Notes
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[1]
E. Benvenisti, Judicial Misgivings Regarding the Application of International Norms : An Analysis of Attitudes of National Courts, 4 Eur. J. Int'l L. 159 (1993).
-
[2]
*NdT : terme désignant la doctrine qui autorise les juges à ne pas se prononcer sur une question de nature politique, comme par exemple la théorie de l'acte de gouvernement.
-
[3]
The Arantzazu Mendi, [1939] A.C. 256, 264 : « Notre État doit parler d'une seule voix sur ce sujet : il ne peut y avoir d'une part le judiciaire disant une chose, et l'exécutif en disant une autre ». V. également Ralph Steinhardt, Human Rights Litigation and the "One Voice" Orthodoxy in Foreign Affairs in World Justice ? U.S. Courts and International Human Rights 23 (Mark Gibney, Ed., 1991), Benvenisti, préc., p. 173-74.
-
[4]
L'analyse explique également pourquoi la Cour suprême américaine, qui n'a pas besoin de protéger les processus politiques ou judiciaires contre la pression extérieure, n'a toujours pas pris part à cet effort collectif. Pour une explication plus ancienne de ce mouvement de retrait de la Cour suprême vis-à-vis de la scène juridique internationale, pendant la période de la Guerre froide, V. Harold Hongju Koh, Transnational Public Law Litigation 100 Yale L. J. p. 2347, p 2360-2366 (1991).
-
[5]
Koh, supra note 3, aux pp. 2383-2394, fait la distinction entre ces types de considérations judiciaires : les questions liées la séparation des pouvoirs, à la compétence judiciaire, et au comité. Les décisions judiciaires les plus franches se demandent si leur « engagement dans le processus de validation des lois étrangères n'est pas davantage un frein qu'une aide à la poursuite des objectifs du pays » (aff. Banco Nacional de Cuba v. Sabbatino, 376 U.S. 398, 423 (1963)) et évoquent « l'avantage de l'approche diplomatique dans la résolution des conflits entre deux États souverains, comparée à l'action unilatérale des juridictions d'un pays » (aff. United States v. Alvarez-Machain, 504 U.S. 655 (1992), fn. 16).
-
[6]
Ceci ne signifie pas que toutes les instances internationales ont des effets néfastes sur la démocratie. Une institution telle que la Cour européenne des droits de l'homme, responsable et efficace, peut améliorer les processus démocratiques et promouvoir les droits des individus dans les États membres (V., plus récemment, Robert O. Keohane, Stephen Macedo et Andrew Moravcsik, Democracy-Enhancing Multilateralism IILJ Working Paper 2007/4, Global Administrative Law Series, disponible sur www.iilj.org (dernière visite le 10 septembre 2008). Cependant, de telles institutions ne représentent qu'une petite partie de toutes les institutions formelles et informelles qui réglementent nos vies, et dont les actions laissent souvent à désirer. Dans de nombreux domaines de la réglementation, les institutions internationales accessibles n'ont pas atteint le niveau des juridictions en matière d'examen de la coopération intergouvernementale.
-
[7]
Voir, par exemple, la décision de la Cour internationale de Justice dans l'affaire du 11 avril 2000 (aff. Congo v. Belg.), 2002 I.C.J. 3 fév. 2004, disponible sur http://www.icj-cij.org/icjwww/idocket/iCOBE/iCOBEframe.htm (dernière visite le 4 avril 2007) (concernant l'examen de la jurisprudence des cours nationales dans le but d'évaluer dans quelle mesure les chefs d'État jouissent de leur immunité devant les juridictions étrangères).
-
[8]
Sur l'interaction entre une cour suprême (en tant que principale) et des tribunaux inférieurs (en tant qu'agents), voir McNollgast, Conditions for Judicial Independence (Research Paper No. 07-43, Apr. 2006), disponible sur http://ssrn.com/abstract=895723 : McNollgast, Politics and the Courts : A Positive Theory of Judicial Doctrine and the Rule of Law, 68 S. Cal. L. Rev. 1631 (1995). La dépendance d'un tribunal international à des cours nationales qui ne sont pas formellement liées par ses décisions est d'autant plus grande. Les relations tendues qui se sont développées entre la Cour de justice de l'Union européenne et certaines juridictions nationales, notamment allemandes et italiennes, confirment cette observation théorique. Voir Juliane Kokkot, Report on Germany in The European Court and National Courts - Doctrine and Jurisprudence 77 (Anne-Marie Slaughter, Alec Stone Sweet and J.H.H. Weiler, Eds., 1998) : Bruno de Witte, Direct Effect, Supremacy, and the Nature of Legal order, in The Evolution of EU Law 177-213 (Paul Craig & Grainne de Burca, éd., 1999).
-
[9]
Pour une analyse de la motivation des cours nationales et de leurs outils, V. Eyal Benvenisti Reclaiming Democracy : The Strategic Uses of Foreign and International Law by National Courts, 102 AJIL241 (2008).
-
[10]
Leur manque de certitude quant à une éventuelle coordination explique leur précédente politique de report.
-
[11]
À noter cette citation extraite de la décision dans l'affaire Alvarez-Machain, sur l'« avantage de l'approche diplomatique... par opposition à l'action unilatérale des juridictions d'un pays » (italique ajouté).
-
[12]
Cf. Constitutional Reform Act 2005, la Chambre des Lords est devenue depuis le 1er octobre 2009 la Cour suprême du Royaume-Uni (N. trad.)
-
[13]
Aff. R. v. Bow St. Métro. Stipendiary Magistrate & Others, ex parte Pinochet Ugarte (N° 3), [2000] 1 A.C. 147, 244 (H.L.) (par le juge Lord Hope of Craighead). Voir également le juge Lord Hobhouse of Woodborough dans les affaires R v Secretary of State for the Home Department, ex parte Adan ; R v Secretary of State for the Home Department, ex parte Aitseguer [2001] 1 All ER 593, 616.
-
[14]
Aff. Jones (Respondent) v. Ministry of Interior (Kingdom of Saudi Arabia) (Appelants), 2006 UKHL 26 par. 63 (H.L.) (par le juge Lord Hoffmann).
-
[15]
Pour une analyse du rôle actif que jouent les cours nationales dans le renforcement de l'UE, V. Joseph HH Weiler, A Quiet Revolution : The European Court of Justice and its Interlocutors 26 Comparative Political Studies 510 (1994).
-
[16]
Par exemple, la Cour de cassation italienne a critiqué en 2004 (aff. Ferrini v. Federal Republic of Germany) une décision rendue par la Cour de cassation grecque en 2000 (aff. Prefecture of Voiotia v. Federal Republic of Germany), alors que la Chambre des Lords a critiqué, en retour, la décision de l'affaire Ferrini (dans l'affaire Jones, supra note 12, par. 22 et 63). Voir Pasquale De Sena & Francesca De Vittor, "State Immunity and Human Rights : The Italian Supreme Court Decision on the Ferrini Case", 16 Europ. J. Int'l L. 89, 101-02 (2005).
-
[17]
La décision rendue par la Cour suprême des Philippines dans l'affaire Minors Oposa est un bon exemple, car elle reconnaît la part des générations futures dans des questions liées à l'environnement : Minors Oposa v. Sec'y of Dep't Env't & Natural Res., 33 I.L.M. 174 (1994). Cette affaire connue a été citée par des cours d'Inde et du Bangladesh - affaire Farooque v. Gov't of Bangladesh, 17 B.L.D. (A.D.) 1 (Cour d'appel du Bangladesh, 1997), disponible sur http://www.elaw.org/resources/printable.asp?id=139 (dernière visite le 4 avril 2007) ; affaire A.P. Pollution Control Bd. (II) v. Nayudu, [2001] 2 S.C.C. 62 (Cour suprême indienne) disponible sur http:// www.commonlii.org//cgi-bin/disp.pl/in/cases/INSC/2000/679. html ?query=Nayudu (dernière visite le 10 janvier 2008) - et dans de nombreux articles universitaires à travers le monde.
-
[18]
Les désaccords qui sévissent au sein de la Cour suprême des États-Unis concernant le droit constitutionnel comparé et la relative réticence de la Cour, ces dernières années, à citer la législation internationale peuvent peut-être être influencés par la relative force des processus nationaux aux États-Unis, qui ne requièrent pas d'aide judiciaire actuellement.
-
[19]
Hersch Lauterpacht, The Development of International Law by the International Court of Justice 227-28, 267-93 (1958). Sur ces instruments, V. également Chester Brown, A Common Law of International Adjudication, pp. 40-54 (2007).
-
[20]
V. Rudolf Bernhardt, Evolutive Treaty Interpretation, Especially of the European Convention on Human Rights, 42 German Ybk. Int'l L. 11 (1999).
-
[21]
C. Maclachlan, The Principle of Systemic Integration and Article 31 (3)(c) of the Vienna Convention, 54 Int'l & Comp. L.Q. 279 (2005) ; D. French, Treaty Interpretation and the Incorporation of Extraneous Legal Rules, 55 Int'l & Comp. L.Q. 281 (2006).
-
[22]
V. par exemple, Theodor Meron, Revival of Customary Humanitarian Law, 99 Am. J. Int'l L. pp. 817, 819-20 (2005). Meron commente « l'échec total [de la CIJ] qui ne s'est pas demandé si l'opinio juris et la pratique favorisaient la cristallisation des [articles concernés] dans le droit coutumier ». Meron salue cette « approche plus souple » et la considère comme « essentielle... à l'efficacité du droit coutumier. » (Id).
-
[23]
Pour une analyse de ces décisions, V. Eyal Benvenisti, Inter-Judicial Cooperation to Secure Independent Review of Counter-Terrorism Measures, in Democracy, Separations of Powers and the Fights against Terrorism (Andrea Bianchi & Alexis Keller éd., 2008).
-
[24]
L'interdiction de la torture a fait l'objet de plusieurs décisions, notamment dans l'affaire Suresh, A (FC) & Others (FC) v. Sec'y of State, 2005 U.K.H.L. 71, et Zaoui v. Attorney-General (N° 2) [2006] 1 NZLR 289 (Cour suprême de Nouvelle-Zélande). La Cour suprême des États-Unis s'est référée à la troisième Convention de Genève (1949) dans l'affaire Hamdan v. Rumsfeld, 126 S. Ct. 2749 (2006), et la cour israélienne a été très active dans l'interprétation et l'application de la législation en matière de conflits armés.
-
[25]
Dans l'affaire People's Union for Civil Liberties v. Union of India [2004] 1 LRI 1, rep. in http://www.commonlii.org/in/cases/INSC/2004/18.html (dernière visite le 10 janvier 2007) (concernant la constitutionnalité de la 2002 Prevention of Terrorism Act, une loi indienne sur la prévention du terrorisme), la cour indienne se réfère (par. 60) à l'institution de l'« avocat indépendant », existant notamment en Nouvelle-Zélande.
-
[26]
Affaire A (FC) & Others (FC) v. Sec'y of State, préc. V. également l'avis du juge Lord Carswell dans la décision dite des « détenus de Belmarsh », A (FC) & Others (FC) v. Sec'y of State, 2004 U.K.H.L. 56, par. 150 (2004) (citant M. Barak, président de la Haute cour de justice d'Israël), sur la nécessité de respecter la rule of law dans la lutte contre le terrorisme).
-
[27]
Dans la récente affaire Charkaoui, la Cour suprême canadienne a présenté la procédure adoptée au Royaume-Uni comme étant un modèle pour le Parlement canadien, lorsque celui-ci décide de remettre en vigueur la loi en question (V. en particulier id. par. 86 : « Rien n'explique pourquoi les rédacteurs de la loi n'ont pas prévu qu'un avocat spécial examine objectivement les documents... comme cela se fait présentement au Royaume-Uni. »).
-
[28]
Aff. People's Union for Civil Liberties v. Union of India, au par. 10.
-
[29]
Aff. A and others v Secretary of State for the home Department ; X and another v Secretary of State for the Home Department [2002] EWCA (Civ) 1502 ; [2004] QB 335, par. 44.
-
[30]
V. Slaughter, préc, Chapter 2.
-
[31]
Dans l'affaire dite du « mandat d'arrêt européen », la Cour constitutionnelle allemande, ou Bundesverfassungsgericht, a examiné la loi sur le mandat d'arrêt européen votée par le Parlement allemand, le Bundestag, afin de mettre en application la décision-cadre sur le mandat d'arrêt européen, qui a été voté en vue de faciliter la coopération intereuropéenne pour lutter contre le crime et le terrorisme. La cour a estimé que ladite loi violait les droits constitutionnels au-delà de ce qui pouvait être nécessaire pour atteindre les objectifs fixés par la politique européenne. Elle a ainsi renvoyé la question au corps législatif afin qu'il remettre en vigueur ladite loi, de sorte que la restriction imposée aux libertés fondamentales (telles que le fait d'être libre de toute extradition) serait proportionnelle. Décision du 18 juillet 2005, 2 BvR 2236/04, disponible sur http://www.bverfg.de/entscheidungen/rs20050718_2bvr223604en.html (dernière visite le 8 septembre 2007). En 1996, le Conseil constitutionnel a renvoyé aux législateurs certaines mesures concernant les immigrés illégaux suspectés d'être des terroristes (ces mesures pénalisant l'assistance à ces personnes et autorisant leur perquisition sans mandat judiciaire). Décision no 96-377 DC du 16 juillet 1996, disponible sur http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/les-decisions/acces-par-date/decisions-depuis-1959/1996/96-377-dc/decision-n-96-377-dc-du-16-juillot-1996.10816.html (dernière visite le 8 septembre 2007). Voir également la décision de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Charkaoui, en 2007, qui exigeait des législateurs qu'ils réécrivent les procédures d'audition.
-
[32]
Le Conseil constitutionnel a jugé une mesure inconstitutionnelle car elle s'appliquait de façon rétroactive dans les territoires étrangers (Décision no 96-377 DC du 16 juillet 1996, préc. Le Parlement allemand a estimé quant à lui que la Luftsicherheitsgesetze (loi de 2005 sur la sécurité aérienne) était inconstitutionnelle car elle violait l'inter alia, ou le principe de la dignité humaine (BVerfG, 1 BvR 357/05 vom 15.2.2006, http://www.bverg.de/entscheidungen/rs20060215_1bvr035705.html (dernière visite le 8 septembre 2007). V. Nina Naske et Georg Nolte, Case Note : « Aerial Security Law » 101 Am. J. Int'l. L. 466 (2007)). En 2004, la Cour suprême indienne a eu recours à un contrôle constitutionnel implicite lorsqu'elle a estimé que plusieurs conditions supplémentaires devaient être ajoutées à un certain nombre de dispositions clés du Prevention of Terrorism Act (« POTA », loi de 2002 sur la prévention du terrorisme), jugeant ces conditions comme nécessaires d'un point de vue constitutionnel (affaire People's Union for Civil Liberties v. Union of India, préc.
-
[33]
Aff. Rasul v. Bush, 542 U.S. 466 (2004).
-
[34]
Aff. Hamdi v. Rumsfeld, 542 U.S. 507 (2004).
-
[35]
Aff. Hamdan v. Rumsfeld, 126 S. Ct. 2749 (2006).
-
[36]
Comme le juge Breyer l'a déclaré dans l'affaire Hamdan, id. aux p. 135-36 : « Au final, la décision de la cour repose sur un seul fondement : le Congrès n'a pas donné "carte blanche" au pouvoir exécutif... Rien n'empêche le président de se tournera nouveau vers le Congrès pour obtenir l'autorité qu'il pense nécessaire ».
-
[37]
Aff. Boumediene v. Bush (2008).
-
[38]
La liste de ces pays comprend l'Inde, le Népal, le Pakistan, les Philippines, le Sri Lanka, la Turquie, l'Afrique du Sud, la Tanzanie, l'Ouganda, le Brésil, le Chili, le Costa Rica, l'Équateur et le Pérou. Pour une analyse des pratiques de ces cours, V. William Onzivu, International Environmental Law, the Public's Health, and Domestic Environmental Governance in Developing Countries, 21 Am. U. Int'l L. Rev. 597, 665-72 (2006) : Carl Bruch et autres, Constitutional Environmental Law : Giving Force to Fundamental Principles in Africa, 26 Colum. J. Envtl. L. 131, 132-35, 150-88 (2001) : Sheetal B. Shah, Illiuminating the Possible in the Developing World : Guaranteeing the Human Right to Health in India, 32 Vand. J. Transnat'l L. 435 (1999) : Vijayashri Sripati, Toward Fifty Years of Constitutionalism and Fundamental Rights in India : Looking Back to See Ahead (1950-2000), 14 Am. U. Int'l L. Rev. 413, 470-71 (1998) : Daniel Bodansky & Jutta Brunnée, The Role of National Courts in the Field of International Environmental Law, 7 RECIEL 11 (1998) : Michael J. Andersen, International Environmental Law in Indian Courts, 7 RECIEL 21 (1998).
-
[39]
Voir Shikhar Ranjan, Legal Controls on the Transboundary Movements of Hazardous Wastes into India - An Evaluation 41Indian J. Int'l L. 44 (2001) (décrivant la réponse du gouvernement indien - l'introduction d'une nouvelle loi - comme étant venue seulement après que les cours avaient réagi aux requêtes de citoyens).
-
[40]
Aff. Shehla Zia v. WAPDA, P.L.D. 1994 Supreme Court 693, disponible sur http://www.elaw.org/assets/word/zia%20v.%20WAPDA.doc (dernière visite le 4 avril 2007).
-
[41]
Aff. Farooque v. Gov't of Bangladesh, préc. (« Si nous regardons les affaires récemment traitées par la Cour suprême d'Inde, alors nous constaterons que l'activisme judiciaire a tendance à protéger l'environnement via les contentieux publics dans des affaires liées à l'environnement. Au Bangladesh, dans ce type d'affaires, les requérants n'ont qu'à frapper à la porte des cours pour leur demander de légiférer en matière environnementale, et les cours acceptent leur affaire. À travers le monde, la tendance est à la libéralisation des règles de recours (standing) [sic], malgré la tradition de ce locus standi. Au début, la Cour suprême indienne avait estimé que, lorsqu'un membre d'un organisme public ou social épousait ainsi [sic] la cause des pauvres et des opprimés, alors ce membre devait être autorisé à saisir la cour, même en écrivant une simple lettre, et sans engager de dépenses lui-même. [...]
La procédure de contentieux d'intérêt public ne devrait pas être limitée aux seules violations des droits définis comme fondamentaux. À l'ère moderne de la technologie, des progrès scientifiques, du développement économique et de la croissance industrielle, les droits socio-économiques sont soumis à un changement considérable. Ces nouveaux droits... requièrent d'être protégés collectivement, et nous devons, par conséquent, agir pour protéger tous les droits constitutionnels, fondamentaux et juridiques, comme le prévoit notre constitution. » -
[42]
Aff. Bulankulama v. Ministry of Indus. Dev., 7(2) South Asian Envtl. Rep. (2000), disponible sur http://www.commonlii.org/lk/cases/LKSC/2000/18.html (dernière visite le 4 avril 2007).
-
[43]
Aff. A.P. Pollution Control Bd. (II) v. Nayudu, préc. (Cour suprême indienne).
-
[44]
Aff. Subhash Kumar v. State of Bihar, 1991 S.C.C. 598, rep. in http://www.commonlii.Org/in/cases/INSC/1991/3.html (dernière visite le 10 janvier 2008) ; Narmada Bachao Andolan, préc.
-
[45]
Aff. Essar Oil Ltd. v. Halar Utkarsh Samiti, [2004] 2 S.C.C. 392, disponible sur http://www.commonlii.org/in/cases/INSC/2004/31.html (dernière visite le 10 janvier 2007).
-
[46]
Aff. Vellore Citizens' Welfare Forum v. Union of India, [1996] 5 S.C.C. 647, rep in http://www.commonlii.org/in/cases/INSC/1996/1027.html (dernière visite le 10 janvier 2007).
-
[47]
Aff. Indian Council for Environ-Legal Action v. Union of India, [1996] 3 S.C.C. 212, rep. in http://www.commonlii.org/in/cases/INSC/1996/244.html (dernière visite le 10 janvier 2007).
-
[48]
Aff. Vellore Citizens' Welfare Forum, supra note # ; Mehta v. Union of India, [1997] 2 S.C.R. 353, rep. in http://www.commonlii.org/in/cases/INSC/1997/769.html (dernière visite le 10 janvier 200/).
-
[49]
V. la décision de la Cour suprême indienne dans l'affaire Karnataka Indus. Areas Dev. Bd. v. Kenchappa, A.I.R. 2006 S.C.W. 2546, dans sa totalité sur http://www.elaw.org/resources/printable.asp ?id=3133 (dernière visite le 4 avril 2007). V. également Narmada Bachao Andolan, préc.
-
[50]
Aff. Karnataka Indus. Areas, par. 54 : « Le Sommet de la terre qui s'est tenu à Rio de Janeiro en 1992 a changé les discours sur l'environnement de façon significative. La durabilité, concept introduit en 1987 dans le rapport Brundtland - intitulé "Notre Avenir à Tous" - et édicté dans les accords de Rio, est devenue le nouveau mot de code, accepté de tous, du développement. » (italique ajouté).
-
[51]
Aff. Vellore Citizens' Welfare Forum, préc. (référence au concept de développement durable). La Haute cour du Kerala a considéré que les autres principes faisaient partie du droit international coutumier, en se fondant sur le raisonnement de la Cour suprême indienne dans l'affaire Soman v. Geologist, [2004] 3 K.L.T. 577 par. 15, disponible sur http://www.elaw.org/resources/printable.asp ?id=2680 (dernière visite le 4 avril 2007).
-
[52]
Shehla Zia, préc., par. 9. Bien que les documents internationaux n'aient pas force de loi, toujours est-il qu'ils sont convaincants et commandent le respect. La Déclaration de Rio est le fruit d'une intense discussion entre les dirigeants des pays du monde, et c'est suite aux négociations entre pays développés et pays en développement qu'une déclaration quasi-consensuelle a pu naître. L'environnement est un problème international qui n'a pas de frontières, et crée donc des effets transfrontaliers. Dans ce domaine, chaque pays doit coopérer et contribuer aux efforts et c'est pourquoi la Déclaration de Rio servira de texte contraignant et instaurera la discipline parmi les pays lorsque des questions environnementales seront en jeu. Pour revenir au sujet présent, il serait approprié de mentionner que le principe no 15 prévoit des règles de précaution et de prudence.
-
[53]
Aff. Bulankulama v. Ministry of Indus. Dev., préc. (référence aux déclarations internationales comme étant des « instruments instaurant une norme internationale »).
-
[54]
Aff. Suray Prasad Sharma Dhungel v. Godavari Marble Indus., W.P. 35/1992 S. C. (1995) (Ass. Plén.), disponible sur http://www.elaw.org/resources/printable.asp ?id=2287 (dernière visite le 4 avril 2007) (référence au principe de développement durable).
-
[55]
Aff. Farooque v. Gov't of Bangladesh, préc. (référence à la Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement, comme source d'inspiration).
-
[56]
Voir B.N. Kirpal et al., Supreme But Not Infallible : Essays in Honour of the Supreme Court of India, p. 372 (2004). L'auteur suggère que, dans l'affaire Centre for Environment Law, WWF I v. Union of India (1999) 1 SCC 263, la Cour suprême indienne a ordonné la fermeture de tanneries, malgré le fait qu'elles fussent « une source majeure de gain de devises étrangères pour le pays, puisqu'elles dominaient le marché de l'export de la maroquinerie. »
-
[57]
Concernant les changements introduits par les pays de destination depuis le début des années 1990, V. Jane McAdam, Complimentary Protection in International Refugee Law (2007) ; Liza Schuster, A Comparative Analysis of the Asylum Policy of Seven European Governments 13 J. Refugee Studies 118 (2000) ainsi que le numéro spécial du Vol. 13 du J. Refugee Studies dédié à la politique des pays européens ; Karin Oellers-Frahm & Andreas Zimmermann, France's and Germany's Constitutional Changes and Their Impact on Migration Law : Policy and Practice, 38 GERMAN Y.B. INT'L L. 249 (1995) ; James C. Hathaway, Harmonizing for Whom ? The Devaluation of Refugee Protection in the Era of European Economic Integration, 26 Cornell Int'l L.J. 719 (1993), Gerald L. Neuman, Buffer Zones Against Refugees : Dublin, Schengen, and the German Asylum Amendment, 33 Va. J. Int'l L. 503 (1993).
-
[58]
Hugo Storey, The Advanced Refugee Law Workshop Experience : An IARLJ Perspective 15 Int'l J. Refugee Law 422 (2003) : « [L'un] des principaux objectifs de l'IARLJ est de développer une jurisprudence régulière et cohérente en matière de réfugiés. Dans l'idéal, le cas d'une personne qui demande à être un réfugié selon les termes de la convention de 1951 devrait être examiné de la même façon en Allemagne, aux États-Unis, au Japon ou en Afrique du Sud ». Dr Hugo Storey était à cette époque le vice-président de la Cour d'appel britannique aux affaires d'immigration et membre du conseil de l'IARLJ.
-
[59]
Site Internet de l'IARLJ : http://www.iarlj.nl/ (dernière visite le 9 septembre 2007). Pour être membre de l'IARLJ, il faut être juge ou « acteur délivrant des décisions quasi-judiciaires ». En août 2007, l'IARLJ comptait 332 membres venant de 52 pays. Ses membres bénéficient d'une base de données en ligne contenant des décisions judiciaires en matière de droit des réfugiés de divers pays, reçoivent une lettre d'information réservée aux membres, et ont accès à un forum.
-
[60]
Id, Article 2(2).
-
[61]
La qualification du statut de réfugié a été particulièrement débattue. V. article 1A(2) de la Convention relative au statut des réfugiés, 189 U.N.T.S. 150 (1951) : « Aux fins de la présente Convention, le terme "réfugié" s'appliquera à toute personne : ... (2) ... craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ... »
-
[62]
Cet effort est capté dans cette déclaration du juge Lord Carswell : « La persécution des minorités et la migration des personnes cherchant un refuge, à l'abri de toute persécution, ont malheureusement perduré, même après la Seconde Guerre mondiale. [...] La Convention de Genève de 1951 a permis de contrebalancer les préoccupations propres des États en réaffirmant leurs obligations internationales : les États ont ratifié cette convention il y a 50 ans, lorsque les problèmes de l'époque étaient inévitablement différents de ceux d'aujourd'hui. Les rédacteurs d'alors ont réussi à formuler un texte, un cadre adaptable, valable même à l'époque actuelle, et il faut rendre hommage à la sagesse et à l'humanité de ceux qui ont dû interpréter les termes de la convention et les appliquer aux multiples cas individuels ». Aff. Januzi (FC) et al v. Secretary of State for the Home Department [2006] UKHL 5, par. 62.
-
[63]
Aff. Canada (Attorney General) v. Ward, [1993] 2 S.C.R. 689.
-
[64]
Aff. Acosta, 19 I. & N. 211 (Conseil de l'immigration américain, 1985). Il est à noter que la décision prend en compte « diverses interprétations internationales » du terme « réfugié » présent dans la convention, en expliquant qu'« étant donné que le Congrès a prévu, dans sa loi d'application de la convention, une définition du terme "réfugié", conformément aux exigences de ladite convention, il convient que nous considérions différentes interprétations internationales de cet accord. Cependant, celles-ci ne sont pas contraignantes pour notre propre interprétation des éléments créés par la loi d'application, car la question de savoir qui doit être considéré comme un réfugié est laissée au final [...] à tout État où se trouve un réfugié. [...] Si nous ne considérons pas le manuel du Haut Commissariat des Nations unies aux réfugiés comme étant le texte absolu, nous estimons toutefois qu'il est un outil très utile dans la mesure où il nous donne une interprétation de la convention qui est internationalement reconnue. » (p. 23-25 de la décision).
-
[65]
Aff. A v. Minister for Immigration and Ethnic Affairs (1997) 2 BHRC 143. D'autres décisions australiennes citent des jugements étrangers, tels que : Al-Kateb v Godwin [2004] HCA 37, Minister for Immigration and Multicultural Affairs v Khawar (2002) 210 CLR 1 : 187 ALR 574 ; 67 ALD 577[2002] HCA 14, Applicant S v Minister for Immigration and Multicultural Affairs (2004) 217 CLR 387 : 206 ALR 242 : 77 ALD 541 [2004] HCA 25 pour la Haute cour, ainsi que Minister for Immigration & Multicultural Aff. v. Applicant Z., 116 F.C.R. 36 (2001), 2002 WL 3645 (FCA), [2001] FCA 1823, Applicant S v Minister for Immigration & Multicultural Affairs [2001] FCA 1411 pour la Cour fédérale.
-
[66]
Aff. GJ [1998] INLR 387.
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[67]
Aff. Islam (A.P.) v. Secretary of State for the Home Department ; Regina v. Immigration Appeal Tribunal and Another Ex Parte Shah, [1999] 2 AC 629, 643 [1999] disponible sur http://www.publications.parliament.uk/pa/ld199899/ldjudgmt/jd990325/islam01.htm (dernière visite le 4 mai 2007) (Chambre des Lords, 1999).
-
[68]
Aff. Shah & Islam, id., id.
-
[69]
Aff. Sanchez-Trujillo, 801 F.2d par. 1576 (1986).
-
[70]
Aff. Hernandez-Montiel v. Immigration and Naturalization Service, 225 F.3D 1084, par 1093 (2000).
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[71]
Par exemple, dans l'affaire Januzi, la Chambre des Lords préfère les approches anglaise et canadienne à celles de quelques cours néo-zélandaises et australiennes.
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[72]
La décision de la Cour suprême des États-Unis dans l'affaire Sale v. Haitian Ctrs. Council, Inc., 509 U.S. 155, 183 (1993), est un exemple d'interprétation étroite, fondée sur l'interprétation textuelle et stricte de la convention de 1951, à la lumière de ses travaux préparatoires (concluant que l'obligation de non-refoulement ne s'appliquait pas aux individus situés hors de la compétence territoriale de l'État). Pour les critiques à cette interprétation, voir Harold Hongju Koh, The "Haiti Paradigm" in United States Human Rights Policy 103 Yale L.J. 2391 (1994). Toutefois, cette interprétation a été approuvée par la Chambre des Lords dans l'affaire R. v. Immigration Officer at Prague Airport and another ex p. European Roma Rights Centre and others [2004] UKHL 55, par. 17, et par la Haute cour australienne (voir Khawar, supra note #, par 42). Le juge Lord Bingham of Cornhill a ajouté que « la Chambre des Lords n'était renvoyée vers aucune autorité judiciaire aux effets contraires » (id., id.).
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[73]
Aff. R v Secretary of State for the Home Department, ex parte Adan & Aitseguer, préc. id. (Lord Hobhouse of Woodborough) : « Le plan de la Convention de Genève est que toute différence de ce genre doit être référée à la Cour internationale de justice, comme le prévoit l'art. 38 de ladite convention. Cependant, il n'y a aucune chance pour que la différence ici en question (et qui existe depuis plusieurs années maintenant) soit résolue de cette façon. Aussi longtemps que ces différences continueront à exister, l'objectif de la Convention de Genève de parvenir à une approche uniforme du problème des réfugiés ne sera pas atteint et le système de réponse internationale au problème sera faussé ».
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[74]
« Par conséquent, il ne peut y avoir, en principe, qu'une seule vraie interprétation d'un traité. S'il existe un désaccord sur le sens de la Convention de Genève, il peut être résolu par la Cour internationale de justice (art. 38 de la Convention de Genève). Cependant, la CIJ n'a jamais reçu une telle demande. La perspective de recours auprès de la CIJ est éloignée. En pratique, ces recours sont laissés aux juridictions nationales, qui se retrouvent face à un désaccord matériel sur une question d'interprétation. Lorsque ces juridictions nationales doivent résoudre ce type de problème, elles doivent rechercher la signification vraie, internationale et autonome du traité, en se détachant des notions de culture juridique de leur pays. Et il ne peut y avoir qu'une seule vraie signification. » Aff. Adan, préc. p. 617.
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[75]
V. Oellers-Frahm et Zimmermann, supra note #, pp 260-263 (indiquant qu'en France l'amendement à la Constitution était destiné à contourner les conclusions d'une précédente décision du Conseil constitutionnel).
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[76]
Concernant les différences d'interprétation, voir Catherine Phuong, Persecution by Non-state Agents : Comparative Judicial Interpretations of the 1951 Refugee Convention 4 European Journal of Migration and Law 521 (2003). La directive européenne de 2004, appelée « Directive Qualification », a solutionné ces différences en reconnaissant que les acteurs non étatiques pouvaient être de potentiels persécuteurs. Voir Guy S. Goodwin-Gill and Jane McAdam, The Refugee in International Law 98-100 (3rd Ed., 2007). Concernant le « long combat » allemand sur la législation qui adopterait, entre autres, cette interprétation, V. Marion Schmid-Drüner, Germany's New Immigration Law : A Paradigm Shift ? 8 European Journal of Migration and Law191 (2006).
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[77]
Aff. Adan préc., p. 600.
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[78]
Aff. Adan préc. Plus récemment, la cour fédérale canadienne a adopté l'approche de la Chambre des Lords en refusant d'autoriser le retour d'un demandeur d'asile colombien aux États-Unis : aff. Canadian Council for Refugees v. The Queen (2007), 2007 FC 1262, disponible sur http://www.canlii.org/en/ca/fct/doc/2007/2007fc1262/2007fc1262.pdf (dernière visite le 10 janvier 2008).
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[79]
Aff. Dr Mohiuddin Farooque vs Bangladesh, represented by the Secretary Ministry of Government of the People's Republic of Bangladesh, Bangladesh Secretariat and others reported in 48 DLR 438, Vincent vs Union of India reported in AIR 1987 (SC) 990 (voir les références dans la décision de la Cour suprême du Bangladesh, ci-dessous).
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[80]
V. la décision de la Cour suprême du Bangladesh dans l'affaire Prof Nurul Islam and ors v Bangladesh and ors, Writ petition, 52 DLR (2000) 413 ; ILDC 477 (BD 2000), qui se réfère aux décisions similaires de la cour indienne dans l'affaire Bamakrishna v State of Kerala and ors, 1992 (2) KLT 725 (Haute cour du Kerala) et du Pakistan dans Pakistan Chest Foundation and ors v Pakistan and ors, 1997 CLC 1379. La décision du Bangladesh a été prise dans le contexte d'une campagne publicitaire programmée par des fabricants de tabac étrangers. Le requérant arguait que « les fabricants de tabac internationaux n'avaient pas réussi à développer un marché dans les pays développés car ces derniers sont conscients des effets néfastes du tabac sur la santé, et se sont donc redirigés vers les citoyens illettrés et ignorants des pays en voie de développement, en Asie et en Afrique, et afin de stimuler leurs affaires plus encore, ils ont ciblé les citoyens illettrés et ignorants des pays sous-développés. » (par. 6).
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[81]
Aff. Novartis v. India, décision du 6 août 2007. Disponible sur http://judis.nic.in/chennai/qrydisp.asp ?tfnm=11121 (dernière visite le 17 septembre 200/).
-
[82]
« Nous avons gardé en tête le but que la loi d'amendement voulait atteindre, et qui est [...] de garantir aux citoyens de ce pays l'accès aux médicaments vitaux et de déléguer les obligations constitutionnelles des [législateurs] de fournir des soins de qualité à leurs citoyens » (id. par. 19).
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[83]
L'affaire a été abandonnée en 2001, après que la cour a autorisé les ONG à. présenter des affidavits (Aff. no 4138/98, Haute cour d'Afrique du Sud). Sur cette affaire, V. David Barnard In the High Court of South Africa, Case No. 4138/98 : The Global Politics of Access to Low-Cost AIDS Drugs in Poor Countries 12 Kennedy Institute of Ethics Journal 159 (2002).
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[84]
Il est important de noter qu'il est actuellement impossible de trouver quelque trace de la coopération inter-judiciaire dans le domaine du droit du travail. Si les juridictions nationales citent des normes internationales, et notamment les conventions de l'Organisation internationale du travail, elles ne se réfèrent pas les unes aux autres. Pour accéder à un recueil de décisions nationales citant le droit du travail international, V. Use of International Law by Domestic Courts, disponible sur http://training.itcilo.it/ils/CD_Use_Int_Law_web/Additional/English/default.htm (dernière visite le 31 décembre 2007).
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[85]
V. respectivement la loi intitulée 1994 Uruguay Round Agreement Act, 19 USCS § 3511, Pub. L. N°. 104-305 (1996), § 102(c), et la décision 94/800 du Conseil du 22 décembre 1994, JO 1994, L336/1.
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[86]
Au Japon : Yuji Iwasawa, Implementation of International Trade Agreements in Japan, in Hilf & Petersmann, National Constitutions And International Economic Law 130, 343 (Kluwer éd., 1993) (les juridictions japonaises refusent que les demandes soient fondées sur les décisions et règles du GATT ou de l'OMC) : en Europe : Nico Krisch, The Pluralism of Global Administrative Law, 17 Eur J Int Law 247, 259 (2006) (les juridictions européennes ont nié les effets des règles de l'OMC, arguant que, dans le cas contraire, les négociations menées par les organes politiques de l'Union européenne en matière de litiges commerciaux seraient gravement restreintes).
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[87]
Protocole d'accession de la Chine, Chien-Huei Wu (2008), How Does TRIPS Transform Chinese Administrative Law ? Global Jurist : Vol. 8 : Iss. 1 (Topics), Article 6. Disponible sur http:// www.bepress.com/gj/vol8/iss1/art6 : Tamir Moustafa, Law Versus the State : The Judicialisation of Politics in Egypt (2003) 28 (4) Law and Social Inquiry 883, 895-896.
-
[88]
Décision de la Chambre des Lords dans l'affaire Pinochet, préc.
-
[89]
À cet égard, les juridictions américaines se démarquent encore : dans la mesure où elles ne s'inquiètent pas particulièrement de protéger leurs processus nationaux de l'influence extérieure (et les textes les accompagnant), elles sont peu perturbées par les effets potentiellement néfastes que peuvent avoir leurs décisions rendues contre des individus étrangers qui enfreignent le droit international : voir l'affaire Sosa v. Alvarez-Machain, 124 S. Ct. 2739 (2004).
-
[90]
Comparer la décision de l'affaire Pinochet, préc. (aucune immunité pour les anciens chefs d'État accusés d'actes de torture) avec celles de l'affaire Jones, préc. (immunité pour les représentants, en poste, d'un État étranger (Arabie Saoudite) accusés d'actes de torture) et de l'affaire Kadhafi, comme l'analyse Salvatore Zappalà, Do Heads of State in Office Enjoy Immunity from Jurisdiction for International Crimes ? The Ghaddafi Case Before the French Gourde Cassation, 12 Europ. J. Int'l L. 595 (2002) (la Cour de cassation française s'est appuyée sur le droit coutumier afin de suggérer, de façon vague, que le colonel Kadhafi jouissait d'une immunité, mais sans expliquer de quelle immunité il s'agissait, ni si cette immunité expirerait à la fin de son mandat).
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[91]
Eyal Benvenisti & George W. Downs, The Empire's New Clothes : Political Economy and the Fragmentation of International Law, 60 Stan. L. Rev. 595 (2007), pp. 623-624.
-
[92]
Concernant cette affirmation, voir Eyal Benvenisti and George Downs, Court Cooperation, Executive Accountability and Global Governance NYU J Int'l L & Pol. (2009).
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[93]
La possibilité que les juridictions nationales examinent les résolutions du Chapitre VII du Conseil de sécurité est évoquée par Erika de Wet & André Nollkaemper, Review of Security Council Decisions by National Courts, 45 German Ybk. Int'l L. 166 (2002). Les auteurs analysent trois décisions rendues par trois juridictions différentes - la Cour de district des Pays-Bas (aff. Milosevic v. The Netherlands, trans. in 48 Netherlands Int'l L. Rev. 357 (2001)), la Cour suprême fédérale de Suisse (aff. Rukundo, applications nos. 1A.129/2001, 1A.130/2001/viz (2001), disponible sur http://www.bger.ch/index/juridiction/jurisdiction-inherit-template/jurisdiction-recht/jurisdiction-recht-urteile2000.htm (dernière visite le 19 mai 2007), et la Cour d'appel du cinquième circuit des États-Unis (affaire Ntakirutimana v. Reno, 184 F.3d 419 (1999). Ces trois décisions montrent les différents points de vue qui existent concernant le pouvoir des cours d'évaluer ce type de lois, mais aucune de ces juridictions n'était particulièrement encline à remettre en question la légalité desdites lois : la cour américaine a estimé que ce problème dépassait la portée de l'habeas, alors que les cours hollandaise et suisse ont montré une certaine déférence envers les résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU. La Cour d'appel britannique a fait preuve de la même déférence dans l'affaire R (on the application of Al-Jedda) v. Secretary of State for Defence, [2006] EWCA Civ 327, par. 71 (disponible sur http://alpha.bailii.org/ew/cases/EWCA/Civ/2006/327.rtf (dernière visite le 18 septembre 2007), tout comme la Cour suprême suisse dans l'affaire Nada v. SECO (décision du 14 novembre 2007, pas encore publiée officiellement), disponible sur http://jcb.blogs.com/jcb_blog/files/tf_youssef_nada.pdf (dernière visite le 10 janvier 2008). Cependant, voir également la décision de la Chambre des Lords dans l'affaire Jedda.
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[94]
V. la Directive 2004/83/EC du Conseil du 29 avril 2004 concernant les normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié ou les personnes qui, pour d'autres raisons, ont besoin d'une protection internationale, et relatives au contenu de ces statuts, 2001 JO (L 304) 12 ; et la Directive 2001/55 du Conseil du 20 juillet 2001 relative à des normes minimales pour l'octroi d'une protection temporaire en cas d'afflux massif de personnes déplacées et à des mesures tendant à assurer un équilibre entre les efforts consentis par les États membres pour accueillir ces personnes et supporter les conséquences de cet accueil, 2001 JO (L 212) 12, disponible sur http://www.ecre.org/eu_developments/temporary %20protection/tpdir.pdf (dernière visite le 18 mai 2007) : S. Reynolds, European Council Directive 2001/55/EC : Toward a Common European Asylum System, 8 Colum. J. Eur. L. 359 (2002). Pour une tendance similaire mais plus ancienne, voir James C. Hathaway, Harmonizing for Whom ? The Devaluation of Refugee Protection in the Era of European Economic Integration, 26 Cornell Int'l L.J. 719 (1993).
1Les juridictions nationales du monde entier ont toujours partagé une même pratique : éviter toute application du droit international qui pourrait être contraire à la position de leur gouvernement. Cette déférence à l'égard de l'exécutif conférait à celui-ci un pouvoir totalement discrétionnaire sur les affaires étrangères. Ces dernières années, cependant, les juridictions nationales se sont montrées plus enclines à s'aventurer dans la sphère internationale, à étudier des affaires impliquant leur gouvernement et son interprétation des traités, et à brider quelque peu leur gouvernement, qui avait auparavant carte blanche en matière de négociations internationales. En même temps, les juridictions nationales ont également commencé à vérifier les actions des organisations internationales, grâce à un processus de coordination entre juridictions nationales et d'interprétation collective des textes juridiques qu'elles partagent sur le droit international et le droit constitutionnel comparé.
2Cette nouvelle approche vient, au moins en partie, en réaction à la délégation d'autorité des gouvernements envers les institutions internationales formelles et informelles, ainsi qu'à la pression grandissante que ces institutions exercent sur les juridictions afin qu'elles se conforment aux normes internationales. Ce processus de coordination entre juridictions est tout à fait cohérent avec les théories démocratiques qui considèrent que les cours et tribunaux facilitent la réflexion et la responsabilité démocratiques. Pour atteindre ces objectifs, les cours ont besoin de mettre en place un front judiciaire uni en coordonnant leurs politiques avec celles des juridictions étrangères de degré équivalent, à travers le langage commun que sont le droit international et le droit constitutionnel comparé.
Introduction
3Les juridictions nationales du monde entier ont toujours partagé une même pratique : éviter toute application du droit international qui pourrait être contraire à la position de leur gouvernement. Cette déférence à l'égard de l'exécutif national conférait à celui-ci un pouvoir discrétionnaire total sur les affaires étrangères [1]. Les juridictions nationales ont développé un ensemble d'instruments et de pratiques afin d'aligner leurs conclusions et leurs décisions sur les orientations de leur gouvernement. Parmi ces techniques figurent notamment les doctrines d'« irrecevabilité » - telles que le standing (intérêt à agir), la political question* [2] et l'immunité -, l'identification, correcte ou erronée, du droit international coutumier applicable, l'interprétation extensive ou restrictive des traités, ainsi que la reconnaissance explicite des compétences du pouvoir exécutif en matière de négociation des relations internationales, en se référant à la nécessité, pour l'État, de « parler d'une seule voix » [3]. Ces dernières années, cependant, les juridictions nationales se sont montrées plus enclines à s'aventurer dans la sphère internationale, à traiter des affaires impliquant leur gouvernement et son interprétation des traités, et à brider quelque peu leur gouvernement, qui avait auparavant carte blanche en matière de négociations internationales. En même temps, les juridictions nationales ont également commencé à examiner les actions des organisations internationales, grâce à un processus de coordination entre juridictions nationales et d'interprétation collective des « textes » juridiques qu'elles partagent en matière de droit international et de droit constitutionnel comparé. Cette nouvelle approche se fait, du moins en partie, en réaction à cette tendance de la mondialisation à élargir le pouvoir discrétionnaire de l'exécutif, au détriment des autres branches du gouvernement, et à réduire à la fois l'espace de la réflexion nationale et la transparence nécessaire à cette dernière pour être efficiente [4].
L'impact de la mondialisation sur les processus nationaux de fabrique du jugement
4Comme Koh l'explique, cette politique judiciaire traditionnelle, qui consiste à s'assurer que l'État parle « d'une seule voix » et à s'effacer derrière l'exécutif pour les questions internationales, est née de diverses considérations liées à l'importance de maintenir la séparation des pouvoirs - l'exécutif conservant son rôle traditionnel de définition et de gestion de la politique étrangère et le judiciaire se voyant imposer des limites à sa compétence [5]. Si ces considérations existent toujours à l'heure actuelle, une foule d'autres questions liées à la mondialisation s'y sont ajoutées. Des institutions internationales, relativement peu transparentes, créent des régulations mondiales qui affectent de plus en plus la vie quotidienne de citoyens à travers le monde. Comparé au pouvoir exécutif, le pouvoir des organes législatifs nationaux d'influer directement sur les normes régulatrices internationales et d'exercer efficacement leur rôle de représentant a considérablement diminué, alors que leur nombre et leur complexité a augmenté. Cette menace pèse d'autant plus sur les juridictions que lesdites normes, essentiellement créées par les gouvernements étrangers, limitent progressivement leur autonomie, leur indépendance, ainsi que l'étendue de leur pouvoir d'examen des lois.
5Dans cette nouvelle mondialisation, la déférence du judiciaire envers la prérogative du gouvernement en matière de politique internationale est une attitude potentiellement risquée du point de vue de la démocratie. Pour la plupart des États, les nouvelles modalités de l'élaboration des politiques internationales ou intergouvernementales signifient trois choses : davantage de dépendance aux forces externes, moins d'importance conférée aux réflexions démocratiques nationales, et une plus grande probabilité pour que les conséquences nuisent à de nombreux citoyens, si ce n'est la plupart [6]. Car si les cours continuent à donner carte blanche au gouvernement, afin qu'il agisse librement en politique mondiale, elles appauvrissent les processus démocratiques et judiciaires du pays, et réduisent l'opportunité pour la plupart des citoyens d'utiliser ces processus afin d'influer sur lesdites conséquences.
6Bien entendu, toutes les juridictions ne sont pas autant attachées à garantir le processus politique de leur pays. Un nombre relativement faible d'États développés et puissants étant les principaux architectes de la réglementation internationale, leurs électeurs ont bien plus de chances de voir leurs orientations reflétées par leurs politiques que les électeurs venant de pays développés plus petits ou de pays en développement. Cependant, même les juridictions des pays puissants sont conscientes que les nouveaux forums judiciaires internationaux remettent en question leur propre autorité en tant qu'interprète des lois et en tant qu'arbitre départageant les intérêts divergents de l'État et les droits prévus par le droit constitutionnel ou international. Pour les cours et tribunaux nationaux, la manière la plus efficace de répondre à ce défi est d'engager un dialogue avec les juridictions internationales et, ce, pour deux raisons. D'un point de vue purement doctrinal, les juridictions nationales participent directement et indirectement à l'évolution du droit international coutumier : les décisions qu'elles prennent en se fondant sur le droit international sont perçues comme le reflet du droit international coutumier [7], et les actions du gouvernement qui seront conformes à leurs décisions constitueront pratique effective de l'État accompagnée de l'opinio juris. Les juridictions internationales devront donc tenir compte de la jurisprudence des cours et tribunaux nationaux. Par conséquent, plus les cours et tribunaux nationaux s'emploient à appliquer la législation internationale, plus leur jurisprudence définit les choix dont disposent les juridictions internationales lorsque celles-ci sont confrontées à des problèmes similaires. En outre, si l'on considère les interactions entre juridictions nationales et internationales, les tribunaux internationaux dépendent, dans une certaine mesure, des cours nationales, car ils ont besoin de leur coopération s'ils veulent qu'elles appliquent leurs décisions [8]. Si une juridiction nationale s'évertue à appliquer sérieusement le droit international, elle envoie ce message fort aux cours internationales : les juridictions nationales estiment participer activement au processus d'élaboration des lois transnationales et ne se contenteront pas de simplement accepter les décisions rendues par les tribunaux internationaux. Puisque l'efficacité des tribunaux internationaux dépend de l'application de leurs décisions par les juridictions nationales, ils doivent anticiper la réaction de ces dernières et tenir compte de leur jurisprudence. C'est en ce sens que des juridictions nationales affirmées et s'appuyant sur le droit international peuvent effectivement limiter l'autonomie des tribunaux internationaux.
7Néanmoins, il manque à cette stratégie un élément essentiel pour avoir un réel impact : un front judiciaire uni et coordonné. Si une seule juridiction nationale adoptait une politique affirmative, elle risquerait d'être repérée et perçue comme un élément problématique et marginal, dont la jurisprudence ne reflète pas la pratique habituelle de l'État. Par conséquent, son gouvernement risquerait d'être isolé ou exploité par des acteurs internationaux. Par exemple, les gouvernements des pays en développement pourront difficilement résister à la pression extérieure qui leur demande de maintenir des normes environnementales peu strictes, afin de jeter des déchets dangereux sur leur territoire, à moins de coordonner leurs activités ou, le cas échéant, de bénéficier de juridictions nationales affirmées et coordonnées. De même, dans le contexte de la lutte anti-terroriste, si une cour d'un pays A impose des contraintes aux mesures anti-terroristes que les cours des autres pays n'imposent pas, alors les citoyens du pays A sont davantage exposés à des attaques terroristes. Un pays qui refuserait de déporter les citoyens étrangers pour des questions de torture, ou un pays où les droits de la vie privée seraient plus strictement appliqués, pourrait devenir (ou pourrait être perçu comme ayant le potentiel de devenir) un refuge pour des terroristes, si les autres pays sont moins tolérants envers les immigrés ou sont dotés de droits plus souples concernant la vie privée. La pression internationale peut aussi s'exercer sur un gouvernement, qui serait obligé de contourner les décisions de ses juridictions, ou de se conformer aux décisions internationales ou, sinon, risquerait de perdre la protection de ses pairs. La meilleure réponse à tous ces cas de figure est la coordination entre les juridictions nationales. Un front uni et transnational parmi les plus hautes juridictions nationales garantirait qu'aucun pays ne devienne une décharge pour les déchets importés, ni un refuge pour les terroristes, ni ne subisse la sanction du groupe ; ainsi, les pairs pourront moins forcer les gouvernements à ignorer les décisions de leurs cours [9].
8Il semblerait de plus en plus que les juridictions nationales prennent pleinement conscience de leur besoin d'être coordonnées [10]. Même les cours des pays les plus puissants comprennent que « l'action unilatérale des juridictions d'un pays » [11] n'aurait pas les effets désirés. La Chambre des Lords [12], par exemple, a déclaré que « les traités internationaux devraient, autant que possible, être uniformément interprétés par les juridictions nationales de tous les États » [13] et a même affinité récemment que ce n'est pas aux juridictions nationales de "développer" les lois internationales en adoptant unilatéralement une version de ces lois qui, bien qu'intéressante, innovante et respectueuse des valeurs, n'est tout simplement pas acceptée par les autres États » [14]. En matière de coordination des politiques migratoires, les juges de plusieurs pays sont allés au-delà de leurs décisions et ont mis en place une institution pour assurer l'uniformité. Ces dernières années, comme le montre, le récent rapport de l'Institut pour l'internationalisation du droit de La Haye (HiiL), des douzaines d'événements réels et virtuels ont été organisées pour stimuler les échanges entre juridictions et une foule de liens se sont créés. Les cours ont besoin d'être sûres que les juridictions d'autres pays appliqueront des règles similaires, a fortiori lorsque faire cavalier seul - ou être trahi ou exploité par d'autres cours - peut se révéler très coûteux, notamment en matière d'immigration.
9Mettre en place une cour supérieure, comme la Cour de justice de l'Union européenne, dont les décisions doivent être appliquées par les juridictions nationales, est certainement un moyen efficace de créer un socle juridique commun, mais ce n'est pas un prérequis pour une coordination judiciaire transnationale [15]. Ce phénomène peut également évoluer de façon endogène entre les juridictions, même si elles cherchent à promouvoir les intérêts nationaux plutôt que la justice mondiale. Si le jeu du dilemme du prisonnier est indéfiniment répété entre deux joueurs, alors il mènera probablement à la coopération, même sans intervention extérieure. Si le jeu se répète indéfiniment et que le futur reste suffisamment incertain (shadow of the future), alors chaque joueur devrait choisir la stratégie de la coopération conditionnelle, en suivant le principe de « un prêté pour un rendu ». En utilisant la menace implicite de la vengeance en cas de défection, les joueurs peuvent obtenir la coopération. La même stratégie de « donnant-donnant » produira également des effets dans un jeu auquel plus de deux personnes participent et, ce, même si un sous-groupe de joueurs choisit de leur faire inconditionnellement défaut. De telles situations peuvent en réalité constituer des jeux de coopération lorsque les joueurs restent dans la partie pour une période indéfinie.
10Pour les cours, la meilleure façon d'initier et de maintenir une coopération est de s'échanger mutuellement leurs informations. Leurs raisonnements et décisions judiciaires donnent des informations sur leur attachement à la coopération. Plus encore, le fait que ces cours s'appuient sur des sources identiques ou similaires facilite leur communication et nous informe sur leur engagement. Dans ce cadre, tous les messages peuvent être transmis, qu'ils soient négatifs ou positifs. Les juridictions coopératives seront citées avec approbation par leurs homologues, alors que les juridictions qui sortent du rang en refusant d'appliquer une nouvelle norme ou en en créant une nouvelle seront critiquées dans les décisions, et parfois même très sévèrement [16].
11En d'autres termes, les décisions d'une cour fonctionnent comme des signaux envers les autres cours et les informent sur son attachement à la coopération. Ces signaux peuvent soit encourager les autres cours soit affaiblir leur détermination, lorsqu'elles sont confrontées à un même dilemme. Parfois, certains jugements présenteront des raisonnements nouveaux et très convaincants qui feront leur chemin parmi les juridictions d'autres pays [17]. Une cour, dans un pays, peut servir d'exemple pour les autres cours, comme la Cour suprême indienne l'est en matière de protection de l'environnement pour le sous-continent indien et pour d'autres pays en développement.
12Les juridictions qui souhaitent signaler qu'elles sont prêtes à coopérer auront tendance à utiliser un langage que d'autres cours comprennent : le droit comparé (essentiellement le droit constitutionnel comparé) et le droit international [18]. Le recours à l'analyse comparée signifie que les cours sont désireuses d'apprendre les unes des autres, ou recherchent le soutien d'autres cours concernant leurs jugements, ou bien les deux. Par ailleurs, elles apprennent du système juridique des autres comment trouver un équilibre entre des intérêts communs divergents, et comment gérer les risques communs et opposés de leurs sociétés. Elles peuvent comparer les accords juridiques comme, par exemple, les conditions de détention des personnes suspectées de terrorisme, en recherchant celui qui empiète le moins sur les droits constitutionnels. Les textes constitutionnels sont encore plus accessibles que les lois spécifiques, et comportent souvent des dispositions similaires sur certaines questions telles que le droit à la vie, le droit à un procès équitable, l'égalité, et les droits politiques fondamentaux. Et en effet, les juridictions recherchant la coopération développent des analyses comparées dans leurs décisions. Comme il sera présenté ci-dessous, l'analyse constitutionnelle comparée occupe aujourd'hui le devant de la scène dans la jurisprudence anti-terroriste ainsi que dans les jugements rendus dans les pays en développement sur des questions liées au droit à un environnement sain. En outre, le droit international, source des normes collectives, est devenu l'outil de coordination le plus précieux pour les juridictions nationales. La capacité de ces cours à s'appuyer sur des normes juridiques identiques ou similaires (des traités internationaux tels que la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, dite Convention de Genève, ou les traités relatifs aux droits de l'homme) facilite l'harmonisation entre elles. Lorsque les cours nationales font référence à l'interprétation d'un même texte, par des juridictions étrangères, elles ne se contentent pas de signaler qu'elles sont prêtes à coopérer, mais elles empêchent également un éventuel futur désistement de l'une d'entre elles qui se retirerait de cette interprétation commune. Puisque les cours s'observent attentivement les unes et les autres, celle qui fait marche arrière doit présenter une explication à ses pairs.
13Cependant, le fait qu'une même norme soit appliquée ne facilite pas pour autant sa mise en pratique par les juridictions concernées. Premièrement, le contenu de la norme peut être vague ou ouvert à diverses interprétations par les gouvernements nationaux. Deuxièmement, toutes les juridictions confèrent un statut très différent au droit international, au sein de leur hiérarchie juridique nationale. Troisièmement, le langage de la législation nationale qui aura intégré un traité international spécifique en aura peut-être altéré le langage original et, de fait, le contenu. Toutefois, les juridictions ont trouvé des moyens de surmonter ces obstacles, lorsqu'elles le souhaitent. Elles exploitent alors l'abondante jurisprudence développée par les tribunaux internationaux sur l'interprétation « effective [19] », « évolutive » [20] ou « systémique » [21] des traités, ou s'appuient sur la variabilité avec laquelle ces tribunaux internationaux identifient les normes coutumières. [22] En outre, ces tribunaux interprètent les lois nationales en partant du principe que les législateurs n'ont pas l'intention de s'opposer aux obligations internationales. Enfin, même les coutumes et traités qui ne sont pas ratifiés sont souvent considérés comme pertinents pour le pouvoir exécutif dans le cadre de son application discrétionnaire des lois nationales.
La coopération judiciaire : une pratique émergente
14L'utilisation stratégique du droit étranger et international caractérise cette facette de la coopération judiciaire qui cherche à vérifier et influer sur la politique des gouvernements. Ce processus de prise de pouvoir collective n'est pas nécessaire dans d'autres domaines de la coopération judiciaire, tels que les contentieux civils transnationaux, qui n'impliquent pas les intérêts du gouvernement. Ce phénomène est constatable dans quatre domaines au moins : en matière de contrôle de constitutionnalité des mesures anti-terroristes mondiales, de la protection de l'environnement dans les pays en développement, du statut des demandeurs d'asile dans les pays de destination, et de l'avancement des droits socio-économiques dans les pays en développement. Dans ces quatre domaines, les cours ont réagi à des réponses gouvernementales qu'elles considéraient trop faibles face à la pression extérieure (concernant la lutte contre le terrorisme, la protection de l'environnement ou les droits socio-économiques, ces réponses venant du pouvoir exécutif des États en développement), ou trop fortes (envers les demandeurs d'asile). Nous examinerons dans cette partie l'évolution de la coopération judiciaire, alors que les cours et tribunaux cherchent à contrebalancer la politique de leurs gouvernements dans ces trois domaines. Cet article ne peut que se limiter à esquisser sommairement les contours de cette jurisprudence émergente. Bien entendu, le but est de démontrer la possibilité de cette thèse sur l'émergence d'une coopération transnationale, plutôt que de proposer une analyse détaillée de chaque domaine. Ainsi, l'attention sera davantage portée sur les moyens de communication - l'usage de plus en plus fréquent du droit constitutionnel comparé et l'utilisation créative du droit international - que sur le contenu précis des normes. En effet, ces domaines de la coopération judiciaire, ainsi que d'autres, nécessiteraient des recherches plus approfondies.
Le contrôle de constitutionnalité des mesures anti-terroristes mondiales
15Suite aux attentats du 11 septembre, les efforts mondiaux menés en matière de lutte contre le terrorisme ont uni les organes de sécurité nationaux de divers pays pour faire cause commune. Ils ont commencé à travailler à la fois directement, en collaborant les uns avec les autres, et indirectement, à travers un réseau d'institutions internationales formelles et informelles. Ces organes nationaux ont insisté sur la nécessité d'avoir un pouvoir discrétionnaire exclusif et étendu pour créer et appliquer ces contraintes comme ils l'entendaient, en arguant que l'exécutif était relativement mieux placé que les autres branches du gouvernement pour évaluer et gérer les risques de terrorisme et pour s'engager dans une coopération mondiale. La plupart des législateurs ont accédé à la demande de prérogative de leur dirigeants politiques nationaux.
16Au début, des juridictions effrayées ont répété le schéma habituel de la déférence judiciaire, mais trois ans plus tard, en décembre 2004, la Chambre des Lords a donné un ton nouveau et différent, dans la décision dite des « détenus de Belmarsh ». Le changement d'approche de la cour, qui était évident dans cette décision, l'est également devenu en dehors du Royaume-Uni. Le dialogue judiciaire émergent comprend actuellement les juridictions d'autres pays, tels que la France, l'Allemagne, Hong Kong, l'Inde, Israël et la Nouvelle-Zélande, et elles s'intéressent toutes aux mesures antiterroristes [23]. Ces cours ont exploré les obligations internationales imposées à leurs pays respectifs, en se référant aux textes des traités sur les droits de l'homme, aux lois sur les conflits armés et au droit international coutumier [24]. Elles apprennent des doctrines des unes et des autres en matière de droit constitutionnel [25]. Dans ce processus d'interprétation, elles se réfèrent considérablement les une aux autres, en se citant. Par exemple, dans une décision de la Chambre des Lords concernant l'admissibilité de preuves obtenues par des actes de torture effectués par des agents étrangers, les juges ont mené une analyse comparée de la jurisprudence d'autres pays, tels que le Canada, la France, l'Allemagne et les États-Unis [26]. En outre, ils comparent les accords juridiques des différents pays, de façon à déterminer les mesures qui empiètent le moins sur les droits constitutionnels [27]. Ils agissent ainsi en étant tout à fait conscients de leur propre rôle dans la lutte mondiale contre le terrorisme. Comme la Cour suprême indienne l'a reconnu, « face aux menaces terroristes mondiales, il est nécessaire d'agir mondialement et collectivement. » [28] La cour indienne a soutenu cette affirmation en faisant référence au juge Lord Woolf qui insiste sur le fait que « lorsque des terroristes internationaux agissent au niveau mondial... il est important d'appréhender le terrorisme de façon collective. » [29] La capacité de ces cours à s'appuyer sur des normes juridiques identiques ou similaires (des traités internationaux tels que la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, dite Convention de Genève, ou les traités relatifs aux droits de l'homme) facilite l'harmonisation entre elles [30]. Le raisonnement des cours, présent dans leurs décisions, montre qu'elles surveillent attentivement la jurisprudence des autres juridictions, et leur évocation du droit international reflète leur savoir et leur érudition.
17Le refus des cours de se limiter à valider la politique de l'exécutif ne doit pas être perçu comme une preuve d'unilatéralisme ni connue un refus de collaborer avec cette branche pour parvenir à une politique anti-terroriste mutuellement acceptable. Contrairement à la jurisprudence des cours en matière de politique migratoire, mentionnée ci-dessus, les cours essaient, en matière de lutte anti-terroriste, d'engager leurs branches politiques dans le débat plutôt que d'avoir le dernier mot sur les questions débattues. Ce qui caractérise nombre de décisions sur la légalité des mesures anti-terroristes, c'est que les cours essaient autant que possible de ne pas juger le fondement de l'action menée par l'exécutif, mais plutôt de déterminer les éléments dont l'exécutif doit tenir compte en exerçant son pouvoir discrétionnaire, ou d'inviter les législateurs à intervenir sur le sujet, ou de reconsidérer une autorisation vague ou précipitée qu'ils ont accordée [31]. En se concentrant sur le niveau institutionnel, les cours peuvent davantage limiter les autorisations délivrées par les législateurs, en avançant que ceux-ci doivent tenir compte d'éléments importants que sont les obligations internationales de l'État. Il est beaucoup plus rare de recourir à une limitation directe du pouvoir législatif se fondant sur des motifs constitutionnels, l'ultime sanction judiciaire [32]. La jurisprudence de la Cour suprême des États-Unis concernant le traitement des personnes détenues à Guantanamo ou ailleurs, en rapport aux attentats du 11 septembre, montre bien comme le contrôle de constitutionnalité peut gagner du terrain. Dans les affaires Rasul [33] et Hamdi [34], la cour a commencé par renvoyer la question aux pouvoirs exécutif et législatif, en affirmant qu'elle avait la compétence d'examiner les actions de l'exécutif concernant la détention des « combattants illégaux » (unlawful ou enemy combatants). Deux ans plus tard, dans l'affaire Hamdam [35], la cour s'est fondée sur le droit international comme standard afin d'évaluer la légalité des commissions militaires établies par le président américain pour déterminer le statut des détenus de Guantanamo. Les juges utilisent encore la technique de renvoi lorsqu'ils déclarent que le pouvoir exécutif peut toujours essayer d'obtenir l'approbation du Congrès pour déroger à ces obligations [36], mais que ce sont eux, les juges, qui finissent par examiner la constitutionalité de l'intervention du Congrès. C'était le cas dans l'affaire Boumediene, qui a confirmé l'inconstitutionnalité de la Military Commissions Act of 2006 (loi de 2006 sur les commissions militaires) [37].
La protection de l'environnement dans les pays en développement
18Dans plusieurs pays en développement, les cours et tribunaux [38] répondent eux-mêmes au manque de législation et d'institutions en matière environnementale. Ces juridictions se transforment ainsi en législateurs, en ouvrant plus facilement leurs portes à de potentiels requérants et en considérant que le droit constitutionnel à la vie peut générer des obligations environnementales pour l'État. Elles interviennent même de façon proactive dans la sphère discrétionnaire de l'exécutif, en mettant en place des mécanismes institutionnels d'évaluation et de surveillance des préjudices environnementaux, qui servent également à donner satisfaction aux requérants [39]. Lorsque le pays n'est pas doté de législation dans ce domaine, les cours siégeant dans une région dont l'environnement est menacé peuvent fonder leur autorité formelle - pour élargir et faire appliquer les procédures et normes liées à l'environnement - sur deux sources : la constitution nationale et le droit international. Ces deux sources leur permettent ainsi de communiquer avec les cours d'autres pays, en se référant à la jurisprudence des cours étrangères. En réalité, ces communications inter-judiciaires se sont révélées être caractéristiques de la jurisprudence de ces cours, la Cour suprême indienne ayant ouvert la marche dans ce domaine. En 1994, la Cour suprême pakistanaise s'est référée à des affaires indiennes [40].
19En 1997, le juge Rahman, de la Section des appels de la Cour suprême du Bangladesh, a présenté une jurisprudence indienne comme modèle pour l'émulation [41]. En 2000, la Cour suprême du Sri Lanka a fait référence à une décision indienne avec approbation [42]. La Cour suprême indienne s'est elle-même référée à des décisions judiciaires venant des Philippines, de Colombie, d'Afrique du Sud, et de la Cour européenne des droits de l'homme, ainsi qu'à une décision de la Commission américaine des droits de l'homme, en notant, avec une évidente satisfaction, que « le concept selon lequel un environnement sain fait partie du droit fondamental à la vie, concept développé par notre propre Cour suprême, est adopté par différents pays, tout comme le droit au développement. » [43]
20Dans de nombreuses constitutions, il n'existe aucun texte clairement dédié à la protection de l'environnement ; de fait, les cours doivent extraire cette protection du droit fondamental à la vie, qui est ancré dans toutes les constitutions. La Cour suprême indienne s'est beaucoup reposée sur le principe que le droit constitutionnel à la vie incluait le droit de disposer d'eau et d'air non pollués, qui sont nécessaires à l'entière jouissance du droit à la vie [44]. Afin d'élargir la portée de ce droit, la Cour indienne, ainsi que d'autres cours, se sont inspirées du droit international, dont elles ont tiré une certaine autorité. Toutefois, recourir à la législation internationale signifie également se heurter à des obstacles. Le droit environnemental international est fragmenté et la plupart de ses dispositions représentent à peine plus que des déclarations exhortatives. En outre, le statut de ces normes, au sein de l'ordre juridique national et interne, est un obstacle supplémentaire à leur utilisation judiciaire. Cependant, face à des désastres environnementaux imminents, les juridictions de plusieurs pays ont adopté tous les documents internationaux sur l'environnement qui pouvaient les aider et les guider.
21La Cour suprême d'Inde a montré le chemin en exploitant ces sources juridiques internationales. Ainsi, elle considère la déclaration de la Conférence de Stockholm sur l'environnement (1972) comme la « grande charte de notre environnement » [45] et importe, dans son droit national, des concepts et principes tels que le « développement durable » [46], le « pollueur-payeur » [47] et le « principe de précaution » [48], tous mentionnés dans les instruments de « droit mou » internationaux [49]. Souvent, la cour ne donne pas la signification légale de ces documents internationaux et, parfois, elle se réfère à des déclarations telles que la Déclaration de Rio sur le développement et l'environnement (1992) en les qualifiant d'« accords » qui ont été « édictés » [50]. L'abondance de ce type de documents non-contraignants, ajouté au fait qu'ils ont été approuvés par de nombreux gouvernements lors de sommets importants, explique pourquoi la cour s'y réfère et dit qu'ils se sont transformés en « droit international coutumier, bien que [leurs] aspects essentiels doivent encore être fixés par des juristes en droit international. » [51] D'autres cours de cette région du monde (au Pakistan [52], au Sri Lanka [53], au Népal [54] et au Bangladesh [55]) ont abondé dans le sens de la jurisprudence de la Cour suprême indienne, en invoquant ces principes de façon similaire dans leurs décisions concernant l'environnement.
22Ces juridictions sont clairement conscientes des conséquences économiques potentiellement négatives que peut engendrer leur jurisprudence pro-environnementale [56]. La coopération inter-judiciaire offre souvent la possibilité d'atténuer ces effets négatifs. En effet, au vu des sérieux dangers environnementaux qui menacent le sous-continent indien, ces juridictions nationales semblent avoir volontairement et résolument poussé à la réforme, sans même chercher le soutien de leurs homologues étrangers. Cependant, sans cette coopération, ces juridictions auraient peut-être beaucoup moins résisté à la pression des groupes industriels nationaux et étrangers, pour qui moins de normes environnementales riment avec davantage de profits économiques. Ces juridictions ne sont pas toutes-puissantes dans leur combat pour limiter les forces économiques de la mondialisation, et la coopération permet à la fois d'élargir ce qui peut être accompli - même l'Inde aurait moins d'ambitions si elle agissait seule - et de réduire le coût de ce combat pour chacune d'entre elles.
La coordination de la migration dans les pays de destination
23Contrairement aux deux domaines présentés plus haut, où s'exerce la créativité judiciaire, l'élaboration des politiques nationales en matière de migration est une question essentielle et hautement politique. Les vagues de demandeurs d'asile venant de régions touchées par les conflits et la pauvreté, a fortiori depuis le début des années 1990, ont poussé les pays développés à modifier leurs politiques migratoires, en restreignant considérablement l'accès aux réfugiés et en limitant leurs droits [57]. Les diverses branches politiques attendaient des cours et tribunaux qu'ils respectent la politique nationale, et qu'ils confirment ce qui était le fruit de réflexions soutenues et de la faveur populaire. Cependant, ces juridictions ne pouvaient pas immédiatement appliquer ces politiques nationales modifiées, du fait de diverses normes juridiques, fondées sur la constitution du pays et sur le droit international. Néanmoins, respecter les exigences du droit constitutionnel et international et ainsi défier la volonté du peuple ne menaient pas uniquement à de lourdes critiques. Si une cour « coopérait » avec ces strictes obligations juridiques, et que les autres cours faisaient « défection » en interprétant les lois moins généreusement, alors la première aurait attiré tous les réfugiés vers elle. Ainsi, la coopération inter-judiciaire était nécessaire afin de tenir tête à la politique nationale, sans pour autant entraîner une augmentation du nombre de réfugiés.
24Toutefois, les enjeux étaient importants et il aurait été inefficace, voire irresponsable, de la part des juges, de s'appuyer uniquement sur cette vieille pratique de comparaison des décisions et d'échanges intermittents. Peut-être que ce sont des sentiments de ce type qui ont mené à la création de l'Association internationale des juges aux affaires des réfugiés (IARLJ) en 1995 [58]. La constitution de l'IARLJ reconnaît qu'« à travers le monde, le rôle des juges et des acteurs délivrant des décisions quasi-judiciaires est notamment de s'assurer que les personnes cherchant la protection hors de leur pays d'origine constatent [...] que les instruments internationaux et régionaux sont appliqués de façon équitable et cohérente, et respectent la rule of law [59]. » Dans ce même document, l'IARLJ affirme que l'un de ses objectifs est de « promouvoir l'indépendance judiciaire, et de faciliter le développement, au sein des systèmes juridiques nationaux, d'institutions indépendantes appliquant les principes judiciaires à la question des réfugiés » [60].
25Dans les années 90, les juridictions nationales traitant les affaires de demandeurs d'asile ont commencé à citer les interprétations de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés, faites par d'autres cours, et en particulier la disposition clé qui concerne la définition d'un « réfugié » [61]. Cette convention a servi de base pour parvenir à une position judiciaire commune qui a souvent permis à ces cours de battre des politiques gouvernementales restrictives, sans pour autant que les immigrants affluent vers les cours les plus souples. Cela ne signifie pas que les juridictions étaient toujours unanimes sur tous les aspects complexes de la qualification de « réfugié ». Cependant, lorsqu'on lit plusieurs décisions clés des plus hautes juridictions des pays de destination, il apparaît clairement qu'elles font un réel effort d'interprétation moderne de la convention de 1951, interprétation qui élargit la définition du réfugié au-delà de ce qu'imaginaient les rédacteurs de l'époque et, ce, malgré les préoccupations des gouvernements contemporains [62].
26Pour atteindre ce but, les cours ont choisi d'interpréter collectivement les termes de la convention. Ce dialogue, judiciaire remonte au début des années 90, quand une décision de la Cour suprême du Canada datant de 1993 [63] cita une décision rendue par le Conseil de l'immigration américain en 1985 [64], et fut elle-même citée ensuite par la Haute cour d'Australie en 1997 [65], par l'Autorité du statut des réfugiés de Nouvelle-Zélande en 1998 [66] et par la Chambre des Lords en 1999 [67]. Dans cette dernière décision, la Chambre des Lords félicite l'Autorité du statut des réfugiés de Nouvelle-Zélande pour son « impressionnante décision » qui se rapproche de « la jurisprudence et la pratique constatées en Allemagne, aux Pays-Bas, en Suède, au Danemark, au Canada, en Australie et aux États-Unis » [68]. En 2000, la Cour d'appel des États-Unis pour le neuvième circuit abandonne sa précédente interprétation [69], que ces autres juridictions ont refusé de suivre, et rejoint la position commune, en concédant que c'était également la position des cours canadiennes voisines [70]. Cet échange inter-judiciaire implique nécessairement des désaccords sur certains aspects de ladite définition [71] mais le dialogue se fait alors dans le plus grand respect et la plus grande attention [72]. Comme le montre cette décision du neuvième circuit (2000), les réflexions peuvent, au final, céder au consensus général. En 2001, la Chambre des Lords a ouvertement abordé le rôle des juridictions nationales qui doivent empêcher les « aberrations » dans l'application de la Convention de Genève sur les réfugiés, grâce à « une approche uniforme du problème des réfugiés. » [73] Le juge Lord Steyn a insisté sur la nécessité d'un effort judiciaire collectif afin de passer au-dessus des particularités nationales lorsqu'il s'agit de l'interprétation d'un texte commun [74].
27Cependant, cette même décision montre également les limites de l'indépendance judiciaire. Certaines juridictions, notamment en France et en Allemagne, ont été plongées, dès le début des années 1990, dans un environnement politique de plus en plus concerné par les afflux de réfugiés. Des politiques restrictives ont été adoptées dans les deux pays, par des amendements à la constitution [75]. Dans les années 90, la plupart des réfugiés fuyaient les pays touchés par des guerres civiles et par la pauvreté intercommunautaire, et les juridictions européennes ont été appelées à déterminer si la « persécution » comme définie par la Convention de Genève pouvait également venir d'agents ne faisant pas partie de l'État. Alors que la majorité des cours, y compris celles du Royaume-Uni, ont reconnu que des acteurs non-étatiques pouvaient être considérés comme des « persécuteurs », quelques autres cours, notamment en Allemagne et en France, ont refusé de les suivre dans cette interprétation [76]. Par conséquent, les juridictions allemandes ne conféraient pas le statut de « réfugiés » aux demandeurs d'asile venant de pays tels que l'Afghanistan, la Bosnie, le Sri Lanka et la Somalie, dont les souffrances étaient causées par des agents non étatiques ; de la même façon, les juridictions françaises rejetaient les demandes d'Algériens persécutés par des milices, sans preuve que l'État algérien n'encourageait pas ou ne tolérait pas ces persécutions [77]. Face à la faiblesse de la protection accordée aux réfugiés dans ces deux pays, la Chambre des Lords a rejeté la décision du ministre britannique d'envoyer des réfugiés somaliens et algériens respectivement en Allemagne et en France, de peur qu'ils soient déportés et persécutés [78].
La protection des droits socio-économiques dans les pays en développement
28On peut observer l'évolution des juridictions des pays en développement dans le domaine de l'application des droits socio-économiques de leurs électeurs nationaux, face à la pression des entreprises étrangères qui veulent faire appliquer des normes liées au commerce en passant par des institutions internationales ou par les gouvernements. Les cours qui résistent pourraient évoquer d'autres normes internationales, comme les droits de l'homme ou de l'environnement, ou des principes constitutionnels, comme le droit à la vie, afin de contrer les demandes fondées sur des traités particuliers ou des lois sur le commerce. Des cours du Pakistan, d'Inde et du Bangladesh se sont référées, par exemple, au droit à la vie protégé par leurs constitutions respectives, et ont également mentionné des documents internationaux tels que les résolutions de l'Organisation mondiale de la santé comme base pour restreindre l'importation de nourriture contaminée [79]. Elles ont en outre vu dans leur droit national l'obligation, pour leurs gouvernements respectifs, d'interdire la publicité sur les cigarettes et d'interdire de fumer dans les lieux publics [80].
29Cependant, la protection des droits socio-économiques peut entrer en conflit avec les obligations de l'État vis-à-vis de traités, en particulier celles liées au commerce. Dans ces conditions, ces cours résistantes peuvent essayer de limiter la portée des obligations en matière de droit international du commerce sur la législation nationale. Par exemple, une haute cour de Madras (Inde) a refusé de se conformer aux obligations du pays prévues dans l'accord TRIPS, dans le cadre d'un procès intenté par une multinationale étrangère contre le gouvernement indien qui avait failli à ses obligations [81]. La cour a estimé que l'accord TRIPS était essentiellement un contrat entre États-parties qui s'étaient accordés sur une juridiction où régler les conflits, en indiquant les vrais problèmes sous-jacents : les droits constitutionnels à la santé et l'accès, pour les patients indiens, aux versions génériques d'un médicament vital [82]. L'enjeu était la brevetabilité de Gleevec, un médicament vital pour les patients atteints de leucémie, ainsi que la production d'une version générique beaucoup moins onéreuse par des sociétés indiennes, pour des patients en Inde et dans d'autres pays en développement. Cette décision venait juste après que des grandes sociétés pharmaceutiques étrangères avaient essayé, en Afrique du Sud, d'exécuter les obligations du pays vis-à-vis de l'accord TRIPS, malgré l'obligation nationale d'obtenir une licence pour les médicaments vitaux [83].
Le potentiel et les limites du développement de cette coopération
30En théorie, on peut s'attendre à voir de la coopération dans d'autres domaines où des alliances judiciaires pourraient faciliter la confrontation à des acteurs internationaux cherchant à supplanter le processus politique national ou à le forcer à se soumettre [84]. La logique de la coopération inter-judiciaire a toutefois ses limites. Les juridictions restent sensibles à l'intérêt national. Chaque fois que les gouvernements souhaitent entretenir la concurrence avec d'autres gouvernements ou entreprises privées, les cours les suivront. Cette attitude est constatée dans le domaine du commerce international. Lorsque les États-Unis et l'Union européenne appliquent le régime de l'Organisme mondial du commerce dans leurs systèmes juridiques respectifs, ils stipulent que les obligations commerciales n'auront aucun effet direct sur leurs législations [85]. D'autres juridictions ont adopté la même attitude et, en effet, il est largement reconnu que les règles de l'OMC ne sont pas directement applicables dans la législation nationale de la plupart des pays [86]. Il est d'ailleurs ironique que les règles de l'OMC jouissent d'une reconnaissance nationale dans certains pays qui, en général, ne sont pas dotés d'un pouvoir judiciaire indépendant. Des pays tels que la Chine et l'Égypte ont entrepris de mettre en place des cours et tribunaux indépendants afin d'exécuter, au niveau national, leurs obligations découlant du régime de l'OMC [87].
31La coopération judiciaire se limitera aux points où le bénéfice pour leur État sera plus important que le coût engendré. Par exemple, de nombreuses cours étaient initialement très désireuses d'examiner les plaintes portées contre des représentants d'États étrangers accusés de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité - l'affaire Pinochet [88] en est un bon exemple - mais ont au final, estimé que les coûts seraient supérieurs aux bénéfices, et ont ainsi décidé de s'incliner devant leur gouvernement. Si les procès intentés contre des dictateurs déchus comme Pinochet n'engendrent pas de risques excessifs pour l'État saisi de l'affaire, il est beaucoup plus risqué pour la plupart des économies - sauf, là encore, pour les États-Unis [89] - d'autoriser les poursuites à l'encontre de chefs du gouvernement ou de haut représentants, qui sont toujours en poste et qui dirigent, en outre, des pays influents qui ont beaucoup investi dans ces États saisis [90].
L'évaluation de la légitimité de la coordination inter-judiciaire
32Les critiques du rôle grandissant des cours dans les politiques nationales, du contrôle de constitutionnalité des lois, et surtout de l'utilisation du droit étranger et international dans les décisions de justice, s'inquiètent que les cours ne dépassent leurs prérogatives et ne supplantent les branches politiques du gouvernement. Ces critiques risquent d'être davantage embarrassés par le développement manifeste de la coopération inter-judiciaire, comme nous l'avons présenté plus haut. Il est toutefois utile de rappeler ceci : le débat sur les limites de l'implication des cours dans les affaires du pouvoir politique, notamment dans le contexte du contrôle de constitutionnalité des lois, se fondait essentiellement sur le présupposé que la réflexion démocratique était souveraine et bien informée. Aujourd'hui, elle n'est ni l'un ni l'autre. Outre ses bienfaits indéniables, la coordination transnationale réduit la possibilité de participation publique à la fabrique du jugement et offre des mécanismes définis pour s'assurer que les agences de coordination puissent rendre des comptes à la société civile.
33Bien entendu, la participation du peuple dans les questions de politique étrangère et dans d'autres domaines a souvent été limitée et, ce, même dans les démocraties évoluées. Toutefois, il est inquiétant de constater que, ces dernières années, ces questions ont été de moins en moins reléguées aux instances décisionnaires transnationales. La coordination intergouvernementale offre de plus en plus aux groupes d'intérêts et aux représentants de l'État les moyens d'éviter les processus nationaux démocratiques et de contrôle, qui s'étaient pourtant développés progressivement grâce aux efforts de la société civile, des législateurs et des cours. Cette attitude menace de priver les électeurs et les législateurs de leur pouvoir électoral, dans plusieurs coins du monde. Outre l'éventuelle exception américaine, la plupart des pays ont cédé une part importante de l'élaboration de leur politique à des forces extérieures. De plus en plus, les gouvernements étrangers et les acteurs privés laissent peu de choix aux gouvernements nationaux et aux parlements, qui doivent accéder à leurs demandes. Cette situation complexe est bien illustrée par les réponses des gouvernements et parlements aux mesures antiterroristes qui ont suivi les attentats du 11 septembre, et par l'inaction des gouvernements des pays en développement en matière de protection environnementale, comme nous l'avons évoqué.
34Les juridictions nationales - encore une fois excepté les cours américaines qui ne partagent pas les mêmes préoccupations, pour des raisons évidentes - réagissent à ce qu'elles identifient comme de la faiblesse de la part de leurs branches politiques qui ne résistent pas à la pression, venant surtout de l'extérieur, ou comme la volonté d'échapper à leur responsabilité nationale. Elles se réfèrent aux droits étranger et international non pas pour essayer de promouvoir des objectifs mondiaux ou aider d'autres pays, mais parce qu'elles estiment que ces références constituent une stratégie durable pour garantir les processus de réflexions intérieurs aux intervenants nationaux, dont les intérêts sont complètement ignorés ou pas totalement protégés par les branches politiques.
35Par ailleurs, en appliquant sérieusement la législation internationale, ces cours signalent aux juridictions internationales qu'elles s'estiment être également partenaires du processus transnational d'élaboration de la jurisprudence, et qu'elles ne se contenteront pas d'accepter passivement les décisions des tribunaux internationaux. La capacité des cours nationales à créer un espace juridique cohérent et stable montre qu'elles pourraient participer directement à la mise, en place, d'un réseau logique d'obligations liées entre elles, qui serait à l'opposé de la cacophonie actuelle, causée par la dispersion et la disparité des traités, souvent contradictoires, qui composent aujourd'hui le droit international. Puisque l'efficacité des tribunaux internationaux dépend de l'application de leurs décisions par les juridictions nationales, ils doivent anticiper la réaction de ces dernières et tenir compte de leur jurisprudence. Ainsi, les cours nationales qui évoquent le droit international peuvent vraiment limiter l'autonomie des juridictions internationales ou, du moins, initier un processus informel de négociation dans lequel leurs législateurs, leurs sociétés civiles et elles-mêmes seront des partenaires relativement égaux.
36Indirectement, en exerçant collectivement leur pouvoir de contrôler la constitutionnalité des lois, un petit groupe de juridictions nationales essentiellement motivées par leur désir commun de protéger les processus démocratiques de leur pays peut promouvoir ce que l'on peut appeler un bien commun mondial : la responsabilité croissante des décideurs internationaux vis-à-vis de groupes d'intervenants de plus en plus variés et venant du monde entier. Bien entendu, il existe plusieurs institutions ou organes judiciaires internationaux qui peuvent largement vérifier et même juger les décisions d'autres organisations internationales. La Cour de justice de l'Union européenne, la Cour européenne des droits de l'homme, la Cour internationale de justice et l'organe d'appel de l'Organisation mondiale du commerce sont quelques-unes des instances clés qui pourraient exercer un contrôle de constitutionnalité indirect entre elles. Cependant, à ce jour, le système d'évaluation officielle des organisations internationales par leurs pairs demeure à l'état de potentiel. Dans ces organisations internationales, les représentants et les juges ont tendance à se coordonner tacitement avec leurs collègues d'autres institutions internationales (ainsi qu'avec d'autres États-parties, plus faibles) [91]. Dans le cas des juges siégeant dans les tribunaux internationaux, l'objectif est de produire une jurisprudence du droit international qui soit cohérente et régulière, car plus la législation est cohérente, plus elle fait autorité. La coordination entre les juridictions renforce le rôle de tous les tribunaux et cours car, en adoptant une position unie et unique, ils montrent que leurs points de vue convergent vers des principes incontestés.
37Contrairement aux organisations internationales qui sont peu incitées à s'évaluer entre elles, les juridictions nationales ont clairement intérêt à contrôler les décisions des organisations internationales qui affectent directement ou indirectement le système juridique de leur pays, d'autant qu'elles ont le pouvoir de le faire. Les cours nationales fonctionnent sous l'autorité des constitutions nationales et, bien souvent, elles disposent d'une tradition d'indépendance établie de longue date, ce qui leur permet d'être bien plus indépendantes du pouvoir exécutif national que les représentants des organisations internationales et les juges des tribunaux internationaux, dont les institutions cultivent moins cette tradition d'indépendance et dont l'organigramme est régulièrement modifié. Les cours nationales estiment qu'elles sont les seules responsables de la protection des intérêts de la population de leur pays ; c'est pourquoi maintenir l'autorité des organisations internationales ou du droit international en général les intéresse peu, et elles n'hésitent pas à vérifier les décisions des organisations internationales qui pourraient affecter leur système juridique ou limiter leur propre autorité en tant que gardiennes. Par conséquent, nous croyons qu'il est possible, dans le futur, que les cours nationales contrôlent les organisations internationales de façon bien plus détaillée que ne le font leurs homologues au niveau international [92].
38Il faut toutefois noter que les gouvernements ont les moyens de réagir à ce défi. Certains signes indiquent clairement qu'une réponse intergouvernementale et collective est en train d'apparaître pour contrecarrer ou restreindre les cours nationales. Dans le domaine de la lutte anti-terroriste, les gouvernements ont travaillé dans le cadre du comité contre le terrorisme du Conseil de sécurité de l'ONU, sous l'égide du chapitre VII de la Charte des Nations unies, afin de limiter l'utilisation du contrôle de constitutionnalité par leurs cours nationales [93]. En matière de migration, on constate également que les gouvernements européens contrent leurs juridictions nationales en recourant aux instruments de l'Union européenne pour réguler les politiques migratoires [94]. La fragmentation du droit international et la tendance aux mécanismes de régulation informels peuvent rendre la tâche de la coordination inter-judiciaire plus difficile.
39Bien entendu, des inquiétudes demeurent concernant cette autonomisation inter-judiciaire et collective : les cours sont aussi, au final, des institutions déléguées ; elles peuvent souffrir de partialité en termes de classe sociale, de genre ou d'ethnicité ; elles n'ont pas l'expérience nécessaire pour évaluer et gérer les risques ; leur intervention peut gêner la gouvernance mondiale. Ces inquiétudes, qui sont bien connues dans le débat sur la légitimité du contrôle de constitutionnalité au niveau national, valent également pour le contrôle de constitutionnalité transnational. Les cours ont conscience de ces questions et font parfois preuve d'auto-modération. Comme le montre la discussion sur les politiques migratoires, les juridictions françaises et allemandes ont réellement tenu compte du débat public dans leurs politiques et ont fait « défection » à la coalition judiciaire sur le statut des réfugiés. Bien entendu, l'auto-modération judiciaire n'est pas toujours effective, et l'on peut s'attendre à des excès. Néanmoins, dans l'ensemble, nous pensons qu'il y a de fortes raisons de croire que les juridictions nationales ont ajouté au processus émergent de délibération mondiale une importante voix qui, autrement, n'aurait pas été entendue.
Conclusion
40La tendance traditionnelle des juridictions nationales à « parler d'une seule voix » avec leurs gouvernements a récemment été démentie par leur désir d'aligner leur jurisprudence avec celle des autres cours nationales. Nous pensons que cette stratégie doit être perçue comme une réponse à la délégation de l'autorité du gouvernement envers les institutions internationales formelles et informelles, ainsi qu'à la pression économique grandissante qui contraint les gouvernements et les cours à se conformer aux normes mondiales. Ainsi, cette stratégie vise à inverser l'effritement de la qualité des délibérations nationales, causé par la mondialisation, et à soutenir leurs États dans leur capacité de résistance à la pression de puissants gouvernements et groupes d'intérêt étrangers. Reste encore à voir si ces efforts de coordination transnationale parviendront à atteindre leurs objectifs. Cependant, ils semblent tout à fait cohérents avec les théories démocratiques qui considèrent que les juridictions facilitent la réflexion démocratique. Dans la mesure où ces efforts judiciaires encouragent indirectement le bien commun mondial de la responsabilité croissante des décideurs internationaux vis-à-vis de groupes d'intervenants de plus en plus variés et venant du monde entier, ils sont compatibles avec les théories qui soutiennent la notion de responsabilité des organisations internationales, ainsi que leur ouverture à la participation publique.
Notes
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[1]
E. Benvenisti, Judicial Misgivings Regarding the Application of International Norms : An Analysis of Attitudes of National Courts, 4 Eur. J. Int'l L. 159 (1993).
-
[2]
*NdT : terme désignant la doctrine qui autorise les juges à ne pas se prononcer sur une question de nature politique, comme par exemple la théorie de l'acte de gouvernement.
-
[3]
The Arantzazu Mendi, [1939] A.C. 256, 264 : « Notre État doit parler d'une seule voix sur ce sujet : il ne peut y avoir d'une part le judiciaire disant une chose, et l'exécutif en disant une autre ». V. également Ralph Steinhardt, Human Rights Litigation and the "One Voice" Orthodoxy in Foreign Affairs in World Justice ? U.S. Courts and International Human Rights 23 (Mark Gibney, Ed., 1991), Benvenisti, préc., p. 173-74.
-
[4]
L'analyse explique également pourquoi la Cour suprême américaine, qui n'a pas besoin de protéger les processus politiques ou judiciaires contre la pression extérieure, n'a toujours pas pris part à cet effort collectif. Pour une explication plus ancienne de ce mouvement de retrait de la Cour suprême vis-à-vis de la scène juridique internationale, pendant la période de la Guerre froide, V. Harold Hongju Koh, Transnational Public Law Litigation 100 Yale L. J. p. 2347, p 2360-2366 (1991).
-
[5]
Koh, supra note 3, aux pp. 2383-2394, fait la distinction entre ces types de considérations judiciaires : les questions liées la séparation des pouvoirs, à la compétence judiciaire, et au comité. Les décisions judiciaires les plus franches se demandent si leur « engagement dans le processus de validation des lois étrangères n'est pas davantage un frein qu'une aide à la poursuite des objectifs du pays » (aff. Banco Nacional de Cuba v. Sabbatino, 376 U.S. 398, 423 (1963)) et évoquent « l'avantage de l'approche diplomatique dans la résolution des conflits entre deux États souverains, comparée à l'action unilatérale des juridictions d'un pays » (aff. United States v. Alvarez-Machain, 504 U.S. 655 (1992), fn. 16).
-
[6]
Ceci ne signifie pas que toutes les instances internationales ont des effets néfastes sur la démocratie. Une institution telle que la Cour européenne des droits de l'homme, responsable et efficace, peut améliorer les processus démocratiques et promouvoir les droits des individus dans les États membres (V., plus récemment, Robert O. Keohane, Stephen Macedo et Andrew Moravcsik, Democracy-Enhancing Multilateralism IILJ Working Paper 2007/4, Global Administrative Law Series, disponible sur www.iilj.org (dernière visite le 10 septembre 2008). Cependant, de telles institutions ne représentent qu'une petite partie de toutes les institutions formelles et informelles qui réglementent nos vies, et dont les actions laissent souvent à désirer. Dans de nombreux domaines de la réglementation, les institutions internationales accessibles n'ont pas atteint le niveau des juridictions en matière d'examen de la coopération intergouvernementale.
-
[7]
Voir, par exemple, la décision de la Cour internationale de Justice dans l'affaire du 11 avril 2000 (aff. Congo v. Belg.), 2002 I.C.J. 3 fév. 2004, disponible sur http://www.icj-cij.org/icjwww/idocket/iCOBE/iCOBEframe.htm (dernière visite le 4 avril 2007) (concernant l'examen de la jurisprudence des cours nationales dans le but d'évaluer dans quelle mesure les chefs d'État jouissent de leur immunité devant les juridictions étrangères).
-
[8]
Sur l'interaction entre une cour suprême (en tant que principale) et des tribunaux inférieurs (en tant qu'agents), voir McNollgast, Conditions for Judicial Independence (Research Paper No. 07-43, Apr. 2006), disponible sur http://ssrn.com/abstract=895723 : McNollgast, Politics and the Courts : A Positive Theory of Judicial Doctrine and the Rule of Law, 68 S. Cal. L. Rev. 1631 (1995). La dépendance d'un tribunal international à des cours nationales qui ne sont pas formellement liées par ses décisions est d'autant plus grande. Les relations tendues qui se sont développées entre la Cour de justice de l'Union européenne et certaines juridictions nationales, notamment allemandes et italiennes, confirment cette observation théorique. Voir Juliane Kokkot, Report on Germany in The European Court and National Courts - Doctrine and Jurisprudence 77 (Anne-Marie Slaughter, Alec Stone Sweet and J.H.H. Weiler, Eds., 1998) : Bruno de Witte, Direct Effect, Supremacy, and the Nature of Legal order, in The Evolution of EU Law 177-213 (Paul Craig & Grainne de Burca, éd., 1999).
-
[9]
Pour une analyse de la motivation des cours nationales et de leurs outils, V. Eyal Benvenisti Reclaiming Democracy : The Strategic Uses of Foreign and International Law by National Courts, 102 AJIL241 (2008).
-
[10]
Leur manque de certitude quant à une éventuelle coordination explique leur précédente politique de report.
-
[11]
À noter cette citation extraite de la décision dans l'affaire Alvarez-Machain, sur l'« avantage de l'approche diplomatique... par opposition à l'action unilatérale des juridictions d'un pays » (italique ajouté).
-
[12]
Cf. Constitutional Reform Act 2005, la Chambre des Lords est devenue depuis le 1er octobre 2009 la Cour suprême du Royaume-Uni (N. trad.)
-
[13]
Aff. R. v. Bow St. Métro. Stipendiary Magistrate & Others, ex parte Pinochet Ugarte (N° 3), [2000] 1 A.C. 147, 244 (H.L.) (par le juge Lord Hope of Craighead). Voir également le juge Lord Hobhouse of Woodborough dans les affaires R v Secretary of State for the Home Department, ex parte Adan ; R v Secretary of State for the Home Department, ex parte Aitseguer [2001] 1 All ER 593, 616.
-
[14]
Aff. Jones (Respondent) v. Ministry of Interior (Kingdom of Saudi Arabia) (Appelants), 2006 UKHL 26 par. 63 (H.L.) (par le juge Lord Hoffmann).
-
[15]
Pour une analyse du rôle actif que jouent les cours nationales dans le renforcement de l'UE, V. Joseph HH Weiler, A Quiet Revolution : The European Court of Justice and its Interlocutors 26 Comparative Political Studies 510 (1994).
-
[16]
Par exemple, la Cour de cassation italienne a critiqué en 2004 (aff. Ferrini v. Federal Republic of Germany) une décision rendue par la Cour de cassation grecque en 2000 (aff. Prefecture of Voiotia v. Federal Republic of Germany), alors que la Chambre des Lords a critiqué, en retour, la décision de l'affaire Ferrini (dans l'affaire Jones, supra note 12, par. 22 et 63). Voir Pasquale De Sena & Francesca De Vittor, "State Immunity and Human Rights : The Italian Supreme Court Decision on the Ferrini Case", 16 Europ. J. Int'l L. 89, 101-02 (2005).
-
[17]
La décision rendue par la Cour suprême des Philippines dans l'affaire Minors Oposa est un bon exemple, car elle reconnaît la part des générations futures dans des questions liées à l'environnement : Minors Oposa v. Sec'y of Dep't Env't & Natural Res., 33 I.L.M. 174 (1994). Cette affaire connue a été citée par des cours d'Inde et du Bangladesh - affaire Farooque v. Gov't of Bangladesh, 17 B.L.D. (A.D.) 1 (Cour d'appel du Bangladesh, 1997), disponible sur http://www.elaw.org/resources/printable.asp?id=139 (dernière visite le 4 avril 2007) ; affaire A.P. Pollution Control Bd. (II) v. Nayudu, [2001] 2 S.C.C. 62 (Cour suprême indienne) disponible sur http:// www.commonlii.org//cgi-bin/disp.pl/in/cases/INSC/2000/679. html ?query=Nayudu (dernière visite le 10 janvier 2008) - et dans de nombreux articles universitaires à travers le monde.
-
[18]
Les désaccords qui sévissent au sein de la Cour suprême des États-Unis concernant le droit constitutionnel comparé et la relative réticence de la Cour, ces dernières années, à citer la législation internationale peuvent peut-être être influencés par la relative force des processus nationaux aux États-Unis, qui ne requièrent pas d'aide judiciaire actuellement.
-
[19]
Hersch Lauterpacht, The Development of International Law by the International Court of Justice 227-28, 267-93 (1958). Sur ces instruments, V. également Chester Brown, A Common Law of International Adjudication, pp. 40-54 (2007).
-
[20]
V. Rudolf Bernhardt, Evolutive Treaty Interpretation, Especially of the European Convention on Human Rights, 42 German Ybk. Int'l L. 11 (1999).
-
[21]
C. Maclachlan, The Principle of Systemic Integration and Article 31 (3)(c) of the Vienna Convention, 54 Int'l & Comp. L.Q. 279 (2005) ; D. French, Treaty Interpretation and the Incorporation of Extraneous Legal Rules, 55 Int'l & Comp. L.Q. 281 (2006).
-
[22]
V. par exemple, Theodor Meron, Revival of Customary Humanitarian Law, 99 Am. J. Int'l L. pp. 817, 819-20 (2005). Meron commente « l'échec total [de la CIJ] qui ne s'est pas demandé si l'opinio juris et la pratique favorisaient la cristallisation des [articles concernés] dans le droit coutumier ». Meron salue cette « approche plus souple » et la considère comme « essentielle... à l'efficacité du droit coutumier. » (Id).
-
[23]
Pour une analyse de ces décisions, V. Eyal Benvenisti, Inter-Judicial Cooperation to Secure Independent Review of Counter-Terrorism Measures, in Democracy, Separations of Powers and the Fights against Terrorism (Andrea Bianchi & Alexis Keller éd., 2008).
-
[24]
L'interdiction de la torture a fait l'objet de plusieurs décisions, notamment dans l'affaire Suresh, A (FC) & Others (FC) v. Sec'y of State, 2005 U.K.H.L. 71, et Zaoui v. Attorney-General (N° 2) [2006] 1 NZLR 289 (Cour suprême de Nouvelle-Zélande). La Cour suprême des États-Unis s'est référée à la troisième Convention de Genève (1949) dans l'affaire Hamdan v. Rumsfeld, 126 S. Ct. 2749 (2006), et la cour israélienne a été très active dans l'interprétation et l'application de la législation en matière de conflits armés.
-
[25]
Dans l'affaire People's Union for Civil Liberties v. Union of India [2004] 1 LRI 1, rep. in http://www.commonlii.org/in/cases/INSC/2004/18.html (dernière visite le 10 janvier 2007) (concernant la constitutionnalité de la 2002 Prevention of Terrorism Act, une loi indienne sur la prévention du terrorisme), la cour indienne se réfère (par. 60) à l'institution de l'« avocat indépendant », existant notamment en Nouvelle-Zélande.
-
[26]
Affaire A (FC) & Others (FC) v. Sec'y of State, préc. V. également l'avis du juge Lord Carswell dans la décision dite des « détenus de Belmarsh », A (FC) & Others (FC) v. Sec'y of State, 2004 U.K.H.L. 56, par. 150 (2004) (citant M. Barak, président de la Haute cour de justice d'Israël), sur la nécessité de respecter la rule of law dans la lutte contre le terrorisme).
-
[27]
Dans la récente affaire Charkaoui, la Cour suprême canadienne a présenté la procédure adoptée au Royaume-Uni comme étant un modèle pour le Parlement canadien, lorsque celui-ci décide de remettre en vigueur la loi en question (V. en particulier id. par. 86 : « Rien n'explique pourquoi les rédacteurs de la loi n'ont pas prévu qu'un avocat spécial examine objectivement les documents... comme cela se fait présentement au Royaume-Uni. »).
-
[28]
Aff. People's Union for Civil Liberties v. Union of India, au par. 10.
-
[29]
Aff. A and others v Secretary of State for the home Department ; X and another v Secretary of State for the Home Department [2002] EWCA (Civ) 1502 ; [2004] QB 335, par. 44.
-
[30]
V. Slaughter, préc, Chapter 2.
-
[31]
Dans l'affaire dite du « mandat d'arrêt européen », la Cour constitutionnelle allemande, ou Bundesverfassungsgericht, a examiné la loi sur le mandat d'arrêt européen votée par le Parlement allemand, le Bundestag, afin de mettre en application la décision-cadre sur le mandat d'arrêt européen, qui a été voté en vue de faciliter la coopération intereuropéenne pour lutter contre le crime et le terrorisme. La cour a estimé que ladite loi violait les droits constitutionnels au-delà de ce qui pouvait être nécessaire pour atteindre les objectifs fixés par la politique européenne. Elle a ainsi renvoyé la question au corps législatif afin qu'il remettre en vigueur ladite loi, de sorte que la restriction imposée aux libertés fondamentales (telles que le fait d'être libre de toute extradition) serait proportionnelle. Décision du 18 juillet 2005, 2 BvR 2236/04, disponible sur http://www.bverfg.de/entscheidungen/rs20050718_2bvr223604en.html (dernière visite le 8 septembre 2007). En 1996, le Conseil constitutionnel a renvoyé aux législateurs certaines mesures concernant les immigrés illégaux suspectés d'être des terroristes (ces mesures pénalisant l'assistance à ces personnes et autorisant leur perquisition sans mandat judiciaire). Décision no 96-377 DC du 16 juillet 1996, disponible sur http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/les-decisions/acces-par-date/decisions-depuis-1959/1996/96-377-dc/decision-n-96-377-dc-du-16-juillot-1996.10816.html (dernière visite le 8 septembre 2007). Voir également la décision de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Charkaoui, en 2007, qui exigeait des législateurs qu'ils réécrivent les procédures d'audition.
-
[32]
Le Conseil constitutionnel a jugé une mesure inconstitutionnelle car elle s'appliquait de façon rétroactive dans les territoires étrangers (Décision no 96-377 DC du 16 juillet 1996, préc. Le Parlement allemand a estimé quant à lui que la Luftsicherheitsgesetze (loi de 2005 sur la sécurité aérienne) était inconstitutionnelle car elle violait l'inter alia, ou le principe de la dignité humaine (BVerfG, 1 BvR 357/05 vom 15.2.2006, http://www.bverg.de/entscheidungen/rs20060215_1bvr035705.html (dernière visite le 8 septembre 2007). V. Nina Naske et Georg Nolte, Case Note : « Aerial Security Law » 101 Am. J. Int'l. L. 466 (2007)). En 2004, la Cour suprême indienne a eu recours à un contrôle constitutionnel implicite lorsqu'elle a estimé que plusieurs conditions supplémentaires devaient être ajoutées à un certain nombre de dispositions clés du Prevention of Terrorism Act (« POTA », loi de 2002 sur la prévention du terrorisme), jugeant ces conditions comme nécessaires d'un point de vue constitutionnel (affaire People's Union for Civil Liberties v. Union of India, préc.
-
[33]
Aff. Rasul v. Bush, 542 U.S. 466 (2004).
-
[34]
Aff. Hamdi v. Rumsfeld, 542 U.S. 507 (2004).
-
[35]
Aff. Hamdan v. Rumsfeld, 126 S. Ct. 2749 (2006).
-
[36]
Comme le juge Breyer l'a déclaré dans l'affaire Hamdan, id. aux p. 135-36 : « Au final, la décision de la cour repose sur un seul fondement : le Congrès n'a pas donné "carte blanche" au pouvoir exécutif... Rien n'empêche le président de se tournera nouveau vers le Congrès pour obtenir l'autorité qu'il pense nécessaire ».
-
[37]
Aff. Boumediene v. Bush (2008).
-
[38]
La liste de ces pays comprend l'Inde, le Népal, le Pakistan, les Philippines, le Sri Lanka, la Turquie, l'Afrique du Sud, la Tanzanie, l'Ouganda, le Brésil, le Chili, le Costa Rica, l'Équateur et le Pérou. Pour une analyse des pratiques de ces cours, V. William Onzivu, International Environmental Law, the Public's Health, and Domestic Environmental Governance in Developing Countries, 21 Am. U. Int'l L. Rev. 597, 665-72 (2006) : Carl Bruch et autres, Constitutional Environmental Law : Giving Force to Fundamental Principles in Africa, 26 Colum. J. Envtl. L. 131, 132-35, 150-88 (2001) : Sheetal B. Shah, Illiuminating the Possible in the Developing World : Guaranteeing the Human Right to Health in India, 32 Vand. J. Transnat'l L. 435 (1999) : Vijayashri Sripati, Toward Fifty Years of Constitutionalism and Fundamental Rights in India : Looking Back to See Ahead (1950-2000), 14 Am. U. Int'l L. Rev. 413, 470-71 (1998) : Daniel Bodansky & Jutta Brunnée, The Role of National Courts in the Field of International Environmental Law, 7 RECIEL 11 (1998) : Michael J. Andersen, International Environmental Law in Indian Courts, 7 RECIEL 21 (1998).
-
[39]
Voir Shikhar Ranjan, Legal Controls on the Transboundary Movements of Hazardous Wastes into India - An Evaluation 41Indian J. Int'l L. 44 (2001) (décrivant la réponse du gouvernement indien - l'introduction d'une nouvelle loi - comme étant venue seulement après que les cours avaient réagi aux requêtes de citoyens).
-
[40]
Aff. Shehla Zia v. WAPDA, P.L.D. 1994 Supreme Court 693, disponible sur http://www.elaw.org/assets/word/zia%20v.%20WAPDA.doc (dernière visite le 4 avril 2007).
-
[41]
Aff. Farooque v. Gov't of Bangladesh, préc. (« Si nous regardons les affaires récemment traitées par la Cour suprême d'Inde, alors nous constaterons que l'activisme judiciaire a tendance à protéger l'environnement via les contentieux publics dans des affaires liées à l'environnement. Au Bangladesh, dans ce type d'affaires, les requérants n'ont qu'à frapper à la porte des cours pour leur demander de légiférer en matière environnementale, et les cours acceptent leur affaire. À travers le monde, la tendance est à la libéralisation des règles de recours (standing) [sic], malgré la tradition de ce locus standi. Au début, la Cour suprême indienne avait estimé que, lorsqu'un membre d'un organisme public ou social épousait ainsi [sic] la cause des pauvres et des opprimés, alors ce membre devait être autorisé à saisir la cour, même en écrivant une simple lettre, et sans engager de dépenses lui-même. [...]
La procédure de contentieux d'intérêt public ne devrait pas être limitée aux seules violations des droits définis comme fondamentaux. À l'ère moderne de la technologie, des progrès scientifiques, du développement économique et de la croissance industrielle, les droits socio-économiques sont soumis à un changement considérable. Ces nouveaux droits... requièrent d'être protégés collectivement, et nous devons, par conséquent, agir pour protéger tous les droits constitutionnels, fondamentaux et juridiques, comme le prévoit notre constitution. » -
[42]
Aff. Bulankulama v. Ministry of Indus. Dev., 7(2) South Asian Envtl. Rep. (2000), disponible sur http://www.commonlii.org/lk/cases/LKSC/2000/18.html (dernière visite le 4 avril 2007).
-
[43]
Aff. A.P. Pollution Control Bd. (II) v. Nayudu, préc. (Cour suprême indienne).
-
[44]
Aff. Subhash Kumar v. State of Bihar, 1991 S.C.C. 598, rep. in http://www.commonlii.Org/in/cases/INSC/1991/3.html (dernière visite le 10 janvier 2008) ; Narmada Bachao Andolan, préc.
-
[45]
Aff. Essar Oil Ltd. v. Halar Utkarsh Samiti, [2004] 2 S.C.C. 392, disponible sur http://www.commonlii.org/in/cases/INSC/2004/31.html (dernière visite le 10 janvier 2007).
-
[46]
Aff. Vellore Citizens' Welfare Forum v. Union of India, [1996] 5 S.C.C. 647, rep in http://www.commonlii.org/in/cases/INSC/1996/1027.html (dernière visite le 10 janvier 2007).
-
[47]
Aff. Indian Council for Environ-Legal Action v. Union of India, [1996] 3 S.C.C. 212, rep. in http://www.commonlii.org/in/cases/INSC/1996/244.html (dernière visite le 10 janvier 2007).
-
[48]
Aff. Vellore Citizens' Welfare Forum, supra note # ; Mehta v. Union of India, [1997] 2 S.C.R. 353, rep. in http://www.commonlii.org/in/cases/INSC/1997/769.html (dernière visite le 10 janvier 200/).
-
[49]
V. la décision de la Cour suprême indienne dans l'affaire Karnataka Indus. Areas Dev. Bd. v. Kenchappa, A.I.R. 2006 S.C.W. 2546, dans sa totalité sur http://www.elaw.org/resources/printable.asp ?id=3133 (dernière visite le 4 avril 2007). V. également Narmada Bachao Andolan, préc.
-
[50]
Aff. Karnataka Indus. Areas, par. 54 : « Le Sommet de la terre qui s'est tenu à Rio de Janeiro en 1992 a changé les discours sur l'environnement de façon significative. La durabilité, concept introduit en 1987 dans le rapport Brundtland - intitulé "Notre Avenir à Tous" - et édicté dans les accords de Rio, est devenue le nouveau mot de code, accepté de tous, du développement. » (italique ajouté).
-
[51]
Aff. Vellore Citizens' Welfare Forum, préc. (référence au concept de développement durable). La Haute cour du Kerala a considéré que les autres principes faisaient partie du droit international coutumier, en se fondant sur le raisonnement de la Cour suprême indienne dans l'affaire Soman v. Geologist, [2004] 3 K.L.T. 577 par. 15, disponible sur http://www.elaw.org/resources/printable.asp ?id=2680 (dernière visite le 4 avril 2007).
-
[52]
Shehla Zia, préc., par. 9. Bien que les documents internationaux n'aient pas force de loi, toujours est-il qu'ils sont convaincants et commandent le respect. La Déclaration de Rio est le fruit d'une intense discussion entre les dirigeants des pays du monde, et c'est suite aux négociations entre pays développés et pays en développement qu'une déclaration quasi-consensuelle a pu naître. L'environnement est un problème international qui n'a pas de frontières, et crée donc des effets transfrontaliers. Dans ce domaine, chaque pays doit coopérer et contribuer aux efforts et c'est pourquoi la Déclaration de Rio servira de texte contraignant et instaurera la discipline parmi les pays lorsque des questions environnementales seront en jeu. Pour revenir au sujet présent, il serait approprié de mentionner que le principe no 15 prévoit des règles de précaution et de prudence.
-
[53]
Aff. Bulankulama v. Ministry of Indus. Dev., préc. (référence aux déclarations internationales comme étant des « instruments instaurant une norme internationale »).
-
[54]
Aff. Suray Prasad Sharma Dhungel v. Godavari Marble Indus., W.P. 35/1992 S. C. (1995) (Ass. Plén.), disponible sur http://www.elaw.org/resources/printable.asp ?id=2287 (dernière visite le 4 avril 2007) (référence au principe de développement durable).
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[55]
Aff. Farooque v. Gov't of Bangladesh, préc. (référence à la Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement, comme source d'inspiration).
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[56]
Voir B.N. Kirpal et al., Supreme But Not Infallible : Essays in Honour of the Supreme Court of India, p. 372 (2004). L'auteur suggère que, dans l'affaire Centre for Environment Law, WWF I v. Union of India (1999) 1 SCC 263, la Cour suprême indienne a ordonné la fermeture de tanneries, malgré le fait qu'elles fussent « une source majeure de gain de devises étrangères pour le pays, puisqu'elles dominaient le marché de l'export de la maroquinerie. »
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[57]
Concernant les changements introduits par les pays de destination depuis le début des années 1990, V. Jane McAdam, Complimentary Protection in International Refugee Law (2007) ; Liza Schuster, A Comparative Analysis of the Asylum Policy of Seven European Governments 13 J. Refugee Studies 118 (2000) ainsi que le numéro spécial du Vol. 13 du J. Refugee Studies dédié à la politique des pays européens ; Karin Oellers-Frahm & Andreas Zimmermann, France's and Germany's Constitutional Changes and Their Impact on Migration Law : Policy and Practice, 38 GERMAN Y.B. INT'L L. 249 (1995) ; James C. Hathaway, Harmonizing for Whom ? The Devaluation of Refugee Protection in the Era of European Economic Integration, 26 Cornell Int'l L.J. 719 (1993), Gerald L. Neuman, Buffer Zones Against Refugees : Dublin, Schengen, and the German Asylum Amendment, 33 Va. J. Int'l L. 503 (1993).
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[58]
Hugo Storey, The Advanced Refugee Law Workshop Experience : An IARLJ Perspective 15 Int'l J. Refugee Law 422 (2003) : « [L'un] des principaux objectifs de l'IARLJ est de développer une jurisprudence régulière et cohérente en matière de réfugiés. Dans l'idéal, le cas d'une personne qui demande à être un réfugié selon les termes de la convention de 1951 devrait être examiné de la même façon en Allemagne, aux États-Unis, au Japon ou en Afrique du Sud ». Dr Hugo Storey était à cette époque le vice-président de la Cour d'appel britannique aux affaires d'immigration et membre du conseil de l'IARLJ.
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[59]
Site Internet de l'IARLJ : http://www.iarlj.nl/ (dernière visite le 9 septembre 2007). Pour être membre de l'IARLJ, il faut être juge ou « acteur délivrant des décisions quasi-judiciaires ». En août 2007, l'IARLJ comptait 332 membres venant de 52 pays. Ses membres bénéficient d'une base de données en ligne contenant des décisions judiciaires en matière de droit des réfugiés de divers pays, reçoivent une lettre d'information réservée aux membres, et ont accès à un forum.
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[60]
Id, Article 2(2).
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[61]
La qualification du statut de réfugié a été particulièrement débattue. V. article 1A(2) de la Convention relative au statut des réfugiés, 189 U.N.T.S. 150 (1951) : « Aux fins de la présente Convention, le terme "réfugié" s'appliquera à toute personne : ... (2) ... craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ... »
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[62]
Cet effort est capté dans cette déclaration du juge Lord Carswell : « La persécution des minorités et la migration des personnes cherchant un refuge, à l'abri de toute persécution, ont malheureusement perduré, même après la Seconde Guerre mondiale. [...] La Convention de Genève de 1951 a permis de contrebalancer les préoccupations propres des États en réaffirmant leurs obligations internationales : les États ont ratifié cette convention il y a 50 ans, lorsque les problèmes de l'époque étaient inévitablement différents de ceux d'aujourd'hui. Les rédacteurs d'alors ont réussi à formuler un texte, un cadre adaptable, valable même à l'époque actuelle, et il faut rendre hommage à la sagesse et à l'humanité de ceux qui ont dû interpréter les termes de la convention et les appliquer aux multiples cas individuels ». Aff. Januzi (FC) et al v. Secretary of State for the Home Department [2006] UKHL 5, par. 62.
-
[63]
Aff. Canada (Attorney General) v. Ward, [1993] 2 S.C.R. 689.
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[64]
Aff. Acosta, 19 I. & N. 211 (Conseil de l'immigration américain, 1985). Il est à noter que la décision prend en compte « diverses interprétations internationales » du terme « réfugié » présent dans la convention, en expliquant qu'« étant donné que le Congrès a prévu, dans sa loi d'application de la convention, une définition du terme "réfugié", conformément aux exigences de ladite convention, il convient que nous considérions différentes interprétations internationales de cet accord. Cependant, celles-ci ne sont pas contraignantes pour notre propre interprétation des éléments créés par la loi d'application, car la question de savoir qui doit être considéré comme un réfugié est laissée au final [...] à tout État où se trouve un réfugié. [...] Si nous ne considérons pas le manuel du Haut Commissariat des Nations unies aux réfugiés comme étant le texte absolu, nous estimons toutefois qu'il est un outil très utile dans la mesure où il nous donne une interprétation de la convention qui est internationalement reconnue. » (p. 23-25 de la décision).
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[65]
Aff. A v. Minister for Immigration and Ethnic Affairs (1997) 2 BHRC 143. D'autres décisions australiennes citent des jugements étrangers, tels que : Al-Kateb v Godwin [2004] HCA 37, Minister for Immigration and Multicultural Affairs v Khawar (2002) 210 CLR 1 : 187 ALR 574 ; 67 ALD 577[2002] HCA 14, Applicant S v Minister for Immigration and Multicultural Affairs (2004) 217 CLR 387 : 206 ALR 242 : 77 ALD 541 [2004] HCA 25 pour la Haute cour, ainsi que Minister for Immigration & Multicultural Aff. v. Applicant Z., 116 F.C.R. 36 (2001), 2002 WL 3645 (FCA), [2001] FCA 1823, Applicant S v Minister for Immigration & Multicultural Affairs [2001] FCA 1411 pour la Cour fédérale.
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[66]
Aff. GJ [1998] INLR 387.
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[67]
Aff. Islam (A.P.) v. Secretary of State for the Home Department ; Regina v. Immigration Appeal Tribunal and Another Ex Parte Shah, [1999] 2 AC 629, 643 [1999] disponible sur http://www.publications.parliament.uk/pa/ld199899/ldjudgmt/jd990325/islam01.htm (dernière visite le 4 mai 2007) (Chambre des Lords, 1999).
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[68]
Aff. Shah & Islam, id., id.
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[69]
Aff. Sanchez-Trujillo, 801 F.2d par. 1576 (1986).
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[70]
Aff. Hernandez-Montiel v. Immigration and Naturalization Service, 225 F.3D 1084, par 1093 (2000).
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[71]
Par exemple, dans l'affaire Januzi, la Chambre des Lords préfère les approches anglaise et canadienne à celles de quelques cours néo-zélandaises et australiennes.
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[72]
La décision de la Cour suprême des États-Unis dans l'affaire Sale v. Haitian Ctrs. Council, Inc., 509 U.S. 155, 183 (1993), est un exemple d'interprétation étroite, fondée sur l'interprétation textuelle et stricte de la convention de 1951, à la lumière de ses travaux préparatoires (concluant que l'obligation de non-refoulement ne s'appliquait pas aux individus situés hors de la compétence territoriale de l'État). Pour les critiques à cette interprétation, voir Harold Hongju Koh, The "Haiti Paradigm" in United States Human Rights Policy 103 Yale L.J. 2391 (1994). Toutefois, cette interprétation a été approuvée par la Chambre des Lords dans l'affaire R. v. Immigration Officer at Prague Airport and another ex p. European Roma Rights Centre and others [2004] UKHL 55, par. 17, et par la Haute cour australienne (voir Khawar, supra note #, par 42). Le juge Lord Bingham of Cornhill a ajouté que « la Chambre des Lords n'était renvoyée vers aucune autorité judiciaire aux effets contraires » (id., id.).
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[73]
Aff. R v Secretary of State for the Home Department, ex parte Adan & Aitseguer, préc. id. (Lord Hobhouse of Woodborough) : « Le plan de la Convention de Genève est que toute différence de ce genre doit être référée à la Cour internationale de justice, comme le prévoit l'art. 38 de ladite convention. Cependant, il n'y a aucune chance pour que la différence ici en question (et qui existe depuis plusieurs années maintenant) soit résolue de cette façon. Aussi longtemps que ces différences continueront à exister, l'objectif de la Convention de Genève de parvenir à une approche uniforme du problème des réfugiés ne sera pas atteint et le système de réponse internationale au problème sera faussé ».
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[74]
« Par conséquent, il ne peut y avoir, en principe, qu'une seule vraie interprétation d'un traité. S'il existe un désaccord sur le sens de la Convention de Genève, il peut être résolu par la Cour internationale de justice (art. 38 de la Convention de Genève). Cependant, la CIJ n'a jamais reçu une telle demande. La perspective de recours auprès de la CIJ est éloignée. En pratique, ces recours sont laissés aux juridictions nationales, qui se retrouvent face à un désaccord matériel sur une question d'interprétation. Lorsque ces juridictions nationales doivent résoudre ce type de problème, elles doivent rechercher la signification vraie, internationale et autonome du traité, en se détachant des notions de culture juridique de leur pays. Et il ne peut y avoir qu'une seule vraie signification. » Aff. Adan, préc. p. 617.
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[75]
V. Oellers-Frahm et Zimmermann, supra note #, pp 260-263 (indiquant qu'en France l'amendement à la Constitution était destiné à contourner les conclusions d'une précédente décision du Conseil constitutionnel).
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[76]
Concernant les différences d'interprétation, voir Catherine Phuong, Persecution by Non-state Agents : Comparative Judicial Interpretations of the 1951 Refugee Convention 4 European Journal of Migration and Law 521 (2003). La directive européenne de 2004, appelée « Directive Qualification », a solutionné ces différences en reconnaissant que les acteurs non étatiques pouvaient être de potentiels persécuteurs. Voir Guy S. Goodwin-Gill and Jane McAdam, The Refugee in International Law 98-100 (3rd Ed., 2007). Concernant le « long combat » allemand sur la législation qui adopterait, entre autres, cette interprétation, V. Marion Schmid-Drüner, Germany's New Immigration Law : A Paradigm Shift ? 8 European Journal of Migration and Law191 (2006).
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[77]
Aff. Adan préc., p. 600.
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[78]
Aff. Adan préc. Plus récemment, la cour fédérale canadienne a adopté l'approche de la Chambre des Lords en refusant d'autoriser le retour d'un demandeur d'asile colombien aux États-Unis : aff. Canadian Council for Refugees v. The Queen (2007), 2007 FC 1262, disponible sur http://www.canlii.org/en/ca/fct/doc/2007/2007fc1262/2007fc1262.pdf (dernière visite le 10 janvier 2008).
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[79]
Aff. Dr Mohiuddin Farooque vs Bangladesh, represented by the Secretary Ministry of Government of the People's Republic of Bangladesh, Bangladesh Secretariat and others reported in 48 DLR 438, Vincent vs Union of India reported in AIR 1987 (SC) 990 (voir les références dans la décision de la Cour suprême du Bangladesh, ci-dessous).
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[80]
V. la décision de la Cour suprême du Bangladesh dans l'affaire Prof Nurul Islam and ors v Bangladesh and ors, Writ petition, 52 DLR (2000) 413 ; ILDC 477 (BD 2000), qui se réfère aux décisions similaires de la cour indienne dans l'affaire Bamakrishna v State of Kerala and ors, 1992 (2) KLT 725 (Haute cour du Kerala) et du Pakistan dans Pakistan Chest Foundation and ors v Pakistan and ors, 1997 CLC 1379. La décision du Bangladesh a été prise dans le contexte d'une campagne publicitaire programmée par des fabricants de tabac étrangers. Le requérant arguait que « les fabricants de tabac internationaux n'avaient pas réussi à développer un marché dans les pays développés car ces derniers sont conscients des effets néfastes du tabac sur la santé, et se sont donc redirigés vers les citoyens illettrés et ignorants des pays en voie de développement, en Asie et en Afrique, et afin de stimuler leurs affaires plus encore, ils ont ciblé les citoyens illettrés et ignorants des pays sous-développés. » (par. 6).
-
[81]
Aff. Novartis v. India, décision du 6 août 2007. Disponible sur http://judis.nic.in/chennai/qrydisp.asp ?tfnm=11121 (dernière visite le 17 septembre 200/).
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[82]
« Nous avons gardé en tête le but que la loi d'amendement voulait atteindre, et qui est [...] de garantir aux citoyens de ce pays l'accès aux médicaments vitaux et de déléguer les obligations constitutionnelles des [législateurs] de fournir des soins de qualité à leurs citoyens » (id. par. 19).
-
[83]
L'affaire a été abandonnée en 2001, après que la cour a autorisé les ONG à. présenter des affidavits (Aff. no 4138/98, Haute cour d'Afrique du Sud). Sur cette affaire, V. David Barnard In the High Court of South Africa, Case No. 4138/98 : The Global Politics of Access to Low-Cost AIDS Drugs in Poor Countries 12 Kennedy Institute of Ethics Journal 159 (2002).
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[84]
Il est important de noter qu'il est actuellement impossible de trouver quelque trace de la coopération inter-judiciaire dans le domaine du droit du travail. Si les juridictions nationales citent des normes internationales, et notamment les conventions de l'Organisation internationale du travail, elles ne se réfèrent pas les unes aux autres. Pour accéder à un recueil de décisions nationales citant le droit du travail international, V. Use of International Law by Domestic Courts, disponible sur http://training.itcilo.it/ils/CD_Use_Int_Law_web/Additional/English/default.htm (dernière visite le 31 décembre 2007).
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[85]
V. respectivement la loi intitulée 1994 Uruguay Round Agreement Act, 19 USCS § 3511, Pub. L. N°. 104-305 (1996), § 102(c), et la décision 94/800 du Conseil du 22 décembre 1994, JO 1994, L336/1.
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[86]
Au Japon : Yuji Iwasawa, Implementation of International Trade Agreements in Japan, in Hilf & Petersmann, National Constitutions And International Economic Law 130, 343 (Kluwer éd., 1993) (les juridictions japonaises refusent que les demandes soient fondées sur les décisions et règles du GATT ou de l'OMC) : en Europe : Nico Krisch, The Pluralism of Global Administrative Law, 17 Eur J Int Law 247, 259 (2006) (les juridictions européennes ont nié les effets des règles de l'OMC, arguant que, dans le cas contraire, les négociations menées par les organes politiques de l'Union européenne en matière de litiges commerciaux seraient gravement restreintes).
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[87]
Protocole d'accession de la Chine, Chien-Huei Wu (2008), How Does TRIPS Transform Chinese Administrative Law ? Global Jurist : Vol. 8 : Iss. 1 (Topics), Article 6. Disponible sur http:// www.bepress.com/gj/vol8/iss1/art6 : Tamir Moustafa, Law Versus the State : The Judicialisation of Politics in Egypt (2003) 28 (4) Law and Social Inquiry 883, 895-896.
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[88]
Décision de la Chambre des Lords dans l'affaire Pinochet, préc.
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[89]
À cet égard, les juridictions américaines se démarquent encore : dans la mesure où elles ne s'inquiètent pas particulièrement de protéger leurs processus nationaux de l'influence extérieure (et les textes les accompagnant), elles sont peu perturbées par les effets potentiellement néfastes que peuvent avoir leurs décisions rendues contre des individus étrangers qui enfreignent le droit international : voir l'affaire Sosa v. Alvarez-Machain, 124 S. Ct. 2739 (2004).
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[90]
Comparer la décision de l'affaire Pinochet, préc. (aucune immunité pour les anciens chefs d'État accusés d'actes de torture) avec celles de l'affaire Jones, préc. (immunité pour les représentants, en poste, d'un État étranger (Arabie Saoudite) accusés d'actes de torture) et de l'affaire Kadhafi, comme l'analyse Salvatore Zappalà, Do Heads of State in Office Enjoy Immunity from Jurisdiction for International Crimes ? The Ghaddafi Case Before the French Gourde Cassation, 12 Europ. J. Int'l L. 595 (2002) (la Cour de cassation française s'est appuyée sur le droit coutumier afin de suggérer, de façon vague, que le colonel Kadhafi jouissait d'une immunité, mais sans expliquer de quelle immunité il s'agissait, ni si cette immunité expirerait à la fin de son mandat).
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[91]
Eyal Benvenisti & George W. Downs, The Empire's New Clothes : Political Economy and the Fragmentation of International Law, 60 Stan. L. Rev. 595 (2007), pp. 623-624.
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[92]
Concernant cette affirmation, voir Eyal Benvenisti and George Downs, Court Cooperation, Executive Accountability and Global Governance NYU J Int'l L & Pol. (2009).
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[93]
La possibilité que les juridictions nationales examinent les résolutions du Chapitre VII du Conseil de sécurité est évoquée par Erika de Wet & André Nollkaemper, Review of Security Council Decisions by National Courts, 45 German Ybk. Int'l L. 166 (2002). Les auteurs analysent trois décisions rendues par trois juridictions différentes - la Cour de district des Pays-Bas (aff. Milosevic v. The Netherlands, trans. in 48 Netherlands Int'l L. Rev. 357 (2001)), la Cour suprême fédérale de Suisse (aff. Rukundo, applications nos. 1A.129/2001, 1A.130/2001/viz (2001), disponible sur http://www.bger.ch/index/juridiction/jurisdiction-inherit-template/jurisdiction-recht/jurisdiction-recht-urteile2000.htm (dernière visite le 19 mai 2007), et la Cour d'appel du cinquième circuit des États-Unis (affaire Ntakirutimana v. Reno, 184 F.3d 419 (1999). Ces trois décisions montrent les différents points de vue qui existent concernant le pouvoir des cours d'évaluer ce type de lois, mais aucune de ces juridictions n'était particulièrement encline à remettre en question la légalité desdites lois : la cour américaine a estimé que ce problème dépassait la portée de l'habeas, alors que les cours hollandaise et suisse ont montré une certaine déférence envers les résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU. La Cour d'appel britannique a fait preuve de la même déférence dans l'affaire R (on the application of Al-Jedda) v. Secretary of State for Defence, [2006] EWCA Civ 327, par. 71 (disponible sur http://alpha.bailii.org/ew/cases/EWCA/Civ/2006/327.rtf (dernière visite le 18 septembre 2007), tout comme la Cour suprême suisse dans l'affaire Nada v. SECO (décision du 14 novembre 2007, pas encore publiée officiellement), disponible sur http://jcb.blogs.com/jcb_blog/files/tf_youssef_nada.pdf (dernière visite le 10 janvier 2008). Cependant, voir également la décision de la Chambre des Lords dans l'affaire Jedda.
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[94]
V. la Directive 2004/83/EC du Conseil du 29 avril 2004 concernant les normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié ou les personnes qui, pour d'autres raisons, ont besoin d'une protection internationale, et relatives au contenu de ces statuts, 2001 JO (L 304) 12 ; et la Directive 2001/55 du Conseil du 20 juillet 2001 relative à des normes minimales pour l'octroi d'une protection temporaire en cas d'afflux massif de personnes déplacées et à des mesures tendant à assurer un équilibre entre les efforts consentis par les États membres pour accueillir ces personnes et supporter les conséquences de cet accueil, 2001 JO (L 212) 12, disponible sur http://www.ecre.org/eu_developments/temporary %20protection/tpdir.pdf (dernière visite le 18 mai 2007) : S. Reynolds, European Council Directive 2001/55/EC : Toward a Common European Asylum System, 8 Colum. J. Eur. L. 359 (2002). Pour une tendance similaire mais plus ancienne, voir James C. Hathaway, Harmonizing for Whom ? The Devaluation of Refugee Protection in the Era of European Economic Integration, 26 Cornell Int'l L.J. 719 (1993).