Notes
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Pour toute correspondance relative à cet article, s’adresser à Farzaneh Pahlavan, Université Paris Descartes, Institut de psychologie, Laboratoire de psychologie sociale, 71 avenue Édouard Vaillant, 92774 Boulogne-Billancourt cedex, France ou par courriel <pahlavan@univ-paris5.fr>.
Farzaneh Pahlavan a proposé l’idée et sa conceptualisation. Elle a travaillé à l’analyse des données et à la rédaction. Ewa Drozda-Senkowska a participé à l’analyse des données et à la rédaction de l’article. Julien Michelot, enfin, a participé à la préparation du matériel et au recueil des données -
[1]
BBC News (Tuesday, 1 May, 2001)
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[2]
Pour les tenants de l’hypothèse de la catharsis (Geen et al., 1977), l’utilisation de ce type de média a un effet bénéfique sur la personne puisqu’elle permet un moyen sans danger de décharger son agression.
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[3]
Les Jeux Vidéo Violents regroupés par les amateurs sous l’appellation anglo-saxonne de « First Person Shooter », ou FPS) mettent en scène, de façon de plus en plus réaliste, des personnages, guidés par le joueur, dans des scenarios dont le principe consiste à agresser, ou tuer, les autres personnages présents dans l’environnement de jeu.
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[4]
Conférence disponible à l’adresse : http://culturalpolicy.uchicago.edu/conf2001/papers/freedman.htm
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[5]
Conférence disponible à l’adresse : http://culturalpolicy.uchicago.edu/conf2001/papers/goldstein.html
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[6]
http://syndicat.pubao.com/index.php3?action=page&id_art=67157
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[7]
Ce comportement s’apparente au rappel à l’ordre du provocateur. Ici il n’est plus question de violation de la norme, puisque, au contraire, c’est l’autre que l’on tente de « ramener à la raison », ou tout du moins vers la norme. Ainsi l’individu, par cette action autoritaire, tente de rétablir l’ordre.
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[8]
À propos du score au jeu, seul l’effet tendanciel de la violence de jeu est à noter. Il suggère que les participantes ont tendance à se faire « tuer » plus souvent lorsqu’elles jouent au jeu vidéo violent (M=1.09, ?=0.89), que lorsqu’elles jouent au jeu vidéo très violent (M=0.74, ?=0.74 ; (F (1,68) =3.26 ; p<0.8 ; f = .44).
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[9]
Afin de procéder aux analyses des fréquences des choix comportementaux, nous avons transformé les données en racines carrées puisque le teste d’hétérogénéité de la variance pour les choix agressifs s’est révélé significatif.
1Au mois d’avril 1999, deux adolescents entrent armés dans le lycée de Columbine au Colorado, et tuent de sang froid douze lycéens et un professeur avant de se suicider. Les familles des victimes entament un procès contre plusieurs compagnies de jeux vidéo proclamant que l’enquête avait révélé leur influence sur la conduite de ces deux jeunes garçons [1].
2Les recherches sur le lien entre la pratique des jeux vidéo violents et les tendances agressives, menées depuis une dizaine d’années, concluent que ce lien est d’autant plus évident que la population étudiée est jeune. Néanmoins, elles suscitent quelques critiques importantes quant à la mesure des tendances agressives et quant au matériel utilisé. La présente étude a pour objectif de leur apporter quelques éléments de réponse.
3La création du jeu vidéo a débuté en 1951 dans le cadre d’un projet ayant pour objectif la conception d’une nouvelle génération des postes de télévision. Il se popularise au début des années 80 et avec l’accès grandissant aux consoles et aux micro-ordinateurs, très rapidement il fait son apparition dans les foyers familiaux. Considéré comme une évolution technologique de la télévision, l’impact de ce type de jeu a été, et reste encore, assimilé à celui de la télévision. Il n’est donc pas étonnant que les débats publics ainsi que les premiers travaux sur le lien entre la pratique des jeux vidéo violents et les conduites agressives s’appuient sur des recherches concernant les effets d’exposition à la violence médiatisée par la télévision. En effet, les résultats d’une cinquantaine d’années d’études montrent notamment qu’auprès des jeunes, l’exposition à la violence contenue dans les médias est corrélée positivement avec des comportements et des attitudes agressives (Donnerstein, Slaby et Eron, 1994) et que ces effets comportementaux et attitudinaux sont relativement stables (Huesmann, Moise-Titus, Podoloski et Eron, 2003 ; Smith et Donnerstein, 1998).
Explication théorique du lien entre le média violent et les conduites aggressives
4Plusieurs modèles théoriques, à l’exception de l’hypothèse de la catharsis [2], s’accordent pour voir dans l’exposition au média violent un facteur favorisant l’expression des tendances agressives (pour une présentation synthétique plus détaillée voir Pahlavan, 2002). Ainsi, selon la théorie de l’apprentissage social ceci est d’autant plus probable que les modèles présentant les conduites agressives sont attrayants et socialement récompensés (Bandura, 1986). Selon le modèle de l’activation physiologique, l’excitation physiologique provoquée par le média augmente la probabilité de la réponse agressive de l’individu, si celui-ci attribue son éveil physiologique, non pas à sa véritable source (cf. la violence médiatisée à laquelle il vient d’être exposé), mais au contexte de provocation qui suit l’exposition (Tannenbaum et Zillmann, 1975). Selon la théorie néo-cognitivo-associationniste, la violence présente dans les médias augmente l’hostilité et l’agression car elle amorce les réseaux sémantiques se rapportant à la violence (Berkowitz et Rogers, 1986). Enfin selon la théorie socio-cognitive (Huesmann, 1998), les différentes formes d’apprentissages (par association et/ou par observation) aboutissent à la formation des scenarii dont la pratique et la récurrence seraient renforcées par des normes transmises notamment par les mêmes médias. Dès lors, l’impact de la violence médiatisée serait d’autant plus fort que l’individu (a) s’identifie au personnage médiatisé, (b) a des fantasmes agressifs, et (c) développe la croyance que les médias reflètent une image correcte de la réalité. Ainsi, chaque nouvelle exposition constituerait une nouvelle opportunité pour apprendre d’autres scenarii agressifs et compléter ceux qui sont déjà acquis. Selon le modèle général d’agression (General Affective Aggression Model, Anderson, 2000), qui intègre les modèles théoriques précédents, les variables personnologiques et situationnelles déterminant l’état interne de l’individu (affects, cognitions, et éveil physiologique) couplés aux processus d’évaluation de la situation (automatiques et contrôlés), déterminerait la réponse comportementale de l’individu.
De l’observation passive à la participation active
5Pratiquement toutes les approches théoriques explicatives du lien entre les médias violents et les conduites aggressives mettent l’accent, directement ou indirectement, sur les processus d’apprentissage. À la lumière de tous les travaux, en grande partie corrélationnels, réalisés sur le lien entre les médias violents et l’agression (pour télévision, film voir Strasburge et Watson, 2003 ; pour le jeu vidéo voir Anderson, 2004), il paraît en effet assez raisonnable de penser que si l’observation passive de la violence médiatisée par la télévision pouvait augmenter les tendances agressives, alors l’expression de la violence par la participation active aux jeux vidéo violents devrait avoir un effet égal ou supérieur. Bien que les jeux vidéo violents partagent avec les scènes médiatisées par la télévision quelques caractéristiques (par exemple, le contenu violent, le divertissement, la présence de l’action, du rythme, des changements visuels ; Signorielli, 2003, Silvern, Williamson, Countermine, 1983, cité par Grifffiths, 1999, p.204 ; Smith, Lachlan, et Tamborini, 2003), ils ont aussi leurs spécificités. Pour Anderson et Dill (2000), les jeux vidéos, contrairement à la télévision, imposent une participation active et facilitent davantage que la télévision l’identification aux personnages d’autant plus qu’ils présentent un risque réel de dépendance. Leur impact sur les conduites agressives peut donc être plus important que celui de la télévision.
6En effet, en ce qui concerne la participation active, on a pu montrer qu’en général, l’expression d’un premier comportement agressif augmente l’intensité d’un futur comportement agressif (Bushman, Baumeister et Stack, 1999 ; Geen et Quanty, 1977 ; Geen, Stonner et Shope, 1975). De plus, le rôle actif du joueur incluant ses choix d’agresser et ses actions agressives, le conduirait à la construction d’un script agressif plus complet que celui construit par un spectateur passif devant des scènes violentes. Il a été montré également que demander aux participants de s’identifier à un agresseur a pour effet l’augmentation de son niveau d’agression (Geen et Quanty, 1977 ; Geen, Stonner, et Shope, 1975). Or, la présentation du jeu en vision subjective (First Person Shooter [3]) facilite cette identification et, de ce fait, renforce son impact. Tout comme le renforce, la nature addictive du jeu (Braun et Giroux, 1989 ; Dill et Dill, 1998 ; Klein, 1984). Selon Griffiths et Hunt (1998), au Royaume Uni, un adolescent sur cinq serait pathologiquement dépendant aux jeux vidéo.
7Ainsi, les jeux vidéo violents constitueraient
« un environnement d’apprentissage complet pour l’agression du fait d’une exposition simultanée aux modèles violents, ainsi que d’un renforcement par gain des points et de répétition des différentes formes de l’agression »
État de recherches sur l’effet de la pratique des jeux vidéos sur les tendances agressives
9Bien que le nombre de travaux consacrés à démontrer l’impact de la pratique des jeux vidéo violents sur les tendances agressives reste encore faible, l’ampleur du phénomène a amené les chercheurs à quelques meta-analyses (Anderson, 2004 ; Anderson et Bushman, 2001 ; Bensley et Van Eenwyk, 2001 ; Griffiths, 1999 ; Sherry, 2001) dont la conclusion met en avant l’idée selon laquelle le lien entre le jeu vidéo et les conduites agressives est surtout évident chez les enfants (Irwin et Gross, 1995 ; Schutte, Malouff, Post-Gorden, et Rodasta, 1988 ; Silven et Williamson, 1987). Toutefois, dans le cadre des études réalisées auprès des enfants, les chercheurs observent l’expression des tendances agressives lors des activités ludiques (free play, Cooper et Mackie, 1986 ; Irwin et Gross, 1995), tandis que chez les adultes, ils recueillent leurs déclarations comportementales suite à la description des scènes conflictuelles faisant référence à la vie quotidienne (Anderson et Dill, 2000 ; Nelson et Carlson, 1985). Cette différence de mesure pose un sérieux problème lorsqu’on garde à l’esprit que l’expression des tendances agressives, considérées comme socialement indésirables, puisse être inhibée en raison des normes sociales en rigueur. Si, dans les situations du jeu, l’agression peut être admise, voire faire partie de l’éventail des comportements nécessaires pour remporter la victoire, ce n’est qu’exceptionnellement le cas des situations conflictuelles de la vie quotidienne. Il est donc tout à fait possible que le lien entre la pratique des jeux vidéo violents et les tendances agressives à court terme observé chez les enfants soit dû au contexte ludique de leur mesure. Si c’est le cas, il devrait se manifester également chez des adultes ayant à exprimer leurs tendances agressives dans un contexte ludique.
10À cette critique, s’ajoutent trois autres (Freedmann [4] ; Goldstein [5] ; Griffiths, 2000). La première soulève le problème d’équivalence entre les conditions expérimentale et contrôle qui, en principe, devraient différer seulement sur les aspects manipulés. Or, dans la plupart des études analysées, il est d’usage de se servir d’un jeu vidéo violent dans la condition expérimentale et d’un autre jeu non violent dans la condition contrôle, et ceci sans procéder à l’évaluation de leur équivalence par exemple en termes de difficulté, d’intérêt, ou de réponse émotionnelle (pour une des exceptions voir Graybill, Strawniak, Hunter, et O’Leary, 1987). Ainsi, il est difficile, voire impossible d’attribuer les effets observés à la seule violence du jeu. La seconde critique pointe le fait que, dans la plupart des cas, les mesures des tendances agressives sont effectuées à l’aide des questionnaires tels que l’AQ (Buss et Perry, 1992) et/ou STAS (Spielberger, Jacobs, Russell et Crane, 1983) destinés à mesurer l’agression-trait et/ou la colère-trait. Conçus pour demander aux individus de se positionner par rapport à un ensemble de situations relativement générales et ambiguës, ils ne permettent pas des mesures contextualisées ni des réactions affectives ni des réactions comportementales. Enfin, on ne peut pas exclure non plus que demander au participant, et a fortiori à un enfant, de jouer à un jeu vidéo violent, peut l’amener à penser que l’expérimentateur approuve la pratique de ce type de jeux (demande implicite de l’expérimentateur).
Objectifs
11Cette étude a pour objectif général de répondre aux questions soulevées par l’analyse critique des travaux concernant le lien entre la pratique des jeux vidéo violents et les tendances agressives à court terme.
12La première renvoie à la conclusion selon laquelle ce lien serait d’autant plus évident que la population étudiée est jeune ce qui, comme nous l’avons déjà mentionné, nécessite de reconsidérer la question concernant le contexte de mesure des tendances agressives. N’étant pas le même dans la plupart des études concernant les enfants et les adultes, la nature ludique du contexte de mesure des études sur les enfants peut être à l’origine de la tendance observée. Répondre à cette critique implique de choisir un échantillon ou bien des enfants ou bien des jeunes adultes moins familiarisés avec ce type de jeu et de mesurer leurs tendances agressives dans un contexte favorisant l’expression de ces tendances (ludique) et dans un contexte la favorisant moins (de la vie quotidienne). Notre choix s’est porté sur des jeunes femmes adultes. Trois raisons parlent en sa faveur. D’abord, sur le plan éthique le fait d’exposer des enfants aux images violentes nous a semblait plus délicat et plus risqué. En suite, comme le remarquent Anderson (Anderson, 2007 ; Anderson et Murphy, 2003), la recherche sur le lien entre la pratique des jeux vidéo violents et les tendances agressives manque d’études portant sur les femmes (Anderson, 2007). De plus, moins familiarisées avec ce type de jeux, elles peuvent exprimer une plus grande sensibilité contextuelle à la violence contenue dans ces jeux. Ceci permet, par ailleurs, de contourner le problème classique de la désensibilisation (Funk, Baldacci, Pasold et Baumgardner, 2004) dont l’étude de la variance inter-individuelle selon le degré d’expertise sort du cadre de l’étude présente dont objectif principal consiste à analyser l’effet à court-terme des jeux violents en faisant varier le contexte de mesure des tendances agressives.
13Les résultats d’une enquête relativement récente réalisée en France par la société GFK pour le Syndicat des Éditeurs de Logiciels de Loisirs (SELL) [6], entre autres, à propos du profil type du joueur, confirment ses suppositions. La population des joueurs est à dominante masculine et âgée de moins de 35 ans. Le temps passé à jouer varie sensiblement avec le sexe et l’âge du joueur ; les plus assidus sont les hommes, ils jouent en moyenne 20 minutes de plus par jour que les femmes. Parmi les jeux préférés figurent les jeux de stratégie, les jeux de réflexion, suivis des jeux d’aventure, de courses automobiles, des jeux d’action (ou de combat) et de sports, avec de fortes disparités selon le sexe et l’âge. Les femmes préfèrent très nettement les jeux d’aventure, les très jeunes plébiscitent les jeux d’action.
14En ce qui concerne à la fois le contexte et le type de mesure des tendances agressives (point 1 et 3 des critiques mentionnées auparavant), vues les critiques existantes, il nous a paru pertinent d’utiliser l’Agression Provocation Questionnaire (APQ) conçu par O’Connors, Archer et Wu (2001) et fondé sur la théorie de l’émotion proposée par Frijda (1986), selon laquelle, les émotions sont des états de préparations à certains types d’actions définis par les systèmes comportementaux ou motivationnels. Cet « état de tension » appelé par Frijda (1986) « mode de préparation à l’action » semble approprié pour définir une émotion, mais les émotions ne débouchent pas nécessairement sur une action explicite. Pour Frijda, les émotions sont des états internes de courtes durées dont la manifestation de façon explicite ( la poursuite, l’élaboration ou l’arrêt) dépendrait de l’évaluation du contexte dans lequel l’émotion est ressentie. Les diverses formes de préparation à l’action peuvent alors permettre la préparation en vue d’actions explicites comme l’approche, la fuite, l’attaque, etc. Les émotions seraient alors des formes de préparation à l’action suscitées par des structures particulières d’appréciation et l’expérience émotionnelle consisterait en une conscience de plan d’action activé permettant son exécution explicite. Selon Frijda, les modes particuliers de préparation à l’action, tels qu’ils sont ressentis par les individus, sont extrêmement spécifiques, au point qu’ils définissent quasiment les émotions et correspondent aux descriptions d’émotions spontanées des individus. Dans cette perspective, l’émotion résulterait d’un traitement d’information au cours duquel intervient la poursuite d’un objectif, l’appréciation ou l’évaluation, par l’individu, de la signification d’événement et de la disponibilité de ses plans d’actions, en vue d’une meilleure adaptation.
15Développé pour répondre à ces exigences théoriques, l’APQ contient des mesures des réactions émotionnelles négatives (colère, irritation, frustration) associées aux différentes réactions aggressives (agresser, ne rien faire, s’affirmer, quitter le lieu, ne rien faire en ressentant la colère) observables dans divers contextes conflictuels de la vie quotidienne. Grâce au choix des items décrivant les différentes situations de provocation issues de la vie quotidienne, ces mesures sont, de fait, situées dans un contexte normatif « quotidien ». Construire une version de ce questionnaire avec des items décrivant le même type de provocations, mais surgissant lors d’un jeu sportif ou d’un jeu de société, permettrait d’obtenir une mesure des tendances agressives dans un contexte normatif « ludique ». De plus, incluant aussi bien des réactions émotionnelles que comportementales, l’APQ permet de disposer d’une mesure plus fine et d’affiner les hypothèses sur l’éventuel impact du contexte conflictuel.
16En ce qui concerne le problème lié à l’équivalence entre les conditions expérimentale et contrôle (point 2 des critiques), il nous a paru intéressant de manipuler non pas le caractère violent ou neutre du jeu, mais le degré de sa violence. Dit autrement, au lieu d’utiliser deux jeux différents dont un violent et l’autre non-violent, nous avons opté pour l’utilisation d’un même jeu vidéo, en soi, violent dont varierait seul le paramètre servant à l’opérationnalisation de son degré de violence. Choisir à cet effet la nature de la cible de l’agression (ici l’adversaire du jeu) est non seulement pertinent, mais permet également de respecter l’environnement habituel des jeux vidéo violents. Les résultats obtenus par Lachlan, Smith et Tamborini (2000) montrent que jouer à un jeu vidéo comportant des actes de violence répétés impliquant des adversaires d’apparence humaine est interprété par les joueurs comme plus violent que de jouer à un jeu vidéo comportant les mêmes actes de violence répétés, mais impliquant des adversaires robots humanoïdes. Vu que des études classiques sur l’agression nous apprennent que les hommes sont plus souvent et plus facilement pris comme cibles d’agression que les femmes (voir Baron et Richardson, 1994 ; Frodi, Macaulay et Thome, 1977), nous avons opté pour des cibles d’apparence humaine de sexe masculin dans la condition « jeu très violent » et pour les cibles robots dans la condition « jeu violent ». Ce choix permet aussi de lever le doute quant au biais de l’expérimentateur (demande implicite de l’expérimentateur ; point 4 des critiques mentionnées), les deux modalités du jeu étant violentes.
Hypothèses
Réactions comportementales
17Pour résumer, dans cette étude réalisée auprès de jeunes femmes, deux facteurs, chacun à deux modalités, font l’objet de la manipulation expérimentale. Le premier renvoie à la violence du jeu vidéo (jeu violent versus jeu très violent), le second au contexte de la mesure des tendances agressives (ludique versus quotidien). L’analyse de la littérature existante nous amène à des hypothèses différentes en ce qui concerne les effets éventuels de ces facteurs sur les réactions comportementales et sur les réactions émotionnelles mesurées à l’aide du questionnaire de provocation de l’agression. En ce qui concerne les premières, nous nous attendons à un effet interactif de nos deux facteurs. Plus précisément, nous pensons que l’effet de la violence du jeu sur le choix du comportement agressif devrait être plus marqué dans un contexte ludique que dans un contexte quotidien.
18Toutefois, en sachant qu’au-delà d’un certain seuil, l’accumulation des stimulations aversives ne conduit plus à la réponse agressive (Negative Affective Escape Theory, Baron, 1972), deux cas de figures sont possibles : soit la violence du jeu, par le biais de notre manipulation, ne dépasse pas ce seuil hypothétique, soit elle le dépasse. Dans le premier cas, dans un contexte ludique le choix de comportement agressif devrait être plus fréquent chez les participantes qui ont joué au jeu très violent (contre les adversaires d’apparence humaine) qu’au jeu violent (contre les adversaires robots). Dans le second cas (contexte ludique), l’inverse peut se produire. C’est parmi les participantes qui ont joué au jeu violent (contre les adversaires robots) que le choix des comportements agressifs devrait être plus fréquent.
19Cependant, il reste la question du comportement de ne rien faire, en général, assez présent chez les femmes (Archer et Parker, 1996 ; Eagly et Steffen, 1986). Si conformément à la classification des comportements agressifs de Buss (1961), on le considère comme le refus de répondre à la provocation, on devrait aussi le considérer comme une forme d’agression passive et indirecte et éventuellement s’attendre aux mêmes tendances que celles décrites pour le comportement agressif direct.
20Par ailleurs, en prenant en compte les travaux sur les réactions comportementales des femmes en réponse à l’exposition à l’agression et en particulier, à la provocation, il est possible d’avancer quelques hypothèses quant au choix probable des comportements, autres que le comportement agressif directe ou indirecte et en particulier, le choix du comportement assertif (tentative d’exercer un contrôle sur son environnement social). En tant que comportement typique des adultes face à la provocation (Archer et al., 1996 ; Eagly et al., 1986), il devrait être le plus choisi, indépendamment de la condition expérimentale. De plus, si nous prenons en compte l’idée, selon laquelle, le choix du comportement agressif directe/ indirecte traduirait un échec d’autorégulation et le comportement assertif son succès [7], le premier devrait se manifester davantage lorsque l’autorégulation est affaiblie et le second lorsqu’elle est facilitée (Baumeister et Boden, 1998). Dans notre étude, l’autorégulation pourrait être affaiblie dans un contexte ludique où la référence aux normes sociales « autorisant » l’agression est activée à deux reprises, lors de la pratique du jeu vidéo, en soi violent, et lors de la mesure de l’agression. Elle serait facilitée dans un contexte quotidien où les normes sociales activées lors de la mesure « condamnent » l’agression « autorisée » lors du jeu.
Réactions émotionnelles
21En ce qui concerne les réactions émotionnelles, la perspective de la construction sociale des émotions et les théories du traitement de l’information sociale conduisent à penser que ces réactions devraient être plus intenses dans le contexte quotidien que dans le contexte ludique. Dans la première approche, on pose que les émotions jouent un véritable rôle dans la préservation des règles sociales (Armond-Jones, 1986). Par exemple, c’est le cas de la colère, dont aussi bien son expression que son absence peuvent être, selon le cas, vivement condamnées, et dont l’intensité semble dépendre de l’importance que requièrent pour l’individu les évènements auxquels il est confronté (Averill, 1983, voir aussi Snell et al, 1991 cité par Power et Dalgleish, 1997, Tedeschi et Felson, 1994). Si les situations de la vie quotidienne sont plus importantes dans la mesure où elles sont plus fréquentes, elles sont de ce fait plus implicantes que les situations ludiques et pourraient donc susciter des réactions émotionnelles plus intenses. Dans les théories du traitement de l’information sociale, il est postulé que le degré d’adéquation entre le schéma d’une situation et les indices situationnels, serrait à l’origine des réactions émotionnelles et conditionnerait leur intensité (Fiske, 1982 cité par Geen et Donnerstein, 1998). Si on admet que les adultes sont plus familiers des situations de la vie quotidienne que des situations ludiques, ils devraient posséder des schémas plus familiers pour les premières que pour les secondes. Et si les écarts entre les schémas plus familiers et les indices situationnels provoquent également des réactions émotionnelles plus intenses, on peut s’attendre à des réactions émotionnelles plus fortes dans un contexte normatif quotidien que dans un contexte normatif ludique.
Participants
22L’échantillon est constitué de 72 participantes âgées de 17 à 30 ans (M=21.06 ans, ?= 2.67), toutes droitières et volontaires (double consentement) pour passer l’expérience. Elles ont été recrutées au sein de l’université Paris Descartes et assignées aléatoirement à l’une des quatre conditions expérimentales. Trente six ont participé à la condition du contexte ludique, 18 ont joué au jeu très violent et 18 au jeu violent. Les 36 autres ont participé à la condition du contexte quotidien, 17 ont joué au jeu très violent et 19 au jeu violent.
Méthode et procédure
Aperçu général
23Les participantes, après avoir joué au jeu vidéo soit violent soit très violent, évaluent la violence du jeu puis répondent au questionnaire de provocation mesurant leurs réactions émotionnelles et comportementales aux situations sociales conflictuelles situées soit dans un contexte de la vie quotidienne (version standard de l’APQ) soit dans un contexte ludique (version ludique de l’APQ). Ensuite, elles remplissent le questionnaire concernant leurs pratiques des jeux vidéo ainsi que leur appréciation des différents aspects du jeu auquel elles ont pris part.
Matériel
Jeu vidéo
24Les participantes ont joué au jeu vidéo Unreal Tournament. Développé par la société Epic Games Inc., il a été introduit sur le marché des jeux vidéo en 1999. Disponible gratuitement sur Internet, il est décrit par l’ESRB (Entertainment Software Rating Board, organisme américain de classification des jeux vidéo) comme comprenant « de la violence et du sang ». Il est destiné à un public d’âge supérieur à 17 ans. La spécificité du jeu est de donner la possibilité d’affronter des adversaires guidés par l’ordinateur, ayant l’apparence humaine de sexe masculin (soldats) ou bien des robots. Son but consiste à éliminer (« tuer ») le maximum d’adversaires et se faire éliminer (« se faire tuer » ou avoir un accident) le minimum de fois. L’ordinateur enregistre le score final (différence entre nombre d’adversaires tués et nombre de fois où le joueur est éliminé : se fait tuer ou a un accident qui l’élimine) ainsi que le temps du jeu.
25Les pré-tests de ce jeu vidéo, réalisés sur un autre échantillon d’étudiantes de la même université, nous ont permis de déterminer la durée de jeu, le nombre d’adversaires à l’écran et le niveau de difficulté ainsi que le type de contrôles de jeu permettant le maniement des personnages. Il s’est avéré qu’en raison du caractère assez répétitif de ce jeu, sa durée a été fixée à 5 minutes. Il est également apparu que le nombre d’adversaires présents à l’écran permettant d’obtenir une action de jeu soutenue sans être trop débordante, correspond à huit et que le niveau de difficulté du jeu doit être minimal. Enfin, pour les contrôles de jeu, après avoir comparé l’utilisation du clavier et de la souris à l’utilisation d’un « joy-pad » (accessoire de console de jeu), nous avons opté pour le clavier et la souris. Ils constituent un dispositif avec lequel, la plupart des étudiants habitués à se servir d’un ordinateur sont plus familiarisés. Les flèches du clavier, vers le haut et vers le bas, servent respectivement pour avancer et pour reculer. La souris permet de changer de direction et tirer (bouton gauche). L’ordinateur utilisé était un PC, équipé d’un processeur Pentium III, d’un écran 17 pouces, et d’enceintes audio.
Évaluation du degré de la violence du jeu
26Afin de contrôler l’efficacité de la manipulation expérimentale, nous avons demandé aux participantes, juste après avoir joué au jeu vidéo, d’indiquer sur une échelle en 7 points allant de 1 (« très peu violent ») à 7 (« très violent »), dans quelle mesure ce jeu vidéo leur a semblé violent. Il est à noter qu’à cette mesure directe et immédiate, s’ajoute celle contenue dans la première partie du questionnaire sur les jeux vidéo rempli suite au questionnaire de provocation de l’agression.
Questionnaire sur les jeux vidéo
27Ce questionnaire est composé de deux parties. La première a pour objectif de recueillir les appréciations concernant le jeu utilisé. Après avoir indiqué si la participante a déjà joué à ce jeu, elle répond, à l’aide de l’échelle en 7 points, à huit questions inspirées de celles utilisées par Anderson et Dill (2000), concernant la difficulté, la rapidité, l’esthétisme, le réalisme, et la violence du jeu, mais également le plaisir, la frustration, l’excitation éprouvés lors du jeu. La deuxième partie du questionnaire a pour objectif de récolter des informations générales sur la pratique des jeux vidéo des participantes. Les questions concernent la fréquence de jeu, l’équipement du joueur, les lieux du jeu, et ses cinq jeux vidéo préférés.
Questionnaire de provocation d’agression (APQ) : version Standard et version Ludique
28Dans la condition du contexte quotidien de la mesure des tendances agressives, nous avons utilisé la version standard française (Pahlavan, Amirrezjvani, et O’Connor, 2007) de l’Aggressive Provocation Questionnaire (APQ) (O’Connor, Archer et Wu, 2001). Ce questionnaire est composé de 12 scenarii décrivant des scènes de provocations de la part d’une personne (familière ou non) surgissant dans des situations relativement banales de la vie quotidienne, comme sortir au restaurant, acheter une carte de transport, aller au cinéma, etc. Nous en avons retiré un (item n°12), le moins adapté au profil des participantes, ce qui ramène le nombre total d’items à 11.
29Le répondant doit s’imaginer dans chacune de ces situations. Dans un premier temps, on lui demande d’exprimer ses réactions émotionnelles et d’indiquer ce qu’il ressentirait à ce moment précis en termes de colère, de frustration et d’irritation, à l’aide d’une échelle en 5 points allant de « pas du tout » à « extrêmement ». Ensuite, on lui demande d’exprimer ses réactions comportementales et d’indiquer ce qu’il penserait faire, face à la personne qui le provoque, en choisissant une des cinq propositions lui permettant : (1) d’agresser (pousser la personne, l’insulter, la menacer) ; (2) de ne rien faire, (3) de s’affirmer en rappelant à l’ordre la personne, (4) de quitter le lieu, (5) de ne rien faire tout en ressentant de la colère.
30Dans la condition du contexte ludique de la mesure des tendances agressives, nous avons utilisé la version dite « ludique » de ce même questionnaire, construite spécialement pour cette étude. Elle reprend la même structure que la version standard (l’évaluation du degré des trois mêmes ressentis émotionnels et le choix parmi cinq mêmes catégories comportementales) et contient exactement le même nombre de scenarii décrivant les différentes situations de provocation venant d’une personne familière ou non. La seule différence consiste dans le fait que toutes les provocations évoquées surgissent lors de la pratique d’un sport ou d’un jeu de société. Nous avons testé les principaux paramètres psychométriques de cette version en sollicitant la participation de 52 étudiants (25 hommes, 27 femmes) de première année de psychologie à l’Université Paris 5 d’un âge moyen de 23 ans (? = 4.83). Les participants ont répondu aux items de l’APQ ludique ainsi qu’aux items du questionnaire Colère-trait de Spielberger (1979). Les résultats montrent que les qualités psychométriques de l’APQ ludique sont équivalentes à celles de la version standard française et anglaise (pour la version ludique de l’APQ : ? de Cronbach : colère = 0.87, frustration = 0.77, et irritation = 0.83 ; corrélation APQcolère/STAScolère-trait = 0.56 ; pour la version standard française de l’APQ : ? de Cronbach : colère = 0.85, frustration = 0.87, et irritation = 0.86 ; corrélation APQcolère/ STAScolère-trait = 0.55 ; pour la version standard anglaise de l’APQ : colère = 0.94, frustration = 0.93 et irritation = 0.89).
Procédure
31Lors du recrutement, l’expérimentateur homme sollicitait la collaboration des participantes pour tester un certain nombre de jeux vidéo et d’en sélectionner quelques uns pour ses futures recherches. Après avoir introduit la participante dans la salle expérimentale, il l’installait devant un ordinateur et lui demandait de remplir la fiche de consentement. Ensuite, il annonçait que dans un premier temps, il s’agit de jouer au jeu vidéo pendant 5 minutes et puis, dans un deuxième temps, de remplir deux questionnaires. Il allumait alors l’ordinateur et avant la phase d’entraînement, il présentait le but de jeu (évoluer dans un univers représenté sur l’écran, afin d’éliminer un maximum d’adversaires tout en se faisant éliminer un minimum de fois). Pendant la phase d’entraînement, le jeu ne comprenait pas d’adversaires, la participante se familiarisait, d’une part, avec les contrôles du jeu (allier le maniement du clavier à celui de la souris) et d’autre part, avec la disposition des éléments constituant l’environnement du jeu (rampes, ascenseurs, passages entre les salles, etc.). Lorsque la participante faisait signe à l’expérimentateur, ou lorsque le temps maximum d’entraînement était atteint. L’expérimentateur lançait la phase « test » en avertissant la participante qu’il n’interviendrait plus. À la fin des 5 minutes, le jeu s’arrêtait automatiquement en annonçant si la participante avait remporté ou non la partie, et affichait son score. La participante, toujours devant l’ordinateur, remplissait alors l’échelle d’évaluation de la violence du jeu puis, elle s’installait à une deuxième table pour remplir les deux questionnaires. L’expérimentateur sortait de la salle. Après avoir rempli les questionnaires, la participante appelait l’expérimentateur qui (avant de lui expliquer l’objectif de l’expérience) l’interrogeait à ce sujet et lui soumettait la deuxième partie du consentement.
Résultats
Efficacité de la manipulation du degré de la violence du jeu
32En moyenne, les participantes allouées à la condition « jeu très violent », confrontées aux adversaires d’apparence humaine de sexe masculin l’évaluent comme plus violent que les participantes alloués à la condition « jeu violent », confrontées aux adversaires robots (respectivement les moyennes sont égales à 4.89 et à 4.13 ; F (1, 68) = 4.08 ; p<.05, f =.49). Les valeurs de ces évaluation sont assez élevées. Elles se situent nettement du côté du pôle « très violent » de l’échelle. Ajoutons que lors du débriefing, aucune participante n’a deviné l’objectif de l’expérience.
Pratique des jeux vidéo et évaluation de la qualité du jeu retenu
33Du fait que deux participantes n’ont pas répondu au questionnaire sur les jeux vidéo, l’analyse porte sur 70 et non pas sur 72 participantes.
Pratique du jeu
34Aucune des participantes n’a déclaré avoir déjà joué au jeu retenu pour cette étude. En revanche, 93 % déclarent avoir déjà joué aux jeux vidéo. Parmi elles, 80% disent de n’avoir jamais ou une fois joué aux jeux vidéo violents. Elles consacrent aux jeux vidéo en moyenne à peine plus d’une demie heure par semaine. Parmi ces étudiantes 64.3% déclarent jouer avec des amis, 27.1% seules chez elles, 17.1% seules mais avec des personnes présentes dans la même pièce et 4.3% dans une salle de jeux en réseau (les choix ne sont pas exclusifs). En termes d’équipement, 47.1% de notre échantillon possède une console de jeu, 58.6% un ordinateur familial et 34.3% un ordinateur personnel. Enfin lorsqu’il est demandé aux participantes de citer, si possible, leur cinq jeux vidéo préférés, elles indiquent 2.21 jeux en moyenne (?=1.87). Leur profil confirme donc celui repéré par l’enquête réalisée par la société GFK pour le SELL, mentionnée auparavant, et il correspond à celui souhaité pour cette étude.
Qualité du jeu
35En ce qui concerne l’évaluation de la qualité du jeu vidéo retenu pour cette étude, les résultats figurant dans le tableau 1 montrent que sur les échelles allant de 1 à 6 points, les participantes ayant joué aussi bien au jeu violent qu’au jeu très violent ne diffèrent pas entre elles et s’accordent pour le considérer comme peu frustrant, peu réaliste, peu esthétique, ayant un faible degré de difficulté, mais relativement excitant et plaisant. En revanche, en ce qui concerne la vitesse et la violence du jeu, les participantes ayant pratiqué le jeu violent et le jeu très violent diffèrent entre elles. Les premières le trouvent moins rapide que les dernières (respectivement m = 3.28 et m =4.08, F(1,68)=4.80 ; p<.04 ; f=.53) et, conformément à leur première évaluation de la violence du jeu (cf. contrôle d’efficacité de la manipulation expérimentale) moins violent (respectivement m =3.94 et m =4.83, F (1, 68)=5.36 ; p<.03 ;f =.58). L’ensemble de ces appréciations suggère que, mis à part la rapidité du jeu pouvant avoir un effet sur le score global au jeu des participantes, la violence du jeu est le principal critère sur lequel les deux versions du jeu diffèrent.
Moyennes et écarts types des réponses aux questions concernant le jeu vidéo
Moyennes et écarts types des réponses aux questions concernant le jeu vidéo
36Par ailleurs, pour l’évaluation du caractère plaisant du jeu uniquement, nous observons l’effet d’interaction de nos deux facteurs, F (1, 68)=4.76 ; p<.04 ; f = .53. Visualisé dans la figure 1, les participantes qui ont joué au jeu très violent et qui ont ensuite rempli la version ludique du questionnaire de provocation, déclarent éprouver plus de plaisir (voir la figure 1; m = 3.61) lors de la partie, par rapport aux participantes qui ont joué au jeu violent (m =2.72). Cet effet s’inverse chez les participantes qui ont rempli la version quotidienne de ce questionnaire : celles qui ont joué au jeu violent (m =3.53) éprouvent plus de plaisir que celles qui ont joué au jeu très violent (m =2.94).
Score moyen du plaisir ressenti par les participants en fonction du questionnaire et la modalité du jeu (F(1,68)=4,76 p<.04)
Score moyen du plaisir ressenti par les participants en fonction du questionnaire et la modalité du jeu (F(1,68)=4,76 p<.04)
37Lorsque nous comparons les déclarations des participantes concernant leurs évaluations du jeu avec leurs scores au jeu, il s’avère que chez les participantes allouées à la condition « jeu très violent », plus leur score est élevé, plus leur estimation de la violence du jeu, exprimée dans le questionnaire est minimisée (r =-.35). Lorsque nous comparons les déclarations des participantes concernant leur pratique des jeux vidéo avec leurs scores, on trouve des résultats attendus : plus elles sont expérimentés (plus souvent elles jouent), plus leur score est élevé (r =.45, p<.05) [8]. Ce résultat concorde avec celui concernant la durée de la phase d’entraînement et le score final : plus elle est longue, moins le score est élevé (r = -.27, p<.05).
Tendances agressives
38Pour rendre compte des tendances agressives nous avons analysé séparément les réactions comportementales et les réactions émotionnelles exprimées à l’aide des deux versions, « ludique » et « quotidienne », du questionnaire de provocation de l’agression. Toutefois, l’analyse multivariée sur l’ensemble des scores émotionnels et comportementaux montre seulement l’effet du contexte, F (7,62) =6.52 ; p<.000, ? =0.57.
Réactions comportementales
39Comme le montre le tableau 2, toutes les conditions confondues, le comportement assertif (s’affirmer), observé habituellement chez des adultes confrontés à des provocations, est aussi le comportement le plus choisi dans cette étude. Viennent ensuite « quitter le lieu », « ne rien faire », « agresser » et « ne rien faire tout en ressentant la colère ». Cette distribution des choix change légèrement en fonction du contexte, mais pas en fonction de la violence de jeu. « S’affirmer », « quitter le lieu » et « ressentir la colère » deviennent un peu moins fréquents dans le contexte ludique, « agresser » et « ne rien faire » un peu plus fréquents.
40Les analyses univariées [9] sur les choix comportementaux confirment en partie cette tendance. Conformément à notre hypothèse, elles montrent que dans le contexte ludique les participantes optent davantage pour l’agression qu’elle soit directe («agresser ») ou indirecte (« ne rien faire ») que dans le contexte quotidien (les fréquences moyennes respectivement pour « agresser » : m =0.175 et m =0.071, F(1,68) = 15.18; p<.000 ; f = .94 ; pour « ne rien faire » : m =0.182 et m =0.112, F(1,68)=6.38 ; p<.02 ; f = .61). En revanche, elles ont tendance à s’affirmer plus dans le contexte quotidien que dans le contexte ludique (respectivement m =0.473 et m =0.378, F(1,68)=8.50 ; p<.01 ; f = .71). Aucune différence n’est observée sur les choix de « quitter le lieu » et de «ne rien faire tout en ressentant la colère ».
41L’effet interactif de nos deux facteurs ne se manifeste que sur le choix de « s’affirmer », qui est par ailleurs, l’option la plus fréquente, F(1,68)=4.73 ; p<.04 ; f = .53. Cet effet visualisé en Figure 2, montre que chez les participantes qui ont joué au jeu vidéo très violent, la fréquence de ce choix ne diffère pas en fonction du contexte (respectivement pour le contexte ludique et quotidien m =0.412 et m =0.436). En revanche, chez les participantes qui ont joué au jeu vidéo violent, elle est plus élevée dans le contexte quotidien que ludique (respectivement m=0.509 et m = 0.343, F(1,35)=14.05; p<.000 ; f = 1.26). Le sens de cette interaction, le fait que nous ne l’observons uniquement sur les intentions concernant ce comportement particulier, suggèrent que l’agression contenue dans le jeu très violent pourrait approcher le seuil hypothétique d’accumulation de stimulations aversives au-delà duquel les réponses agressives seraient inhibées.
Fréquence moyenne des réponses affirmatives en fonction du questionnaire et la modalité du jeu vidéo (F(1,68)=4,73 ; p<.04)
Fréquence moyenne des réponses affirmatives en fonction du questionnaire et la modalité du jeu vidéo (F(1,68)=4,73 ; p<.04)
Réactions émotionnelles
42Toutes conditions confondues, nous relevons de fortes corrélations entre les trois émotions (frustration/colère r=.55 ; frustration/irritation r=.65, irritation/colère r=.69). Les ? de Cronbach, élevés aussi bien pour la version quotidienne que la version ludique du questionnaire de provocation (respectivement pour la colère : 0.84 et 0.80 ; pour la frustration : 0.88 et 0.88 ; pour l’irritation : 0.85 et 0.82), autorisent le calcul du score global de réaction émotionnelle pour chaque participantes.
Moyennes et écart-types de réponses émotionnelles et comportementales en fonction de la condition expérimentale
Moyennes et écart-types de réponses émotionnelles et comportementales en fonction de la condition expérimentale
Note : Les moyennes figurant dans chaque colonne et comportant les mêmes lettres sont significativement différentes à p <.05 d’après le test post-hoc de Newman-Keuls.43Comme le montre le tableau 2 et comme attendu, les participantes ressentent plus de colère et d’irritation dans le contexte quotidien que dans le contexte ludique (les scores globaux respectivement pour la colère m =29.22 et m =20.89, F(1,68)=21.69; p<.000 ; f=1.30) ; pour l’irritation m =30.86 et m =25.06, F(1,68)=10.98; p<.002 ; f=.80). En ce qui concerne la frustration l’effet du contexte est tendanciel, mais va dans le même sens (respectivement m =20.78 et m =16.53, F(1,68) =3.46; p<.07 ; f=.45).
Discussion
44Le principal résultat de cette étude suggère que chez les jeunes femmes peu habituées aux jeux vidéo violents, l’effet de la pratique de ce type de jeu sur les tendances agressives à court terme diffère selon le contexte de leur mesure. Faite à l’aide de deux versions, quotidienne (standard) et ludique (créée pour cette étude), du questionnaire de provocation de l’agression (APQ), cette mesure concerne les intentions en termes de comportements et de ressentis émotionnels. C’est dans le contexte ludique de mesure, qui « autorise » l’agression que les intentions comportementales agressives aussi bien directe (« agresser ») qu’indirecte (« ne rien faire ») sont plus fréquentes contrairement au contexte quotidien « condamnant » l’agression. Il pourrait s’agit d’une baisse de l’autorégulation en ce qui concerne le respect des normes régulant les comportements des individus dans un contexte conflictuel. En effet, nous constatons que dans le contexte ludique de mesure, les références normatives « autorisant » l’agression, activées lors de la pratique du jeu vidéo violent sont maintenues, tandis que dans le contexte quotidien, elles sont rompues lors de la mesure des tendances agressives et de l’évaluation de la qualité du jeu. Cette explication est d’autant plus plausible que les intentions de s’affirmer (rappeler à l’ordre celui qui transgresse la norme), considérées comme l’expression d’une autorégulation réussite, sont plus fréquentes dans le contexte quotidien que dans le contexte ludique. De plus, les ressentis émotionnelles, en particulier la colère et l’irritation, y sont également plus intenses. Comme nous l’avons mentionné, ces émotions ayant pour fonction la préservation des normes et règles sociales, devraient être plus intenses lorsque les schémas de la situation, y compris dans leurs aspects normatifs, s’écartent de la situation. C’est davantage le cas de la version quotidienne que la version ludique du questionnaire de provocation de l’agression. Par ailleurs, ces tendances apportent un argument en faveur de la validité expérimentale de la version ludique du questionnaire de provocation de l’agression, créée à l’usage de cette étude.
45L’autre résultat intéressant concerne la violence du jeu vidéo retenu pour cette étude. Nous avons manipulé le degré de sa violence par la nature de la cible d’agression qui a ou bien l’apparence humaine ou bien l’apparence de robot. Les évaluations effectuées immédiatement après le jeu et à la fin de la passation expérimentale, montrent que la version avec la cible humaine (la condition « jeu très violent ») est perçue comme étant plus violente que celle avec le robot (la condition « jeu violent »), surtout dans le contexte quotidien de mesure (voir le tableau 1). Il est donc possible que dans la condition « jeu très violent », la violence du jeu approche le seuil hypothétique d’accumulation des stimuli aversifs au-delà duquel les réactions agressives seraient inhibées. Ceci pourrait expliquer d’une part l’absence de l’effet principal de ce facteur sur les intentions comportementales et les ressentis émotionnels et d’autre part l’effet interactif entre la violence du jeu et le contexte normatif sur les intentions de s’affirmer, mais pas sur les intentions d’agresser et/ou de ne rien faire. En revanche, le fait qu’indépendamment de sa violence, le jeu utilisé soit considéré comme relativement plaisant suggère le contraire. Si la violence du jeu « très violent » approchait le seuil de l’agression, il devrait être moins plaisant. Or, ce n’est pas le cas. Toutefois, il ne faut pas oublier que cette appréciation est exprimée dans le questionnaire sur le jeu, rempli après le questionnaire de provocation de l’agression. Elle reflète donc à la fois l’impact du jeu et du contexte de mesure. D’ailleurs, nous observons à son propos l’effet interactif de nos deux facteurs. Les participantes ayant précédemment répondu au questionnaire renvoyant à des provocations de la vie quotidienne, évaluent le jeu violent comme plus plaisant que le jeu très violent. Les participantes ayant répondu au questionnaire ludique, évaluent le jeu violent comme moins plaisant que le jeu très violent.
46Nous pensons que cet effet interactif traduit encore une fois un affaiblissement de l’autorégulation dans le contexte ludique et son maintien dans le contexte quotidien. Il est possible que l’activation des références normatives « autorisant » la violence à deux moments consécutifs, lors du jeu vidéo et lors du remplissage de la version ludique du questionnaire de provocation de l’agression, lève le seuil de l’agression au moment où les participantes répondent au questionnaire sur le jeu. Tout comme l’activation des références normatives « condamnant » l’agression lors de la passation de la version quotidienne du questionnaire de provocation, contribue à le maintenir en rappelant que la violence étant condamnée par notre société, il est difficile de déclarer éprouver du plaisir à son contact. En l’absence d’un référent permettant d’établir ce seuil, il est évident qu’il ne s’agit là que de spéculations.
47Mis à part ces deux résultats principaux, notre étude soulève la question du rôle des ressentis émotionnels dans l’expression des intentions comportementales agressives. Globalement, si dans le contexte normatif quotidien, les participantes déclarent davantage des ressentis émotionnels négatifs (colère et irritation), elles déclarent également moins d’intentions comportementales agressives (aussi bien directes qu’indirectes). L’inverse se produit dans le contexte ludique. Ainsi, à première vue, nos résultats s’opposent à la théorie des émotions de Frijda (1986), qui stipule que les émotions préparent à l’action, ce qui implique que plus forte est la colère, plus forte sera l’agression. De même, nos résultats ne vont pas non plus dans le sens des prédictions de Berkowitz (1993) qui stipule qu’un évènement aversif, comme une provocation, devrait amener un sentiment de colère ou de peur. Et si colère il y a, elle devrait être suivie par de l’agression. Il est possible que ceci soit dû au fait que les réactions que nous observons, n’ont rien à voir avec des réactions émotionnelles et comportementales, à la suite d’une provocation réelle. Il ne s’agit ici que des intentions exprimées à l’égard des scenarii hypothétiques à choix multiples que Berkowitz (1993) considère comme un dispositif « trop cognitif et trop rationnel pour étudier l’agression » (p. 3). Toutefois, comme le remarque Averill (1983), les auto-reports des tendances agressives ne constituent un problème que lorsque les attentes ou normes sociales sont des variables confondues. En revanche, lorsqu’elles sont au cœur du questionnement, ce dispositif prend tout son sens. Il est tout aussi possible que les ressentis émotionnels, en particulier dans ce type de dispositif, modulent l’expression des intentions comportementales agressives.
48Pour conclure, cette étude ayant pour objectif de répondre à un certains nombre de critiques adressées aux études expérimentales partant sur l’effet de la pratique des jeux vidéo violents sur les tendances agressives, suggère que les intentions de leur expression (les auto-reports), dépendent du contexte de mesure. Chez les jeunes femmes peu familiarisées aux jeux vidéo violents, la pratique de ce type de jeu conduit à des ressentis émotionnels négatifs relativement peu intenses et à davantage d’intentions comportementales agressives, lorsque le contexte de leur mesure active les mêmes références normatives « autorisant » la violence que le jeu vidéo violent. Favorable à l’affaiblissement d’autorégulation, ce contexte normatif est aussi assez spécifique. Dit autrement, nos résultats suggèrent que la pratique de jeux vidéo violents ne conduirait pas aux comportements agressifs si au moment de leur expression, sous une forme ou sous une autre, les normes « condamnant » l’agression sont activées. Sur ce plan, ils soutiennent l’idée selon laquelle, si le rappel des normes ne suffit pas pour changer des comportements contre-normatifs, il est nécessaire pour maintenir les comportements conformes aux normes. En termes de prévention de la violence, on aurait donc fort probablement à gagner à rappeler qu’elle n’est pas acceptable y compris en intégrant ce type de message dans des jeux vidéo violents.
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- – Tannenbaum P. H. et Zillmann D. (1975): Emotional arousal in the facilitation of aggression through communication. Advances in Experimental Social Psychology, 8, pp. 149-192.
- – Tedeschi J. T. et Felson R. B. (1994): Violence, aggression, and coercive Actions. Washington, American Psychological Association.
Mots-clés éditeurs : Contexte normatif, Agression, Jeu vidéo violent, Affirmation, Situation conflictuelle
Mise en ligne 28/02/2012
https://doi.org/10.3917/cips.075.0051Notes
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[*]
Pour toute correspondance relative à cet article, s’adresser à Farzaneh Pahlavan, Université Paris Descartes, Institut de psychologie, Laboratoire de psychologie sociale, 71 avenue Édouard Vaillant, 92774 Boulogne-Billancourt cedex, France ou par courriel <pahlavan@univ-paris5.fr>.
Farzaneh Pahlavan a proposé l’idée et sa conceptualisation. Elle a travaillé à l’analyse des données et à la rédaction. Ewa Drozda-Senkowska a participé à l’analyse des données et à la rédaction de l’article. Julien Michelot, enfin, a participé à la préparation du matériel et au recueil des données -
[1]
BBC News (Tuesday, 1 May, 2001)
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[2]
Pour les tenants de l’hypothèse de la catharsis (Geen et al., 1977), l’utilisation de ce type de média a un effet bénéfique sur la personne puisqu’elle permet un moyen sans danger de décharger son agression.
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[3]
Les Jeux Vidéo Violents regroupés par les amateurs sous l’appellation anglo-saxonne de « First Person Shooter », ou FPS) mettent en scène, de façon de plus en plus réaliste, des personnages, guidés par le joueur, dans des scenarios dont le principe consiste à agresser, ou tuer, les autres personnages présents dans l’environnement de jeu.
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[4]
Conférence disponible à l’adresse : http://culturalpolicy.uchicago.edu/conf2001/papers/freedman.htm
-
[5]
Conférence disponible à l’adresse : http://culturalpolicy.uchicago.edu/conf2001/papers/goldstein.html
-
[6]
http://syndicat.pubao.com/index.php3?action=page&id_art=67157
-
[7]
Ce comportement s’apparente au rappel à l’ordre du provocateur. Ici il n’est plus question de violation de la norme, puisque, au contraire, c’est l’autre que l’on tente de « ramener à la raison », ou tout du moins vers la norme. Ainsi l’individu, par cette action autoritaire, tente de rétablir l’ordre.
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[8]
À propos du score au jeu, seul l’effet tendanciel de la violence de jeu est à noter. Il suggère que les participantes ont tendance à se faire « tuer » plus souvent lorsqu’elles jouent au jeu vidéo violent (M=1.09, ?=0.89), que lorsqu’elles jouent au jeu vidéo très violent (M=0.74, ?=0.74 ; (F (1,68) =3.26 ; p<0.8 ; f = .44).
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[9]
Afin de procéder aux analyses des fréquences des choix comportementaux, nous avons transformé les données en racines carrées puisque le teste d’hétérogénéité de la variance pour les choix agressifs s’est révélé significatif.