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Article de revue

Curricula cachés et biais perceptifs en EPS

Pages 193 à 210

Notes

  • [1]
    Les compétences culturelles ont été renommées compétences propres dans les textes officiels postérieurs au recueil de données.

1 Malgré leur meilleure réussite scolaire, les filles réussissent moins bien que les garçons en Éducation Physique et Sportive (EPS). Cet article tente d’expliquer, en partie, pourquoi cette moindre réussite perdure, à partir de deux questions : En quoi les contenus du curriculum caché de l’EPS appréhendés à partir des appréciations portées sur les bulletins scolaires sont-ils révélateurs de cette réussite différentielle ?

2 Quels sont les effets du sexe des élèves sur le jugement professoral ?

3 Nous étudions le curriculum caché de l’EPS dans un lycée d’enseignement général, en faisant appel à la sociologie du curriculum. Cette approche interroge les savoirs scolaires en les considérant comme des constructions sociales conformes aux intérêts et attentes de certains groupes sociaux, détenteurs du pouvoir (Forquin, 1989). Comme dans les autres disciplines, la question de la légitimité des choix curriculaires effectués en EPS mérite d’être posée. Depuis une dizaine d’années, plusieurs travaux s’y sont intéressés. D’autres recherches, externes à la sociologie des curricula, ont souligné la proximité entre la culture de l’EPS et une culture plutôt masculine. Cette proximité aurait pour conséquence la transmission d’un curriculum caché masculiniste en EPS.

4 L’analyse des appréciations portées sur les bulletins scolaires offre un filtre de lecture original des curricula transmis en EPS. En effet, le bulletin n’est pas un simple instrument d’évaluation du curriculum réel, il évalue également la distance de chaque élève aux exigences du curriculum caché (Sarrazy, 2000). L’analyse menée permet de dévoiler en partie le curriculum caché de l’EPS, puis de répondre à notre seconde question relative aux effets du sexe des élèves sur le jugement professoral. Ce dernier, selon Bourdieu et De Saint-Martin (1975), se fonde sur des catégories de l’entendement professoral, systèmes de classement (taxinomie) qui organisent implicitement la perception d’un élève (e.g. par l’opposition brillant/terne), tout en structurant la pratique des enseignants. Ces jugements ont pour effet de faire intérioriser, bien plus que de simples compétences scolaires, un habitus scolaire fortement différencié selon l’origine sociale, mais également sans doute selon le sexe de l’élève. Bourdieu (1998) souligne que l’opposition masculin/féminin se construit à partir de taxinomies binaires (haut/bas, force/douceur, dur/mou). L’EPS étant une discipline marquée fortement par une culture sportive « virile », il se peut que les deux types de taxinomies se chevauchent et favorisent la moindre réussite des filles, celles-ci n’étant pas appréciées comme correspondant au bon élève en EPS. Les mécanismes du jugement professoral pourraient fonctionner à l’insu des enseignants. Ils leur seraient inaccessibles, soit par méconnaissance complète, soit par refus de vérifier leurs soupçons, embarrassés par ce qu’ils entrevoient (Perrenoud, 1995). L’analyse des manifestations « physiques » du jugement professoral (notes et appréciations), en dévoilant les représentations des enseignants, permet d’appréhender les messages cachés qu’ils envoient et par conséquent de mettre au jour cette part du curriculum qui échappe à la conscience des acteurs. Ainsi, nous nous intéressons à cette part de l’habitus professionnel qui permet de comprendre comment, sous l’impulsion du « sens pratique », « des conduites peuvent être orientées par rapport à des fins sans être consciemment dirigées vers et par ces fins » (Bourdieu, 1987, p. 20). Les pratiques, ici les choix et discours curriculaires, présentent une cohérence que le chercheur tente de construire au-delà du seul discours des acteurs.

5 À notre connaissance, aucune étude n’a encore été menée à partir des appréciations portées par les enseignants d’EPS sur les bulletins. Ce type de discours a été peu exploré. Bien qu’inscrit dans un cadre institutionnel précis et relativement contraint, il permet à l’enseignant de se livrer à une interprétation de la réalité scolaire qui engage son système de normes et de valeurs qu’il conviendra de mettre en lien avec le sexe des élèves.

6 Après avoir présenté les différentes recherches constituant le cadre de notre réflexion, celles centrées sur le curriculum caché de l’EPS ainsi que celles sur le jugement professoral, nous présenterons le dispositif méthodologique utilisé. Nous nous attacherons à montrer en quoi les contenus du curriculum caché (appréciations portées sur les bulletins scolaires) et réel (APSA enseignées) contribuent à mettre en difficulté « les » filles en EPS.

LE CURRICULUM CACHÉ

7 Le curriculum caché correspond à ce que les élèves apprennent implicitement à l’école sans que ce ne soit prévu par les curricula formel ou réel. Selon Perrenoud (1993), il renvoie à une partie des expériences formatrices vécues par un individu, en étant productrices d’apprentissages qui échappent à la conscience des principaux intéressés. D’après Terret et al. (2006), l’EPS transmet un curriculum caché masculiniste : le choix des APSA serait conforme aux goûts et ressources des garçons, favorisant leurs prises d’initiatives et acceptant leurs débordements ; les filles auraient le choix entre s’intégrer dans cet univers masculin ou être mises à l’écart. Selon Le Doeuff (1989, citée par Mosconi, 1995), le masculinisme est le fait de n’envisager que l’histoire ou la vie sociale des hommes et de doubler cette limitation d’une affirmation implicite ; il n’y a qu’eux et leurs points de vue qui comptent.

8 Par ailleurs, un curriculum caché découle du traitement inégal des élèves selon leur sexe (Mosconi, 1995). Bonniot et al. (2009) montrent que les enseignants utilisent des discours stéréotypés pour expliquer un même comportement. Les garçons sont décrits comme agités, les filles comme passives, alors qu’autant de comportements passifs émanant des garçons et des filles sont observés. Cette étude montre aussi une fréquence plus forte des comportements hors tâche de la part des garçons et des interventions professorales plus rapides lorsque les auteurs de comportements hors tâche ou passifs sont des garçons. Bienaimé-Patinet (2009) parle de « loi des garçons » pour relater la centration des enseignants d’EPS sur une activité visant à contrôler/intéresser les garçons. Elle rapporte l’exemple suivant : lors d’une leçon d’EPS, un enseignant a séparé filles et garçons, chaque groupe sexué sur un terrain. L’enseignant s’est placé de façon à voir les garçons, tout en tournant le dos aux filles. Ceci produit un curriculum caché : les filles sont moins intéressantes que les garçons. Moreno (2006) souligne également la loi des garçons qui s’impose dans une EPS mixte : les enseignants construiraient leurs cycles, leurs leçons et modifieraient ces dernières en fonction des garçons, par le choix d’activités et de modes de pratiques valorisant l’opposition et la compétition. En outre, Lentillon et Cogérino (2005) montrent qu’en EPS les garçons monopolisent davantage l’attention des enseignants par la création d’incidents. Bien que désavantagées par l’attention reçue, les filles sont aussi satisfaites que les garçons du soutien professoral ; elles auraient tellement intériorisé leur infériorité en EPS qu’elles finiraient par croire que leur situation désavantageuse est juste. D’après Eggleston (1977, cité par Perrenoud, 1995), le curriculum réel est le produit d’une négociation/confrontation maître-élèves. Les études mentionnées plus haut semblent indiquer qu’en EPS, les garçons occupent le rôle de négociateurs dans la construction du curriculum réel, ce qui engendre un curriculum caché, « des apprentissages méconnus, étrangers à ceux que l’école sait et déclare favoriser » (Perrenoud, 1995, p. 243). En effet, alors que l’école (et l’EPS) déclarent favoriser l’égalité des sexes, la centration de l’EPS sur des APSA et modes de pratique plus en phase avec les goûts d’une majorité de garçons, puis un traitement inégal des élèves selon leur sexe, favorisent l’apprentissage (et l’intériorisation) de l’inégalité des sexes.

9 Par ailleurs, les curricula cachés masculinistes de l’école et de l’EPS pourraient provenir d’un masculin-neutre qui serait la norme au sein de l’institution scolaire (Mosconi, 1994). La connivence entre culture de l’EPS et culture sportive compétitive, par la prédominance d’APS « masculines », participe à l’existence de ce masculin-neutre en EPS. En effet, même si athlétisme, natation, volleyball, badminton apparaissent comme des APS neutres aujourd’hui, les deux premières ont été forgées par et pour les hommes. De plus, comme le souligne Cleuziou (2000), les modalités de pratique de ces APS consistent à battre l’adversaire, soit par une confrontation directe (un duel), soit par une confrontation indirecte (le chrono), i.e. des modalités de pratique plus proches de la culture masculine. L’auteur note l’absence d’ouverture dans la programmation des APSA enseignées, celle-ci étant centrée sur un noyau dur très réduit, constitué d’APSA « masculines ». Pour Combaz et Hoibian (2008), ce qui est proposé en EPS est en adéquation avec les goûts des garçons, mais très éloigné des aspirations des filles.

10 Si les valeurs du masculin dominent en EPS, la différence des sexes n’y est pas complètement déniée ; il existe des barèmes différenciés. Pourtant, selon Williamson (1996), loin de favoriser la lutte contre les inégalités, ces barèmes différenciés exerceraient une pression sociale sur les élèves ; les garçons doivent répondre aux attentes en surpassant les filles, alors que ces dernières sont censées ne pas atteindre le niveau des garçons. Ces barèmes différenciés participent donc à la transmission d’un curriculum caché.

11 Ces différentes recherches montrent que les curricula de l’EPS sont plus proches de la culture masculine. Par ailleurs, le masculin-neutre en EPS produit un curriculum caché qui désavantage les filles. Plus éloignées de la culture transmise en EPS, elles ont de plus fortes chances de subir un jugement professoral plus sévère.

LE JUGEMENT PROFESSORAL

12 Selon Bressoux et Pansu (2003), le jugement scolaire/professoral peut prendre deux formes :

13

  • informelle (remarques, louanges, sourires),
  • formelle (notes, appréciations sur bulletin, décision d’orientation).

14 Les auteurs notent la nécessité de questionner ce jugement, car comme tout jugement social, il obéit à une psychologie quotidienne ; or, les individus sont limités dans leur capacité à traiter l’information, sujets à de multiples stéréotypes.

15 Nous questionnerons ce jugement via les appréciations et notes portées sur les bulletins scolaires.

LE BULLETIN

16 La mise en forme et le contenu des bulletins scolaires dans le secondaire sont cadrés par la circulaire n° 99-104 du 28 juin 1999. Ce texte vise à mieux inscrire les bulletins trimestriels « dans une démarche pédagogique et éducative » ; « encourager l’élève à progresser plutôt que de l’enfermer dans une évaluation-sanction ». Il recommande de valoriser les efforts et d’évaluer des compétences non liées directement aux performances scolaires, e.g. le sens de l’initiative, l’autonomie, la prise de responsabilités, le travail fourni. De plus, il préconise d’encourager les élèves à progresser, de souligner leurs points forts et de leur donner des conseils précis sur les moyens de s’améliorer. Enfin, les appréciations doivent « être respectueuses de la personne de l’élève » et « il est demandé de bannir tout vocabulaire trop vague (« peut mieux faire », « moyen »), réducteur (« faible », « insuffisant »), voire humiliant (« inexistant », « nul », « terne ») qui n’aide aucunement l’élève ».

17 Vu le contenu des appréciations dans notre échantillon, cette circulaire n’apparaît pas appliquée par tous les enseignants. En effet, bien que les élèves soient encouragés à progresser, les moyens pour progresser ne sont que rarement précisés. Par ailleurs, si le travail et les efforts fournis sont souvent mentionnés, les « peut mieux faire », « moyen », « faible »« insuffisant », voire « terne » n’ont nullement été bannis.

18 D’après Sarrazy (2000), le bulletin scolaire a une fonction externe/sociale et une fonction interne/pédagogique. La seconde s’adresse plutôt aux élèves et renvoie à la gestion de classe, au maintien d’un climat de travail. La première renvoie à un message aux parents, aux collègues, aux personnes extérieures. Ainsi, les bulletins, élément principal des dossiers scolaires, constituent une pièce maîtresse pour l’orientation. Dans le lycée étudié, ils sont très importants, vu les ambitions des élèves (« prépas », IUT, BTS). D’après Darmon (2012), les contenus des bulletins relèvent d’une langue d’initiés qui permet aux enseignants de se parler par dossier interposé. Elle montre qu’au cours des commissions de recrutement des classes préparatoires, les enseignants « recruteurs » montrent leur capacité à « décoder » les appréciations de leurs collègues de lycée, par une évaluation de second degré des jugements scolaires présents dans le dossier. Ce décryptage est facilité par des catégories de l’entendement professoral communes. Bourdieu et de Saint Martin (1975) définissent ces catégories comme des schèmes de perception, d’appréciation et d’action acquis par la pratique et structurant la pratique ; le jugement professoral s’appuie « sur tout un ensemble de critères diffus, jamais explicités » (p. 73).

19 Ainsi, le sérieux, apparemment vertu scolaire, peut devenir handicapant pour un recrutement en classe préparatoire, surtout pour les élèves moyens, soit la majorité des lycéens. Darmon (2012) montre que des appréciations du type « se donne beaucoup de peine », « sérieuse et appliquée », « beaucoup de sérieux, des difficultés surmontées grâce aux efforts entrepris » sont interprétées comme « pas très gentilles ». L’élève « sérieux » est déprécié par les recruteurs, assimilé au laborieux, ayant besoin de travailler énormément pour réussir. Les recruteurs pronostiquent qu’étant déjà « au taquet » au lycée, il n’a pas les capacités pour suivre le rythme et réussir en classe préparatoire. Darmon souligne également que les laborieux et les trop sérieux sont souvent des filles ; les catégories de l’entendement professoral sont fortement sexuées. Elle parie qu’à résultats égaux, par rapport à un garçon non « sérieux », une fille « sérieuse » sera pénalisée pour intégrer une « prépa ».

STÉRÉOTYPE, BIAIS PERCEPTIF ET PROPHÉTIE AUTORÉALISATRICE

20 Le jugement professoral est susceptible d’être parasité par des biais de perceptions, dus à l’origine sociale ou au sexe des élèves. Morin-Messabel et Ferrière (2012) montrent chez les futurs professeurs des écoles, l’existence d’un stéréotype : les filles sont inférieures en mathématiques. Les sujets étudiés devaient analyser l’évaluation d’un élève de CM2 à partir d’un même dossier indiquant un bon niveau malgré des difficultés en mathématiques. Le nom associé au dossier était Sarah ou Adam. Les résultats montrent que les lacunes en mathématiques sont plus problématiques pour une fille. Les difficultés de « Sarah » seraient plutôt cognitives, alors que celles d’« Adam » seraient passagères, les enseignants soulignant plutôt sa réussite générale.

21 Cependant, selon Bressoux et Pansu (2003), en classe, l’enseignant dispose d’informations riches et objectives sur les élèves, ce qui réduit les biais de perception. Néanmoins, ils ont montré qu’une fois le niveau « réel » contrôlé, les enseignants perçoivent une meilleure réussite des garçons en mathématiques là où elle n’existe pas. D’après ces auteurs, le fait que les attentes des professeurs prédisent fortement les résultats des élèves peut s’expliquer par trois raisons :

22

  • les effets des prophéties autoréalisatrices,
  • les effets des biais perceptifs ; le jugement des enseignants n’influence pas le comportement des élèves, mais la confirmation du jugement existe dans la tête de l’enseignant (notes et appréciations) ;
  • l’exactitude du jugement (qui prédit le résultat final sans l’avoir influencé).

23 D’après Chalabaev (2006), les stéréotypes de sexe peuvent influencer la réussite des élèves en EPS, par les biais perceptifs et les prophéties autoréalisatrices produits par les professeurs, par le poids des stéréotypes sur les élèves.

24 Comme le souligne Perrenoud (1995), les individus sont confrontés à une succession d’expériences formatrices, à l’école ou en dehors. Il rappelle les travaux de Hall sur la distance sociale. La distance entre deux interlocuteurs lors d’une conversation varie d’une société à l’autre. Les individus sont capables de respecter cette distance culturelle, sans être conscients qu’ils respectent un standard, celui-ci n’étant jamais énoncé. Perrenoud en conclut que dès l’enfance, nous sommes confrontés à des expériences (formant notre curriculum) qui nous conduisent à notre insu à trouver la bonne distance lors d’une conversation. Le chercheur rappelle cependant que les apprentissages varient entre deux pôles, l’apprentissage spontané-inconscient et l’action éducative intentionnelle. L’apprentissage des manières de se comporter en société, suivant son statut ou sexe et celui de son interlocuteur, se fonde à la fois sur une action éducative intentionnelle (être poli, rester sage) et sur des apprentissages inconscients tels ceux liés à la construction sexuée (soit jolie, soit fort).

25 L’apprentissage des stéréotypes de sexe fait plutôt partie des apprentissages inconscients. La différence des sexes possède un tel ancrage culturel qu’elle n’a nullement besoin d’être pensée. Ces stéréotypes de sexe, issus d’apprentissages plus ou moins implicites et étalés dans le temps, viennent biaiser la perception des individus, enseignants et élèves. En nous appuyant principalement sur la sociologie du curriculum, nous tenterons de comprendre pourquoi les filles réussissent moins bien en EPS, en articulant curricula de l’EPS et jugement professoral. Nous pensons que les stéréotypes de sexe vont favoriser la transmission d’un curriculum caché peu favorable à la réussite des filles en EPS.

CURRICULUM CACHÉ AU TRAVERS DU JUGEMENT PROFESSORAL

26 Pour appréhender le curriculum caché, nous étudions les bulletins scolaires. Selon Sarrazy (2000), ces derniers évaluent la distance qui sépare les élèves des exigences du curriculum caché, plutôt que celle qui les sépare des curricula formel et réel. Les enseignants attendent certaines valeurs et attitudes des élèves pour qu’ils puissent réussir leur scolarité, mais sans que celles-ci ne soient énoncées explicitement. Bourdieu et Saint-Martin (1975) soulignent que la taxinomie des enseignants « enferme une définition implicite de l’excellence scolaire qui, en constituant comme excellentes, les qualités détenues par ceux qui sont socialement dominants, consacre leur manière d’être et leur état » (p. 77). Pour les auteurs, le jugement professoral s’appuie sur une multitude de critères diffus, jamais énoncés clairement, ce qui conduit à un jugement biaisé par des attentes liées à l’origine sociale des élèves ; à travers le style, la culture générale, l’élocution, l’hexis corporelle. Le jugement professoral s’étend à toute la personne (qualités, valeur) et pas uniquement à ses performances scolaires. Selon Bressoux et Pansu (2003), dès l’école primaire, c’est l’enfant et pas seulement l’élève qui est touché par le jugement scolaire ; les caractéristiques des élèves (sexe, origine sociale) peuvent agir comme des marqueurs sociaux et activer des stéréotypes, entraînant des biais de perception affectant le jugement de l’enseignant, ce dernier influençant la perception de compétence scolaire des élèves.

27 L’analyse des appréciations et notes portées sur les bulletins permettra d’appréhender les stéréotypes de sexe et les biais perceptifs pouvant influencer le jugement professoral en EPS. Elle informera sur les qualités et caractéristiques personnelles que possèdent ou non bons et mauvais élèves, filles et garçons, sur la définition implicite de l’excellence en EPS. Nous supposons que cette discipline constitue comme excellentes les qualités détenues par une majorité de garçons et consacre des manières d’être plutôt masculines (affrontement, défi, compétition). Ainsi, les appréciations seraient porteuses d’un message implicite, un curriculum caché : les qualités « masculines » auraient plus de valeur, seraient plus utiles pour réussir en EPS. Par ailleurs, les bulletins font partie intégrante du curriculum réel, en tant qu’expérience plus ou moins heureuse, que vit chaque élève pendant son parcours scolaire. L’analyse des bulletins révélera la persistance ou non de stéréotypes de sexe au sein des représentations des enseignants d’EPS. Or, ces stéréotypes, véhiculés implicitement au travers des bulletins, poursuivraient leur propagation en étant intégrés inconsciemment par les élèves.

MÉTHODOLOGIE

28 Notre recueil de données a été réalisé dans un lycée d’enseignement général ayant un fort taux de réussite au bac (plus de 95 % entre 2007 et 2009) et un public plutôt favorisé (environ 40 % d’élèves ayant au moins un parent cadre pour moins de 10 % d’élèves ayant un parent ouvrier). Ce type d’établissement est particulièrement intéressant. En effet, Combaz (1992) ou Moreno (2006) ont montré que les différences de réussite en EPS au baccalauréat étaient réduites dans les filières les plus cotées et dans les milieux favorisés. Face à cette apparente « égalité », l’analyse des bulletins sous l’angle des curricula cachés permettra de dévoiler (en partie) les représentations et attentes professorales. En juin 2008, avec l’accord du proviseur, notes et appréciations portées par les enseignants d’EPS sur les bulletins ont été recueillies. Les appréciations ont été traitées selon une analyse thématique pour en dégager des « noyaux de sens » (Bardin, 1977), rangés dans 4 catégories (C1, C2, C3, C4) inspirées de celles de Sarrazy (2000).

29 C1 renvoie aux appréciations relatives aux résultats ou au travail de l’élève et se subdivise en 8 sous-catégories (excellent, très bon, bon, assez bon, moyen, insuffisant, évolution positive, évolution négative).

30 C2 renvoie aux appréciations relatives à une morale scolaire, aux comportements des élèves, positifs (sérieux, bonne volonté, efforts) ou négatifs (bavardage, manque d’implication).

31 C3 renvoie à des injonctions/conseils et se divise en 2 sous-catégories ; rupture (partielle ou totale) et continuité. Au sein de celle-ci, nous avons distingué les injonctions « persévérez », « poursuivez » et « continuez ». « Persévérez » transmet l’idée de labeur, d’obstination et sous-entend la nécessité de travailler plus que les autres pour réussir aussi bien qu’eux. Au contraire, « continuez dans cette voie » laisse penser que l’élève est déjà sur la bonne voie, celle de la réussite, sans évoquer la notion d’effort. « Poursuivez vos efforts » se situe entre ces deux injonctions. Elle suppose que l’élève n’est pas loin de la réussite, qu’il pourra l’atteindre grâce aux efforts qu’il a entrepris et qu’il perpétuera. Les « ruptures partielles » renvoient à une demande de modification partielle du comportement ou du travail des élèves. Les « ruptures totales » renvoient à une demande de changement radical. Vu leur rareté (21 et 19), ruptures totale et partielle ont été regroupées pour l’analyse.

32 C4 renvoie aux appréciations relatives au potentiel des élèves et se divise en 3 sous-catégories : potentiel mal exploité, potentiel pour réussir, progrès possibles.

33 Notons que certaines appréciations ne comportent qu’un commentaire (ou noyau de sens) correspondant à une seule catégorie, souvent à C1 (« Bon trimestre »), alors que d’autres peuvent renvoyer à plusieurs catégories (« Bon trimestre. Participation satisfaisante. Vous pouvez faire encore mieux au prochain trimestre »).

34 Les appréciations adressées aux 342 filles et 209 garçons de notre échantillon au cours des 3 trimestres ont été étudiées, soit 1 653 appréciations. Pour vérifier si le sexe des élèves influe sur ces appréciations, des tests de ?2 ont été réalisés. Nous parlerons de différences significatives au seuil de 5 % et de différences très significatives au seuil de 1 %. Ici, nous présenterons une analyse des catégories C2, C3 et C4, puis nous étudierons les appréciations reconnaissant l’excellence d’un élève en EPS.

RÉSULTATS ET DISCUSSION

DES COMPORTEMENTS PLUTÔT POSITIFS

35 Peu d’appréciations soulignent le comportement inapproprié d’un élève (cf. tableau 1). Lorsque c’est le cas, il s’agit surtout d’un manque d’investissement. À l’inverse, de nombreuses appréciations soulignent un comportement positif en EPS, des garçons comme des filles.

Tableau 1

appréciations relatives au comportement des élèves (C2) selon le sexe

garçons filles
A : Comportement positif 219 382
B : Comportement négatif 19 23
Ni A, ni B 389 621
figure im1

appréciations relatives au comportement des élèves (C2) selon le sexe

36 Le sexe des élèves n’a pas d’effet sur les appréciations relatives au comportement. Rares sont les appréciations relatant un comportement négatif en EPS, alors que de nombreuses appréciations pointent le comportement positif des élèves. Les enseignants d’EPS semblent globalement satisfaits de l’implication de leurs élèves. Néanmoins, les filles reçoivent plus d’injonctions à changer de comportement en s’impliquant davantage (cf. tableau 2).

RUPTURE ET CONTINUITÉ

Tableau 2

Injonctions (C3) selon le sexe

garçons filles
A : Persévérez 13 36
B : Poursuivez vos efforts 12 58
C : Continuez dans cette voie 50 67
D : Rupture 8 32
Ni A, ni B, ni C, ni D 544 833
figure im2

Injonctions (C3) selon le sexe

37 L’effet du sexe est ici très significatif, c’est-à-dire avec alpha = 1 % (?2 = 23,615). Les garçons sont sous-représentés parmi les élèves recevant des injonctions « rupture » (contribution au ?2 : 14,4 %) ou à poursuivre leurs efforts (contribution au ?2 : 33,8 %). L’inverse se produit pour les filles. Les enseignants d’EPS rappelleraient plus facilement à l’ordre les filles en cas de manque d’investissement, alors même qu’ils pointent ce manque autant chez les garçons que chez les filles (cf. tableau 1). Ce rappel à l’ordre, via une participation plus forte, indiquerait qu’il est nécessaire pour les filles de s’investir fortement en EPS pour y réussir. Leur sur-représentation parmi les élèves recevant une injonction à poursuivre leurs efforts semble également indiquer que ces efforts sont nécessaires pour que les filles réussissent.

38 L’analyse des injonctions montre que les appréciations des enseignants d’EPS transmettent un message implicite : pour réussir en EPS, les élèves qui ont besoin de fournir le plus d’effort, voire de besogner, de s’acharner sont plutôt des filles. Au contraire, les garçons (pour la plupart) réussiraient sans effort. Ont-ils un meilleur potentiel ?

POTENTIEL ET ATTENTES DÉÇUES

Tableau 3

appréciations mentionnant le potentiel (C4) selon le sexe

garçons filles
A : Potentiel mal exploité 22 28
B : Potentiel pour réussir 27 17
C : Progrès possibles 0 22
Ni A, ni B, ni C 578 959
figure im3

appréciations mentionnant le potentiel (C4) selon le sexe

39 L’effet du sexe est ici très significatif (?2 = 23,323). Les appréciations mentionnant des progrès possibles correspondent à des notes médiocres. Sorte d’encouragement à persévérer, elles s’adressent exclusivement à des filles ayant des notes faibles (« Des progrès sont possibles dans les activités pratiquées » ; note : 9,75).

40 Les enseignants d’EPS semblent attendre plus des garçons. Si ceux-ci sont absents parmi les élèves recevant une appréciation « progrès possibles », ils sont sur-représentés parmi les élèves recevant des appréciations mentionnant qu’ils ont le potentiel pour réussir (contribution au ?2 : 27,1 %), alors que les filles sont sous-représentées (contribution au ?2 : 16,6 %) dans cette catégorie. L’analyse des contributions au ?2 montre par ailleurs que la répartition des appréciations mentionnant un potentiel mal exploité n’est pas significativement influencée par le sexe des élèves. Ce type d’appréciations manifeste des attentes déçues vis-à-vis d’un élève qui n’aurait pas réalisé une performance à la hauteur de ses possibilités (« Assez bon trimestre seulement. On pouvait attendre mieux d’A ! »). Il semble donc que pour les enseignants, les garçons disposent d’un potentiel supérieur à celui des filles en EPS. Nous pouvons donc nous attendre à ce qu’ils soient plus aisément reconnus comme étant excellents.

L’EXCELLENCE

41 Il existe un lien très significatif entre le sexe des élèves reconnus comme excellents en EPS et la distribution des notes associées à cette excellence (?2 = 12,366).

Tableau 4

Notes associées aux appréciations « excellent » selon le sexe

notes garçons filles
[19 ; 20] 11 21
[18 ; 19[ 22 8
[17 ; 18[ 20 8
<17 10 8
figure im4

Notes associées aux appréciations « excellent » selon le sexe

42 Parmi les « excellents en EPS », les filles ayant obtenu une note supérieure à 19 sont sur-représentées (contribution au ?2 : 35,6 %), alors que les garçons ayant obtenu des notes similaires sont sous-représentés (contribution au ?2 : 27,6 %). Ceci indiquerait que les filles doivent démontrer plus que les garçons pour être reconnues comme excellentes en EPS. Notons qu’il existe des barèmes sexués dans les APSA comme l’athlétisme et la natation. Dans ces APSA « mesurables », les enseignants pourraient considérer que, les barèmes étant « favorables » aux filles, à note équivalente, elles sont moins talentueuses que les garçons.

43 Par ailleurs, être excellent ne renvoie pas à une même note selon l’APSA. Malgré une excellente performance, il semble plus difficile d’obtenir un 20 dans une APSA de duel que dans une APSA mesurable. Dans ce lycée, 29 cycles étaient consacrés à un sport collectif, 27 aux sports de raquettes, 28 à des activités athlétiques, 2 à la natation, 3 à la gymnastique et 3 à la danse. Malgré un nombre de cycles similaire, peu d’élèves sont reconnus comme excellents en sports de raquettes et en sports collectifs, au vu du nombre d’élèves « excellents » en athlétisme. Sur les 108 appréciations reconnaissant l’excellence d’un élève, 51 correspondent à l’évaluation d’une activité athlétique (29 s’adressant à une fille) et 11 correspondent à un duo d’APSA comportant une activité athlétique (3 s’adressant à une fille).

Tableau 5

Appréciations reconnaissant l’excellence d’un élève selon les APSA

APSA garçons filles
Athlétisme, natation, gymnastique 23 31
Sports de raquette 14 7
Sports collectifs 12 3
Groupements (2 APSA) 14 4
figure im5

Appréciations reconnaissant l’excellence d’un élève selon les APSA

44 Il existe un lien très significatif entre le sexe des élèves et la reconnaissance de leur excellence dans les différentes APSA (?2 = 11,802). Parmi les élèves reconnus pour leur excellence en EPS, les filles sont sous-représentées parmi les élèves reconnus pour leur excellence dans les sports collectifs (contribution au ?2 : 14,3 %) ou au 3e trimestre suite à l’évaluation de deux APSA (contribution au ?2 : 13,8 %). Elles sont sur-représentées (contribution au ?2 : 27,2 %) parmi les excellents dans les APSA dont les barèmes sont fixés concrètement (temps, distances, code de pointage). Au contraire, les garçons sont sous-représentés parmi les élèves reconnus pour leur excellence dans ces APSA dont les barèmes sont fixés concrètement (contribution au ?2 : 19,4 %) Les enseignants d’EPS associeraient l’excellence à des attitudes qu’ont plus de chances de posséder les garçons. Comme le souligne Bourdieu et Saint-Martin (1975), les catégories de l’entendement professoral enferment une définition implicite de l’excellence scolaire qui consacre les manières d’être de ceux qui sont socialement dominants, en constituant comme excellentes les qualités qu’ils détiennent. En EPS, les dominants sont les garçons, la définition implicite de l’excellence consacrerait des manières d’être socialement connotées « masculines ». Notons enfin la quasi-absence d’élèves reconnus pour leur excellence dans des APSA « féminines » (une seule fille en gymnastique, aucun élève en danse). Les filles n’ont pas su profiter des 6 cycles (sur 90) consacrés à une APSA « féminine » pour briller en EPS, malgré le sérieux dont elles semblent faire preuve.

DOUBLE DISCOURS

45 Une analyse thématique montre l’importance du sérieux, de la participation et de l’effort : 605 commentaires concernent ces thèmes. Ils auraient donc une importance essentielle aux yeux des enseignants d’EPS, surtout pour les filles. En effet, les garçons sont sous-représentés (contribution au ?2 : 39,3 %) parmi les élèves recevant une appréciation abordant le thème du sérieux, de la participation ou des efforts (cf. tableau 6). Au contraire, les filles sont sur-représentées parmi ces élèves (contribution au ?2 : 24 %).

Tableau 6

Appréciations « effort, participation, sérieux » selon le sexe

garçons filles
A : Effort(s), participation, sérieux 198 407
Non A 429 619
figure im6

Appréciations « effort, participation, sérieux » selon le sexe

46 L’effet du sexe est ici très significatif (?2 = 10,975). Cette répartition sexuée semble indiquer que les garçons sont moins concernés que les filles par les efforts, la participation et le sérieux en EPS, bien que ces éléments occupent une place centrale pour les enseignants de cette discipline. D’ailleurs, certains commentaires, plus rares (n = 12), associent même réussite et travail, diffusant une morale scolaire : la réussite passe par le travail (« plus d’implication te permettra de progresser » ou « ensemble un peu juste par manque d’effort »).

47 Néanmoins, un tout autre discours, contradictoire, cohabite avec ce discours. En effet, 61 appréciations soulignent le comportement positif d’élèves aux résultats médiocres (« résultats moyens malgré les efforts »). Ce type d’appréciations indique que, malgré efforts et travail, certains ne réussissent pas en EPS. Que leur manque-t-il ? Du talent, des dons qui dans les croyances collectives permettent de réussir dans le sport ? Ou simplement des heures de pratique extrascolaire ? Les enseignants d’EPS évalueraient alors des apprentissages extrascolaires. Cela semble transparaître dans trois appréciations de très bons élèves : « X était dans son élément ! » Ces appréciations ne font-elles pas référence à la pratique fédérale (compétition en club) ? Si ces très bons élèves sont « dans leur élément » en EPS, c’est certainement parce que leurs acquis extrascolaires leur permettent d’y exceller. D’autres appréciations donnent des injonctions à persévérer et insinuent que certains élèves (plutôt des filles) auraient besoin de fournir plus d’efforts pour réussir. Au contraire, certaines appréciations recommandent aux élèves de continuer sur la même voie (pas d’effet du sexe) ou mentionnent leur fort potentiel (plutôt des garçons).

CONCLUSION

48 Dans le lycée étudié, les curricula de l’EPS, réel ou caché, sont plus proches de la culture masculine et se trouvent donc plus en phase avec les attentes des garçons. Les enseignants d’EPS privilégient des APSA et des modalités de pratique masculines, fondées sur la performance physique ou l’affrontement. Il existe un déséquilibre entre les différentes compétences culturelles (CC) abordées [1], au détriment de la CC2 (adapter ses déplacements aux différents types d’environnements) et de la CC3 (concevoir et réaliser des actions à visée artistique ou esthétique), qui pourraient mieux correspondre aux goûts de nombreuses filles. Le noyau restreint d’APSA proposées dans le lycée étudié est susceptible de mettre en difficulté ces dernières.

49 Néanmoins, certaines filles ont su réussir, voire exceller en EPS. Pour cela, elles ont dû se conformer aux formes de pratiques masculines. En effet, comme le montre notre analyse, le jugement professoral est traversé par des biais perceptifs liés au sexe des élèves. Ce résultat valide notre hypothèse. Les appréciations portées sur les bulletins diffusent un message implicite selon lequel les filles sont moins « douées » que les garçons en EPS : elles ont besoin de persévérance et d’efforts pour réussir, ont moins de potentiel que les garçons, sont plus aisément rappelées à l’ordre en cas de manque d’investissement.

50 Conformément au discours officiel qui apparaît dans les bulletins (travail, sérieux et efforts sont récompensés), adopter un comportement scolaire (sérieux, participation, efforts, bonne volonté) permet d’éviter les notes trop faibles. Rares sont en effet les notes inférieures à la moyenne en EPS. Il est possible que les enseignants d’EPS, attendant moins des filles, soient bienveillants envers celles en difficulté en ne les sanctionnant pas d’une mauvaise note lorsqu’elles font preuve de bonne volonté. En effet, un discours officieux cohabite avec le discours officiel au sein des bulletins. Certains élèves possèdent des « dons » pour réussir sans effort. D’autres, privés de ces « dons », doivent multiplier les efforts. Nos résultats montrent que les filles sont mieux représentées dans la seconde catégorie d’élèves. Cependant, on peut faire l’hypothèse que ces « dons » ne doivent rien à la nature, mais sont en fait le produit de compétences acquises hors de l’école, en particulier par la compétition au sein d’un club sportif. Assurément, la connivence entre pratique sportive compétitive et EPS influe sur la définition implicite de l’excellence en EPS. Cette dernière se fonde sur l’excellence sportive, elle-même construite au sein d’un univers masculin. Par conséquent, la définition implicite de l’excellence en EPS consacrerait des manières d’être « masculines » que les garçons ont plus de chances d’incorporer lors de leurs socialisations au sein de leur famille et des clubs sportifs.

51 Nous ne disposons pas dans notre étude de données sur les pratiques sportives des élèves. Cette piste mérite d’être exploitée. Par ailleurs, le curriculum caché de l’EPS n’a été appréhendé qu’au travers des appréciations et notes portées sur les bulletins scolaires, tout comme les représentations des enseignants. Ces limites sont autant de perspectives de recherches. Il serait nécessaire de poursuivre en observant ce qui se déroule au cœur même des leçons d’EPS. Travailler à partir de différentes traces des pratiques (vidéo et entretiens) permettrait de mieux cerner les curricula réels et cachés en EPS, en associant analyse de pratiques réelles et représentations des enseignants.

ANNEXE

Tableau 7

exemples d’appréciations catégorisées selon les noyaux de sens

Sexe Note Exemple Type(s)/noyau(x) de sens
fille 12 « Bon travail, tes efforts ont été récompensés. » Bons résultats ; comportement positif
garçon 16,5 « Très bien sérieux. » TB résultats ; comportement positif
fille 16 « Très bien. Élève active et sérieuse. » TB résultats ; comportement positif
fille 10 « Un trimestre difficile par manque d’implication, il faudra réagir pour l’an prochain. » Résultats justes ; comportement négatif ; changez de comportement
fille 11 « De la volonté malgré vos difficultés, c’est bien, persévérez. » Comportement positif ; travail, mais ne réussit pas ; persévérez
fille 10 « Résultats plus moyens ce trimestre malgré les efforts et le sérieux. » Comportement positif ; travail, mais ne réussit pas
garçon 10 « Les résultats restent moyens avec des efforts et de la volonté. » Comportement positif ; travail, mais ne réussit pas
fille 9,75 « Des progrès sont possibles dans les activités pratiquées. » Progrès possible
fille 7,75 « Malgré cette note, que de progrès.
Tu es sûrement encore capable d’évoluer dans ce domaine et d’éprouver du plaisir. »
Progrès effectués ; progrès possibles
garçon 15 « Élève très agréable avec des compétences motrices. » Comportement positif ; potentiel pour réussir
fille 16 « Un ensemble très satisfaisant et sérieux. Des possibilités. » TB résultats ; comportement positif ; potentiel pour
réussir
garçon 13 « Assez bon trimestre seulement. On pouvait attendre mieux d’A ! » AB résultats ; potentiel mal exploité
fille 7 « Une préparation pas assez soutenue, vous êtes capable de mieux avec plus d’investissement. » Comportement négatif ; potentiel mal exploité
fille 13 « Des qualités motrices à découvrir et à développer, tu es capable de mieux. » Potentiel mal exploité
figure im7

exemples d’appréciations catégorisées selon les noyaux de sens

Bibliographie

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Mots-clés éditeurs : sociologie du curriculum, éducation physique et sportive

Mise en ligne 16/02/2015

https://doi.org/10.3917/cdle.038.0193

Notes

  • [1]
    Les compétences culturelles ont été renommées compétences propres dans les textes officiels postérieurs au recueil de données.
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