Cette étude traite d’un changement linguistique induit par le contact interdialectal défini comme le contact entre variétés mutuellement intelligibles. La régularité et l’intensité du contact varient en fonction de la concentration de population : dans les petites communautés rurales, il est plus limité et la densité des réseaux sociaux, de par la stabilité sociale, permet le maintien de formes dialectales (ex. Trudgill 1986 ; Tagliamonte, Smith et Lawrence 2005) alors que dans les communautés urbaines plus grandes, tant la nature des liens entre les individus que la mobilité sociale et géographique sont au premier plan des changements linguistiques (Labov 2001). Cela étant dit, dans sa recension de vingt-deux études sur le contact entre variétés, Britain (2012) conclut que la nature linguistique des changements est la même tant en zone urbaine que rurale. Notre travail s’inspire des recherches sur le contact interdialectal faisant appel à la linguistique variationniste, la dialectologie et la sociolinguistique.
Dans la francophonie nord-américaine, les Iles de la Madeleine occupent une place particulière du point de vue géographique et linguistique. Les 12 000 Madelinots, qui sont à majorité acadiens, habitent une sous-région administrative de la province de Québec située au cœur des provinces de l’Atlantique. À partir d’ouvrages historiques (ex. Hubert 1926/1979 ; Naud 1994 ; Fortin et Larocque 2003 ; Carbonneau 2009), on peut diviser l’histoire locale en trois étapes : le peuplement initial, l’accroissement naturel et l’ouverture sur le monde…