Couverture de CCA_153

Article de revue

Le co-commissariat aux comptes sous le prisme de la sociologie du droit

Des vertus symboliques d'une règle contestée du gouvernement d'entreprise

Pages 117 à 140

Notes

  • [1]
    Au Danemark, le co-commissariat aux comptes a été supprimé en 2005.
  • [2]
    En Tunisie, le co-commissariat aux comptes a été introduit par la loi destinée à renforcer la sécurité financière de 2006. En Afrique du sud, le co-commissariat aux comptes ne concerne que les établissements financiers.
  • [3]
    Le CDI a été saisi par le CENA qui est l’organe de la Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes chargé du contrôle de la qualité des travaux.
  • [4]
    Arrêté du 10 avril 2007 portant homologation de la norme d’exercice professionnel relative à l’audit des comptes réalisé par plusieurs commissaires aux comptes, 3 mai 2007, Journal officiel.
  • [5]
    Code de déontologie de la profession de commissaire aux comptes (Annexe au décret n° 2005-1412 du 16 novembre 2005), consultable en ligne sur le site du CNCC.
  • [6]
    L’article R 821-6 du Code de commerce prévoit que sont habilités à saisir le H3C sur des questions relatives à la déontologie et à la compétence du commissaire aux comptes les personnes et instances suivantes : le garde des Sceaux, le ministre en charge de l’économie, le Procureur général auprès de la Cour des comptes, le président de la CNCC, le président de l’AMF, le président du CRCC, les commissaires aux comptes.
  • [7]
    Le premier avis avait été formulé avant que la norme d’exercice professionnel ne soit homologuée.
  • [8]
    L’extraction des échanges concernant le seul co-commissariat aux comptes a été facile puisque les débats parlementaires sont organisés par article.
  • [9]
    Une recherche informatisée étant possible uniquement pour la période de 1984 à 2008 (les archives des articles publiés avant 1984 ne sont pas consultables sur internet), nous avons donc limité le recensement des articles publiés à cette période en complétant ce recensement par une recherche manuelle limitée à l’année 1966.

Introduction

1Il n’est pas habituel d’étudier le gouvernement d’entreprise sous l’angle de la sociologie du droit. Pourtant, cette discipline ayant pour objet « les normes juridiques et leurs répercussions sur les conduites sociales » est particulièrement utile pour comprendre le gouvernement d’entreprise qui « implique à la fois des institutions, des relations, des règles et des comportements » (Perez, 2003, p. 5). C’est pourquoi, dans cet article, nous avons recours à la sociologie du droit de Carbonnier afin d’appréhender une disposition souvent contestée du gouvernement d’entreprise français, à savoir le co-commissariat aux comptes.

2L’établissement des comptes financiers est un des principaux moyens de contrôle de l’activité des dirigeants. Mais pour que ce moyen soit efficace, encore faut-il que les informations comptables produites soient fiables (Pochet, 1998). L’audit légal répond à cette exigence de fiabilité. L’auditeur est un professionnel indépendant et externe à l’entreprise qui procède à un examen critique en vue de « vérifier que l’activité d’une entreprise est fidèlement traduite dans ses comptes annuels conformément à un référentiel identifié » (Mikol, 1999, p. 8). Les enjeux économiques et sociaux de l’audit légal ont justifié, dans la plupart des pays occidentaux, une intervention croissante du législateur en vue d’élargir la mission de l’auditeur et de renforcer son indépendance et sa compétence. Dès 1935, le législateur français impose aux sociétés anonymes faisant appel public à l’épargne de désigner au moins un commissaire aux comptes choisi sur une liste garantissant un certain niveau de compétence technique. En 1966, il réforme en profondeur le commissariat aux comptes et introduit le système du co-commissariat (joint audit) comme une « alternative aux dysfonctionnements constatés dans le contrôle des comptes et la gouvernance des grandes entreprises » (Ebondo, 2006, p. 217). La loi sur les sociétés commerciales de 1966 impose ainsi aux sociétés faisant appel public à l’épargne de nommer deux commissaires aux comptes titulaires travaillant d’une manière conjointe. En 1984, le champ d’application de ce dispositif a été élargi aux sociétés contraintes de publier des comptes consolidés. Plus récemment, l’exemple français a été suivi, parfois temporairement, par quelques États, à savoir le Danemark [1], l’Inde, la Tunisie ou encore l’Afrique du Sud [2].

3Pourtant, en France, l’efficacité du co-commissariat a fait l’objet d’une polémique. En soulignant l’existence d’un déséquilibre considérable dans la rémunération des co-commissaires en charge d’un même dossier, Le Maux (2004) conteste l’effectivité de cette particularité du gouvernement d’entreprise français. Coûteux pour les entreprises qui y sont astreintes, ce que certains n’hésitent pas à qualifier de « sous-commissariat aux comptes » serait une formalité de façade sans réelle utilité.

4L’objet de cet article est de répondre aux critiques formulées à l’encontre du co-commissariat en se fondant sur la sociologie juridique qui a précisément pour objet l’effectivité, l’efficacité et l’efficience du droit. Ces trois notions méritent d’être définies préalablement à l’élaboration de la question de recherche, car elles renvoient à des problématiques distinctes mais liées (Canivet et al., 2005). Selon Cornu (1987), une règle de droit est effective si « elle est réellement appliquée ». Plus restreinte que l’effectivité, l’efficacité serait, selon Rangeon (1989), le caractère « d’un acte ou d’une décision qui produit l’intention recherchée par ses auteurs ». Enfin, l’efficience suppose de mettre en relation les effets produits par une règle de droit, les intentions visées par le législateur et le coût induit par la règle.

5La sociologie de Carbonnier dépasse cette représentation tripartite de l’application du droit en se focalisant sur le concept d’effectivité symbolique (Carbonnier, 1958, 2001, 2004). La notion d’effectivité symbolique s’intéresse non pas à la concordance des pratiques sociales avec la lettre de la loi mais à la transformation des consciences voulue par le législateur. Saisir l’effectivité symbolique d’une loi implique une analyse téléologique des intentions véritables du législateur. C’est pourquoi, dans la continuité des réflexions développées par Carbonnier, cette étude met en perspective la loi voulue par les parlementaires et la loi perçue par les acteurs économiques. Les résultats d’une double analyse de contenu effectuée à partir des débats parlementaires et de la presse économique et professionnelle révèlent l’effectivité symbolique de cette particularité du gouvernement d’entreprise français.

6La première partie de cet article rappelle les contours de la réglementation française propre au co-commissariat avant de récapituler les principales critiques formulées à l’encontre de ce dispositif. Dans la deuxième partie, nous présentons le parcours et la position de Carbonnier dans la sociologie du droit, puis sa théorie de l’effectivité du droit. Enfin, la dernière partie décrit la méthodologie de la recherche, présente les résultats émergents et dresse des pistes de recherche futures.

1 – Le co-commissariat aux comptes : une disposition contestée du gouvernement d’entreprise

7Après avoir présenté les nouvelles règles du co-commissariat aux comptes, nous synthétisons les principaux apports de la littérature académique consacrée à la question de l’efficacité de ce dispositif.

1.1 – Un dispositif fondé sur une répartition équilibrée des travaux d’audit

8Le champ d’application du co-commissariat aux comptes est défini par la loi. L’article L 823-2 du Code de commerce dispose que : « Les personnes et les entités astreintes à publier des comptes consolidés désignent au moins deux co-commissaires aux comptes ». Tout dirigeant qui ne satisferait pas à cette obligation légale s’exposerait à une sanction susceptible d’aller jusqu’à deux ans d’emprisonnement et 30 000 € d’amende selon les termes de l’article L 820-4 du Code de commerce.

9Le législateur a confié aux professionnels eux-mêmes la définition des modalités concrètes de collaboration entre les co-commissaires aux comptes. L’article L 823-15 du Code de commerce prévoit en effet que les commissaires aux comptes « se livrent ensemble à l’examen contradictoire des conditions et des modalités d’établissement des comptes selon les prescriptions énoncées par une norme d’exercice professionnel ». Les principes organisant une répartition équilibrée des travaux entre les co-commissaires aux comptes sont précisés par une norme d’exercice professionnel homologuée en 2007 dont le respect est contrôlé par le Haut Conseil au Commissariat aux Comptes (H3C).

1.1.1 – Les principes posés par la norme d’exercice professionnel et le Code de déontologie

10Le co-commissariat aux comptes n’est pas un double audit exercé séparément par deux professionnels : il doit consister en une collaboration entre deux commissaires agissant de concert. D’une part, les co-commissaires doivent se répartir les travaux à conduire en vue de se forger leur opinion sur la qualité des comptes de leur client. Il ne s’agit donc pas de dupliquer systématiquement les mêmes opérations de contrôle. Les travaux de chaque auditeur peuvent et doivent s’appuyer sur les travaux de son confrère. D’autre part, la responsabilité des co-commissaires est conjointe et solidaire. Toute défaillance imputable à l’un des commissaires aux comptes peut être potentiellement reprochée à l’ensemble des co-commissaires. Les professionnels ont progressivement clarifié les modalités concrètes de répartition des travaux entre les co-commissaires. Le Conseil de Déontologie et d’Indépendance (CDI) précise dans une recommandation n° 2000/05/18-2 du 18 mai 2000 que l’exercice collégial de la mission d’audit légal repose sur trois éléments :

  • une répartition équilibrée du programme de travail entre les co-commissaires aux comptes et une revue réciproque des dossiers ;
  • l’indépendance fonctionnelle et réelle des co-commissaires aux comptes non seulement dans la relation au client mais également entre eux, ce qui suppose que chaque commissaire réalise une partie significative des travaux ;
  • la participation effective de chaque commissaire aux travaux de contrôle.
Le CDI se borne à énoncer des principes généraux et a toujours refusé d’édicter des critères quantitatifs précis relatifs à la répartition des travaux réalisés par les co-commissaires aux comptes de crainte d’imposer une organisation du travail figée et peu soucieuse de la spécificité de chaque mission. Saisi à deux reprises de cas concernant des situations de co-commissariat déséquilibré [3], le CDI confirme cette position par deux avis du 19 décembre 2002 (2002/12/19-10) et du 16 octobre 2003 (2003/10/16-9 A) en considérant que les conditions de l’exercice collégial du contrôle ne sont pas remplies, si l’un des commissaires n’exécute aucun des travaux d’audit et si son intervention ne représente que 3 % du budget total accordé aux auditeurs.

11La norme 1-201 de la Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes exige également une participation équilibrée des co-commissaires. Le contenu de cette norme se limite à l’énonciation de principes généraux, précisant que la notion d’équilibre ne peut pas être assimilée à un simple partage à parts égales des honoraires.

12La norme d’exercice professionnel homologuée le 10 avril 2007 [4] qui se substitue à la norme 1-201 clarifie les principes qui régissent l’exercice collégial de l’audit des comptes en introduisant des prescriptions plus précises concernant la conduite d’une mission de co-commissariat. Elle définit les diligences qui doivent être menées par chaque commissaire aux comptes et celles qui doivent résulter d’une action concertée. Elle instaure également le principe de rotation de tout ou partie des travaux entre les co-commissaires, favorisant le développement des compétences de ces derniers en chacun des aspects de la mission.

13Le Code de déontologie de la profession de commissaire aux comptes du 9 juillet 2008 [5] complète la norme d’exercice professionnelle en précisant que le niveau des honoraires perçus par le commissaire aux comptes ne doit pas porter atteinte à son objectivité ou à son indépendance. En vertu de l’article 31 du Code de déontologie, les honoraires versés à des commissaires aux comptes doivent être « en rapport avec l’importance des diligences à mettre en œuvre, compte tenu de la taille, de la nature et de la complexité des activités de la personne ou de l’entité dont les comptes sont certifiés ». Cette règle est destinée à éviter certaines situations de déséquilibre manifeste relevées par l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) et la Commission des Opérations de Bourse (COB) dans lesquelles l’un des co-commissaires percevait 97 % des honoraires contre seulement 3 % pour l’autre. Les honoraires facturés par le commissaire aux comptes ne doivent pas non plus créer de dépendance financière à l’égard du client. L’article 34 du Code de déontologie précise qu’il y a présomption de dépendance financière pour un cabinet de commissariat aux comptes lorsque le « total des honoraires perçus dans le cadre de la mission légale représente une part significative du chiffre d’affaires total du cabinet ». Aucun seuil n’est toutefois défini. Enfin, concernant l’indépendance réciproque des commissaires, l’article 17 du Code de déontologie dispose que les co-commissaires désignés doivent appartenir à des structures d’exercice professionnel distinctes, c’est-à-dire qui n’appartiennent pas à un même réseau et qui n’ont pas de liens capitalistiques ou financiers. Ces nouvelles règles qui viennent enrichir les interprétations effectuées par le CDI sont contrôlées par le H3C.

1.1.2 – Le contrôle des situations de co-commissariat déséquilibré

14Le H3C est habilité à émettre des avis sur des questions déontologiques à partir de situations particulières qui lui sont soumises par les commissaires aux comptes ou par les autorités mentionnées par le législateur [6]. Le Haut Conseil n’a pas vocation à trancher des litiges ou à jouer le rôle d’arbitre. Il analyse les situations qui lui sont soumises en vue de formuler une réponse de principe susceptible d’être appliquée à des cas similaires. Depuis sa Constitution, le H3C a été saisi à trois reprises par l’Autorité des marchés financiers (AMF) concernant des situations de co-commissariat aux comptes déséquilibré. Il précise dans trois avis (le 22 mai 2006 [7], le 22 novembre 2007 et le 1er juillet 2008) les caractéristiques d’une répartition équilibrée des travaux entre des co-commissaires aux comptes. Le H3C considère que le volume des heures de travail de chaque commissaire ne doit pas être disproportionné. Il ajoute qu’un déséquilibre est possible à la condition d’être justifié par des critères tels que l’expérience ou la qualification des équipes de travail et de ne pas faire obstacle à la mise en œuvre des diligences spécifiques. Dès lors, si chaque commissaire aux comptes parvient à justifier par des critères qualitatifs qu’il est en mesure d’accomplir toutes les diligences requises par la profession, une répartition des honoraires de 75 % pour l’un des co-commissaires et 25 % pour l’autre n’est pas nécessairement déséquilibrée. Selon le Haut Conseil, la réalité doit primer sur l’apparence.

15Ainsi, les précisions apportées par le Code de déontologie, par la récente norme d’exercice professionnel et par le H3C vont dans le sens d’un contrôle plus strict des situations de co-commissariat aux comptes déséquilibré. Ces précisions sont d’autant plus précieuses que la littérature académique souligne le manque d’efficacité de ce dispositif du gouvernement d’entreprise.

1.2 – Un dispositif dont l’efficacité est contestée

16Les chercheurs en audit se sont intéressés tardivement à l’efficacité du co-commissariat. Les premières études remontent à 2002 et se cristallisent autour de la notion d’efficacité de la réglementation.

17Bennecib (2002 ; 2004) propose d’évaluer l’efficacité du co-commissariat aux comptes à partir d’une analyse de la perception des tiers. Selon elle, le co-commissariat aux comptes peut être considéré comme efficace s’il conduit à améliorer la confiance que les tiers accordent au rapport d’audit. L’Expectation Gap, c’est-à-dire l’existence d’un décalage entre les attentes des auditeurs et celles des lecteurs du rapport d’audit, a été mise en évidence aux États-Unis (Holt et Moizer, 1990) et en France (Gonthier-Besacier, 1996 ; 1998 ; 2001). Si la plupart des utilisateurs jugent l’intervention du commissaire aux comptes utile et « font confiance à l’impartialité de l’opinion émise » dans le rapport d’audit, ils expriment néanmoins des réserves concernant l’efficacité du contrôle (Gonthier-Besacier, 2001, p. 162). En imposant un contrôle réciproque des auditeurs et en diminuant le risque de collusion entre l’auditeur et la direction de l’entreprise contrôlée, le co-commissariat pourrait contribuer à réduire cet Expectation Gap. L’efficacité réelle du dispositif dépendrait donc de l’indépendance des co-commissaires telle qu’elle est perçue par les tiers.

18D’autres chercheurs étudient l’efficacité du co-commissariat aux comptes à partir d’une analyse des honoraires d’audit répartis entre les auditeurs. Les honoraires d’audit sont en effet fréquemment utilisés pour mesurer la qualité de l’audit (André et al., 2008 ; Audousset-Coulier, 2008 ; 2009). Le Maux (2004, p. 1) conteste l’efficacité d’un dispositif qu’il considère comme « une mauvaise utilisation du capital humain » en soulignant l’existence d’un déséquilibre important dans les honoraires perçus par les co-commissaires aux comptes en charge d’un même dossier. Ces déséquilibres furent régulièrement soulignés dans les rapports annuels de la COB et de l’AMF. En 2007, l’AMF constate quelques situations de fort déséquilibre parmi les sociétés du CAC 40 et pointe du doigt trois sociétés, Michelin, Axa et Essilor, pour lesquelles la différence dans la rémunération des co-commissaires était de l’ordre de 1 à 10.

19Les explications de ce différentiel divergent. Selon Le Maux (2004, 2006), les entreprises contraintes par la loi à la nomination de deux commissaires aux comptes se conformeraient à l’obligation légale pour éviter des sanctions juridiques et économiques. Mais en réalité, l’essentiel du travail de contrôle serait conduit par un auditeur qui percevrait la quasi-totalité des honoraires. Le second auditeur, nommé « pour la forme », serait moins un co-commissaire aux comptes qu’un « sous-commissaire » aux comptes. Contestant cette interprétation, Noël (2005) montre que le différentiel de rémunération résulte partiellement de la prime de réputation telle qu’elle est définie par Simon et Francis (1988). En effet, lorsque les co-commissaires aux comptes intervenant sur un dossier ont un même niveau de réputation (par exemple lorsqu’il s’agit de deux cabinets membres des Big four), l’écart de rémunération serait réduit à 25 % (contre 54 % en moyenne). Le Maux (2006) ajoute que le différentiel d’honoraires s’explique non seulement par la différence de réputation des commissaires aux comptes mais également par la taille et les caractéristiques de la société auditée. Ainsi, le différentiel est d’autant plus important que la taille de la société auditée est grande et que la part des éléments incorporels dans son bilan est importante. Ces éléments tendraient à démontrer que le co-commissariat aux comptes n’est pas un outil légitime de gouvernance.

20Les critiques formulées à l’encontre du co-commissariat ne sont toutefois pas unanimes. Piot et Janin (2005) soulignent que le co-commissariat est perçu comme présentant les deux avantages suivants : il offre la possibilité d’une vérification réciproque des diligences mises en œuvre par les auditeurs et il renforce l’indépendance des auditeurs. Mais le co-commissariat aux comptes ne conduit pas systématiquement à une amélioration de la qualité de l’audit. Francis et al. (forthcoming) montrent ainsi que la qualité de l’audit mené par des co-commissaires dépend de leurs profils respectifs. Ainsi, l’association de deux Big Four produirait un audit de meilleure qualité que l’association d’un seul Big four à un autre cabinet, lequel serait préférable à l’association de deux cabinets n’appartenant pas aux Big Four. Un co-commissariat basé sur la coopération de deux Big Four contribuerait à réduire l’incertitude de l’information financière communiquée par les dirigeants. Au contraire, Marmousez (2008) montre à partir d’un échantillon plus restreint que l’efficacité du co-commissariat dépendrait de la complémentarité des auditeurs. Ses résultats suggèrent que la qualité de l’audit serait moindre lorsque le co-commissariat est assuré par deux auditeurs membres des Big Four. En effet, ceux-ci mettent en œuvre des méthodes de travail comparables et disposent d’un niveau de réputation similaire, ce qui les conduit à se fier davantage aux conclusions de leurs collègues et à faire preuve d’une moins grande vigilance. Seules des interactions entre un membre des Big Four et un auditeur indépendant favoriserait une réelle confrontation des approches et des travaux.

21Ces données expliquent en partie le constat selon lequel l’appartenance des co-commissaires à un Big four a un impact sur le délai de signature du rapport d’audit et sur le montant des honoraires versés. Piot (2007, 2008) montre que le délai de signature du rapport d’audit tend à diminuer au fur et à mesure que le nombre de Big four parmi les auditeurs augmente. Selon Gonthier-Besacier et Schatt (2007), lorsque les deux co-commissaires font partie d’un Big four, les honoraires d’audit, ajustés en fonction de la taille de l’entreprise auditée, seraient nettement inférieurs à ceux perçus dans d’autres configurations. Ces éléments pourraient conduire à remettre en cause l’efficacité du co-commissariat lorsqu’il est conduit par deux auditeurs choisis parmi les Big four.

22Ainsi, les études existantes appréhendent l’efficacité du dispositif du co-commissariat aux comptes en pointant ses lacunes et ses avantages. Mais elles ne parviennent pas à montrer la raison d’être de cette spécificité du gouvernement d’entreprise français. La sociologie juridique peut nous éclairer sur ce point en soulignant les limites inhérentes à certaines des méthodologies précitées et en dévoilant les intentions réelles du législateur.

2 – Le cadre théorique : le droit a ses raisons que la raison financière ignore

23La recherche en comptabilité et en gouvernement d’entreprise a été fortement influencée par la psychologie, la sociologie (Gendron et Baker, 2001) ou même les neurosciences et l’économie du droit (Charreaux, 2005). Par contre, le cadre conceptuel de la sociologie juridique demeure largement inexploité par les chercheurs en comptabilité. Cela peut s’expliquer en partie par le faible nombre des recherches francophones au croisement du droit et de la gestion. Comme le montre Rossignol (2003 : 64), de telles recherches sont rares en France : à titre d’exemple, moins de 1 % des articles publiés dans la Revue Française de Gestion étudient ou intègrent la variable juridique.

24Or, la sociologie juridique en général et la pensée de Carbonnier en particulier peuvent apporter des éléments d’analyse essentiels pour comprendre les écarts apparents existant entre les prescriptions législatives et les pratiques concrètes.

2.1 – Carbonnier ou la rencontre de la sociologie et du droit

25Jean Carbonnier (1908-2003) fut professeur, puis Doyen à la Faculté de droit de 1937 à 1976. Il contribua au renouvellement du Code civil, notamment dans le domaine du droit de la famille, et conseilla, jusqu’à sa mort, le législateur pour de nombreuses réformes sur le divorce ou sur le droit des successions (2001). Il est le fondateur de la sociologie du droit en France. Carbonnier (2004 : 16) définit la sociologie du droit comme une branche de la sociologie générale qui a pour objet une variété spécifique de phénomènes sociaux, à savoir les phénomènes juridiques. La sociologie du droit (ou sociologie juridique) étudie les phénomènes juridiques en prêtant attention aux pratiques des acteurs du droit, et non simplement aux textes réglementaires. C’est ce qui permet de la distinguer de la théorie du droit, qui ne s’intéresse pas aux comportements sociaux, et de la philosophie du droit qui se focalise sur les concepts et principes fondamentaux du droit. La sociologie du droit ne prétend pas atteindre l’essence de la juridicité. Elle se contente de cerner le phénomène, c’est-à-dire l’apparence. Carbonnier est porteur d’une conception élargie de la sociologie du droit, puisqu’elle se nourrit des apports de disciplines connexes telles que l’ethnologie, la psychologie ou encore la philosophie (2004 : 69). Carbonnier présida pendant près de quinze ans le Comité de direction de l’Année sociologique et contribua par exemple à l’utilisation d’instruments d’enquêtes sociologiques, comme le sondage, afin d’appréhender la « demande de droit » exprimée par les citoyens. Ses ouvrages de réflexion sur le droit sont devenus des classiques de la discipline juridique (1958 ; 2001 ; 2004 ; 2008).

26Dans Flexible droit (2001), Carbonnier fonde sa vision sociologique sur les hypothèses d’évolution et de structure. L’hypothèse d’évolution situe le droit dans le temps. La sociologie juridique doit saisir le phénomène juridique dans un mouvement historique (Carbonnier, 2001 : 9), puisque le droit, comme tout élément social, est sujet à transformations. L’hypothèse de structure est une voie intermédiaire entre le monisme de Kelsen (1962), qui ne reconnaît qu’une seule autorité compétente de création du droit, à savoir l’État, et le pluralisme juridique de Gurvitch (1935 ; 1940), selon lequel le pouvoir de créer du droit n’est pas le monopole de l’État, car il réside dans les faits normatifs qui sont au cœur de la vie sociale. Carbonnier (2001 : 208) s’oppose au monisme juridique car, selon lui, le droit est essentiellement « multiple et hétérogène ». Par exemple, dans le domaine de l’audit, le législateur, le H3C, le CDI ainsi que les organismes professionnels tels que la Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes sont les foyers de création du droit. Carbonnier se démarque également du pluralisme juridique qui confond les phénomènes juridiques et les phénomènes infrajuridiques et risque de conduire à un alignement du droit sur les faits.

27Les hypothèses d’évolution et de structure définies par Carbonnier justifient notre posture méthodologique. En effet, conformément à l’hypothèse d’évolution, nous avons choisi d’étudier l’évolution des objectifs du législateur dans le temps en analysant les débats parlementaires de 1966, de 1984 et de 2003. Conformément à l’hypothèse de structure, nous sommes allés au-delà de l’analyse du texte légal afin d’étudier tout à la fois les déclarations des parlementaires, des membres du gouvernement et des professionnels de l’audit.

2.2 – Les limites de l’exigence d’effectivité matérielle

28La pensée de Carbonnier permet de prendre des distances avec la notion d’efficacité du droit et de se démarquer ainsi de la recherche académique consacrée au co-commissariat. Elle a ceci en commun avec la pensée de Gurvitch (1940) qu’elle ose regarder plus loin que la simple application des règles juridiques, considérant les faits et les pratiques sociales non plus comme des choses mais comme susceptibles d’être pénétrés de valeurs juridiques et morales. Reprise par le courant sociologique contemporain (Lascoumes et Serverin, 1986 ; Lascoumes, 1988 ; Serverin, 2000 ; Lascoumes, 2005), la sociologie de Carbonnier fait donc voler en éclat l’idée d’un droit dont les seuls fruits seraient l’effectivité matérielle des prescriptions législatives. Selon lui, la force d’une loi n’est à rechercher ni dans son application apparente, ni dans les sanctions dont elle serait assortie, car l’exigence d’une effectivité matérielle, voire intégrale, de la loi est vaine et fallacieuse : « la phrase banale, que les règles de droit sont faites pour s’appliquer, quoi qu’elle ait l’air d’un truisme, n’est pas une vérité » (Carbonnier, 2001, p. 143). L’effectivité est un idéal théorique qui n’est quasiment jamais atteint et dévoile, entre effectivité totale et ineffectivité totale, toute une série d’états intermédiaires.

29À la différence de l’effectivité matérielle qui résulte de l’application de sanctions en cas de violation de la règle ou de l’application de la règle par seule crainte des sanctions (Kelsen, 1962), l’effectivité symbolique ne peut être dévoilée qu’à partir d’un travail sur les valeurs sous-jacentes à une règle juridique. Elle semble proche du concept d’efficacité en ce qu’elle s’appuie sur une analyse des objectifs du législateur. Mais les deux notions ne se confondent pas, car l’effectivité symbolique implique non seulement une transformation des pratiques mais également une transformation des consciences. Une telle approche conduit à porter une attention particulière aux valeurs qui animent le législateur, puis à mettre en perspective les intentions partagées par le législateur et les intentions perçues par les sujets de droit.

30Partant de l’idée que l’effectivité intégrale est pour ainsi dire impossible, Carbonnier s’intéresse aux causes d’ineffectivité. Selon lui, l’ineffectivité de la loi doit être comprise comme un phénomène nécessaire pour quatre raisons :

  1. De nombreuses lois sont purement facultatives et laissent une large marge de choix aux acteurs concernés. L’importance des lois interprétatives (et non ouvertes), des lois à contenu variable (et non immédiatement opérationnelles) et des lois instrumentales (et non formelles) a été l’un des objets récurrents de réflexion des approches sociologiques (Reynaud, 1997) et juridiques (Perelman et Vander Elst, 1984 ; Ost et Van De Kerchove, 1988 ; Arnaud, 1993). Si les lois ne font que des propositions, l’effectivité de la loi « se situe non dans l’action, mais dans la liberté même, c’est-à-dire dans le pouvoir de choisir l’inaction aussi bien que l’action » (2001, p. 143).
  2. La loi pénale de sanction, comme par exemple l’article L 820-4 prévoyant une peine d’emprisonnement et une amende pour les dirigeants qui n’auraient pas respecté l’obligation de nommer deux co-commissaires aux comptes alors qu’ils rentrent dans le champ d’application de ce dispositif, a vocation à être ineffective. Deux règles coexistent au sein de la loi pénale : la prohibition dont l’effectivité est difficile à mesurer et la sanction qui est facile à mesurer, mais révèle tout le contraire de l’effectivité d’une loi pénale. En effet, dans l’hypothèse d’une sanction pénale, la règle de sanction est effective, mais la règle de prohibition, plus importante, est ineffective. Ainsi, « bien souvent, il n’y a pas de poursuite parce qu’il n’y a pas d’infraction, et l’absence d’infraction peut s’expliquer fort naturellement par l’action psychologique de la prohibition pénale. Ce qui est tout l’opposé d’une impuissance des lois : cette loi-ci peut même être dite la plus effective de toutes, quoique son accomplissement soit invisible et immatériel » (2001, p. 144). Il se peut donc que l’absence d’augmentation du contentieux pénal soit le signe de l’action psychologique de la prohibition pénale et non l’indice patent d’un échec de la loi. Comme le souligne François Rangeon (1989 : 144), « les statistiques portant sur le contentieux donnent une image déformée du droit, réduit à une pathologie de ses difficultés d’application. Elles ne permettent pas de mesurer le degré d’application paisible, voire spontanée ou inconsciente d’un texte. »
  3. Carbonnier met en exergue l’ineffectivité statistique de la sanction. Les sanctions pénales sont loin de concerner l’ensemble des infractions pénales. Aussi, en matière de prévention pénale, l’ineffectivité est à rechercher non seulement dans le décalage entre la criminalité apparente (nombre de crimes connus de la police) et la criminalité légale (nombre de crimes sanctionnés par les tribunaux répressifs) mais également dans le décalage entre la criminalité réelle et la criminalité apparente. Lascoumes (2005) souligne que la visibilité de certains faits délictueux est très faible. La corruption des personnes chargées d’effectuer un contrôle constitue, selon lui, une infraction particulièrement peu visible, exigeant un travail d’investigation à partir d’indices et d’informations en faible nombre. Les travaux de Lascoumes enrichissent l’analyse de Carbonnier en montrant l’importance des lois dont l’objet est d’accroître la visibilité des infractions réelles et les possibilités de signalement à une agence de contrôle.
  4. Enfin, les lois, même inappliquées, peuvent se révéler efficaces, car dans l’ordre symbolique, elles exhibent un idéal, créent un climat de « mauvaise conscience » qui agit sur la criminalité réelle. Comme l’énonce également Lascoumes (2005), ces lois symboliques augmentent dans le monde immatériel l’effectivité des règles de prohibition.

Graphique 1

Les liens entre effectivité, efficacité et efficience d’une règle de droit

Graphique 1

Les liens entre effectivité, efficacité et efficience d’une règle de droit

31Ces arguments développés par Carbonnier montrent qu’il n’est possible d’induire ni l’effectivité symbolique de l’absence d’infractions, ni l’ineffectivité symbolique de l’existence d’infractions. Notre analyse de l’effectivité symbolique du co-commissariat doit se porter sur les intentions du législateur.

2.3 – L’effectivité symbolique et l’analyse des objectifs du législateur

32Carbonnier préfère à la notion d’effectivité matérielle ou comportementale celle d’effectivité symbolique qui se rapproche du concept de légitimité. Une règle juridique est effective parce que les individus la considèrent comme légitime (Carbonnier, 1958). Or, la règle est légitime parce que les individus considèrent les intentions du législateur qui en sont le support comme légitimes. Le législateur peut adopter une loi, non pas pour en exiger une application systématique ou minutieuse, mais pour exprimer son attachement à des valeurs dont on ne peut écarter qu’elles soient également morales (Ost et Van de Kerchove, 1988). Dans cette perspective, la loi a moins la fonction de se faire respecter par la contrainte que celle de diriger les consciences. La vertu de la loi est alors dite pédagogique.

33Carbonnier montre que la fonction pédagogique de la loi est d’autant plus aisée à comprendre qu’on s’éloigne de la vision de la Loi-gendarme. La socialisation s’opère selon lui de façon plus subtile par l’exemple et le spectacle des institutions juridiques existantes : le contrôle, le contrat, l’information… La vertu éducatrice et moralisatrice n’est pas réservée à certaines lois. Toutes les lois portent en elles une fonction pédagogique. Certaines lois qui interdisent les délits des affaires ont un effet pédagogique direct, puisqu’elles ont pour objet de rappeler des principes moraux régissant les comportements sociaux dans l’entreprise. D’autres lois sont pédagogues d’une éthique, certes moins manifeste, sauf à considérer de près les explications qui accompagnent la loi et qui visent à susciter le respect de certaines valeurs.

3 – L’effectivité symbolique du dispositif du co-commissariat aux comptes

34Dans le cadre de la sociologie du droit de Carbonnier, l’étude de l’efficacité du dispositif du co-commissariat aux comptes ne peut pas se fonder sur la seule analyse des pratiques des entreprises. Il s’agit plutôt de vérifier si les intentions du législateur sont connues et assimilées par les acteurs. Après avoir expliqué la méthodologie utilisée, nous présentons puis discutons les principaux résultats dégagés à l’occasion de notre recherche.

3.1 – Méthodologie de l’étude

35S’appuyant sur une démarche qualitative, cette étude vise à dévoiler le sens donné par le législateur au dispositif du co-commissariat et à savoir si cette vision a été comprise par les acteurs économiques en général et par les commissaires aux comptes en particulier.

3.1.1 – Méthode de collecte et d’analyse des données relatives aux intentions du législateur

36Afin de connaître les intentions du législateur, nous avons conduit une analyse de contenu à partir des débats et travaux parlementaires menés en 1966, en 1984 et en 2003 préalablement à l’adoption et à la modification du dispositif du co-commissariat aux comptes. Notre démarche de collecte et de traitement des débats et des travaux parlementaires s’appuie sur des méthodes et des formats de présentation des données préconisés par Miles et Huberman (1991). Elle s’articule en trois phases : la condensation des données, la présentation des données et l’élaboration des résultats.

37Dans une première étape, nous avons retranscrit dans un fichier word les extraits des débats et des travaux parlementaires portant sur le dispositif de co-commissariat aux comptes [8]. Le fichier word obtenu représente 49 pages, soit près de 27 000 mots, qui ont été extraits des 500 pages environ correspondant aux débats et rapports parlementaires relatifs aux trois réformes successives du droit des sociétés et de l’audit. La liste des références utilisées dans cette étude figure dans l’annexe 1.

38La seconde étape de la recherche a consisté à identifier les arguments présentés dans ces échanges en vue de connaître la façon dont les parlementaires appréhendaient le co-commissariat. Le volume des débats nous a semblé insuffisant pour procéder à une analyse lexicale par l’intermédiaire d’un logiciel de traitement. En outre, une simple analyse de la fréquence d’apparition d’un concept n’aurait pas suffià dévoiler les objectifs symboliques du législateur. Ceux-ci nécessitent une analyse littéraire des arguments présentés. Nous avons donc recensé manuellement les arguments justifiant le co-commissariat, puis nous les avons triés en les regroupant par thème afin de dégager les avantages attendus de ce dispositif. Le dictionnaire thématique réalisé à partir de cette analyse figure dans l’annexe 2.

3.1.2 – Méthode de collecte et d’analyse des données relatives aux perceptions des acteurs économiques

39Les perceptions des objectifs visés par le législateur ne pouvaient pas être appréhendées à partir d’une analyse statique d’entretiens conduits en 2009. Afin de comprendre les visions des acteurs économiques, nous avons analysé les articles publiés dans la presse économique et professionnelle en 1966 [9] et de 1984 à 2008. Nous avons pour cela utilisé les bases de données Delphes et Factiva pour recenser les articles publiés en matière d’audit légal de 1984 à 2008 et avons complété cette recherche par un recensement manuel. Nous avons dénombré au total 186 articles relatifs à l’audit légal et avons identifié 34 textes mentionnant le dispositif du co-commissariat. Nous avons procédé à une analyse de contenu afin de vérifier si les objectifs du législateur qui émergent de l’analyse des débats et travaux parlementaires sont présents dans les articles de presse. Le dictionnaire thématique issu de l’analyse des articles recensés figure dans l’annexe 3.

3.2 – Résultats de l’étude

40Notre étude révèle que les intentions symboliques et matérielles du législateur sont globalement comprises par les acteurs économiques. Trois objectifs sont mentionnés par le législateur et assimilés par les acteurs économiques :

  • le renforcement de la transparence et de la sécurité financière ;
  • l’amélioration de l’indépendance des auditeurs et de la qualité de l’audit ;
  • la limitation de l’hyper-concentration du marché de l’audit légal.

3.2.1 – Premier objectif du législateur : renforcer la transparence et la sécurité financière pour restaurer la confiance

41Le co-commissariat est présenté par le législateur comme un moyen de renforcer la transparence et la sécurité financière et de réduire les risques de fraude de la part des entreprises les plus importantes. Cet objectif est le seul présent lors de l’institution du dispositif du co-commissariat aux comptes en 1966 (AN, 1/6/1965 ; AN, 10/6/1966). En effet, dans les années 1960, le commissariat aux comptes est encore en France une pratique exercée par des personnes physiques dotées de peu de moyens. Comme le souligne Ramirez (2003 : 16) « Avant la réforme de 1969, le commissariat aux comptes est davantage une fonction pour l’obtention et l’exercice de laquelle le capital social prime sur la maîtrise des savoirs comptables. Étant donné la rémunération souvent faible des missions, l’étendue et la profondeur des diligences mises en œuvre ne semblent pas permettre d’asseoir le commissariat sur une base technique consistante ». Dans ce contexte, le fait d’exiger la collaboration de deux commissaires aux comptes pour le contrôle des entreprises les plus importantes semble une réelle nécessité pour garantir leur sécurité financière.

42Ce désir de renforcer la sécurité financière ne donne lieu à aucune argumentation de la part des parlementaires de 1966. Que l’action conjointe de deux commissaires soit plus crédible que l’action d’un seul est présentée comme une évidence qui n’a pas besoin d’être démontrée. Alors que le commissariat aux comptes est désormais largement dominé par de grands cabinets multinationaux disposant d’une approche technique comparable, la contribution du co-commissariat au renforcement de la sécurité financière n’est pas remise en cause par le législateur. Elle est même maintenue dans les débats de 1984 et de 2003, mais sans discussion plus approfondie. Seuls quelques échanges portant sur des situations de co-commissariat déséquilibré ont été l’occasion pour le législateur de rappeler l’importance pour les parties prenantes de la communication sur les rémunérations versées à chacun des commissaires aux comptes. « C’est vis-à-vis du marché que la société portera la responsabilité d’un co-commissariat bancal. Par la pratique d’un co-commissariat cosmétique, les bénéficiaires disposeront d’un élément supplémentaire pour juger de la qualité de la certification et in fine de l’information délivrée » (AN, Rapport n° 807, présenté par F. Goulard, au nom de la commission des finances). Dans l’esprit du législateur, l’existence de situations de co-commissariat aux comptes déséquilibré ne prive pas le dispositif de sa pertinence. Au contraire, les acteurs disposent ainsi d’une information supplémentaire concernant la qualité des informations financières diffusées et la crédibilité de leur certification.

43L’analyse de la presse économique révèle que cet objectif à forte connotation symbolique est connu des professionnels, mais sujet à critiques. On peut recenser quelques articles remettant en cause la pertinence du co-commissariat (5 articles sur 34). Ces articles, publiés entre 1984 et 2008, se focalisent sur l’existence de situations de co-commissariat déséquilibrées et le coût induit par l’obligation légale. Ce premier objectif n’étant plus tout à fait suffisant pour légitimer le dispositif du co-commissariat aux comptes, les parlementaires ont avancé d’autres arguments pour justifier sa pérennisation.

3.2.2 – Deuxième objectif du législateur : améliorer l’indépendance des commissaires aux comptes et la qualité de l’audit

44Le deuxième objectif visé par le législateur à l’occasion des débats parlementaires portant sur le co-commissariat est de favoriser l’indépendance des auditeurs légaux afin d’améliorer la qualité de l’audit. En 1984, les principales critiques formulées dans les débats parlementaires portent sur les charges supplémentaires auxquelles doivent faire face les sociétés faisant appel public à l’épargne contrainte au double commissariat. Ces critiques obligent les députés à justifier le maintien et l’extension du dispositif. L’indépendance des commissaires aux comptes est alors présentée comme l’objectif premier et décisif : dans la relation « à la direction générale, aux responsables de gestion », « mieux vaut être deux que tout seul. La solitude du co-commissaire aux comptes n’est pas toujours une bonne chose, d’autant que des liens peuvent s’établir, avec l’habitude, entre contrôleurs et contrôlés » (AN, 3/2/1984) ; « Pour que les demandes à l’égard des dirigeants aient des chances d’être satisfaites, la dualité est un argument déterminant. En supprimant cette obligation, on altère incontestablement l’efficacité politique du contrôle » (AN, 5/12/1983). L’indépendance est mieux assurée par une pluralité de cabinets en face d’une grande direction générale que par une pluralité de collaborateurs relevant d’un même cabinet.

45Ainsi, dans l’esprit du législateur, la qualité de l’audit légal dépend non seulement de la compétence technique (Citron and Taffler, 1992 ; Lee and Stone, 1995 ; Richard, 2006) et éthique (Fortin and Martel, 1997, Richard, 2006 ; Prat dit Hauret, 2003 ; Ponemon, 1990), mais aussi relationnelle de l’auditeur (Richard, 2000). Pour accomplir sa mission, l’auditeur doit veiller à établir une relation de confiance avec le personnel de l’entreprise contrôlée ainsi qu’avec la direction (Richard et Reix, 2002). Certes, la confiance établie entre un commissaire aux comptes et son client est de nature à accroître la longévité de la relation d’audit et à minimiser les risques de conflits ou d’incidents. Mais en cas de survenance d’un désaccord ou d’un conflit, le fait de se sentir relayé et conforté par un confrère peut conférer plus de force au commissaire aux comptes et favoriser son indépendance réelle. De ce point de vue, les bienfaits de la collaboration sont essentiellement symboliques, reposant sur l’idée qu’en cas de tensions, il est plus aisé pour deux commissaires aux comptes que pour un seul de faire part aux clients d’une difficulté. Cet objectif est mentionné à de multiples reprises dans les articles publiés dans la presse économique et professionnelle de 1984 à 2008 (cf. annexe 3).

3.2.2 – Troisième objectif du législateur : lutter contre la concentration du marché de l’audit

46Enfin, le législateur a exprimé la volonté de lutter contre la concentration du marché de l’audit. Cet objectif est suggéré dès 1984 : la suppression de l’obligation du double commissariat « pénaliserait les cabinets français et réduirait leurs possibilités d’extension, de notoriété et de rayonnement à l’étranger » (AN, 3/2/1984). Le co-commissariat aux comptes constitue de ce point de vue un moyen d’éviter que la quasi-totalité des mandats correspondant aux grandes entreprises françaises soient confiés aux actuels Big Four.

47Ramirez (2003 : 66) souligne que le marché de l’audit en France est construit sur la « confrontation d’un modèle professionnel qui donne la primauté à l’individu et d’un modèle qui conjuguant taille et prestige, a placé au sommet de la profession des organisations devenues aujourd’hui de véritables entreprises multinationales ». Si l’audit légal n’était confié qu’à un seul commissaire, il est probable que les sociétés cotées ne feraient appel qu’aux Big four, seuls acteurs capables d’offrir partout dans le monde des méthodes de travail uniformes. D’ailleurs, toutes les entités du CAC 40 ont au moins un de leurs commissaires aux comptes issu de l’un des Big four (AMF, 2007). Et sur l’ensemble des sociétés qui font appel public à l’épargne, seuls 5 % des mandats ont été confiés à des auditeurs autres que les Big four.

48Le législateur craint que la suppression du co-commissariat conduise à accroître encore davantage le phénomène d’hyper-concentration, voire de « cartélisation » du marché de l’audit (Pigé, 2003). Piot (2006) montre en effet que la concentration s’est accrue globalement entre 1997 et 2003 sur le marché de l’audit. Les ratios de concentration confirment une « tendance vers l’oligopole restreint, signe d’un marché globalement non concurrentiel ».

49Cet objectif, à la différence des deux autres, ne semble pas être porteur d’une vertu symbolique, le législateur cherchant avant tout à faire preuve de pragmatisme économique. Si les trois objectifs visés par le législateur peuvent être relevés dans la presse économique, l’objectif matériel de maintien des forces économiques apparaît de loin comme celui qui a été le plus fréquemment mentionné. En effet, les deux tiers des articles de presse recensés font expressément référence au dispositif du co-commissariat comme un moyen de lutter contre l’hyperconcentration du marché de l’audit.

3.3 – Discussion, limites de l’étude et perspectives de recherche

50Les deux premiers objectifs du législateur, à savoir le renforcement de la crédibilité et de l’indépendance réelle des commissaires aux comptes, sont étroitement liés, l’indépendance des cabinets participant à la sécurité financière. Ils traduisent une vision symbolique selon laquelle le co-commissariat permet la confrontation et l’expression de deux points de vue et garantit ainsi un meilleur contrôle. Le troisième objectif relatif à la protection économique des cabinets français est apparu plus tardivement à l’occasion des débats parlementaires de 1984 et 2003. Contrairement aux deux objectifs précédents, il relève davantage de l’ordre matériel que de l’ordre symbolique.

3.3.1 – Des limites de notre étude

51Faut-il induire de l’importance accordée par la presse à la structure du marché de l’audit que les objectifs à forte connotation symbolique consistant à développer une force d’action plus diversifiée en vue de faire contrepoids au pouvoir du dirigeant sont moins importants aux yeux des professionnels que les objectifs économiques et matériels ? Rien n’est moins sûr, car la presse économique et professionnelle accorde souvent, pour des raisons éditoriales, plus d’intérêt aux considérations pratiques et matérielles qu’à une réflexion de fond sur le sens du métier d’auditeur. Il est donc difficile de hiérarchiser l’importance relative que les acteurs économiques accordent à chaque objectif, à partir d’une simple analyse de la presse. Il est seulement possible d’affirmer que les objectifs symboliques et matériels du législateur sont globalement identifiés et compris par les acteurs économiques.

52Comment dès lors apprécier l’effectivité de chacun des objectifs du législateur ?

53Les travaux précités de Carbonnier nous ont permis de montrer que l’effectivité matérielle du dispositif du co-commissariat ne peut pas être mesurée à la lumière de l’analyse des pratiques, et, en particulier, à partir du seul constat d’une difficulté de mise en œuvre que serait le déséquilibre des rémunérations. Il n’est pas non plus possible d’affirmer que la fluidité du marché de l’audit serait tout aussi importante si le dispositif du co-commissariat n’existait pas. Et même si la présence des Big four est moindre en France qu’en Grande-Bretagne où le dispositif du co-commissariat aux comptes n’a pas été instauré (André et al., 2008), les liens de cause à effet entre un dispositif légal et des comportements économiques et sociaux sont difficiles à interpréter, dans la mesure où il est impossible d’isoler la variable juridique des autres facteurs économiques. On ne peut donc pas avancer avec certitude que le législateur a atteint son troisième objectif.

54Nous pouvons toutefois supposer une effectivité symbolique du dispositif, dans la mesure où les acteurs économiques semblent avoir compris les intentions du législateur. Cette orientation de recherche, axée sur la fonction symbolique de la loi, se heurte à une difficulté méthodologique : si les effets de la loi dans le monde matériel ne sont pas aisés à décrypter, l’identification des objectifs du législateur est également délicate. Non seulement ces objectifs ne sont pas toujours énoncés de manière claire et explicite par le législateur, mais ils résultent de compromis entre détenteurs d’enjeux et reflètent ainsi la synthèse d’intérêts divergents. Dès lors, l’intention du législateur doit être élucidée par le chercheur. Que des objectifs symboliques soient inhérents à cette intervention législative comme à toute intervention législative, quoiqu’à des degrés divers, est une évidence. Mais comment certifier qu’ils constituent les raisons véritables de la loi ? En outre, nous faisons l’hypothèse que les interviews rapportées dans la presse économique et professionnelle nous donnent accès à la conscience des acteurs, alors qu’un décalage important peut exister entre ce que les professionnels pensent et ce qu’ils déclarent à la presse.

3.3.2 – Perspectives de recherche

55L’étude de l’effectivité symbolique du dispositif du co-commissariat peut être enrichie dans les années à venir par une enquête conduite auprès des commissaires aux comptes et des parties prenantes de l’audit. Notre analyse de contenu fournit une base solide pour l’élaboration d’un questionnaire destiné à évaluer la manière dont les acteurs économiques ont été transformés par les objectifs symboliques du législateur. Il serait également intéressant de déterminer si des variables telles que l’âge ou l’appartenance à un Big Four peuvent avoir une influence sur les perceptions des objectifs du législateur par les acteurs.

56Enfin, la sociologie du droit de Carbonnier offre de nombreuses perspectives de recherche sur les autres thèmes du gouvernement d’entreprise. En permettant de mieux comprendre comment les multiples foyers créateurs du droit s’articulent, elle peut notamment servir à l’analyse de la portée symbolique des règles applicables à la rémunération des dirigeants ou aux parachutes dorés. Une étude conduite à partir des hypothèses d’évolution (comment la réglementation a-t-elle évolué au fil du temps ?) et de structure (quels sont les ordres juridiques auxquels les sujets de droit ont le sentiment d’appartenir ?) donne une vision plus globale des règles du gouvernement d’entreprise.

Conclusion

57En soulignant les limites des analyses classiques de l’efficacité des règles du gouvernement d’entreprise, nous souhaitons proposer un nouveau champ de recherche qui fait de la sociologie du droit un cadre d’analyse de la réglementation financière particulièrement prometteur, parce que « l’opposition traditionnelle entre la gestion et le droit est bien dépassée » et que « les deux approches sont pleinement complémentaires bien que différentes » (Rossignol, 2008 : 4).

58La sociologie du droit invite les chercheurs en comptabilité et en audit à reconnaître aux règles légales de la gouvernance d’entreprise une fonction pédagogique. Les lois sont des textes inspirés par un législateur qui « dévoilant ses mobiles, faisant luire ses fins, s’explique lui-même » (Carbonnier, 2001, p. 167). L’effectivité comme l’ineffectivité de la loi sont des questions qui suscitent la rencontre entre le chercheur, le professionnel et le législateur. Carbonnier souligne que cette rencontre est possible à une condition. Les chercheurs et professionnels doivent admettre que le législateur peut préférer « à la loi sèche qui commande » « la loi qui explicite les raisons qui font d’elle une loi juste, utile, désirable » (2001, p. 168). Ils doivent donc s’ouvrir et s’imprégner des explications du législateur afin de discerner les raisons de la loi. Il se peut que la valeur d’exemplarité des principes sous-tendant la loi (transparence, honnêteté, indépendance, réalité…) ait une incidence plus grande dans le monde matériel, quoi que difficilement observable, que les recommandations concrètes. Dès lors que les dispositifs légaux sont des moyens pour le législateur de proposer des valeurs communes (Supiot, 2005), les acteurs économiques peuvent entrevoir dans les institutions du gouvernement d’entreprise les manifestations d’un sens commun qui les dépasse et les transforme.


Annexe 1 - Liste des documents collectés et analysés

tableau im2
1966 1984 2003 Assemblée nationale – Débats parlementaires : compte-rendu intégral des débats de l’Assemblée nationale – Assemblée nationale : discussion d’un projet de loi sur les sociétés commerciales – séance du 1er juin 1965 (1965 N°38) – Séance du 10 juin 1966 (1966 N°47) Assemblée nationale – Débats parlementaires : compte-rendu intégral des débats de l’Assemblée nationale – Séance du 3 février 1984 (1984 N°9) – Séance du 5 décembre 1983 (1983 N°108) Sénat – Rapport de la Commission des lois (12/3/2003) – Rapport N° 206 de P. Marini fait au nom de la Commission des finances (12 mars 2003) – Compte rendu intégral des débats (18, 19 et 20 mars 2003) – Rapport N° 319 de P. Marini (28 mai 2003) – Compte rendu intégral des débats (5 juin 2003) Assemblée nationale – Rapport N° 807, de F. Goulard, au nom de la commission des finances (10 avril 2003) – Avis N° 712 de P. Houillon (8 avril 2003)

Annexe 2 - Dictionnaire thématique issu de l’analyse des débats parlementaires

tableau im3
Thème 1– Renforcer la transparence et la sécurité Sécurité financière – Transparence financière pour renforcer la confiance Crédibilité – Confiance Thème 2– Améliorer l’indépendance des Obtenir gain de cause – Solitude commissaires aux comptes et la qualité de l’audit Risques de collusion – Indépendance Efficacité politique Thème 3 – Limiter l’hyper-concentration du marché Mandarinat – Monopole – Équilibre – Compétition de l’audit légal Regroupement des cabinets

Annexe 3 - Dictionnaire thématique issu de l’analyse des articles de la presse économique

tableau im4
Thèmes Concepts clés Thème 1– Renforcer la transparence et la sécurité Sécurité financière financière pour renforcer la confiance Crédibilité des comptes Crédibilité du travail du commissaire aux comptes Confiance Thème 2– Améliorer l’indépendance des Indépendance des commissaires aux comptes commissaires aux comptes et la qualité de l’audit Qualité Thème 3 – Limiter l’hyper-concentration du marché Concentration de l’audit légal Fluidité du marché Ouvrir le marché

Annexe 4 - Liste des 34 articles de presse étudiés

Le Monde

5930 juin 2009 « Le secteur de l’audit se concentre autour de grands réseaux »

6014 octobre 2008 « Un continent où la concurrence entre les big four se renforce »

618 mai 2008 « Croissance contre transparence ? »

627 août 2007 « La concentration des cabinets d’audit inquiète Bruxelles »

6325 février 2005 « Audit : la concentration du secteur pose problème »

6425 février 2005 « L’indépendance des commissaires aux comptes en principe renforcée »

6531 juillet 2004 « Faire attention à conserver une force de frappe dans l’audit »

6627 février 2004 « La garantie des commissaires aux comptes en question »

6723 septembre 2003 « L’affaire Enron n’en finit pas de recomposer le paysage de l’audit et du conseil »

6818 décembre 2002 « Trois questions à Michel Tudel »

6923 novembre 2002 « La profession des commissaires aux comptes fait son mea culpa »

7014 novembre 2002 « Francis Mer souhaite plus de transparence »

7124 septembre 2002 « Les commissaires aux comptes prônent des réformes »

7217 septembre 2002 « Vers un renforcement du contrôle sur l’audit »

7328 mai 2002 « Peut-on construire une alternative crédible aux réseaux mondiaux ? »

7418 avril 2002 « Andersen décide de se rapprocher d’Ernst and Young »

7511 avril 2002 « La montée en puissance des commissaires aux comptes accroît leur responsabilité »

7622 octobre 1997 « Le mouvement de concentration dans les cabinets d’audit s’accélère »

773 décembre 1996 « Les cabinets comptables manquent d’indépendance et de moyens »

784 février 1995 « Les commissaires aux comptes veulent retrouver leur crédibilité »

794 juillet 1987 « Les commissaires aux comptes s’expliquent »

La Tribune

8024 octobre 2005 « Entretien avec William Parrett PDG de Deloitte »

817 août 2003 « Pas de confiance dans l’information financière sans crédibilité de l’audit »

826 février 2002 « Le monde de l’audit comptable dans l’onde de choc du séisme Enron »

La profession comptable

83Interview de V. Baillot, n° 297, octobre 2007

84Interview de P. Gounelle, n° 299, décembre 2007

85Interview de D. Kurkdjian, n° 310, novembre 2008

La revue Française de comptabilité

86Mai 2007, N° 399, « Concentration du marché de l’audit en France : un état des lieux », p. 34-37.

Option finance

8721 avril 2008 « Commissaires aux comptes : les raisons de la colère »

882 juillet 2007 « Polémiques autour du co-commissariat aux comptes »

8918 décembre 2006 « Grant Thornton France : Il faut élargir les possibilités de choix pour les entreprises »

9030 octobre 2006 « Audit : les cabinets indépendants ont la côte »

913 juillet 2006 « Patrick de Combourg, président de Mazars »

9216 octobre 1995 « Mazars et Guerard : concentration dans l’audit en France »

Bibliographie

Bibliographie

  • AMF (2007). Étude sur les honoraires versés aux commissaires aux comptes et à leur réseau au titre de la période 2005-2006 pour les groupes français du CAC 40. www.amf.fr.
  • André, P., Broye, G., Pong, C., Schatt, A. (2008). The cost of different regulatory settings : A comparison of Audit Fees and their determinants in France and UK. 31st Annual Congress of the European Accounting Association. Rotterdam. May 27 p.
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Notes

  • [1]
    Au Danemark, le co-commissariat aux comptes a été supprimé en 2005.
  • [2]
    En Tunisie, le co-commissariat aux comptes a été introduit par la loi destinée à renforcer la sécurité financière de 2006. En Afrique du sud, le co-commissariat aux comptes ne concerne que les établissements financiers.
  • [3]
    Le CDI a été saisi par le CENA qui est l’organe de la Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes chargé du contrôle de la qualité des travaux.
  • [4]
    Arrêté du 10 avril 2007 portant homologation de la norme d’exercice professionnel relative à l’audit des comptes réalisé par plusieurs commissaires aux comptes, 3 mai 2007, Journal officiel.
  • [5]
    Code de déontologie de la profession de commissaire aux comptes (Annexe au décret n° 2005-1412 du 16 novembre 2005), consultable en ligne sur le site du CNCC.
  • [6]
    L’article R 821-6 du Code de commerce prévoit que sont habilités à saisir le H3C sur des questions relatives à la déontologie et à la compétence du commissaire aux comptes les personnes et instances suivantes : le garde des Sceaux, le ministre en charge de l’économie, le Procureur général auprès de la Cour des comptes, le président de la CNCC, le président de l’AMF, le président du CRCC, les commissaires aux comptes.
  • [7]
    Le premier avis avait été formulé avant que la norme d’exercice professionnel ne soit homologuée.
  • [8]
    L’extraction des échanges concernant le seul co-commissariat aux comptes a été facile puisque les débats parlementaires sont organisés par article.
  • [9]
    Une recherche informatisée étant possible uniquement pour la période de 1984 à 2008 (les archives des articles publiés avant 1984 ne sont pas consultables sur internet), nous avons donc limité le recensement des articles publiés à cette période en complétant ce recensement par une recherche manuelle limitée à l’année 1966.
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