Couverture de CGES_NS02

Article de revue

Une théorie gestaltiste de la dépression et la construction et la validation d’un test

Pages 157 à 186

Notes

  • [1]
    Texte tiré de : Babakhanyan I., Burley T. (2016). “A Gestalt Process-Action Based Theory of Depression and Test Construction Validation”, in Roubal J. (dir.), Towards a Research Tradition in Gestalt Therapy, Cambridge, Cambridge Scholars Publishing.
  • [2]
    CDI Children Depression Inventory – Questionnaire sur la dépression chez l’enfant. Ndt
  • [3]
    Il s’agit de la façon dont nous percevons nos besoins – de la forme (Gestalt) qu’ils prennent dans notre éprouvé – et dont nous pouvons les résoudre. Ndt.
  • [4]
    Le coefficient alpha de Cronbach (0 ≦ α ≦ 1) mesure la cohérence interne d’un ensemble d’items d’un questionnaire. La corrélation de ces items est généralement considérée comme acceptable à partir de ≧ 0,7 ; c’est l’indice qu’ils évaluent un même phénomène. Ndt.

Introduction

1Le manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM) publié par l’association américaine de psychiatrie avait pour objet de fournir une terminologie commune et des critères standards pour classer les désordres psychiques. Durant des décennies, depuis que les professionnels de la santé mentale ont commencé à utiliser le DSM, ce manuel a influencé leur façon de concevoir la signification de ces désordres. La compréhension de la maladie mentale se résume ainsi à une liste de symptômes qui guide la façon dont est fourni le traitement et qui le reçoit. Cette approche consistant à étiqueter les individus pour en inférer le traitement peut être problématique pour un certain nombre de raisons. Les spécialistes s’accordent sur le fait que la psychiatrie adhère maintenant au modèle médical qui préconise l’application cohérente de méthodes et de façons de penser médicales modernes (Black, 2005) et dans lequel la psychopathologie représente « l’expression d’un dysfonctionnement dans une partie du corps » (Guze, 1992). La psychologie a aussi adopté ce modèle médical : le DSM est l’outil le plus utilisé pour diagnostiquer la maladie mentale et guider le traitement, tant pour les enfants que pour les adultes.

Le problème du diagnostic

2Les chercheurs ont souligné plusieurs aspects problématiques dans cette approche diagnostique. Le premier est que les mesures utilisées pour l’évaluation comprennent beaucoup d’éléments de symptomatologie physique qui peuvent être associés à de nombreux maux psychologiques et médicaux différents. Ainsi la fatigue, les maux de tête, les troubles du sommeil, la diminution ou l’augmentation de l’appétit, les douleurs musculaires et articulaires, les troubles de la concentration, de la mémoire, le raccourcissement du souffle, les problèmes gastro-intestinaux sont des symptômes couramment présents dans différents états de santé ; néanmoins ils sont typiquement inclus dans les évaluations habituelles de la dépression (Conradi, Ormel, et de Jonge, 2012 ; Hyams, 1998). De plus les symptômes associés au stress post-traumatique, les soucis, l’angoisse et les sentiments de tristesse peuvent coexister, rendant difficile l’identification du trouble (Burley, 2012). Du fait de la grande diversité de la pathologie humaine et des interactions complexes entre de nombreuses affections et processus biologiques divers, le diagnostic d’entités cliniques distinctes est difficile (Cooper, 2004).

3De manière générale cette approche diagnostique se désintéresse de l’étiologie. Les critères utilisés pour diagnostiquer un trouble n’en sont très souvent que des conséquences ou des effets secondaires. Ils disent très peu du développement, du processus et du maintien d’un trouble. Les théoriciens gestaltistes ajouteraient que dans ce processus de diagnostic rien ne décrit ce que fait la personne mais seulement ce qu’elle est devenue du fait de ses actions antérieures. Les critères diagnostiques ne décrivent pas le processus psychique, ils se réfèrent seulement à ses effets secondaires ou à ses symptômes (Burley, 2012). Chaque diagnostic du DSM est supposé représenter un dysfonctionnement dans quelque aspect mental, physique ou comportemental mais il est posé sans considération pour le processus sous-jacent ou la nature du dysfonctionnement. En médecine, lorsqu’un diagnostic est réalisé à propos d’un symptôme, on connaît le facteur qui cause le problème ; on peut donc en tirer des conclusions générales sur le traitement à tenir. En psychologie l’usage du DSM peut tout à fait séparer le diagnostic de l’étiologie qui est souvent plus importante que les symptômes eux-mêmes. Bien qu’inspirée par le modèle médical, cette approche centrée sur le symptôme est loin de permettre d’identifier un véritable processus psychologique ou biologique dans la réalité sous-jacente à la maladie ; au point qu’on la considère comme l’interprétation minimale du modèle médical (Murphy, 2010).

Le besoin d’une mesure orientée processus

4Au vu du stade actuel de l’évaluation et du diagnostic, il est justifié de proposer le développement d’un nouvel instrument de mesure, distinct des outils habituels d’évaluation. Au lieu de s’appuyer sur des modèles installés depuis des décennies à partir de la symptomatologie du DSM ou bien de mesures purement projectives – qui sont subjectives et difficiles à quantifier convenablement, une approche ascendante dans le développement d’un instrument de mesure apportera une nouvelle perspective. L’approche ascendante débute avec des observations spécifiques au sein d’un domaine de recherche (p.ex. la dépression chez l’enfant) en provenance de la population à laquelle on s’intéresse (les enfants dépressifs et non dépressifs). L’une des clés de cette approche ascendante est que les items sont construits à partir d’une théorie, la théorie de la Gestalt-thérapie de la dépression. Cette approche offre des informations contextuelles et linguistiques précieuses pour développer les items pertinents pour la dépression chez l’enfant et elle a plus de chances de produire des instruments solides au plan psychométrique qui assurent une comparabilité des mesures (Knight et al., 2009). Bien que semblant moins direct, ce nouvel instrument devrait être en mesure de saisir ce que les instruments projectifs cherchent à faire ; les réponses qu’on en obtiendrait pourraient être quantifiées pour donner des scores et servir à déterminer des seuils. Aux fins d’évaluer la dépression d’une façon neuve, la nouvelle approche ne devrait pas incorporer la symptomatologie du DSM – les symptômes observables comme la perte d’appétit ou les troubles du sommeil – mais se centrer sur la façon dont un enfant dépressif perçoit sa situation et opère dans son environnement.

La dépression chez l’enfant

5L’évaluation des états émotionnels liés à la dépression chez l’enfant a longtemps été un domaine important de la psychologie. Dès les années 1980 lorsqu’on s’est intéressé à ce type de dépression, on a développé des mesures standardisées pour évaluer et identifier les enfants dépressifs. La plupart des mesures utilisées actuellement ont été construites il y a plus de deux décennies, bien que notre connaissance sur la pathologie enfantine ait changé depuis cette époque. Les professionnels s’accordent maintenant sur l’existence de la dépression infantile même s’il reste plusieurs controverses quant à ses signes cliniques et sur les meilleures façons de l’évaluer et de la diagnostiquer. Il y a consensus sur le besoin d’un dépistage aussi tôt que possible pour permettre des interventions précoces. Et on s’accorde encore, les symptômes dépressifs se présentant différemment selon les groupes d’âge, sur le fait que le diagnostic nécessite une approche développementale empirique. (D’Angelo et Augenstein, 2012).

6En plus de ses risques immédiats, la dépression infantile a des conséquences à long terme dans le fonctionnement psychique des adultes. Les enfants et les adolescents qui font un épisode dépressif précoce ont plus de risque de rechute et sont plus sujets à la dépression sévère à l’âge adulte (Kessler, Chiu, Demler, et Walters, 2005). La dépression dans l’enfance a des conséquences sur toute la vie et elle est coûteuse tant pour les enfants que pour la société (Mash et Wolfe, 2008). Le niveau de prévalence du trouble dépressif majeur (TDM) chez les enfants de 4 à 18 ans est de 2 à 8 % (Mash et Wolfe, 2008). Selon l’institut national de la santé mentale (NIMH), en 2010, pas moins de 11,2 % des personnes de 13 à 18 ans étaient sujettes à des troubles dépressifs. Parmi eux 3 % avaient eu un épisode dépressif sérieusement débilitant (Merikangas et al., 2010). L’un des principaux facteurs de risque de suicide chez l’enfant est la dépression (Shaffer et Pfeffer, 2001), le suicide est la troisième cause de mortalité des adolescents aux Etats-Unis et il est responsable de 11 % des décès ; 27 % des enfants dépressifs (Stark et al., 1991) et 60 % des adolescents dépressifs (Wetzler, Asnis, Hyman et Virtue, 1996) ont de sérieux penchants suicidaires.

7Actuellement l’essentiel de la recherche sur la dépression de l’enfant en est à ce stade descriptif (Novell, 1986). Des chercheurs ont, par exemple, essayé de distinguer les caractéristiques fondamentales de la dépression infantile de ses traits associés (Cantwell, 1982). Sans surprise elles sont en cohérence avec le DSM, comme l’anhédonie, tandis que les traits associés peuvent être des comportements et des attitudes (p.ex. être inquiet de souffrir). Toutes les mesures sur la dépression de l’enfant, y compris le CDI [2], ont été construites au sein de ce même système diagnostique. L’objectif, en disposant d’une méthode valide de mesure de la dépression de l’enfant, était d’en faciliter la description (Novell, 1986). Bien que décrire soit un préalable important à la compréhension des causes et des mécanismes d’un syndrome ou d’un trouble, le travail d’élucidation s’arrête souvent quand la description semble terminée.

8Les instruments principalement utilisés pour évaluer les enfants permettent rarement de comprendre leurs ressentis. Les études montrent que les enfants ont tendance à développer leur dialogue intérieur à partir des propos des parents et à répondre aux items du questionnaire de façon à faire plaisir. De plus, de peur d’être ostracisés, les enfants peuvent se retenir d’exprimer leurs véritables sentiments. Le plus grand problème pour évaluer la pathologie avec des auto-questionnaires chez les enfants réside souvent dans leur manque de compréhension de leur propre vécu. C’est pourquoi les items qui questionnent directement s’ils se sentent fatigués ou tristes peuvent exclure les enfants qui ne sont pas en contact avec leurs sensations et leurs perceptions. Même en cas de douleur physique, il n’est pas rare qu’ils rapportent des symptômes différents de ce qu’on peut observer (Beyer, McGrath, et Berde, 1990). Certains enfants affirmeront être heureux même dans des situations très difficiles tout en continuant à faire des cauchemars et à être en difficulté scolaire du fait d’une détresse émotionnelle. Une étude réalisée avec une échelle reconnue et portant sur des enfants malades dans un service de soins intensifs a révélé que, bien qu’hospitalisés, les enfants ne déclaraient que peu de symptômes de dépression, contrairement à l’échantillon témoin (Babakhanyan, 2012). Les instruments d’auto-évaluation nécessitent un certain niveau de compréhension de soi dont certains jeunes enfants peuvent ne pas disposer. Les enfants ne sont pas toujours conscients de leurs propres difficultés et peuvent manquer de perspicacité sur leurs propres états émotionnels. Les questions qui leur demandent d’identifier des symptômes spécifiques sont donc contre-intuitives pour cette population.

La théorie gestaltiste

9La théorie gestaltiste est une perspective holistique qui souligne que le tout est différent de la somme des parties. La théorie du champ de Lewin, décrite comme le fondement de la théorie gestaltiste (O’Neill et Gaffney, 2008), souligne le fait que tout individu existe dans un environnement qui est en relation avec d’autres. Lewin (1952) explique que « la totalité des faits coexistants conçus comme mutuellement interdépendants » constitue le champ d’un individu (p. 240). Par ailleurs, cette théorie est fondée sur l’observation phénoménologique et considère le comportement comme une fonction à la fois de la personne et du champ présent. En outre, la perspective existentielle implique que chaque individu partage le monde avec chacun de ses autres habitants, si bien que toutes les manifestations de ce partage apportent du sens et de la valeur non seulement dans sa propre vie, mais aussi dans celles des personnes qu’il atteint. Cette approche est un principe clé de la Gestalt : le thérapeute doit comprendre qu’il fait partie du monde de son patient et doit tenir compte des effets que sa simple existence et leurs interactions ont sur lui (Plummer, 1997). En général, un individu ne peut pas être compris si l’on ne commence par prendre en compte les problématiques dans lesquelles il est plongé (Applebaum, 2012). Selon ce modèle, comprendre une pathologie exige donc de porter l’attention au-delà des symptômes particuliers d’un patient. Cela nécessite de comprendre le fonctionnement de l’individu dans son monde. Ainsi, l’évaluation de son état psychologique actuel doit tenir compte des rapports qu’il entretient avec son environnement.

10Un individu a des besoins qui orientent sa perception du monde environnant. Pour la théorie gestaltiste les besoins d’un individu ont leur siège dans l’individu et émergent à partir de processus biologiques. Selon Burley (2003), les besoins sont organisés d’une façon semblable à la pyramide de Maslow (1970). Ils structurent la perception du champ et l’activité humaine est vue comme interactive et en partie comme une réaction aux conditions du champ de sorte qu’il y a une interrelation permanente et dynamique des constituants du champ (Levine, 2012). Les individus scrutent continuellement leur environnement à la recherche d’informations, qu’elles leur soient ou non familières, plutôt en quête de stimuli inhabituels ou pouvant les avertir d’un danger potentiel. Les principes de la théorie gestaltiste peuvent ainsi être décrits : « les besoins et les intérêts d’un individu en contexte détermineront ce à quoi il sera attentif (awareness) et ils orienteront son comportement cognitivo-affectif et physique vers une résolution, en sorte que la figure suscitée par le besoin cesse d’être au centre de l’attention » (Burley, 2003).

11Yontef et Simkin (1993) expliquent que le fondement principal de la Gestalt-thérapie est l’awareness : « l’objectif des clients est de devenir attentifs à ce qu’ils font, à la façon dont ils le font et aux façons par lesquelles ils peuvent changer, tout en apprenant à s’accepter et à éprouver leur valeur » (Yontef et Simkin, 1993). Le client apprend à valoriser ce qui est plutôt que ce qui pourrait ou devrait être (Yontef et Simkin, 1993). La Gestalt-thérapie repose sur l’idée directrice selon laquelle on ne se connaît que sur le fond de sa relation avec l’environnement (Latner, 2000). Elle se concentre sur ce qui se passe, ce qui est en train d’être fait, pensé et ressenti dans l’instant présent. L’expérience immédiate est plus révélatrice que l’interprétation indirecte ou secondaire d’une expérience. L’expérience de la présence actuelle d’un individu dans une pièce, par exemple, est une expérience immédiate. Par contraste, les symptômes sont des expériences indirectes mesurées lors d’une évaluation qui peuvent ou non correspondre aux critères diagnostiques (c’est-à-dire, insomnie, perte d’appétit, pleurs excessifs). Être conscient de ces expériences immédiates demande d’être attentif (awareness) aux perceptions sensorielles (vue, ouïe, odorat, etc.) et le traitement de ces perceptions fournit le fondement de l’interprétation (Brownell, 2010). L’aspect holistique de la théorie gestaltiste concerne l’organisation de l’expérience sensorielle (Levine, 2012). C’est par ces expériences sensorielles que les humains éprouvent qui ils sont et entrent en contact avec le monde.

12Les domaines de l’évaluation et du traitement semblent divisés. Les théories bien assises comme la Gestalt évitent généralement les diagnostics et donc les modèles d’évaluation. Ces derniers d’ailleurs n’ont souvent pas de théorie qui les fonde. Combler cet écart pourrait améliorer le diagnostic et le résultat des traitements. Dans la théorie gestaltiste, le concept même d’évaluation pourrait créer un dilemme (Joyce et Sills, 2006). L’idée du diagnostic semble en effet aller à l’encontre de nombreux principes fondamentaux de la pratique gestaltiste car elle implique une sorte de structure au sens où « une personne possède de la fixité, de l’immobilité et peut être évaluée à distance » (Joyce et Sills, 2006, p. 57). Malgré la pertinence de cette critique, cela ne devrait pas pousser à séparer l’évaluation et le traitement. Selon les principes gestaltistes, le diagnostic est plus utile s’il reste descriptif, phénoménologique et souple au lieu de n’être utilisé que pour nommer et définir. Une définition du diagnostic dans la théorie existentielle consisterait à dire qu’il s’agit d’une description dynamique d’une Gestalt devenue figée dans la vie d’un client. La Gestalt figée est « la description d’un ajustement créateur réalisé à un moment donné dans certaines circonstances de vie, et qui est devenu habituel et inapproprié au présent » (Joyce et Sills, 2006, p. 60). Afin d’établir un diagnostic, le thérapeute doit distinguer les symptômes du client et l’étiologie. Étant donné que l’objectif de la théorie gestaltiste est de réunifier l’individu et de considérer le patient de façon holistique, ces deux objectifs peuvent sembler contradictoires. Cependant, si on ne cherche qu’à confirmer ce qui a déjà été validé au lieu de s’atteler à la découverte de nouvelles manières de mesurer nos conceptualisations, la science psychologique manquera de théories solides sur lesquelles baser sa pratique.

La dépression selon la Gestalt-thérapie

13Bien que la dépression ne soit pas explicitée de façon détaillée dans la littérature gestaltiste, les principes de la Gestalt-thérapie peuvent considérablement aider à comprendre la façon dont on atteint un état dépressif. La formation et la résolution des figures sont l’unité phénoménologique de base de la théorie gestaltiste (Burley, 1981) et les individus dépressifs, lorsqu’un besoin est là, ont de la difficulté à créer la forme et sont incapables de suivre ce besoin jusqu’à la résolution. La mémoire procédurale, que l’on a toujours définie comme une mémoire inaccessible à la conscience (awareness), guide cependant le comportement lorsque surviennent des situations similaires à d’autres qui ont déjà été rencontrées et maîtrisées (Burley et Freier, 2004). Ce qui, à tout moment, vient à l’attention de quelqu’un, se fonde toujours sur des besoins ou des intérêts ancrés dans le biologique et c’est ce qui polarise le champ en figure et fond. Cela commence par une prise de conscience (awareness) du besoin (la formation de la figure) suivie d’un temps où elle se précise (le besoin se clarifie). À cette étape l’individu explore son environnement pour y trouver les moyens les plus appropriés pour que la figure se résolve (Burley et Freier, 2004). La résolution de ce processus passe dans la mémoire, gardant trace de la façon dont le besoin a été satisfait, si toutefois il l’a été. Bien que ce processus s’effectue en principe sans accroc (les besoins ont été conscientisés et sont parvenus à leur résolution), il arrive parfois qu’il soit interrompu et inachevé, créant un problème chez l’individu. Ce type de situations constitue la psychopathologie dans la théorie gestaltiste.

14La théorie gestaltiste considère l’individu dépressif comme un individu dont les besoins sont insatisfaits. Tous les individus ont des besoins et leur bien-être se fonde sur leur capacité à les reconnaître et à les satisfaire. Si un individu est incapable de satisfaire ses besoins ou en est empêché cela peut causer une perturbation du système. Perls, Hefferline et Goodman (1990) ont affirmé que les êtres humains étaient créatifs et doté d’un self créatif ; les symptômes sont créés pour détourner les individus d’entrer en contact avec les autres. C’est pour cette raison qu’un individu dépressif présente un manque de confiance en lui ainsi que de sa capacité à établir et à garder des relations avec les autres. Cette explication est plus attachée à la compréhension du processus qui peut conduire à la dépression. Les individus dépressifs sont persuadés que rien ne vaut la peine d’être fait car ils se sentent impuissants et pensent que tout est sans espoir (Burley, 2012).

15C’est là que la mémoire procédurale entre en jeu en automatisant cette réponse désespérée. Ses besoins sont donc insatisfaits et, à un moment, l’individu cesse de les reconnaître car cela ne sert à rien de les garder à ce niveau de conscience. Cette impuissance apprise entraînera une absence de réaction (aucun besoin) lorsque l’individu sera confronté à une situation de détresse ou de gêne, laissant simplement les choses en l’état. Cet état de non-conscience (unawareness) a pu répondre à un moment à un besoin dans la vie de cet individu. Par exemple, un enfant privé de l’affection de sa mère peut avoir appris à ne pas avoir besoin d’être étreint ou réconforté. Devenu adulte, il ne sent alors plus le besoin d’être physiquement réconforté par les autres. De la même manière, la dépression a pu à un moment satisfaire un besoin ; elle est cependant restrictive et peut empêcher le développement (Burley, 2012). La souffrance à la base de la dépression servait un besoin : c’était donc une réponse créative aux problèmes de l’individu. Cette réponse a néanmoins progressivement évolué en un ajustement étouffé ou dépressif. On peut également avancer que la dépression est un besoin insatisfait et que la dépression chronique est le résultat d’une suite de besoins ignorés.

16Une approche basée sur la description du processus a été proposée, donnant à comprendre le diagnostic psychologique (Burley, 2012). Le processus de formation et de résolution de la figure (Gestalt) conduit à définir la dépression comme un trouble au niveau des besoins dans lequel ils ne sont pas adéquatement reconnus ou traités, et où leur non-satisfaction passe pour une conséquence (Burley, 2012). Les principes éthologiques qui participent du processus dépressif incluent les introjects négatifs, l’impuissance apprise, le désespoir et la mémoire procédurale. Ce processus peut expliquer la genèse de la dépression, ce qui peut être très utile au traitement puisque cela permet d’expliquer comment un ensemble de symptômes s’est développé. Le manque d’une compréhension profonde du développement des symptômes dépressifs entraîne une faiblesse dans la plupart des mesures de la dépression existantes et cela reste un domaine que la recherche doit explorer.

L’impuissance, le sentiment de désespoir et la dépression chez l’enfant

17Bien que la littérature sur les conséquences de la Gestalt-thérapie sur les enfants ne soit pas abondante, les gestalt-thérapeutes qui travaillent avec eux utilisent bel et bien de nombreux principes de base de cette théorie. Les plus importants d’entre eux sont pertinents dans le travail avec les enfants : la prise de conscience (awareness) et l’expérience, l’usage des sens et du corps et le sens de soi. Les expérimentations en séance ont souvent recours à des interventions basées sur le jeu (Stadler, 2009). Il a été suggéré aux thérapeutes de rencontrer l’enfant au niveau d’abstraction dont il est capable en séance et d’ajuster les interventions en conséquence (Oaklander, 1997). Bien que la théorie indique les meilleures formes d’interaction avec les enfants, certaines d’entre elles n’ont pas encore reçu de preuve empirique. De la même façon, les outils d’évaluation n’ont pas évolué au-delà de la prise en compte de la symptomatologie du DSM pour incorporer de la théorie. Cependant l’objet de cette étude est de combler ce fossé en créant un instrument de mesure fondé sur la théorie. Pour ce faire beaucoup de techniques utilisées en Gestalt-thérapie serviront à la création d’items qui chercheront à rendre compte de ce qu’est le processus dépressif pour l’enfant.

18Le contact avec le monde à travers les cinq sens (la vue, l’ouïe, le toucher, le goût et l’odorat) est un élément clé de la Gestalt-thérapie, tant pour les adultes que pour les enfants. Pour ces derniers, on pense que l’expérience est plus importante que le travail de l’attention (awareness) (Oaklander, 1995). À un moment de leur vie adulte, les gens perdent la pleine conscience (awareness) de leurs sens par excès de pensée et d’analyse. D’après Oaklander, « Nous en arrivons au point où nous vivons presque comme si nos sens, notre corps et nos émotions n’existaient pas – comme si nous n’étions que des têtes géantes qui pensent, jugent, analysent, règlent des problèmes, moralisent, se souviennent, rêvent, lisent dans les esprits, prédisent l’avenir et censurent » (1988, p. 109). On pense généralement que les enfants parviennent mieux à rester en contact avec leurs sens, desquels ils peuvent cependant être coupés en cas de traumatisme. C’est pourquoi en Gestalt-thérapie l’intervention vise à reconnecter les enfants à leur expérience sensible en stimulant leurs fonctions sensorielles par des activités manuelles comme le jeu avec l’argile par exemple. Pour intégrer ce concept d’expérience sensible dans l’établissement d’une mesure, on devrait s’intéresser prioritairement aux expériences des enfants plutôt qu’à leur perception (awareness) de leur état émotionnel. On devrait par exemple interroger l’enfant sur les situations spécifiques qu’il a vécues plutôt que de poser des questions générales. D’après Kirchner (2000), le but de la Gestalt-thérapie est en effet d’accompagner l’individu dans le rétablissement (ou la découverte) de sa capacité naturelle à s’autoréguler et à établir des contacts réussis et épanouissants avec les autres, tout comme avec les aspects reniés de lui-même.

19Outre les stimuli sensoriels, l’état émotionnel peut également influer sur les processus cognitifs. On parle alors de biais cognitif (Gotlib, Joormann, 2010). L’information est traitée, interprétée et enregistrée d’une façon qui privilégie une certaine valence émotionnelle ou certaines significations lors du traitement de l’information (Richter, 2012). La façon dont est traité ce qui provient de l’environnement est très pertinente dans le traitement de la dépression (Mathaws, MacLeod, 2005) et peut contribuer au maintien de la maladie (Beck, Weissman, Kovacs, 1976). Le terme d’« impuissance apprise » est utilisé pour décrire la façon dont un organisme vivant apprend à se comporter en impuissant, période durant laquelle il échoue à répondre même lorsque se présentent des opportunités qui lui permettraient d’éviter une situation désagréable ou d’être récompensé. La dépression clinique est considérée comme étant le résultat de la perception que l’on est incapable de maîtriser l’issue d’une situation (Seligman, 1975).

20Dans les expériences classiques sur l’impuissance apprise, on expose un animal de façon répétée à un stimulus aversif auquel il ne peut échapper. L’animal finit par ne plus essayer de s’y soustraire et se comporte comme s’il était impuissant face à la situation. L’étape suivante de l’expérience consiste à proposer à l’animal une porte de sortie ; néanmoins l’impuissance apprise va l’empêcher d’entreprendre une quelconque action pour ne plus souffrir. Lors de ce type d’expérience, le mécanisme d’adaptation choisi par l’animal consiste à rester apathique et à supporter la gêne occasionnée. De la même façon, les théoriciens décrivent la dépression comme un état d’impuissance dans lequel l’individu se sent incapable d’agir sur son environnement et de changer l’issue d’un événement. La théorie gestaltiste pousse cette perspective un cran plus loin puisqu’elle explique que, si les individus dépressifs cessent d’essayer d’agir sur leur environnement, ils risquent, tôt ou tard, de ne plus avoir conscience (unaware) des conditions adverses. Chez les enfants, le retrait, en tant que symptôme de dépression, est décrit comme un moyen de survie : « ainsi, l’enfant en retrait a-t-il eu peut-être besoin de se soustraire à un monde trop douloureux » (Oaklander, 1988, p. 231). À un moment donné, l’enfant a appris qu’il devait se retirer et il continue à reproduire ce comportement même lorsque les circonstances sont différentes.

21À côté de l’impuissance, la notion de désespoir est également traitée dans la littérature sur la dépression. On s’accorde à dire que le désespoir joue un rôle majeur dans la dépression ; les tentatives pour comprendre et mesurer le désespoir sont néanmoins peu nombreuses, et peu de travaux portent sur son intérêt dans l’évaluation de la dépression (Lewis et al., 2011). Levine (2012) définit le désespoir comme un sombre état d’amertume qui peut amener à se sentir vide et désespéré. Certains auteurs ont par ailleurs conceptualisé le désespoir comme l’absence d’espoir, tandis que d’autres considèrent l’espoir et le désespoir comme deux concepts sans rapports entre eux. L’espoir est généralement conceptualisé comme une vision optimiste de l’avenir, tandis que le désespoir représente un attachement à des objectifs ou des aspirations perdus (Lewis et al., 2011). Néanmoins, ces définitions ont rarement été utilisées pour élaborer un instrument de mesure.

L’élaboration d’un nouvel instrument de mesure

22Nous avons débuté cette étude par un examen soigneux de la littérature sur la dépression chez l’enfant, sur les instruments de mesure actuels d’évaluation de la dépression chez l’enfant et sur la théorie de la Gestalt-thérapie. Nous avons également utilisé une approche ascendante pour élaborer les items du nouvel instrument. Cela commence par la réalisation d’observations spécifiques dans un domaine de recherche (la dépression chez l’enfant) auprès de la population concernée (les enfants dépressifs et non dépressifs). Les questions (items) du nouvel instrument ont ensuite été élaborées à partir : de la compréhension conceptuelle de la théorie gestaltiste (1), d’informations apportées par le groupe de travail (2) et l’opinion d’experts (3).

23L’élaboration de l’instrument s’est effectuée en trois phases :

241. La phase 1 (élaboration d’une identification de la dépression cohérente avec la théorie gestaltiste) consistait à rassembler des questions pour l’évaluation à partir de trois sources, i.e. les informations provenant de la théorie gestaltiste, du groupe de travail et de l’opinion d’expert. La dépression a été conceptualisée à partir des écrits fondateurs de la Gestalt-thérapie ainsi qu’à l’aide d’un modèle théorique de la dépression, le processus de formation-résolution de Gestalt[3]. Évoqués ci-dessus, les items ont été créés sur la base des thèmes du désespoir, de l’impuissance, d’une vision négative de l’avenir et de l’incapacité à reconnaître ses propres besoins. Le groupe de travail a permis de faire ressortir les thèmes-clé suivants : désespoir, capacité à s’autoréguler, perspective d’avenir et planification, incapacité à distinguer la figure du fond, capacité à être présent et à répondre, interprétation des événements, perte de contact avec soi et l’environnement, incapacité de reconnaître ses propres besoins, événements internes et externes, dépression comme processus créatif, sentiment de renoncement, etc.

252. Au cours de la phase 2 (mise au point des items du questionnaire), les items ont été regroupés pour former l’échelle du processus de dépression chez l’enfant. Un dispositif d’analyse thématique de contenu (Walker et Avant, 2005), au cours duquel les spécialistes ont réexaminé les questions sélectionnées, a permis de rendre compte des aspects spécifiques de la manifestation du désespoir et de l’awareness chez l’enfant. Le groupe de chercheurs a ensuite débattu des données obtenues au cours de cette phase jusqu’à obtenir un consensus sur les différents thèmes. La forme finale de l’échelle du processus de dépression chez l’enfant (DPS-C – Depression Processus Scale for Children) a ainsi été conçue à partir d’un ensemble initial de 30 questions pour lesquelles les experts s’accordaient à considérer qu’elles permettaient d’appréhender au mieux les concepts. Parmi ces 30 items, 23 sont conformes à la Gestalt-théorie et ont donc été retenus. Ils ont été inclus dans la version finale de l’instrument (voir l’annexe).

263. Au cours de la phase 3 (mise en œuvre de l’instrument et validation psychométrique préliminaire), le questionnaire a été soumis à un test psychométrique préliminaire, réalisé sur un échantillon d’enfants dépressifs et non dépressifs, qui ont également rempli un questionnaire bien établi sur le fonctionnement émotionnel. Une analyse factorielle exploratoire et une analyse de corrélation ont été réalisées afin d’évaluer la structure, la fiabilité, la validité prédictive du nouvel instrument ainsi que l’équivalence des mesures.

Procédure

27Les participants se sont vu expliquer les tenants et les aboutissants de cette étude et ont signé un formulaire écrit de consentement éclairé. Tous les enfants ayant participé à cette étude ont été évalués sur la nouvelle échelle, le DPS-C, ainsi que sur une échelle préexistante de mesure de la dépression infantile, le Children’s Depression Inventory 2 (CDI 2). Les parents ont rempli un questionnaire démographique et répondu au BASC-2 (Behavioral Assessment System for Children-2) échelle généraliste et non spécifique de la dépression pour mieux cerner le fonctionnement comportemental et émotionnel de l’enfant. Les participants du groupe contrôle (échantillon sans dépression) ont été recrutés parmi la population générale. Pour pouvoir intégrer le groupe contrôle, les participants devaient être âgés de 7 à 17 ans, être accompagnés d’un parent ou d’un soignant à même de remplir les questionnaires à destination des adultes ainsi que le formulaire de consentement, et savoir lire et écrire l’anglais. Les critères d’inclusion au groupe contrôle comprenaient également l’absence d’un diagnostic de maladie psychique et d’inquiétude parentale concernant une éventuelle dépression de l’enfant. Si l’adulte (parent ou soignant) indiquait s’inquiéter d’une possible dépression de l’enfant, l’enfant était assigné au groupe dépressif. Le recrutement de ce dernier s’est effectué dans plusieurs régions dans lesquelles existait une offre de traitement hospitalier et ambulatoire pour enfants souffrant de dépression.

Résultats

Description

28Pour déterminer la taille de l’échantillon d’une analyse factorielle, la recommandation est d’inclure cinq fois plus de patients qu’il n’y a de variables (Bryant et Yarnold, 1995) ; une évaluation comportant environ 20 items doit donc compter au moins 100 participants. Notre échantillon final comprenait 168 participants, dont 109 appartenaient au groupe contrôle, 58 au groupe des enfants dépressifs et un pour lequel les données étaient incomplètes. Les adultes n’ayant pas fait d’études supérieures étaient plus susceptibles d’indiquer qu’ils soupçonnaient la présence d’une dépression infantile (48,6 %) que ceux qui étaient diplômés de l’enseignement supérieur (31,6 %). D’autre part, les adultes nés aux États-Unis étaient plus susceptibles d’identifier une dépression chez leur enfant (53,5 %) que ceux nés ailleurs (20,8 %). Les deux groupes ne présentaient pas de distribution différente sur les autres variables démographiques (âge, revenus, sexe, type de relation à l’enfant, statut matrimonial et statut de l’enfant vis-à-vis de l’immigration).

29L’analyse statistique de la fiabilité des items préalable à l’analyse factorielle exploratoire (Exploratory Factor Analysis – EFA) a identifié quatre items qui faisaient diminuer la fiabilité globale de la nouvelle échelle ; ils en ont été sortis. L’analyse de la fiabilité a démontré que le coefficient alpha de Cronbach [4] était de 0,830 pour le groupe contrôle, de 0,914 pour le groupe des déprimés et de 0,963 pour l’échantillon total, ce qui suggère que l’échelle de mesure peut être considérée comme fiable.

Analyse factorielle

30Afin d’évaluer la validité de notre conceptualisation, la cohérence interne et la structuration sous-jacente du DPS-C, une analyse factorielle exploratoire (EFA) a été réalisée sur le groupe contrôle. Un modèle à trois facteurs s’est dégagé sur un sous-ensemble de 13 items (cf. tableau 1).

Tableau 1

Matrice structurelle avec rotation Promax pour la modélisation finale

123
DPS-C Item 13.835-.028-.020
DPS-C Item 23.796-.288-.264
DPS-C Item 9.681.222-.193
DPS-C Item 6.640-.103.119
DPS-C Item 11.566.232.108
DPS-C Item 7.379.144.246
DPS-C Item 8-.146.872-.011
DPS-C Item 22.030.845-.206
DPS-C Item 18.179.480.233
DPS-C Item 10.108-.320.750
DPS-C Item 14-.246.020.628
DPS-C Item 20.218.205.523
DPS-C Item 15-.067.003.481

Matrice structurelle avec rotation Promax pour la modélisation finale

31La dénomination de chacun des trois facteurs a été déterminée en fonction du contenu et des thèmes des variables, dans le cadre de la théorie gestaltiste. Le facteur 1 est ainsi l’échelle 1 du DPS-C. Ses thèmes centraux tournaient autour de « trouver un moyen » d’influer sur un événement extérieur (items 6 et 7), d’envisager l’avenir (items 9 et 13), du regard des autres (item 11) et de la perception de l’environnement (item 23). Ces variables sont celles qui ont une composante de relation avec le monde externe du sujet, comme le futur, l’environnement et autrui. L’échelle 1 a donc été intitulée « Perception des facteurs extérieurs ».

32Le facteur 2 constitue l’échelle 2 du DPS-C. Les thèmes principaux de cette échelle concernent la perception physique de la faim et de la soif (item 18), l’orientation dans l’espace (item 22) et la perception du comportement des autres (item 8). L’échelle 2 se réfère à la perception de l’expérience et a été intitulée « Impuissance/désespoir » car ses variables semblent refléter la gravité de la dépression et l’abandon de la quête de résolution des besoins.

33Le facteur 3 constitue l’échelle 3 de la DPS-C et ses thèmes principaux tournent autour de la reconnaissance des besoins (item 10), la capacité à prendre des décisions pour répondre à ses propres besoins (item 14), la conscience d’utiliser ses capacités (item 3), et la capacité à s’organiser pour satisfaire ses besoins (item 20). Par conséquent, l’échelle 3 a été intitulée « Perception des besoins personnels ».

34Voir l’annexe pour disposer du questionnaire complet et du détail des items retenus en forme d’échelle de Likert.

35Le coefficient alpha de Cronbach a été utilisé pour estimer la fiabilité de ces trois échelles. Le facteur 1, « Perception des facteurs extérieurs », explique 27,87 % de la variance (α de Cronbach = 0,75). Le facteur 2, « Perception de l’expérience », en explique 11,97 % (α de Cronbach = 0,66). Le facteur 3, « Perception des besoins personnels », en explique 10,54 % de la variance (α de Cronbach = 0,50). Cette structure de trois facteurs pris ensemble rend compte de 50,38 % de la variance totale. Le coefficient alpha de Cronbach évaluant la cohérence de la totalité de l’instrument est de 0,75, ce qui suggère que ce dernier remplit les critères de fiabilité pour servir de mesure.

Évaluation de la conceptualisation : validité par convergence et par divergence

36L’un des objectifs principaux de cette analyse était d’établir une nouvelle méthode d’évaluation de la dépression et ce, en s’appuyant sur une modélisation de son processus et non sur son résultat ou ses symptômes. Afin d’évaluer la pertinence de notre conceptualisation, nous avons fait une analyse de corrélation avec d’autres outils couramment utilisés (le BASC-2 et le CDI 2).

37L’analyse des échelles comportementales du DPS-C et BASC-2 a démontré une forte corrélation positive. En particulier, il a été établi que l’échelle 1 du DPS-C (« Perception des facteurs extérieurs »), l’échelle 3 (« Perception des besoins personnels ») et le score total du DPS-C était fortement et positivement corrélés avec la sous-échelle de « dépression » du BASC-2. Les résultats respectifs de ces corrélations se présentaient comme suit : r(159) = 0,714, p < 0,001 ; r(159) = 0,727 ; p < 0,001 ; r(159) = 0,763, p < 0,001. De plus le score total du DPS-C était fortement corrélé à la sous-échelle de « retrait » du BASC-2 : r(159) = 0,714, p < 0,001. Ces fortes corrélations sont un aspect primordial de cette étude : le DPS-C n’ayant démontré de forte corrélation avec aucune autre des sous-échelles du BASC-2 nous avons une preuve solide de la cohérence de notre conceptualisation.

38L’analyse du DPS-C et du CDI 2 ne montre aucune forte corrélation entre les deux instruments. Puisque l’objectif recherché en développant le DPS-C était d’évaluer la dépression chez les enfants d’une manière différente de celle du CDI 2, il est normal et souhaitable que ces deux instruments ne soient pas corrélés. Cela prouve que la nouvelle échelle peut évaluer un construit d’une manière différente de celle du CDI 2. La majorité des instruments de mesure ont été développés sans qu’on ait pu auparavant établir la validité de leurs hypothèses. Entériner continuellement ce défaut limite la nature des données que nous pouvons mesurer car cela restreint la prise en compte de conceptualisations alternatives.

Validité prédictive

39Une analyse de régression logistique a permis de vérifier la pertinence théorique du DPS-C en testant sa capacité à prédire la dépression. Les résultats indiquent que, à niveaux d’éducation et statut d’immigration de l’adulte constants, le score total sur le DPS-C est un prédicteur statistiquement significatif de la dépression. Le modèle différencie aussi le groupe dépressif du groupe non dépressif de façon fiable, prédisant avec justesse l’affectation de 94 % des cas (WaldX2(3) = 140,335 ; p < 0,001). L’échelle 1 (Perception des facteurs extérieurs) et l’échelle 3 (Perception des besoins personnels) sont également des prédicteurs significatifs de la dépression (échelle 1, p = 0,006 ; échelle 3, p = 0,007).

Tableau 2

Résumé de l’analyse de régression logistique pour le score total du DPS-C

VariableBSEBWalddfp
Niveau d’éducation de l’adulte-.718.746.9261.488
Statut de l’adulte sur le plan de l’immigration-1.493.6385.4791.019*
Score total du DPS-C.262.03847.1821.001**
Constante-5.2081.8148.2471.004*

Résumé de l’analyse de régression logistique pour le score total du DPS-C

*p < .05 **p < .01
Tableau 3

Résumé de l’analyse de régression logistique pour les échelles du DPS-C

VariablebSEWalddfp
Niveau d’éducation de l’adulte-.758.773.9601.327
Statut de l’adulte sur le plan de l’immigration-1.389.6554.4951.034*
Échelle 1 du DPS-C.326.1187.6001.006**
Échelle 2 du DPS-C.017.163.0111.917
Échelle 3 du DPS-C.421.1577.2071.007**
Constante-6.0952.0518.8301.003**

Résumé de l’analyse de régression logistique pour les échelles du DPS-C

*p < 0,05 ; **p < 0,01.

40Le score total du CDI était lui aussi un marqueur significatif de la dépression pour cet échantillon en la prédisant avec un taux de réussite de 70,1 % (Wald X2(5) = 28,993 ; p < 0,001). Cependant, si l’on entre les échelles de la DPS-C dans la régression, le score au CDI n’est plus un facteur prédictif significatif.

Discussion

41L’objectif principal de la présente étude était l’établissement d’une nouvelle méthode d’évaluation de la dépression chez les enfants, fondée sur un modèle qui en théorise le processus plutôt que d’être élaborée à partir de ses conséquences. Pour cela nous avons créé un nouvel instrument, le DPS-C – échelle du processus de dépression chez les enfants – à partir de la perspective gestaltiste sur la dynamique dépressive sans utiliser la symptomatologie du DSM ce qui le rend très différent des autres instruments existants. L’existence de besoins, le repérage et la conscience (awareness) de ces besoins et le fait d’agir en vue de les satisfaire sont au cœur de la compréhension de la dépression selon la théorie gestaltiste. La perturbation de ce processus est à l’origine de la psychopathologie (T. Burley, 2012). La dépression résulte d’une répétition de situations où des besoins ne sont pas satisfaits, jusqu’au point où ces désirs disparaissent de la conscience (awareness), c’est-à-dire jusqu’à la dépression chronique.

42Les résultats obtenus démontrent l’intérêt de cette théorisation, la cohérence interne et la valeur prédictive du DPS-C. De plus, l’instrument de mesure final, à 13 items, satisfait aux exigences de fiabilité. L’étude a également prouvé la validité conceptuelle et la valeur discriminante de l’instrument de mesure. Des analyses de corrélation entre le score total sur le DPS-C, les échelles cliniques du BASC-2 et le CDI 2 ont mis en évidence de fortes corrélations directes entre, d’une part, l’échelle 1, l’échelle 3 et le score total sur la DPS-C et, d’autre part, la sous-échelle « Dépression » du BASC-2. L’échelle 2 semble liée aux aspects relatifs à l’attention à l’expérience (awareness). Elle pourrait donc rendre compte d’aspects différents ou d’une part plus importante de la variabilité de ce qui est mesuré par notre instrument que le BASC-2, fondé presque uniquement sur le recueil d’éléments émotionnels. Le score total sur le DPS-C présente une forte corrélation avec la sous-échelle « Retrait » du BASC-2, mais n’a aucun lien significatif avec les autres sous-échelles de ce dernier (Hyperactivité, Agressivité, Troubles du comportement, Anxiété, Somatisation, Inadaptation et Troubles de l’attention), ce qui suggère que le DPS-C possède une validité convergente et sélective. L’examen des items de la sous-échelle « Retrait » montre qu’ils procèdent d’un comportement de distanciation vis-à-vis de l’activité, comme la participation de l’enfant aux jeux et aux interactions avec ses pairs (par exemple : « Refuse de participer aux activités de groupe », « Préfère être seul(e) » ou « Évite les autres adolescents »). Selon la théorie gestaltiste, il ne peut y avoir de résolution du besoin lorsque la personne cesse de s’efforcer de s’engager dans son écosystème (T. Burley, 2012). Ces résultats viennent conforter la validité de la conceptualisation de la mesure de la dépression chez les enfants sur laquelle le DPS-C est construit.

43Nous n’avons pas observé de forte corrélation du DPS-C avec le CDI 2, ce qui suggère que le nouvel instrument est probablement en prise avec un phénomène plus vaste et/ou différent de celui que le CDI 2 mesure. Ce résultat, associé aux corrélations trouvées entre le DPS-C et les sous-échelles « Retrait » et « Dépression » du BASC-2, laisse penser que le nouvel instrument réussit à distinguer la dépression d’autres états émotionnels, tout en conceptualisant la dépression différemment des méthodes d’évaluation actuelles. Ce résultat est particulièrement important car au lieu de s’appuyer sur les modèles existants identifiant la dépression par sa symptomatologie, la présente étude démontre qu’il est tout à fait possible d’aborder l’évaluation selon une perspective neuve. Bien que l’approche non symptomatique ne soit pas une nouveauté dans le traitement en santé mentale (cf. la Gestalt-thérapie, la thérapie par le jeu, les approches psychanalytiques, etc.) notre étude est la première à en faire la base théorique de l’élaboration d’un outil d’évaluation et ce, en se fondant sur le processus dépressif lui-même. Les résultats de l’étude montrent, bien qu’étant encore dans ses premiers stades, qu’une fois validé et étalonné sur une population plus large l’instrument pourrait constituer un outil d’évaluation diagnostique précieux donnant d’importantes indications en matière d’approche et de planification du traitement.

44La validité prédictive du DPS-C a également été démontrée par l’analyse. La comparaison des deux groupes de l’étude (le groupe des enfants non dépressifs et le groupe des enfants identifiés par les parents comme potentiellement dépressifs) a permis de démontrer, à l’aide d’une analyse de régression logistique sur le score total sur la DPS-C, que les échelles 1 et 3 constituaient, de façon statistiquement significatives, des prédicteurs de la dépression. La sensibilité du DPS-C à déceler de façon fiable le souci parental concernant la dépression de l’enfant est surprenante. Étant donné que l’échantillon dépressif avait été recruté en population générale et non sur une base clinique, il est possible que le DPS-C ait une aptitude sans précédent à révéler cette subtilité, qui échappe au CDI 2. Le DPS-C, une fois validée sur le plan psychométrique par des études de suivi, pourrait devenir un outil précieux pour les praticiens. En effet, la littérature suggère que la plupart des instruments de mesure peinent à identifier la composante de dépression « pure » des émotions. L’anxiété ou d’autres troubles chez l’enfant sont ainsi fréquemment confondus avec la dépression (Kazdin, 1990). La présente étude a réussi à créer un instrument de mesure qui se différencie des autres échelles dans sa prise en compte du souci du parent vis-à-vis du comportement et des émotions de son enfant. Ce résultat pourrait contribuer à faire progresser notre manière de mesurer la dépression et ce, autrement qu’en ne s’intéressant qu’à certains aspects du fonctionnement émotionnel.

Pour le futur

45En conclusion, l’analyse de la littérature et les résultats soulèvent des enjeux importants concernant les critères de diagnostic. Si la recherche devait confirmer qu’une approche fondée sur le processus de la dépression est plus utile que celle fondée sur les symptômes, les critères diagnostiques de troubles tels que la dépression majeure pourraient adopter cette perspective au lieu de s’intéresser aux symptômes apparents. Les individus expriment des symptômes apparents de tristesse par bien des façons et il est impossible de comparer deux individus sur la manière dont ils manifestent la dépression. De futures études devraient explorer la prise en compte du processus dans les critères diagnostiques.

46Il faut espérer que la présente étude suscitera l’intérêt des chercheurs envers les praticiens qui traitent la dépression avec d’autres modèles que celui de l’identification des symptômes. Une meilleure représentation des modèles théoriques et de traitement au sein de la recherche contribuerait à élargir la palette des paramètres actuellement utilisés pour identifier les troubles mentaux. L’amélioration de nos méthodes d’évaluation des troubles mentaux pourrait permettre de mieux identifier les individus ayant besoin d’un traitement. Un repérage et une compréhension diagnostique meilleurs pourraient guider un traitement qui serait spécifique au trouble au lieu de seulement chercher à en réduire les symptômes. Il reste encore un important travail à faire pour élaborer un instrument de mesure de la dépression fiable, valide et utile à la pratique clinique. Au final cette étude peut offrir les grandes lignes d’une nouvelle manière de concevoir et d’évaluer la dépression ainsi que permettre de combler le fossé entre la théorie et la recherche.


Annexe

Échelle de la dépression chez l’enfant (Depression Process Scale-Children – DPS-C – Babakhanyan, 2012)

tableau im1
DPS-C ID :__________ Date :____________ Age :_____Grade :___ Masculin/Féminin________ Tout à fait Faux 0 1 Tout à fait Vrai 1 2 3 4

47Ce questionnaire liste différentes façons d’être affecté par ce qui arrive. Après chaque phrase, évaluez dans quelle mesure celle-ci vous paraît vraie ou fausse. Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise réponse. De 1 à 4 où 1 est Tout à fait Faux à 4 qui est Tout à fait Vrai.

1Même si je suis furieux, il n’y a rien que je puisse faire sur la situation qui m’a contrarié1234
2Quand d’autres personnes rencontrent des problèmes, je sais ce que je peux faire pour les aider.1234
3Quand j’ai une idée à propos de quelque chose, je n’en parle généralement à personne parce que je sais que ça ne sert à rien.1234
4Personne ne peut m’aider dans mes problèmes.1234
5Tout le monde rencontre des jours « avec » et des jours « sans ». Dans mes jours « sans » je sais que rien de ce qu’on fait pour moi ne peut me faire aller mieux.1234
6Quand j’ai une envie de faire quelque chose pour le week-end, je trouve un moyen de le faire.1234
7Si quelque chose m’arrive que je n’aime pas, je peux trouver un moyen de le changer.1234
8Je ne fais pas vraiment attention à la méchanceté des autres enfants envers moi car je sais que je ne peux rien faire pour me sentir mieux.1234
9Je sais que je pourrai devenir comme je voudrai quand je serais grand1234
10J’ai du mal à savoir ce que je veux.1234
11Personne ne se soucie de savoir si je suis blessé.1234
12Je sais toujours comment obtenir ce que je veux.1234
13Peu importe si je traverse une mauvaise journée, je suis sûr que demain sera meilleur.1234
14Les autres prennent tout le temps des décisions pour moi.1234
15Quand je suis triste je ne sais pas comment en sortir.1234
16Quand on est en colère on a la force de changer les choses.1234
17Généralement je ne sais pas ce qui se passe autour de moi (ce que les autres font ou disent).1234
18Je ne me rends pas compte si j’ai faim ou soif ou si je suis fatigué.1234
19Quand je pense que je ne peux pas résoudre un problème, j’abandonne.1234
20Cela ne sert à rien de faire des plans parce que rien ne marche jamais comme cela devrait.1234
21Les adultes se soucient vraiment de ce que les enfants pensent.1234
22Quand je me promène, si je me perds je sais que je n’arriverai pas à trouver mon chemin si personne ne me retrouve.1234
23Quand j’entre pour la première fois dans une pièce, j’aime regarder autour de moi et voir les personnes qui sont là et ce qu’elles font.1234

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  • YONTEF, G., et SIMKIN, J. (1993). Gestalt therapy : An introduction. Gestalt Journal Press.

Notes

  • [1]
    Texte tiré de : Babakhanyan I., Burley T. (2016). “A Gestalt Process-Action Based Theory of Depression and Test Construction Validation”, in Roubal J. (dir.), Towards a Research Tradition in Gestalt Therapy, Cambridge, Cambridge Scholars Publishing.
  • [2]
    CDI Children Depression Inventory – Questionnaire sur la dépression chez l’enfant. Ndt
  • [3]
    Il s’agit de la façon dont nous percevons nos besoins – de la forme (Gestalt) qu’ils prennent dans notre éprouvé – et dont nous pouvons les résoudre. Ndt.
  • [4]
    Le coefficient alpha de Cronbach (0 ≦ α ≦ 1) mesure la cohérence interne d’un ensemble d’items d’un questionnaire. La corrélation de ces items est généralement considérée comme acceptable à partir de ≧ 0,7 ; c’est l’indice qu’ils évaluent un même phénomène. Ndt.
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