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Article de revue

Arène de conflit ou acteur institutionnel ? Le rôle de l'Association Nationale des Magistrats dans la gouvernance judiciaire italienne

Pages 477 à 487

Notes

  • [1]
    La constitution italienne attribue au Conseil supérieure de la magistrature ces fonctions. Le CSM est un organe de rang constitutionnel composé par 24 membres plus le président de la République, qui en est le président, dont deux tiers sont élus par les magistrats sur la base d'une distinction de fonction et un tiers est élu par le Parlement en séance commune - les deux chambres réunies ensembles - et avec la majorité qualifiée des votes.
  • [2]
    Cf. L. 24 mars 1958, n. 195, ensuite modifiée par la loi 695/1975 et la loi 44/2002.
  • [3]
    Programme électoral de Magistratura Democratica pour les élections du Comité de direction de l'Association Nationale Magistrats, 6-8 mars 2016.
  • [4]
    Programme électoral de Magistratura Indipendente pour les élections du Comité de direction de l'Association Nationale Magistrats, 6-8 mars 2016.
  • [5]
    Programme électoral de Unità per la Costituzione pour les élections du Comité de direction de l'Association Nationale Magistrats, 6-8 mars, 2016.

Remarques introductives

1Presque plébiscitaire. L'Association Nationale des Magistrats (ANM) italienne compte depuis des décennies un consensus qui va bien au-delà du 90 %. On aurait déjà là une raison forte pour soutenir l'exceptionnalité du cas italien si on le met dans une perspective comparée européenne. Ce consensus extrêmement étendu peut être entièrement apprécié si l'on le considère en combinaison avec la pluralité culturelle qui caractérise l'ANM sur les points essentiels de la politique judiciaire : tout d'abord l'interprétation du rôle du magistrat dans un système démocratique [Borgna e Maddalena, 1996 ; Guarnieri, 2003], ensuite la façon dont les fonctions d'ordre directif, voire les chefs des juridictions doivent être conçues [Marini, 2010 ; Cassano, 2011 ; Lepre, 2014], pour arriver jusqu'à un point crucial dans l'histoire de la magistrature en Italie, l'enjeu entre l'ANM et le Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Celui-ci est l'organe responsable, depuis la loi constitutionnelle républicaine, du recrutement, de la nomination, de l'évaluation et du contrôle disciplinaire des magistrats ordinaires (ceux qui ont fonctions d'ordre juridictionnel ainsi que ceux qui sont attachés au parquet)  [1].

2Les équilibres que l'on peut observer se déployant tout au long du développement de la démocratie italienne ont garanti d'une certaine manière que la pluralité interne à l'ANM était organisée et transmise aux institutions à travers un mécanisme associatif que l'on appelle « correnti », groupes. Chaque groupe avait ses leaders, ou mieux dit ses points de référence, sa revue, ses colloques/séminaires, ses initiatives culturelles. Chaque groupe participait en tant que groupe à la définition des candidatures des magistrats qui participent aux élections pour devenir membres du CSM.

3C'est exactement par ce biais que l'associationnisme judiciaire a été de plus en plus perçu comme un outil au service du corporativisme judiciaire. Les critiques couvrent plusieurs aspects, mais la remarque la plus négative porte sur la relation entre les liens associatifs des membres du CSM et les nominations des magistrats pour les postes de chefs ou encore le fait que l'ANM ne soit pas capable de se faire acteur promoteur d'une politique d'auto-réforme de la magistrature telle qu'on la voudrait dans un système d'auto gouvernance comme celui italien.

4Il faut souligner que les remarques critiques ne dérivent pas seulement du monde extérieur à la magistrature. Bien au contraire. Les magistrats italiens eux-mêmes soulèvent des perplexités, voire des critiques profondes à l'égard du système des « correnti ». Cela est d'autant plus vrai de ce que l'on prend en considération les années récentes pendant lesquelles la question de la nomination des chefs de juridiction est devenue un thème central. Différentes raisons sont responsables de cette tournure critique. Tout d'abord le fait que les nominations des chefs ont une validité temporaire. Les magistrats qui exercent les fonctions de chef de juridiction après 8 ans sont censés revenir à leurs services ordinaires. D'ailleurs, après 4 ans de service ils sont évalués sur la base des résultats d'ordre organisationnel ainsi que de gestion de la juridiction, afin que la fonction soit confirmée encore pour 4 ans.

5 C'est donc facile de comprendre le pourquoi : en Italie les enjeux qui se mettent en oeuvre entre l'ANM, le CSM et la magistrature en tant que corps sont extrêmement importants. Les pages à suivre vont aborder ce sujet très délicat et en même temps très fascinant pour le sociologue du droit et le politologue sous trois angles :

  • 1. Un aperçu historique qui permet aux lecteurs de comprendre quelles sont les traditions et les règles informelles - voire les normes implicites - de l'associationnisme judiciaire italien.
  • 2. Une analyse détaillée du cadre normatif et institutionnel de la gouvernance judiciaire italienne dans lequel il soit possible de mettre au jour le rôle joué par l'ANM.
  • 3. Une reconstruction critique faite sur la base des données de recherche du terrain des débats et des questions aujourd'hui sur l'agenda de l'ANM et du CSM in matière de professionnalité des magistrats ayant fonctions de chef de juridiction ou de chef du parquet.

6Quelques remarques sur les leçons à tirer du cas italien seront enfin proposées.

Regards différents, langage commun : l'associationnisme judiciaire en Italie et ses « correnti »

7L'Association des magistrats italiens existe depuis 1909 quand, à Milan, sous le nom de l'Association générale des magistrats, on peut voir la forme embryonnaire de la future ANM. Dissolue par le régime fasciste, l'ANM vient d'être constituée en 1944, à Rome, où elle se trouve directement impliquée dans le débat culturel qui est à la base de la rédaction de la charte constitutionnelle, notamment dans l'élaboration de la partie portant sur le rôle de la magistrature, art. 101-113. À cette époque la culture judiciaire de la magistrature était encore influencée par une idée institutionnelle de hiérarchie, qui allait avec la centralité de la Cour de cassation à la fois dans les lignes jurisprudentielles et dans le rôle des magistrats de cassation joués dans la nomination et dans la légitimation des magistrats plus jeunes. Cet idéal - qui se reflète dans une fonction judiciaire relativement homogène - va être mis en cause quelques années après l'instauration de la république. C'est d'abord entre le 1956 et le 1957 qu'une forme associative représentative de la partie la plus jeune de la magistrature, celle qui avait interprété le rôle du pouvoir judiciaire comme étant l'architrave de la nouvelle forme républicaine et démocratique, commence à s'opposer à la partie de la magistrature qui occupait à ce moment les positions les plus hautes dans les institutions judiciaires. Le nom de cette forme associative dévoile en soi l'orientation culturelle : « Terzo Potere ». L'usage du terme pouvoir mérite quelque considération. Il s'agit d'une référence claire à la magistrature comme troisième pouvoir, à côté de l'exécutif et du législatif. Mais il s'agit aussi d'une reconnaissance claire du fait qu'il y a un pouvoir dans les institutions judiciaires et que ce n'est pas par ce biais qu'il devient possible de se mettre au service seulement de la loi, mais aussi des principes et des valeurs de la démocratie. On trouve ici les graines d'une vision substantielle de la justice, et non pas seulement formelle-procédurale. C'est d'ailleurs au congrès du « Terzo Potere », organisé à Naples en 1957, que l'on voit adoptée dans le cadre d'un programme de politique judiciaire l'idée selon laquelle la carrière ne représente pas un mécanisme qui se différencie parmi les magistrats. Les magistrats sont plutôt égaux, en se distinguant seulement sur la base de leurs fonctions. Cela signifie en concret que les promotions de carrière ne doivent pas être conçues comme des voies vers une différentiation du pouvoir dans la magistrature. Un magistrat de cassation ne se distingue pas en tant que statut d'un magistrat qui vient juste d'être nommé [Meniconi, 2013].

8La magistrature ainsi dite « di carriera », c'est-à-dire les magistrats les plus anciens, en 1961 s'associent dans l'Union Magistrats Italiens. Il s'agissait d'une association qui avait la majorité dans la Cour de cassation, mais seulement un taux de représentation de 7-8 % dans le Conseil supérieure de la magistrature. Cette distribution inégale de la représentation du consensus ne montre pas seulement l'existence d'une ligne de conflit entre la magistrature jeune et la magistrature ancienne, mais aussi une question qui restait sur l'agenda de la politique judiciaire italienne et qui - dans des formes différentes - est toujours présente, à savoir la conception de la carrière. Deux pôles peuvent être reconnus : le premier est celui des magistrats qui pensent que la carrière n'existe pas en tant que telle, mais les différentes positions reflètent plutôt un service rendu à l'institution - donc par exemple après avoir prêté service en tant que magistrat président du tribunal on peut, et il doit être possible que l'on puisse, rendre service en tant que magistrat ordinaire ; le deuxième, qui voit dans la carrière un miroir de la croissance des compétences.

9Les années 60 témoignent du développement de l'Association nationale des magistrats, qui organise son premier congrès en 1964, année dans lequel vient se former Magistratura democratica. À la fin des années 60 on a une configuration de l'associationnisme qui ressemble de près à celle que l'on observe aujourd'hui. Magistratura Democratica, qui représente la partie la plus favorable à une interprétation du rôle du juge comme interprète de la norme dans une direction d'expansion des droits fondamentaux, Magistratura Indipendente, qui est la partie de la magistrature initialement la plus liée aux magistrats de cassation et d'appel et ensuite avec la perte des magistrats les plus anciens, devient la « corrente » la plus traditionaliste, Unità per la costituzione, qui émerge de la combinaison des magistrats plus modérés de Magistratura Democratica avec Terzo Potere.

10Les évolutions des « correnti » peuvent être considérées comme le miroir des conflits culturels et institutionnels qui ont marqué la magistrature italienne dans les premières décennies de sa vie démocratico-républicaine. Deux lignes de tensions : la première portant sur la façon d'interpréter le rôle du juge - si plus proche de la bûche de la loi ou plutôt interprète de son temps historique ; la deuxième portant sur la conception de la carrière, plus proche à une véritable promotion et par conséquence conçue comme liée à la seniority, ou plutôt proche à un service qui doit être rendu à l'institution judiciaire, sans qu'il y ait un lien explicite avec la carrière. On pourrait dire, d'une manière synthétique, mais pas trop éloignée de la réalité, que la position culturelle de Magistratura Democratica est plus proche de celle qui inspire les magistratures post bureaucratiques, tandis que la position culturelle de Magistratura Indipendente est plus proche de celle qui inspire les magistratures nordiques, voir en Suède ou au Norvège, pour arriver jusqu'à l'Autriche, là où la carrière et la hiérarchie judiciaire sont des mécanismes de gouvernance consolidés.

11Les positions culturelles différentes ont fait à la fois l'objet d'un débat dans chaque « corrente » - qui a fait ainsi que, à travers les conférences annuelles organisées par chacune « corrente » se sont de plus en plus émergé les leaders, les magistrats avec une capacité de construction du consensus - et le moteur de la compétition électorale pour devenir membre du Conseil supérieur de la magistrature.

12Il est donc important de comprendre quelle est la structure institutionnelle du CSM et de quelle manière sont nommés ses membres. Selon la loi organique de 1958, qui applique la norme constitutionnelle (art. 105) selon laquelle la magistrature, la nomination, la promotion, la discipline sont gérés par un organisme d'auto-gouvernement, - le CSM est un organisme constitutionnel - dont la réforme demande une majorité qualifiée des deux chambres du parlement - et avec une majorité des magistrats, à la fois du siège et du parquet. Avant 1975, la magistrature des hautes cours avait la majorité au CSM. Il s'agissait d'une condition qui faisait l'objet de critiques exacerbées à l'intérieure de la magistrature ordinaire de première nomination, qui a mobilisé ses ressources culturelles et politiques pour arriver à changer la norme électorale pour l'élection des membres du CSM [Freddi, 1976].

13Selon la constitution et la loi organique à l'état présente le CSM est composé par le président de la République, qui en est le président, le président de la Cour de cassation et le procureur général à la cassation [2]. Les magistrats élus sont les deux tiers du CSM et sont, d'après la dernière réforme, adoptée en 2002, 16. Ils comprennent deux magistrats de la Cour de cassation - du siège et du parquet - quatre magistrats du parquet des juridictions ordinaires, 10 magistrats du siège des juridictions ordinaires. Les autres 8 membres du CSM sont nommés par le parlement, les deux chambres, avec une majorité qualifiée des trois cinquièmes, parmi des avocats et des professeurs de droit.

14Du point de vue des interactions du CSM avec l'Association Nationale des Magistrats la variable importante à considérer est le système électoral. Le système est majoritaire, sur un collège unique, national. Chaque magistrat a trois niveaux de décision : le candidat de cassation, le candidat du parquet ordinaire, le candidat du siège ordinaire. Les candidatures sont individuelles et sont coordonnées à l'intérieure de l'Association Nationale des Magistrats.

15D'une certaine manière c'est la compétition électorale au CSM qui met en place des conditions structurelles favorables à la coordination à l'intérieur des « correnti », qui jouent un rôle de vrais producteurs du consensus [Guarnieri, 2014 ; Morlino et Piana, 2016].

16Après les années 90 cependant une transformation dans la magistrature a donné lieu à un phénomène nouveau qui a mis en cause la capacité des « correnti » d'agréger les magistrats sur des programmes communs. Il s'agit de la monté en puissance de la visibilité publique de certains magistrats liés plutôt à la juridiction, et moins à la « corrente ». Pour mieux le dire, c'était à la suite de certaines affaires qui avaient un écho national très fort que certains magistrats ont construit une position dans le monde de la politique judiciaire très importante. On peut donner deux exemples, Caselli qui est à Palermo pendant la saison des grands procès contre la mafia, Antonio di Pietro qui est à Milan dans la grande enquête Mains Propres, Gerardo Colombo, lui-même à Milan. Dans l'ensemble l'agrégation sur la base des « correnti » est accompagnée et parfois même mise à l'écart par l'émergence de ces personnalités qui sont très localisées et liées au territoire tout d'abord. Le consensus lié au territoire devient une composante dans la compétition électorale au CSM. On vit une saison d'affaiblissement des « correnti », qui se manifeste aussi dans le fait que les jeunes magistrats, qui viennent d'être nommés s'éloignent de l'associationnisme, vu comme un lieu de confrontation et de conflit de grands magistrats, plutôt que comme un laboratoire de la culture judiciaire.

17C'est avec les changements normatifs qui se passent en 2006 et ensuite en 2015 que l'on voit un retour des conflits entre les « correnti », sur une base de véritable interprétation du rôle du magistrat ou, d'une manière plus spécifique, du magistrat qui a un rôle chef dans la juridiction : chef du tribunal ou chef du parquet.

Un chef c'est pas un « chef » : les acteurs et leurs sémantiques

18En 2006, à la suite d'un changement du gouvernement qui a vu la gauche remplacer la droite, le parlement italien passe une loi organique qui fixe les termes de l'organisation judiciaire sur trois niveaux :

  • 1. la nomination des chefs de juridiction et la gestion des carrières ;
  • 2. la procédure d'évaluation de professionnalité ;
  • 3. la formation des magistrats, initiale et continue.

19 Les éléments d'innovation ont été multiples. Tout d'abord, le système qui avait été appliqué jusqu'à ce moment, consistant à interpréter la carrière sur la base d'une promotion automatique qui allait avec la seniority, vient d'être remplacé par un mécanisme de nomination en chef de type temporaire. Les magistrats qui ont fonctions de type organisationnel sont nommés pour quatre ans, après lesquels ils sont soumis à une évaluation qui, si positive, donne lieu à une confirmation pour quatre ans. Après 8 ans au maximum, la nomination comme chef cesse d'être valide et le magistrat reprend en principe ses fonctions ordinaires, sauf si il ou elle est nommé(e) dans une autre juridiction comme chef. Le changement est significatif du point de vue de l'Association Nationale des Magistrats et de ses « correnti ». Toujours contraires à une idée hiérarchique de carrière, les magistrats de Magistratura Democratica ont bien soutenu la réforme, laquelle n'avait pas été soutenue, par contre, par Magistratura Indipendente. Si auparavant les nominations des chefs de tribunal et de cour d'appel, ainsi que les chefs du parquet, avaient été un thème conflictuel, mais toujours gérés sur la base du critère de la seniority, qui avait une sorte d'objectivité hétéronome par rapport aux coordinations internes à l'Association Nationale des Magistrats, après 2006 la nomination des magistrats « direttivi » devient une arène dans laquelle les « correnti » reprennent une activité au sein du CSM et qui est liée pas seulement à une distribution des postes, mais aussi - et parfois même plus important - à une pluralité des visions portant sur ce qui doit faire un chef.

20Les « correnti » se situent tout au long d'un continuum, qui va d'une vision plus entrepreneuriale - partagé par Magistratura Democratica - à une vision plus traditionnelle - partagé par Magistratura Indipendente.

21Le test révélateur de cette tension, dérivant d'une pluralité des visions, est double et date du 2015. En 2014 le gouvernement propose au parlement une norme qui oblige les magistrats de 70 ans à se retirer à la retraite, tandis qu'auparavant ils restaient en service jusqu'à 72 ans. Cette coupure dans la magistrature, qui en considérant l'âge, est concernée surtout à la fin de la carrière et, de facto, parmi les magistrats avec des positions hautes dans la juridiction, met dans les mains du CSM une question très difficile à gérer, qui consiste en une série de nominations tout à fait extraordinaire par quantité et donc par potentiel conflictuel.

22À la suite d'une action de promotion interne au CSM des membres élus au sein de la « corrente » Magistratura Indipendente, on arrive à adopter, en juillet 2015, le premier texte organique sur les critères et les indicateurs à appliquer dans les décisions de nomination des chefs de juridiction. Il s'agit d'une révolution de paradigme, au moins dans les principes de politique judiciaire. Le texte est intitulé « Testo Unico » et vise à « rendre intelligible et prévisible le pouvoir du CSM » en matière de gouvernement des carrières. Cette norme, qui relève de l'ordre du règlement, est prise en aval d'une longue décennie où la légitimité dite du pouvoir judiciaire externe a été confrontée à des problèmes systémiques dirions-nous. Peut-être que dans aucune représentation d'autres démocraties européennes, les médias, les incursions fréquentes du discours politique sur le plan institutionnel entre des conflits et de la perméabilité effective de la politique - en termes de leadership - le pouvoir judiciaire lui-même a certainement fait pression sur le profil perçu, représenté, dit l'impartialité mais surtout ce qui est plus important que la prévisibilité de la fonction judiciaire. Bien heureusement, cela n'a pas donné lieu à un changement au niveau des directions réglementées impliquant des réformes visant à réduire les garanties d'indépendance, cependant, la question de la perception et de la représentation est d'un intérêt direct pour la légitimité du pouvoir judiciaire liée main dans la main en fonction de l'espérance d'un alignement de certaines règles et mis en oeuvre de manière certaine et prévisible.

23L'objection que le discours des médias et de la narration collective ne correspond pas à la vérité ne contribue pas à résoudre le problème qui existe encore de la perception externe de la fonction judiciaire. Par conséquent, d'une certaine façon le « Testo Unico a voulu donner un signal de prédétermination, lecture claire et la lisibilité même de l'extérieur ainsi que la prévisibilité de la méthode par laquelle les juges des lignes directrices et directives fonctions semi sont nommés.

24En Italie, l'exercice de cette partie de la fonction gouvernementale de l'automobile prend un relief encore plus important par rapport à d'autres pays européens, principalement pour l'existence objective d'une différenciation régionale significative non seulement des rendements des bureaux, mais aussi dans les modèles d'organisation adoptés pour régir la fonction judiciaire afin d'assurer la qualité de la compétence et de service. Si, alors l'accès à mettre en lumière, même avec excès, puis la distorsion du discours médiatique est le fait que, objectivement, des différences régionales qui peuvent être tracées à l'adoption de modèles d'organisation et un travail différent, adoptée dans le respect des nonnes en vigueur, cela est quand il apparaît que rapport de plus grande importance institutionnelle de la tentative faite par le « Testo Unico à introduire dans la lisibilité du processus de nomination et de prévisibilité.

25L'adoption du « Testo Unico », avec les outils d'évaluation des candidats aux postes de chef de juridiction et les indicateurs considérés comme instruments de prévisibilité pour la programmation de la professionnalité des magistrats, s'inscrit dans un contexte de mis en cause de la manière dont on doit gérer la marge de manoeuvre que la norme de 2006 avait ouverte pour ceux-ci. Une fois que l'évaluation des magistrats candidats aux postes de chef est fait en considérant les activités organisationnelles et les initiatives d'innovation de l'organisation et de la technologie, les avantages professionnels dérivant d'une attitude entrepreneuriale sont évidents. À quel point un chef de juridiction peut - ou même doit - aborder le sujet de la bonne gouvernance d'un tribunal ou d'un parquet en s'éloignant d'un modèle de comportement bureaucratique, voire de stricte application des normes ? Là où il y a une marge de manoeuvre qui est même reconnue par la loi, y a-t-il le contexte suffisant pour la mise en oeuvre des stratégies d'innovation qui sont promues à travers une trajectoire bottom - up plutôt que top - down ? Cela signifie que ce sont les chefs de juridiction les vrais moteurs de l'innovation. À quel point cela est-il acceptable et même désirable dans une vision de la magistrature qui essaie de gagner en légitimité tout en sachant qu'elle en a perdue à la suite de l'inefficience dans la gestion des affaires dans des délais raisonnables ?

26Ces questions sont devenues d'autant plus contraignantes que les - « correnti » ont manifesté des positions différentes - et parfois très conflictuelles - sur la manière de combiner la dimension juridico-jurisprudentielle avec celle organisationnelle-managérielle de la professionnalité en magistrature. Un reflet de cela apparaît évident aussi dans le débat qui a eu lieu sur la formation des magistrats qui ont un poste de chef juridiction. Si d'une part la magistrature plus réformiste - sur l'héritage de Magistratura Democratica - voit avec faveur une formation qui vise à construire une professionnalité de type entrepreneuriale, la magistrature la plus traditionnaliste - sur l'héritage de Magistratura Indipendente - préfère une professionnalité toujours centrée sur le volet institutionnel (et moins manageriel).

27« Pour éviter que le nouveau leadership consolidé conduit à un carriérisme - qui est, que chaque magistrat dirige sa carrière professionnelle en non-fonctionnement du service, mais de sa carrière, amassant les titres et les mérites qui servent peu ou rien pour améliorer la qualité de son travail, il est un changement fondamental dans la mer les notes, et même avant, dans les confirmations, par le biais d'une politique sérieuse de l'expansion des sources de connaissances et la transparence absolue des éléments évalués ». [3]

28« Dans la prise de conscience du rôle central de la formation professionnelle afin de garantir une réponse judiciaire adéquate à la complexité croissante des histoires soumises au magistrat, doit être au centre du débat culturel, associatif et réalités institutionnelles, le contenu et les outils la formation actuelle. Il est donc en vue de mettre en évidence et de surmonter les problèmes rencontrés par la mise en place de plans pluriannuels concertés avec le CSM : - récupérer et renforcer le rôle du CSM dans la formation professionnelle, à travers le dialogue avec le SSM dans la formulation des lignes du Guide annuel de formation, avec une référence spécifique, entre autres, au contenu et les méthodes de formation initiale, la formation décentralisée et la formation à la gestion »  [4]

29Nous croyons que les juges qui sont les dirigeants de ne pas continuer à faire les cadres, mais de veiller à ce que chaque juge peut mieux accomplir ses tâches et d'affirmer le principe selon lequel la justice est une fonction publique pour le citoyen. Nous croyons en la justice pour laquelle l'Ecole de la magistrature est pas opposée au Conseil Supérieur de la Magistrature, mais observe ses prérogatives constitutionnelles. Nous croyons que les juges qui sont les gardiens stricts de leur professionnalisme, parce qu'ils sont légitimés uniquement dans l'exercice des fonctions judiciaires exercées à l'indépendance et l'impartialité ».  [5]

30Trois visions, trois magistratures, qui se trouvent à se mettre en accord sur les actions concrètes dans les contextes des juridictions, là où organisation, interprétation du rôle et politique judiciaire se croisent.

Quelques leçons à tirer dans une perspective comparée

31L'expérience italienne d'associationnisme judiciaire ou de syndicalisme judiciaire s'inscrit dans le cadre d'un système juridico-politique qui montre des traits spécifiques, capables d'expliquer le pourquoi de la montée en puissance de la mobilisation de la magistrature, dans deux niveaux différents : un premier qui est représenté par l'Association Nationale des Magistrats et les autres institutions, un deuxième qui consiste en des enjeux parmi les « correnti », à l'intérieur de l'Association Nationale des Magistrats. Tout d'abord, le cas italien se qualifie pour être très connoté par la demande d'une justice et d'une gestion des conflits qui doit venir d'une institution indépendante du politique. Peut-être n'a-t-on pas d'autres pays en Europe avec une demande fonctionnelle adressée à la magistrature ordinaire de la même taille que celle qui est adressée à la magistrature italienne. D'ailleurs, il serait difficile de nier que l'héritage culturel de la magistrature est très fortement influencé par les expériences faites dans les années 60 et 70, quand l'ordre même de l'État de droit et de la démocratie était en vrai danger et la magistrature a représenté un rempart contre les risques de bouleversement qui venaient de l'intérieure. Ensuite, la défense de la loi contre les attaques des organisations criminelles, surtout au Sud de l'Italie, dans les années 80, a à nouveau demandé à la magistrature une réponse de garantie, dans une condition presque d'urgence de facto permanente. À l'aube de la Deuxième République, la mémoire du passé a marqué pas seulement la professionnalité des magistrats, mais aussi la visibilité de la magistrature. L'associationnisme a donc été attaqué comme un moyen de protection corporatiste de la magistrature, accusée par une partie du monde politique de ne pas être capable de s'auto réformer, de devenir moderne. Bien évidemment les critiques sont plus faciles et ont plus de chance d'être perçues comme étant légitimes d'autant plus que l'Association Nationale Magistrats agit en pratique à travers les « correnti ». Celles-ci restent des laboratoires culturels légitimes, mais seulement dans la mesure où elles ne sont engagées dans les politiques de gouvernance des carrières. Sur ce point, cependant, il faut considérer aussi le contexte. L'intégration du principe de la représentativité dans l'organisme de l'autogouvernement, le CSM, et le système électoral, qui donne des avantages à ceux qui sont capables d'avoir le consensus au niveau national, est une condition favorable aux stratégies de distribution des candidats. Peut-être que, pour renouveler le rôle de l'associationnisme, il faudrait changer les conditions du contexte, à savoir le système électoral du CSM. Mais cela est un thème sur lequel le gouvernement ne peut pas agir sans le consensus de la magistrature et celui-ci passe à travers la composition des conflits et des pluralités des « correnti ». Time will tell.

Notes

  • [1]
    La constitution italienne attribue au Conseil supérieure de la magistrature ces fonctions. Le CSM est un organe de rang constitutionnel composé par 24 membres plus le président de la République, qui en est le président, dont deux tiers sont élus par les magistrats sur la base d'une distinction de fonction et un tiers est élu par le Parlement en séance commune - les deux chambres réunies ensembles - et avec la majorité qualifiée des votes.
  • [2]
    Cf. L. 24 mars 1958, n. 195, ensuite modifiée par la loi 695/1975 et la loi 44/2002.
  • [3]
    Programme électoral de Magistratura Democratica pour les élections du Comité de direction de l'Association Nationale Magistrats, 6-8 mars 2016.
  • [4]
    Programme électoral de Magistratura Indipendente pour les élections du Comité de direction de l'Association Nationale Magistrats, 6-8 mars 2016.
  • [5]
    Programme électoral de Unità per la Costituzione pour les élections du Comité de direction de l'Association Nationale Magistrats, 6-8 mars, 2016.
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