Couverture de CDLJ_2004

Article de revue

Puissance et enjeu de l'interprétation judiciaire de la loi. Approche pratique à partir d'un cas de responsabilité médicale

Pages 609 à 632

Notes

  • [1]
    Cass., ass. plén., 17 nov. 2000, Bull. Ass. plén., n° 9 ; 13 juill. 2001, Bull. Ass. plén., n° 10 ; 28 nov. 2001, Bull. Ass. plén., n° 15 et 16.
  • [2]
    Il est regrettable que le nom de ces personnes soit attaché à une polémique qui met en cause la légitimité éthique de leur demande et les a d'ailleurs conduits à s'en justifier publiquement dans un domaine qui relève de leur vie privée.
  • [3]
    V. par exemple B. Frydman, Le sens des lois. Histoire de l'interprétation et de la raison juridique, Bruxelles/Paris : Bruylant/LGDJ, 2005 et doctrine citée ; A. Papaux, Herméneutique juridique, qualification et abduction, Revue interdisciplinaire d'études juridiques, vol. 42, n°. 1, 1999, p. 85-123 ; P. Amselek, Interprétation et droit, Bruxelles-Paris, Ed. Bruylant-Presse 1985 ; G. Kalinowski, L'interprétation du droit : ses règles juridiques et logiques, Archives de philosophie du droit, tome 30, Sirey, p. 191 sq, univ. d'Aix-Marseille, 1985.
  • [4]
    L'auteur qui a présidé l'Assemblée plénière de la Cour de cassation qui a rendu les arrêts précités, ne peut en effet ni les critiquer ni les défendre. En outre le présent texte ne prend en compte que les éléments publics du débat qu'ils ont provoqué.
  • [5]
    P. Rémy, La part faite au juge. Pouvoirs, 2003, 107(4), 22-36. doi :10.3917/pouv.107.0022 ; G. Canivet, Conférence à l'Académie des sciences morales et politiques, 13 nov. 2006, Vision prospective de la Cour de cassation.
  • [6]
    V. en particulier J. Krynen, Le théâtre juridique, une histoire de la construction du droit, Gallimard, 2018.
  • [7]
    J. Krynen, Ibid.
  • [8]
    P. Rémy, loc. cit. L'expression en elle-même ambigüe, est l'objet d'interprétations diverses, v. par exemple E. Abesso Zambo, Une approche interdiscursive de la métaphore juridique ”le juge, bouche de la loi” : application au discours jurisprudentiel francophone, https://www.village-justice.com/articles/approche-interdiscursive-metaphore,10548.html
  • [9]
    F. Zénati, La nature de la Cour de cassation, Bulletin d'information de la Cour de cassation n° 575 du 15/04/2003, https://www.courdecassation.fr/publications_26/bulletin_information_cour_cassation_27/bulletins_information_2003_1615/n_575_1652/
  • [10]
    « Les tribunaux ne peuvent ni s'immiscer dans l'exercice du pouvoir législatif, ou suspendre l'exécution des lois, ni entreprendre sur les fonctions administratives, ou citer devant eux les administrateurs pour raison de leur fonction » (t. III, ch. v, art. 23 de la Constitution de 1791 ; L. 16-24 août 1790, art. 10).
  • [11]
    J. Krynen, loc. cit., Rémy P., loc. cit.
  • [12]
    J. Krynen, loc. cit., Rémy P., loc. cit.
  • [13]
    G. Bigot, Introduction historique au droit administratif depuis 1789, Paris, PUF, 2002.
  • [14]
    Dans les respects des compétences réservées par la jurisprudence du Conseil constitutionnel tirée de l'article 66 de la Constitution, pour l'autorité judiciaire, et du principe fondamental des lois de la République tiré de « la conception française de séparation des pouvoirs », pour les juridictions administratives. P. Wachsmann, Le Conseil constitutionnel et le principe de séparation des autorités administrative et judiciaire, Jus Politicum, n° 21, [http://juspoliticum.com/article/Le-Conseil-constitutionnel-et-le-principe-de-separation-des-autorites-administrative-et-judiciaire-1252.html]
  • [15]
    J. Krynen, loc. cit. ; G. Canivet, État de droit, libertés en France. Perspectives historiques. L'inachevé du droit, in Les libertés en France et au Royaume-Uni : état de droit, Rule of Law. À propos de l'anniversaire de la Grande Charte de 1215. Actes du colloque en hommage à Roger Errera, Paris, Société de législation comparée, 2016, p. 47-62 ; « Pathologie de la garantie de la liberté individuelle : le syndrome de confusion. Examen de la jurisprudence du Conseil constitutionnel relative à l'interprétation de l'article 66 de la Constitution », in Humanisme et justice : mélanges en l'honneur de Geneviève Giudicelli-Delage, Paris, Dalloz, 2016, p. 323-347 ; P. Wachsmann, Ibid.
  • [16]
    Art. 29 et 30 de la Loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République.
  • [17]
    Art. 61-1 et 62 de la Constitution.
  • [18]
    N. Molfessis, La résistance immédiate de la Cour de cassation à la QPC, Pouvoirs, vol. 137, n°. 2, 2011, p. 83-99.
  • [19]
    Il est vraisemblable qu'à terme, le Conseil d'État et la Cour de cassation s'empareront de la jurisprudence du Conseil constitutionnel pour l'interpréter afin de décider du caractère sérieux ou non de la question de constitutionnalité sans que le Conseil constitutionnel dispose de moyens procéduraux directs de s'y opposer ; A. Roblot-Troizier, La QPC, le Conseil d'État et la Cour de cassation, Les Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, vol. 40, n°. 3, 2013, p. 49-61.
  • [20]
    Par l'art. 23-2, al. 5 de l'Ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : « En tout état de cause, la juridiction doit, lorsqu'elle est saisie de moyens contestant la conformité d'une disposition législative d'une part aux droits et libertés garantis par la Constitution et d'autre part aux engagements internationaux de la France, se prononcer par priorité sur la transmission de la question de constitutionnalité au Conseil d'État ou à la Cour de cassation ».
  • [21]
    CJUE, 22 juin 2010, « ...l'article 267 TFUE s'oppose à une législation d'un État membre qui instaure une procédure incidente de contrôle de constitutionnalité des lois nationales, pour autant que le caractère prioritaire de cette procédure a pour conséquence d'empêcher, tant avant la transmission d'une question de constitutionnalité à la juridiction nationale chargée d'exercer le contrôle de constitutionnalité des lois que, le cas échéant, après la décision de cette juridiction sur ladite question, toutes les autres juridictions nationales d'exercer leur faculté ou de satisfaire à leur obligation de saisir la Cour de questions préjudicielles ». X. Magnon, La QPC face au droit de l'Union : la brute, les bons et le truand, Revue française de droit constitutionnel, vol. 84, n°. 4, 2010, p. 761-791.
  • [22]
    Ancien art. L162-12 du CSP.
  • [23]
    Pour une classification de ces affections v. P. Engelmann, Les interruptions médicales de grossesse. Évolutions législatives, témoignage et questions, Laennec, vol. tome 50, n°. 4, 2002, p. 16-26.
  • [24]
    Cass. 20 mai 1936, Mercier.
  • [25]
    L'interruption volontaire de grossesse pour motif médical peut être envisagée à tout moment de la grossesse après avis de deux médecins membres d'une équipe pluridisciplinaires attestant de la forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité (art. L2213-1 du CSP).
  • [26]
    Ass. nat. : Amendement au projet de loi de modernisation sociale déposé par M. Mattei, non adopté (séance du 10 janvier 2001), Proposition de résolution de MM. Jean-François Mattei, Jean-Louis Debré et Philippe Douste-Blazy tendant à la création d'une commission d'enquête sur la situation des personnes handicapées en France. (22 mai 2001), Rapport n° 3260 de M. Francis Hammel au nom de la commission des affaires culturelles, Proposition de loi de MM. Georges Sarre et Jean-Pierre Chevènement, visant à garantir l'égale dignité de toute vie humaine (26 sept. 2001), Question écrite de M. Léonce Deprez à Mme la ministre déléguée à la famille (1er oct. 2001), Question écrite de M. Léonce Deprez à M. le ministre chargé des relations avec le parlement (1er oct. 2001), Question au gouvernement de M. Jean-François Chossy (27 nov. 2001), Proposition de loi de M.M. Jean-François Mattei, Jean-Louis Debré et Philippe Douste-Blazy relative à la solidarité nationale et à l'indemnisation des handicaps congénitaux (3 déc. 2001), art. 16 et 1382 du code civil amendement déposé par le gouvernement (débats du 10 janvier 2002), Amendement au projet de loi de modernisation sociale déposé par MM. Fouché et Mattei, retiré à l'issue du débat (séance du 6 décembre 2001).
    Sénat : Amendement au projet de loi relatif à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception, déposé par M. Claude Huriet (séance publique du 28 mars 2001). Supprimé par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture (séance du 17 avril 2001), Question écrite de M. Serge Mathieu (4 oct. 2001), Proposition de loi de M. Bernard Fournier et plusieurs de ses collègues tendant à interdire l'indemnisation d'un "préjudice de naissance".
    Proposition de loi de M. Jacques Blanc, relative à la solidarité nationale et à l'indemnisation des handicaps congénitaux (7 déc. 2001), Question au gouvernement de M. Robert Calmejane (7 déc. 2001), Rapport d'information fait au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la jurisprudence « Perruche », par M. René Garrec, 3 janvier 2002.
  • [27]
    Titre Ier : Solidarité envers les personnes handicapées, Article 1
    I. - Nul ne peut se prévaloir d'un préjudice du seul fait de sa naissance.
    La personne née avec un handicap dû à une faute médicale peut obtenir la réparation de son préjudice lorsque l'acte fautif a provoqué directement le handicap ou l'a aggravé, ou n'a pas permis de prendre les mesures susceptibles de l'atténuer.
    Lorsque la responsabilité d'un professionnel ou d'un établissement de santé est engagée vis-à-vis des parents d'un enfant né avec un handicap non décelé pendant la grossesse à la suite d'une faute caractérisée, les parents peuvent demander une indemnité au titre de leur seul préjudice. Ce préjudice ne saurait inclure les charges particulières découlant, tout au long de la vie de l'enfant, de ce handicap. La compensation de ce dernier relève de la solidarité nationale.
    Les dispositions du présent I sont applicables aux instances en cours, à l'exception de celles où il a été irrévocablement statué sur le principe de l'indemnisation.
    II. - Toute personne handicapée a droit, quelle que soit la cause de sa déficience, à la solidarité de l'ensemble de la collectivité nationale.
    III. - Le Conseil national consultatif des personnes handicapées est chargé, dans des conditions fixées par décret, d'évaluer la situation matérielle, financière et morale des personnes handicapées en France et des personnes handicapées de nationalité française établies hors de France prises en charge au titre de la solidarité nationale, et de présenter toutes les propositions jugées nécessaires au Parlement et au Gouvernement, visant à assurer, par une programmation pluriannuelle continue, la prise en charge de ces personnes.
  • [28]
    B. Girard, La responsabilité civile dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel, Jus Politicum, n° 21 [http://juspoliticum.com/article/La-responsabilite-civile-dans-la-jurisprudence-du-Conseil-constitutionnel-1253.html]
  • [29]
    M. Fabre-Magnan, L'affaire perruche : Pour une troisième voie, Droits, vol. 35, n° 1, 2002, p. 119-133.
  • [30]
    Avis rendu par le Conseil d'État sur les questions de droit posées par le tribunal administratif de Paris (affaire Draon), le 6 décembre 2003, JO du 12 janvier 2003).
  • [31]
    Stipulations du 1 de l'art. 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, art. 5, 8, 13 et 14 de cette convention, art. 1er du premier protocole additionnel à cette convention, art. 14 et 26 du pacte sur les droits civils et politiques.
  • [32]
    CEDH, Draon c. France, Maurice c. France, 6 oct. 2005.
  • [33]
    Décision n° 2010-2 QPC du 11 juin 2010, Mme Vivianne L. [Loi dite "anti-Perruche"], cons 23.
  • [34]
    Civ. 1re, 8 juill. 2008
  • [35]
    CE 24 févr. 2006, n° 250704 CE, Mme Levenez et M. Levenez, Lebon ; AJDA 2006. 520 ; ibid. 1272, note S. Hennette-Vauchez ; D. 2006. 812 ; RDSS 2006. 360, obs. P. Hennion-Jacquet ; RTD civ. 2006. 263, obs. J.-P. Marguénaud .
  • [36]
    Assemblée nationale, Rapport enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 décembre 2001 fait au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur les propositions de loi - de M. Jean-François Mattei (n° 3431), relative à la solidarité nationale et à l'indemnisation des handicaps congénitaux,- de M. Bernard Accoyer (n° 2844), instituant un moratoire sur les demandes en recherche de responsabilité du fait de la naissance ou du maintien de la vie, - de M. Jean-François Chossy (n° 2805), tendant à rendre irrecevable toute demande d'indemnisation du seul fait de sa naissance, par M. Jean-François Mattei.
  • [37]
    Rapport de la Mission « Droit et justice », Naissances handicapées et responsabilité, recherche sur l'impact de l'arrêt « Perruche » sur la jurisprudence et sur les pratiques en matière d'assurance médicale », http://anr-dpn.vjf.cnrs.fr/sites/default/files/133-RF_Labrusse-Riou_Rapport %20Perruche.pdf
  • [38]
    J. Krinen, op. cit., p. 19, s.
  • [39]
    J. Chevallier, Doctrine juridique et science juridique, Droit et Société, n° 50, 2002, p. 103-119.
  • [40]
    P. Rémy, le rôle de l'exégèse dans l'enseignement du droit au XIXe siècle, https://univ-droit.fr/docs/recherche/rhfd/pdf/02-1985/02-1985-p091-105.pdf.
  • [41]
    D. de Béchillon, Porter atteinte aux catégories anthropologiques fondamentales ? Réflexions, à propos de la controverse Perruche, sur une figure contemporaine de la rhétorique universitaire, RTD civ. 2002. 47 ; P.Y. Gauthier, Les distances du juge, à propos d'un débat éthique sur la responsabilité civile, JCP 2001, I, 287, Notes autour de l'affaire P..., Droits, Revue française de théorie, de philosophie et de culture juridique, 2002, n° 35, p. 147 ; M. Gobert, La Cour de cassation méritait-elle le pilori (À propos de l'arrêt de l'Assemblée plénière du 17 novembre 2000), LPA, 8 déc. 2000, p. 4, République, Cour de cassation et échographie (à propos des arrêts d'Assemblée plénière du 13 juillet 2001), LPA, 21 nov. 2001, p. 7 s., Handicap et démocratie, Revue Commentaire, printemps 2002, p. 29 s. ; T. Pech, Retour sur la jurisprudence Perruche, Esprit, janv. 2002. ; THERY, P., Un grand bruit de doctrine, in Ruptures, mouvements et continuité du droit, Autour de Michelle Gobert, Economica, 2004, p. 113 s. ; N. Molfessis, La controverse doctrinale et l'exigence de transparence de la doctrine, RTDC 2003. 161 s. Sur la distinction entre doctrine et sciences juridique, v., J. Chevallier, loc. cit.
  • [42]
    M. Troper, Qu'est-ce que la philosophie du droit ?, éd., La philosophie du droit. Presses Universitaires de France, 2011, p. 9-25 ; J.-P. Chazal, Philosophie du droit et théorie du droit, ou l'illusion scientifique, Revue interdisciplinaire d'études juridiques, vol. volume 46, n°. 1, 2001, p. 39-80.
  • [43]
    C. Bachelard-Jobart, L'eugénisme, la science et le droit, collec. Partage du savoir, PUF, 2001 ; O. Cayla, Y. Thomas, Du droit de ne pas naître. À propos de l'affaire Perruche, Gallimard, collec. Le débat, 2002 ; J. Chanteur, Condamnés à mort ou condamnés à vivre ? Autour de l'arrêt Perruche, Éditions Factuel, 2002 ; M. Iacub, Penser les droits de la naissance, PUF, Questions d'éthique, 2002 ; M. Iacub, P. Jouannet, (collectif), Juger la vie, La découverte, 2001 ; M. Iacub, Droit de ne pas naître ou liberté de procréer ?, in Le crime était presque sexuel, et autres essais de casuistiques judiciaires, Edel, 2002. B. Edelman, L'arrêt « Perruche » : une liberté pour la mort ? D. 2002. 2349 ; G. Lhuilier, Les juristes sont-ils des clercs ? Sur la dimension anthropologique du droit, Esprit, nov. 2002, p. 183-195 ; D. Salas, L'arrêt « Perruche », un scandale qui n'a pas eu lieu, Justices, 14 mai 2001, hors-série.
  • [44]
    P. Brunet, Argument sociologique et théorie de l'interprétation, in D. Fenouillet, (dir.), L'argument sociologique en droit. Pluriel et singularité, Paris, Dalloz, coll. Thèmes et Commentaires, 2015, p. 101-116.
  • [45]
    V. par exemple, O. Cayla, Y. Thomas, Du droit de ne pas naître. À propos de l'affaire Perruche, Gallimard, collec. Le débat, 2002.
  • [46]
    E. Mackaay, La règle juridique observée par le prisme de l'économiste - Une histoire stylisée du mouvement de l'analyse économique du droit, RIDE 1986. 43 s. ; E. Mackaay, S. Rousseau, Analyse économique du droit, Dalloz, coll. Méthodes du droit, 2008 ; Y. Gabuthy, Analyse économique du droit : présentation générale, Économie et prévision 2013, p. 202.
  • [47]
    Rapport de la Mission « Droit et Justice », III, L'impact de la réparation du handicap de naissance sur l'assurance médicale et sur les mécanismes de solidarité nationale ; L'assurance de responsabilité civile médicale au 1er janvier 2005, Assurer (Lettre d'information bimensuelle éditée par la Fédération française des sociétés d'assurance) n° 42, 26 janv. 2005 ; L. Dubouis, Assurance privée et responsabilité médicale, RDSS 39 (3), 2003, p. 353 ; L. Hemlinger, D. Martin, La judiciarisation de la médecine : mythe et réalité, revue Sève, n° 5, 2005 p. 39 ; La crise de l'assurance responsabilité civile médicale, D. 2003, Point de vue p. 142 ; La responsabilité médicale : la loi du 30 décembre 2002 modifiant la loi du 4 mars 2002, D. 2003. Chron. 361 ; J. Lansac, M. Sabouraud, Les conséquences de la judiciarisation de la médecine sur la pratique médicale, revue Sève, n° 5, 2005 p. 47 ; C. Rade, La solidarité au secours de la responsabilité, Resp. civ. et ass. 2003, chr. n° 5 ; P. Villeneuve, Les vicissitudes de l'assurance de responsabilité civile des professionnels de santé, LPA, 17 déc. 2004.
  • [48]
    V. le rapport sur l'impact des décisions de justice de la Mission Droit et Justice.
  • [49]
    Rapport précité.
  • [50]
    P. Amselek, éd., 1995.
  • [51]
    G. Kalinowski, loc. cit. ; D. Bourcier, P. Mackay, éd., 1992.
  • [52]
    Il faudrait comprendre dans ces acteurs les praticiens (avocats, juristes d'entreprises, juristes administratifs) qui expriment leur point de vue sur l'application des règles.
  • [53]
    M. Van de Kerchove, M. Ost, 1988.
  • [54]
    J. Hauser, Le juge et la loi, Pouvoirs, vol. 114, n°. 3, 2005, p. 139-153.
  • [55]
    H. Capitant, F. Terre, Y. Lequette, Les grands arrêts de la jurisprudence civile T1 et T2, 13e édition, Dalloz, 2015 ; J. Pradel, A. Varinard, Les grands arrêts de la procédure pénale, 10e édition, Dalloz 2019, Les grands arrêts du droit pénal général, 11e édition, Dalloz 2018.
  • [56]
    Art. 1014 du c. pr. civ., L131-6 du COJ.
  • [57]
    Art. L. 441-1 à L. 441-4 et R. 441-1 du COJ.
  • [58]
    Décision n° 2010-39 QPC du 6 octobre 2010, Mmes Isabelle D. et Isabelle B. [Adoption au sein d'un couple non marié], cons 2.
  • [59]
    Voir supra § **
  • [60]
    Civ. 1re, 26 mars 1996.
  • [61]
    Cass., ass. plén., 28 nov. 2001, Bull. Ass. plén., n° 15 et 16 ; JCP 2002, II, n° 10018.
  • [62]
    J. Massip, J. Carbonnier, un législateur attentif à la jurisprudence et à la pratique judiciaire, https://www.courdecassation.fr/IMG/File/5-intervention_massip.pdf
  • [63]
    J.-P. Duprat, La représentation, le législateur et le juge, in Le concept de représentation dans la pensée politique, Presses universitaires d'Aix-Marseille, 2015, p. 469-489.
  • [64]
    J.-M. Sauvé, L'étendue et les limites du pouvoir du juge, Intervention à l'occasion d'un Colloque européen sur le juge et la politique le 31 octobre 2014, https://www.conseil-etat.fr/actualites/discours-et-interventions/l-etendue-et-les-limites-du-pouvoir-du-juge ; G. Canivet, Activisme judiciaire et prudence interprétative in La création du droit par le juge, Paris, Dalloz, 2007.
  • [65]
    Pour un inventaire du contentieux de l'indemnisation du handicap d'origine génétique devant les juridictions de l'ordre judiciaire v. le rapport précité de la Mission Droit et Justice sur l'impact des décisions de justice II, A.
  • [66]
    V. par exemple pour la Cour suprême des États-Unis, la réflexion de S. Breyer, La Cour suprême, l'Amérique et son histoire, Odile Jacob 2011 et, pour la Cour suprême d'Israël, A. Barak, L'exercice de la fonction juridictionnelle vu par un juge : Le rôle de la Cour suprême dans une démocratie, Presses Universitaires de France, Revue française de droit constitutionnel, 2006/2 n° 66, p. 227 à 302.
  • [67]
    A. Barak, Ibid.
  • [68]
    D. Lochak, Le juge doit-il appliquer une loi inique ?, Le Genre humain, vol. 28, n°. 1, 1994, p. 29-39. ; Concl. J. Sainte-Rose, sous C. cass A.P. 17 nov. 2000, JCP 2000, II, 10438, 13 juill. 2001, JCP 2001, II, 10601, 28 nov. 2001, JCP 2002, II, n° 10018.
  • [69]
    J. Sainte-Rose, Concl. sous C. cass A.P., 17 nov. 2000, JCP 2000, II, 10438, 13 juill. 2001, JCP 2001, II, 10601, 28 nov. 2001, JCP 2002, II, n° 10018 ; Le droit et la vie, RRJ, Droit prospectif, 2002-3, p. 1131. À propos de l'affaire Perruche, Droits, Revue française de théorie, de philosophie et de culture juridique, 2002, n° 35, p. 142, Le juge face aux normes de la biomédecine, in Feuillet-Le Mintier (dir.), Normativité et biomédecine, Economica, 2003, p. 249-258.
  • [70]
    Assemblée nationale, Rapport Mattei, précité.
  • [71]
    Civ. 1re, 26 mars 1996, Bulletin 1996 n° 155 p. 109.
  • [72]
    CE., 14 févr. 1997, CHR de Nice/Quarez, JCP 1997, II, 22828, note J. Moreau ; RFDA 1997. 374, concl. V. Pécresse.
  • [73]
    Conclusions Valérie Pécresse précitées « ... nous ne pensons pas qu'un enfant puisse se plaindre d'être né tel qu'il a été conçu par ses parents (...) Affirmer l'inverse serait juger qu'il existe des vies qui ne valent pas la peine d'être vécues et imposer à la mère une sorte d'obligation de recourir, en cas de diagnostic alarmant, à une interruption de grossesse ».
  • [74]
    Art. L431-5 à L431-10, R431-11 à R431-14 du COJ.
  • [75]
    B. Markesinis, Réflexions d'un comparatiste anglais sur et à partir de l'arrêt Perruche, RTD civ. 2001. 77.
  • [76]
    Concl. J. Sainte Rose, précitées.
  • [77]
    Le Tribunal fédéral suisse, par exemple.
  • [78]
    Rapports précités P. Sargos et H. Blondet.
  • [79]
    Cass., Note relative à la structure des arrêts et avis et à leur motivation en forme développée, déc. 2018.
  • [80]
    Sur la pertinence de l'opposition entre jusnaturalisme et positivisme v. J.-P. Chazal, loc.cit.
  • [81]
    Autorité de la concurrence, Décision n° 06-D-34 du 9 novembre 2006 relative à des saisines concernant le domaine de l'assurance de la responsabilité civile médicale ; IGAS Rapport d'enquête sur l'assurance de responsabilité médicale, janv. 2004.
  • [82]
    Rapport de la Mission Droit et Justice, préc.
  • [83]
    Rapport de la Mission Droit et Justice, préc.
  • [84]
    Rapport de la Mission Droit et Justice, préc.
  • [85]
    Loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées (1).
  • [86]
    CEDH, 6 oct. 2005, n° 1513/03, Draon c/ France, AJDA 2005. 1924, obs. M.-C. Montecler ; D. 2005. 2546, obs. M.-C. de Montecler ; ibid. 2006. 1200, obs. J.-C. Galloux et H. Gaumont-Prat ; RDSS 2006. 149, obs. P. Hennion-Jacquet ; RTD civ. 2005. 743, obs. J.-P. Marguénaud ; ibid. 798, obs. T. Revet .
  • [87]
    Rapport de la Mission Droit et Justice, précité.
  • [88]
    Civ. 16 juin 1896.
  • [89]
    Loi du 9 avril 1898 Concernant les responsabilités dans les accidents du travail ; F. Ewald, Formation de la notion d'accident du travail in : Sociologie du travail, 23[#7497] année n° 1, Janvier-mars 1981. Sociologie et justice. p. 3-13.
  • [90]
    V. le débat actuel à propos du Projet de loi relatif à la bioéthique.
  • [91]
    C'est la mission de l'Agence de la biomédecine.
  • [92]
    V. le rapport de la Cour des comptes sur l'allocation aux adultes handicapés du 19 novembre 2019 ; l'Agence de la biomédecine, 2008.
  • [93]
    V. Autorité de la concurrence, Décision n° 06-D-34 du 9 novembre 2006 précitée.
« ...Il est trop heureux que la nécessité où est le juge de s'instruire... ne lui permette jamais d'oublier que, s'il est des choses arbitraires à sa raison, il n'en est point qui soient purement à son caprice ou à sa volonté... ».
Portalis, Discours préliminaire du code civil.

Introduction

11 - Il y a maintenant une vingtaine d'années, entre les mois de novembre 2000 et novembre 2001 [1], la Cour de cassation rendit, en assemblée plénière, une série d'arrêts établissant le principe, fixant les conditions et précisant l'ampleur de l'indemnisation de la personne atteinte d'un grave handicap génétique non diagnostiqué par le médecin ou le laboratoire d'analyse médicale en raison d'une pratique défaillante de tests génétiques prénataux. Reposant sur les articles 1165 et 1382 du code civil, cette jurisprudence dite « Perruche », du nom des demandeurs dans l'instance ayant donné lieu à l'arrêt fondateur de cette série [2], provoqua une polémique dont l'ampleur et la vivacité éclairent très significativement les enjeux multiples de l'interprétation judiciaire de la loi.

22 - Le propos n'est pas ici de revenir sur les diverses théories de l'herméneutique juridique qui, dans les doctrines civiliste et de Common Law donne lieu à une littérature foisonnante [3], mais de montrer, en pratique, à partir de ces espèces singulières, le pouvoir et la responsabilité normatifs du juge. Ces arrêts mettent, en effet, tout spécialement en relief la puissance du juge dans la révélation du sens de la loi pour l'appliquer à la résolution des litiges dont il est saisi, en l'espèce, à une situation particulière de la responsabilité médicale (I), tandis que la réception de ces arrêts par le législateur, la doctrine juridique, les groupes d'intérêt concernés et la presse révèlent les enjeux théoriques, juridiques éthiques, politiques, économiques, médiatiques et sociaux du pouvoir juridictionnel (II). L'intérêt d'un examen rétrospectif de ce qui fut vécu comme une crise et a été le prétexte de multiples dérèglements dans le comportement des acteurs n'est pas de justifier ou de critiquer cette construction jurisprudentielle [4], mais d'inciter à une réflexion sur la responsabilité sociale du juge et son incidence sur l'autorité de sa juridiction.

I - Puissance de l'interprétation judiciaire de la loi

33 - À toutes les époques a été discuté le pouvoir du juge d'interpréter la loi pour l'appliquer aux situations contentieuses soumises à son jugement (A), mais chacune des tentatives politiques pour le limiter a finalement échoué (A), de sorte que la puissance normative de la jurisprudence n'est plus aujourd'hui raisonnablement contestable (B) [5].

A - Un pouvoir discuté

44 - Les historiens de la justice se sont attachés à montrer que le pouvoir du juge sur la loi a provoqué d'inévitables tensions avec l'autorité titulaire de la souveraineté législative ou avec la doctrine savante sous ses diverses formes, aussi bien à Rome, qu'à l'époque féodale, sous l'Ancien Régime et plus clairement encore à partir de la Révolution [6]. À l'époque contemporaine, à ces forces contraires, s'ajoute le regard critique des philosophes, des sociologues et des économistes sur les mécanismes judiciaires de création du droit. Enfin, ne doit pas être aujourd'hui méconnue l'influence des groupes d'intérêt tant sur la formation de la loi que sur son interprétation.

1. Par l'auteur de la loi

55 - Très explicables sont les tensions entre le juge et l'autorité investie du pouvoir souverain d'édicter la loi. Qu'il s'agisse du Roi, sous l'Ancien Régime, des assemblées parlementaires depuis la Révolution ou des titulaires des pouvoirs législatif et réglementaire dans les constitutions contemporaines [7], l'auteur de la règle écrite entend en effet, d'une part, qu'elle produise directement les effets qu'il en attend dans les situations qu'il a anticipées et qu'elle s'applique telle qu'elle est, littéralement, mécaniquement, sans infléchissement, enrichissement ou correction et, a fortiori, sans obstruction ou dénaturation, d'autre part, que dans les espaces laissés vacants, le juge ne puisse lui-même créer du droit. C'est la figure du juge « bouche de la loi », selon la célèbre expression de Montesquieu [8].

66 - Ainsi à l'égard des juges, spécialement des Parlements d'Ancien Régime, puis de toutes juridictions judiciaires depuis la Révolution, le pouvoir politique a imaginé divers procédés visant à supprimer, réduire ou encadrer leur pouvoir juridictionnel. Il ne s'agit pas de faire l'histoire du contrôle politique sur la justice et, en parallèle, de la conquête par celle-ci de son indépendance, ni de décrire dans le détail les techniques destinées à brider le pouvoir normatif du juge. Tout cela est parfaitement traité ailleurs, qu'il s'agisse, sous l'Ancien Régime, de la justice retenue, du rôle du parquet ou du renvoi au Souverain de toutes les questions d'interprétation de la loi, puis, à partir de la Révolution, de la création et du rattachement au Corps législatif du Tribunal de cassation chargé de contrôler l'application de la loi par les juridictions et de renvoyer au législateur, par le « référé législatif », tous les cas d'ambiguïté ou d'insuffisance de celle-ci [9], de la défense faite au juge d'exercer un contrôle juridictionnel sur les actes de l'administration [10] et, concomitamment, de la création progressive d'un dualisme juridictionnel ou encore de l'interdiction des arrêts de règlement [11].... À travers des conflits parfois violents, ces obstacles n'ont pas empêché la maîtrise de la loi par les Parlements d'Ancien Régime ni, à l'époque moderne, l'émergence de la normativité de la jurisprudence de la Cour de cassation [12].

77 - En définitive, le seul effet persistant et tangible de cette volonté de réduction de l'office des juridictions judiciaires est la création, à côté d'elles, d'un ordre juridictionnel administratif [13] qui soustrait l'activité de l'administration à la justice ordinaire en permettant au législateur de répartir les contentieux à son gré [14] et de mettre les deux ordres en concurrence sur les plus sensibles, notamment sur celui des libertés [15]. Le dernier avatar de ces procédés est l'institution, par la réforme constitutionnelle de 2008 [16] de la question prioritaire de constitutionnalité dont l'objet essentiel est de priver définitivement la Cour de cassation, comme le Conseil d'État, du pouvoir d'interpréter et appliquer la Constitution pour censurer la loi ou de créer des principes fondamentaux dans le domaine constitutionnel, cela en attribuant exclusivement le contrôle de la constitutionnalité de la loi à une institution à composition politique : le Conseil constitutionnel [17]. On sait la résistance opposée par la Cour de cassation à cette création qu'elle a comprise comme une amputation de son autorité [18]. Il est sans doute prématuré d'anticiper sur l'effet à terme de ce mécanisme [19], mais il est d'ores et déjà avéré que la loi organique mettant en œuvre ce recours « prioritaire » de constitutionnalité a manqué l'intention du constituant de réduire le pouvoir des juridictions judiciaires et administratives dans l'application directe du droit conventionnel interprété par les juridictions européennes [20] et d'écarter l'application de la loi interne contraire aux droits et libertés fondamentaux de sources supranationales [21].

Une question de responsabilité médicale

88 - La question de la responsabilité médicale dans la pratique du dépistage prénatal du handicap d'origine génétique a été l'éclatante illustration de la contestation par le législateur du pouvoir d'interprétation de la loi par le juge. À l'évidence, à l'occasion des arrêts précités, la Cour de cassation a créé du droit. Par interprétation constructive des articles 1165 et 1382 du code civil, elle a ouvert une action en responsabilité pour faute au bénéfice de la personne atteinte d'un grave handicap congénital contre le médecin ou le laboratoire ayant failli à l'obligation contractuelle d'information de sa mère sur la forte probabilité de naissance d'un enfant handicapé, en raison d'une erreur dans un diagnostic anténatal. Elle a fixé les conditions de cette action en référence à l'article L.2213-1 du code de la santé publique issu de la loi du 17 janvier 1975 [22] instaurant l'interruption volontaire de grossesse pour motif médical : pour être indemnisé le handicap doit être une affection d'une particulière gravité et reconnu comme incurable au moment du diagnostic [23], l'erreur de diagnostic doit répondre aux conditions de mise en œuvre de la responsabilité médicale, savoir la violation de l'obligation contractuelle de donner au patient des soins consciencieux, attentifs et conformes aux données actuelles de la science [24], violation ayant conduit au manquement du médecin au devoir d'informer la mère sur la forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'un tel handicap, alors que celle-ci avait spécialement indiqué au praticien qu'en pareil cas, elle envisagerait une interruption volontaire de grossesse [25]. Quant à l'indemnisation, elle répare intégralement toute nature de préjudice résultant du handicap.

99 - Dès le prononcé du premier arrêt, mus par des intérêts qui seront ci-après développés, certains membres des assemblées prirent violemment position contre cette jurisprudence. Ainsi se multiplièrent leurs initiatives pour mettre fin à une telle application du droit de la responsabilité : questions aux ministres par les députés et sénateurs, amendements à des lois en discussion, propositions de lois, commissions d'enquête parlementaire [26], jusqu'à ce qu'un amendement du Gouvernement soit introduit dans la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé [27]. Si cette disposition dérogatoire au principe constitutionnel de la responsabilité civile [28] ne remet pas en cause le régime de responsabilité du médecin libéral ou de l'établissement hospitalier lorsque le handicap découle directement d'un acte fautif, par exemple une erreur commise à l'occasion de l'accouchement, elle le fait en revanche, dans l'hypothèse où la faute a eu pour conséquence de ne pas révéler, au cours de la grossesse, un handicap ayant une cause génétique ; elle exclut alors de l'indemnisation le préjudice correspondant, pour les parents comme pour l'enfant, aux charges découlant, tout au long de la vie de celui-ci, de ce handicap. Dans ce cas, le législateur a choisi ne pas laisser l'indemnisation de ce préjudice à la charge du médecin ou de l'établissement hospitalier et de leur régime d'assurance, en prévoyant que la « compensation » de ce handicap relèverait exclusivement de la solidarité nationale. Et, pour anéantir au plus vite la jurisprudence de la Cour de cassation, la loi a entendu s'appliquer immédiatement, même aux litiges en cours. Bien que, sur plusieurs points, la contrariété de cette loi à la Constitution ait été aussitôt soulignée [29], elle n'a pas été déférée avant sa promulgation au Conseil constitutionnel. De sorte que, en dépit d'un avis complaisant de l'assemblée du contentieux du Conseil d'État [30] estimant ces dispositions conformes aux droits fondamentaux de sources internationales [31] comme constitutionnelles, les premiers litiges relatifs à l'application de la loi nouvelle ont suscité des interrogations, des juridictions tant judiciaires qu'administratives. Ces dispositions furent finalement jugées contraires à l'article 1er du Protocole n° 1 à la Convention européenne des droits de l'homme sur la protection du droit de propriété, par la Cour européenne des droits de l'homme, en ce que, sans justification, elles privent partiellement les requérants de la possibilité d'obtenir réparation de leur préjudice [32] et, quant à leur application immédiate, contraires à l'article 16 de la Déclaration de 1789 par le Conseil constitutionnel saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité [33]. En considération des motifs de ces décisions, la Cour de cassation persista à appliquer sa jurisprudence à toutes les naissances antérieures au 4 mars 2002 [34], tandis que le Conseil d'État [35] se borna à écarter l'application de la loi nouvelle aux instances introduites avant cette date.

1010 - S'il est conforme au fonctionnement des institutions que la loi revienne sur une jurisprudence des juridictions judiciaires ou administratives estimée politiquement indésirable, il est en l'espèce remarquable que l'initiative du législateur, notamment devant l'Assemblée nationale, se soit accompagnée d'une remise en cause de la légitimité de l'office du juge de cassation. Selon le rapport du député Jean-François Mattéi sur les trois propositions de loi précitées, la jurisprudence de la Cour de cassation serait, en effet, tout à la fois « inacceptable », « inquiétante », comprendrait de « nombreuses anomalies juridiques », porteuse « d'effets pervers », discriminante entre personnes handicapées, menaçante pour la pratique de l'échographie fœtale, et facteur d'un risque d'eugénisme ; le tout rendant indispensable et urgente l'intervention du législateur. Il était en outre reproché à la Cour de cassation de s'immiscer dans le domaine de la prise en charge et de l'intégration des personnes handicapées laquelle ne relèverait pas de la responsabilité civile mais exclusivement de la solidarité nationale, donc de la seule compétence des pouvoirs publics, tout en regrettant d'ailleurs l'insuffisance de la loi en la matière [36]. Ainsi s'est abondamment développée, lors du débat parlementaire, une contestation frontale de la fonction normative de la Cour de cassation.

2. Par la doctrine juridique

1111 - Il est vrai que cette charge inédite s'inspirait des critiques d'une grande partie de la doctrine. La jurisprudence précitée de la Cour de cassation a en effet donné lieu à un nombre considérable de commentaires juridiques, critiques pour beaucoup, positifs pour d'autres. Inventoriée dans un rapport de recherche demandée par la Mission Droit et justice sur « L'impact de l'arrêt « Perruche » sur la jurisprudence et sur les pratiques en matière d'assurance médicale » [37], cette réaction doctrinale s'inscrit dans la complexité des relations de l'université avec le juge et le législateur. Selon une vision historique, le droit résulte d'un processus de construction selon lequel le législateur ordonne, le juge tranche et le professeur théorise dans un contexte juridique et social particulier. Quelle que soit l'époque, ils agissent dans un cadre juridique ordonné dont ils assurent ensemble la maintenance et le progrès. Tout à la fois affaire de lois et de sentences le droit est regardé comme une construction intellectuelle visant à la satisfaction du bien commun [38]. Dit en des termes plus contemporains, la doctrine juridique participe au processus de construction du droit par une activité d'interprétation, par un travail de systématisation, par la production de nouvelles représentations, enfin par une contribution à l'élaboration de la norme [39]. Si la controverse doctrinale provoquée par les arrêts précités s'inscrit dans cette dynamique coopérative, elle a, en l'espèce, emprunté des voies inhabituelles excédant les limites de la controverse académique pour se situer sur un terrain subversif, mobilisant des arguments non seulement juridiques mais à caractère moral et anthropologique, afin de discréditer l'autorité de la Cour de cassation et la légitimité de sa construction jurisprudentielle. Le mode d'expression utilisé par certains de ces professeurs dans les grands médias ajouté au caractère collectif et pétitionnaire de leur posture suggère une autorité normative de groupe, rivale de celle de la Cour de cassation. Faute d'infléchir une jurisprudence réitérée de l'assemblée plénière, par leur démarche collective, ces professeurs ont cherché à provoquer une intervention législative pour la supprimer. Il y a deux manières de comprendre cette démarche, soit ces professeurs, convaincus de la légitimité de la force agissante de la doctrine, ont voulu, par la mobilisation activiste de l'opinion et de la classe politique, forcer la suppression d'une réalité juridique réprouvée, soit, ils sont revenus, consciemment ou non, à l'École de l'Exégèse selon laquelle, sans considération de son application par les juridictions, la loi s'examine, s'interprète et s'enseigne à la seule lumière des textes lus par de grands sachants investis de la science juridique [40]. Plus ou moins nuancées, de telles attitudes ont provoqué dans le monde académique une controverse sur le rôle et les formes du débat doctrinal [41]. Mais les juristes ne sont pas les seuls à mettre en cause le caractère normatif de l'activité juridictionnelle. Selon une vision pluridisciplinaire du droit, la critique est désormais tout à la fois philosophique, sociologique et économique.

3. Par la philosophie du droit

1212 - D'un point de vue philosophique, la détermination du jugement ne se trouve pas dans le droit positif, mais dépend d'orientations idéologiques sous-jacentes qui commandent le choix et l'interprétation de la règle. Ainsi, les juges dépendent, pour leur office, non seulement de l'énoncé de la règle mais encore de concepts fondamentaux employés dans la formulation de celle-ci. En ce sens, le contenu des règles juridiques exprime les préférences politiques et morales de ceux qui les posent et les interprètent. Pour les théories jusnaturalistes, il existe en outre, au-dessus des lois, un droit naturel dont la connaissance, accessible à toute raison humaine, révèle des principes de justice gouvernant la création et l'application du droit. Ce droit naturel est alors l'objet d'une philosophie qui porte sur des questions de société comme par exemple la famille, l'avortement ou la bioéthique... Une telle vision prend une dimension normative lorsqu'elle recommande au législateur comme au juge d'adopter ou de comprendre les règles en harmonie avec des principes théoriques de justice. Le philosophe du droit entend donc influer sur l'édiction comme sur l'interprétation de la règle, de sorte qu'il est fondé à prendre parti sur la jurisprudence [42]. Les valeurs éthiques et les questions anthropologiques débattues à l'occasion des arrêts en cause étant propices à la mobilisation des philosophes, beaucoup ont exprimé leur opinion sur les solutions retenues [43].

4. Par la sociologie du droit

1313 - Sans entrer dans le débat sur les conceptions différentes voire contradictoires de la sociologie du droit et de ses rapports avec la doctrine juridique, il n'est guère discutable que l'approche sociologique est pertinente et utile lorsqu'elle souligne que la perception et l'incidence de la norme sont davantage le produit de croyances, de déterminismes sociaux ou d'un contexte culturel, économique ou social, que d'une validité dogmatique du droit [44]. Ce qui invite tout créateur de norme, législateur ou juge, à prendre en compte les usages sociaux du droit sur les questions qu'il traite. Il s'ensuit que le sociologue peut, lui aussi, avoir, de ce point de vue, une opinion critique sur l'interprétation du droit par le juge. Si peu d'entre eux se sont exprimés sur les affaires dont on parle, l'approche sociologique a été intégrée à la réflexion pluridisciplinaire sur la représentation de la personne atteinte d'un handicap d'origine génétique [45].

5. Par l'économie du droit

1414 - L'analyse économique du droit a, elle-aussi, l'ambition d'intervenir dans l'élaboration des règles juridiques. Proposant de confronter la réalité du droit aux techniques et aux concepts de la science économique, elle regarde, au moyen des outils de la microéconomie, la création et les conditions d'efficacité des normes. Ainsi, les économistes entendent, d'une part, observer et expliquer le processus de production des règles, d'autre part, dans une perspective normative, proposer l'adoption de celles dont l'effet économique serait optimal [46]. L'interprétation du droit par le juge n'échappe donc ni à leur champ d'étude ni à leurs prescriptions. La question de la responsabilité médicale est alors spécialement concernée, tant au regard de la théorie économique du contrat, de celle la responsabilité, que de l'économie de la santé et de l'assurance. S'agissant de la responsabilité civile appliquée à la réparation du préjudice résultant du handicap d'origine génétique non diagnostiqué, c'est sous ces aspects que les arrêts successifs de la Cour de cassation ont été examinés dans leur incidence économique sur la pratique du dépistage anténatal du handicap et le régime assurantiel qui l'accompagne [47].

6. Par les groupes d'intérêts

1515 - Un autre enseignement des affaires évoquées fut l'activisme des groupes d'intérêts concernés par la question de la responsabilité médicale pour faute dans la pratique du dépistage du handicap d'origine génétique. Dans la phase d'élaboration de la jurisprudence, médecins, assureurs, associations de défense des handicapés se sont en effet largement exprimés dans la presse, directement, par leurs organes représentatifs ou par leurs consultants juridiques habituels. Les plus actifs ont été les médecins qui ont insisté sur les questions d'éthique médicale, soit à travers le Comité national d'éthique, par le canal de l'Académie nationale de médecine ou certains membres de ces institutions, soit par des interventions personnelles, tout en appelant l'attention sur les conditions du diagnostic prénatal par des prises de position des groupements de spécialistes. Mais ces parties prenantes ont aussi fait pression sur le Parlement [48]. À cet égard, l'activisme des députés et sénateurs issus des professions médicales a été important. Jean-François Mattéi qui a pris la tête de cette campagne critique a été professeur de génétique médicale ; les propositions devant l'Assemblée nationale et le Sénat ont essentiellement été présentées et soutenues par des élus médecins lesquels sont intervenus de manière pressante tant en commission, devant les assemblées que dans les médias tandis que les revues médicales ont multiplié les publications critiques. Quoique de manière plus discrète, les compagnies d'assurance ont-elles-aussi, largement pesé dans les débat public et parlementaire tout comme les associations de défense des handicapés [49]. Le juge comme le législateur travaille désormais sous la pression des lobbys.

B - Mais un pouvoir incontournable

1616 - Pour autant, tant pour des raisons théoriques que pour des considérations pratiques, si elle a une influence incontestable sur la production de la norme, l'intervention des juristes académiques, des philosophes, des sociologues, des économistes et des groupes d'intérêts, dans les mécanismes de son interprétation, n'entrave pas la puissance normative du juge.

1. Fondé sur des raisons théoriques

1717 - L'activité qui consiste à connaître et appliquer le droit comporte nécessairement une dimension d'interprétation : elle vise à dégager des significations, à rechercher dans des textes divers des principes de cohérence et à résoudre leurs éventuelles contradictions. En contribuant à fixer le contenu de la norme, l'interprétation a naturellement une portée qui, en théorie, peut se concevoir de deux façons [50]. L'école classique la situe dans l'ordre de la connaissance, c'est une découverte rationnelle du sens de la loi qui ignore la subjectivité de l'interprète. À cette vision s'oppose une conception active et volontariste selon laquelle les énoncés juridiques n'acquerraient leur véritable portée qu'à partir d'une interprétation résolument constructive tournée vers une fin déterminée [51]. Il en résulte une division fondamentale séparant les acteurs de l'interprétation. Comme l'indique la théorie kelsénienne, sont à distinguer les interprétations données par les « organes d'application du droit » et celles émanant des juristes ou autres commentateurs en référence à la science du droit ou à d'autres disciplines des sciences sociales. Les premières sont des interprétations authentiques, inséparables des processus de création du droit ; elles impliquent un acte de volonté. Les secondes sont regardées comme non authentiques, dépourvues de force obligatoire et se situent dans l'ordre de la proposition. Même si les diverses interprétations auxquelles se livrent chacun des acteurs du champ juridique [52] sont en interaction constante [53], seul le juge est investi du pouvoir de dire le droit et de le rendre effectif.

1818 - Davantage encore, la règle générale, impersonnelle et abstraite édictée par le législateur n'a d'efficacité que dans la signification que lui donne le juge pour dégager une norme individuelle applicable au litige et rendre une décision revêtue de la force exécutoire. Il en résulte que l'interprétation est indissociable de l'application de la loi et que seul le juge, dont c'est la fonction, a la faculté de la rendre effective dans les situations contentieuses particulières. C'est tout à la fois la juris-dictio et l'imperium, en définitive les deux composantes de son office, qui confèrent au juge sa puissance interprétative.

1919 - Au stade suivant, la succession et la cohérence des décisions individuelles ainsi prononcées et leur classement méthodique construisent, par leur continuité historique, une jurisprudence porteuse de règles générales qui complètent, adaptent, corrigent, parfois modifient la loi et même créent des principes généraux dépourvus de référence légale [54]. Ce modèle bien connu a permis les grandes constructions jurisprudentielles du XXe siècle en droit pénal comme en droit civil, reprises dans les « Grands arrêts » de la jurisprudence [55], notamment en matière de responsabilité et en particulier dans le domaine de la responsabilité médicale dans laquelle s'inscrivent les arrêts évoqués.

2020 - Ce caractère normatif de la jurisprudence est consacré de multiples manières. Par la Cour de cassation elle-même, qui distingue ses arrêts notables par des sigles particuliers, vise de plus en plus fréquemment des « principes » détachés de tout support législatif, invoque sa « doctrine », commente ses propres décisions, regroupe ses arrêts convergents comme pour obtenir un effet de promulgation, règle dans le temps l'effet de ses arrêts de revirement et peut rejeter l'admission des pourvois qui visent à remettre en question une jurisprudence établie [56]. Le législateur a lui-même confirmé cette évolution : l'article 604 du Nouveau Code de procédure civile dit que le pourvoi en cassation tend à faire censurer la non-conformité du jugement aux « règles de droit », et non plus à la loi seule. La saisine pour avis de la Cour de cassation, autorisée par la loi du 15 mai 1991, a pour finalité de régler les questions de droit nouvelles qui posent une difficulté d'interprétation hors de toute saisine contentieuse de la Cour, par une opinion abstraite qui, comme la loi elle-même, est publiée au Journal Officiel [57]. La manifestation le plus éclatante de la reconnaissance de la normativité de la jurisprudence vient du Conseil constitutionnel qui examine la conformité de la loi à la Constitution dans la portée effective que lui donne une interprétation jurisprudentielle constante de la Cour de cassation [58].

2. Consacré par la pratique

2121 - À partir du début du XX° siècle, cette jurisprudence créative a été soutenue par de nouveaux courants doctrinaux, notamment celui de l'École scientifique, qui entendent coopérer activement, par les commentaires d'arrêts à l'affirmation et à l'harmonie de ce corpus de droit, de sorte que, depuis cette époque, la recherche et l'enseignement du droit intègrent la jurisprudence comme une source de droit [59]. C'est dans le cadre de cette contribution active à la formation de la jurisprudence que s'est développé le débat doctrinal accompagnant le prononcé des arrêts relatifs à l'indemnisation du handicap génétique non diagnostiqué. Ce qui explique l'exaspération de certains auteurs devant la persistance de la position de la Cour de cassation en dépit d'opinions réprobatrices, à leurs yeux, décisives.

2222 - Il est vrai qu'entre le 26 mars 1996 [60], date du prononcé de l'arrêt de la première chambre civile dans l'affaire « Perruche » et le 28 novembre 2001 [61], date des derniers arrêts de l'assemblée plénière, la Cour de cassation a persisté dans la construction d'un système responsabilité dont elle a fixé le principe et le régime, en dépit de la critique d'une partie de la doctrine, de la bruyante désapprobation de certains parlementaires, de l'hostilité des groupes d'intérêt en cause et de pressantes campagnes médiatiques. La puissance interprétative de la Cour de cassation s'est ainsi imposée tant par l'ambition de son innovation que par sa résistance aux réactions contraires, politiques, juridiques et médiatiques.

2323 - C'est donc sans surprise que le législateur s'est emparé de la question de la responsabilité médicale consécutive à un diagnostic anténatal fautif. Le pouvoir souverain du législateur impose en effet que les constructions jurisprudentielles dans le domaine de la loi soient subordonnées à sa faculté, soit de les laisser prospérer sans intervenir, soit de les approuver explicitement en les consacrant en tout ou partie par la loi, soit de les corriger par des lois interprétatives soit d'y mettre fin par des lois correctrices. Les exemples de ces réactions sont nombreux [62]. Selon le principe constitutionnel de séparation des pouvoirs, le législateur reste souverainement maître de la loi [63]. C'est finalement ce qui s'est passé dans le cas examiné.

2424 - Un tel contrôle du Parlement sur les créations prétoriennes du juge emporte une responsabilité particulière de ce dernier [64]. Elle n'est pas propre à la Cour de cassation, la production juridictionnelle normative mobilise en effet tous les degrés de juridictions. Comme c'est fréquent, dans les affaires examinées, ce sont, en général, les juridictions de première instance qui ont innové en ouvrant le droit à indemnisation, leurs jugements étant le plus souvent infirmés par des arrêts des cours d'appel qui ont donné lieu à pourvois en cassation et finalement au renvoi en assemblée plénière [65]. À des degrés divers, l'interprétation de loi intéresse donc l'ensemble de l'appareil juridictionnel, ce qui invite les juges, du fond, comme de cassation, à en bien comprendre les enjeux.

II - Enjeux du pouvoir d'interpréter

2525 - La fonction normative des juridictions engendre en effet des risques en ce qu'elle met en jeu la crédibilité du juge, l'autorité de sa juridiction et au-delà, le crédit de l'institution judiciaire. Qu'il s'agisse d'autorité, de crédit ou de confiance, cette qualité de la justice est nécessaire pour que puissent s'imposer naturellement, sans crise, ses décisions dans des affaires sensibles, de nature politique, éthique, économique ou sociale. Elle s'acquiert, s'entretient et se ménage autant par le comportement de ses acteurs que par ses jugements [66]. Par les enjeux multiples qu'elles ont révélés, les affaires relatives à l'indemnisation du handicap d'origine génétique sont particulièrement instructives. Ces enjeux sont à examiner, d'une part, sous un angle juridique (A), d'autre part, au regard des conséquences économiques et sociales qu'emporte cette succession d'arrêts (B).

A - Les enjeux institutionnels et juridiques

2626 - Du point de vue juridique largement compris, les conditions dans lesquelles ont été élaborés les arrêts de référence invitent à des observations de nature institutionnelle, procédurale, méthodologique, internationale, autant que sur la substance du droit.

1. Institutionnels

2727 - Il a suffisamment été dit que, dans nos institutions, existent les instruments qui permettent de dénouer le désaccord entre le juge et le législateur sur la norme jurisprudentielle dans le respect de l'indépendance de l'autorité judiciaire et du pouvoir souverain du législateur. Pour la santé des institutions, ces désaccords ne sont ni à répéter ni à exacerber. La réaction de certains parlementaires à propos de la jurisprudence de la Cour de cassation et l'emphase médiatique dont elle s'est accompagnée n'a servi ni l'autorité du Parlement ni le crédit de la justice, cela d'autant plus que la loi correctrice a elle-aussi été contestée et finalement partiellement invalidée. C'est à méditer pour les uns comme pour les autres.

2828 - Sous le rapport institutionnel, à l'égard du juge, peut être invoquée une obligation de loyauté à l'égard de la loi. Comme l'écrit Aharon Barak, ancien président de la Cour suprême d'Israël : « Le respect du rôle du législateur doit influencer la formulation d'un système d'interprétation approprié qui reconnaîtrait la volonté du législateur comme un facteur important dans l'interprétation de la législation. C'est le peuple qui crée la loi par le biais de ses représentants au Parlement. La loi est censée mettre en œuvre un intérêt public souhaité par le législateur au nom des citoyens qu'il représente. Cet intérêt doit être pris au sérieux et doit être exprimé lors de l'interprétation de la législation » [67]. Danièle Lochak formule autrement le même principe « Et les juges n'ont aucune légitimité pour faire prévaloir leurs propres valeurs sur la loi écrite, qui, dans une démocratie, est réputée exprimer les valeurs auxquelles adhère le peuple » [68]. Tels sont en définitive les fondements de la prudence interprétative.

2929 - Dans l'ordre de la déontologie, les espèces de référence interpellent encore sur l'obligation de loyauté de tout magistrat à l'égard de l'institution judiciaire. Dans les cours suprêmes, il est en général admis que lorsqu'une position jurisprudentielle est fixée, les membres de la juridiction s'y tiennent et, en tout cas, s'abstiennent d'exprimer publiquement une opinion contraire. Ce ne fut pas l'attitude de l'avocat général près la Cour de cassation, qui après avoir conclu notamment pour des raisons éthiques, à l'illicéité de l'intérêt à agir en réparation de son préjudice de la personne atteinte d'un handicap congénital consécutif à une faute a, en dépit de la décision contraire adoptée par le premier arrêt de l'assemblée plénière, persisté dans son opinion dans les conclusions développées lors des deux audiences suivantes, ce qui, de la part d'un membre du parquet peut se comprendre, mais - ce qui est moins concevable - a multiplié les publications critiques dans les revues juridiques [69], participé à de nombreuses conférences et colloques en se posant ostensiblement en défenseur d'une conception éthique du droit supposée méconnue par la juridiction à laquelle il appartenait. Sa position, inspirée et reprise par une partie de la doctrine, a évidemment servi de référence aux parlementaires hostiles à la jurisprudence de la Cour [70].

3030 - Un autre élément d'affaiblissement du crédit de la justice fut la division de la jurisprudence du Conseil d'État et de la Cour de cassation sur le titulaire du droit à indemnisation. Le particularisme du dualisme juridictionnel français conduit, on le sait, à ce que le Conseil d'État et la Cour de cassation statuent sur les mêmes contentieux selon qu'ils concernent des personnes publiques et des personnes privées. C'est le cas de la responsabilité médicale, en fonction de l'imputation de la faute, soit aux praticiens du secteur public hospitalier, soit à ceux de la médecine libérale. À l'occasion du contentieux examiné, si la Cour de cassation et le Conseil d'État se sont accordés sur le principe de responsabilité de l'auteur de la faute, ils se sont divisés sur le bénéficiaire de droit à réparation. Pour la Cour de cassation, outre les dommages et intérêts que peuvent demander les parents en réparation de leur préjudice personnel, la personne handicapée est elle-même titulaire du droit à indemnisation des conséquences dommageables des troubles dont elle est atteinte [71]. Au contraire, le Conseil d'État a estimé que seuls les parents étaient fondés à obtenir, outre la réparation de leur préjudice moral et des troubles dans leurs propres conditions d'existence, la réparation d'un préjudice matériel prenant en compte les charges particulières, notamment en matière de soins et d'éducation spécialisée, qui découlent de l'infirmité de leur enfant [72]. Cette divergence fondée sur les raisons éthiques exprimées par le Commissaire du Gouvernement [73] a été un argument de décrédibilisation de la jurisprudence de la Cour de cassation dans le débat public et parlementaire. Ce qui incite à une réflexion sur la nécessité, pour le crédit de la justice, de renforcer les instruments, non seulement de répartition rationnelle du contentieux entre les deux ordres de juridictions, mais encore d'harmonisation de leur jurisprudence.

2. Procéduraux

3131 - Du même ordre est l'interrogation au sujet des procédures qui permettent de résoudre les divergences d'interprétation au sein de l'ordre judiciaire [74]. Dans les espèces de référence, la résistance de la Cour d'appel de renvoi à l'arrêt de la 1re chambre de la Cour reconnaissant le droit à réparation de la personne atteinte d'un handicap endogène a motivé le renvoi devant l'assemblée plénière tandis que d'autres pourvois traitant de la même question l'ont été d'office par ordonnance du premier président en raison de la question de principe posée et de l'existence de divergences entre les juridictions du fond. En définitive, près de dix ans se sont écoulés entre le jugement initial et les arrêts de la Cour de cassation fixant le principe et les modalités d'une telle action. Au regard de l'exigence de sécurité juridique, ce long délai est évidemment incompatible avec la nécessité de régler définitivement une question sensible, troublant l'opinion publique comme celle des juristes et divisant les juridictions et interroge sur l'efficience des mécanismes de stabilisation de la jurisprudence judiciaire.

3. Internationaux

3232 - Sur les grandes questions de société, dans l'espace international, la décision d'une cour prend place parmi celles qui ont été rendues dans d'autres États. Il est donc intéressant de connaître ces sentences étrangères, soit pour vérifier la pertinence de la position retenue par la juridiction nationale, soit pour la situer dans le courant mondial des grands systèmes juridiques. Une telle approche prenait tout son intérêt dans les affaires de référence [75]. La Cour de cassation n'a néanmoins pas demandé d'étude générale de la question dans la jurisprudence des grandes cours effectuée par un centre de recherche en droit comparé, ce qu'elle a fait ensuite dans d'autres affaires de portée universelle. L'argument du droit étranger n'a donc été que partiel et non vérifié, aussi bien pour le rapporteur, les parties que pour l'avocat général. Dans ses conclusions [76], ce dernier se réfère en effet à une étude effectuée par le Service des affaires européennes et internationales du ministère de la Justice qui n'a toutefois été ni produite ni discutée.

4. Méthodologiques

3333 - Méthodologiquement, en simplifiant beaucoup, il existe deux approches complémentaires de l'exercice d'interprétation de la loi par le juge, l'une littérale, reposant sur une lecture exégétique du texte en fonction de préceptes différenciant la clarté ou l'obscurité de la loi, de sa cohérence avec l'ensemble du corpus juridique, national, écrit ou jurisprudentiel, se référant à des principes de logique argumentative, à des standards écrits ou non, à la volonté du législateur, au but de la loi ou à son effet utile... L'autre approche est contextuelle, elle prend en compte les réalités culturelles et socioéconomiques au sein desquelles se pose la question traitée. Contrairement à d'autres cours suprêmes [77], la Cour de cassation n'indique toutefois pas les principes herméneutiques qui soutiennent son interprétation des textes. Tel est le cas dans les arrêts de référence qui, ni dans leurs motifs, ni dans les travaux préparatoires ne donnent la moindre indication à ce sujet.

3434- Il est vrai que les principes d'interprétation exégétique des textes visés par ces arrêts n'avaient guère de sens, s'agissant de règles très générales, remontant aux origines du Code civil pour lesquels ni l'interprétation littérale ni le recours à la volonté du législateur n'étaient opérants. Toutefois, le juge ne dispose pas d'un pouvoir discrétionnaire. Même lorsqu'elle porte sur des textes généraux et anciens, son interprétation n'est légitime que lorsqu'elle est cohérente avec le cadre juridique dans lequel elle prend place, si elle repose sur un raisonnement rationnel et si elle respecte les valeurs sociales dominantes. C'est donc une question de motivation. Si le style bref des arrêts de la Cour de cassation en cours à l'époque rend leur argumentaire elliptique, les travaux des rapporteurs donnent suffisamment d'indications sur chacun de ces points [78].

3535 - Sur la motivation de ses arrêts, la position de la Cour de cassation a d'ailleurs évolué. À la suite des travaux d'une commission de réflexion, elle a publié des lignes directrices « relatives à la structure de ses décisions et à leur motivation en forme développée » [79] qui prescrivent, en particulier, qu'à chaque fois que la cour fixe une interprétation de la norme, elle indique dans l'arrêt la méthode d'interprétation dont elle fait usage.

5. De rationalité juridique

3636 - C'est principalement sur la rationalité juridique des solutions retenues que les arrêts en cause ont été contestés. Ont spécialement été discutés la recevabilité de l'action de la personne handicapée en réparation du dommage constitué par le handicap dont elle souffre, la relation entre le manquement contractuel à l'égard de la mère et la faute délictuelle à l'égard de l'enfant, le lien de causalité entre cette faute et le dommage et la licéité du dommage, tout cela non seulement à partir d'arguments tirés des principes du droit de la responsabilité, mais en référence à des considérations éthiques sur la dignité de la personne et sur une vision anthropologique de la vie humaine. Sur tous ces points, des réponses, satisfaisantes ou non, sont apportées sinon dans la motivation des arrêts, à tout le moins dans les travaux des rapporteurs successifs. L'existence de la faute contractuelle consistant à un manquement au devoir d'information du patient est tirée d'une jurisprudence constante, tout comme la portée de cette faute contractuelle à l'égard du tiers au contrat qui peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage. En réponse à l'argument critique le plus récurrent, et qui a été au centre de la résistance des cours d'appel, selon lequel le handicap d'origine génétique, par nature antérieur à l'intervention du médecin, est sans lien direct avec l'erreur de diagnostic commise par celui-ci, la Cour de cassation se réfère, de manière toute aussi classique, au principe selon lequel, dans un acte destiné à prévenir un dommage évitable la faute consiste précisément à ne pas l'avoir évité, c'est l'adage : « qui peut et n'empêche pêche » qui relie la faute au dommage. Enfin, l'argument critique sur la licéité de la demande en réparation tiré du fait d'être né au regard du principe fondamental du droit à la vie est contourné par le raisonnement de la cour qui retient que la demande de réparation ne porte pas sur le fait de vivre mais sur la réalité et les conséquences du handicap.

3737 - Une autre objection fondamentale était tirée de la méconnaissance du principe de dignité de la personne humaine : conférer à l'enfant atteint d'un handicap d'origine génétique un droit à réparation d'un préjudice qui ne pourrait être évité que par une interruption de la grossesse, impliquerait que « certaines vies ne valent pas d'être vécues ». À cet égard, commentant l'arrêt du 28 novembre 2011 dans son rapport annuel, la cour indique que, sans méconnaître les principes fondamentaux quant au respect de la vie et à l'égale dignité de tous les êtres humains, il lui est « apparu que le respect effectif, et pas seulement théorique, de la personne passait par la reconnaissance de l'enfant handicapé en tant que sujet de droit autonome et que devait être reconnu son droit propre à bénéficier d'une réparation du préjudice résultant de son handicap - et exclusivement de celui-ci - de façon à lui permettre de vivre dans des conditions conformes à la dignité humaine ». Elle ajoute, en référence à la jurisprudence précitée du Conseil d'État, accordant aux parents de l'enfant handicapé une réparation du préjudice matériel sous forme de capital représentant une rente pendant toute la vie de celui-ci, qu'elle a estimé que « les inévitables aléas inhérents au versement d'un capital (séparation ou divorce des parents avec partage du capital entre eux, décès qui entraîne aussi un partage dont l'enfant handicapé peut n'avoir qu'une faible part successorale, placement hasardeux, dilapidation...) ne permettent pas d'être certain que l'enfant en sera le réel bénéficiaire sa vie durant » et que « la défense de son intérêt, comme la présentation de la dignité de ses conditions de vie futures, paraissent mieux assurées par l'attribution d'une indemnisation qui lui soit propre ». En réaction à ce commentaire, certains auteurs ont aussitôt opposé une philosophie humaniste du droit à une vision positiviste dévalorisée prêtée à la Cour de cassation [80]. Mais quelle que soit la validité des arguments de la Cour, la campagne médiatique s'est nouée sur le slogan de l'absurdité « du droit de ne pas naître » auquel la technique juridique ne peut guère répondre de manière audible.

3838 - À cela se sont ajoutées des attaques tirées de l'effet pervers de la jurisprudence en question, principalement du danger d'eugénisme. Sans entrer dans une polémique sur ce concept, la Cour rappelle, comme l'avaient déjà indiqué les travaux préparatoires des rapporteurs successifs, que ses arrêts se situent dans le prolongement direct de la loi du 17 janvier 1975, qui, dans les conditions fixées, accorde à la mère une liberté de choix de recourir à une interruption volontaire de grossesse et qu'elle n'implique pas davantage un risque de dérive de l'IVG pour motif thérapeutique dès lors que, en référence aux dispositions de l'article 2213-1 du Code de la santé publique, le droit à réparation est subordonnée à l'existence d'une forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic.

39Ajoutées à ces considérations éthiques et anthropologiques, étaient encore invoquées les conséquences économiques et sociales de la position de la cour.

B - Ses conséquences économiques et sociales

4039 - En aggravant la responsabilité des praticiens, laboratoires et établissements hospitaliers du secteur privé, la jurisprudence de la Cour de cassation a incontestablement eu un impact sur leurs pratiques et sur leur régime d'assurance dans un contexte où le développement de nouvelles techniques de diagnostic prénatal, à l'époque insuffisamment encadrées, avaient engendré un contentieux important. Faute d'avoir anticipé ce risque, les compagnies d'assurance ont, au prétexte des arrêts de la Cour de cassation, fait le choix d'augmenter massivement et de manière indifférenciée les primes d'assurance, alarmant les praticiens ou, plus radicalement, elles se sont retirées de ce secteur en provoquant une crise du marché de l'assurance médicale ayant finalement nécessité l'intervention de l'État [81]. Faute d'avoir été argumentées par les assureurs parties aux instances, ces conséquences économiques n'ont pas été discutées devant la Cour de cassation.

4140 - Elles ont en tout cas poussé les milieux médicaux et leurs assureurs à revendiquer un transfert à l'État du risque engendré par le diagnostic anténatal. Il en est résulté un débat agité sur le régime social de prise en charge des handicapés qui a conduit à opposer les solutions de la responsabilité civile, regardées comme impropres à régler la question, à celles de la solidarité nationale, relevant exclusivement du législateur [82]. L'alternative était relativement neutre pour les personnes handicapées puisque les indemnités obtenues par la mise en œuvre de la responsabilité du praticien étaient en grande partie appréhendées par l'action récursoire de la sécurité sociale en remboursement des prestations servies. Mais elle était d'importance sur la charge du risque pesant, dans un cas, sur le secteur médical du dépistage prénatal, sur la collectivité, dans l'autre [83].

4241 - Comme on le sait, la loi de 2002 décida que les charges particulières découlant du handicap seraient soustraites à la responsabilité du praticien pour relever exclusivement de la solidarité nationale, alors que le régime de prise en charge des handicapés était notoirement déficient. Ce qui révolta les associations de défense des handicapés qui, ayant milité contre la jurisprudence de la Cour de cassation, demandèrent finalement l'abrogation de la loi qui y mettait fin [84]. Ce ne fut qu'en 2005 [85] après une condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme [86] que la loi améliora la prise en charge du handicap.

4342 - C'est évidemment à l'égard des handicapés eux-mêmes que l'impact social de la jurisprudence de la Cour de cassation est à regarder de près. Alors que les arrêts de 2000 et 2001, visaient à une pleine reconnaissance de la personne et des droits des handicapés et qu'elle améliorait très sensiblement leur situation en ce qui concerne la prise en charge financière de leur handicap, elle fut d'abord très mal accueillie par la plupart des associations intéressées. Cette hostilité s'explique de deux manières. D'une part, bien que la différence de situation soit explicable par la faute du praticien, ces arrêts donnent une impression d'inégalité dans le droit à réparation entre ceux dont le handicap d'origine génétique était indemnisable et tous les autres. D'autre part et surtout, elle heurte très profondément le sentiment de justice des parents qui, informés ou non, ont assumé la naissance d'un enfant gravement handicapé et qui l'entourent de soins et d'affection avec l'aide d'une prise en charge sociale déficiente, tandis que ceux qui, ayant refusé de l'assumer, sont indemnisés pour l'échec de leur projet d'éviter la naissance, tout en obtenant pour l'enfant lui-même les moyens d'une existence décente [87]. La Cour de cassation aurait sans doute du mieux prendre en compte ce sentiment d'injustice.

Conclusion

4443 - En définitive, dans la construction de sa jurisprudence relative à la responsabilité médicale en cas de faute dans la pratique du diagnostic prénatal, la Cour de cassation a-t-elle abusé de son pouvoir d'interprétation ? C'est généralement ce qui a été prétendu à chaque fois qu'elle a adapté le droit de la responsabilité au contexte économique et social ; qu'on se souvienne, par exemple, de l'âpre débat qui a eu lieu entre l'arrêt Tiffaine du 16 juin 1896 [88], fondant sur l'article 1384 du code civil, le principe de la responsabilité de l'employeur en cas d'accident du travail, et la loi du 9 août 1898 [89], qui en organise le régime. Son raisonnement juridique était-il scandaleusement erroné ? Les opinions se sont partagées à ce sujet au point que certains auteurs ont estimé que, dans les espèces en cause, la reconnaissance du droit à réparation comme sa négation étaient juridiquement possibles. Quoiqu'il en soit, la querelle est aujourd'hui dépassée. Sa jurisprudence a-t-elle été attentatoire à la dignité de la personne humaine et a-t-elle incité à l'eugénisme ? La controverse sur l'atteinte potentielle au droit à la vie et le risque eugénique des lois qui traitent de la génétique de l'être humain est loin d'être close [90]. A-t-elle eu des effets négatifs sur le diagnostic prénatal ? Il faudrait à cet égard examiner la qualité et la fiabilité des pratiques actuelles [91]. Était-elle socialement juste ? Cela dépend des conditions de prise en charge du handicap depuis la loi de 2005 [92]. A-t-elle été économiquement fatale au régime de l'assurance maladie appliqué à la pratique du diagnostic anténatal ? Seule une étude sur l'économie de ce secteur du marché de l'assurance maladie permettrait de le dire [93].

4544 - Quelle que soit la réponse à ces multiples questions, cette série d'arrêts appelle à la conscience du juge et à la prudence dans l'office d'interprétation de la loi. Sous cet aspect, ils sont aujourd'hui à méditer.

Notes

  • [1]
    Cass., ass. plén., 17 nov. 2000, Bull. Ass. plén., n° 9 ; 13 juill. 2001, Bull. Ass. plén., n° 10 ; 28 nov. 2001, Bull. Ass. plén., n° 15 et 16.
  • [2]
    Il est regrettable que le nom de ces personnes soit attaché à une polémique qui met en cause la légitimité éthique de leur demande et les a d'ailleurs conduits à s'en justifier publiquement dans un domaine qui relève de leur vie privée.
  • [3]
    V. par exemple B. Frydman, Le sens des lois. Histoire de l'interprétation et de la raison juridique, Bruxelles/Paris : Bruylant/LGDJ, 2005 et doctrine citée ; A. Papaux, Herméneutique juridique, qualification et abduction, Revue interdisciplinaire d'études juridiques, vol. 42, n°. 1, 1999, p. 85-123 ; P. Amselek, Interprétation et droit, Bruxelles-Paris, Ed. Bruylant-Presse 1985 ; G. Kalinowski, L'interprétation du droit : ses règles juridiques et logiques, Archives de philosophie du droit, tome 30, Sirey, p. 191 sq, univ. d'Aix-Marseille, 1985.
  • [4]
    L'auteur qui a présidé l'Assemblée plénière de la Cour de cassation qui a rendu les arrêts précités, ne peut en effet ni les critiquer ni les défendre. En outre le présent texte ne prend en compte que les éléments publics du débat qu'ils ont provoqué.
  • [5]
    P. Rémy, La part faite au juge. Pouvoirs, 2003, 107(4), 22-36. doi :10.3917/pouv.107.0022 ; G. Canivet, Conférence à l'Académie des sciences morales et politiques, 13 nov. 2006, Vision prospective de la Cour de cassation.
  • [6]
    V. en particulier J. Krynen, Le théâtre juridique, une histoire de la construction du droit, Gallimard, 2018.
  • [7]
    J. Krynen, Ibid.
  • [8]
    P. Rémy, loc. cit. L'expression en elle-même ambigüe, est l'objet d'interprétations diverses, v. par exemple E. Abesso Zambo, Une approche interdiscursive de la métaphore juridique ”le juge, bouche de la loi” : application au discours jurisprudentiel francophone, https://www.village-justice.com/articles/approche-interdiscursive-metaphore,10548.html
  • [9]
    F. Zénati, La nature de la Cour de cassation, Bulletin d'information de la Cour de cassation n° 575 du 15/04/2003, https://www.courdecassation.fr/publications_26/bulletin_information_cour_cassation_27/bulletins_information_2003_1615/n_575_1652/
  • [10]
    « Les tribunaux ne peuvent ni s'immiscer dans l'exercice du pouvoir législatif, ou suspendre l'exécution des lois, ni entreprendre sur les fonctions administratives, ou citer devant eux les administrateurs pour raison de leur fonction » (t. III, ch. v, art. 23 de la Constitution de 1791 ; L. 16-24 août 1790, art. 10).
  • [11]
    J. Krynen, loc. cit., Rémy P., loc. cit.
  • [12]
    J. Krynen, loc. cit., Rémy P., loc. cit.
  • [13]
    G. Bigot, Introduction historique au droit administratif depuis 1789, Paris, PUF, 2002.
  • [14]
    Dans les respects des compétences réservées par la jurisprudence du Conseil constitutionnel tirée de l'article 66 de la Constitution, pour l'autorité judiciaire, et du principe fondamental des lois de la République tiré de « la conception française de séparation des pouvoirs », pour les juridictions administratives. P. Wachsmann, Le Conseil constitutionnel et le principe de séparation des autorités administrative et judiciaire, Jus Politicum, n° 21, [http://juspoliticum.com/article/Le-Conseil-constitutionnel-et-le-principe-de-separation-des-autorites-administrative-et-judiciaire-1252.html]
  • [15]
    J. Krynen, loc. cit. ; G. Canivet, État de droit, libertés en France. Perspectives historiques. L'inachevé du droit, in Les libertés en France et au Royaume-Uni : état de droit, Rule of Law. À propos de l'anniversaire de la Grande Charte de 1215. Actes du colloque en hommage à Roger Errera, Paris, Société de législation comparée, 2016, p. 47-62 ; « Pathologie de la garantie de la liberté individuelle : le syndrome de confusion. Examen de la jurisprudence du Conseil constitutionnel relative à l'interprétation de l'article 66 de la Constitution », in Humanisme et justice : mélanges en l'honneur de Geneviève Giudicelli-Delage, Paris, Dalloz, 2016, p. 323-347 ; P. Wachsmann, Ibid.
  • [16]
    Art. 29 et 30 de la Loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République.
  • [17]
    Art. 61-1 et 62 de la Constitution.
  • [18]
    N. Molfessis, La résistance immédiate de la Cour de cassation à la QPC, Pouvoirs, vol. 137, n°. 2, 2011, p. 83-99.
  • [19]
    Il est vraisemblable qu'à terme, le Conseil d'État et la Cour de cassation s'empareront de la jurisprudence du Conseil constitutionnel pour l'interpréter afin de décider du caractère sérieux ou non de la question de constitutionnalité sans que le Conseil constitutionnel dispose de moyens procéduraux directs de s'y opposer ; A. Roblot-Troizier, La QPC, le Conseil d'État et la Cour de cassation, Les Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, vol. 40, n°. 3, 2013, p. 49-61.
  • [20]
    Par l'art. 23-2, al. 5 de l'Ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : « En tout état de cause, la juridiction doit, lorsqu'elle est saisie de moyens contestant la conformité d'une disposition législative d'une part aux droits et libertés garantis par la Constitution et d'autre part aux engagements internationaux de la France, se prononcer par priorité sur la transmission de la question de constitutionnalité au Conseil d'État ou à la Cour de cassation ».
  • [21]
    CJUE, 22 juin 2010, « ...l'article 267 TFUE s'oppose à une législation d'un État membre qui instaure une procédure incidente de contrôle de constitutionnalité des lois nationales, pour autant que le caractère prioritaire de cette procédure a pour conséquence d'empêcher, tant avant la transmission d'une question de constitutionnalité à la juridiction nationale chargée d'exercer le contrôle de constitutionnalité des lois que, le cas échéant, après la décision de cette juridiction sur ladite question, toutes les autres juridictions nationales d'exercer leur faculté ou de satisfaire à leur obligation de saisir la Cour de questions préjudicielles ». X. Magnon, La QPC face au droit de l'Union : la brute, les bons et le truand, Revue française de droit constitutionnel, vol. 84, n°. 4, 2010, p. 761-791.
  • [22]
    Ancien art. L162-12 du CSP.
  • [23]
    Pour une classification de ces affections v. P. Engelmann, Les interruptions médicales de grossesse. Évolutions législatives, témoignage et questions, Laennec, vol. tome 50, n°. 4, 2002, p. 16-26.
  • [24]
    Cass. 20 mai 1936, Mercier.
  • [25]
    L'interruption volontaire de grossesse pour motif médical peut être envisagée à tout moment de la grossesse après avis de deux médecins membres d'une équipe pluridisciplinaires attestant de la forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité (art. L2213-1 du CSP).
  • [26]
    Ass. nat. : Amendement au projet de loi de modernisation sociale déposé par M. Mattei, non adopté (séance du 10 janvier 2001), Proposition de résolution de MM. Jean-François Mattei, Jean-Louis Debré et Philippe Douste-Blazy tendant à la création d'une commission d'enquête sur la situation des personnes handicapées en France. (22 mai 2001), Rapport n° 3260 de M. Francis Hammel au nom de la commission des affaires culturelles, Proposition de loi de MM. Georges Sarre et Jean-Pierre Chevènement, visant à garantir l'égale dignité de toute vie humaine (26 sept. 2001), Question écrite de M. Léonce Deprez à Mme la ministre déléguée à la famille (1er oct. 2001), Question écrite de M. Léonce Deprez à M. le ministre chargé des relations avec le parlement (1er oct. 2001), Question au gouvernement de M. Jean-François Chossy (27 nov. 2001), Proposition de loi de M.M. Jean-François Mattei, Jean-Louis Debré et Philippe Douste-Blazy relative à la solidarité nationale et à l'indemnisation des handicaps congénitaux (3 déc. 2001), art. 16 et 1382 du code civil amendement déposé par le gouvernement (débats du 10 janvier 2002), Amendement au projet de loi de modernisation sociale déposé par MM. Fouché et Mattei, retiré à l'issue du débat (séance du 6 décembre 2001).
    Sénat : Amendement au projet de loi relatif à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception, déposé par M. Claude Huriet (séance publique du 28 mars 2001). Supprimé par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture (séance du 17 avril 2001), Question écrite de M. Serge Mathieu (4 oct. 2001), Proposition de loi de M. Bernard Fournier et plusieurs de ses collègues tendant à interdire l'indemnisation d'un "préjudice de naissance".
    Proposition de loi de M. Jacques Blanc, relative à la solidarité nationale et à l'indemnisation des handicaps congénitaux (7 déc. 2001), Question au gouvernement de M. Robert Calmejane (7 déc. 2001), Rapport d'information fait au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la jurisprudence « Perruche », par M. René Garrec, 3 janvier 2002.
  • [27]
    Titre Ier : Solidarité envers les personnes handicapées, Article 1
    I. - Nul ne peut se prévaloir d'un préjudice du seul fait de sa naissance.
    La personne née avec un handicap dû à une faute médicale peut obtenir la réparation de son préjudice lorsque l'acte fautif a provoqué directement le handicap ou l'a aggravé, ou n'a pas permis de prendre les mesures susceptibles de l'atténuer.
    Lorsque la responsabilité d'un professionnel ou d'un établissement de santé est engagée vis-à-vis des parents d'un enfant né avec un handicap non décelé pendant la grossesse à la suite d'une faute caractérisée, les parents peuvent demander une indemnité au titre de leur seul préjudice. Ce préjudice ne saurait inclure les charges particulières découlant, tout au long de la vie de l'enfant, de ce handicap. La compensation de ce dernier relève de la solidarité nationale.
    Les dispositions du présent I sont applicables aux instances en cours, à l'exception de celles où il a été irrévocablement statué sur le principe de l'indemnisation.
    II. - Toute personne handicapée a droit, quelle que soit la cause de sa déficience, à la solidarité de l'ensemble de la collectivité nationale.
    III. - Le Conseil national consultatif des personnes handicapées est chargé, dans des conditions fixées par décret, d'évaluer la situation matérielle, financière et morale des personnes handicapées en France et des personnes handicapées de nationalité française établies hors de France prises en charge au titre de la solidarité nationale, et de présenter toutes les propositions jugées nécessaires au Parlement et au Gouvernement, visant à assurer, par une programmation pluriannuelle continue, la prise en charge de ces personnes.
  • [28]
    B. Girard, La responsabilité civile dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel, Jus Politicum, n° 21 [http://juspoliticum.com/article/La-responsabilite-civile-dans-la-jurisprudence-du-Conseil-constitutionnel-1253.html]
  • [29]
    M. Fabre-Magnan, L'affaire perruche : Pour une troisième voie, Droits, vol. 35, n° 1, 2002, p. 119-133.
  • [30]
    Avis rendu par le Conseil d'État sur les questions de droit posées par le tribunal administratif de Paris (affaire Draon), le 6 décembre 2003, JO du 12 janvier 2003).
  • [31]
    Stipulations du 1 de l'art. 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, art. 5, 8, 13 et 14 de cette convention, art. 1er du premier protocole additionnel à cette convention, art. 14 et 26 du pacte sur les droits civils et politiques.
  • [32]
    CEDH, Draon c. France, Maurice c. France, 6 oct. 2005.
  • [33]
    Décision n° 2010-2 QPC du 11 juin 2010, Mme Vivianne L. [Loi dite "anti-Perruche"], cons 23.
  • [34]
    Civ. 1re, 8 juill. 2008
  • [35]
    CE 24 févr. 2006, n° 250704 CE, Mme Levenez et M. Levenez, Lebon ; AJDA 2006. 520 ; ibid. 1272, note S. Hennette-Vauchez ; D. 2006. 812 ; RDSS 2006. 360, obs. P. Hennion-Jacquet ; RTD civ. 2006. 263, obs. J.-P. Marguénaud .
  • [36]
    Assemblée nationale, Rapport enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 décembre 2001 fait au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur les propositions de loi - de M. Jean-François Mattei (n° 3431), relative à la solidarité nationale et à l'indemnisation des handicaps congénitaux,- de M. Bernard Accoyer (n° 2844), instituant un moratoire sur les demandes en recherche de responsabilité du fait de la naissance ou du maintien de la vie, - de M. Jean-François Chossy (n° 2805), tendant à rendre irrecevable toute demande d'indemnisation du seul fait de sa naissance, par M. Jean-François Mattei.
  • [37]
    Rapport de la Mission « Droit et justice », Naissances handicapées et responsabilité, recherche sur l'impact de l'arrêt « Perruche » sur la jurisprudence et sur les pratiques en matière d'assurance médicale », http://anr-dpn.vjf.cnrs.fr/sites/default/files/133-RF_Labrusse-Riou_Rapport %20Perruche.pdf
  • [38]
    J. Krinen, op. cit., p. 19, s.
  • [39]
    J. Chevallier, Doctrine juridique et science juridique, Droit et Société, n° 50, 2002, p. 103-119.
  • [40]
    P. Rémy, le rôle de l'exégèse dans l'enseignement du droit au XIXe siècle, https://univ-droit.fr/docs/recherche/rhfd/pdf/02-1985/02-1985-p091-105.pdf.
  • [41]
    D. de Béchillon, Porter atteinte aux catégories anthropologiques fondamentales ? Réflexions, à propos de la controverse Perruche, sur une figure contemporaine de la rhétorique universitaire, RTD civ. 2002. 47 ; P.Y. Gauthier, Les distances du juge, à propos d'un débat éthique sur la responsabilité civile, JCP 2001, I, 287, Notes autour de l'affaire P..., Droits, Revue française de théorie, de philosophie et de culture juridique, 2002, n° 35, p. 147 ; M. Gobert, La Cour de cassation méritait-elle le pilori (À propos de l'arrêt de l'Assemblée plénière du 17 novembre 2000), LPA, 8 déc. 2000, p. 4, République, Cour de cassation et échographie (à propos des arrêts d'Assemblée plénière du 13 juillet 2001), LPA, 21 nov. 2001, p. 7 s., Handicap et démocratie, Revue Commentaire, printemps 2002, p. 29 s. ; T. Pech, Retour sur la jurisprudence Perruche, Esprit, janv. 2002. ; THERY, P., Un grand bruit de doctrine, in Ruptures, mouvements et continuité du droit, Autour de Michelle Gobert, Economica, 2004, p. 113 s. ; N. Molfessis, La controverse doctrinale et l'exigence de transparence de la doctrine, RTDC 2003. 161 s. Sur la distinction entre doctrine et sciences juridique, v., J. Chevallier, loc. cit.
  • [42]
    M. Troper, Qu'est-ce que la philosophie du droit ?, éd., La philosophie du droit. Presses Universitaires de France, 2011, p. 9-25 ; J.-P. Chazal, Philosophie du droit et théorie du droit, ou l'illusion scientifique, Revue interdisciplinaire d'études juridiques, vol. volume 46, n°. 1, 2001, p. 39-80.
  • [43]
    C. Bachelard-Jobart, L'eugénisme, la science et le droit, collec. Partage du savoir, PUF, 2001 ; O. Cayla, Y. Thomas, Du droit de ne pas naître. À propos de l'affaire Perruche, Gallimard, collec. Le débat, 2002 ; J. Chanteur, Condamnés à mort ou condamnés à vivre ? Autour de l'arrêt Perruche, Éditions Factuel, 2002 ; M. Iacub, Penser les droits de la naissance, PUF, Questions d'éthique, 2002 ; M. Iacub, P. Jouannet, (collectif), Juger la vie, La découverte, 2001 ; M. Iacub, Droit de ne pas naître ou liberté de procréer ?, in Le crime était presque sexuel, et autres essais de casuistiques judiciaires, Edel, 2002. B. Edelman, L'arrêt « Perruche » : une liberté pour la mort ? D. 2002. 2349 ; G. Lhuilier, Les juristes sont-ils des clercs ? Sur la dimension anthropologique du droit, Esprit, nov. 2002, p. 183-195 ; D. Salas, L'arrêt « Perruche », un scandale qui n'a pas eu lieu, Justices, 14 mai 2001, hors-série.
  • [44]
    P. Brunet, Argument sociologique et théorie de l'interprétation, in D. Fenouillet, (dir.), L'argument sociologique en droit. Pluriel et singularité, Paris, Dalloz, coll. Thèmes et Commentaires, 2015, p. 101-116.
  • [45]
    V. par exemple, O. Cayla, Y. Thomas, Du droit de ne pas naître. À propos de l'affaire Perruche, Gallimard, collec. Le débat, 2002.
  • [46]
    E. Mackaay, La règle juridique observée par le prisme de l'économiste - Une histoire stylisée du mouvement de l'analyse économique du droit, RIDE 1986. 43 s. ; E. Mackaay, S. Rousseau, Analyse économique du droit, Dalloz, coll. Méthodes du droit, 2008 ; Y. Gabuthy, Analyse économique du droit : présentation générale, Économie et prévision 2013, p. 202.
  • [47]
    Rapport de la Mission « Droit et Justice », III, L'impact de la réparation du handicap de naissance sur l'assurance médicale et sur les mécanismes de solidarité nationale ; L'assurance de responsabilité civile médicale au 1er janvier 2005, Assurer (Lettre d'information bimensuelle éditée par la Fédération française des sociétés d'assurance) n° 42, 26 janv. 2005 ; L. Dubouis, Assurance privée et responsabilité médicale, RDSS 39 (3), 2003, p. 353 ; L. Hemlinger, D. Martin, La judiciarisation de la médecine : mythe et réalité, revue Sève, n° 5, 2005 p. 39 ; La crise de l'assurance responsabilité civile médicale, D. 2003, Point de vue p. 142 ; La responsabilité médicale : la loi du 30 décembre 2002 modifiant la loi du 4 mars 2002, D. 2003. Chron. 361 ; J. Lansac, M. Sabouraud, Les conséquences de la judiciarisation de la médecine sur la pratique médicale, revue Sève, n° 5, 2005 p. 47 ; C. Rade, La solidarité au secours de la responsabilité, Resp. civ. et ass. 2003, chr. n° 5 ; P. Villeneuve, Les vicissitudes de l'assurance de responsabilité civile des professionnels de santé, LPA, 17 déc. 2004.
  • [48]
    V. le rapport sur l'impact des décisions de justice de la Mission Droit et Justice.
  • [49]
    Rapport précité.
  • [50]
    P. Amselek, éd., 1995.
  • [51]
    G. Kalinowski, loc. cit. ; D. Bourcier, P. Mackay, éd., 1992.
  • [52]
    Il faudrait comprendre dans ces acteurs les praticiens (avocats, juristes d'entreprises, juristes administratifs) qui expriment leur point de vue sur l'application des règles.
  • [53]
    M. Van de Kerchove, M. Ost, 1988.
  • [54]
    J. Hauser, Le juge et la loi, Pouvoirs, vol. 114, n°. 3, 2005, p. 139-153.
  • [55]
    H. Capitant, F. Terre, Y. Lequette, Les grands arrêts de la jurisprudence civile T1 et T2, 13e édition, Dalloz, 2015 ; J. Pradel, A. Varinard, Les grands arrêts de la procédure pénale, 10e édition, Dalloz 2019, Les grands arrêts du droit pénal général, 11e édition, Dalloz 2018.
  • [56]
    Art. 1014 du c. pr. civ., L131-6 du COJ.
  • [57]
    Art. L. 441-1 à L. 441-4 et R. 441-1 du COJ.
  • [58]
    Décision n° 2010-39 QPC du 6 octobre 2010, Mmes Isabelle D. et Isabelle B. [Adoption au sein d'un couple non marié], cons 2.
  • [59]
    Voir supra § **
  • [60]
    Civ. 1re, 26 mars 1996.
  • [61]
    Cass., ass. plén., 28 nov. 2001, Bull. Ass. plén., n° 15 et 16 ; JCP 2002, II, n° 10018.
  • [62]
    J. Massip, J. Carbonnier, un législateur attentif à la jurisprudence et à la pratique judiciaire, https://www.courdecassation.fr/IMG/File/5-intervention_massip.pdf
  • [63]
    J.-P. Duprat, La représentation, le législateur et le juge, in Le concept de représentation dans la pensée politique, Presses universitaires d'Aix-Marseille, 2015, p. 469-489.
  • [64]
    J.-M. Sauvé, L'étendue et les limites du pouvoir du juge, Intervention à l'occasion d'un Colloque européen sur le juge et la politique le 31 octobre 2014, https://www.conseil-etat.fr/actualites/discours-et-interventions/l-etendue-et-les-limites-du-pouvoir-du-juge ; G. Canivet, Activisme judiciaire et prudence interprétative in La création du droit par le juge, Paris, Dalloz, 2007.
  • [65]
    Pour un inventaire du contentieux de l'indemnisation du handicap d'origine génétique devant les juridictions de l'ordre judiciaire v. le rapport précité de la Mission Droit et Justice sur l'impact des décisions de justice II, A.
  • [66]
    V. par exemple pour la Cour suprême des États-Unis, la réflexion de S. Breyer, La Cour suprême, l'Amérique et son histoire, Odile Jacob 2011 et, pour la Cour suprême d'Israël, A. Barak, L'exercice de la fonction juridictionnelle vu par un juge : Le rôle de la Cour suprême dans une démocratie, Presses Universitaires de France, Revue française de droit constitutionnel, 2006/2 n° 66, p. 227 à 302.
  • [67]
    A. Barak, Ibid.
  • [68]
    D. Lochak, Le juge doit-il appliquer une loi inique ?, Le Genre humain, vol. 28, n°. 1, 1994, p. 29-39. ; Concl. J. Sainte-Rose, sous C. cass A.P. 17 nov. 2000, JCP 2000, II, 10438, 13 juill. 2001, JCP 2001, II, 10601, 28 nov. 2001, JCP 2002, II, n° 10018.
  • [69]
    J. Sainte-Rose, Concl. sous C. cass A.P., 17 nov. 2000, JCP 2000, II, 10438, 13 juill. 2001, JCP 2001, II, 10601, 28 nov. 2001, JCP 2002, II, n° 10018 ; Le droit et la vie, RRJ, Droit prospectif, 2002-3, p. 1131. À propos de l'affaire Perruche, Droits, Revue française de théorie, de philosophie et de culture juridique, 2002, n° 35, p. 142, Le juge face aux normes de la biomédecine, in Feuillet-Le Mintier (dir.), Normativité et biomédecine, Economica, 2003, p. 249-258.
  • [70]
    Assemblée nationale, Rapport Mattei, précité.
  • [71]
    Civ. 1re, 26 mars 1996, Bulletin 1996 n° 155 p. 109.
  • [72]
    CE., 14 févr. 1997, CHR de Nice/Quarez, JCP 1997, II, 22828, note J. Moreau ; RFDA 1997. 374, concl. V. Pécresse.
  • [73]
    Conclusions Valérie Pécresse précitées « ... nous ne pensons pas qu'un enfant puisse se plaindre d'être né tel qu'il a été conçu par ses parents (...) Affirmer l'inverse serait juger qu'il existe des vies qui ne valent pas la peine d'être vécues et imposer à la mère une sorte d'obligation de recourir, en cas de diagnostic alarmant, à une interruption de grossesse ».
  • [74]
    Art. L431-5 à L431-10, R431-11 à R431-14 du COJ.
  • [75]
    B. Markesinis, Réflexions d'un comparatiste anglais sur et à partir de l'arrêt Perruche, RTD civ. 2001. 77.
  • [76]
    Concl. J. Sainte Rose, précitées.
  • [77]
    Le Tribunal fédéral suisse, par exemple.
  • [78]
    Rapports précités P. Sargos et H. Blondet.
  • [79]
    Cass., Note relative à la structure des arrêts et avis et à leur motivation en forme développée, déc. 2018.
  • [80]
    Sur la pertinence de l'opposition entre jusnaturalisme et positivisme v. J.-P. Chazal, loc.cit.
  • [81]
    Autorité de la concurrence, Décision n° 06-D-34 du 9 novembre 2006 relative à des saisines concernant le domaine de l'assurance de la responsabilité civile médicale ; IGAS Rapport d'enquête sur l'assurance de responsabilité médicale, janv. 2004.
  • [82]
    Rapport de la Mission Droit et Justice, préc.
  • [83]
    Rapport de la Mission Droit et Justice, préc.
  • [84]
    Rapport de la Mission Droit et Justice, préc.
  • [85]
    Loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées (1).
  • [86]
    CEDH, 6 oct. 2005, n° 1513/03, Draon c/ France, AJDA 2005. 1924, obs. M.-C. Montecler ; D. 2005. 2546, obs. M.-C. de Montecler ; ibid. 2006. 1200, obs. J.-C. Galloux et H. Gaumont-Prat ; RDSS 2006. 149, obs. P. Hennion-Jacquet ; RTD civ. 2005. 743, obs. J.-P. Marguénaud ; ibid. 798, obs. T. Revet .
  • [87]
    Rapport de la Mission Droit et Justice, précité.
  • [88]
    Civ. 16 juin 1896.
  • [89]
    Loi du 9 avril 1898 Concernant les responsabilités dans les accidents du travail ; F. Ewald, Formation de la notion d'accident du travail in : Sociologie du travail, 23[#7497] année n° 1, Janvier-mars 1981. Sociologie et justice. p. 3-13.
  • [90]
    V. le débat actuel à propos du Projet de loi relatif à la bioéthique.
  • [91]
    C'est la mission de l'Agence de la biomédecine.
  • [92]
    V. le rapport de la Cour des comptes sur l'allocation aux adultes handicapés du 19 novembre 2019 ; l'Agence de la biomédecine, 2008.
  • [93]
    V. Autorité de la concurrence, Décision n° 06-D-34 du 9 novembre 2006 précitée.
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