Couverture de CAS_019

Article de revue

Donner la vie et la mort, ou comment les Inuit activent des objets

Pages 51 à 66

Notes

  • [1]
    Voir, par exemple, Coupaye et Pitrou (2018), Pitrou (2014, 2016).
  • [2]
    Pour une description plus complète d’une ethnothéorie de la vie inuit, voir parmi une abondante littérature, Saladin d’Anglure (1998 et 2007).
  • [3]
    Chasser, anngutivuq, signifie attraper et s’applique aussi bien pour une femme que pour un animal.

1Les Inuit qui vivent au Nunavut, un territoire autonome créé en 1999, sont un peuple de chasseurs qui considère les animaux à la base de leur vie sociale. L’une des premières initiatives prise par le nouveau gouvernement du Nunavut a été celui de rouvrir la chasse à la baleine, avec des quotas qui n’ont, depuis, pas cessé d’augmenter. Comme le rappellent de nombreux mythes, les animaux exigent d’être chassés pour renouveler leur enveloppe corporelle. Les humains ne sauraient vivre sans eux. Dès son plus jeune âge, le chasseur voit sa vie rythmée par une multitude de rites dits « de premières fois » (premier phoque, premier ours, etc.) qui varient selon les familles et les régions. En dépit de la christianisation, de la sédentarisation et d’une occidentalisation qui ont à certains égards profondément transformé les traditions nordiques, ces pratiques rituelles demeurent toujours bien vivantes dans les communautés.

2Dans cet article, répondant à l’invitation de Perig Pitrou et des réflexions théoriques qu’il a entreprises sur l’animisme et l’anthropologie de la vie [1], je voudrais montrer l’intérêt d’aborder ensemble deux dynamiques contrastées et pourtant inséparables au sein des « ethnothéories de la vie » inuit : une dynamique substantielle à l’œuvre avec la circulation de l’énergie vitale et une dynamique relationnelle observable avec les objets que les échanges activent. Cela dit, s’il est tentant de vouloir distinguer différents processus vitaux et leurs explications, il n’est pas facile de séparer systématiquement ces dynamiques, ni possible d’isoler et délimiter conceptuellement tous les processus.

3Les données ethnographiques utilisées sont tirées de l’ethnographie classique et de témoignages recueillis auprès d’aînés inuit au cours des vingt dernières années. Ont ici été retenus des objets disparates mais qui jouent tous un rôle dans les pratiques cynégétiques. Il s’agit d’examiner plusieurs objets fabriqués avec des biomatériaux et de voir comment les Inuit interagissent donc avec eux. Dans la fabrication et l’interaction avec ces objets, des processus vitaux sont bel et bien à l’œuvre, parmi lesquels la reproduction et la mort, le souffle occupant une place singulière. Chez les Inuit de l’Arctique canadien, en effet, le souffle anime le corps et lui donne sa vitalité. Il se termine avec la mort qui fait éclater la bulle d’air qui encapsule l’âme-tarniq, cette image miniature du corps qui l’abrite (Rasmussen, 1929 : 58-59). Si les âmes-tarniit des êtres animaux semblent se recycler sans cesse, chez les humains, c’est plutôt par la transmission des noms que s’opère ce recyclage, les tarniit allant idéalement dans des lieux post-mortem. Celles qui demeurent plus longtemps sur terre deviennent des tupilait, des mauvais esprits. Elles errent dans la toundra, dans des poches de sang et d’air, et sèment la maladie. Elles devront être percées par des chamans pour rejoindre les pays des défunts. Tous ces éléments confèrent au souffle une importance capitale, j’y reviendrai [2].

4À l’instar des objets miniatures qui servaient jadis lors des chasses et qui s’offrent aujourd’hui lors des anniversaires, j’avance l’idée que la puissance des objets inuit tient moins à leurs propriétés intrinsèques qu’aux relations qui, littéralement, les activent. La préséance de cette dynamique relationnelle pour l’animation des objets n’empêche pas pour autant qu’une dynamique matérielle opère, certaines substances demeurant très puissantes.

5Pour montrer la coprésence de ces deux dynamiques et le primat de la logique relationnelle, j’examinerai d’abord le cas des amulettes (armguaat) et des objets chamaniques comme les qalugiujait (couteaux chamaniques), et un bâton de chaman utilisé pour des pratiques divinatoires (qilaniq). Tous ces objets sont fabriqués avec des éléments provenant d’êtres vivants. Ils se composent d’os, de plumes, de fourrure, de bois, de peaux, de parties d’animaux, etc. À de rares exceptions, comme le sang menstruel utilisé pour la sorcellerie, ces extraits de corps animaux ne sont toutefois pas dotés d’une essence qui leur octroie du pouvoir. Leur mise en circulation active plutôt leur capacité d’agir. J’aborderai ensuite le cas des objets de chasse, comme le qiviutaq indispensable pour la chasse au trou de respiration du phoque, et la reconfiguration du souffle qui permet de relier la respiration, le vent et les souffles corporels, pour montrer qu’en dépit de ces substances et la présence d’une force vitale, la chasse s’appréhende également sous l’angle d’une dynamique relationnelle. Finalement, j’analyserai certaines sculptures miniatures que les Inuit s’offrent entre eux ou déposent sur les tombes de leurs défunts.

Des amulettes (armguaat) aux substances corporelles : aux sources de l’activation

6Même si les amulettes ne sont de nos jours pas faciles à voir, la littérature ethnographique est remplie de références aux amulettes et à leurs pouvoirs de transformation. Ces objets pouvaient être portés par le jeune chasseur ou par sa mère, y compris avant la naissance de l’enfant. Lors de la Ve expédition de Thulé, Knud Rasmussen en a rapporté de splendides collections, documentant à la fois leur matérialité, leurs usages et leur appartenance. Os, dents, poils, griffes, organes vitaux, insectes, la gamme des amulettes était variée et ces objets étaient portés surtout par les plus jeunes. Par exemple, Tertaq portait des cheveux d’un vieil homme cousus à son capuchon pour mener une longue vie et avoir de la force, une peau de corbeau pour mieux voir les caribous, les pattes d’une mouette pour avoir du succès à la chasse, de la mousse et des pattes de caribou pour demeurer en santé, deux cordelettes de son père pour avoir de la chance à la chasse, la tête d’un plongeon pour avoir de la chance à la pêche au saumon, un morceau de peau de la tête d’un ours pour être fort, celle d’un phoque pour être endurant, etc. (Rasmussen, 1931 : 271-272)

7Avec Rink, Rasmussen est l’un des premiers à formuler l’observation que ces objets ne contiennent pas de pouvoir en soi, mais que ce dernier leur vient de l’esprit (inua) qui possède l’objet (Rasmussen, 1929 : 151) ou du donneur. Les éléments vivants qui composent les objets, n’étaient cependant pas anodins et certaines associations émergent. Jarich Oosten montre que le caribou, par exemple, est souvent associé à la vitesse, l’ours à la force, le phoque à la chance, l’hermine et l’araignée à l’agilité et à la dextérité, le loup et le renard aux compétences du chasseur, la mouette à celles du pêcheur, le chien à la force du combattant (Oosten, 1997 : 118 ; Pollick, 2003 : 30-35). Kappianaq, originaire d’Igloolik, explique que porter un nerf de loup permet à la personne de courir très vite (Laugrand et Oosten, 2014a : 59). Mais ces associations sont complexes et les qualités attendues de l’objet extrait d’un animal ne correspondent pas toujours à celles de ce dernier. Ainsi des pattes de lagopèdes apportent de la force et de la vitesse pour se déplacer (Rasmussen, 1931 : 274), alors qu’en hiver, cet animal est une proie facile en raison, justement, de son inertie. L’ethnologue ne saurait donc en déduire une règle systématique.

8Jadis, les Inuit présumaient qu’une personne en danger pouvait devenir, par un processus métonymique, l’animal dont elle porte un élément du corps (Rasmussen, 1931 : 267-8). Dans ce cas, ce n’était pas l’esprit d’un objet qui agissait mais l’esprit de l’animal représenté par une partie de cet animal. En outre, s’il fallait placer l’amulette à des endroits précis du manteau, il fallait surtout acquérir l’amulette dès l’enfance et de sa mère pour qu’elle soit réellement efficace. Ces détails révèlent l’importance du relationnel, au-delà des propriétés physiques de l’objet et de la circulation de la vitalité.

9C’est donc le donneur de l’amulette qui lui confère du pouvoir. Souvent, le receveur offre en retour un objet à son donneur. Lors d’une séance de qilaniq, une pratique divinatoire qui permet de localiser le gibier, Suvaksiuq a ainsi souhaité offrir un stylo à Angutinngurniq pour valider la capacité de ce dernier à officier et à entrer en contact avec les défunts, mais surtout à lui transmettre cette habileté. Une personne sans pouvoir peut donner un objet, il restera sans pouvoir (Rasmussen, 1929 : 52). Dans d’autres cas, ce don activera au contraire des effets. Jarich Oosten rapporte un exemple à propos des cheveux. Lors de son passage, un chaman demanda à Rasmussen qui avait obtenu des amulettes des Netsilik, d’offrir quelques cheveux à tous ceux qui lui avaient donné des amulettes, soulignant qu’un tel geste éviterait de mettre les esprits en colère (Rasmussen, 1931 : 44), garantissant ici aussi la possibilité d’agir en retour sur le receveur. Rasmussen explique que pour un Netsilik, à l’époque, se couper les cheveux revenait « à perdre une partie de son âme » (Rasmussen, 1931 : 262 ; 1929 : 182). Lui-même consentit à l’échange mais pour ne pas perdre trop de cheveux, il proposa d’offrir des morceaux de ses propres vêtements, ce qui fut accepté. La relation a donc primé ici sur la substance. De la même manière, lors des rites de premiers gibiers, le jeune chasseur devait toujours offrir une partie de la viande à son accoucheuse (sanaji ou arnaliaq), car ce geste ferait de lui un bon chasseur (pijaqsaijuq). Uqsuralik, de Kinngait, l’a expliqué à J. Briggs (2000 : 37).

10En somme, donner un objet est une action qui active le pouvoir dudit objet. Les aînés aiment encore offrir des têtes de harpon aux plus jeunes, leur transférant un peu de chance et le pouvoir de chasses fructueuses. Le pouvoir des objets résulte donc moins de leurs qualités intrinsèques que de leur don et de leur mise en circulation.

11Les émanations du corps constituent une exception car elles contiennent la force vitale capable de transférer du pouvoir. Selon Rasmussen, la force vitale est liée au souffle, à la chaleur du corps, et à toutes les émanations corporelles comme l’odeur, la transpiration, les excréments, le sang, l’urine, des substances potentiellement dangereuses. Certaines émanations diminuent la vitalité. Quiconque éternue ou fait des flatulences, et cette règle s’applique surtout aux femmes – devait ainsi dire « qaaq » afin de continuer à vivre (Rasmussen, 1929 : 182). Le sang est également marqué tout comme certains organes. Oosten rappelle que la peau qui a servi à essuyer le sang de la mère du nourrisson à la naissance devenait une puissante amulette susceptible d’attirer du gibier. Lors des rites de premières fois, le jeune chasseur devait également toucher les organes génitaux ou l’abdomen d’une vieille femme (saqusiniq), comme s’il obtiendrait ainsi de la vitalité pour devenir un bon chasseur (Laugrand et Oosten, 2014a : 62).

12La salive contribue également à faire circuler de l’énergie vitale. Dans la région d’Igloolik, Rasmussen (1929 : 173) rapporte que la jeune mère disposait d’un sac dans lequel elle plaçait des petits morceaux de viande qu’elle frottait au préalable sur la bouche de son nourrisson à chaque fois qu’elle prenait un repas. Contenant un peu de salive de l’enfant, ces morceaux étaient destinés à nourrir son âme-nom, et plus largement parlant les ancêtres qui, en retour, aideraient l’enfant à devenir un bon chasseur. À Arviat, Peter Suvaksiuq a raconté comment sa grand-mère léchait bruyamment une pierre pour acquérir des propriétés curatives (Fig. 1, Laugrand/Cahier central (CC)). Ces exemples suggèrent que certaines substances étaient bien dotées de puissance, positive dans le cadre de la force vitale, ou négative, dans le cas du sang menstruel. Inversement, en effet, la femme menstruée était considérée comme impure. Les Inuit de jadis faisaient remarquer qu’elle dégage une vapeur (pujartuq), très dangereuse pour la chasse et les animaux.

13Avec Oosten, concluons que l’activation d’une amulette dépend de trois relations : de la relation entre le donneur et le receveur de l’objet (don et contre-don) ; de la relation entre la mère et l’enfant avec ici un transfert de la force vitale ; et de la relation entre le propriétaire de l’amulette (ces objets avaient souvent appartenu à des défunts humains ou animaux) et le receveur, celle-ci contenant une partie de pouvoir liée à l’être duquel elle provient. La possession d’une amulette qui contient une partie d’être humain véhicule assurément de la force, des habiletés et de la vitalité de son propriétaire au receveur. La possession d’une amulette contenant une partie d’animal donne au chasseur soit les qualités de cet animal, soit la capacité de le tuer. Ces deux fonctions peuvent être distinguées : la première induit un transfert de qualités sensibles, la seconde un transfert de capacité d’agir. Pour Oosten, ce symbolisme est lié au fait que tout esprit maître (inua) doit consentir à ce que l’animal soit tué par un chasseur vertueux, si bien qu’en faisant l’acquisition du nom d’un tel chasseur ou de ses armes de chasse, la personne obtient aussi ses capacités.

14Avec le christianisme, la notion d’inua a connu un déclin rapide et les Inuit préfèrent de nos jours se référer à une sorte de méta-inua qu’est la figure de Dieu, Guuti pour les Anglicans et Anirnialuk (« le grand esprit »), pour les catholiques. Ces conceptions alimentent l’idée qu’un puissant pouvoir spirituel existe évoquant une conception de type mana (Laugrand, 2017 ; Crépeau et Laugrand, 2017). La logique relationnelle demeure toutefois présente au cœur d’une logique substantielle, comme l’illustre l’exemple des dents de Tungilik.

15Rappelons les faits. En 1983, suite à son évacuation pour raison médicale, Mark Tungilik a fabriqué deux petites sculptures miniatures avec ses propres dents qu’il offrit à l’Evêque Omer Robidoux lors de la fête de Pâques (Fig. 2, Laugrand/CC). Dans ce cas, les deux miniatures comportent bien une part d’énergie vitale, mais elles n’ont pas de pouvoir en soi. En revanche, le don en retour de ces cadeaux a activé le pouvoir des gestes de l’Évêque Omer Robidoux qui a pu ainsi guérir Tungilik, comme si ce dernier avait souhaité activer une connexion. Mais en acceptant ces cadeaux, l’Évêque n’a pas pensé que ces deux miniatures étaient peut-être aussi pour Tungilik un moyen d’agir sur ce dernier. On peut imaginer qu’en acceptant ce don, Tungilik a compris que l’Évêque acceptait de recevoir sa protection. De ce point de vue, l’objet sanctionne le transfert d’un pouvoir.

16Comme les ceintures chamaniques et les qalugiujait (couteaux chamaniques miniatures), les amulettes transfèrent ainsi les pouvoirs de ceux qui sont décédés et les ont fabriqués à leurs acquéreurs.

Des objets de chasse : souffle et connexions

17Chez les Inuit, la chasse est une question de connexion où les substances et le visuel jouent un rôle clé.

18Le qiviutaq est un petit objet fait de plume ou de duvet d’oie ou de lapin, que les Inuit utilisent pour la chasse au phoque. Il s’agit de placer le qiviutaq dans l’eau du trou de respiration du phoque (aglu) et de l’observer bouger pour savoir à quel moment précis il faudra harponner la bête. Quand un phoque vient respirer, il remonte et fait bouger l’objet en expirant l’air de ses bronches. Or, c’est à cet instant précis que le chasseur doit agir, le phoque ne pouvant ni respirer ni sentir la présence de son prédateur pendant ce court laps de temps. Victor Tungilik, un aîné originaire de Naujaat, explique comment il a découvert cette technique fort ancienne :

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« En hiver, nous nous rendions jusqu’à la glace de mer. […] Nous chassions au bord d’un trou de phoque qui était recouvert de neige. […] Je vais vous dire ce que m’a dit mon beau-père. Ça pourrait être embarrassant. Lorsqu’il a finalement commencé à m’expliquer comment chasser, il m’a dit de me souvenir de la première fois que j’ai eu une relation sexuelle et de me souvenir de ma respiration à ce moment-là. […] Il m’a dit que c’était le type de respiration que le phoque aurait lorsqu’il approcherait de l’aglu. Je n’avais encore jamais eu de relations sexuelles avec une femme, alors je n’avais aucune idée du type de respiration dont il parlait. Puis un jour, le qiviutaq a bougé. Il faut mouiller seulement le bout et pas le reste, parce que s’il était complètement mouillé il ne pourrait pas bouger. On m’a dit que ce morceau de duvet permettait de savoir quand exactement un phoque approchait. Lorsqu’il s’est mis à bouger, j’ai commencé à retenir ma respiration. Lorsque la plume a commencé à remonter, elle s’est balancée un peu et j’ai enfin entendu le souffle du phoque. Je tremblais parce que je savais qu’il y avait un phoque juste là. Avant cette fois-là, je ne le savais pas. Je ne savais pas comment ce serait. Ma respiration est devenue laborieuse. Le qiviutaq bougeait au rythme de l’inspiration et de l’expiration du phoque. J’ai commencé à me servir de la respiration du phoque pour m’aider à savoir à quel moment le harponner. Quand j’ai eu l’impression que le phoque remontait, j’ai pensé qu’il était temps pour moi de le frapper. Et j’ai harponné le phoque quand il s’est approché. J’avais l’impression que le bruit des jointures de mes genoux était très fort, parce que je tremblais beaucoup. C’est comme ça que ça s’est passé. J’ai finalement compris comment utiliser ce morceau de duvet d’oiseau. Il s’est mis à bouger à cause du mouvement de l’eau. Il a semblé s’arrêter, puis il s’est remis à bouger. Quand il descendait un peu, c’est à ce moment-là que le phoque montait et c’était à cet instant qu’il fallait le harponner. J’ai découvert ça tout seul. D’une certaine façon, c’était comme si je m’étais enseigné ça à moi-même. »
(Laugrand et Oosten, 2014a : 272)

20Chasser le phoque à l’aglu impliquait donc de savoir utiliser un qiviutaq et d’avoir déjà eu des relations sexuelles, cette respiration étant analogue à celle du phoque en approche. Le sexe joue un rôle clé pour la chasse et selon une injonction ancienne, un chasseur devait toujours s’abstenir d’avoir des relations avec sa partenaire avant de partir à la chasse [3].

21Cet exemple montre toute la force du souffle qu’il faut savoir maîtriser et qui demeure au cœur de la cosmologie et du chamanisme des Inuit. Knud Rasmussen relate que pour chasser le mal, un chaman doit fermer les yeux, « tousser après chaque mot qu’il prononce et changer fréquemment de voix ». Lorsqu’il invoque son esprit auxiliaire, il parle de façon méconnaissable, « respirant profondément comme si son corps était soumis à une pression extrême » (Rasmussen, 1929 : 133, 145, 147). Cet exemple illustre les interactions complexes qui existent, lors d’une séance chamanique, entre la parole, la toux, la respiration et d’autres sons. La respiration est également marquée lorsque des humains entrent en contact avec des non-humains. Le souffle permet ainsi d’établir une connexion avec des ancêtres, des divinités, des animaux ou des esprits. Inversement, il est utilisé pour stopper cette connexion. Ainsi, lorsqu’un chaman est à demi conscient à l’issue d’une performance au cours de laquelle il est entré en contact avec un tupilaq, un mauvais esprit, ses assistants ou d’autres aînés lui soufflent à l’oreille pour l’aider à reprendre conscience et interrompre sa communication avec le monde invisible. Des gestes de ce type sont requis pour le qilaniq (le rituel divinatoire), si bien qu’à la fin du rituel, l’officiant souffle sur le sol pour clore la communication avec les non-humains.

22Une autre analogie se dessine entre le souffle et le vent. Elle apparaît dans deux mythes inuit : l’un relate l’histoire de Naarsuk, le bébé géant qui incarne Sila, l’autre décrit les origines du chamanisme. Lorsque le bébé géant respire et secoue ses vêtements, dit-on, de l’air s’échappe des espaces libres, provoquant le hurlement des vents et le mauvais temps. Un chaman doit alors monter dans le ciel et fouetter le bébé jusqu’à ce qu’il se calme et que les tempêtes s’apaisent (Rasmussen, 1931 : 210, 229-230). Le chaman peut se servir d’un crochet et couper la veine du vent (Therrien et Laugrand, 2001 : 283). Ces pratiques s’éclairent avec la présence de Sila, le maître des vents, du climat et de tout ce qui respire, lequel donne son souffle aux êtres vivants et le reprend lorsqu’ils meurent (Laugrand, 2017 : 328). Le deuxième mythe raconte qu’avant le chamanisme, les hommes guérissaient la maladie avec une coquille d’oursin en forme d’anus sur laquelle il fallait souffler en direction de la plaie du malade. Une alternative était de la tenir dans la main, en lâchant un pet dans la direction du malade (Saladin d’Anglure, 2001 : 133). Par le biais de ces objets, souffle, vent et vitalité paraissent donc inter-reliés et le souffle est étroitement associé à la force vitale.

23Les crânes de caribou placés sur le toit ou le haut du mur de certaines maisons occupées par des chasseurs révèlent d’autres connections, mais d’ordre visuel. Ces crânes ne sont évidemment pas des trophées. Ils servent plutôt à indiquer à l’esprit de l’animal – ou à son esprit-maître (inua) –, la position exacte du prédateur humain, comme si ce chasseur respectueux et vertueux, obtiendrait plus facilement une nouvelle proie à l’avenir. Simon Tookoome (1999 : 28-29) décrit une variante de cette pratique : « Lorsque nous avons tué un caribou, la tradition veut que nous orientions sa peau vers notre maison ou vers notre tente. On nous envoie ainsi plus de caribous. » Ces crânes indiquent qu’une relation est donc bien établie entre le chasseur et son gibier dorénavant unis par une sorte de transfert de vitalité.

24Cette pratique en évoque une autre dans le contexte de la chasse à la baleine. Lors de son séjour chez les Inuit aivilik, Rasmussen explique qu’au cours de la chasse, « les femmes devaient porter une ornementation sur le devant de la tête qui consistait en un morceau de quartz attaché à un bandeau », et que « Cette pratique visait à montrer une lumière à l’âme de la baleine » (Rasmussen, 1929 : 188). Par cet objet, les femmes guident la baleine et la font se rapprocher du rivage où des chasseurs l’attendent pour la harponner. La relation ne s’opère toutefois plus ici par un transfert de vitalité.

25La sorcellerie offre des exemples où logique relationnelle et logique substantielle se combinent, et où le sorcier doit parvenir à réaliser des déconnexions. Rasmussen (1929 : 143) explique ainsi qu’un chaman peut nuire à une personne en se procurant un objet qui lui appartient ou une partie de son corps (cheveu ou autre), en y déversant dessus des mauvaises paroles et en le frottant à une tombe maudite, par exemple.

Des miniatures et des relations

26Contrairement à ce qu’observe Claude Lévi-Strauss dans La Pensée sauvage à partir d’une œuvre de Clouet, les Inuit considèrent que la miniature précède le modèle réel et non l’inverse. L’âme-tarniq est ainsi par définition une miniature de l’être qui l’héberge (Laugrand, 2010). En tant qu’images, les miniatures rappellent qu’elles sont à l’origine des choses et non l’inverse. D’un bout à l’autre de l’Arctique, on conçoit d’abord que tout être vivant doit son existence à celle d’une miniature. Le mythe de l’origine du gibier marin indique également comment les morses, phoques et autres mammifères marins sont nés des phalanges sectionnées de la femme de la mer, donc de miniatures.

27Pour les Inuit, qu’elles soient de type intégral ou qu’elles ne consistent qu’en partie d’un tout, les miniatures disposent toujours d’un pouvoir de substitution et de transformation. Pouvoir de substitution du fait que les humains peuvent récupérer les objets des défunts sur les tombes à condition de les remplacer par des jouets ou des objets miniatures (Laugrand et Oosten, 2008 : 75). Pouvoir de transformation du fait que ces objets jouent un rôle à des moments clés de la vie et qu’ils aident à transformer la personne. Ainsi les jeunes filles reçoivent-elles des poupées miniatures au moment de leur puberté, et les garçons des petits objets avec lesquels ils jouent à la chasse. Par exemple, le jeu du nattiujaq qui permet de devenir un bon chasseur de phoque exige d’utiliser des harpons miniatures.

28Dans les rituels, si les objets peuvent être des jouets ou des objets décoratifs ordinaires, leur pouvoir s’active dès qu’ils entrent en circulation dans les échanges. Les miniatures servent bien à fabriquer les êtres. Les poupées transforment les enfants en adultes. Mais les miniatures transforment aussi les défunts en alliés pour le groupe. Les ingelrutit et les ilijät désignent les objets personnels des morts qui les accompagnent dans leur voyage dans l’au-delà. Au moment du décès, hommes et femmes étaient empierrés et leurs objets personnels ou des miniatures de ces objets (un kayak, un traîneau, un harpon, une tasse pour les hommes, une lampe, une tasse, des aiguilles pour les femmes) étaient placés à leur pied. Rasmussen (1929 : 199) indique qu’avec ces miniatures, l’âme se déplace plus facilement auprès de la femme de la mer et ce, peu de temps après le décès. De nos jours, certaines tombes sont encore remplies d’objets. Il s’agit d’objets de toutes sortes que les vivants déposent sur les tombes : des photos, des cigarettes, des jouets, des miniatures, des armes, etc. Les vivants ont l’habitude de conserver certains objets personnels du défunt ou de les placer sur sa tombe. Jadis, il était possible de les récupérer ensuite, mais à condition de les remplacer par d’autres objets, même abîmés, mais idéalement de la même forme.

29Les objets de décoration pouvaient donc devenir de puissantes amulettes et une simple substitution suffisait à les activer. Hawkes rapporte que des Inuit fabriquaient des lampes miniatures pour récupérer les vraies lampes sur les tombes. Jadis, cet usage des miniatures ne s’appliquait pas qu’aux humains puisqu’on offrait parfois des objets miniatures à l’ours polaire qui venait d’être abattu. Franz Boas décrit ces pratiques qui consistaient à suspendre la langue et les entrailles de l’ours, et leur adjoindre des couteaux et toutes sortes d’autres objets, comme s’ils étaient offerts en cadeaux à l’âme de l’ours qui, présumait-on, diraient ensuite aux autres ours qu’elle a été bien traitée par des chasseurs, et qu’ils seraient donc eux aussi bien traités s’ils s’offraient à eux lors de futures chasses. À l’issue du rituel, le chasseur qui avait tué l’ours reprenait alors ses objets et ses miniatures pour les lancer en l’air dans la maison où les enfants devaient les attraper avant de les rendre au chasseur (Boas, 1888 : 501).

30Aujourd’hui, si la situation a changé, ces pratiques décrites par Boas n’ont plus cours. Mais les miniatures continuent d’exercer la fascination. La plupart des cadeaux que se font les Inuit sont des miniatures fabriquées avec des parties animales : des mini kamiit (des bottes) associées à la fertilité, de petits ulu (des couteaux féminins en demi-lune), etc. Nombre d’entre elles sont réputées donner du succès à la chasse ou dans d’autres registres. Jadis, Rasmussen (1929 : 183) mentionne déjà cette pratique qui consiste à donner des objets à la personne qui a rêvé d’une autre, surtout s’il s’agit d’un mauvais rêve. Dans ce cas, les membres de la famille de la personne victime doivent offrir des cadeaux au rêveur. Des échanges d’objets sont également nécessaires lorsque deux personnes homonymes se rencontrent, car cela permet, dit-on, « de renforcer leurs âmes et faire plaisir aux ancêtres » (Rasmussen, 1929 : 183). Et certains objets sont plus solides s’il existe un double miniature. Rasmussen (1929 : 183) cite l’exemple de la pierre à savon dans laquelle les Inuit fabriquent la lampe à huile. Un fragment du même bloc doit servir à fabrique du même objet en miniature, ce qui permettra, dit-on, d’éviter que le modèle original se brise facilement.

31Peu importe leur matérialité, les miniatures transforment le réel en images et, inversement, il faut peu de choses pour que ces images agissent sur le réel.

32Avec la christianisation, de nombreux objets chrétiens comme des médailles ou des crucifix ont été utilisés comme des miniatures. Mathiassen explique qu’il ne parvint jamais à acheter un petit crucifix à des Inuit d’Igloolik (Laugrand et Oosten, 2010 : 279).

33Les miniatures relient sans doute plusieurs niveaux d’expérience. Elles disposent d’un pouvoir de transformation qui se déploie métonymiquement ou métaphoriquement. Elles permettent de chevaucher les frontières et les échelles, elles interviennent au début de la vie et à la fin, elles agissent comme des médiateurs dont le pouvoir est activé selon les contextes et les besoins et ce, pas uniquement par les chamans.

34L’exemple d’un qalugiujaq ayant appartenu au chaman Qimuksiraaq (Fig. 3, Laugrand/CC) et retrouvé dans les archives des sœurs Grises à qui il l’avait offert le 7 janvier 1937, – nous l’apprendrons plus tard en lisant les chroniques de l’hôpital – (Laugrand et Oosten, 2014b) est révélateur. Ayant vu un jour la photo de cet objet, des Inuit avaient formulé leurs craintes de ne pas le récupérer. Rappelons que ces objets qui avaient la forme de couteaux miniatures étaient fabriqués en os et destinés à être accrochés aux ceintures chamaniques (tapsiit ou angaluit). Ces os étaient idéalement ceux des morts exhumés des tombes, de sorte que pour certains Inuit comme Felix Pisuk, ils incarnent bien « les armes des esprits tuurngait (les esprits auxiliaires chamaniques) ».

35Le pouvoir attribué aux miniatures doit donc être appréhendé dans une perspective relationnelle. En effet, les miniatures ne contiennent en soi pas de pouvoir. Elles ne sont pas des objets magiques mais leur pouvoir résulte de relations. En d’autres termes, les miniatures ne sont considérées comme ayant du pouvoir que lorsqu’elles sont produites, acquises et transmises avec certaines intentions : un don que l’on fait à un guérisseur pour obtenir son aide, un don à un défunt, etc.

36Les pouvoirs des qalugiujait sont encore bien connus dans l’Arctique canadien. Victor Tungilik relate ce qu’il lui est arrivé un jour au poste de traite de la Compagnie de la Baie d’Hudson qui faisait office d’épicerie, alors qu’il portait une telle ceinture (Fig. 4, Laugrand/CC). Face à lui, le traiteur est devenu rouge et s’est mis à lui donner tout ce qu’il voulait. Tungilik trouvait que c’était beaucoup trop et redoutait la dette qu’il risquait avoir en retour… Ainsi les chamans recevaient-ils toujours des objets de la part des gens qu’ils servaient, si bien que leur ceinture peut être conçue comme une construction sociale faite d’objets donnés par les gens qui attendent en retour la protection et l’aide du chaman.

37Soulignons pour finir qu’il fallait habituellement donner un objet ou un qalugiujaq à un chaman pour qu’il puisse opérer au bénéfice du demandeur. Ces gestes expliquent pour quelles raisons les chamans disposaient souvent de nombreux qalugiujait. Lors d’un atelier de transmission des savoirs organisé à Arviat en 2003, les aînés ont décrit ces pratiques en détail. Pour Job Muqyunniq, par exemple, « si quelqu’un souhaitait vivre une bonne vie, pour lui et sa famille, il devait attacher un objet à la ceinture chamanique d’un chaman et il recevrait quelque chose en retour » (Oosten et Laugrand, 2010 : 86). Son épouse, Eva Muqyunniq, offrit plus de détails encore, comparant ces pratiques aux cadeaux que les invités offrent aux mariés en Occident :

38

« Dès qu’un chaman arrivait dans notre communauté, nous lui montrions notre joie de l’accueillir afin qu’il/elle se sente bienvenu. Nous étions heureux, très heureux de sa présence parmi nous. Le soir, on organisait des danses au tambour en son hommage. […] Lorsque le chaman arrivait avec sa ceinture, on pouvait alors y voir toutes sortes d’objets attachés. Dans ma région, seules les femmes étaient autorisées à accrocher un objet à la ceinture du chaman, les hommes n’en avaient pas le droit. […] Ces pratiques ne faisaient pas peur. Au contraire, elles vous procuraient de la sérénité et de la joie intérieure, cela vous rendait heureux. On demandait habituellement au chaman ce qu’on voulait qu’il advienne, ou l’obtention de nourriture, ou de choses en particulier. »
(Oosten et Laugrand, 2010 : 87)

39Une fois de plus, c’est donc en faisant circuler les objets que leurs pouvoirs s’animent.

40Cette logique du don d’objet apparaît enfin avec le cas d’un bâton de chaman (Fig. 5, Laugrand/CC) utilisé pour la divination de type qilaniq, et dont une des fonctions centrales était celle de la localisation du gibier. Un tel objet me fut un jour offert en guise de remerciement pour avoir rendu possible des démonstrations de séance de qilaniq lors d’un atelier de transmission des savoirs. Composé d’un manche en bois que les Inuit avaient fait venir spécialement par avion d’une communauté située à 500 km de là, et autour duquel ils avaient attaché des lanières de pukiq, la partie ventrale du caribou que les Inuit considèrent être le vêtement des ijjirait, les esprits des montagnes associés au caribou, le bâton fut brièvement utilisé par Job Muqyunniq et ses compagnons. Il fut activé par l’appel d’un apiqsaq, un esprit défunt, lors du rituel. Il n’en fallait pas plus pour que l’objet soit maintenant considéré comme fonctionnel et réutilisable.

Conclusion

41Plus que leur essence ou leur matérialité, c’est leur circulation qui active le pouvoir de vie et de mort des objets. Un bel exemple est rapporté par le capitaine Hall, à la fin du xixe siècle. Hall raconte qu’un jour, alors qu’il avait donné un peu de pemmicans (de la viande séchée) à une femme inuit qui mourrait de faim, celle-ci lui a rendu en échange 12 figurines miniatures représentant des canards et des oiseaux de mer fabriquées en ivoire de morse, et qu’en les acceptant ainsi, cela garantirait Hall de ne jamais avoir faim dans l’avenir. Ici, le don en retour active le premier don, lui assure son efficacité en même temps qu’il oblige en quelque sorte Hall à donner à son tour pour s’assurer de ne jamais plus avoir faim. La réciprocité engendre donc une sorte de cercle vertueux.

42S’il faut donc bien saisir les contextes de production et de circulation des objets ainsi que les intentionnalités, comme l’a bien montré Alfred Gell (1998), il faut traiter ces objets comme des personnes dotées d’une agentivité et d’une subjectivité propres dès qu’ils entrent en circulation. Cette observation rejoint un point que souligne Santos Granero (2009) dans son plaidoyer pour une meilleure prise en compte de la vie des objets qui ne sont jamais de simples matériaux, composés de tel ou tel élément du vivant, comme l’entend le naturalisme. Et pourtant, à l’exception du sang menstruel, les substances et la matérialité des objets ne priment pas.

43Pour la plupart, les biomatériaux ne répondent pas à une logique substantielle, et dès qu’ils sont assemblés, transformés en objets et mis en circulation, la dynamique relationnelle l’emporte. Ces deux logiques semblent coprésentes.

44De nos jours, les Inuit continuent à donner des objets ou même de simples petits morceaux de viande aux défunts dont ils portent les noms et dont ils ont hérité les capacités. Simon Tookoome de Baker Lake (2000), l’a confié : « même si ce sont de tout petits morceaux, j’en dépose sur les tombes », comme si par ces gestes, le chasseur s’assurait d’un succès futur à la chasse.

45Avec la christianisation, les Inuit ont été amenés à se séparer de certains de leurs objets, notamment des ceintures chamaniques et des amulettes qui se sont accumulées depuis dans les musées. Ces objets dont de petits trous sont souvent la seule preuve qu’ils ont été un jour utilisés et portés les desservent, d’autant plus qu’ils répondent mal à des critères esthétiques élaborés par les Occidentaux, demeurant du coup considérés comme ayant peu d’intérêt. Or, ce sont évidemment là les objets les plus puissants s’ils étaient activés…

46Si le christianisme a peut-être affecté le pouvoir substantiel de certains objets en réduisant les pratiques de la sorcellerie, il n’a pas fait disparaître leur pouvoir relationnel, et encore moins les logiques qui dictent leur usage. À certains égards, les missionnaires ont même poussé les Inuit à produire de nouveaux objets – fabriqués avec les mêmes matériaux, comme l’illustre ces crucifix en ivoire ou toutes ces sculptures représentant des scènes chrétiennes. L’exemple des deux sculptures miniatures que Tungilik a fabriquées avec ses propres dents et offert à l’Évêque du Diocèse de la Baie d’Hudson en témoigne. Mais le christianisme a également contribué à maintenir la logique des substances vitales, faisant de Dieu « le grand esprit », le créateur de toute chose, et de Jésus, un grand guérisseur capable de capter les pouvoirs les plus puissants et de transmettre la vitalité. À cet égard, nombre d’Inuit accordent une grande importance à l’eucharistie et à ses pouvoirs.

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Mots-clés éditeurs : tambour, chamanisme, mort, miniatures, objets, amulettes, vie, Inuit, Canada, vivant

Date de mise en ligne : 07/09/2021

https://doi.org/10.3917/cas.019.0051

Notes

  • [1]
    Voir, par exemple, Coupaye et Pitrou (2018), Pitrou (2014, 2016).
  • [2]
    Pour une description plus complète d’une ethnothéorie de la vie inuit, voir parmi une abondante littérature, Saladin d’Anglure (1998 et 2007).
  • [3]
    Chasser, anngutivuq, signifie attraper et s’applique aussi bien pour une femme que pour un animal.

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