L’édition de ces deux textes du xiiie s. déjà signalés par Alfred Jeanroy en 1893, permet de compléter notre connaissance des formes du discours amoureux médiéval périphériques du Grand Chant courtois lyrique et l’accompagnant constamment comme son contredit critique et réflexif.
Composés sur le modèle prosodique et strophique des Vers de la mort du moine Hélinand de Froidmont, lui-même ancien trouvère du xiie s., les deux Vers ou dits d’amour qui nous sont présentés et commentés par Federico Saviotti appartiennent en outre à la féconde production arrageoise du xiiie s. dont celle d’un de leurs plus célèbres trouvères professionnels, Adam de la Halle.
Ces poèmes illustrent, par ailleurs, le passage (ou l’expérimentation) d’un lyrisme chanté à un lyrisme du « dit » non chanté, qui ouvre à de nouvelles formes d’expression tout en proposant un regard distancié sur la tradition issue des lointains troubadours. Le je du dit n’est jamais exactement le même sujet lyrique que celui du Grand Chant. C’est pourquoi ces pièces s’inscrivent aussi dans la dynamique d’une littérature arrageoise qui sut reformuler de plusieurs manières des modèles hérités et empruntés.
C’est dire combien l’édition de F. Saviotti est intéressante à plus d’un titre, en particulier pour la longue introduction qui présente et commente, pour la première fois, ces textes méconnus, grâce à ses notes très nombreuses et minutieuses qui en balisent et en soutiennent la lecture, mais également grâce à son glossaire…