Couverture de CDAP_003

Article de revue

Décentralisation et collectivités territoriales

Pages 13 à 24

Notes

  • Démocratie locale
  • Organisation territoriale
  • Gestion des collectivités territoriales

Démocratie locale

Statut des élus locaux

Protection des élus : une circulaire et un plan pour lutter contre les menaces envers les élus

1 Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, le ministre de la Justice, Éric Dupont-Moretti, et la ministre déléguée chargée des Collectivités territoriales, Dominique Faure, ont adressé aux parquets une nouvelle circulaire concernant les agressions d’élus [1], étant précisé que Dominique Faure prépare également un nouveau plan national de lutte, dont elle a dévoilé les premières mesures devant le Sénat.

Référent déontologue de l’élu local

2 La Direction générale des collectivités locales (DGCL) a publié, en juillet 2023, un guide relatif à la désignation du référent déontologue de l’élu local, obligatoire depuis le 1er juin 2023, pour aider les collectivités en retard. Mais il n’a pas convaincu les professionnels sur certains points, dont le rôle des centres de gestion. Depuis le 1er janvier 2023, les élus locaux ont en effet le droit de consulter un référent déontologue, chargé de lui apporter tout conseil utile au respect des principes déontologiques consacrés dans la charte des élus locaux. Un décret [2] et un arrêté du 6 décembre 2022 ont défini les modalités et critères de désignation de ce référent, mais force est de constater que toutes les collectivités n’ont pas encore sauté le pas malgré la date d’application au 1er juin 2023, en raison, notamment, des difficultés d’interprétation de la réglementation ou de recrutement.

Organisation territoriale

Collectivités de droit commun

Un nouveau cadre législatif pour lutter contre les incendies

3 La loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie a été publiée au Journal officiel du 11 juin 2023 [3]. Cette loi doit permettre de renforcer encore l’éventail des possibilités face aux feux de forêt. Déposée par les sénateurs Jean Bacci (REP), Anne-Catherine Loisier (UC), Pascal Martin (UC) et Olivier Rietmann (REP), elle vient traduire les 70 recommandations législatives de la mission d’information sénatoriale sur les feux de forêt et de végétation du 3 août 2022. Ce texte s’inscrit dans un moment décisif pour l’avenir de la sécurité civile, quelques semaines après les investissements annoncés [4] par le président de la République, Emmanuel Macron, et la publication du rapport Falco [5], portant 116 préconisations sur la modernisation de la sécurité civile et la protection contre les risques majeurs.

4 Le premier article de la loi est consacré à l’élaboration, d’ici le 10 juillet 2024, de la stratégie nationale de défense des forêts et des surfaces non boisées contre les incendies. Celle-ci sera élaborée par le Gouvernement en concertation, notamment, avec les représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements. En outre, dans les départements dont les bois et forêts sont classés à risque d’incendie, l’autorité administrative compétente de l’État élaborera, dans un délai de deux ans à compter de ce classement, un plan de protection des forêts contre les incendies, décliné pour chaque massif forestier. De plus, les plans départementaux ou interdépartementaux de protection des forêts contre les incendies doivent intégrer le risque d’incendie de surfaces agricoles et de végétation. De même pour le schéma départemental d’analyse et de couverture des risques. Il est précisé que lorsqu’un groupement de collectivités est compétent en matière de défense extérieure contre l’incendie, les maires des communes membres de ce groupement ou d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, membre du groupement de collectivités, peuvent transférer au président de celui-ci des attributions lui permettant de réglementer l’activité de défense extérieure contre l’incendie.

5 Le Titre II de la loi comprend de nombreuses dispositions relatives aux obligations légales de débroussaillement (OLD). Ce titre prévoit également que le Gouvernement élaborera une carte, révisée au moins tous les cinq ans, analysant la sensibilité du territoire métropolitain au danger prévisible de feux de forêt et de végétation. À partir de cette carte, un arrêté ministériel établira la liste des communes exposées à un danger élevé ou très élevé de feux de forêt et de végétation. Si le territoire d’une commune inscrite sur cette liste n’est pas couvert par un plan de prévention des risques naturels prévisibles d’incendies de forêt approuvé, le préfet de département peut délimiter une partie du territoire de la commune, dite « zone de danger », qui est exposée à un danger élevé ou très élevé de feux de forêt et de végétation. La loi décrit les contraintes liées à ces zones.

6 La loi prévoit encore que le préfet de département établit une liste des personnes et des organismes pouvant être mobilisés en soutien aux actions de lutte contre les incendies de forêt, de surfaces agricoles et de végétation et prévoit leurs conditions d’intervention. Cette liste inclut les agriculteurs disponibles et volontaires dans chaque commune ainsi que leurs citernes d’eau. De plus, sur proposition du commandant des opérations de secours et pour les nécessités de la lutte contre l’incendie, le représentant de l’État dans le département peut faire appel par réquisition aux agriculteurs et aux entreprises de travaux forestiers, notamment pour l’approvisionnement en eau.

7 Aussi est-il désormais interdit de fumer dans les bois et forêts et dans un rayon de 200 mètres autour d’eux pendant la période à risque définie par arrêté préfectoral. Le code pénal dispose clairement que les gardes champêtres recherchent et constatent les infractions forestières.

8 La loi comporte en outre diverses mesures fiscales au profit des services d’incendie et de secours : exonération de la taxe sur les carburants, réduction des cotisations patronales [6] pour chaque salarié sapeur-pompier volontaire, etc.

9 Enfin, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la loi, le Gouvernement devra remettre au Parlement un rapport réalisant un état des lieux des freins à l’engagement des sapeurs-pompiers volontaires, des dispositifs actuels visant à faciliter leur recrutement et des mesures envisageables afin de mieux concilier leur engagement et leur carrière professionnelle.

Gestion des collectivités territoriales

Ressources humaines et fonction publique territoriale

10 Outre les éléments d’actualité qui concernent les trois versants de la fonction [7], ceux qui intéressent spécifiquement les collectivités territoriales sont les suivants :

Exclusion des contractuels territoriaux de la nouvelle bonification indiciaire

11 Dans une décision du 26 juin 2023 [8], le Conseil d’État a jugé que le fait que les agents contractuels de la fonction publique territoriale soient exclus du bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire (NBI) ne crée aucune inégalité de traitement par rapport aux fonctionnaires. Cette différence de traitement, qui découle des caractéristiques inhérentes au statut des fonctionnaires, se justifie par l’existence de règles distinctes de détermination des rémunérations, qui permettent d’assurer la prise en compte, dans la rémunération des fonctionnaires comme dans celle des agents contractuels, à durée déterminée ou indéterminée, de la responsabilité ou de la technicité particulières des fonctions exercées, selon des modalités propres.

Calcul du contingent de décharges d’activité de service par un centre de gestion

12 Dans un arrêt du 13 juillet 2023 [9], qui sera mentionné aux tables du Recueil Lebon, le Conseil d’État s’est prononcé sur le cas d’une organisation syndicale qui réclamait à un centre de gestion d’accorder le bénéfice d’une décharge d’activité de service sur le contingent des heures attribuées par le centre de gestion à un agent, qui faisait partie d’un syndicat mixte affilié volontairement au centre de gestion. Selon la Haute Juridiction, il résulte des articles 15, 22, 23, 32 et 100-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et des articles 2, 12, 19 et 20 du décret n° 85-397 du 3 avril 1985 qu’il appartient au centre de gestion de calculer le contingent de décharges d’activité de service pour les syndicats mixtes qui lui sont affiliés, alors même que cette affiliation n’est pas obligatoire, et dont le comité technique est placé auprès de lui ; en outre, aux termes des articles précités, dès lors qu’un centre de gestion calcule le contingent de décharges d’activité de service pour les syndicats mixtes qui lui sont affiliés, il lui incombe de procéder au remboursement des charges salariales afférentes à l’utilisation de ce contingent.

Congés bonifiés – Harmonisation des critères à prendre en compte

13 Une circulaire du ministère de la Transformation et de la Fonction publiques, publiée le 4 août 2023 [10], harmonise concrètement, dans les trois versants de la fonction publique, la prise en compte des critères qui permettent d’identifier le Centre d’intérêts matériels et moraux (CIMM) des agents. L’objectif est de faciliter le traitement des demandes de congés bonifiés. Cette circulaire précise en effet les modalités d’application du CIMM pour l’attribution des congés bonifiés et la détermination de la priorité légale d’affectation outre-mer. Il convient de rappeler que le congé bonifié concerne les fonctionnaires territoriaux originaires d’outre-mer et affectés dans l’hexagone. Ce congé présente plusieurs avantages : il permet de bénéficier de la prise en charge des frais de voyage entre l’hexagone et la collectivité d’outre-mer dont les agents sont originaires et d’une indemnité de cherté de la vie pendant la durée du congé. Pour en bénéficier, l’une des conditions à remplir est de justifier que le centre de ses intérêts moraux et matériels (CIMM) est situé en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à la Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin ou à Saint-Pierre-et-Miquelon. Cette justification doit répondre à certaines règles, explicitées dans cette circulaire.

Protection sociale complémentaire des agents territoriaux

14 Une majorité des membres de la Coordination des employeurs territoriaux ainsi que six organisations syndicales ont signé, le 11 juillet 2023, un accord national « portant réforme de la protection sociale complémentaire des agents publics territoriaux » [11] : les signataires préconisent des contrats de prévoyance à adhésion obligatoire garantissant 90 % du revenu net de l’agent et le plafonnement des cotisations santé des retraités. Cet accord, qui en appelle d’autres sur la santé, concerne principalement la prévoyance. S’il est transposé en règlement, il améliorera les droits des agents dans ce domaine par rapport aux textes existants (ordonnance n° 2021-175 du 17 février 2021 et décret n° 2022-581 du 20 avril 2022). Ainsi, un agent malade ou en invalidité percevra 90 % de son revenu net incluant le traitement indiciaire (TI), la nouvelle bonification indiciaire (NBI) et le régime indemnitaire (RI).

Égalité professionnelle « femmes-hommes » : dispositions intéressant la fonction publique territoriale

15 Après un parcours parlementaire de trois mois, la loi visant à renforcer l’accès des femmes aux responsabilités dans la fonction publique a été publiée au Journal officiel du 20 juillet 2023 [12]. Cette loi renforce les dispositifs de nomination et d’occupation équilibrées aux postes à responsabilité dans la fonction publique, et étend les dispositifs de lutte contre les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes.

16 L’article L. 132-9 du code général de la fonction publique (CGFP) est supprimé : il permettait d’échapper à la sanction du non-respect de l’obligation de nominations équilibrées si les emplois assujettis à cette obligation étaient occupés par au moins 40 % de personnes de chaque sexe. Au prochain renouvellement général des assemblées délibérantes des régions, des départements, des communes et des établissements publics de coopération intercommunale, le taux de nomination dans les emplois de direction de ces collectivités et du Centre national de la fonction publique territoriale est porté à 50 %. La loi introduit un article L. 132-6-1 dans le CGFP, imposant aux autorités territoriales et aux établissements publics de coopération intercommunal de publier, chaque année, le nombre de femmes et d’hommes nommés dans les emplois de direction. Un article L. 132-6-2 du CGFP complète le dispositif en posant une sanction en cas de non-respect de cette obligation de publication sous la forme d’une contribution forfaitaire.

17 Un nouvel article L. 132-9-1, en vigueur au 1er janvier 2027, dispose que la proportion de personnes de même sexe aux emplois de direction ne peut être inférieure à 40 %. Cette proportion est appréciée dans chaque autorité territoriale ou établissement public de coopération intercommunal. Les employeurs ne se conformant pas à cette règle disposent d’un délai de 3 ans pour se mettre en conformité et publient la première année des objectifs de progression et les mesures de correction retenues. Si l’obligation n’est toujours pas respectée passé ce délai, une pénalité financière est appliquée, pouvant aller jusqu’à 1 % de la rémunération brute annuelle globale de l’ensemble des personnels. La loi pose à un article L. 132-9-2, en vigueur au 1er janvier 2027, une obligation de publier, chaque année, le nombre femmes et d’hommes dans les emplois de direction. Une contribution forfaitaire est due en cas de violation de cette obligation.

18 Enfin, la loi vise à supprimer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes. La publication des 10 rémunérations les plus élevées de l’article L. 716-1 du CGFP est étendue aux collectivités et établissements publics de coopération intercommunale de plus de 40 000 habitants, contre 80 000 précédemment. La loi introduit de plus les articles L. 132-9-3 à 132-9-5 relatif à la suppression des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes, applicables aux collectivités et EPCI de plus de 40 000 habitants et au CNFPT au plus tard le 30 septembre 2024. Les collectivités territoriales et les EPCI de plus de 40 000 habitants ainsi que le CNFPT publient et présentent à leur assemblée délibérante, chaque année, les indicateurs relatifs aux écarts de rémunération entre les femmes et les hommes ainsi qu’aux actions mises en œuvre pour les supprimer. Une contribution forfaitaire sanctionne le non-respect de cette obligation. Les résultats obtenus au regard de ces indicateurs devront dépasser une cible définie par décret.

Relèvement de la participation des employeurs aux titres de transport

19 Dans le cadre des mesures en faveur de la hausse du pouvoir d’achat des agents publics, la participation aux abonnements de transports collectifs des agents sera désormais prise en charge par l’employeur à hauteur de 75 %, contre 50 % aujourd’hui. Cette mesure entre en vigueur le 1ᵉʳ septembre 2023. En effet, un décret du 21 août 2023 [13] modifie le taux de prise en charge partielle par l’employeur du prix des titres d’abonnement correspondant aux déplacements effectués par les agents entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail : ce texte augmente ainsi cette prise en charge du titre de transport collectif à hauteur de 75 % de la valeur annuelle mensualisée du titre de transport à compter du 1er septembre 2023.

Instruments de la commande publique

Commande publique – La copie de sauvegarde

20 La Direction des affaires juridiques (DAJ) de Bercy a mis en ligne une notice explicative concernant le fonctionnement de la copie de sauvegarde (MAJ 22/06/2023) : elle a en effet publié une foire aux questions intitulée « La copie de sauvegarde » pour tenter de répondre aux interrogations des acheteurs publics sur le fonctionnement du dispositif. En effet, l’arrêté n° ECOM2308848A du 14 avril 2023 modifie les articles 2-I et 4 de l’annexe 6 du code de la commande publique « fixant les modalités de mise à disposition des documents de la consultation et de la copie de sauvegarde » afin d’ajouter un nouveau mode de transmission de la copie de sauvegarde à ceux existants pour les supports papier ou supports physiques électroniques. La DAJ rappelle d’abord que la copie de sauvegarde « est une copie de la réponse électronique d’un candidat destinée à se substituer, en cas d’anomalies ou de difficultés limitativement énumérées (présence d’un programme informatique malveillant, candidature ou offre incomplète, reçue hors délai ou qui ne peut être ouverte), à la candidature et l’offre transmises par voie électronique ». Elle rappelle ensuite quel est l’objectif de l’arrêté du 14 avril 2023 modifiant l’annexe 6 du code de la commande publique, et souligne que « le dépôt de l’offre par l’opérateur économique sur le profil d’acheteur reste la règle. La copie de sauvegarde est un pli de secours qui n’est ouvert que dans les conditions limitativement énumérées à l’article 2 de l’annexe 6 du code de la commande publique ». Elle précise encore le fonctionnement de l’outil permettant la remise d’une copie de sauvegarde par voie électronique et les modalités d’utilisation de la copie de sauvegarde, et elle termine en listant les services existants permettant la remise de la copie de sauvegarde par voie électronique.

Amélioration des marchés publics relatifs aux transports scolaires

21 Le groupe de travail mis en place par le plan d’action interministériel « transport scolaire » et formé avec les acteurs du secteur (fédérations professionnelles et représentants des collectivités autorités organisatrices des transports) a publié mi-juillet 2023 un guide « Transport scolaire et marchés publics » [14]. Ce guide présente des recommandations pour améliorer ces marchés et des mesures concrètes expérimentées par des collectivités, le groupe de travail ayant approfondi trois thématiques : la définition de l’offre de transport (expression des besoins, volumes de prestation), l’élaboration et la passation du contrat.

Gestion des violences urbaines

Loi « Reconstruction » complétée par trois ordonnances

22 Présentée au stade du projet de loi au Conseil des ministres du 13 juillet par le ministre de la Cohésion des territoires, Christophe Béchu, la loi visant à accélérer la reconstruction et la réfection des bâtiments dégradés ou détruits au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet 2023 est parue au Journal officiel du 26 juillet 2023 [15]. En effet, entre le 27 juin et le 5 juillet derniers, d’après le Gouvernement, ces violences ont conduit à de nombreux dégâts sur le bâti, public et privé, dont des services publics et commerces, dans les quelque cinq cents communes qui ont été touchées ; et le bilan fait ultérieurement lors du Conseil des ministres du 13 septembre 2023 précise que « selon le dernier recensement connu, soixante-huit bâtiments ont été entièrement détruits, quatre cent cinquante ont été partiellement détruits et plus de deux mille dégradés. Le coût estimé par les assureurs s’élève à 730 millions d’euros, dont presque 30 % concernent le patrimoine des collectivités ».

23 La loi du 25 juillet 2023 a autorisé la prise d’ordonnances dans trois domaines : les marchés publics, l’instruction des permis de construire et le financement. Cette loi s’articule en effet autour de trois articles, dans lesquels elle autorise le Gouvernement à prendre des ordonnances pour trois sujets : la commande publique, l’urbanisme et les financements. Pour chacune de ces ordonnances, un projet de loi de ratification devrait être déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance.

24 La première ordonnance annoncée par la loi du 25 juillet 2023 et publiée au Journal officiel du 27 juillet 2023 [16] simplifie, pour neuf mois et sur trois points, les procédures de passation des marchés publics, dans la mesure où il s’agit d’accélérer la reconstruction ou la réfection des bâtiments et équipements publics détruits ou dégradés lors des émeutes urbaines survenues fin juin-début juillet 2023 et ainsi de permettre le retour au fonctionnement normal des services publics : en premier lieu, les acheteurs pourront déroger aux règles normales de passation des marchés publics en recourant à une procédure négociée, sans publication préalable d’un avis d’appel à la concurrence, mais avec une mise en concurrence, pour tous les marchés de travaux nécessaires à la reconstruction ou à la réfection des équipements publics (mobilier urbain, réseaux de transport, équipements d’infrastructures, etc.) et des bâtiments endommagés et répondant à un besoin inférieur à 1,5 million d’euros hors taxes ; en deuxième lieu, ces acheteurs pourront également, sans justification et sans limitation de montant, déroger au principe général d’allotissement des prestations nécessaires à ces reconstructions ou à ces réfections ; en troisième lieu, un nouveau cas de recours au marché de conception-réalisation est créé afin d’autoriser les maîtres d’ouvrages publics à confier à un opérateur économique (quel que soit le montant estimé des travaux), une mission globale portant à la fois sur l’établissement des études et l’exécution des travaux nécessaires à la reconstruction ou à la réfection des équipements publics et des bâtiments détruits ou dégradés.

25 L’objectif de la deuxième ordonnance publiée le 13 septembre 2023 [17] est d’accorder des dérogations aux règles de délivrance (par les collectivités territoriales) des autorisations d’urbanisme, dans le but de favoriser la reconstruction des bâtiments à l’identique ou avec des améliorations justifiées ou des adaptations limitées.

26 Ainsi, le commencement des travaux préliminaires (terrassements, fondations, etc.) sera possible dès le dépôt de la demande d’autorisation d’urbanisme. Cela signifie que le maire devra procéder, dans les meilleurs délais et pendant toute la durée de l’instruction, à l’affichage en mairie (ou à la publication par voie électronique sur le site internet de la commune) d’un avis de dépôt de demande de permis ou de déclaration préalable précisant les caractéristiques essentielles du projet. Le récépissé de dépôt de la demande devra être affiché sans délai sur le terrain, de manière visible de l’extérieur, par les soins du demandeur. En revanche, le constructeur devra solliciter et obtenir les autorisations requises par les autres législations, auxquelles il n’est pas dérogé, notamment en matière d’occupation du domaine public et de la voirie publique.

27 La reconstruction ou la réfection à l’identique de ces bâtiments peut être réalisée même si une disposition d’urbanisme, le plan local d’urbanisme ou la carte communale s’y oppose. Mais ces travaux peuvent comporter des adaptations de la construction initiale, dans la limite d’une diminution ou d’une augmentation de 5 % de son gabarit initial. Si elle est justifiée par un objectif d’amélioration de la performance énergétique, d’accessibilité ou de sécurité, cette diminution ou cette augmentation peut dépasser 5 % du gabarit initial, à proportion des modifications du bâtiment nécessaires à la réalisation du ou des objectifs invoqués. Cependant, la destination ou la sous-destination initiale du bâtiment ne pourront pas être modifiées.

28 Les délais d’instruction sont modifiés aussi : pour les permis de construire, d’aménager ou de démolir, ils sont limités à un mois. Pour les déclarations préalables, ce sera quinze jours. Quand la délivrance de l’autorisation d’urbanisme est subordonnée au recueil préalable de l’avis, de l’accord ou de l’autorisation d’un organisme ou d’une autorité administrative, l’autorité compétente lui transmet un exemplaire du dossier, dans les cinq jours suivant sa réception. Les majorations ou prolongations du délai d’instruction de la demande d’urbanisme découlant de l’application de règles de délivrance prévues par d’autres législations que celle de l’urbanisme sont limitées à quinze jours à compter de la réception du dossier par l’organisme ou l’autorité administrative concernés.

29 L’ordonnance permet aussi, lorsque la réalisation des travaux requiert l’accomplissement préalable d’une procédure de participation du public, à l’autorité compétente de recourir à une procédure de participation du public par voie électronique en lieu et place d’une enquête publique.

30 La demande d’autorisation d’urbanisme doit préciser que le projet est soumis au régime dérogatoire prévu par cette ordonnance et, le cas échéant, contenir une motivation spécifique des adaptations de la construction initiale envisagées. De même, cette ordonnance ne s’applique qu’aux demandes d’autorisations d’urbanisme déposées dans les dix-huit mois à compter de son entrée en vigueur.

31 La troisième ordonnance publiée le 14 septembre 2023 [18] permet d’accélérer les attributions du fonds de compensation de la TVA (FCTVA) en instaurant une dérogation au régime de versement des attributions du FCTVA. En effet, le régime de droit commun conduit à attribuer les droits au FCTVA deux ans après l’exécution des dépenses éligibles. Pour les dépenses liées à la réparation des dommages directement causés par les actes de dégradation et de destruction de l’été dernier, l’ordonnance prévoit une attribution systématique, et pour tous les bénéficiaires, de FCTVA l’année d’exécution de ces dépenses.

32 Cette ordonnance adapte aussi le cadre applicable aux subventions versées aux collectivités territoriales et à leurs groupements, et qui sont plafonnées en application de l’article L. 1111-10 du CGCT [19]. En principe, sauf dérogation expresse prévue par la loi, toute collectivité territoriale ou groupement, maître d’ouvrage d’une opération d’investissement, doit assurer une participation minimale au financement de ce projet fixée à 20 % du montant total des financements apportés par les personnes publiques à ce projet, explique le Gouvernement. Pour accélérer la réparation des dommages, cette obligation de participation minimale du maître d’ouvrage ne sera pas applicable au financement des projets de reconstructions. Ces derniers pourront donc, le cas échéant, bénéficier de subventions allant jusqu’à 100 % du coût des travaux.

33 Enfin est prévue une dérogation au plafonnement des fonds de concours qui peuvent être versés entre les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre et leurs communes. D’habitude, le montant total de ces fonds de concours, destinés au financement d’un équipement ou de son fonctionnement, ne peut excéder la part du financement assurée, hors subventions, par le bénéficiaire du fonds de concours. L’ordonnance supprime exceptionnellement cette limite pour laisser la possibilité de mobiliser les ressources disponibles et d’accélérer la réparation des dommages causés aux biens des collectivités.

Gestion et finances des collectivités territoriales

Procédure d’admission en non-valeur des créances des collectivités

34 Pour constater l’irrécouvrabilité des créances, les assemblées délibérantes, qui disposent du pouvoir budgétaire, les admettent en non-valeur. Cette mesure d’apurement d’ordre budgétaire et comptable ne s’oppose pas à l’exercice de poursuites ultérieures si le débiteur revient à meilleure fortune, mais s’insère dans l’exigence de sincérité des comptes portée par l’article 47-2 de la Constitution. Afin de fluidifier la mise en œuvre de cette procédure pour les créances de faible montant et recentrer les travaux de l’assemblée sur les créances significatives, la loi dite 3DS n° 2022-217 du 21 février 2022, notamment son article 173, autorise la délégation de la décision d’admission en non-valeur à l’exécutif local dans la limite d’un seuil. Le décret n° 2023-523 du 29 juin 2023 « relatif au seuil plafond de délégation des décisions d’admission en non-valeur et aux conditions dans lesquelles le maire, le président du conseil départemental et le président du conseil régional rendent compte à l’assemblée délibérante de l’exercice de cette délégation fixe ce seuil au-delà duquel la délégation » ne peut intervenir à 100 euros et prévoit les modalités selon lesquelles ces premiers rendent compte de l’exercice de cette délégation auprès de cette dernière.

Note thématique la Cour des comptes sur « Les transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales : des objectifs et des instruments à redéfinir »

35 La Cour des comptes a publié le 7 juillet 2023, neuf notes thématiques pour « renforcer la qualité de la dépense publique ». Dans la note consacrée aux transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales, la Cour des comptes rappelle que la loi de finances initiale pour 2023 a prévu 158 milliards d’euros de transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales (communes, groupements de communes, départements et régions), soit 5,7 % du PIB prévisionnel. Elle note que depuis 2021, ces transferts ont crû pour représenter plus de la moitié des recettes des collectivités, tandis que la part des impôts locaux a chuté, du fait de la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales et celle de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, qui ont été compensées par l’attribution de fractions de TVA. La Cour a dénombré 155 transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales. Elle estime que ces transferts pourraient contribuer plus activement au redressement d’ensemble des finances publiques, en allégeant le poids qu’ils font peser sur le budget de l’État pour réduire le déficit de ce dernier. La Cour recommande également de mettre en réserve une partie de la dynamique annuelle des recettes de TVA afin de renforcer, sans appel à l’État, la résilience financière des collectivités face aux chocs économiques qui viennent réduire leurs recettes. Un autre enjeu déterminant, selon elle, est de mieux allouer les transferts financiers que verse l’État aux collectivités. Dans cet objectif, il conviendrait, selon elle, de répartir la dynamique des recettes des impôts nationaux qui compensent des suppressions d’impôts locaux ou des transferts de compétences en fonction de critères démographiques et socioéconomiques, et non plus de situations de plus en plus datées dans le temps. En outre, la Cour recommande d’accroître les moyens consacrés à la péréquation financière, à coût constant pour l’État, et de mieux les cibler vers les collectivités qui en ont le plus besoin, alors qu’ils sont saupoudrés entre la presque totalité des collectivités. Enfin, la Cour préconise de réorienter les soutiens financiers de l’État aux investissements des collectivités territoriales dans le sens d’une meilleure prise en compte des impératifs liés à la transition écologique, ce qui nécessiterait de réduire le principal concours financier de l’État – le fonds de compensation de la TVA –, qui procure une aide indifférenciée aux collectivités, au profit des dotations à l’investissement qui prennent en compte ces impératifs et d’accroître la part de ces dotations consacrée au financement des investissements « verts ».

Extension du champ d’application de la taxe annuelle sur les logements vacants

36 Après plusieurs semaines d’attente, le décret modifiant la liste des communes pouvant instaurer la taxe annuelle sur les logements vacants (TLV), ainsi qu’une majoration de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires, a été publié le 26 août 2023 au Journal officiel[20]. Présenté le 13 juin lors du Comité des finances locales (CFL), le décret était toujours en attente de publication au Journal officiel : le CFL avait pourtant donné un avis favorable, notamment après que le Gouvernement a préféré jouer la montre et suspendre pour 2023 cette possibilité introduite dans le projet de loi de finances pour 2023, en privilégiant une concertation avec les associations de collectivités pour une mise en place pour 2024.

37 L’article 73 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023 a étendu le champ d’application de la TLV prévue à l’article 232 du code général des impôts et, dès lors, de la majoration de taxe d’habitation sur les logements meublés non affectés à l’habitation principale prévue par l’article 1407 ter du même code, instituée sur délibération communale, aux communes qui, sans appartenir à une zone d’urbanisation continue de plus de cinquante mille habitants, sont confrontées à un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d’accès au logement sur l’ensemble du parc résidentiel existant. Pour ces communes en effet, la tension immobilière est notamment caractérisée par le niveau élevé des loyers ou des prix d’acquisition des logements anciens ainsi que par la proportion élevée de logements affectés à l’habitation autres que ceux affectés à l’habitation principale par rapport au nombre total de logements.

38 Le décret n° 2023-822 du 25 août 2023 a pour objet, d’une part, d’établir la liste des communes éligibles ainsi définies et, d’autre part, d’actualiser la liste des communes appartenant à une zone d’urbanisation continue de plus de cinquante mille habitants où il existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements, établie par le décret n° 2013-392 du 10 mai 2013 modifié par le décret n° 2015-1284 du 13 octobre 2015. La liste présentée en annexe du décret concerne 3 697 communes, notamment des grandes agglomérations, du littoral et dans les montagnes : 2 263 ont été ajoutées à la liste du décret n° 2013-392 du 10 mai 2013 [21], qui intégrait 1 434 communes pouvant instaurer la taxe annuelle sur les logements vacants.

Politique de la ville – Nouveaux contrats

39 Réclamées depuis des mois par les élus de communes populaires, des précisions sur le calendrier et la méthodologie d’élaboration des nouveaux contrats de ville font l’objet d’une circulaire datée du 31 août 2023 [22] élaborée par la secrétaire d’État chargée de la Ville. Mais le Gouvernement devra encore préciser les engagements des différents ministères : des réponses seront vraisemblablement apportées le 9 octobre 2023 à l’occasion du Comité interministériel des villes.


Date de mise en ligne : 16/11/2023

https://doi.org/10.3917/cdap.003.0013

Notes

Domaines

Sciences Humaines et Sociales

Sciences, techniques et médecine

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