie dont il partage la démarche depuis ses premières écrits, au début des années 50, jusqu’au début des années 70.
6Il est inévitable que le paradigme aisthétique des arts, en mettant en avant l’attention portée à la phénoménalité du sensible plutôt qu’à l’organisation conceptuelle du monde en objets, ait trouvé dans la phénoménologie un appui théorique considérable. Parce qu’elle est une pensée de la phénoménalité, c’est-à-dire de ce qui fait de chaque phénomène un phénomène - son apparaître, sa manifestation, sa révélation, sa vérité -, la phénoménologie a trouvé dans la manière moderne de comprendre l’expérience esthétique, la mise en œuvre de son intuition philosophique fondamentale. Henri Maldiney établit clairement cette parenté lorsqu’il écrit à propos de Cézanne : « La ‘logique des yeux’, la seule qu’admette Cézanne, est une ‘phénoméno-logie’ au sens que dira Husserl : ‘c’est seulement en voyant, que je peux mettre en évidence ce dont il s’agit véritablement dans un voir ; l’explicitation propre d’un tel voir, je dois l’effectuer en voyant’ [8] » [9]. Lyotard ne dit pas autre chose quand il dit ce qu’est le tableau pour la peinture moderne : « un objet où se montre l’engendrement des objets, l’activité transcendantale elle-même » [10]. Pour lui, comme pour Merleau-Ponty, Cézanne est le héraut de cette peinture phénoménologique : parce que l’espace de ses tableaux n’est plus représentatif et réalise « la déconstruction de la zone focale par la plage courbe du champ de vision », le peintre« manifeste la Sainte-Victoire en train de se donner à voir », autrement dit « le paysage tel qu’on peut le voir avant de le regarder », et, ce faisant, « nous fait voir ce que c’est que voir » [11]. L’expérience aisthétique de l’art est donc une mise en œuvre de la réduction phénoménologique qui effectue la suspension (l’épokhê) de tout jugement sur les choses et les faits pour voir le monde comme un pur phénomène. Cette pensée du « il y a » se retrouve dans toute l’œuvre de Lyotard : « un tableau de Newman, c’est un ange. Il n’annonce rien, il est l’annonce même », écrit-il encore dans L’Inhumain [12].
7Au programme logocentré de « l’œil écoute » selon Claudel, la phénoménologie a substitué le programme de « voir l‘invisible ». Lyotard se détache de ce courant de pensée lorsqu’il cesse de considérer cet invisible comme celui de la phénoménologie, pour l’envisager comme celui de Freud : la pulsion, l’inconscient, le désir. A côté du sens sensible, il existe un autre sens qui, lui, est libidinal. La phénoménologie s’est détournée du « je » au profit du « on » ; mais même si elle n’est plus une philosophie de la première personne, elle reste une philosophie du sujet. Il faut aller plus loin, plus profond : passer du « on » au « ça ». Merleau-Ponty a donc eu le tort de croire que c’était le corps qui était le lieu de l’événement, troublait le langage et qu’était néanmoins possible « un langage de la coïncidence, une manière de faire parler les choses mêmes » [13]. C’est là selon Lyotard une illusion : Merleau-Ponty n’a pas vu ce qui résiste définitivement au langage et est tombé dans l’erreur de croire dans la toute puissance de la pensée ; il a cru pouvoir aller « là-bas en restant ici [14] ». La phénoménologie est alors jugée coupable, comme toute la philosophie occidentale, d’avoir cherché à oblitérer le désir, de « récupérer l’autre en même [15] ».
8Les principes psychanalytiques sont à la fois les armes de la critique de la phénoménologie et, positivement, le principe de la vision de l’art qui se met en place durant ces années et colorent les positions durables de Lyotard sur l’art. L’art est ainsi conçu comme affleurement du désir : « [Il] est posé dans l’altérité en tant que plasticité et désir, étendue courbe, face à l’invariabilité et à la raison, espace diacritique [16] ». Il témoigne de l’imprésentable, fait signe vers « quelque chose qui reste en dehors de la sphère de la conscience au sens phénoménologique du terme ».
9Mais comment présenter l’invisible quand celui-ci est l’imprésentable ? Ici intervient le terme clé de « figure ». La figure - à la fois forme sensible dans la peinture et figure de style dans la littérature - est ce où se manifeste une pulsation qui vient d’ailleurs, une énergie irréductible au discours. D’où la « connivence radicale de la figure et du désir » [17]. Discours, figure insiste sur l’analogie entre le travail de création et le travail du rêve. Tous deux obéissent aux mêmes opérations qui déconstruisent le discours articulé. Ainsi l’espace figural de Cézanne est-il l’équivalent plastique de l’inconscient : travaillé par des processus primaires et secondaires, il est un espace « oscillant, laissant coexister plusieurs points de fuite, un espace de non localité [18] ». L’œuvre porte toutes les traces des procédés qui lui ont donné naissance : déplacements, renversement, unité des contraires, indifférence au temps et à la réalité ; elle est en ce sens « l’atelier exhibé du processus primaire » [19]. L’œuvre poétique est, quant à elle, « un texte travaillé par la figure » [20], c’est-à-dire ici par les figures de style qui transgressent les règles ordinaires du lexique et de la syntaxe. Lorsque Shakespeare invente dans Hamlet l’adjectif « mobled », pour qualifier la reine (« The mobled Queen » ; « La reine encamouflée », traduit Gide), les opérations du processus primaire affleurent. Issu de la condensation des mots « mother », « mob » (la populace), « motley » (bigarré), « mobled » est interprété par Lyotard comme « un fragment de l’espace de l’inconscient primaire, venu faire sa trace dans celui du discours ». Lorsque Henri Pichette écrit à propos de l’aimée « je t’imprime », « je te rame », ou « je te musique », il use de termes déplacés qui témoignent « qu’il y a en sous-sol (…) des forces, une énergétique qui bouscule l’ordonnancement en système [21] ». La poétique ne construit pas le sens mais le déconstruit et ce faisant, ne dit pas le vrai, mais « fait un travail de vérité [22] ».
10Telle est l’esthétique libidinale de Lyotard. L’œuvre d’art est affaire d’intensités, de dispositifs, de déplacements, d’énergie. Dans les années 80, la pensée de l’art de Lyotard, aimantée par le traitement kantien de la question du sublime, évolue. L’expérience du sublime est celle d’un plaisir par la souffrance (« plaisir que la raison excède toute représentation ; douleur que l’imagination ou la sensibilité ne soient pas à la mesure du concept »). Ainsi en est-il l’expérience de la couleur : non un plaisir simple, rétinien, mais plaisir et souffrance à la fois car elle est anamnèse de l’abyssal, ou, comme l’écrit Lyotard à propos des toiles de Sam Francis, « contradictoire bouquet à la gloire de ce que voir peut et ne peut pas [23] ». L’art n’est plus alors le lieu de la représentation indirecte, inattendue, détournée, de l’imprésentable, mais le lieu où se manifeste le fait qu’il y a de l’imprésentable. Le sublime renvoie à une fulgurance de l’absolu qui se montre en même temps qu’il se dérobe : « le ‘sujet’ de la peinture est bien l’instant, l’éclair qui aveugle l’œil, une épiphanie [24] ». L’art post-moderne est interprété par Lyotard comme le lieu de cette présentation négative. Pour dire l’indicible de la Shoah, l’œuvre de Gertrude Stein est alors préférable à Si c’est un Homme de Primo Levi, ou à La Nuit, d’Elie Wiesel. Ainsi, depuis Discours, figure jusqu’aux textes esthétiques les plus tardifs, Lyotard soutient que l’art témoigne du creux qui est au cœur de la représentation, de ce non sens originaire qui se nomme d’abord « figure », puis « différent ».
Après Lyotard
11Le panorama de l’esthétique en France aujourd’hui est varié, complexe et contrasté. Etroitement lié à des options philosophique, on y trouve des travaux d’inspiration analytique, phénoménologique, d’autres inspirés de la French philosophy, d’autres de l’histoire de la philosophie ou plus largement de l’histoire des idées, d’autres encore de la philosophie de l’esprit et des sciences cognitives. Sous cette bigarrure, se repère une ligne de partage assez nette entre ceux qui acceptent le legs de Lyotard et ceux qui le refusent. Je considérerai tour à tour ces deux positions.
Le legs Lyotard ou le paradigme artistique de l’esthétique
12Les analyses lyotardiennes de l’art rendent extrêmement problématique le statut de l’esthétique et plus largement de la philosophie. Pour Hegel, l’esthétique comme réflexion philosophique sur l’art est possible et nécessaire puisque l’art n’est pas auto-suffisant et que le logos est le seul lieu du sens. La philosophie est donc requise pour dire la vérité de l’art. Mais quand l’art est conçu comme le royaume d’un sensible que le langage ne peut saisir, d’un sens libidinal qui échappe précisément au logos, d’un sens qui se dérobe en même temps qu’il se donne, quand la théorie est jugée terroriste et destructrice des singularités et des intensités, quid de la philosophie de l’art ?
13Une première réponse consiste à confier à l’art la tâche de la philosophie. L’idée n’est pas neuve. Le Romantisme allemand de Iéna a cru en une philosophie de l’Art, non pas au sens d’une philosophie qui parlerait de l’Art, qui réfléchirait sur l’Art, mais une philosophie qui sourdrait de l’Art, qui procéderait de l’Art et qui serait supérieure à la philosophie classiquement conçue. Novalis assignait à la poésie la tâche d’accomplir la philosophie ; la Philosophie de l’art de Friedrich Schlegel entendait être une compréhension de tout l’univers par l’Art. La French philosophy elle aussi a conçu l’art comme un opérateur de pensée et l’a mis au centre de l’exploration de la différence. « L’art a quelque chose de philosophique » déclarait Lyotard dans un entretien de 1985 avec Bernard Blistène. Il réalise – à sa manière, qui est selon Lyotard la seule manière possible - un programme métaphysique, produit l’étonnement philosophique, fait vaciller croyances et savoirs d’entendement, met en contact avec le principe. Si bien que le tableau, dans la peinture moderne « devrait pouvoir tenir lieu de philosophie tout entière [25] », et que « Gertrude Stein, Joyce ou Duchamp paraissent de meilleures têtes ‘philosophiques’ en regard de Nietzsche ou Heidegger [26] ». Alain Badiou qui intitule un recueil de ses textes sur l’art : Petit Manuel d’inesthétique (1998), entend remplacer le discours sur l’art par celui d’un art qui est lui-même “une procédure de vérité”. En 1959 déjà, Mikel Dufrenne décrivait ce renoncement de la philosophie à elle-même : tout se passe, écrivait-il, « comme si la philosophie, lorsqu’elle prétend être une pensée de l’impensable, ayant peine à se suffire à elle-même, éprouvait le besoin d’être relayée ou relancée par un savoir qui n’est plus philosophique, par un discours qui se situe peut-être au-delà du savoir [27] ».
14Une deuxième réponse consiste à faire de l’esthétique autrement que philosophiquement. Là encore, l’idée n’est pas nouvelle. A l’époque du Gai savoir, Nietzsche, qui avait fait périr l’idéal de vérité et de science sous le coup de la critique, voyait dans les illusions de l’art un modèle pour un monde débarrassé du vrai, et appelait de ses vœux le philosophe artiste qui refuse le système au profit de l’intuition et de la vision, et qui procède par méditations aphoristiques. En même temps qu’il opposait, dans L’Inhumain les lourdeurs du discours conceptuel à la sublime légèreté de l’œuvre, Lyotard continuait à écrire sur l’art. Mais son esthétique ne peut pas être sans contradiction philosophie de l’art : elle n’a de légitimité qu’à condition de devenir elle-même artistique. Elle devient telle lorsqu’elle renonce à la méthode, à l’argumentation, au raisonnement, à la vérité ; quand son unique tâche est de signaler l’ineffable qui lui échappe : « Le rien exige de la pensée qu’elle s’inscrive non pas comme le produit de son argument critique mais comme le style de son écriture réflexive » [28]. De même qu’une peinture n’est pas à lire, mais, selon le mot de Klee « à brouter », le discours esthétique qui a en lui « du bougé, du mouvement, de la force », sera lui aussi à brouter plutôt qu’à comprendre [29]. Revendiquant un discours qui exprime plus qu’il ne signifie, Lyotard ne reconnaît pour l’esthétique qu’un discours faible, qui admet son « impouvoir ». En substituant l’idée d’aléthéia à celle de vérité, il entend échapper à l’accusation de sophistique, de relativisme et de nihilisme : « la vérité ne passe nullement par un discours de signification, son topos impossible n’est pas repérable par les coordonnées de la géographie du savoir, mais il se fait sentir à la surface du discours par des effets, et cette présence du sens se nomme expression [30] ». Dans un complet bouleversement l’esthétique comme discours ordonné et articulé serait fausse puisqu’elle ne réaliserait pas la déconstruction. Inversement, le discours incertain, fragmenté, inachevé, pourrait seul toucher au vrai. La force de la philosophie devient sa faiblesse congénitale ; sa faiblesse devient sa grandeur.
15Ces deux propositions (l’art comme philosophie et la philosophie comme art) sont évidemment étroitement liées. Une partie de ce qui se fait en France aujourd’hui sous le nom d’esthétique se recommande de que j’appellerai donc le paradigme artistique de l’esthétique. Sans surprise, il est particulièrement développé dans les écoles d’art, se trouve généralement bien représenté dans les départements des arts dans les universités, et est présent de manière diffuse dans quantité de discours. Ainsi par exemple, Anne Moeglin-Delcroix, dans un numéro récent de L’Observatoire, demande qu’on adopte le point de vue inverse de celui qui veut « que la philosophie ait le dernier mot sur l’art » et que l’art « repre[nne] à la philosophie la mission la plus élevée qu’elle se soit donnée depuis ses débuts, qui est de conduire les hommes à la vérité, à la liberté, au bonheur » [31]. Aujourd’hui le lexique herméneutique s’est largement substitué au lexique ésotérique : il s’agit moins de mise en présence de l’invisible et de l’imprésentable ou de monstration de l’impossibilité de la monstration, que d’œuvres qui « interrogent », « questionnent », « remettent en cause », « invitent à réfléchir », « donnent à penser », autant de formules qui font signe vers la fondation socratique de la philosophie.
Contre Lyotard : le paradigme philosophique de l’esthétique
16En même temps que se répandait la pensée de Lyotard, se développait dans le monde anglo-américain une esthétique issue de la philosophie analytique qui s’inscrivait en faux contre la grande tradition spéculative du xixe siècle. Les penseurs qui se recommandent de cette méthode font leur la formule de Russell selon laquelle il ne s’agit pas de construire des systèmes mais d’analyser, c’est-à-dire de décomposer un concept, un fait ou une entité en ses composantes, et de clarifier des notions vagues et confuses en examinant la manière dont elles sont employées. L’esthétique analytique s’est construite en réaction contre les grands systèmes spéculatifs de type hégélien et contre les pensées issues du Romantisme, mais elle s’attaque aussi à leurs déclinaisons les plus variées et les plus contemporaines. Qu’il s’agisse de figure de l’esprit absolu selon Hegel, de l’être de l’étant selon Heidegger, ou de l’imprésentable de Lyotard, toutes ces thèses sont jugées obscures, confuses et stériles.
17La pensée analytique acclimatée en France a opposé un contrepoids puissant au paradigme artistique de l’esthétique et a contribué, aux côtés de bien d’autres travaux d’inspiration plus classique, à rendre l’esthétique à la philosophie. Dans les frontières relégitimées de l’esthétique philosophique, se déploient aujourd’hui des entreprises qui occupent un spectre très large allant de travaux clairement estampillés analytiques, comme ceux de Jacques Morizot, ou de Roger Pouivet à d’autres s’inscrivant dans une tradition plus continentale d’histoire de la philosophie ou d’histoire des idées. Ayant restitué au logos sa légitimité, ils peuvent s’occuper de questions précises et déterminées qu’ils instruisent conceptuellement. Que ce soit à la manière analytique, en posant des question directes : l’expérience esthétique est-elle une expérience sui generis ? Comment fonctionne symboliquement la représentation ? Comment pouvons-nous être émus par ce que nous savons être des fictions ?, etc. Que ce soit en faisant de l’histoire de la philosophie et des idées (l’invention du goût, l’esthétique kantienne, l’histoire de l’idée de catharsis, etc.). Que ce soit encore en combinant les deux dans une approche historico-conceptuelle qui pose des questions d’intérêt général (au sens où on parle de philosophie générale) tout en tenant compte de l’historicité substantielle de l’art.
L’esthétique aujourd’hui
18Cette approche historico-conceptuelle est celle que je pratique. Elle consiste à procéder par des questions déterminées et explicites (l’art peut-il racheter le dégoût [32] ? La critique éthique est-elle légitime ? [33] Quels sont les rapports de l’artistique et de l’esthétique [34] ? etc.) et à construire une argumentation pour y répondre. Mais, à la différence de l’esthétique analytique elle convoque, lorsqu’il le faut, l’histoire de l’art et l’histoire des idées – et en tout premier lieu celle de l’idée d’art -, pour instruire ces questions. On a à juste titre reproché à l’esthétique sa méconnaissance des œuvres dont elle parle, et il est vrai qu’un discours légitime sur l’art suppose une connaissance et une fréquentation des œuvres, du présent comme du passé. Il suppose aussi, contre la focalisation moderniste de l’esthétique sur la peinture et ses métamorphoses modernes et contemporaines, un intérêt élargi aux autres arts et notamment à la sculpture, à l’architecture et à la littérature-arts qui ont été étrangement et regrettablement absents de ses champs ordinaires d’investigation, mais qui commencent à être investis par l’esthétique. L’histoire de l’art sans esthétique est aveugle car l’art n’est pas fait que d’œuvres ; il est fait aussi de mots pour les dire, de concepts pour les catégoriser, de théories pour les penser. Mais inversement, l’esthétique sans histoire de l’art (au sens d’histoire des œuvres et d’histoire des concepts de l’art) est vide. Voici pour la méthode. Mais une discipline se définissant aussi par ses objets, quelles sont les questions qu’il appartient à l’esthétique d’instruire ?
19La pensée de Lyotard, parfaitement en phase avec le moment moderne de l’art, a contribué à constituer l’idée d’art du modernisme tardif et de la post-modernité qui lui convenait. Précipité de modernité au sens que nous avons vu, elle était congruente avec une telle idée de l’art. Celle-ci s’incarnait dans les avant-gardes, dans des arts attentifs à leur spécificité (la picturalité du peint, la littérarité de la littérature, la musicalité de la musique, etc.), soucieux de formes et non de contenus, revendiquant leur autonomie et leur autotélie. C’est dans ces qualités que Lyotard faisait résider sa profondeur et sa force de dévoilement. Or, nous sommes sortis de ce moment moderne de l’art et même de son moment post-moderne, qui avait renoncé à la pureté militante des avant-gardes, revendiqué l’éclectisme, les références à l’histoire, pratiqué la citation, l’humour et la dérision, mais où Lyotard voyait encore une poursuite de la modernité : « le post-moderne serait ce qui, dans le moderne, allègue l’imprésentable dans la présentation elle-même ; ce qui se refuse à la présentation des bonnes formes […] ce qui s’enquiert de présentations nouvelles, non pas pour en jouir, mais pour mieux faire sentir qu’il y a de l’imprésentable » [35]. La post-modernité est elle-même derrière nous. L’art n’est plus ni moderne, ni post-moderne et la pensée de Lyotard est inadaptée et inappropriée à cet état contemporain de l’art qui se caractérise par trois traits que je désignerai par les mots de dé-définition, de dé-autonomisation et de dé-artification.
Dé-définition
20Le xviiie siècle avait fait du beau la valeur suréminente de l’art comme l’atteste l’invention des beaux-arts ; le xixe siècle et une grande partie du xxe ont infléchi cette esthétisation en une aisthétisation en insistant sur le proprement sensible du sensible et en promouvant l’expérience esthétique comme attention aux qualités purement aspectuelles de l’œuvre. La dissolution de l’art dans l’esthétique était en quelque sorte programmée dans cette évolution. Elle fut réalisée à l’intérieur même de l’art par Cage. Dans sa pièce intitulée « 4’ 33 », il a mis les auditeurs dans les conditions d’écoute d’une œuvre artistique pour lui faire entendre des sons extra-artistiques, conduisant ainsi le public à accueillir les sons du monde. Selon un courant théorique fort du xxe siècle, dont Cage est à bien des égards le héraut, l’art a ainsi pour mission ultime d’apprendre à se passer de l’art : « Il me semble, écrit-il dans son Journal, que l’art moderne du xxe siècle a eu pour effet de changer notre manière de voir, si bien que, où que nous regardions, nous pouvons regarder esthétiquement ». C’est la fin de la barrière d’espèce entre art et nature. C’est là la forme la plus aboutie de ce que Harold Rosenberg désignait par ce mot de dé-définition.
Dé-autonomisation
21Là où l’art se survit à lui-même, il revêt des formes inattendues. On est bien sorti du moment formaliste et autotélique de l’art. Les artistes revendiquent des engagements variés, qu’il s’agisse de solidarité, de fraternité ou d’avenir écologique de la planète. Wodiczko s’engage contre la guerre en en projetant sur la statue de Lincoln de l’Union Square de New-York l’image animée et les paroles d’un vétéran. Rick Lowe rénove des Row Houses abandonnées à Houston. Felix Gonzalez-Torres se lance dans des campagnes d’affichage dénonçant l’homophobie. En résonance avec la Journée mondiale de l’eau, Jorge et Lucy Orta présentent à la Biennale de Venise de 2005 sous le titre de Drinkwater ! des dispositifs de filtration de l’eau croupie et des véhicules permettant de la transporter à peu de frais. L’exposition « Moral Imagination » au Kunstmuseum de Torgau (Suisse) en 2009 consacre le progrès du Green Art. Ces exemples choisis parmi mille autres possibles attestent que la production artistique combine dé-définition et dé-autonomisation. Aux antipodes de l’idée d’autotélie, les œuvres citées ne se donnent plus pour un objet auratique support d’expérience esthétique ; elles entendent agir sur le monde extra-artistique et renouent pour cela avec un fonctionnalisme direct.
22Dé-artification. Par cette traduction de l’expression adornienne d’« Entkunstung der Kunst », je désigne la transformation de l’artistique en culturel et du culturel en art de masse. L’art contemporain est un îlot isolé dans l’océan de l’industrie culturelle. Les arts de masse (c’est-à-dire diffusés par des technologies de masse - CD, DVD, télévision, internet, - planétairement partagés et universellement accessibles sans condition de culture et de formation préalable) font apparaître l’art contemporain héritier des avant-gardes comme un canton perdu ésotérique, ambitieux et anxieux tout à la fois.
23Ces évolutions ouvrent à l’esthétique de nouveaux champs d’investigation. La dé-définition invite à sortir l’esthétique de son cantonnement moderniste en philosophie de l’art et l’engage à se tourner vers le paysage, l’environnement, le design, les arts de vivre. Du fait de l’étymologie de son nom, la discipline « esthétique » est partagée entre deux orientations. Baumgarten qui a légué à l’histoire ce nom [36] en faisait à la fois une poétique (techné de l’art) et – comme y engage son étymologie – aisthésis - une réflexion sur le sensible et l’expérience du sensible. Ces deux orientations voulues par Baumgarten ont eu une postérité inégale. Le mot « esthétique » s’est rapidement spécifié en « philosophie de l’art ». L’esthétique fut donc pendant longtemps, et presque exclusivement, une artistique. En 1998, Denis Huisman affirmait dans le « Que sais-je ? » qu’il avait écrit sur le sujet, “il faut considérer l’esthétique comme la philosophie de l’art, et rien de plus”. Or, les évolutions contemporaines de l’art lui-même invitent, paradoxalement, au développement de l’esthétique extra artistique. Explorer le sensible et le sentir, comme J.-M. Schaeffer en esquisse le programme dans Les Célibataires de l’art, c’est l’ouvrir à toutes les formes du sentir, que son objet soit une œuvre d’art, un objet naturel ou artificiel, un événement ou une expérience. C’est lui donner pour objets un certain type très particulier de relation de l’homme au monde (la relation esthétique dans ses dimensions cognitives, affectives, judicatoires), ainsi que les objets de cette expérience (les qualités esthétiques et les objets qui en sont les supports). Les développements actuels des travaux sur le design, le paysage, les arts décoratifs ou les arts de vivre, de ceux qui se rangent sous l’appellation d’esthétique environnementale, ou d’esthétique du quotidien, témoignent de ce déploiement actuel de l’esthétique hors des limites du champ artistique. La sortie du moment formaliste de l’art a également permis à l’esthétique dans sa partie artistique de réinvestir des questionnements un moment interdits, comme ceux qui concernent les liens que l’art entretient avec les émotions ou avec l’éthique. La désartification l’invite à se tourner vers ces objets peu étudiés et pourtant anthropologiquement et socialement si importants que sont les arts de masse (séries TV, Blockbusters, jeux vidéo, musiques populaires, clips, etc.).
24Le xxe siècle s’est achevé en France par une forte remise en cause de l’esthétique. Ce qu’on vient de voir permet de comprendre plus précisément que cette mise en cause n’est pas uniforme. Elle correspond à deux types d’accusations diamétralement opposées. D’un côté les partisans du paradigme artistique de l’esthétique, l’ont accusée de vouloir dominer et assujettir la grandiose subtilité de l’art par les procédures autoritaires et oppressives du logos – pensons au Petit Manuel d’inesthétique de Badiou (1998) ; de l’autre, les partisans du paradigme philosophique de l’esthétique l’ont accusée de tenir des discours oraculaires, plaquant sur l’art des thèses spéculatives injustifiées – pensons à L’Adieu à l’esthétique de Jean-Marie Schaeffer (2000).
25Le choix est donc entre une inesthétique et une esthétique philosophique, autrement dit entre une esthétique philosophique ou rien. Le moment Lyotard de l’inesthétique apparaît, avec le recul que permet l’éloignement historique, comme un moment à la fois important par son emprise doxique et marquant pour ses conséquences préjudiciables à l’esthétique, mais somme toute limité ; comme une parenthèse dans l’histoire de l’esthétique philosophique qui, bien avant l’invention de l’esthétique au xviiie siècle en Europe, depuis ses débuts antiques s’est intéressée aux arts, au beau et plus généralement au sensible.
26Sous les feux croisés de chacun des camps, l’esthétique a souffert mais s’est relevée d’une crise qui correspondait au conflit ouvert de deux modèles. Requise par ses objets traditionnels et sollicitée par de nouvelles questions qui résultent de la dé-définition de l’art, de sa dés-autonomisation et de sa dé-artification, l’esthétique constitue aujourd’hui en France un champ consistant et prometteur de la philosophie.
Notes
-
[1]
J’emploie ici ce mot au sens que lui donne l’histoire de l’art pour désigner une période qui débute à la fin du xixe?siècle et s’achève dans les années 1960.
-
[2]
Mallarmé, «?Crise de vers?».
-
[3]
J.-F. Lyotard, Discours, figure, 1971, rééd. Paris, Klincksieck, 2002, p. 11.
-
[4]
Id. p. 218.
-
[5]
Id. pp. 152-3.
-
[6]
J.-F. Lyotard, Chambre sourde. L’antiesthétique de Malraux, Paris, Galilée, 1998, p. 56.
-
[7]
J.-F. Lyotard, Discours, figure, op. cit., p. 13.
-
[8]
Husserl, Logique formelle et logique transcendantale, 2ème éd. Puf, 1965, p. 216.
-
[9]
H. Maldiney, «?Le Monde en avènement dans l’événement de l’œuvre. Cézanne et le paysage?», in Art et existence, Paris, Klincksieck, 1986, pp. 22-23.
-
[10]
J.-F. Lyotard, Discours, figure, op. cit., p. 28.
-
[11]
Id., p. 204.
-
[12]
J.-F. Lyotard, L’Inhumain, Paris, Galilée, 1988, p. 90.
-
[13]
M. Merleau-Ponty, Le Visible et l’Invisible, Gallimard, 1964, p. 166.
-
[14]
J.-F. Lyotard, Discours, figure, op. cit., p. 19.
-
[15]
Id. p. 21.
-
[16]
Id., p. 13.
-
[17]
Id. p. 271.
-
[18]
J.-F. Lyotard, «?Freud selon Cézanne?», in Dispositifs pulsionnels, Paris, C. Bourgeois, 10/18, 1973, p. 80.
-
[19]
J.-F. Lyotard, Discours, figure, op. cit., p. 238.
-
[20]
Id., p. 281.
-
[21]
Id. p.145.
-
[22]
Id. p. 386.
-
[23]
J.-F. Lyotard, «?Sam Francis. Leçon de ténèbres?» in Écrits sur l’art contemporain et les artistes, Louvain, Presses Universitaires de Leuven/Louvain, vol. 2, 2010.
-
[24]
J.-F. Lyotard, L’Inhumain, op. cit. p. 90.
-
[25]
J.-F. Lyotard, Discours, figure, op. cit., p. 28.
-
[26]
J.-F. Lyotard, Moralités post-modernes, Paris, Galilée 1993, p. 30.
-
[27]
M. Dufrenne, La Notion d’«?a priori?», 1959.
-
[28]
J.-F. Lyotard, Moralités post-modernes, Paris, Galilée 1993, p. 30.
-
[29]
J.-F. Lyotard, Discours, figure, op. cit., p. 15.
-
[30]
Id., p. 17.
-
[31]
L’Observatoire,, n°41, hiver 2012, p. 25.
-
[32]
C. Talon-Hugon, Goût et dégoût. L’art peut-il tout montrer??, Nîmes, éd. J. Chambon, 2004.
-
[33]
C. Talon-Hugon, Morales de l’art, Paris, Puf, 2009.
-
[34]
C. Talon-Hugon, Art versus esthétique, Paris, Hermann, sous presse.
-
[35]
J.-F. Lyotard, «?Réponse à la question?: Qu’est-ce que le post-modernisme???», in Critique, 1982, n°419.
-
[36]
Mais qui ne lui a pas pour autant donné son sens moderne de science de l’art?; il fallu attendre Sulzer pour cela.