Notes
-
[1]
La première section de ce chapitre s’inspire largement du rapport soumis en 2004 par le Secrétaire général des Nations unies à l’Assemblée générale des Nations unies et intitulé « Application de la Déclaration du millénaire adoptée par l’Organisation des Nations unies » (accessible à l’adresse http :// milleniumindicators.un.org/unsd/mi/pdf/a59_282e.pdf). Son contenu reflète la position du Secrétariat de l’OCDE à laquelle ne souscrivent pas nécessairement les Nations unies.
-
[2]
Les rapports qui ont été publiés sont accessibles à l’adresse suivante : wwww. undp. org/ mdg/ donorcountryreports.html.
-
[3]
Pour plus de détails, consulter les adresses www. paris21. org et www. worldbank. org/ data/ results.html.
-
[4]
Consulter l’adresse www. unmillenniumproject. org.
-
[5]
Consulter les adresses www. millenniumcampaign. org et www. makepovertyhistory. org.
-
[6]
L’indice d’écart de pauvreté est le montant moyen de revenu manquant aux populations pauvres pour atteindre le seuil de pauvreté, exprimé en pourcentage de ce seuil.
-
[7]
Voir www. oecd. org/ dac/ stat/ crs/ hivaids.
-
[8]
Voir http ://siteresources.worldbank.org/PROJECTS/Resources/40940-1097257794915/UseCountrySystems-10-08-04.pdf.
Introduction
1La Déclaration du millénaire, qui a été adoptée lors du Sommet du millénaire de septembre 2000, fera l’objet d’un examen détaillé en 2005. Celui-ci couvrira tous les aspects de la Déclaration, y compris la paix et la sécurité, les objectifs fixés en matière de développement et la réforme des Nations unies. Ce chapitre offre un aperçu général des progrès accomplis vers les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) en fournissant des données principalement pour l’année 2002 – à mi-parcours entre l’année de référence 1990 et l’échéance de 2015. Il présente brièvement les activités menées par le CAD sur la prévention des conflits et la construction de la paix en liaison avec les OMD avant d’aborder les vastes travaux que conduit ce Comité – avec ses partenaires– pour améliorer l’efficacité de l’aide au développement.
Faire des Objectifs du millénaire pour le développement une réalité [1]
2Les OMD restent l’élément moteur du programme de coopération pour le développement non seulement au sein de la communauté des donneurs mais aussi, et surtout, dans les pays en développement eux-mêmes. Ces objectifs sont intégrés dans les stratégies, politiques et actions nationales et internationales de développement en vue d’obtenir de meilleurs résultats dans le domaine du développement.
3Les pays en développement peuvent être classés en trois grands groupes suivant les progrès qu’ils ont accomplis vers les OMD :
- La plupart des pays d’Asie et d’Afrique du Nord sont en bonne voie pour réduire de moitié le nombre de personnes vivant dans l’extrême pauvreté d’ici à 2015 et réaliser bon nombre des autres objectifs sociaux énoncés dans la Déclaration.
- L’Asie occidentale, l’Amérique latine et les Caraïbes ont bien avancé dans la réalisation de certains objectifs comme celui consistant à assurer l’éducation primaire pour tous, mais ont obtenu des résultats moins concluants dans la lutte contre la pauvreté.
- L’Afrique subsaharienne et les pays d’autres régions appartenant à la catégorie des moins avancés sont loin d’avoir fait des progrès suffisants pour la plupart des objectifs.
4La Déclaration du millénaire forme avec le Consensus de Monterrey et le Sommet de Johannesburg de 2002 un accord global reposant sur des engagements mutuels et une reddition mutuelle de comptes. Les pays en développement se sont engagés à réaffecter et à mobiliser davantage de ressources sur le plan interne, à réformer les institutions, et à adopter des politiques économiques et sociales souveraines et efficaces pour stimuler la croissance économique, et ont pris des engagements plus généraux à l’égard de la démocratie, des droits de l’homme et d’une gestion avisée et responsable des affaires publiques. Les pays développés se sont quant à eux engagés à accroître et à améliorer l’aide au développement, à mener à bien un nouveau cycle de négociations commerciales orienté vers le développement, à accorder des allégements de dette plus importants à une plus grande échelle et à encourager le transfert de technologie.
Remodeler les stratégies de développement
Pays en développement
5Les Objectifs du millénaire pour le développement ont des effets tangibles au niveau des pays. De nombreux gouvernements commencent à élaborer des stratégies nationales qui induisent des changements réels dans les politiques avec un recentrage sur les OMD. On peut citer, à cet égard, un ciblage sur le développement rural et la sécurité alimentaire (Tanzanie), l’adoption, pour chaque région, d’un cadre de référence à partir duquel des stratégies de développement seront élaborées (Albanie), des objectifs de développement qui vont au-delà de ceux convenus à l’échelle mondiale (Thaïlande et Viêt-nam), des objectifs adaptés aux priorités et aux situations nationales (Cambodge, Mozambique et Yémen), des cibles spécifiques pour des régions et des groupes sociaux (Brésil) et même l’élaboration de stratégies nationales de développement pour se relever d’un conflit (Afghanistan et îles Salomon). Plus de 73 pays en développement ont établi – avec l’aide du PNUD– des rapports nationaux sur les OMD et l’on dénombre également cinq rapports régionaux. Ces rapports font maintenant intervenir un plus grand nombre de parties prenantes, comme les gouvernements et leurs offices statistiques nationaux, qui jouent désormais un rôle plus actif dans la collecte et l’analyse d’indicateurs spécifiques. Les pays ont ainsi le sentiment de prendre les choses en main et sont plus fortement motivés.
Pays donneurs
6De nombreux pays donneurs reconnaissent aussi qu’il est utile d’établir des rapports sur leur contribution à la réalisation des OMD afin de montrer leur action à l’appui de ces objectifs et de souligner l’importance de la réciprocité entre les pays donneurs et les pays partenaires. Le Danemark a été le premier pays à publier un rapport en 2003 et les Pays-Bas et la Suède l’ont suivi en mai et juin 2004, respectivement. Vingt-trois pays membres de l’Union européenne ont répondu à une demande du Conseil de l’UE qui les invitait à établir un rapport pour le mois de novembre 2004 de sorte que la Commission européenne puisse rédiger un rapport de synthèse en temps voulu pour le bilan de la mise en œuvre de la Déclaration du millénaire que doit dresser l’Organisation des Nations unies en 2005. L’Australie, le Canada, le Japon, la Nouvelle-Zélande, la Norvège et la Suisse ont également entrepris de rédiger des rapports et les États-Unis en sont au stade préparatoire du rapport qu’ils doivent présenter pour l’examen des Nations unies [2].
7On estime, en première analyse, que si l’APD est toujours destinée à lutter contre la pauvreté, de manière directe ou indirecte, environ 43 % du total, soit près de 24 milliards USD, durant la période 2001-02 étaient aussi expressément axés sur les autres objectifs. C’est ainsi que sur ce total, on a consacré plus d’un milliard USD à l’enseignement primaire, plus de 1.2 milliard USD à la lutte contre le VIH/sida, environ 2.1 milliards USD aux programmes relatifs à la protection de l’environnement et près de 5.1 milliards USD à l’allègement de la dette.
Système multilatéral
8Les OMD ont changé la façon dont les organismes des Nations unies traitent les questions de développement en améliorant la cohérence et la coordination au niveau des pays. Les plans-cadres des Nations unies pour l’aide au développement sont maintenant recentrés sur ces objectifs. La Banque mondiale et le Fond monétaire international les utilisent pour orienter leurs travaux et ont adopté, en coordination avec les Nations unies, une approche commune pour l’évaluation, au niveau des pays, des actions à entreprendre en vue de réaliser ces objectifs dans le contexte des stratégies nationales de développement et des cadres stratégiques de lutte contre la pauvreté.
9De nombreux organismes des Nations unies utilisent le cadre défini par les OMD pour suivre l’exécution de leurs propres activités, comme celles qui ont trait au programme relatif à l’éducation pour tous de l’UNESCO, à la surveillance de la santé maternelle et infantile à l’OMS/ UNICEF ou encore aux mesures de résultats effectuées par la FAO, le FIDA et le PAM pour la sécurité alimentaire, la nutrition, la lutte contre la faim et l’élimination de la pauvreté rurale. Ces objectifs sont de plus en plus largement utilisés comme instrument de référence pour la rédaction de grands rapports internationaux comme le Rapport mondial sur le développement humain et le Rapport sur la santé dans le monde, et d’un nouveau rapport annuel de la Banque mondiale, le Rapport de suivi mondial, qui examine les politiques à mettre en œuvre pour atteindre les OMD.
10Le manque de données fiables et à jour pour suivre les progrès accomplis vers les objectifs et en rendre compte a incité à prendre des mesures pour améliorer la situation. Premièrement, une coopération inter-organisations sans précédent a été instaurée pour dresser un bilan mondial et régional des progrès réalisés qui soit aussi cohérent que possible compte tenu des données disponibles. Un aperçu des résultats de ces travaux est donné au tableau 3.1. Deuxièmement, les OMD ont stimulé la demande et l’apport d’un soutien international coordonné en faveur du renforcement durable des capacités statistiques nationales, la collecte de données de qualité, fiables et comparables étant indispensable pour élaborer et mettre en œuvre des politiques devant permettre d’atteindre les objectifs. On peut citer à cet égard le Plan d’action de Marrakech pour la statistique, lequel bénéficie du ferme soutien du consortium PARIS21 qu’héberge la direction de la coopération pour le développement de l’OCDE [3].
11Le Projet Objectifs du millénaire des Nations unies sur lequel un rapport sera présenté le 17 janvier 2005, a mis en contact des centaines de responsables politiques, de praticiens et d’experts répartis entre dix groupes de travail afin d’élaborer de nouvelles stratégies pour atteindre les objectifs. Ce projet a identifié les réformes institutionnelles, les investissements et autres interventions nécessaires pour intensifier les efforts axés sur la réalisation des objectifs. Une collaboration a été instaurée avec un certain nombre d’équipes locales des Nations unies et de la Banque mondiale et d’autres partenaires pour aider les gouvernements à mettre leurs stratégies de lutte contre la pauvreté (ou des instruments d’action équivalents) en harmonie avec une stratégie spécifique à long terme devant permettre de réaliser les objectifs à l’horizon de dix ans découlant de l’échéance de 2015 [4].
12Enfin, la Campagne Objectifs du millénaire vise à mobiliser un soutien politique en faveur de la Déclaration du millénaire sur la base d’une collaboration avec des réseaux de parlementaires, des collectivités locales, des organes d’information, des organisations confessionnelles, des associations de jeunes, des organisations de la société civile et d’autres mouvements. Dans le cadre de consultations avec des représentants de la société civile et d’autres partenaires des pays en développement organisées en Amérique latine, en Afrique, en Asie et dans les pays arabes, elle vise à forger de vastes coalitions pour la promotions des OMD. Un mouvement se développe également en faveur de ces objectifs dans les pays développés, surtout en Europe où une vaste coalition se met en place sous l’impulsion de la société civile pour focaliser l’attention sur l’examen quinquennal de la Déclaration du millénaire qui aura lieu prochainement, le slogan généralement retenu étant « Make poverty history » [5] (Éliminons la pauvreté).
Encadré 3.1. Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) Objectifs et cibles tirés de la Déclaration du millénaire
Cible 1 : Réduire de moitié, entre 1990 et 2015, la proportion de la population dont le revenu est inférieur à un dollar par jour
Cible 2 : Réduire de moitié, entr 1990 et 2015, la proportion de la population qui souffre de la faim
Objectif 2 : Assurer une éducation primaire pour tous
Cible 3 : D’ici à 2015, donner à tous les enfants, garçons et filles, partout dans le monde, les moyens d’achever un cycle complet d’études primaires
Objectif 3 : Promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes
Cible 4 : Éliminer les disparités entre les sexes dans les enseignements primaire et secondaire d’ici à 2005 si possible et à tous les niveaux de l’enseignement en 2015 au plus tard
Objectif 4 : Réduire la mortalité des enfants de moins de 5 ans
Cible 5 : Réduire de deux tiers, entr 1990 et 2015, le taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans
Objectif 5 : Améliorer la santé maternelle
Cible 6 : Réduire de trois quarts, entr 1990 et 2015, le taux de mortalité maternelle
Objectif 6 : Combattre le VIH/sida, le paludisme et d'autres maladies
Cible 7 : D’ici à 2015, avoir stoppé la propagation du VIH/sida et commencé à inverser la tendance actuelle
Cible 8 : D’ici à 2015, avoir maîtrisé le paludisme et d’autres grandes maladies, et avoir commencé à inverser la tendance actuelle
Objectif 7 : Assurer un environnement durable
Cible 9 : Intégrer les principes du développement durable dans les politiques nationales et inverser la
tendance actuelle à la déperdition des ressources environnementales
Cible 10 : Réduire de moitié, d’ici 2015, le pourcentage de la population qui n’a pas accès de façon durable à un approvisionnement en eau potable salubre et à des services d’assainissement de base
Cible 11 : Réussir, d’ici à 2020, à améliorer sensiblement la vie d’au moins 100 millions d’habitants de taudis
Objectif 8 : Mettre en place un partenariat mondial pour le développement
Cible 12 : Poursuivre la mise en place d’un système commercial et financier multilatéral ouvert, fondé sur des règles, prévisible et non discriminatoire. Cela suppose un engagement en faveur d’une bonne gouvernance, du développement et de la lutte contre la pauvreté, aux niveaux tant national qu’international
Cible 13 : S’attaquer aux besoins particuliers des pays les moins avancés. La réalisation de cette cible suppose l’admission en franchise et hors contingents des produits exportés par les pays les moins avancés; l’application du programme renforcé d’allégement de la dette des PPTE et l’annulation des dettes publiques bilatérales; et l’octroi d’une APD plus généreuse aux pays qui démontrent leur volonté de lutter contre la pauvreté
Cible 14 : Répondre aux besoins particuliers des petits États insulaires en développement (en appliquant le Programme d’action pour le développement durable des petits États insulaires en développement et les conclusions de la vingt-deuxième session extraordinaire de l’Assemblée générale)
Cible 15 : Traiter globalement le problème de la dette des pays en développement, par des mesures d’ordre national et international propres à rendre leur endettement viable à long terme
Cible 16 : En coopération avec les pays en développement, formuler et appliquer des stratégies qui permettent aux jeunes de trouver un travail décent et utile
Cible 17 : En coopération avec l’industrie pharmaceutique, rendre les médicaments essentiels disponibles et abordables dans les pays en développement
Cible 18 : En coopération avec le secteur privé, faire en sorte que les avantages des nouvelles technologies, en particulier des technologies de l’information et de la communication, soient accordés à tous
Note : Les Objectifs du millénaire pour le développement et les cibles correspondantes sont tirés de la Déclaration du millénaire qu’ont signée 189 pays, dont 147 représentés par leur chef d’État, en septembre 2000 (wwww. un. org/ documents/ ga/ res/55/a55r002.pdf A/RES/55/2). Les objectifs et les cibles sont étroitement liés et doivent être considérés comme formant un tout. Ils représentent un partenariat entre les pays en développement et les pays développés, tous résolus, comme il est dit dans la Déclaration du millénaire, à « créer – aux niveaux tant national que mondial – un climat propice au développement et à l’élimination de la pauvreté ».
Vue d’ensemble des progrès accomplis vers les Objectifs du millénaire po
Vue d’ensemble des progrès accomplis vers les Objectifs du millénaire po
Progresser dans la réalisation des Objectifs du millénaire pour le développement
13Si l’on s’accorde à reconnaître l’importance des OMD et si l’on observe quelques tendances encourageantes aux niveaux régional et sous-régional, la communauté mondiale dans son ensemble ne progresse pas aussi rapidement qu’elle le pourrait. Des progrès encourageants ont été enregistrés dans certaines régions, notamment en Asie s’agissant de la réduction de la pauvreté. Mais nombre d’autres régions et pays ne font guère de progrès dans la réalisation de l’un quelconque des objectifs.
Objectif 1 – Éliminer l’extrême pauvreté et la faim
14Les progrès concernant la réduction de la pauvreté monétaire demeurent inégaux et il y a même eu une détérioration dans de nombreux pays. Si une grande partie de l’Asie de l’Est, du Sud-Est et du Sud et de l’Afrique du Nord est sur la bonne voie de façon générale pour réduire de moitié l’incidence de la pauvreté d’ici à 2015, on a peu ou pas progressé en Afrique subsaharienne ainsi qu’en Amérique latine et dans les Caraïbes, et en Asie occidentale la pauvreté s’est aggravée. En 2001, près de la moitié de la population de l’Afrique au sud du Sahara luttait pour survivre avec un dollar par jour, voire moins, soit la même situation qu’en 1990. L’indice d’écart de pauvreté [6] pour cette région est presque trois fois supérieur à celui de l’Asie du Sud, deuxième région la plus pauvre de la planète.
15La proportion de la population des pays en développement qui souffre de la faim a diminué en Asie de l’Est et du Sud-Est ainsi qu’en Amérique latine et dans les Caraïbes dans les années 90. Si elle a aussi régressé en Asie du Sud, le rythme des progrès n’est pas suffisant pour assurer la réalisation de l’objectif fixé pour 2015. En Afrique, la production vivrière a tout juste suivi le rythme d’accroissement de la population depuis 1980, en raison de l’épuisement des sols, de la diminution de la superficie des terres arables disponibles pour chaque personne et de la forte croissance démographique. En Asie occidentale, l’incidence de la faim s’est accrue.
Objectif 2 – Assurer une éducation primaire pour tous
16Dans toutes les régions, les pays en développement ont accru leur taux net de scolarisation dans le primaire entre 1991-1992 et 2001-2002, mais l’Afrique subsaharienne, l’Asie du Sud et l’Océanie sont encore loin de l’objectif. De surcroît, 121 millions d’enfants ne sont toujours pas scolarisés, 65 millions d’entre eux étant des filles et leur nombre étant particulièrement élevé en Afrique, en Asie du Sud et dans les pays les moins avancés. Il est possible d’améliorer la situation – les taux nets de scolarisation dans le primaire ont augmenté sensiblement entre 1990 et 2000 au Bénin, en Érythrée, en Gambie, au Malawi, au Mali, au Rwanda, au Sénégal et au Togo – mais de gros efforts supplémentaires s’imposent.
Objectif 3 – Promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes
17On a enregistré de nets progrès vers la cible relative à l’élimination des disparités entre les sexes dans les enseignements primaire et secondaire d’ici à 2005. Cette cible a été atteinte ou est en passe de l’être dans la plupart des régions à l’exception de l’Afrique subsaharienne et de l’Asie du Sud et de l’Ouest qui pourraient rattraper leur retard d’ici à 2010. Les taux de scolarisation des filles ont augmenté plus rapidement que ceux des garçons dans toutes les régions et le rapport filles/garçons dans l’enseignement primaire a progressé de manière impressionnante entre 1990 et 2000 dans de nombreux pays, comme le Bangladesh, la Gambie, la Mauritanie, le Népal et le Soudan. Ces progrès doivent toutefois se répercuter au niveau du secondaire, moins de 80 filles pour 100 garçons étant scolarisées en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud, de façon générale.
18Peu de progrès ont été enregistrés selon les autres indicateurs de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes. Les pourcentages de femmes dans l’emploi salarié non agricole n’ont guère changé depuis 1990, quelle que soit la région considérée, et ils restent très inférieurs aux chiffres correspondants pour les hommes dans toutes les régions, sauf en Amérique latine et dans les Caraïbes (où 43% des salariés en 2002 étaient des femmes) et en Asie de l’Est (40%). Les femmes sont encore largement sous-représentées au sein des Parlements nationaux dans la plupart des régions. En Afrique du Nord, en Asie du Sud et de l’Ouest et en Océanie, elles occupent moins de 10% des sièges.
Objectif 4 – Réduire la mortalité infantile
19L’Afrique du Nord, l’Amérique latine et les Caraïbes, ainsi que l’Asie du Sud-Est sont en assez bonne position pour réduire la mortalité infantile de deux tiers. Les progrès réalisés ont été plus modestes en Asie du Sud et négligeables en Asie de l’Ouest, en Afrique subsaharienne et en Océanie. Les pays d’Afrique subsaharienne continuent d’enregistrer des taux records pour la mortalité des enfants de moins de cinq ans, celle-ci étant estimée à 174 décès pour 1000 naissances vivantes, soit près du double du chiffre relevé pour la région venant en deuxième position – l’Asie du Sud – et plus de vingt fois le taux mesuré pour les régions développées.
Objectif 5 – Améliorer la santé maternelle
20Le nombre de décès liés à la maternité en 2000 est estimé à 529000 dans le monde. Les deux régions les plus touchées sont l’Afrique subsaharienne où le taux a été le plus élevé, avec 920 décès pour 100 000 naissances vivantes, et l’Asie du Sud avec 520 décès pour 100000 naissances. Des données récentes sur la proportion d’accouchements qui se font en présence de personnel de santé qualifié, élément capital pour la réduction des décès liés à la maternité, font heureusement apparaître des progrès appréciables en Afrique du Nord et en Asie de l’Est et du Sud-Est. Toutefois, un tiers seulement des naissances en Asie centrale et du sud ont été assistées en 2000, contre un quart en 1990.
Objectif 6 – Combattre le VIH/sida, le paludisme et d’autres maladies
21Les donneurs accordent un appui politique et financier plus important à la lutte menée pour stopper la propagation du VIH/sida et d’autres grandes maladies, notamment le paludisme et la tuberculose. Près de 2.5 milliards USD ont été affectés chaque année à la lutte contre le VIH/sida durant la période 2000-2002 [7], mais les montants annuels disponibles restent nettement en dessous des besoins estimés. Comme indiqué dans le rapport de 2004 sur le sida, il n’y a pas de région où le VIH ne constitue pas une grave menace pour la population, et il n’y a presque pas de pays où la propagation du VIH/sida ait été stoppée définitivement.
22Le nombre de personnes contaminées par le VIH/sida est passé de 35 millions en 2001 à 38 millions en 2003 et le nombre de personnes contaminées en 2003 a été plus élevé que jamais : 4.8 millions. Sur le nombre de décès liés au sida en 2003, qui est estimé à 2.9millions, 2.2 millions ont eu lieu en Afrique subsaharienne. La pandémie progresse toujours autant dans de nombreux pays et de par son ampleur, le problème a des répercussions catastrophiques sur la santé, la pauvreté, l’éducation et la faim, et même sur la capacité de gouverner des dirigeants. Toutefois, dans les pays qui ont adopté les programmes nécessaires de prévention, de dépistage et de contrôle, comme en Ouganda, des progrès ont été accomplis.
23Malgré des actions notoires menées pour un coût raisonnable contre le paludisme, la tuberculose et d’autres maladies infectieuses, l’incidence de ces maladies augmente en Afrique subsaharienne et elle n’a diminué que dans de faibles proportions dans la plupart des autres régions.
Objectif 7 – Assurer un environnement durable
24Bien que les données sur l’eau potable et l’assainissement soient encore partielles, on peut dire que des progrès ont été accomplis dans toutes les régions. L’accès à une eau potable améliorée est pratiquement universel en milieu urbain, sauf en Afrique subsaharienne et en Océanie, où les chiffres sont en baisse. Des pas en avant importants ont été faits en zone rurale dans toutes les régions, mais seuls quelques pays ont réalisés des progrès suffisants pour atteindre l’objectif consistant à réduire de moitié, d’ici à 2015, le pourcentage de la population n’ayant pas accès à l’eau potable et à l’assainissement. On s’est nettement rapproché de l’objectif en matière d’assainissement, mais il reste qu’en 2000,2.6milliards d’habitants de la planète ne bénéficiaient toujours pas d’un assainissement amélioré.
25Même des régions qui ont fait des progrès notables par rapport à nombre d’autres objectifs, par exemple certaines parties de l’Asie, ont un bilan plus médiocre dans le domaine de l’environnement. Les zones protégées ont été étendues dans toutes les régions, mais la couverture forestière a été réduite dans certaines régions du monde, notamment celles où il y a des forêts tropicales. La consommation d’énergie et les émissions de dioxyde de carbone par habitant ont augmenté dans les pays en développement, mais elles ont fléchi dans les économies en transition, du fait de la baisse de leur production industrielle durant les années 90. Dans le monde entier, les chlorofluorocarbones, qui appauvrissent la couche d’ozone, ne sont presque plus utilisés.
26Quant à la mise en œuvre des conventions mondiales, les réalisations sont inégales. Après sa ratification par la fédération de Russie, le Protocole de Kyoto sur les changements climatiques va maintenant entrer en vigueur. Le manque de ressources financières a limité la mise en œuvre de la Convention sur la lutte contre la désertification, mais des progrès plus sensibles ont été faits sur la voie de l’application intégrale de la Convention sur la diversité biologique : des indicateurs mesurables et des objectifs précis ont été adoptés afin de freiner l’appauvrissement de la biodiversité d’ici à 2010. De plus, 150 pays possédant 85% de la surface boisée de la planète ont réalisé des progrès en élaborant des critères et des indicateurs pour une gestion durable des forêts.
Bâtir un partenariat mondial vigoureux
Objectif 8 – Mettre en place un partenariat mondial pour le développement
27L’engagement pris par les pays développés de soutenir les pays en développement qui s’efforcent d’atteindre les sept premiers objectifs, en supprimant les obstacles au commerce, en allant plus loin dans l’allègement de la dette et en augmentant l’aide au développement, est essentiel pour la réalisation des OMD. Quelques progrès ont été réalisés, notamment en ce qui concerne les flux d’aide, mais le niveau de soutien reste très en dessous de ce qui serait nécessaire.
28Après avoir marqué le pas pendant dix mois, à la suite de l’échec des négociations lors de la réunion ministérielle de l’OMC à Cancún (Mexique), le cycle de négociations commerciales de Doha a recommencé à progresser depuis que les 147 gouvernements membres de l’OMC se sont mis d’accord, en juillet 2004, sur un nouveau cadre de négociations. Pour la première fois, les gouvernements membres se sont fixés une date limite pour la suppression de toute forme de subvention à l’exportation de produits agricoles et sont convenus de réduire les aides internes à l’agriculture qui faussent les échanges. Il faut maintenant passer de ce schéma à un accord qui procure des avantages notables au monde en développement.
29En avril 2004, 37 pays comptant parmi les moins avancés avaient été classés comme remplissant les conditions pour bénéficier des avantages de l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés. Sur ces pays, 14 avaient atteint le « point de décision » et 13 le « point d’achèvement », 54 milliards USD leur ayant été alloués au titre de l’allègement de dette. Le ratio dette-revenu national brut (RNB) de ces pays est tombé de 109% en 1997 à 86 % en 2002. Mais avec la détérioration des termes de l’échange qu’ont connue de nombreux pays, il n’est pas certain que leur dette reste soutenable.
30Les apports d’aide publique au développement ont continué d’augmenter en 2003 pour atteindre 68.5 milliards USD, chiffre le plus élevé jamais atteint, que ce soit en valeur nominale ou en valeur réelle, et qui représente 0.25% du RNB global des membres du CAD (voir le chapitre 4 pour plus de détails).
31L’objectif8 comprend également des cibles renvoyant à l’élaboration de stratégies en faveur de l’emploi des jeunes, de l’accès aux médicaments essentiels et de la diffusion des nouvelles technologies.
32Il est essentiel que les jeunes puissent trouver un travail décent et utile si l’on veut parvenir à un développement durable et équitable dans les pays en développement où les jeunes représentent 23% de l’ensemble de la main-d’œuvre, contre 14% dans les pays développés. Les Nations unies, l’OIT et le Réseau pour l’emploi des jeunes de la Banque mondiale s’emploient à réaliser cette cible. Dans l’ensemble, les jeunes sur le marché du travail restent nettement désavantagés par rapport aux individus plus âgés. Les taux de chômage des jeunes dépassent ceux des adultes dans toutes les régions. Entre 2002 et 2003, le nombre de jeunes au chômage a progressé de près de 2% pour s’établir à 88.2millions alors que le chômage total n’a augmenté que de 0.2%. Le taux de chômage des jeunes a augmenté en Asie du Sud-Est, dans les pays de la CEI, en Amérique latine et dans les Caraïbes, et en Asie de l’Est. Ce n’est que dans les régions développées que le chômage des jeunes a légèrement diminué au cours de la décennie.
33En 1999,65 % seulement de la population des pays en développement avait régulièrement accès aux médicaments essentiels, mais cela représentait toutefois une amélioration par rapport à l’année 1987 où ce pourcentage était estimé à 55 %. La répartition géographique des médicaments essentiels est aussi très inégale. En Afrique subsaharienne et en Asie centrale et du Sud, plus de 50 % de la population n’a pas accès aux médicaments essentiels, même les plus courants. Diverses initiatives visant à améliorer l’accès aux médicaments antirétroviraux pour les malades du sida sont actuellement mises en œuvre par des organismes internationaux, des gouvernements, des organisations non gouvernementales et des entités privées. La collaboration instaurée entre le secteur public et le secteur privé a permis de réduire les prix des médicaments antirétroviraux de 95 % ces dernières années. Certains pays fournissent maintenant gratuitement des antirétroviraux aux malades du sida tandis que d’autres s’emploient à apporter des restrictions aux brevets pour rendre ces médicaments plus accessibles.
34L’accès au téléphone et à l’Internet dans les pays en développement s’est considérablement développé ces dernières années. Le nombre total d’abonnés au téléphone (fixes et mobiles) est passé de 530 millions en 1990 à 2 259 millions en 2002. La progression la plus rapide a concerné les téléphones mobiles. Le nombre d’abonnés au téléphone mobile cellulaire qui était d’à peine 11 millions en 1990, a dépassé 1.1 milliard à la fin 2002. Une personne sur cinq dans le monde a maintenant un téléphone mobile, contre une sur 339 en 1991. En 2002, les abonnés au téléphone mobile étaient plus nombreux que les abonnés au téléphone fixe, une forte progression dans l’utilisation du mobile ayant été enregistrée en particulier dans les régions en développement. C’est ainsi que la Chine, dépassant les États-Unis, est devenue le premier marché mondial du téléphone mobile. La croissance a été particulièrement soutenue en Afrique où la quasi-totalité des pays comptent maintenant davantage d’abonnés au téléphone mobile qu’au téléphone fixe.
35Le nombre d’ordinateurs personnels est passé de quelque 120 millions en 1990 à 615 millions en 2002. Si les pays en développement détenaient environ 20 % du parc total d’ordinateurs personnels au début des années90, ils en possèdent maintenant quelque 30 %. L’utilisation de l’Internet a progressé à un rythme stupéfiant. En 1990, 27 pays seulement avaient un accès direct au réseau mondial. Aujourd’hui, presque tous les pays du monde sont connectés à l’Internet et à la fin de 2002, on dénombrait 625 millions d’utilisateurs dans le monde. Selon des estimations, quelque 10% de la population mondiale étaient connectés à la fin 2002. Plus de la moitié de la population adulte est connectée dans la plupart des pays développés. C’est dans les pays en développement que l’utilisation de l’Internet a progressé le plus vite. En 2002, ces pays représentaient 30% de l’ensemble des utilisateurs de l’Internet, soit une progression spectaculaire par rapport à 1991 où le pourcentage correspondant était de 2 %.
2005 – une année décisive pour la réalisation des OMD
36Dix années seulement nous séparent de l’échéance de 2015, et 2005 sera une année charnière pour la réalisation des OMD, surtout en Afrique. Pour vaincre la pauvreté, il faudra faire un bond prodigieux, tant sur le plan matériel que dans nos ambitions : plus de stratégies et de politiques prises en main par les pays, des institutions plus solides, des processus participatifs de plus grande envergure, des investissements ciblés dans l’infrastructure économique et sociale, et davantage de ressources, tant internes qu’externes. Tout cela doit se faire très vite si l’on veut avoir une chance raisonnable d’atteindre les objectifs.
37Comme indiqué dans le rapport des Nations unies : « Théoriquement, il est encore possible d’atteindre les Objectifs du millénaire, même dans les pays les plus pauvres, mais le temps presse et la volonté politique fait largement défaut. Il se peut que l’examen de la mise en œuvre de la Déclaration du millénaire cinq ans après son adoption soit la dernière occasion de prendre les mesures nécessaires pour donner un coup d’accélérateur à l’énorme dynamique créée ces dernières années. Il faut absolument que nous saisissions cette occasion. »
Paix et sécurité
38Il est également essentiel de ne pas négliger les pays et régions qui pâtissent d’une insécurité et de conflits récurrents ou tentent de sortir de cette situation. Dans ses travaux sur les pays qui connaissent une situation précaire, sont touchés par un conflit ou y sont particulièrement exposés – voir le chapitre intitulé « Le CAD et ses travaux »– le CAD aide à faire en sorte que les besoins de ces populations soient pris en compte aussi pleinement que possible, eu égard aux défis posés par leur environnement. L’encadré3.2 étudie les liens existant entre la paix et la sécurité, et les OMD.
Encadré 3.2. La prévention des conflits, la construction de la paix et les OMD
La communauté du développement met de plus en plus l’accent sur l’insécurité et les conflits en tant qu’obstacles au développement politique, économique et social. Si les pays veulent créer les conditions qui leur permettront d’échapper au cercle vicieux où l’insécurité, la criminalisation et le sous-développement se renforcent mutuellement, ils doivent s’attaquer simultanément aux aspects socio-économiques et à ceux concernant la sécurité. Le lien existant entre les conflits et la pauvreté a été clairement établi. Il est toutefois essentiel d’envisager les conflits non seulement comme un corollaire de la pauvreté mais aussi comme l’une de ses principales causes.
Le Réseau du CAD sur les conflits, la paix et la coopération pour le développement a récemment consacré des travaux (Réforme des systèmes de sécurité et gouvernance : principes et bonnes pratiques) au rôle positif que peut jouer la réforme intégrée du système de sécurité d’un pays dans la stabilisation de pays qui connaissent une situation précaire, sont touchés par un conflit ou y sont particulièrement exposés. La notion classique de sécurité fait actuellement l’objet d’une redéfinition pour inclure non seulement la stabilité de l’État et la sécurité des nations, mais aussi la sécurité et le bien-être de leurs populations et la possibilité pour celles-ci de vivre à l’abri de la peur. La prise de conscience du fait que la sécurité et le développement sont indissociables permet d’intégrer les considérations de sécurité dans les pays partenaires dans les orientations stratégiques et les préoccupations liées aux principes de bonne gestion, le public étant ainsi appelé à faire preuve d’une plus grande vigilance à l’égard de la politique de sécurité. Un système de sécurité efficace, obéissant à l’obligation de rendre des comptes et placé sous le contrôle des civils dans un environnement démocratique aide à réduire le risque de conflit, ce qui crée un environnement propice au développement. Les orientations concernant la réforme des systèmes de sécurité visent à relever trois défis interdépendants auxquels sont confrontés tous les États : i) définir un cadre institutionnel clair pour assurer la sécurité, qui permette d’intégrer la politique de sécurité et celle du développement et fasse appel à tous les acteurs concernés ; ii) renforcer la gestion des institutions chargées de la sécurité ; et iii) constituer des forces de sécurité compétentes et professionnalisées qui soient responsables devant les instances civiles.
La communauté internationale a encore beaucoup à faire pour que les questions touchant aux conflits soient prises en compte dans l’architecture du développement international et dans le cadre de son engagement auprès des pays et régions partenaires. Il faut que les donneurs, et les organisations bilatérales et multilatérales harmonisent mieux leur soutien, sous la conduite des pays partenaires. La réforme des systèmes de sécurité appelle aussi l’adoption d’approches associant de manière harmonieuse et efficace l’ensemble des services concernés de l’administration du pays donneur. Un soutien des efforts déployés aux échelons régional et sous-régional peut compléter utilement l’aide fournie à l’échelon local.
Les recommandations futures concernant la réalisation des OMD devraient tenir compte de la nécessité d’élargir et d’approfondir l’analyse des conflits et de leurs causes ainsi que des facteurs politiques, économiques et sociaux qui les alimentent. La mise en place de mécanismes d’alerte précoce et de réaction rapide et souple dans des situations de conflit complexes est tout aussi importante. Qui plus est, une plus large place doit être faite aux programmes destinés à empêcher activement l’éruption de conflits et à aider les collectivités à faire face à des conflits de manière non violente.
La promotion de la paix est un processus dynamique qui requiert un engagement et une vision à long terme, et non pas une solution technique rapide, même en cas de crise complexe de courte durée. Faute d’une telle approche, des progrès vers les OMD seront beaucoup plus difficiles à réaliser.
Alignement, harmonisation et ciblage sur les résultats au service de l’efficacité en matière de développement
39Dans leur déclaration, les participants au Forum de haut niveau sur l’harmonisation qui s’est tenu à Rome en février 2003, ont souscrit aux bonnes pratiques sur l’harmonisation et l’alignement définies par le CAD et les banques multilatérales de développement. Depuis lors, la communauté internationale met de plus en plus l’accent sur l’amélioration des procédures, pratiques et politiques d’aide afin d’améliorer les résultats en matière de développement. Les donneurs commencent à simplifier leurs procédures et pratiques, à collaborer pour la réalisation des travaux d’analyse, à recentrer leur attention sur la production de résultats en matière de développement, et à recourir à la coopération déléguée, à des procédures communes de passation des marchés et de gestion financière, ainsi qu’à des dispositifs communs pour les approches sectorielles et le soutien budgétaire. De plus, des discussions ont été engagées pour déterminer comment appliquer ces bonnes pratiques aux financements provenant des Fonds mondiaux et dans des conditions de partenariat difficiles. Toutefois, les bonnes pratiques ne sont pas encore devenues la règle. Des efforts considérables doivent encore être déployés par les donneurs – bilatéraux et multilatéraux – en collaboration avec les pays partenaires, si l’on veut accroître collectivement l’efficacité de l’aide.
Groupe de travail du CAD sur l’efficacité de l’aide
40Les activités menées dans ce domaine sont orientées et soutenues par le Groupe de travail du CAD sur l’efficacité de l’aide et les pratiques des donneurs. Ses membres – organismes bilatéraux, Banque mondiale, FMI, banques régionales de développement, organismes des Nations unies et 14 pays partenaires– collaborent étroitement entre eux et avec d’autres pays partenaires. Le Groupe de travail a pour mandat de suivre et de rendre compte des progrès accomplis, et de faciliter et de soutenir la concrétisation des engagements pris dans la Déclaration de Rome. Ses travaux s’articulent autour de cinq axes : l’harmonisation et l’alignement (équipe de projet); la gestion des finances publiques (activité conjointe); la gestion axée sur les résultats en matière de développement (activité conjointe) ; le renforcement des capacités de passation des marchés dans les pays partenaires (Table ronde avec la Banque mondiale); et le suivi des progrès concernant le déliement de l’aide.
41Le Groupe de travail est devenu le pôle institutionnel international pour les travaux à mener durant la période séparant le Forum de Rome du Forum de haut niveau sur l’harmonisation, l’alignement et le ciblage sur les résultats au service de l’efficacité en matière de développement que le gouvernement français accueillera à Paris, du 28février au 2mars 2005. Pour orienter les préparatifs du Forum de Paris, la Banque mondiale préside un comité de direction des membres du Groupe de travail composé de représentants du Secrétariat du CAD, du PNUD, des banques régionales de développement, de la Commission européenne, du Danemark, de la France, du Japon, des États-Unis et de trois pays partenaires – le Bangladesh, l’Éthiopie et le Nicaragua.
Contrôle et soutien politiques
42Le contrôle et le soutien politiques sont assurés aux niveaux les plus élevés des organismes bilatéraux et multilatéraux pour entretenir la dynamique requise par les changements à apporter aux pratiques en matière d’aide. À la réunion à haut niveau du CAD d’avril 2004, les ministres de la Coopération pour le développement et les responsables des organismes d’aide ont déclaré : « Nous veillerons à ce que nos organismes d’aide et leur personnel sur le terrain appliquent les plans d’action […] afin de donner suite à la réunion de Rome. Nous reconnaissons que cela nécessitera des changements importants, au niveau des services centraux comme dans les modes actuels d’acheminement de l’aide. » À l’issue de la réunion annuelle tenue en octobre 2004 par le Comité du développement du FMI/Banque mondiale, les ministres ont déclaré dans leur communiqué : « Nous sommes déterminés à saisir l’occasion offerte par le deuxième Forum de haut niveau sur l’harmonisation, qui doit se tenir à Paris au printemps prochain, pour donner une suite concrète à ces accords (de Rome), sous forme d’engagements clairs et précis assortis d’un calendrier, et pour demander que des indicateurs et des valeurs de référence soient établis, qui permettent d’assurer le suivi de la participation, au niveau du pays, de tous les partenaires à cet effort. »
Des progrès étendus mais peu marqués
43D’après la base de données nationales de la Banque mondiale, plus de 60 pays partenaires et 40 organismes bilatéraux et multilatéraux participent actuellement à des activités en matière d’harmonisation et d’alignement. Mais aussi impressionnants que soient l’éventail et la couverture géographique de ces activités, les bonnes pratiques ne se sont pas encore généralisées. Au regard de l’engagement pris par les donneurs d’opérer des changements en profondeur de leur mode de gestion et d’acheminent de l’aide dans les pays partenaires, les progrès accomplis ne se sont pas encore suffisamment accélérés pour déboucher sur la mise en œuvre rigoureuse et systématique des bonnes pratiques. Cette appréciation s’appuie sur les résultats d’une enquête effectuée par l’équipe de projet du CAD sur l’harmonisation et l’alignement, des informations tirées des travaux de facilitation menés par les pays membres du CAD et des activités en matière d’harmonisation et d’alignement conduites par d’autres pays partenaires, sous la direction de la Banque mondiale. Des efforts considérables doivent encore être déployés par les donneurs – bilatéraux et multilatéraux – en collaboration avec les pays partenaires, si l’on veut accroître collectivement l’efficacité de l’aide.
44L’enquête du CAD sur l’appropriation, l’harmonisation et l’alignement effectuée dans les 14 pays partenaires associés à l’équipe de projet – où les progrès en matière de mise en œuvre étaient censés être les plus importants – est particulièrement révélatrice. Cette enquête qui a pour objet de suivre la mise en œuvre à l’échelon local des engagements pris à Rome au moyen de 13 indicateurs (voir encadré 3.3), est conduite non pas par des consultants externes mais par des facilitateurs représentant les pays partenaires et les donneurs, et doit faire le bilan des progrès accomplis dans les trois domaines essentiels du programme d’action de Rome, à savoir :
- L’appropriation – capacité du gouvernement de prendre en mains ses programmes de développement.
- L’alignement–mesure dans laquelle les programmes des donneurs soutiennent les politiques de développement d’un pays partenaire et utilisent ses systèmes et procédures.
- L’harmonisation – mesure dans laquelle les donneurs rationalisent leur comportement collectif, procèdent à des échanges d’informations et simplifient leurs procédures.
Encadré 3.3. Enquête du CAD sur l’appropriation, l’harmonisation et l’alignement
Cadre d’indicateurs de l’harmonisation et de l’alignement
Cadre d’indicateurs de l’harmonisation et de l’alignement
45S’il existe des différences notables entre les pays, l’image d’ensemble qui se dégage est celle de pays partenaires qui s’approprient de plus en plus leurs programmes de développement et prennent en main la fixation des priorités de leurs programmes d’aide. Par ailleurs, l’élaboration des stratégies sectorielles opérationnelles reste dissociée de leur intégration dans des cadres budgétaires à moyen terme. Les questions de gouvernance et d’obligation de comptes continuent de poser des problèmes dans un certain nombre de cas.
46Tant les donneurs bilatéraux que les donneurs multilatéraux abandonnent progressivement les stratégies d’aide-pays conçues par les services centraux au profit de stratégies nationales de développement ou de cadres stratégiques de lutte contre la pauvreté à partir desquels ils élaborent leurs programmes d’aide. Toutefois, des faiblesses subsistent en ce qui concerne l’alignement de leur programmation sur les priorités gouvernementales et la capacité de modifier la programmation à partir de l’examen annuel des stratégies de lutte contre la pauvreté ou d’autres stratégies. Les donneurs voient aussi dans les insuffisances des systèmes nationaux un obstacle majeur à leur utilisation au lieu de les considérer comme un point de départ pour un renforcement ciblé et harmonisé des capacités s’inscrivant dans un plan précis d’alignement progressif sur les systèmes nationaux. Ce qu’il y a de plus regrettable d’après les résultats de l’enquête, c’est que les donneurs ne semblent guère prendre de mesures pour harmoniser des activités faciles à harmoniser, par exemple en réalisant des travaux diagnostiques/analytiques conjoints, en rationalisant les missions, en réduisant au minimum les coûts de transaction à la charge des pays partenaires grâce à la coopération déléguée et en alignant leur planification sur les cycles budgétaires des pays partenaires. À de rares exceptions près, il existe un décalage important entre les engagements internationaux pris par les services centraux et la manière dont ces derniers sont transposés dans la pratique à l’échelon local.
Prévisibilité de l’aide à moyen terme
47L’offre de financements à moyen terme – internes et externes– appropriés et prévisibles à l’appui des programmes de développement des pays partenaires est un autre aspect important de l’efficacité de l’aide. Il s’agit non seulement de financer les coûts récurrents mais aussi d’investir dans des projets d’équipement. Cela exige des donneurs qu’ils modifient les modalités de fourniture de l’aide au développement. Il faut, par exemple, qu’ils programment, conçoivent et échelonnent leurs apports d’aide à un horizon de planification à moyen terme qui soit compatible avec les stratégies nationales de développement des pays partenaires. Il faut aussi qu’ils fournissent aux autorités des pays partenaires des informations fiables sur le volume des apports d’aide et le calendrier et les conditions des versements. Parallèlement, les pays partenaires doivent redoubler d’efforts pour mobiliser les ressources intérieures grâce à la consolidation de leurs finances publiques et à l’instauration d’un environnement propice à l’investissement public et privé. Pour cela, il faut disposer de systèmes transparents, efficaces et responsables de gestion des finances publiques afin d’améliorer la mobilisation des ressources publiques et la gestion de leur emploi. Les résultats de l’enquête sont, à cet égard, aussi peu satisfaisants. Le CAD mène un dialogue avec les donneurs et les pays partenaires en vue de l’élaboration de bonnes pratiques concernant des mécanismes d’acheminement de l’aide plus efficaces et plus prévisibles, en s’appuyant sur les remarquables travaux réalisés dans le cadre du Partenariat stratégique pour l’Afrique.
Alignement sur les systèmes et capacités des pays partenaires
48Il y a également lieu de se demander si de réels progrès vont pouvoir être réalisés en ce qui concerne l’alignement des donneurs sur les procédures et systèmes des pays partenaires. Il faut que les donneurs trouvent ensemble des moyens de mettre en œuvre et de gérer des programmes d’aide qui renforcent les capacités au lieu de les amoindrir. Des programmes de renforcement des capacités reposant davantage sur des financements alloués par plusieurs donneurs appliquant des procédures communes seraient une bonne solution. Si l’on veut déterminer valablement l’impact de l’aide sur le développement, on peut se demander si cette dernière renforce au fil du temps les systèmes nationaux. L’application de procédures propres aux donneurs et la multiplication des équipes de gestion de projets opérant en dehors des circuits gouvernementaux pour répondre aux exigences de reddition de comptes vont à l’encontre des bonnes pratiques concernant l’alignement et la durabilité. Dans un rapport récent au Conseil des administrateurs, la Banque mondiale a soulevé certaines questions liées à l’utilisation des systèmes nationaux dans le cadre de ses propres activités [8]. Dans ce domaine, il importe d’encourager la diffusion rapide des enseignements tirés de l’expérience, l’adaptation aux conditions propres à chaque pays et une plus grande utilisation des systèmes nationaux.
Gestion axée sur les résultats en matière de développement
49Lors de la deuxième Table ronde internationale sur la gestion axée sur les résultats en matière de développement qui s’est tenue à Marrakech, en février 2004, le président du CAD et les responsables des banques multilatérales ont entériné des principes clés visant à promouvoir une approche harmonisée de la gestion axée sur les résultats en matière de développement ainsi qu’un plan d’action auquel ils ont invité à adhérer tous les organismes bilatéraux et multilatéraux de développement et les pays en développement (voir www. mfdr. org). Les principes clés entérinés sont les suivants :
- Centrer le dialogue sur les résultats au niveau des pays partenaires, des organismes de développement et des autres parties prenantes.
- Aligner les activités de programmation, de suivi et d’évaluation sur les résultats escomptés qui ont été convenus.
- Veiller à ce que le système de notification des résultats reste aussi simple, efficace par rapport à son coût et convivial que possible.
- Assurer une gestion axée sur les résultats et non déterminée par ces derniers.
- Utiliser l’information sur les résultats pour un apprentissage de gestion et la prise de décision, ainsi que pour l’établissement de rapports et l’obligation de compte.
50Les travaux au titre du plan d’action sont réalisés par un certain nombre d’équipes spéciales dans le cadre de l’Activité conjointe sur la gestion axée sur les résultats en matière de développement.
51La gestion axée sur les résultats doit s’appuyer sur des systèmes statistiques nationaux capables de suivre et d’évaluer les stratégies de lutte contre la pauvreté et de rendre compte des progrès réalisés vers les OMD. Entre la Déclaration du millénaire adoptée en 2000 et le premier grand bilan qui doit être dressé en 2005, des progrès auront été accomplis en ce qui concerne l’amélioration des systèmes statistiques nationaux, en partie grâce aux efforts déployés dans le cadre de nombreuses initiatives internationales. Toutefois, la plupart des données utilisées pour suivre la réalisation des OMD proviennent encore d’une modélisation statistique – souvent effectuée par des organismes internationaux à partir de rares observations nationales, si tant est qu’il en existe– et non de mesures réelles. Il faudrait que d’ici 2010, le prochain grand bilan s’appuie sur des données produites et appropriées par les pays concernés qui servent en premier lieu à élaborer et à suivre les politiques et programmes nationaux. Pour cela, les pays en développement ont besoin d’un important soutien extérieur complémentaire destiné à renforcer leurs systèmes statistiques. Qui plus est, les donneurs ont besoin que les pays en développement leur communiquent des informations statistiques de meilleure qualité pour pouvoir mesurer plus précisément l’impact de leur aide.
Le Forum à haut niveau de Paris en mars 2005
52Le Forum à haut niveau de Paris, qui se tiendra en mars 2005, rassemblera des représentants de la communauté des donneurs, des pays partenaires et de la société civile. Dans la perspective de ce Forum, quatre grands ateliers régionaux ont été organisés – deux en Asie, un en Afrique et un autre dans la région de l’Amérique latine et des Caraïbes. Ces ateliers sont d’importants éléments d’appui pour le Forum qui disposera de données nationales pour soutenir les travaux entrepris au sein du CAD sur les bonnes pratiques, des études de cas, des analyses et un important rapport d’étape sur l’harmonisation et l’alignement. Le Forum devrait déboucher sur une « Déclaration de Paris » énonçant des engagements vérifiables et liés à des échéances précises pour accélérer les progrès dans la mise en œuvre des bonnes pratiques avalisées à Rome.
53Ce Forum offrira l’occasion d’évaluer et de rendre compte des progrès accomplis par rapport aux engagements pris à Rome tant par les pays donneurs que par les pays partenaires. Ce sera aussi une opportunité pour la communauté internationale des donneurs de faire fond sur les progrès réalisés pour aller de l’avant et ne pas laisser l’immobilisme entamer la crédibilité des engagements pris collectivement.
Notes
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[1]
La première section de ce chapitre s’inspire largement du rapport soumis en 2004 par le Secrétaire général des Nations unies à l’Assemblée générale des Nations unies et intitulé « Application de la Déclaration du millénaire adoptée par l’Organisation des Nations unies » (accessible à l’adresse http :// milleniumindicators.un.org/unsd/mi/pdf/a59_282e.pdf). Son contenu reflète la position du Secrétariat de l’OCDE à laquelle ne souscrivent pas nécessairement les Nations unies.
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[2]
Les rapports qui ont été publiés sont accessibles à l’adresse suivante : wwww. undp. org/ mdg/ donorcountryreports.html.
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[3]
Pour plus de détails, consulter les adresses www. paris21. org et www. worldbank. org/ data/ results.html.
-
[4]
Consulter l’adresse www. unmillenniumproject. org.
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[5]
Consulter les adresses www. millenniumcampaign. org et www. makepovertyhistory. org.
-
[6]
L’indice d’écart de pauvreté est le montant moyen de revenu manquant aux populations pauvres pour atteindre le seuil de pauvreté, exprimé en pourcentage de ce seuil.
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[7]
Voir www. oecd. org/ dac/ stat/ crs/ hivaids.
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[8]
Voir http ://siteresources.worldbank.org/PROJECTS/Resources/40940-1097257794915/UseCountrySystems-10-08-04.pdf.