Introduction
1Sous l’influence de conditions techniques, économiques et institutionnelles définissant un environnement souvent considéré comme plus complexe, les systèmes de contrôle de gestion (SCG) évoluent. En particulier, les frontières entre les différents niveaux de contrôle, contrôle stratégique, contrôle de gestion et contrôle opérationnel, s’estompent (Bouquin et Pesqueux, 1999). Le « contrôle de gestion stratégique » (Lorino, 1991) contribue ainsi au rapprochement de la stratégie et du management opérationnel nécessaire au déploiement et à l’émergence stratégique (Simons, 1995 ; Bouquin, 2000). Dans ce mouvement, les systèmes de gestion intégrés (SGI), également connus sous la terminologie anglo-saxonne d’ERP (Enterprise Resources Planing), semblent jouer un rôle (Scapens et Jazayeri, 2003 ; Dechow et Mouritsen, 2005 ; Meysonnier et Pourtier, 2006). Au-delà de leur objet technique, consistant à supprimer les problèmes d’interfaces entre les différents systèmes d’information de l’organisation, les SGI ont été conçus avec une intention de normalisation des systèmes de gestion. Cela nous conduit à nous interroger sur l’évolution des SCG liée à l’adoption de SGI. Comment les SGI peuvent-ils contribuer à « l’intégration du SCG », c’est-à-dire au rapprochement de la stratégie et de l’action via le SCG ? Pour comprendre cette influence, il s’agit d’étudier à la fois l’évolution des SCG formels et les pratiques effectives de CG associées à l’usage de la technologie.
2Dans un premier temps, nous présenterons le cadre d’analyse, nous permettant de caractériser l’intégration du SCG et l’influence possible des SGI sur cette intégration (1). Dans un deuxième temps, nous analyserons les modalités de cette intégration mises en évidence à partir d’études de cas (2).
1 – Le cadre d’analyse
3Les SGI constituent l’un des facteurs d’évolution des SCG dans un contexte plus global composé de multiples facteurs internes et externes (Chiapello, 1996 ; Chenhall, 2003). Cette perspective contingente est complétée par une approche constructiviste (Bessire, 1995, 1998 ; Dupuy, 1999 ; Oriot, 2004) soulignant le rôle des acteurs et des contextes locaux spécifiques sur les SCG et sur l’utilisation des SGI. Notre cadre d’analyse vise à rendre compte de ces multiples interactions, tout d’abord en caractérisant l’intégration des SCG et les éléments influençant cette intégration, ensuite en introduisant les SGI comme facteurs éventuellement spécifiques.
1.1 – Caractérisation de l’intégration des SCG
4Pour comprendre l’évolution des SCG, il semble utile de se référer aux modèles d’organisation susceptibles d’orienter le changement. Ceux-ci se caractérisent par deux tendances :
- une délégation de responsabilités et une décentralisation de la décision accrues ;
- un développement du contrôle décentralisé s’appuyant sur un système d’information et de communication visant la cohérence globale et la pertinence stratégique.
1.1.1 – L’intégration des SCG : vers un CG plus stratégique
5Dans une perspective contingente, Simons (1990, 1994, 1995) définit un modèle de CG stratégique atténuant les frontières entre les différents niveaux de contrôle. Pour que le SCG assure plus efficacement son rôle d’intégration entre la stratégie et le pilotage opérationnel, il est composé d’un « contrôle diagnostic » et d’un « contrôle interactif ». De type cybernétique, le contrôle diagnostic s’appuie sur un contrôle régulier des résultats en référence à des standards de performance préétablis. Il s’inscrit dans une logique de stabilité de l’environnement, les comportements étant encadrés par des dispositifs traditionnels de contrôle formel. Le contrôle interactif suppose quant à lui une interaction plus continue entre managers opérationnels et direction pour faire face à un environnement changeant. Il s’applique aux « zones d’incertitudes stratégiques » pour lesquelles la direction s’implique personnellement dans la prise de décision de ses subordonnés. Les outils de contrôle sont mobilisés de manière moins formelle et systématique que dans le contrôle diagnostic, et sont susceptibles d’être mis en question ou aménagés pour donner plus de réactivité à l’organisation. Le contrôle interactif est par conséquent générateur d’apprentissages et de changements. Simons (1994, 1995) identifie également deux autres formes de contrôle composant le SCG : un système de valeurs, exprimé de manière formelle par la direction, et un système de limites explicitant les règles fondamentales encadrant la prise de décision. La représentation donnée par Simons de ces deux dernières formes de contrôle est assez mécaniste. Elles sont, en particulier, définies sur la base des déclarations et engagements de la direction, et non comme des phénomènes socialement construits au sein de chaque organisation. De même, l’apprentissage organisationnel s’appuie sur l’interaction autour des zones d’incertitude stratégique « perçues par la direction ». Le contrôle interactif constitue alors un contrôle directif, système de veille stratégique interne piloté par la direction. Il ne s’agit pas d’une ouverture à un contrôle lâche facilitant l’expression des savoirs spécifiques des managers opérationnels et l’émergence stratégique. C’est pourquoi notre représentation du contrôle interactif sera enrichie pour faire une place plus importante aux jeux sociopolitiques et cognitifs, indispensable à la compréhension des enjeux liés à l’adoption des SGI.
1.1.2 – L’intégration des SCG : une normalisation relative des représentations
6La perspective sociopolitique conduit à analyser le SCG d’une organisation comme un système de régulation des comportements, fondé sur un équilibre entre des dispositifs de contrôle formels et informels, des zones de contrôle et d’autonomie (Crozier et Friedberg, 1977). Cette représentation rejoint partiellement les notions de contrôle diagnostic et de contrôle interactif de Simons, mais les arguments qui fondent la délimitation des zones de contrôle sont différents. Dans le cadre sociopolitique, le SCG a pour objet de donner de la réactivité à l’organisation en limitant les risques de dysfonctions liés aux jeux d’acteurs. La régulation de contrôle, formelle et prédéfinie, peut être assimilée au contrôle diagnostic, mais la régulation autonome va plus loin que le contrôle interactif tel que défini par Simons. L’équilibre entre les deux formes de régulation exprime des mécanismes rationnels définissant une structure viable du point de vue technique, économique et sociopolitique. L’identification des zones de contrôle diagnostic et de contrôle interactif s’appuiera donc sur l’étude des dispositifs formels (Simons, 1990, 1994, 1995), mais également sur l’analyse des pratiques effectives et des jeux d’acteurs dans l’élaboration des structures. Cette représentation du SCG comme processus en construction est renforcée par l’analyse sociocognitive (Lorino, 1995). Dans cette perspective, le SCG constitue un système de pilotage visant à donner un cadre commun d’interprétation, relativement standardisé, à des individus ou groupes d’individus aux objectifs et représentations parfois conflictuels (Cyert et March, 1963 ; Simon, 1976 ; March et Simon ; 1979). Ce cadre se construit dans l’action et la réflexivité des acteurs (Argyris et Schön, 1978 ; Weick, 1979) et s’appuie sur des savoirs et valeurs à la fois explicites et tacites. La fonction CG est alors chargée d’assurer un équilibre entre le besoin d’une théorie interprétative relativement stable, apparentée au système de contrôle diagnostic, et celui de renouvellement des représentations dans un contexte changeant, via un système de contrôle interactif. À cet égard, elle joue un rôle spécifique et exacerbé lors de l’implantation d’un SGI, qui constitue une occasion pour l’organisation de s’interroger sur la pertinence des choix en matière de systèmes d’information et de contrôle.
1.2 – L’influence potentielle des SGI sur l’intégration des SCG
7Les travaux portant sur l’influence des SGI sur les SCG révèlent des impacts contrastés (Fahy et Linch, 1999 ; Grandlund et Malmi, 2002 ; Tsamenyi et al., 2006 ; Meysonnier et Pourtier, 2006). Néanmoins, de telles études d’impacts permettent d’identifier les opportunités offertes aux SCG par les SGI (Scapens et Jazayeri, 2003).
1.2.1 – Les opportunités d’intégration des SCG offertes par les SGI
8Techniquement, les SGI assurent l’intégration des différents systèmes d’information, en particulier des systèmes de gestion de production, des outils de comptabilité financière et de contrôle de gestion, dans un système unique et standard. Les SGI font ainsi disparaître les problèmes d’interfaces entre les différents sous-systèmes. Au-delà de cette fonctionnalité générale, les opportunités offertes aux SCG par les SGI se situent de manière combinée aux niveaux du pilotage opérationnel, du contrôle de gestion, du contrôle stratégique et de l’interaction entre ces différents niveaux.
9Tout d’abord, au niveau opérationnel, les SGI automatisent certaines tâches et activités de traitement de l’information, évitant des opérations de saisies multiples à faible valeur ajoutée. Le système d’information rendu ainsi plus performant, fournirait des données plus fiables améliorant en principe le contrôle. Au niveau des processus de CG, la procédure budgétaire serait facilitée par le partage et la standardisation des données sur lesquelles interagissent les services opérationnels et de CG. L’efficacité du contrôle serait également renforcée par des procédures d’alerte plus rapides. Enfin, la standardisation des données dans les différentes unités d’une entité, entreprise ou groupe, faciliterait la consolidation et la remontée d’information. Dans ce sens, l’accessibilité et la diffusion des données standards auraient une influence sur l’intégration des différents niveaux de contrôle et l’émergence d’un contrôle de gestion stratégique. Les SGI en contribuant à la normalisation des représentations, faciliteraient à la fois le déploiement de la stratégie au niveau opérationnel et l’émergence stratégique. Le référentiel normalisé deviendrait progressivement le langage et le sens commun, unique, adopté par tous les acteurs. Les SGI participeraient ainsi d’une part à l’efficacité du contrôle diagnostic, en permettant le suivi d’un nombre important d’indicateurs de performance, identifiés et définis a priori lors de l’implantation de la technologie. D’autre part, en rendant le contrôle diagnostic plus automatique, les SGI libéreraient des ressources, du temps pour le contrôleur de gestion notamment, pour un contrôle plus interactif.
10En définitive, les SGI semblent pouvoir contribuer à une meilleure intégration des SCG par la standardisation des référentiels, la diffusion de l’information, la formalisation et la rationalisation des processus de gestion, dont ils sont porteurs. Cela étant, les pratiques effectives de CG associées à leur adoption sont assez ouvertes. En particulier, le SGI peut servir l’intégration du SCG dans une logique centralisatrice, tournée vers l’aide à la décision du sommet stratégique, ou un SCG plus proche des opérationnels et de leurs besoins spécifiques pour le pilotage de leurs activités. Il peut également favoriser un contrôle diagnostic formel exclusif ou se voir intégré à un management plus ouvert à un contrôle interactif souple. Enfin, l’adoption d’un SGI ne présume pas du degré de cloisonnement ou d’intégration des différents niveaux de contrôle (opérationnel, de gestion et stratégique) en pratique.
1.2.2 – L’influence des SGI selon le contexte social
11Les SGI constituent des objets dont l’influence peut être mieux comprise dans un cadre global d’analyse contextuelle. Celui-ci nous permet d’intégrer dans un modèle unique les différents éléments susceptibles d’influencer l’intégration des SCG associée à l’adoption de SGI, c’est-à-dire à la fois les déterminants techniques, économiques, institutionnels et les mécanismes cognitifs et sociopolitiques. En outre, chaque élément formel de la structure, qu’il s’agisse du SCG ou du SGI, est analysé à la fois dans sa dimension formelle et informelle et comme objet sociotechnique. Ainsi, lorsque l’on évoque l’harmonisation des référentiels de CG grâce à l’implantation du SGI, il est bien évident que la standardisation des outils ne garantit pas spontanément l’harmonisation des référentiels individuels et des comportements. Des paramètres sociopolitiques et cognitifs rendent l’intégration effective beaucoup plus longue et incertaine que la simple standardisation des données et la rationalisation formelle du SCG. Cette perspective sociotechnique est en outre enrichie en élargissant le champ d’analyse. Les modes d’intégration technologie-contrôle s’expliquent par les conditions de leur appropriation par les acteurs (Barley et Tolbert, 1997 ; Besson, 1999), mais également par les conditions sociales de conception de la technologie (Weick, 1990 ; Orlikowski, 1992 ; Desanctis et Poole, 1994). Ainsi, il semblerait que les SGI soient porteurs d’une norme sociocognitive, au sens institutionnel (Meyer et Rowan, 1977 ; Di Maggio et Powell, 1983 ; Scott, 1987), déterminant certains usages de la technologie et certaines pratiques de contrôle. En effet, les SGI constituent un outil spécifique par rapport à des technologies plus anciennes, parce qu’ils reposent sur une modélisation standard de tous les processus de gestion, largement prédéfinie par les concepteurs. Cette norme pourrait cependant être remise en cause dans les contextes d’action.
12En définitive, ce cadre d’analyse met en évidence la complexité du couplage entre les évolutions des SCG et les changements liés à l’implantation d’un SGI. Il sera mobilisé dans un cadre empirique visant d’une part à préciser la façon dont la technologie oriente l’évolution des SCG parmi un ensemble de conditions structurelles, et d’autre part à analyser les pratiques effectives technologie-contrôle stabilisées à un moment donné.
2 – L’influence des SGI sur l’intégration des SCG en pratique
13Des études de cas longitudinales ont été réalisées pour comprendre l’évolution des SCG liée à l’implantation de SGI. Elles font apparaître deux types de résultats. Tout d’abord, des mécanismes techniques, économiques et institutionnels conduisent à l’évolution des SCG formels et à l’élaboration d’un modèle d’intégration technologie-contrôle dominant. Ensuite, les pratiques effectives révèlent l’existence de différentes modalités d’intégration du SCG compatibles avec les dispositifs standards formels en place.
2.1 – Une recherche empirique fondée sur des études de cas
14Les résultats présentés et analysés se fondent sur deux types de données :
- des données issues de l’observation du champ économique, technique et social constitué autour de l’implantation des SGI et de l’évolution des SCG. Il s’agit de documentations et communications institutionnelles des concepteurs et intégrateurs de SGI, de témoignages recueillis auprès d’associations professionnelles (Cigref, DFCG), d’une revue de la presse généraliste et spécialisée réalisée entre 1999 et 2002 ;
- des données liées à une observation directe de deux cas d’entreprises ayant adopté un SGI incluant le module CG (tableau 1).
Les données relatives aux études de cas
Les données relatives aux études de cas
15Le cas SAINT constitue notre cas pilote. SAINT est une entreprise européenne du secteur du BTP. En 1993, après une année de difficultés financières, le siège décide de développer le SCG jusqu’alors quasiment inexistant. Au même moment, l’obsolescence du système d’information conduit l’entreprise à lancer le projet d’implantation d’un SGI. Le SGI est effectivement à l’œuvre à partir de 1997, associé à un changement organisationnel global. Ce changement concerne plus spécifiquement le pilotage lié au SCG. À cette fin, des contrôleurs ont été affectés à tous les niveaux de l’organisation avec comme mission la mise en place d’un SCG efficace :
- en diffusant le nouveau référentiel de performance (calcul de rentabilité affaire par affaire, démarche prévisionnelle, analyse d’écarts) et les procédures et outils correspondants ;
- en développant l’utilisation du SGI par les managers opérationnels pour le pilotage de leurs affaires.
16Le cas SA a donné lieu à une observation indirecte via le suivi d’étudiants en stage chez SA, complétée par un long entretien avec le contrôleur d’une business unit, ayant été auparavant l’un des leaders du projet SGI. L’entreprise SA est une filiale d’un groupe mondial, diversifié dans des domaines de haute technologie, tels que la téléphonie ou les automatismes. Depuis 1993, cette entreprise a mené une politique de croissance externe, pour devenir l’un des leaders sur ses différents secteurs d’activité. Le groupe est organisé en business units (BU) spécialisées par activité ou produit. Un système de management standardisé a été mis en place, avec en particulier un développement du CG, qui s’exprime notamment par un nombre plus important de contrôleurs auprès des managers opérationnels. En 1993, SAP-R2 est implanté à la fois pour l’infrastructure logistique et pour tout le système comptable, puis SAP-R3 est adopté en 1997, suivi de régulières mises à jour. Les données recueillies sur ce cas nous semblent fournir suffisamment d’information, permettant une triangulation des données, pour constituer un cas de comparaison. Il permet d’envisager des pratiques alternatives d’intégration d’un SGI et d’évolution du SCG.
17Le traitement des données concernant ces deux cas, sous forme de matrices chronologiques et de diagrammes de causalité, vise tout d’abord une reconstitution longitudinale a posteriori du changement organisationnel (Pettigrew, 1990), centrée sur les dispositifs formels. Celle-ci est complétée par le traitement et l’analyse des données issues de l’observation directe des situations de gestion, des entretiens semi-directifs (Wacheux, 1996 ; Hlady-Rispal, 2002) et des données relatives au champ social constitué autour des SGI. Le matériau ainsi recueilli nous permet d’une part d’analyser l’influence des SGI sur l’évolution des SCG parmi un ensemble de déterminant contextuel, et d’autre part d’étudier les pratiques effectives d’intégration des SCG, les intentions et représentations des acteurs associées à l’usage des SGI.
2.2 – L’évolution des SCG formels associée à l’adoption d’un SGI
18L’évolution des SCG formels observée dans les entreprises SA et SAINT est concordante avec les changements identifiés dans la littérature (Lorino, 1991 ; Besson et Bouquin, 1991 ; Mintzberg, 1994 ; Bessire, 1995 ; Bouquin, 2000). Elle se caractérise en particulier par une nouvelle répartition des attributions managériales :
- une délégation accrue des responsabilités de gestion, favorable à la pertinence des décisions et à une plus grande réactivité ;
- un développement des dispositifs formels de contrôle, reposant sur des référentiels d’action standardisés, le déploiement de services de CG décentralisés et un reporting plus intense.
19Les SGI constituent l’un des facteurs explicatifs de cette évolution dans les entreprises SAINT et SA. Ils rendent notamment plus aisé le mouvement de décentralisation et de renforcement du contrôle grâce au potentiel offert en termes de traitement, de standardisation et de communication de l’information. Pour le pilotage opérationnel, les SGI offrent aux managers opérationnels la possibilité de suivre en temps réel la gestion de leurs affaires. Pour le pilotage global, les SGI développent le potentiel en termes de reporting. Les SCG peuvent ainsi garantir la cohérence de l’ensemble en faisant plus facilement le lien entre les données locales et globales et entre les différents niveaux de contrôle. Il existe donc bien une influence des SGI sur l’évolution des SCG, mais les changements observés résultent également de l’influence du contexte économique et institutionnel. Du point de vue économique, la pression concurrentielle nécessite une plus grande réactivité, qui s’appuie sur la décentralisation et la diffusion du modèle de performance financier à l’ensemble de l’organisation. Ainsi, la plupart des managers opérationnels, autrefois centrés sur la dimension technique de leur métier, sont devenus des gestionnaires complets de centres de responsabilité, supposés mieux associer leurs objectifs locaux à une représentation globale de la performance de la firme. Le contexte institutionnel joue également un rôle, notamment à travers la pression des fournisseurs de capitaux en faveur d’une standardisation des dispositifs de contrôle et des informations centralisées. L’adoption d’un SGI permet ainsi de répondre de manière plus efficace à l’exigence des maisons-mères de disposer de reporting plus fréquents, plus fins et standardisés. De même, l’implantation d’un SGI est assez systématique dans les groupes ayant adopté une stratégie de croissance externe. Cela s’explique par des raisons techniques, de mise en compatibilité des différents systèmes d’information, mais également par des objectifs organisationnels d’homogénéisation des systèmes de gestion d’entreprises auparavant indépendantes.
20Ces différentes dimensions du contexte se renforcent mutuellement pour conduire les entreprises au changement. Les SGI apparaissent comme l’un des facteurs de la décentralisation du savoir et du contrôle comptable, l’un des facteurs de la rationalisation et de la normalisation des SCG. À cet égard, parmi les différents déterminants du changement, les SGI semblent jouer un rôle particulier. Les acteurs du champ définissent ainsi les SGI comme des objets conçus sur la base des « meilleures pratiques » orientant l’organisation vers un modèle standard apte à garantir son efficacité. Les SGI sont ainsi porteurs d’un idéal d’intégration des SCG, centré sur la dimension formelle du contrôle et focalisé sur le contrôle diagnostic. Le modèle définit un SCG qui s’appuierait d’une part sur un contrôle standardisé assuré par les managers opérationnels eux-mêmes et d’autre part sur un reporting plus intense avec le suivi d’un nombre important d’indicateurs prédéfinis (Figure 1).
Les SGI, conçus pour un modèle de contrôle diagnostic standardisé
Les SGI, conçus pour un modèle de contrôle diagnostic standardisé
21L’utilité d’un contrôle interactif fondé sur des outils et dispositifs, éventuellement informels, complémentaires du SGI est ignorée, voire niée. Au niveau du lien entre le SCG et le pilotage opérationnel, les promoteurs de SGI présentent l’outil comme un instrument universel, adapté à toutes les situations de CG et qui suppose donc la disparition des systèmes d’information, de pilotage et de contrôle locaux spécifiques. Concernant le lien entre le SCG et le contrôle stratégique, la réactivité et la pertinence reposent sur un strict contrôle formel de type diagnostic, et non plus sur le contrôle lâche ou interactif, tel que préconisé dans un environnement complexe et turbulent par les théoriciens de la contingence (Burns et Stalker, 1961 ; Child, 1984 ; Simons, 1995). Cette représentation du SCG idéal associé au SGI s’est diffusée et consolidée pour devenir prédominante dans le choix d’adoption de la technologie. Elle oriente l’évolution des organisations de manière plus ou moins radicale selon les contextes.
2.3 – Différentes formes d’intégration technologie-contrôle en pratique
22L’observation des pratiques effectives de CG des deux entreprises étudiées nous permet de mettre en évidence différentes formes d’intégration des SCG associées à l’usage des SGI. Ces formes se distinguent d’une part selon les liens créés par le SCG avec les autres niveaux de contrôle, et d’autre part selon le type de contrôle mis en œuvre, diagnostic ou interactif.
2.3.1 – Adoption d’un SGI et développement d’un SCG bureaucratique
23Le cas SA nous permet de montrer comment un SGI peut être implanté dans une perspective exclusive de CG diagnostic, assez fidèle au modèle de contrôle formel standardisé porté par les concepteurs de SGI. Les objectifs initiaux associés à l’adoption du SGI se situent à la fois au niveau de l’efficacité du pilotage opérationnel et du pilotage stratégique, via une amélioration des conditions du contrôle budgétaire et du reporting. Le SGI est censé donner une meilleure visibilité aux décideurs, par la qualité des informations mises à leur disposition. Ainsi, pour les managers opérationnels, c’est un outil d’aide au pilotage dans le cadre d’un référentiel relativement stable. Le SGI impose plus d’autocontrôle et sert peu l’interaction avec les contrôleurs de gestion. « La mise en place de l’ERP a surtout renforcé l’évolution du métier des opérationnels, qui exige de nouvelles compétences de gestionnaires. Par exemple, on a dit aux chefs de service : « Maintenant, vous avez sap, vous êtes responsables de votre budget et vous pouvez aller voir directement les informations dans sap. » Le contrôleur de gestion est là pour les aider, mais normalement, ils sont responsables de leur budget. » (Contrôleur SA). Formellement, le contrôleur pourrait participer à un apprentissage au niveau du pilotage opérationnel, mais en pratique il semble trop occupé par d’autres missions : « Moi, ce que je vois dans ma fonction, c’est que j’ai de plus en plus de reporting à faire, sur de plus en plus de sujets, et donc je m’éloigne du terrain opérationnel. J’explique ça par ce qu’on voit que le groupe à une politique de suivi de productivité, de suivi de résultats, de benchmarking, qui absorbe le contrôleur dans sa tâche de contrôle « comptable » plutôt que de le libérer pour du conseil aux opérationnels. […] Le contrôleur sert donc plutôt à mettre en évidence des écarts, il ne participe pas à la définition de mesures correctives. » (Contrôleur SA). Le contrôle, maîtrise a priori de la performance, est ainsi entièrement délégué aux managers opérationnels, le contrôleur intervenant dans la mise en évidence d’écarts a posteriori.
24Au niveau du lien entre SCG et contrôle stratégique, l’interaction se conçoit uniquement dans le référentiel prédéfini ou en dehors du SCG animé par les fonctionnels du contrôle. Les contrôleurs de gestion sont ainsi cantonnés au rôle de fournisseurs de chiffres, à destination du sommet stratégique. « Le système d’information est tellement structuré que l’on a peu de marges de liberté pour faire ressortir un nouvel indicateur. On doit suivre et commenter des choses qui sont déjà définies. » (Contrôleur SA). Dans ce cadre, l’intégration liée au SCG est très formelle et il n’existe pas à proprement parler de contrôle interactif, susceptible de faire émerger de nouvelles perspectives stratégiques, et dans lequel le contrôleur aurait un rôle à jouer. À cet égard, la mission des contrôleurs et l’organisation de la fonction au sein des business units révèlent le caractère bureaucratique du rôle assigné au SCG. Les contrôleurs sont spécialisés soit comme contrôleurs « coûts de revient », conseillers dans les actions d’amélioration de la rentabilité, soit comme contrôleurs « en charge du contrôle budgétaire et du reporting ». Dans ce dernier cas, le contrôle budgétaire est réalisé par les managers opérationnels eux-mêmes et le contrôleur est surtout chargé du reporting trimestriel. Il fournit une information au siège, sans être jamais impliqué dans la prise de décision. « Bien qu’il participe à la mise en œuvre des plans d’actions, le contrôleur n’a qu’une faible influence sur la définition des objectifs et plans d’action. » (Contrôleur SA).
25Finalement, avec l’implantation du SGI, le contrôle diagnostic est renforcé, à la fois au niveau du pilotage opérationnel – les managers ont été contraints de développer un fort autocontrôle sur tous les indicateurs de productivité – et au niveau du sommet stratégique, grâce à un système de reporting très dense et plus fiable. Les contrôleurs jouent un rôle dans l’efficacité du contrôle diagnostic par le suivi d’indicateurs chaque jour plus nombreux. Ils assurent une traque permanente de l’information, normalement facilitée par la technologie. Cette évolution du métier implique cependant un éloignement du terrain et de la prise de décision de façon générale, et un morcellement de la connaissance et des activités au sein du SCG. « La technologie libère du temps pour faire des analyses, le temps qui était affecté auparavant à faire des retraitements sous Excel. […] Cependant, on n’observe pas vraiment de meilleure communication à l’intérieur du service, si ce n’est qu’on a des disques durs communs. Dans ce cadre, on peut partager des données […]. Par contre, SAP est tellement complexe, que je suis souvent obligée d’aller voir la direction financière pour leur demander des explications et à la direction financière, on a parfois du mal à trouver le bon interlocuteur. Chacun va connaître simplement sa petite fenêtre ou sa petite spécialité et après pour avoir une explication au niveau plus général c’est très difficile. » (Contrôleur SA).
2.3.2 – Adoption d’un SGI et développement d’un SCG dual
26Dans le cas SAINT, le SGI est présenté lors de son adoption comme un outil d’aide à la décision des opérationnels, leur donnant les moyens de faire eux-mêmes leur contrôle budgétaire « en temps réel ». Parallèlement, il permet aux contrôleurs le suivi à distance des activités et sert de support à l’analyse lors des points de gestion. Les contrôleurs implantés en régions contribuent à la démarche prévisionnelle, par la définition des objectifs et plans d’action, aux niveaux des activités (BU) et des responsables d’affaires (RA). Ils assurent également le suivi mensuel des affaires et le reporting trimestriel. En première analyse, la mise en place du SGI semble avoir facilité le développement d’un système standardisé de contrôle diagnostic. Ainsi, le SGI a été adopté en vue d’une intégration des référentiels standardisés de CG dans le pilotage opérationnel. « Grâce au SGI, le métier de responsable d’affaires n’a plus rien à voir avec ce qu’il était auparavant. Avant, il fallait qu’il aille partout chercher les informations, maintenant il allume son micro et il dispose de tout. Cela lui a permis de mieux intégrer la dimension financière de son métier. » (Responsable des systèmes d’information, SAINT). « Avant le RA était un opérationnel plus proche du chantier, avec chacun sa propre gestion. Le côté gestion prévisionnelle se faisait très mal. Cela a nettement changé avec l’arrivée du SGI, mais cela s’est fait progressivement. Aujourd’hui, la gestion est plus formalisée et précise (les découpages sont très intéressants) pour des volumes d’affaires beaucoup plus importants. » (J.G. chef de service SAINT). La standardisation des SCG dont le SGI est porteur apparaît comme un atout et un choix. Le SGI a eu pour vocation, parallèlement à d’autres dispositifs, de servir de socle à la construction d’un référentiel gestionnaire commun, dont l’appropriation par les « responsables d’affaires », anciennement « chefs de chantiers » n’était pas évidente. « (Avec le SGI), maintenant les responsables d’affaires ont plus de responsabilités. Les affaires leur appartiennent davantage. Mais certains adhèrent plus que d’autres. » (F.F. chef de service). Le rôle du contrôleur de gestion en région est d’amener les responsables d’affaires à une utilisation du SGI dans le cadre d’un pilotage normalisé, et à développer un autocontrôle. À cet égard, le contrôleur a une fonction de pédagogue pour convaincre de l’utilité des systèmes développés et pour faire accepter un outil qui change fondamentalement les responsabilités managériales. Cela explique en partie pourquoi les SCG s’appuient de manière non exclusive sur l’information traitée par le SGI.
27Au-delà de la transformation formelle de l’organisation et des SCG, les pratiques effectives de contrôle et les interactions entre managers opérationnels et contrôleurs de gestion révèlent un SCG dual. Ce système est composé à la fois d’un contrôle diagnostic, s’appuyant sur les informations et outils standards portés par le SGI, et d’un contrôle interactif moins formel. Ce dernier repose sur des outils parallèles au SGI, souvent utilisés lors des points de gestion, tels que des tableaux de bord développés par le responsable du contrôle de gestion ou par les managers opérationnels eux-mêmes. Ces outils participent à l’apprentissage et au contrôle de manière complémentaire à ceux intégrés au SGI, en raison à la fois des informations apportées et de l’interaction générée. Les points de gestion créent une interaction entre contrôleurs et responsables d’affaires, propre à la fois à la diffusion du référentiel standard et à l’émergence stratégique, via la prise en compte d’informations non standards, de savoirs tacites ou spécifiques (au métier ou au marché notamment). Le contrôle interactif ainsi mis en œuvre correspond à la fois à une préoccupation fonctionnelle de pilotage technique et économique de l’activité, mais également à un système de partage des connaissances et des représentations d’acteurs aux intérêts parfois divergents. Il constitue ainsi un soutien essentiel à l’identification d’objectifs partagés et au développement d’une culture gestionnaire commune : « Avant le fonctionnel du contrôle de gestion avait moins de place. On aurait d’ailleurs mal vu qu’un gratte-papier vienne nous donner des conseils. Le RA faisait lui-même dans son coin sa gestion. […] Maintenant, on s’appuie plus sur le contrôleur qui apporte plus d’informations et de conseils. D’ailleurs, heureusement qu’il nous aide, étant donné le nombre d’indicateurs à suivre. » (J.G., chef de service). « La grosse part dans ma conception de mon job, c’est d’être là auprès des opérationnels pour apporter un service pour les guider dans la façon de suivre leurs affaires, pour attirer leur attention sur des risques, […] leur donner des astuces pour mieux suivre, et établir des budgets qui tiennent la route, pour être vigilants sur leurs coûts et sur la façon de les appréhender. C’est donc avant tout une fonction de conseil aux opérationnels. » (Contrôleur SAINT)
28Au niveau de la relation entre SCG et contrôle stratégique, le reporting s’inscrit dans la même démarche d’intégration fondée sur un SCG dual, diagnostic et interactif. Il comprend à la fois le suivi d’indicateurs standards selon un format préétabli et une participation directe du contrôleur aux comités stratégiques. L’évolution conjointe du système d’information et des SCG a favorisé la pertinence stratégique en s’appuyant sur une meilleure mesure de la performance. L’influence du SGI est ainsi très directe sur le système de contrôle diagnostic. « Jusqu’à présent, on faisait partie d’un métier n’ayant pas un niveau de résultat extraordinaire et sur lequel les marchés se sont quand même durcis. […] Le résultat diminuait parce qu’on continuait dans des activités qui n’étaient pas rentables, mais on n’en avait pas la bonne mesure. Le contrôleur de gestion a amené la prise en compte de cette dimension. » (Responsable régional du CG).
29L’efficacité gagnée en termes de contrôle diagnostic, reposant sur un reporting standard, est renforcée par le développement du contrôle interactif. Ce dernier s’appuie sur des données dépassant le référentiel du SGI et sur des interactions directes entre contrôleur et direction. Il favorise une émergence en dehors du cadre prédéfini. L’influence des SGI est donc indirecte sur le contrôle interactif. Ce SCG dual a été souhaité par le siège, qui a placé en région des responsables du CG impliqués dans les choix stratégiques. « La fonction contrôle de gestion a énormément évolué chez SAINT depuis 10 ans. Au départ, le contrôleur de gestion était plus issu d’une formation comptable. […] Aujourd’hui, le poste de contrôleur de gestion est un poste clé dans l’organisation d’une DR (direction régionale). […] On a la chance depuis le début de l’année d’avoir un responsable commercial régional et un contrôleur de gestion qui travaillent ensemble. […]. Une vraie structure de pilotage stratégique. » (Contrôleur SAINT). Le développement d’un système de contrôle interactif est clairement le choix d’acteurs, qui ont réussi à donner cette dimension au SCG au cours du processus de changement.
30En définitive, dans le cas SAINT, la technologie sert de support à une intégration des différents niveaux de contrôle, qui s’appuie de manière complémentaire sur des outils de contrôle standardisés dans le cadre d’un contrôle diagnostic et sur des dispositifs de contrôle interactif.
2.3.3 – La marge de manœuvre des organisations en matière d’intégration des SCG
31Les deux cas étudiés nous conduisent à admettre qu’en dépit de représentations initiales normatives, centrées sur un objectif de contrôle diagnostic standardisé exclusif, les modalités d’intégration des SCG liées à l’usage des SGI sont assez ouvertes. Ils nous permettent de tracer le schéma suivant (Figure 2), représentant deux approches possibles de l’intégration du SCG associée à l’utilisation d’un SGI.
Le champ des possibles en matière de configuration technologie-contrôle
Le champ des possibles en matière de configuration technologie-contrôle
32Entre ces deux « idéaux-types » d’intégration, assurée par le couple technologie-contrôle, différents agencements sont possibles et peuvent être analysés au regard du principe d’équilibre entre différenciation et intégration (Lawrence et Lorsch, 1969). Dans le cas du modèle de contrôle formel standardisé, le SGI est finalement mobilisé pour réduire la différenciation des SCG. Le SCG en lien avec le pilotage opérationnel et stratégique s’appuie sur un modèle de performance unique prédéfini, fondant la réactivité sur l’accessibilité et le partage d’informations denses, mais relativement moins variées que dans le système de contrôle dual. Un tel système induit le risque à moyen terme de limiter la capacité d’apprentissage organisationnel. Ce risque est lié à la fois au type d’informations mobilisées dans le SCG, mais également à l’organisation des responsabilités managériales. Dans ce système, le contrôleur tend à être cantonné à une mission de traitement de l’information, dans un système relativement cloisonné et centralisé.
33Dans le système de contrôle dual, l’instrumentation des SGI rejoint les arguments favorables à un SCG plus stratégique et générateur d’apprentissages dans l’action (Bouquin, 2000 ; Simons, 1995). Au niveau local, le SGI facilite la diffusion d’un référentiel gestionnaire commun. Il sert de cadre à l’interprétation des résultats, en garantissant la stabilité nécessaire à la prise de décision, mais il n’est pas exclusif d’outils mieux adaptés à certaines spécificités de contexte. Au niveau global, un système d’information et de contrôle dual permet l’émergence d’indicateurs de performance non prédéfinis, favorable à la pertinence stratégique à plus long terme. Dans ce cadre, il semble que les mécanismes de différenciation et d’intégration, adaptés à la complexité des contextes, jouent pleinement leur rôle. L’organisation est vue de manière moins mécaniste et centralisatrice que dans le modèle de contrôle formel standardisé ; au contraire, la technologie semble être adoptée avec un objectif de décentralisation et d’autonomie des opérationnels. Le contrôleur joue alors non seulement un rôle d’intermédiaire dans le déploiement du référentiel d’action normalisé et la consolidation, mais également celui plus complexe et plus riche de régulateur des interactions dans un système de contrôle souple et émergent.
Conclusion
34En conclusion, il convient de revenir sur les principaux résultats de cette recherche. Les SGI ont contribué à un mouvement organisationnel visant à rapprocher la stratégie et l’action. Ce rapprochement s’appuie sur le développement de SCG standardisés, inscrits dans une logique de contrôle diagnostic. Il repose à la fois sur le développement d’un autocontrôle, fondé sur un référentiel standard et assuré par les managers opérationnels, et sur un reporting plus dense. Ce modèle participe à une intégration organisationnelle mécanique. Cependant, en dépit d’une institutionnalisation assez forte d’un tel modèle de CG associé aux SGI, les pratiques effectives révèlent la possibilité d’instrumentations technologie-contrôle alternatives. En particulier, un SCG dual, faisant un compromis entre le modèle initial de contrôle formel standardisé et un modèle plus souple de contrôle interactif, peut être associé à l’adoption d’un SGI. Dans ce cadre, le SGI facilite le rapprochement des différents niveaux de contrôle via le système de contrôle diagnostic fondé sur un référentiel homogène et standard. Il contribue effectivement à l’élaboration d’un langage commun au sein des échanges formels, mais la qualité de ces échanges est renforcée lorsque son utilisation n’est pas exclusive de dispositifs complémentaires, permettant un contrôle plus interactif. En définitive, cette délimitation du potentiel d’action des SGI devrait permettre une meilleure intégration aux systèmes de gestion.
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Mots-clés éditeurs : intégration organisationnelle, système de gestion intégré, contrôle de gestion
Date de mise en ligne : 15/11/2012
https://doi.org/10.3917/cca.141.0033