Notes
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[1]
Il n’est pas que le Voyage en Orient de Nerval qui soit fécond pour enrichir notre idée du destin symbolique d’Hiram. Dans un ouvrage contesté par les modernes philologues, mais d’une très grande richesse de signification, Nicolae Densusianu avait soutenu l’hypothèse d’une culture « pélasgique », préhistorique et hyperboréenne, qui aurait constitué, depuis les Carpates et la civilisation geto-dace, le centre de rayonnement d’une langue et d’une spiritualité dont on retrouvera plus tard des traces dans le monde celte, à Troie ou dans les installations pré-latines de l’Italie. Or le héros éponyme de ce peuple est ARIM ou ARMIN, d’où ARMINIUS, ou HERMANN, le guerrier indo-européen déjà identifié par Leibniz à la source de la civilisation occidentale (cf. Théod., § 136-143). Emporté par son hypothèse, Densusianu finit par suggérer un lien possible entre cet ARIM et MITHRA, ARIM et JANUS (on connaît d’ailleurs le lien entre Hiram et les portes du Temple) et même PROMETHEE, le héros pétrifié des Carpates. Entre cet ARIM et notre HIRAM, le lien existe, du moins dans la langue des oiseaux, et élargit considérablement l’horizon de la Maçonnerie adonhiramite ; cf. Nicolae Densusianu, Dacia preistorica, Bucarest, 1913, facsimilé, Bucarest 2002.
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[2]
Nietzsche, Ecce homo, éd. Bouquins, p. 1160.
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[3]
Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra, III, Des transfuges, § 2, éd. Bouquins, p. 424-25. On peut traduire aussi par les apostats ou les renégats.
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[4]
APZ, II, Dans les îles bienheureuses, p. 349.
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[5]
APZ, III, De la vertu qui rapetisse, § 3, p. 417.
-
[6]
François Rabelais, Tiers Livre, Prologue. Ou avec quelques variantes de grand sens : « Puis doncques qu’en nostre faculté n’est en l’art d’architecture tant promouvoir come ils font, je suis délibéré faire ce que fist Regnault de Montauban, servir les massons, mettre bouillir pour les massons ; et m’auront, puis que compagnon ne puis estre, pour auditeur, je dis infatigable, de leurs trescelestes escripts », Cinquième livre, Prologue. L’érudition s’est toujours mise en peine de savoir quels étaient les écrits très célestes des Maçons. Rappelons simplement que, dans la légende des Quatre Fils Aymon, Renaud de Montauban entreprend de servir, pour pénitence de sa vie passée, les bâtisseurs de Saint Pierre de Cologne.
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[7]
Nietzsche, Gai savoir, § 125, éd. Bouquins, p. 132.
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[8]
Toute la complexité de ce mouvement est résumé par le nom ADONIRAM et l’adjectif « adonhiramite » qu’on en a tiré pour qualifier la Maçonnerie qui place Hiram en son centre : car Hiram et Adonai s’y trouvent si mêlés que, bien sûr, Adoniram, c’est Seigneur Hiram, mais c’est aussi, par un renversement inévitable, le Seigneur comme Hiram, Adonai sous les traits d’Hiram. L’analogie avec l’incarnation et la mort du Christ devient alors troublante, mais c’est pour entraîner Hiram et Christ dans une même mythologie du crépuscule des dieux.
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[9]
Il faut évaluer à sa juste mesure cette proposition de Nietzsche plus technique qu’elle n’en a l’air : « Celui qui a dit : ‘Dieu est esprit’ – a fait jusqu’à présent sur la terre le plus grand pas et le plus grand bond vers l’incrédulité : ce ne sont pas là des paroles faciles à réparer sur la terre ! », APZ, IV, La fête de l’âne, § 1, p. 533.
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[10]
Ibid.
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[11]
APZ, III, De l’homme supérieur, § 2, p. 510.
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[12]
APZ, IV, La fête de l’âne, § 1, p. 533. Le pape disait à Zarathoustra : « Plutôt adorer Dieu sous cette forme que de ne point l’adorer du tout. », ibid.
-
[13]
APZ, IV, L’Ombre, p. 500. Pour se persuader de la réalité de ce retour à la religion au sein même de la pensée la plus critique et la plus révolutionnaire, il suffit de lire le dernier livre de Jean Birnbaum, Les Maoccidents, Un néoconservatisme à la française, Paris, Stock, 2009.
-
[14]
Ecce Homo, p. 1176.
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[15]
Ecce Homo, p. 1176.
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[16]
Ecce Homo, p. 1177.
-
[17]
Nietzsche, Le Cas Wagner, Avant-propos, éd. Bouquins, p. 900.
-
[18]
APZ, II, Des grands événements, p. 387. Le Voyageur et son ombre est le titre du premier ouvrage de Nietzsche après la séparation avec Wagner.
-
[19]
APZ, IV, L’Ombre : « Mon ombre m’appelle ? Qu’importe mon ombre ! Qu’elle me coure après ! moi – je me sauve d’elle. », p. 498. Mais la suite de l’analyse est d’une subtilité et d’une mélancolie extrêmes.
-
[20]
Ecce Homo, « Le psychologue prend la parole », § 3, p. 1123.
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[21]
Dans un séminaire célèbre, Carl Gustav Jung s’y est exercé, même si c’était pour vérifier le bien fondé de son analyse des archétypes et du Soi ; cf. Nietzsche’s Zarathoustra : Notes of the Seminar Given in 1934-1939, James L. Jarrett editor, Princeton univ., 1997.
Une rencontre entre Hiram, maître des Maçons, et Zarathoustra, maître des esprits libres, apparaît si improbable qu’elle exige les plus grandes précautions. Tentons pourtant l’exercice, dans l’espoir de modifier pour quelque temps les fronts de la philosophie et de l’initiation.
Illustration Jean-Pie Robillot
Illustration Jean-Pie Robillot
1Pourquoi irions-nous chercher nos racines dans cette confrontation entre l’architecte du roi Salomon et l’antique réformateur de la religion du feu ? C’est pourtant en cet orient de légende que sont nés nos livres sacrés et qu’ont survécu nos souvenirs les plus communément partagés. Plus encore, Hiram l’architecte païen du Saint des Saints, Zoroastre, l’abolisseur des religions du sacrifice instaurées par les Maîtres de l’Inde, partagent ceci d’être des aventuriers, des tard venus, des hommes sauvages qui ont trouvé leur art et ont fondé leur légitimité dans des filiations toujours mineures, toujours voilées, toujours indirectes, au point qu’il leur a fallu se faire ensuite reconnaître par les traditions majeures pour finir par les servir, avant peut-être, et par des moyens qui leur sont propres, de les infléchir au point de rendre leur œuvre fondamentalement énigmatique pour les temps futurs. Il n’est que de consulter Gérard de Nerval, et l’on verra qu’Hiram a représenté tout sauf un pouvoir neutre et purement soumis auprès de Salomon [1]. Quant à Zarathoustra, il ne s’est emparé du feu des vieilles religions de la Perse que pour en interdire l’usage sacrificiel au profit d’opérations désormais purement spirituelles.
Nietzsche
Nietzsche
2Et pour nous aujourd’hui ? Je soutiens l’idée que ces rapprochements ne sont pas seulement érudits ou archéologiques, mais qu’ils permettent de mesurer jusqu’où se prolongent les formes de maîtrise dont nous sommes les héritiers. L’ésotérisme d’Hiram, l’hermétisme de Zarathoustra résument tout le pouvoir de progrès spirituel contenus dans les traditions anciennes et les filiations secrètes. Par eux, c’est toute la libre pensée nourrie non pas à de superficielles contestations ou au culte épidermique de la dénonciation, mais à de vénérables traditions et à une connaissance complexe du passé, qui est appelée à la vérification de ses principes en des temps où, plus que jamais, elle est exposée à des malentendus.
Gérard de Nerval
Gérard de Nerval
Il est peut-être trop tard pour les religions et, si les hommes voulaient y revenir, ce ne serait qu’un symptôme de plus de leur impuissance à croire
3Croyante ou pas en un principe premier, la Maçonnerie ne confessera jamais sa foi profonde comme un converti ou comme le fidèle d’une Eglise peut la pratiquer. Non seulement trop d’histoire, de persécutions, de luttes ouvertes ou plus secrètes opposent les deux rapports au sacré et à l’autorité qui émane de lui, mais on ne confondra jamais une foi symbolique, une foi née de la méditation de symboles au sein d’un cercle voué au secret, et une foi reçue par l’entremise d’une vie sacramentelle et la participation revendiquée à des rites d’appartenance communautaire.
4Mais il n’importe au fond, puisque le philosophe allemand Friedrich Nietzsche a fait revenir Zarathoustra parmi nous, non pas pour proposer sous une forme nouvelle les principes de sa morale antique, mais pour montrer aux hommes qu’il est peut-être trop tard pour les religions et que, s’ils voulaient revenir à quelque tentation d’adoration, ce ne serait qu’un symptôme de plus de leur impuissance à croire et de leur irreligion désormais irréversible. Cet Ainsi parlait Zarathoustra n’est pas une mauvaise lecture en des temps de nouvelle respectabilité des religions et elle place le Maçon devant des responsabilités redoutables.
5Il y a ainsi un destin nietzschéen de la Maçonnerie et nous aurions tort de l’oublier car Nietzsche, lui, ne nous oubliera pas. La force de notre initiation dépendra en fin de compte de notre capacité à traiter le cas-Hiram comme Nietzsche nous a appris à traiter le cas-Wagner. Wagner, Nietzsche, Hiram, Zarathoustra, Wotan, Siegfried, Sarastro et Mozart : tous ces noms semblent mélangés comme à loisir dans le présent discours. Mais il existe un fil rouge qui les ordonne, qu’il nous faut maintenant suivre.
I. De la « rectification » des Maçons
6Animé par une indéniable perversité, je vais tenter d’accumuler des objections contre l’image du Maçon, tel qu’il pouvait apparaître à la fin du XIXe siècle. Ces images existent chez Nietzsche comme chez d’autres auteurs de diverses appartenances. Seulement Nietzsche a la capacité de les ramener à quelques grandes questions qui nous aideront à mesurer l’intérêt d’une épuration, par la critique de Nietzsche, d’une certaine vulgate des loges. Dans ce passage, par exemple, Nietzsche rappelle les polémiques de sa jeunesse et ajoute ces considérations singulières :
« Jusqu’à présent, rien ne m’a été plus étranger que toute la gent des « libres penseurs », qu’ils soient européens ou américains. Avec ceux-là, qui sont les incorrigibles crétins et les pantins des « idées modernes », je me trouve même beaucoup plus profondément en désaccord qu’avec n’importe lequel de leurs adversaires. Ils veulent aussi « rendre meilleure » l’humanité, à leur façon et à leur image. Ils déclareraient une guerre implacable à tout ce que je suis, à tout ce que je veux, en admettant qu’ils soient capables de le comprendre – ils croient tous encore à l’ « idéal »… Je suis le premier immoraliste [2]. »
8Le rituel du Compagnon nous invite à bâtir des temples à nos vertus et à creuser des tombeaux pour nos vices. Sommes-nous en mesure de résister en immoralistes à la confusion des idées modernes ? Il faut s’habituer au style de Nietzsche, fait d’outrecuidance, de défi, d’ironie dévastatrice. Mais l’occasion nous est donnée, à travers son persiflage, de rencontrer une première difficulté de taille : l’initiation doit-elle faire de nous des thuriféraires des idées modernes ? Doit-elle nous rendre bon, respectable et acquiesçant ? L’auteur du Zarathoustra dit non et discerne dans cette voie bien pensante le plus grand obstacle à la véritable connaissance et comme une soumission irrémédiable à un monde mécanisé, voué à la mort et à l’esclavage.
9Emporté par un même mouvement de transmutation des valeurs, Zarathoustra avait déjà développé son attaque en tous sens et sa prédication se présentait d’abord comme une galerie des tares de la civilisation moderne. Mais qui visait-il au juste dans un passage comme celui-ci, voué à la dénonciation des formes nouvelles de religiosité qui se développaient en son temps, tout autant liées aux sectes protestantes qu’aux cercles théosophiques :
« Nous sommes redevenus pieux » – ainsi confessent les transfuges.
[…]
Je l’entends et je le sens : l’heure est venue des chasses et des processions, non des chasses sauvages, mais des chasses douces et débiles, reniflant dans les coins, sans faire plus de bruit que le murmure des prières, –Ils se mettent ensemble pendant des soirées entières et ils se disent :
- des chasses aux belles âmes poltronnes : toutes les souricières des cœurs sont de nouveau braquées ! Et partout où je soulève un rideau, une petite phalène se précipite dehors.
- Etait-elle blottie là avec une autre petite phalène ? Car partout je sens de petites communautés cachées ; et partout où il y a des réduits <Kämmerlein>, il y a de nouveaux bigots <Bet-Brüder> avec l’odeur des bigots.
« Redevenons comme les petits enfants et invoquons le bon Dieu !
[…]
Ou bien, durant de longs soirs, ils regardent les ruses d’une araignée à l’affût, qui prêche la sagesse aux autres araignées, en leur enseignant : « Sous les croix, il faut bon tisser sa toile ! »
Ou bien ils sont assis pendant des journées entières à pêcher à la ligne au bord des marécages, et ils croient que c’est là être profond ; mais celui qui pêche où il n’y a pas de poisson, j’estime qu’il n’est même pas superficiel ! […]
Ou bien ils apprennent la peur chez un sage à moitié détraqué qui attend, dans des chambres obscures <in dunkle Zimmern>, que les esprits apparaissent – tandis que leur esprit disparaît entièrement !
[…]
En vérité, ce sera ma mort, d’étouffer de rire, en voyant des ânes ivres et en entendant ainsi des veilleurs de nuit douter de Dieu.
Le temps n’est-il pas depuis longtemps passé, même pour de pareils doutes ? Qui aurait le droit de réveiller dans leur sommeil d’aussi vieilles choses ennemies de la lumière [3] ? »
11Qui ne reconnaîtrait ses propres doutes dans le fond de l’alcôve maçonnique ? Quel Maçon ne se sentirait pas traversé par cette désignation des chambrettes capitonnées, des Kämmerlein, et des « frères » en bigoterie ? Quel fils du Roi-Pêcheur ne se retrouverait en train de pêcher dans les eaux troubles de la spiritualité maçonnique ? Qui ne reconnaîtrait, pour finir, le transfuge des Eglises dans le croyant des loges ? Et qui ne reconnaîtrait tout l’arsenal d’une Maçonnerie fin de siècle dans cette évocation des tables tournantes et de la transe des médiums ? Il faut supporter ce regard de Zarathoustra, car demain, ne sera-ce pas celui d’Hiram ? Car notre rite ne nous promet pas seulement le voyage sous la terre, il met une condition à la découverte de la pierre cachée : LA RECTIFICATION. N’est-ce pas cela « rectifier » ?
12A tout le moins, cela s’appelle « philosopher à coup de marteau », comme le revendique Nietzsche, mais que serait le légendaire maçonnique sans le symbolisme du maillet et du marteau, du maillet qui conduit le travail et du marteau qui préside aux premiers travaux de l’Apprenti ? Aussi est-ce en Maître que parle ici Zarathoustra :
« Ma très ardente volonté de créer me pousse sans cesse vers les hommes : ainsi le marteau est poussé vers la pierre [4]. »
14Et les coups du marteau qui attaque la pierre ne lancent pas en vain leurs étincelles. Elles vont nourrir le feu qui présidera aux cuisines complexes de Zarathoustra :
« Je fais bouillir dans ma marmite tout ce qui est hasard. Et ce n’est que lorsque le hasard est cuit à point que je lui souhaite la bienvenue pour en faire ma nourriture [5]. »
16Zarathoustra, à ce stade, ne se révèle certes pas un frère bien connu de la loge, mais on pourrait reprendre pour le sévère Perse ce mot du philosophe des Jardins de Touraine : « Je serviray les massons, je mettray bouillir pour les massons, et, le past terminé, au son de ma musette mesureray la musarderie des musards [6]. » Cette musette frappe fort, mais elle ne fait que répondre à trop de complaisances à l’égard du monde profane. Quand tu vas chez les Maçons, prends ton fouet ! Mais ce sont eux qui dansent et qui font leur ronde jusqu’au douzième coup de minuit.
II. Des jeux funèbres en l’honneur de Dieu
17Voilà la charge, elle pourrait même être intensifiée si on la rapportait à des figures plus vastes encore de l’œuvre comme l’Homme Supérieur, le Pape, les Vertus qui rapetissent…, tous échos de la détresse qui sort des entrailles du plus laid des hommes, le meurtrier de Dieu. Un même chant de mélancolie les étreint et obligera Zarathoustra à s’en débarrasser quand le signe sera venu.
18Nous avons vu aussi des signes de complicité se glisser dans le discours comme autant d’attestations que le Zarathoustra est aussi un rituel d’initiation et de Maîtrise, et que Nietzsche, loin d’abolir une Maçonnerie qu’il provoque, chemine à ses côtés en nous rappelant à une rigueur que nous aurions tort de méconnaître. Quel est l’esprit de cette rigueur ? Evaluer le temps de notre œuvre profane comme il mérite de l’être et déceler les compromissions de notre initiation avec les idées reçues ou plus obscurément intérieures et propres à provoquer notre perte.
L’humeur maçonnique est fondamentalement funèbre, depuis le cabinet de réflexion jusqu’à certaines questions qui marquent la mémoire et l’âme, comme celle-ci : « Vos mains sont-elles pures » ?
19C’est pourquoi il faut à nouveau revenir au cri par lequel commence le Zarathoustra qui qualifie l’heure de la plus grande détresse des Modernes : « Dieu est mort » ! Entre ceux qui ne savent encore pas que Dieu est mort, et ceux qui s’en réjouissent de façon irresponsable, Nietzsche inscrit une action intellectuelle qui pourrait bien caractériser celle de la Maîtrise initiatique : payer pour ce crime et inventer les jeux funèbres qui pourraient laver nos mains. Dans la Maçonnerie, tout n’est pas idyllique, crime, assassinat, vengeance, exécutions s’y succèdent et l’humeur maçonnique est fondamentalement funèbre, depuis le cabinet de réflexion jusqu’à certaines questions qui resteront toujours dans notre mémoire : « Vos mains sont-elles pures ? » Il est vrai qu’une grande calamité a frappé la Franc-maçonnerie.
20Tout n’est que tristesse et douleur dans ce lieu où le sang marque les dalles de nos temples. Nietzsche a des paroles bouleversantes pour dire ce deuil qui frappe l’Occident depuis la ruine du Temple :
« Où est allé Dieu ? s’écria-t-il, je veux vous le dire ! Nous l’avons tué – vous et moi ! Nous tous, nous sommes ses assassins ! […] N’entendons-nous rien encore du bruit des fossoyeurs qui enterrent Dieu ? Ne sentons-nous rien encore de la décomposition divine ? – les dieux, eux aussi, se décomposent ! Dieu est mort ! Dieu reste mort ! Et c’est nous qui l’avons tué ! Comment nous consolerons-nous, nous, les meurtriers des meurtriers ? Ce que le monde a possédé jusqu’à présent de plus sacré et de plus puissant a perdu son sang sous nos couteaux – qui effacera de nous ce sang ? Avec quelle eau pourrons-nous nous purifier ? Quelles expiations, quels jeux sacrés serons-nous forcés d’inventer ? La grandeur de cet acte n’est-elle pas trop grande pour nous ? Ne sommes-nous pas forcés de devenir nous-mêmes des dieux pour du moins paraître digne des dieux [7] ? »
Chateaubriand
Chateaubriand
22Ce texte extraordinaire résume le monologue d’un mauvais Compagnon qui ne dormirait pas dans la caverne de sa fuite, son poignard auprès de lui. On y retrouve encore le romantisme de Chateaubriand décrivant la profanation de la tombe des rois sous la Révolution. On y trouve surtout le nom même de nos rites : JEUX FUNEBRES ! Nous ne sommes pas des libertins irréfléchis, nous n’avons rien de commun avec les dévots, nous jouons un jeu funèbre, le jeu funèbre suprême où notre Maître Hiram joue son éternité. Seulement, avec sa mort, ce n’est pas seulement la mort du meilleur des hommes qui est impliquée, mais la mort indicible, définitive, inauguratrice de l’Immortalité même – la mort de Dieu ! L’urgence du rite ne peut que mettre en résonance la mort du Maître et le crépuscule du Dieu [8].
23Par le rite, le G.A.D.L.U. devient un des noms de la mort de Dieu, non pas un nom criminel, mais le nom d’une pérennisation rituelle de l’idée divine par-delà le dépassement du Dieu de la religion. Hegel avait déjà une idée de ce dépassement de Dieu par-delà sa mort, et il a nommé ce dépassement « savoir absolu » ou le savoir libre de Dieu [9]. Le G.A.D.L.U. qui meurt et renaît avec Hiram est le passage de Dieu à l’universalité de ce savoir et c’est le privilège du tombeau du Maître de nous y donner accès : « A quoi servent donc ces églises, demande encore Nietzsche, si elles ne sont les tombes et les tombeaux de Dieu [10] ? » A quoi servent les loges si elles ne sont pas le tombeau des religions et la renaissance des Maîtres ?
Quelle lucidité supérieure nous conduit donc à entretenir la mémoire de la faute, au-delà des invraisemblances de l’histoire et des soi-disant « retours du religieux » ?
24Peu nombreux sont sans doute les Maçons qui accepteront l’idée qu’ils sont engagés dans un tel rite funèbre, où le principe de toute croyance lui-même est impliqué. Mais comment hésiteront-ils encore longtemps sur cette hypothèse après toute la force de l’énoncé nietzschéen ? Si quelqu’un devait faire « bouillir » pour les Maçons, n’était-ce pas celui qui montre de quel crime les frères sont solidaires et quelle lucidité supérieure les conduit à poursuivre la mémoire de leur faute, au-delà même des vraisemblances de l’histoire et des retours du religieux qui animent le devant de la scène ?
25Les frères font mémoire ensemble de la mort de leur père qu’ils ont tué. Freud a réécrit l’histoire biblique sur cette hypothèse dans Totem et Tabou et, cette hypothèse, il ne pouvait la tenir d’une autre source que de la Maçonnerie à laquelle, par ses fidélités juives, il était loin d’être étranger. Nietzsche appartient à ce même mouvement de divulgation de la Maçonnerie qui pourrait constituer le moteur caché de la philosophie. Romantisme, anti-romantisme de la faute, du sang, du tombeau, de la relève, de la parole … ces thèmes de la critique nietzschéenne sont au cœur d’une initiation, la nôtre, qui essaie de réparer la faute d’un crime inexpiable dont l’objet disparaît dans l’énormité du geste qui l’accomplit. Et le dessein de relève est commun, même si les termes sont différents. Nietzsche sait-il encore ici s’il parle du Maître – ou de Dieu lui-même ?
Freud
Freud
« Vous n’êtes ressuscités que depuis qu’il gît dans la tombe. C’est maintenant seulement que revient le grand Midi, maintenant l’homme supérieur devient – maître <Herr> [11] ! »
27Ces propositions brûlantes, qui les prononce ? Quel Frère sans tablier nous les susurre et nous les impose ? Quel théâtre commun à la Maçonnerie et à la Philosophie est ici mobilisé pour notre plus grand trouble ?
28On doit demander, pour finir : qu’est-ce qu’un Maître ? Une série d’accidents a livré des initiations très puissantes, mais toujours incomplètes, à la vie profane, mettant l’œuvre maçonnique à la disposition de tous les talents et confondant la puissance et la Maîtrise. Si l’initiation tourne toujours, d’une certaine façon, à la contre-initiation, c’est toujours la faute de mauvais Compagnons. Les mauvais Compagnons ont tué Hiram et Zarathoustra s’insurge. Mais nous sommes tous de mauvais Compagnons et la prédication de Zarathoustra nous laisse finalement seuls face à la nécessité énigmatique d’un Surhomme qui soit un Maître. Dieu alors ne nous fait presque pas d’ombre.
III. La relève de Zarathoustra
29Pour entendre Zarathoustra en Maçon (comme Mozart devinait déjà Sarastro dans Don Giovanni), il serait utile de se tenir à quelques règles de sagesse, que Nietzsche lui-même suggère, mais qui permettent de donner des limites au duel débridé qu’il finira par instaurer entre le Christ et Dionysos. Ce duel n’est pas le nôtre, et nous aurions tort de nous fourvoyer dans cette logique d’opposition qui, littéralement, a eu raison de l’auteur du Zarathoustra. Voici, en première approximation, ces nouvelles tables d’une Maîtrise restaurée sous les auspices conjoints de Zarathoustra et d’Hiram :
301) Nous devons d’abord craindre le destin des hommes supérieurs qui, dans leur détresse mal surmontée, ne craignent pas de revenir à la croyance. Car pour Nietzsche, le meurtrier de Dieu est si honteux de son propre ressentiment contre l’ancien monde qu’il finit par adorer n’importe quoi, pourvu qu’on adore. Souvenons-nous donc de l’exclamation de Zarathoustra quand il retrouve tous les hommes supérieurs en train d’adorer un âne dans sa caverne :
« Et toi, dit Zarathoustra au voyageur et à l’ombre, tu t’appelles esprit libre, tu te figures être un esprit libre ? Et tu te livres ici à de pareilles idolâtries et à de pareilles mômeries ? […] »
« C’est triste, en effet, répondirent le voyageur et l’ombre, tu as raison : qu’y puis-je ? Le Dieu ancien revit, ô Zarathoustra, tu diras ce que tu voudras [12]. »
32Et l’avertissement va loin car il pressent exactement les périls de notre temps et les tentations des meilleurs esprits :
« Garde-toi qu’une foi étroite ne finisse par s’emparer de toi, une illusion dure et sévère ! Car désormais tu es séduit et tenté par tout ce qui est étroit et solide [13]. »
342) Nous devons cependant résister aux oppositions simples auxquelles Nietzsche le protestant nous invite : non seulement Dionysos d’un côté, le Crucifié de l’autre, mais encore le Croyant et le Créateur. Par exemple, je lis ceci dans Ecce homo, à propos de Dante :
« Dante, si on le compare à Zarathoustra, n’est qu’un croyant, et non point quelqu’un qui crée d’abord la vérité, un esprit qui domine le monde, une fatalité [14]. »
Il est impossible de ne pas reconnaître en Dante le père de la patrie, le paladin de l’empire et l’amoureux endeuillé
36Cette proposition est au moins deux fois fausse : d’abord parce qu’il est impossible de ne pas reconnaître, dans l’inventeur de la langue italienne, le père de la patrie, le paladin de l’Empire et l’amoureux endeuillé, pèlerin sous la terre, une fatalité créatrice de civilisation, au sens où l’entend Nietzsche, mais parce que la question de l’ésotérisme de Dante, celle de son hétérodoxie complexe, celle de ses alliances avec le templarisme et le soufisme ne sont pas même entrevues, malgré la référence de principe à la Gaya Scienza, au « Gai savoir » des troubadours ! Ne nous hâtons pas de taxer de croyant celui qui nomme Dieu et vérifions d’abord quel usage il en fait.
Dante
Dante
Wagner
Wagner
373) Tout helléniste d’exception qu’il soit, Nietzsche est dépourvu d’un véritable rapport à la tradition. On ne peut écrire : « Avant Zarathoustra, il n’existe pas de sagesse, pas de recherche de l’âme, pas d’art de la parole [15] ». Au contraire, nos symboles sont plus anciens que nous-mêmes et notre création ne suppose pas l’abolition du monde ancien, mais seulement un art de « rassembler ce qui est épars ». C’est pourquoi on ne peut soutenir cette politique de rupture ni des affirmations qui, pour être toujours drôles, ne peuvent pas être soutenues sans sottise. Qui laissera passer sans broncher ce dithyrambe sur le Zarathoustra :
« La plus puissante force de symbolisation qui ait jamais existé est pauvreté et jeu d’enfant si on la compare à ce retour de la langue à la nature même de l’image [16]. » ?
394) Nietzsche a eu des sentiments plus que partagés à l’égard de Wagner. Mais il aura pour finir, à Turin, des aveux qui doivent rester gravés dans notre mémoire :
« Si je soutiens dans cet écrit que Wagner est nocif, je soutiens également qu’il est indispensable à quelqu’un – au philosophe. Les autres personnes peuvent peut-être se passer de Wagner : mais le philosophe n’est pas libre de s’abstenir de Wagner [17]. »
41Le philosophe est le maître des poisons et il s’expose volontairement à ce qui peut nuire au profane. N’en est-il pas de même de la Franc-maçonnerie? Elle peut être nocive à bien des gens, mais elle est indispensable au philosophe. Si elle est le requiem des vivants et le crépuscule des ombres, Wagner nous l’enseigne avant Nietzche.
Après Wagner, la franc-maçonnerie est un savoir endeuillé qui baigne dans une atmosphère de déclin. Gardons-lui ce goût des ombres et des cavernes !
425) Après Wagner, avec Wagner, la Franc-maçonnerie est un savoir endeuillé qui baigne dans une atmosphère de déclin. Elle est un savoir du soir. Elle a son midi, mais elle enseigne à voir sombrer l’Etoile flamboyante à l’Orient. Gardons-lui ce goût des ombres et des cavernes ; c’est là qu’elle prospère le mieux. C’est la condition tout antique de son pouvoir de divination. Les Mystères se célébraient la nuit. Sans ce minuit, il n’y a pas danse de Zarathoustra ni profondeur de l’Eternel Retour. Nietzsche lui-même savait se faire voyageur comme Wotan et ombre parmi les ombres. Il y décèle pourtant une faiblesse à surveiller :
« Suis-je donc un fantôme ? Que dois-je penser de cela ? dit Zarathoustra. Mais c’était peut-être mon ombre. Vous avez entendu parler déjà du voyageur et de son ombre ?
Une chose est certaine : il faut que je la tienne plus sévèrement, autrement elle finira par ma gâter ma réputation [18]. »
44Plus loin dans l’œuvre, Zarathoustra veut échapper à son ombre et finira par proposer à celle-ci de participer au grand réveil de l’homme supérieur sur lequel s’achève sa prédication, avec l’issue que l’on sait : Zarathoustra finit par se retrouver seul à l’heure ultime [19]. Mais nul voyageur n’échappe à l’ombre qu’il projette sur la terre. C’est la leçon la plus profonde de l’initié au pays des morts. Notre rite est un jeu d’ombres qui nous promet la lumière quand, ayant sorti notre glaive, nous écartons les âmes défuntes qui s’attachent à nous. L’Eternel retour du même c’est aussi l’Eternel retour des ombres. Nietzsche s’est libéré trop tôt de la sagesse de son ombre.
456) L’ombre est la chance de Zarathoustra et le pouvoir qu’il pouvait partager sinon avec Hiram, au moins avec ses meurtriers. Mais Nietzsche aura un autre sort. Quittant la fraternité des ombres, il se vouera au théâtre des masques. C’est ainsi qu’il finira par rencontrer la folie :
« Cet orgueil spirituel silencieux, cette fierté de l’élu de la connaissance, de celui qui, en « initié », est presque sacrifié, a besoin de toutes les sortes de déguisement pour se protéger de l’attachement des mains opportunes et compatissantes et surtout de tout ce qui n’est pas son égal par la souffrance. La profonde douleur rend noble : elle sépare […] Il y a des esprits libres et insolites qui voudraient cacher et nier qu’au fond ils sont des cœurs irrémédiablement brisés – c’est le cas d’Hamlet : et alors la folie elle-même peut être le masque pour un savoir fatal et trop certain. [20] »
Il y a un regard maçonnique à porter sur la destinée de Nietzsche. Certes, il ne sera jamais pour nous ni Goethe ni Mozart, mais nous ne pouvons nous soustraire à cette épreuve
477) De même, donc, qu’il y a une évaluation nietzschéenne de la Maçonnerie, il y a un regard maçonnique, et même de l’ésotérisme occidental, sur la destinée de Nietzsche [21]. Cet esprit libre peut libérer le nôtre, en interposant son jeu de tarot au cœur de notre initiation. Mais Nietzsche ne sera jamais pour nous ni Goethe ni Mozart, il n’a pas la maîtrise des venins d’un Paracelse, ni ne connaît la colère de Dieu et la « faim du Mercure » comme Jacob Boehme.
Goethe
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48Il illustre un drame de la libre pensée telle qu’il vient jusqu’à nous depuis la Renaissance. Zarathoustra, le destructeur et le créateur, est la figure ultime d’une Renaissance de géants et d’expérimentateurs, et se soumettre à Zarathoustra, ne serait-ce qu’un instant, c’est accepter le regard de Vinci ou de Giordano Bruno sur nos rites et nos mythes. Nous ne pouvons nous soustraire à cette épreuve si nous avons compris que, pour nous, la liberté est Devoir et le Devoir est Fatalité, autrement, si nous avons quitté les idées vulgaires de la liberté. Notre liberté est dénuement, serment, voyage, mort et relève et c’est pourquoi elle nous contraint à des épreuves et des ivresses aussi insolites que celles qu’aura traversées Nietzsche, mais non moins chargées de risques.
Notes
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[1]
Il n’est pas que le Voyage en Orient de Nerval qui soit fécond pour enrichir notre idée du destin symbolique d’Hiram. Dans un ouvrage contesté par les modernes philologues, mais d’une très grande richesse de signification, Nicolae Densusianu avait soutenu l’hypothèse d’une culture « pélasgique », préhistorique et hyperboréenne, qui aurait constitué, depuis les Carpates et la civilisation geto-dace, le centre de rayonnement d’une langue et d’une spiritualité dont on retrouvera plus tard des traces dans le monde celte, à Troie ou dans les installations pré-latines de l’Italie. Or le héros éponyme de ce peuple est ARIM ou ARMIN, d’où ARMINIUS, ou HERMANN, le guerrier indo-européen déjà identifié par Leibniz à la source de la civilisation occidentale (cf. Théod., § 136-143). Emporté par son hypothèse, Densusianu finit par suggérer un lien possible entre cet ARIM et MITHRA, ARIM et JANUS (on connaît d’ailleurs le lien entre Hiram et les portes du Temple) et même PROMETHEE, le héros pétrifié des Carpates. Entre cet ARIM et notre HIRAM, le lien existe, du moins dans la langue des oiseaux, et élargit considérablement l’horizon de la Maçonnerie adonhiramite ; cf. Nicolae Densusianu, Dacia preistorica, Bucarest, 1913, facsimilé, Bucarest 2002.
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[2]
Nietzsche, Ecce homo, éd. Bouquins, p. 1160.
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[3]
Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra, III, Des transfuges, § 2, éd. Bouquins, p. 424-25. On peut traduire aussi par les apostats ou les renégats.
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[4]
APZ, II, Dans les îles bienheureuses, p. 349.
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[5]
APZ, III, De la vertu qui rapetisse, § 3, p. 417.
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[6]
François Rabelais, Tiers Livre, Prologue. Ou avec quelques variantes de grand sens : « Puis doncques qu’en nostre faculté n’est en l’art d’architecture tant promouvoir come ils font, je suis délibéré faire ce que fist Regnault de Montauban, servir les massons, mettre bouillir pour les massons ; et m’auront, puis que compagnon ne puis estre, pour auditeur, je dis infatigable, de leurs trescelestes escripts », Cinquième livre, Prologue. L’érudition s’est toujours mise en peine de savoir quels étaient les écrits très célestes des Maçons. Rappelons simplement que, dans la légende des Quatre Fils Aymon, Renaud de Montauban entreprend de servir, pour pénitence de sa vie passée, les bâtisseurs de Saint Pierre de Cologne.
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[7]
Nietzsche, Gai savoir, § 125, éd. Bouquins, p. 132.
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[8]
Toute la complexité de ce mouvement est résumé par le nom ADONIRAM et l’adjectif « adonhiramite » qu’on en a tiré pour qualifier la Maçonnerie qui place Hiram en son centre : car Hiram et Adonai s’y trouvent si mêlés que, bien sûr, Adoniram, c’est Seigneur Hiram, mais c’est aussi, par un renversement inévitable, le Seigneur comme Hiram, Adonai sous les traits d’Hiram. L’analogie avec l’incarnation et la mort du Christ devient alors troublante, mais c’est pour entraîner Hiram et Christ dans une même mythologie du crépuscule des dieux.
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[9]
Il faut évaluer à sa juste mesure cette proposition de Nietzsche plus technique qu’elle n’en a l’air : « Celui qui a dit : ‘Dieu est esprit’ – a fait jusqu’à présent sur la terre le plus grand pas et le plus grand bond vers l’incrédulité : ce ne sont pas là des paroles faciles à réparer sur la terre ! », APZ, IV, La fête de l’âne, § 1, p. 533.
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[10]
Ibid.
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[11]
APZ, III, De l’homme supérieur, § 2, p. 510.
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[12]
APZ, IV, La fête de l’âne, § 1, p. 533. Le pape disait à Zarathoustra : « Plutôt adorer Dieu sous cette forme que de ne point l’adorer du tout. », ibid.
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[13]
APZ, IV, L’Ombre, p. 500. Pour se persuader de la réalité de ce retour à la religion au sein même de la pensée la plus critique et la plus révolutionnaire, il suffit de lire le dernier livre de Jean Birnbaum, Les Maoccidents, Un néoconservatisme à la française, Paris, Stock, 2009.
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[14]
Ecce Homo, p. 1176.
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[15]
Ecce Homo, p. 1176.
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[16]
Ecce Homo, p. 1177.
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[17]
Nietzsche, Le Cas Wagner, Avant-propos, éd. Bouquins, p. 900.
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[18]
APZ, II, Des grands événements, p. 387. Le Voyageur et son ombre est le titre du premier ouvrage de Nietzsche après la séparation avec Wagner.
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[19]
APZ, IV, L’Ombre : « Mon ombre m’appelle ? Qu’importe mon ombre ! Qu’elle me coure après ! moi – je me sauve d’elle. », p. 498. Mais la suite de l’analyse est d’une subtilité et d’une mélancolie extrêmes.
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[20]
Ecce Homo, « Le psychologue prend la parole », § 3, p. 1123.
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[21]
Dans un séminaire célèbre, Carl Gustav Jung s’y est exercé, même si c’était pour vérifier le bien fondé de son analyse des archétypes et du Soi ; cf. Nietzsche’s Zarathoustra : Notes of the Seminar Given in 1934-1939, James L. Jarrett editor, Princeton univ., 1997.