Couverture de BUPSY_493

Article de revue

Darwinisme et discriminations de sexe, de couleur ou de caste

Pages 83 à 95

Notes

  • [*]
    Université Paul-Valéry, Montpellier-III, route de Mende, 34199 Montpellier Cedex 5.
    <andrel.demailly@wanadoo.fr>
  • [1]
    Longtemps confinée au domaine animal, la biologie des populations s’est peu à peu intéressée à l’homme, avec les travaux fondateurs de Trivers, de Wilson (1975, 1978) et de Dawkins (1976). La psychologie évolutionniste s’est constituée plus récemment (Cosmides, Tooby, 1987), dans le sillage de ces pionniers, en se démarquant de certaines de leurs positions et en évitant, surtout, de reprendre l’intitulé, fort décrié, de « sociobiologie », comme nous le verrons plus loin.
  • [2]
    À l’instar de Dawkins (1982, glossaire), on évitera de qualifier de « néo-darwiniens » les auteurs de cette synthèse, tant il y en a d’autres qui se considèrent comme tels. Par souci de clarté, on parlera de « darwinisme de la synthèse », pour les désigner et de « darwinisme des comportements », pour désigner les courants de la biologie des populations et de la psychologie évolutionniste, dont il sera question ci-dessous.
  • [3]
    Pour expliquer ce comportement, il souligne que les hyménoptères sont haplodiploïdes : les œufs de la reine, qui ne sont pas fécondés donnent des mâles, tandis que les œufs fécondés donnent des femelles, de sorte que celles-ci partagent plus de gènes en commun (3/4) qu’avec les mâles (1/4) ou même leur éventuelle progéniture féminine (1/2).
  • [4]
    Dawkins, comme Lumsden et Wilson, reconnaissent, cependant, que ce dernier leur a ouvert la voie.
  • [5]
    À l’appui de cette thèse, les enquêtes de Buss (1989, 1994) montrent que les hommes craignent plutôt l’infidélité sexuelle de leurs épouses, tandis que les femmes appréhendent davantage l’infidélité affective de leurs conjoints : les premiers tendant à être rassurés quant à leur paternité, les secondes recherchant un partenaire stable pour réaliser leur maternité.
  • [6]
    La question des origines du système de castes reste très controversée. La version que nous en donnons est celle du Mahatma Phule (1827-1890), qui anima un puissant mouvement anti-brahmane au Maharashtra (voir Omvedt, 1995). Le grand meneur intouchable (ou dalit), Ambedkar (1917), reprend cette thèse d’une invention délibérée de ce système. Issu des hautes castes, son contemporain Gandhi (1921 ; cité par Jaffrelot, 2003, p. 26) ne le conteste pas sur ce point, tout en adoptant des accents quasi darwiniens pour en défendre le principe : « D’un point de vue historique, la caste apparaît comme l’expérience d’adaptation sociale tentée par l’homme dans le laboratoire de l’Inde. Si nous pouvons prouver qu’il s’agit d’une réussite, nous pourrons l’offrir au monde comme un levier et comme le meilleur remède contre la compétition sans cœur et la désintégration sociale née de l’avarice et de l’appât du gain ». On notera que Gandhi se fait le pourfendeur d’un libéralisme économique qui se réclame aussi du darwinisme (voir Alchian, 1950 ; Friedman, 1953).
  • [7]
    On notera, toutefois, que Dawkins (1982, 1993) accorde plus d’importance à la question des origines, en s’intéressant davantage aux caractéristiques structurelles (et non au contenu) des « mèmes » dominants. Comme on le verra ultérieurement, c’est ce qui le rapproche le plus de la psychologie sociale expérimentale actuelle, essentiellement axée sur la recherche des invariants psychosociaux des discriminations.
  • [8]
    Ces interventions extérieures relèvent de la régulation sociale et visent à désamorcer les situations les plus explosives. Comme on le verra, elles sont le fait d’élites, qui sont parties prenantes du système en place et n’ont pas intérêt à provoquer son dépérissement total.
  • [9]
    Ambedkar (voir Herrenschmidt, 1996) définit par ce terme l’imitation des hautes castes par les basses castes et, donc, l’intériorisation, par celles-ci, de la doctrine et des rites de « l’inégalité graduée » de celles-là.
  • [10]
    Dans la société industrielle, la polygamie officielle aurait ajouté, à la pauvreté des plus démunis, une misère sexuelle, dont les conséquences auraient été bien plus explosives. Par définition, le prolétaire « possède », quand même, une femme et des enfants.
  • [11]
    À l’appui de cette thèse, on remarquera combien les enfants reprennent et amplifient à l’excès les injures sexistes ou racistes, qu’ils ont entendues dans leur entourage familial ou scolaire (voir Aboud, 1988 ; Powlishta, Serbinn Doyle, White, 1994).
  • [12]
    Chaque Indien est tellement obnubilé par la différence, qu’il ne se repère qu’au travers de sa sous-caste, qui est l’une des multiples ramifications d’une caste bien plus abstraite.
  • [13]
    W. E. B. Du Bois précise, aussi, que cette double conscience doit être féminisée, tant pour exorciser les violences à l’égard des femmes, que pour en reprendre les vertus d’harmonie, de liberté et de réciprocité.
  • [14]
    Lorenzi-Cioldi (2002) souligne que la notion de discrimination positive a pris le pas sur d’autres expressions équivalentes (discrimination inverse, action antidiscriminatoire, traitement préférentiel, égalité d’opportunités d’emploi) et qu’elle a fait partie du vocabulaire politique avant d’être reprise par celui des sciences sociales.
  • [15]
    Gould et surtout Lewontin furent les grands pourfendeurs, au nom de l’antiréductionnisme et du marxisme, des thèses sociobiologiques de Wilson et sont à l’origine du discrédit qui entoure toujours la notion même de sociobiologie.
  • [16]
    Dans le même esprit, Berg et Singer (1992) font valoir que des jumeaux homozygotes, issus des mêmes gènes, n’auront pas le même fonctionnement cérébral ni les mêmes défenses immunitaires.
  • [17]
    Popper (1972) avait évoqué, lui aussi, un « monde des idées », mais en prenant soin de souligner qu’il n’avait d’existence propre qu’à la condition d’être consigné sur des supports matériels (livres et autres médias).
  • [18]
    Allusion à l’aphorisme de Pasteur (1854), selon lequel « dans les champs de l’observation, le hasard ne favorise que des esprits préparés ».
  • [19]
    Dans un registre plus philosophique, on notera que le pragmatisme américain, dont on redécouvre actuellement toute la richesse, est né de la bataille de Gettysburg (Rioux, 2006) : les Américains s’aperçurent qu’ils s’y étaient massacrés au nom d’idées abstraites, d’autant plus violentes qu’elles étaient rationnelles, et qu’on ne les y reprendrait plus ; à partir de là, James et Dewey vont s’attacher davantage à l’utilité des idées qu’à leur rationalité, tandis que Peirce va explorer ce qui relie les signes les plus abstraits aux plus incarnés et les raisonnements les plus heuristiques à leurs sources les plus banales.
  • [20]
    Cet aspect mérite d’être souligné en ce qui concerne les discriminations de caste. Les villages indiens ont longtemps été l’instrument privilégié tant de la ségrégation des activités et des unions que du contrôle des contacts et des échanges. La vie urbaine vient brouiller tout cela, bien que les sports sans contact (cricket) aient toujours peu de chances d’y être évincés par les sports de contact (rugby).

1Les discriminations sociales s’appuient, tantôt sur des différences visibles mineures (la couleur de la peau dans le cas du racisme) ou majeures (le sexe dans le cas du sexisme), tantôt sur des différences invisibles (la pureté des origines ou « varna », dans le cas du système de castes, en Inde).

2Les sciences humaines et sociales s’y intéressent à des degrés divers et selon des angles d’approche différents. Ainsi, l’histoire, l’ethnologie, la sociologie et les sciences politiques oscillent entre études descriptives et interprétatives, selon qu’elles postulent ou non un sens de l’histoire ou un progrès des sociétés. La psychologie sociale tend à s’en démarquer, en affichant sa vocation particulière à étudier les rapports intergroupes et les confins de l’individuel et du collectif (Moscovici, 1984), mais force est de reconnaître qu’elle bute autant qu’elles sur ces phénomènes discriminatoires : si ses études empiriques en font, parfois, un examen plus fouillé, ses travaux expérimentaux ajoutent plutôt à la confusion en s’appuyant sur un lourd appareil conceptuel (catégorisation sociale, représentations sociales, identité sociale), qui tend davantage à les « essentialiser » qu’à cerner leur dynamique particulière dans des environnements contingents.

3En revanche, il convient de noter l’exceptionnelle créativité de la biologie des populations (Trivers, 1974) et de la psychologie évolutionniste (Buss, 1989, 1994 ; Wright, 1994), quant aux rapports inter-sexes [1], en dépit de la méfiance, que suscitent toujours, les thèses darwiniennes, dans le domaine social ou des critiques plus fondamentales, dont elles sont l’objet au plan biologique.

4Notre propos majeur sera de présenter ces thèses darwiniennes, avant de montrer comment les disciplines qui s’en réclament les font fonctionner dans le champ des rapports inter-sexes et comment il est possible d’extrapoler leur mode d’approche aux discriminations, fondées sur la couleur de la peau et la pureté des origines. Ce faisant, nous mettrons en évidence des processus communs à ces trois champs : d’une part, les discriminations actuelles, comme avatars et remparts de rapports de dominance du passé, ainsi que leur exacerbation face à toute tentative visant à les résorber, d’autre part, les diverses stratégies qui s’offrent à ceux qui en sont victimes, en soulignant que la détection de ces stratégies s’inspire moins des thèses darwiniennes proprement dites que des situations sociohistoriques où nous les avons fait fonctionner.

5Cette effervescence créative ne garantit cependant pas la justesse des thèses darwiniennes, pas plus que la pertinence de leur application aux phénomènes discriminatoires. C’est pourquoi nous mentionnerons, en cours de route, certaines données psychosociales convergentes, puis reviendrons rapidement sur les différentes critiques suscitées, tant par la révolution darwinienne que par ses diverses déclinaisons (la théorie synthétique et la biologie des populations, en particulier). Certaines des critiques les plus récentes suggèrent notamment 1o que la théorie synthétique (voir note suivante) tend à surestimer la part des gènes et de la transmission à distance dans la construction du vivant, au détriment du travail de proximité des protéines (des cellules embryonnaires aux réseaux neuronaux) ; 2o que la biologie des populations et la psychologie évolutionniste tendent à surestimer, en outre, l’indépendance structurelle et fonctionnelle des différents niveaux de l’architecture du vivant. Et, puisque nous avons porté un jugement sévère sur la psychologie sociale expérimentale, nous tenterons aussi de l’argumenter brièvement, en nous appuyant sur les considérations qui précèdent, ce qui nous conduira à envisager différemment les ressorts de l’inventivité humaine.

Les thèses darwiniennes

6L’œuvre de Darwin présente un double visage, selon qu’elle traite des espèces végétales et animales ou de l’homme. D’un côté, L’origine des espèces (1859) propose une théorie générale, extrêmement cohérente, de l’évolution, qui récuse tout déterminisme naturel ou finalisme divin. Pour l’essentiel, elle revient à dire 1o que les traits héréditaires n’ont de cesse de se répliquer ; 2o qu’ils se combinent et se recombinent au fil des générations ; 3o qu’ils peuvent, de temps à autre, subir des erreurs de copie (variations aléatoires) ; 4o que leur sélection s’opère au travers de leurs porteurs, qui ne sont ni les meilleurs ni les plus sophistiqués, mais plus adaptés que d’autres à leur environnement du moment ; 5o de sorte que le patrimoine héréditaire des différentes espèces évolue sans cesse et que certaines d’entre elles peuvent même disparaître. De l’autre, La descendance de l’homme (1871) tente, de manière plus tâtonnante, d’en saisir les implications quant à l’espèce humaine, tout en y reconnaissant l’importance de la sélection sexuelle (à travers le régime matrimonial ou le choix des partenaires) et l’émergence, tant d’inégalités et de hiérarchies au plan collectif, que de sentiments moraux et d’un libre arbitre au plan individuel.

7En ce qui concerne sa théorie générale, Darwin n’avait aucune idée de la nature des gènes et des lois de la génétique. Dans son sillage, Weismann, Morgan, Muller, Fisher, Dobzhansky, Huxley, Haldane et Mayr, contribueront à la formulation d’une théorie synthétique (voir Mayr, 1991), qui 1o intègre les apports de la génétique ; 2o distingue les notions de germen et de soma (seul le germen participe à la reproduction, mais ne peut exister sans le soma) ; 3o développe les concepts de génotype et de phénotype (le premier désignant un assemblage stable de gènes ; le second renvoyant à la concrétisation de celui-ci : des individus particuliers relevant d’espèces particulières) ; 4o insiste sur l’idée que la sélection s’effectue sur les phénotypes (qui ne font que passer), tout en favorisant les gènes (quasi éternels), dont ils sont porteurs. Pendant longtemps, ils maintiendront l’idée que l’évolution ne s’opère que par transmission des gènes, sans que les phénotypes aient quelque prise sur elle [2].

8En ce qui concerne l’application de cette synthèse à l’espèce humaine, d’autres disciples en contesteront certains points, tout en tentant de développer l’idée de sélection sexuelle ou de rendre compte des progrès fulgurants de l’humanité en l’absence de variations génétiques majeures depuis homo sapiens.

9Les uns commenceront à penser que les phénotypes, loin d’être les vecteurs passifs de leurs gènes, peuvent en influencer la sélection et peser ainsi sur leur propre descendance. Ainsi, Hamilton (1964) émet l’idée que les hyménoptères femelles favorisent la transmission de leurs propres gènes, en soignant plus particulièrement les larves de leurs sœurs, au prix d’une stérilité précoce [3]. Pour Trivers (1972), cette attention sélective expliquerait la proportion plus importante de femelles que de mâles (5/8 contre 3/8), ainsi que les remarquables capacités d’adaptation et d’essaimage de ces espèces. Il va en déduire 1o que ces capacités sont le fait d’un « altruisme de parentèle », qui est, en fait, un « égoïsme éclairé », puisque les femelles ouvrières font le sacrifice de leur fécondité pour favoriser la dissémination de leurs gènes ; 2o que cet altruisme de parentèle concerne aussi l’espèce humaine et peut conditionner les rapports inter-sexes qui s’y manifestent.

10Les autres vont s’intéresser davantage à l’explication des prodigieux progrès de l’humanité en l’absence de nouvelles variations génétiques.

11D’une part, Dawkins (1976, 1982) suggère que des « réplicateurs culturels » y auraient pris le relais des gènes biologiques. Ces réplicateurs seraient, en quelque sorte, des idées de produits techniques ou culturels, qui prolongeraient les phénotypes humains. Ils se comporteraient eux-mêmes à l’image des gènes biologiques de par leur propension à se diffuser, à se combiner, à subir des variations et à être soumis au couperet de leur environnement. Dawkins propose de les appeler « mèmes », pour souligner qu’ils peuvent se propager de manière exponentielle, notamment par imitation ou mimétisme. Dans ces conditions, les phénotypes humains seraient toujours sous l’emprise de leur génotype, à ceci près que celui-ci serait devenu culturel.

12D’autre part, Lumsden et Wilson (1981) avancent l’idée d’une co-évolution, à la fois génétique et culturelle. D’un côté, l’évolution biologique aurait favorisé l’émergence de certains produits culturels, qu’ils appellent « gènes culturels » (les soins à la progéniture, la prohibition de l’inceste, le langage et les techniques) ; de l’autre, ces « gènes culturels » auraient favorisé la prospérité et la dissémination de ceux qui les détenaient. On notera que ce modèle n’exclut pas l’altruisme de parentèle : ainsi, le « gène culturel » du célibat monacal pénalise la capacité reproductive des uns au profit de celle des autres (les populations alentour).

13L’opposition de ces deux derniers modèles est bien plus profonde qu’il n’y paraît. Dans celui de Lumsden et Wilson, la compétition entre « gènes culturels » se situe au niveau de leur concrétisation matérielle et de leur usage par les phénotypes humains, tout en laissant le dernier mot au génotype biologique de ces derniers. Dans celui de Dawkins, la compétition entre « mèmes » se situe à un niveau plus symbolique et au sein de leur propre monde mémétique (Blackmore, 1999 ; Jouxtel, 2005), au profit des plus prégnants, qui prennent, donc, le relais des gènes biologiques dans le processus d’évolution de l’espèce. À la différence du modèle de Trivers [4], qui ne porte que sur les rapports inter-sexes, ces modèles peuvent rendre compte, tant de ces derniers que des rapports de couleur ou de caste.

Darwinisme et discriminations

L’émergence des discriminations

Les rapports inter-sexes

14En ce qui concerne les rapports inter-sexes, le modèle de Trivers (1971, 1974) s’appuie sur l’asymétrie constitutionnelle des sexes : 1o la femme ne délivre qu’un ovule, à de rares moments de l’année, tandis que l’homme est en mesure de libérer, à tout moment, quantité de spermatozoïdes ; 2o la femme sait que son temps de fécondité lui est compté entre puberté et ménopause, amenuisant, peu à peu, son degré d’attrait, tandis que l’homme dispose d’un empan plus large en ce domaine ; 3o la femme est prudente, sachant qu’il lui reviendra de s’occuper des enfants à naître, tandis que l’investissement parental du père sera beaucoup plus faible ; 4o la femme aura tendance à être plus sélective dans le choix d’un partenaire, en recherchant un compagnon susceptible d’assurer la sécurité matérielle de la famille et de témoigner d’un investissement parental élevé, tandis que l’homme sera moins regardant et plus éclectique. Ce modèle introduit, donc, le concept d’investissement parental, pour avancer que celui de la femme serait plus élevé et correspondrait à un altruisme de parentèle (au profit de sa progéniture), qui l’inciterait à privilégier une union monogamique stable et sûre, tandis que l’homme serait foncièrement polygamique et volage [5]. Dès lors, cet altruisme de parentèle handicaperait la femme, mais ne scellerait pas nécessairement la domination masculine, puisqu’il assurerait la descendance de l’espèce. Mais, de fait, parmi les multiples scénarios que pouvait susciter cette asymétrie des sexes et des investissements, Wright (1994) montre que la civilisation occidentale s’est orientée vers une monogamie officielle, laissant libre cours à une polygamie officieuse, scellant la domination masculine. Wright se réfère aux seules thèses de Trivers, mais on pourrait considérer, ici, en s’inspirant de Lumsden et Wilson ou de Dawkins, que cette solution matrimoniale est un « gène culturel » ou un « mème » : dans le premier cas, elle serait, à nouveau, le reflet de la suprématie économique et sociale des mâles ; dans le second cas, elle manifesterait surtout la prépondérance de ce « mème » sur ses concurrents (c’est-à-dire, d’autres « mèmes », ayant, éventuellement, trait à un rapport plus équitable des sexes).

Les rapports de couleur et de caste

15En ce qui concerne les rapports de couleur ou de caste, la biologie des populations et la psychologie évolutionniste ont progressé plus lentement et plus tardivement (voir Sidanius, Pratto, 1999), nous offrant toute latitude pour extrapoler la démarche qu’elles ont suivie à propos des rapports inter-sexes. Dans cette perspective, la référence aux thèses de Lumsden et Wilson est la plus directement opérationnelle. D’une part, les Africains auraient été les principales victimes de l’avantage technique et culturel européen (« gènes culturels » dominants, en matière d’armement, de transport et d’économie), en devenant la main d’œuvre asservie du système de plantation, qui fut mis en place, au XVIe siècle, dans les Caraïbes et les Amériques, récemment découvertes. D’autre part, les populations autochtones de l’Inde auraient subi, trois millénaires plus tôt, la domination militaire d’envahisseurs aryens venus du Nord-Ouest et s’exprimant en sanskrit.

16Mais la référence aux thèses de Dawkins est tout aussi séduisante, pour ce qui est de la perpétuation de cet avantage temporaire. D’un côté, les maîtres blancs auraient favorisé la dissémination du « mème » de la stigmatisation du statut social par la couleur de la peau. De l’autre, les envahisseurs aryens auraient fait de même, en demandant à leurs prêtres d’inventer une cosmogonie (autrement dit, des « mèmes »), qui pérennise leur supériorité sur les autochtones (ce que firent ces prêtres, à ceci près qu’ils se mirent au-dessus de leurs nobles commanditaires !). De fait, il en est résulté une hiérarchie sacrée et un système de castes, qui se fondent sur la pureté des origines de chacun (« varna »), selon la partie du corps d’un Homme primordial (Purusha), dont il est issu : la tête pour les brahmanes (prêtres), les bras pour les kshatriyas (guerriers), les cuisses pour les vaishyas (cultivateurs et artisans), les pieds pour les shudras (serviteurs) et, plus sale encore, pour les parias ou intouchables (voir Malamoud, 1978) [6].

Une grande part de contingence

17En ce qui concerne les rapports inter-sexes, Trivers ne fait intervenir qu’une différence d’investissement parental, comme fondement biologique d’une inégalité éventuelle des sexes. Parmi les multiples scénarios, que pouvait susciter cette différence dans la société occidentale, Wright montre que le choix du plus discriminatoire, à l’égard de la femme, relève plus de la ruse égoïste du mâle, que d’un quelconque déterminisme. Dans la perspective de Lumsden et Wilson, ces scénarios sont considérés comme des « gènes culturels », qui sont départagés par l’usage (sans que cela soit irréversible). Dans la perspective de Dawkins, ces scénarios sont considérés comme des « mèmes », dont la sélection échappe davantage à l’emprise de chaque individu. De même, à propos des discriminations de couleur et de caste, on ne trouve d’autre facteur de différenciation initiale que la latitude géographique, à ceci près que celle-ci favorise, d’abord, la supériorité technologique des uns (sous forme de « gènes culturels » ou de « mèmes »), puis un même type de scénario, caractérisé par la ruse (stigmatisation par la couleur de la peau ou la pureté des origines) et entretenu par l’usage ou la prédominance mémétique. Dans tous ces cas de figure, le déterminisme est très mince, voire inexistant, puisque les choses auraient pu se dérouler tout autrement, en fonction des contingences du moment et de l’endroit. Dans ces conditions, la question des discriminations de sexe, de couleur ou de caste, est moins celle de leur origine que celle de leur perpétuation, de leur exacerbation ou de leur résorption [7]. Cette conclusion peut paraître « contre-intuitive », tant les phénomènes discriminatoires sont patents et semblent quasi-naturels. C’est sur ce point que diffèrent le darwinisme et les sciences humaines : celles-ci partent à la recherche des causes immédiates du phénomène observé (pourquoi ?), alors que celui-là l’aborde dans la perspective de l’évolution (compétition interspécifique, puis rapports intraspécifiques). Dans cette dernière perspective, la question est celle de la survie de chacun au sein du groupe et des meilleurs moyens de l’assurer (comment ?). Le statut, dans la hiérarchie sociale, est l’un des plus prisés : quelle que soit la manière dont on y accède, l’important est de le perpétuer, en usant de tous les artifices disponibles.

L’exacerbation des discriminations

18Comme on vient de le voir, les discriminations de sexe, de couleur ou de caste, ne font qu’asseoir et perpétuer des différences de statut et de niveau hiérarchique : la domination du mari sur l’épouse, du maître sur l’esclave, de l’envahisseur sur l’autochtone. Darwin (1871) convenait lui-même que les inégalités de statut constituaient le fondement de toute société humaine, tout en s’interrogeant déjà sur leur compatibilité avec les sentiments moraux, qu’il considérait également comme l’un des traits de l’évolution humaine. Les sociétés les plus démocratiques n’y échappent pas et déploient même des trésors d’ingéniosité pour les conforter. Wright (1994) décrit une société anglaise, avide de distinction par la naissance, les propriétés ou les titres. Maurin (2004) en fait de même pour l’élitisme républicain en France, où la distribution des revenus et même des lieux d’habitation se fait à l’aune de la hiérarchie des diplômes (et non des contributions effectives à la bonne marche de la société). Dans les deux cas, sous le couvert d’une égalité formelle, chacun s’évertue « en douce » à monter plus haut que son voisin dans l’échelle sociale. Cette compétition forcenée fait que les échelons supérieurs tendent à préserver ou accroître leurs écarts avec ceux du dessous, tout en leur enjoignant hypocritement de réduire les leurs avec le bas de l’échelle. Et, de fait, les interventions extérieures [8], visant à combattre les discriminations qui en résultent, ont, souvent, l’effet d’exacerber celles-ci. Avant d’en donner une interprétation darwinienne, on en présentera trois exemples historiques, dans les domaines qui nous intéressent.

Sexisme et société victorienne

19En ce qui concerne le sexisme, l’exemple de Wright (1994) a trait à la société victorienne très hiérarchisée de l’époque de Darwin. Dans le souci d’améliorer le sort des épouses, le gouvernement en place instaure le divorce. À partir de là, les divorcées d’un certain âge ont le plus grand mal à trouver un partenaire de leur rang, tandis que les divorcés, souvent plus fortunés et plus longtemps attractifs, n’ont aucun mal à se remarier autant de fois qu’ils le souhaitent (monogamie à répétition, qui est une autre forme de polygamie). De plus, outre le fait que de nombreuses femmes se retrouvent dans un célibat forcé et sont, parfois, prêtes à tout pour en sortir, leurs ex-époux privent des concurrents, moins fortunés ou moins attractifs, de partenaires potentielles et les obligent à se rabattre, tantôt vers l’abstinence, tantôt vers le marché de la prostitution ou de la pornographie (tout aussi dégradant pour les femmes).

Racisme caraïbe à l’époque de la Révolution

20En ce qui concerne le racisme, l’exemple de Dubois (2004) a trait aux événements, encore plus saisissants, qui se sont déroulés dans la partie française de l’île de Saint-Domingue, lors de la Révolution française. Depuis une centaine d’années, il y prospère une économie de plantation, fondée sur l’exploitation des esclaves africains. Il en ressort une hiérarchie des statuts (du grand propriétaire à l’esclave de place) et des couleurs (du blanc au noir), qui ne correspond pas à celle des richesses et de l’éducation : d’un côté, un « petit blanc » (ni planteur, ni administrateur royal) passe avant un esclave affranchi ; de l’autre, les riches planteurs blancs ont de nombreux enfants métissés, dont ils prennent grand soin en matière d’éducation et de dotation, tout en les privant de certains droits civiques. Avec la Révolution française et la Déclaration des droits de l’homme, les discriminations de couleur prennent le pas sur les autres, lorsque les riches métis réclament une égalité totale avec les blancs, sans se préoccuper du sort des noirs. Elles s’amplifient à l’annonce de l’abolition de l’esclavage, lorsque les esclaves noirs se révoltent contre leurs maîtres blancs, qui refusent de s’y conformer. Elles s’exacerbent, lorsque Napoléon s’apprête à revenir sur cette abolition : jusqu’alors, des armées mixtes (blancs, noirs, métis) combattaient l’ennemi extérieur (anglais ou espagnol) ou se combattaient entre elles ; à partir de ce moment, les armées noires et les armées blanches vont s’affronter et se massacrer sans merci.

Le système de castes avant et après l’indépendance de l’Inde

21En ce qui concerne les discriminations de castes, l’exemple de Jaffrelot (2003) est tout aussi évocateur. Dans le souci d’instaurer plus de démocratie dans une société de castes trois fois millénaire, l’occupant britannique favorise la création de partis interconfessionnels et intercastes. Mais les brahmanes, qui contrôlent le puissant Parti du Congrès, s’ingénient à dévoyer ce processus à leur profit. Pour s’attirer les voix des basses castes, ils les persuadent de s’engager dans une démarche de « sanskritisation » [9], censée réduire leur impureté originelle et les rapprocher d’eux. Autrement dit, loin de concourir au dépérissement du système de castes, les mesures prises par les autorités britanniques provoquent son regain.

Un processus identique

22Dans ces trois cas, une intervention extérieure vient perturber les hiérarchies en place, tout en exacerbant les discriminations, qui leur étaient associées. En ce qui concerne le mariage, Wright (1994) souligne que le régime monogamique officiel ne visait pas tant l’égalité des sexes que l’égalité économique et sociale des mâles, dès lors qu’un régime polygamique officiel aurait entraîné trop de disparités entre ceux-ci [10] (la femme étant censée préférer l’éventualité de partager, avec d’autres, le lit et les richesses des nantis, à celle de régner seule sur un foyer misérable). Dans ces conditions, l’instauration du divorce, qui introduit un peu plus de polygamie, renforce, de fait, les écarts de statut entre mâles, tout en réduisant un peu plus la femme à ses attributs sexuels et fonctions de jouissance. En ce qui concerne l’esclavage, la Déclaration des droits de l’homme ne visait que l’égalité des Français de métropole. Dès lors, son application outre-mer s’opposait directement à l’organisation très inégalitaire du régime de plantation et ne pouvait qu’exacerber la hiérarchie des couleurs qui l’accompagnait. En ce qui concerne l’Inde, l’instauration d’élections démocratiques (un homme, une voix), s’opposait directement aux privilèges temporels du système de castes et ne pouvait être détournée que par un regain de ses fondements spirituels.

Deux interprétations darwiniennes divergentes

23D’un point de vue darwinien, on pourrait y voir des stratégies d’alignement des plus faibles sur les plus forts : les femmes se pliant aux vues des hommes, les esclaves reprenant les critères de couleur de leurs maîtres, les basses castes intériorisant la cosmogonie religieuse des hautes castes. En termes plus précis, ce serait le triomphe des « gènes culturels » ou des « mèmes » des dominants sur ceux des dominés. Mais, là encore, les points de vue de Lumsden et Wilson et de Dawkins vont diverger. La perspective de Lumsden et Wilson donne l’avantage aux phénotypes biologiques, qui détiennent les « gènes culturels » dominants, sans exclure que leurs concurrents puissent prendre leur revanche ou retourner la situation en leur faveur : la compétition se situe au niveau des phénotypes. La perspective de Dawkins situe, au contraire, celle-ci au niveau des « mèmes » : comme le souligne Blackmore (1999), chaque phénotype humain s’apparente, dès lors, à un « non-moi », dont la mémoire est moins le champ de bataille des « mèmes », que le véhicule de leurs vainqueurs ; la part de « moi » d’un individu se limitant à ses perceptions et sensations immédiates, ainsi qu’à ses apprentissages idiosyncrasiques (encore que ceux-ci soient conditionnés par sa vision mémétique du monde). La divergence de ces perspectives va peser sur l’interprétation des possibilités de résorption des discriminations.

La résorption des discriminations

24La perspective de Dawkins, selon laquelle les « mèmes » dominants ne peuvent être ébranlés ou remplacés que par d’autres rivaux, nous invite à faire le deuil de toute rationalité et de toute morale. D’un point de vue rationnel, les « mèmes » du sexisme, du racisme ou des discriminations de caste, seraient pathologiques et se situeraient davantage dans la tête du mâle, du blanc ou du brahmane que dans celle de leurs victimes. D’un point de vue moral, il serait, donc, logique ou « normal » que les mèmes de la parité des sexes, de l’égalité des couleurs ou l’illusion des castes finissent par l’emporter… Mais, de manière très darwinienne, Dawkins fait valoir que les « mèmes » n’ont que faire de la rationalité ou de la morale et que, seules, importent leurs capacités de réplication et de dissémination. Il avance même (Dawkins, 1993) que les « mèmes » les plus prégnants seraient, à l’instar des virus, ceux dont la structure serait la plus élémentaire [11] et la plus apte à prendre les apparences les plus diverses, pour véhiculer leur contenu. Dans ces conditions, les stéréotypes binaires de l’inégalité seraient bien plus vigoureux que la rhétorique raffinée de la Déclaration des droits de l’homme…

25La perspective de Lumsden et Wilson confère plus d’importance à l’action des individus et des groupes. Il reviendrait aux victimes de combattre les discriminations, dont elles sont l’objet, soit en reprenant, à leur profit, les « gènes culturels » de leurs oppresseurs, soit en en produisant de nouveaux.

Les stratégies d’affrontement

26La reprise des « gènes culturels » dominants débouche sur des stratégies d’affrontement. C’est ce que l’on observe particulièrement dans l’Inde des années 1930-1940. En suite des manigances du Parti du Congrès et sous la pression de certains leaders intouchables, les autorités britanniques instaurent un système électoral, fondé sur les castes, dans le souci louable de privilégier la représentation politique des plus basses castes (dont les membres sont de loin les plus nombreux). Cette politique a l’effet pervers 1o d’obliger chacun à faire état de son « varna », alors qu’il l’avait plus ou moins oublié, au profit de la spécialisation professionnelle de sa sous-caste [12] ; 2o d’inciter chaque sous-caste à se situer plus haut dans la hiérarchie des castes, en faisant valoir son noble passé ou son statut de premier occupant (plus dravidien qu’indo-européen, plus noir que blanc), avant les invasions du Nord-Ouest (aryenne puis moghole). Autrement dit, ces stratégies reviennent à adopter les « gènes culturels » hiérarchiques de leurs oppresseurs : d’une part, le critère de pureté des origines, d’autre part, des critères de statut, de race ou de couleur. C’est ce que l’on retrouve aussi dans le cas du racisme et du sexisme. En ce qui concerne l’un, certaines stratégies communautaires s’attachent autant à magnifier la couleur de la peau ou l’éclat du passé qu’à susciter des antagonismes incongrus (par exemple, la mise en compétition des « mémoires » de la Shoah et de la traite négrière). En ce qui concerne l’autre, certaines stratégies féministes tendent à creuser le fossé des « genres », sous prétexte d’équilibrer la balance des sexes. Il semble que ces stratégies sont largement contreproductives, dès lors qu’elles attisent la haine de l’autre et la haine de soi. Des romanciers, tels que Richard Wright (1956) ou Marie Cardinal (1975), ont bien décrit ce passage de la haine de l’autre à la haine de soi (et son report sur la femme noire, en ce qui concerne Wright). De manière plus réflexive, W. E. B. Du Bois (1938) et E. Badinter (2003) soulignent les effets pervers du repli communautaire et du féminisme.

Les stratégies d’investissement

27La création de nouveaux « gènes culturels » correspond à des stratégies tout à fait différentes, que l’on observe particulièrement à propos du racisme. Divers penseurs de la diaspora noire (voir Gilroy, 1993) ont beaucoup réfléchi aux effets dévastateurs de la haine de l’autre et de soi. Les plus perspicaces d’entre eux, notamment, W. E. B. Du Bois (1903, 1938), ont vite perçu qu’il était vain de se complaire dans les souffrances du passé, dans l’illusion d’un retour au pays des ancêtres, dans l’espoir d’un « au-delà » réparateur ou dans un repli communautaire stérile (occultant la diversité des origines et des trajectoires). Ils ont admis que l’homme de la diaspora noire devait exploiter, au contraire, toutes les ressources de son héritage africain et occidental (mêlant le pire de l’oppression au meilleur de l’invention et de la création). C’est l’idée de « double conscience » [13], qui est à la source d’une culture profondément métissée et luxuriante, à l’instar des musiques noires, qui mêlent les cantiques et mélodies occidentales aux rythmes et tempos africains. Ainsi, ces musiques et l’idée de « double conscience » sont autant de nouveaux « gènes culturels », qui ne demandent qu’à se diffuser. On remarquera que les unes y parviennent fort bien, tout en notant que les oreilles blanches préfèrent encore des sons noirs issus de gorges blanches (Glenn Miller plutôt que Duke Ellington, Elvis Presley ou Johnny Hallyday plutôt que Ray Charles, Otis Redding ou James Brown). On remarquera aussi que l’idée de « double conscience » a plus de mal à faire son chemin, dès lors qu’il faut avoir « touché le fond » de l’humiliation et de la souffrance pour y accéder. Ces « gènes culturels » s’apparentent à des investissements proches de l’altruisme darwinien puisqu’ils réclament plus de sacrifices des uns (les noirs) que des autres (les blancs), pour le profit de tous.

28À l’instar des stratégies d’alignement ou d’affrontement, qui sont, toujours, suscitées par des événements extérieurs (l’instauration du divorce, la Déclaration des droits de l’homme, la mise en place d’élections), il semble aussi que ces stratégies d’investissement ne puissent se développer qu’à l’occasion d’interventions facilitatrices, telles que des politiques de discrimination positive [14]. Dans ce cas, elles reviennent à exploiter ces nouvelles opportunités et à « investir » les zones intéressées : les domaines de l’éducation ou de la fonction publique pour les basses castes, les zones de parité prescrite pour les femmes, les politiques de « minima » pour les minorités de couleur aux États-Unis ou au Canada. Mais, qu’on la considère comme un « gène culturel » ou un « même », toute discrimination positive risque aussi de provoquer, en retour, une exacerbation des discriminations négatives.

29Certaines études psychosociales empiriques viennent conforter ou moduler ces propos : 1o Désert et Leyens (2004) notent que les victimes de discriminations mettent en place diverses stratégies (mobilité individuelle, créativité sociale, compétition sociale), qui relèvent davantage, selon nous, de l’alignement et de l’affrontement que de l’investissement ; 2o Lorenzi-Cioldi (1994) remarque, cependant, que les militantes féministes des années 1960-1970 en sont venues à revendiquer, en l’absence de toute politique de discrimination positive, une personnalité androgyne réunissant « ce qu’il y a de mieux dans ce que la masculinité et la féminité représentent actuellement » (Bem, 1976, p. 51), qui s’apparente, selon nous, à la « double conscience » de l’Afro-Américain, mais il constate aussitôt que les androgynes féminins sont, toujours, moins épargnés que leurs homologues masculins ; 3o Lorenzi-Cioldi et Buschini (2005) font, également, état d’un regain du sexisme à l’égard des femmes, qui bénéficient de mesures de discrimination positive dans le domaine professionnel ; 4o Tougas et col. (2004) soulignent, aussi, que le moindre acte de délinquance d’un noir fait resurgir un racisme profond, qui était occulté par le « politiquement correct » de la société canadienne ; 5o Arroyo et Zigler (1995) notent, enfin, un surcroît d’états dépressifs et anxieux chez des étudiants noirs, qui tentent de surpasser leurs condisciples blancs.

Darwinisme et psychologie sociale expérimentale

30Nous évoquerons brièvement les critiques suscitées par le darwinisme, en soulignant que leurs motifs ont longtemps été plus idéologiques que scientifiques. Nous montrerons, ensuite, que les critiques scientifiques les plus fondées s’étendent, aussi, à la psychologie sociale expérimentale, tout en nous incitant à envisager autrement les ressorts de l’inventivité.

La critique du darwinisme

31Le darwinisme a, lui-même, été stigmatisé par les idéologies en place. Ainsi, Darwin retarda le plus possible la publication de L’origine des espèces, par crainte des foudres de l’Église, qui défendait âprement le créationnisme. Il craignait davantage encore que ses thèses ne sapent les fondements rationnels et moraux de la société et c’est ce qui le conduisit probablement à rédiger La descendance de l’homme. De fait, on ne manqua pas de fustiger un « darwinisme social », qui justifierait la loi du plus fort, alors que cette idée avait été émise par Spencer dès 1851 et que Darwin parlait plutôt de survie du plus adapté, comme l’avait fort bien compris Boltzmann (1900). Mais les tenants de la supériorité raciale et de l’eugénisme (Galton, Le Bon, Carrel, Rosenberg) s’appuieront sur cet amalgame. Par la suite, Weismann, Morgan et Muller, qui jouèrent un rôle majeur dans la synthèse darwinienne, devinrent les « bêtes noires » des lyssenkistes soviétiques (voir Medvedev, 1971). Mentionnons, enfin, que certaines controverses récentes, au sein même de la communauté darwinienne, eurent un arrière-plan très idéologique (Gould, Lewontin, 1979 ; Lewontin, Rose, Kamin, 1984) [15].

32S’appuyant sur des arguments scientifiques bien plus solides, certains biologistes (Denton, 1985 ; Chandebois, 1993 ; Chaline, 1999, 2006 ; Gould, 2002 ; Fleury, 2006) contestent la place que le darwinisme de la synthèse confère aux gènes. Selon eux, ceux-ci ont de remarquables propriétés de fiabilité et de transmission à distance, mais aucune inventivité ; la construction et l’évolution du vivant seraient essentiellement le fait des protéines, qui se développeraient de manière parallèle et distribuée dans l’espace tridimensionnel qui leur est offert (en puisant, certes, dans le stock génétique, dont elles disposent, mais avec beaucoup plus de plasticité que ne le suggérerait l’idée d’une simple copie [16]). Miermont (2000) va dans le même sens, en avançant que l’invention du vivant se ferait à l’image du fonctionnement de notre cerveau, qui s’appuie sur quelques règles fiables et innées, de type syntaxique, pour développer une prodigieuse activité de type sémantique au contact de l’environnement du moment. Plus fondamentalement, il suggère que nos réseaux neuronaux les plus élaborés seraient en interaction permanente avec les réseaux cellulaires participant à des fonctions vitales plus primitives (en soulignant, par exemple, les coûts énergétiques des processus cognitifs). Cette thèse s’oppose à celle d’une architecture du vivant en niveaux indépendants et autonomes (le biologique, le psychologique, voire le psychosocial et le sociologique), que favorisent nos cloisonnements disciplinaires. Tout au contraire, ces niveaux seraient enchevêtrés et leurs oscillations tendraient à vibrer à l’unisson.

33Ces critiques remettent, donc, en cause tant l’idée d’une toute puissance de la transmission génique que celle d’un cloisonnement des niveaux de l’architecture du vivant. Elles éclairent également certains maux de la psychologie sociale expérimentale.

Les maux de la psychologie sociale expérimentale

34Dans l’introduction de cet article, nous avons estimé que les sciences humaines butaient sur le problème des discriminations et nous avons porté un jugement plus sévère sur la psychologie sociale expérimentale. Nous motiverons ce jugement en avançant 1o que son lourd appareillage conceptuel vise le repérage d’invariants psychologiques et, surtout, sociaux (voir Deconchy, 1989), plus descriptifs qu’explicatifs ; 2o que son recours à l’expérimentation favorise une vision statique et réductrice du vivant.

La recherche d’invariants

35Toute loi scientifique requiert la présence d’au moins un invariant (par exemple, la vitesse de propagation de la lumière) et il n’est pas étonnant qu’une discipline à prétention scientifique, telle que la psychologie sociale expérimentale, soit partie à la recherche de tels invariants. L’un des premiers, qu’elle met en avant, est de nature psychologique et même logique, puisqu’il s’agit de la dissonance cognitive (et des tentatives de réduction qu’elle implique), créée par la prise de conscience de l’adhésion à des thèses contradictoires ou de la coexistence de comportements et d’opinions incompatibles : Bramel (1972) recense toute une série de travaux visant à montrer que notre rejet d’une personne d’une autre couleur peut être combattu victorieusement, dès lors que nous nous apercevons qu’elle partage les mêmes opinions que nous. Or, les faits de la vie quotidienne ont plutôt tendance à montrer que le rejet a tendance à perdurer, quelles que soient les opinions du rejeté. Un autre invariant est avancé par Tajfel (1972) et tend plutôt à justifier ces propensions discriminatoires : du fait de ses capacités cognitives et mnésiques limitées, l’homme a tendance à réduire la complexité de son environnement au moyen de catégories rudimentaires, qui lui simplifient la vie ; dans le même souci du moindre effort, il va les meubler de croyances et d’opinions, qui lui viennent de son groupe d’appartenance : si la catégorisation est un invariant psychologique, elle appelle des invariants sociaux, qui vont modeler ses contenus (stéréotypes), ainsi que leurs connotations évaluatives (valeurs et normes sociales). Ce faisant, Tajfel ouvre une boîte de Pandore, dont va sortir une autre version de l’invariant social : les représentations sociales. Dans cette perspective, l’individu est toujours le récepteur et le réémetteur de stéréotypes forgés en dehors de lui ; mais, comme ces stéréotypes ont plutôt trait à des personnes, les « représentations sociales » vont couvrir des domaines sociétaux plus larges (Moscovici, 1961) et, surtout, avoir une structure et une dynamique propres (Abric, 1994) : chacune d’elles est composée d’un noyau central quasi-intangible et d’éléments périphériques plus malléables ; autrement dit, chacune d’elles peut subir certaines variations périphériques, tant que son noyau central n’est pas remis en cause et, si c’est le cas, elle est remplacée par une autre représentation. Tous ces choix théoriques ne vont pas manquer de retentir sur la définition même de l’identité de chacun, qui ne peut être que sociale, au croisement de ses appartenances à tel ou tel groupe (Scharnitzky, 2006) et des représentations sociales, dont il est porteur. Ils reviennent, pour la plupart, à partir de processus psychologiques (dissonance, catégorisation, représentation), pour leur donner une « essence » sociale, qui aurait valeur de loi, dès cet instant (je discrimine parce que je catégorise et je discrimine socialement, parce que je reprends des catégories et représentations sociales toutes prêtes). En d’autres occasions, Lewin (1931) avait dénoncé ce tour de passe-passe aristotélicien, qui revient à transformer une description en explication.

Le recours à l’expérimentation

36Le choix de l’expérimentation va accentuer l’idée d’un monde découpé en catégories tranchées et soumis à des causalités unidirectionnelles, dès lors qu’on y examine l’effet d’un nombre limité de variables indépendantes (découpées en quelques modalités) sur un nombre tout aussi restreint de variables dépendantes. De manière paradoxale, ces expériences portent, le plus souvent, sur des individus isolés, alors que leur appareillage conceptuel valorise les facteurs sociaux, de même, leurs résultats sont si opaques qu’on les dissèque à grand renfort de traitements statistiques compliqués, mais guère plus éclairants. On ne s’étonnera donc pas que ce curieux attelage tourne en rond, sans qu’il fasse progresser beaucoup la question des discriminations.

Les maux communs du darwinisme et de la psychologie sociale expérimentale

37Autrement dit, les études psychosociales et les études d’inspiration darwinienne peuvent converger vers des résultats similaires, à ceci près que les unes s’interdisent toute référence à la biologie, alors que les autres se permettent de le faire. On avancera, ici, que les unes et les autres se prêtent aux critiques de Miermont, 1o en privilégiant la transmission au détriment de l’invention dans la construction du vivant ; 2o en postulant une architecture du vivant en niveaux indépendants et étanches.

38En ce qui concerne le premier point, on remarquera que les représentations sociales ressemblent étrangement aux « réplicateurs culturels » ou « mèmes » de Dawkins. Les unes et les autres se déploient et se combattent dans leur propre monde, essentiellement symbolique ; ce qui implique la « négation de l’individualité » (Rouquette, 1994) de ceux qu’elles irriguent, en les réduisant au statut de récepteurs-réémetteurs ou de « masse ». Ce faisant, les unes et les autres privilégient la transmission, au détriment de l’invention dans la construction du vivant.

39En ce qui concerne le second point, on notera aussi que le darwinisme des comportements (Dawkins, notamment) et le courant des représentations sociales introduisent un dualisme de fait entre réplicateurs culturels et gènes biologiques, d’une part, représentations sociales et processus mentaux individuels, d’autre part. Ce faisant, l’un et l’autre réifient un niveau symbolique qui serait autonome [17].

40Sur ces deux points, on sera moins sévère à l’égard du darwinisme. Son père fondateur était un « esprit préparé » [18], soutenu par un réseau d’informateurs dévoués, qui sut accumuler d’innombrables observations, avant d’en proposer une théorie. Par la suite, le darwinisme de la synthèse privilégia la transmission génique sous l’effet des énormes progrès de la génétique, mais il n’est pas exclu qu’une nouvelle synthèse parvienne à absorber les études plus récentes de la dynamique des protéines. Et le darwinisme des comportements témoigne d’une ouverture croissante à l’égard des sciences humaines, même s’il privilégie toujours la transmission et tend à cloisonner les niveaux de l’architecture du vivant.

41En revanche, la psychologie sociale expérimentale des cinquante dernières années se caractérise plutôt par sa fermeture, en ignorant superbement les autres champs disciplinaires. S’agissant de la dissonance cognitive, rappelons que Freud (1895, p. 395) l’avait évoquée sous l’expression de « déplaisir intellectuel de la contradiction », qu’il imputait à « la non observation des règles biologiques qui gouvernent le cours de la pensée ». En ce qui concerne la catégorisation, signalons que Miller (1956) avait introduit, bien avant Tajfel, la notion de chunk qui désigne tout regroupement d’éléments d’information en des unités plus aisément manipulables et mémorisables, en précisant toutefois que ces chunks se formaient par agrégation de ces éléments et pouvaient se combiner ultérieurement entre eux, alors que Tajfel privilégie l’idée de catégories-réceptacles fortement cloisonnées. Soulignons aussi que Simon (1947, 1969) avait longuement insisté sur les limites de notre rationalité, qui nous incitaient, non seulement à produire de tels chunks, mais à utiliser aussi des « règles de flair » ou « heuristiques », pour économiser nos efforts intellectuels. Simon estimait même que « l’identification à l’organisation » constituait l’une des principales heuristiques de notre vie sociale (au lieu d’examiner à fond une question, reprendre ce qu’en pense notre entourage immédiat), mais il n’en faisait qu’une heuristique parmi d’autres, sans la réifier en invariant social, de même qu’il préférait une simulation dynamique des processus cognitifs à des expérimentations plus statiques. En ce qui concerne les représentations sociales, notons enfin que certains auteurs (Flament, 1984) iront même jusqu’à soutenir que le noyau central de celle du « groupe » renvoie à un « groupe idéal », dont les membres seraient égaux et fraternels, alors que les comportements animaux et humains sont marqués, depuis toujours, par des rapports de dominance et la création de hiérarchies.

Inventivité fictive et inventivité effective

42En privilégiant l’invention dans une architecture du vivant, dont les niveaux seraient constamment en résonance, Miermont (2007, p. 214) nous invite à envisager autrement l’inventivité : d’une part, en reconnaissant que « les phénomènes de tromperie, de déception, de falsification des signaux semblent caractériser les relations entre espèces, ainsi que les relations entre congénères chez les primates supérieurs » ; d’autre part, en admettant que « les relations sentimentales ou professionnelles, les systèmes de croyance et du sens de l’existence, les différenciations et les ajustements culturels, la compréhension de lui-même et de son environnement font que l’homme (…) se doit de ruser avec ses propres ruses, celles d’autrui, et celles des écosystèmes qui le font naître, vivre, survivre et mourir ».

43Dans cette perspective, force est de reconnaître que les bénéficiaires des discriminations font preuve de bien plus d’inventivité fictionnelle que ceux qui en sont victimes : outre les auteurs du système de castes, Platon n’a-t-il pas inventé un monde idéal pour rétablir la domination des familles aristocratiques dont il était issu ? Et Hegel n’a-t-il pas conçu, face au spectre de l’évolutionnisme, un projet divin confortant les prérogatives traditionnelles de la religion et de l’empereur (voir Popper, 1945) ?

44À l’inverse, on est en droit de penser que les victimes sont davantage soucieuses d’une inventivité plus embrayée sur la réalité. Le CRAN (Conseil représentatif des associations noires ; voir Lozès, 2007) en donne un exemple suggestif : loin de se présenter comme une communauté unie, ses membres clament leur diversité et leurs divergences d’intérêts ; loin de réclamer des politiques de discrimination positive en leur faveur, ils demandent qu’on se contente de les prendre pour des citoyens comme les autres ; loin de glorifier leur couleur, ils n’en font qu’un problème blanc à l’origine de leurs difficultés ; et puisqu’ils ne peuvent se fondre parmi les blancs, ils souhaitent, notamment, que les statistiques d’emploi et d’insertion fassent état de la couleur et même du pays d’origine de chacun, pour révéler l’étendue du préjudice qui leur est causé… Ce faisant, ils ne font que tenter de relier le niveau symbolique des bonnes paroles (qui sont souvent des dénis de la réalité), des lois généreuses (qui ne prônent qu’une égalité formelle) et des études savantes (qui « essentialisent » les discriminations) aux autres niveaux de la vie, à commencer par les comportements effectifs de chacun dans un environnement, où les vrais problèmes n’ont pas de couleur…

45Néanmoins, face à la prodigieuse plasticité fictionnelle des discours de la discrimination, on peut craindre que les leurs ne soient guère entendus et risquent même de se retourner contre eux (au point de les rendre responsables de ce qui leur arrive). En revanche, face à l’inventivité fictive de nombreuses études des discriminations, on peut estimer qu’ils disposent de meilleurs repères en tout genre (comportementaux, relationnels, émotionnels et même vitaux), pour orienter la psychologie sociale et le darwinisme des comportements dans le sens d’une inventivité plus effective.

46On nous objectera probablement que, sur ce point comme sur d’autres, la richesse des repères ne garantit pas la valeur des théories, pas plus que l’utilité sociale n’est gage de pertinence scientifique. On répondra à cela que les unes peuvent favoriser les autres : les repères astronomiques de Copernic et de Galilée ne leur ont-ils pas permis de surmonter les apparences du géocentrisme ? Les repères empiriques de Darwin ne lui ont-ils pas permis d’affronter les certitudes du créationnisme et du déterminisme ? Les techniques, dont la plupart étaient suscitées par des motifs de survie, n’ont-elles pas précédé le plus souvent les sciences et ne les ont-elles pas alimentées en problèmes plus fondamentaux ? Et les avancées scientifiques les plus rationnelles et les plus abstraites [19] ne s’enracinaient-elles pas dans des considérations ou des objets qui l’étaient moins (l’astrologie pour la physique, l’alchimie pour la chimie, les épluchures et les moisissures pour les vitamines et la pénicilline ; voir Dagognet, 1985) ?

Conclusion

47Si l’on admet que les sciences modernes ont coïncidé avec une décentration de l’homme en direction de l’univers (les astres, avec Kepler et Newton), le darwinisme résulte d’une autre décentration en direction de l’ensemble du monde vivant, chacune s’appuyant sur une somme considérable d’observations empiriques, tout en étant suivie d’une phase de reflux vers un monde symbolique et des idées fictionnelles « occultant » une réalité sociale bien plus archaïque. L’heure est sans doute venue d’une nouvelle décentration, qui relie, cette fois, l’homme à ses différents environnements : un environnement humain de plus en plus multicolore, mixte et urbain [20], un environnement biologique, dont la diversité est de plus en plus menacée et un environnement physique de plus en plus turbulent. Il y va de sa survie… et c’est probablement en commençant par se réconcilier avec elle-même que l’humanité évitera de scier la branche sur laquelle elle est assise.

Références

  • Aboud (Frances).– Children and prejudice, Oxford, Blackwell, 1988.
  • Abric (Jean-Claude).– L’organisation interne des représentations sociales : système central et système périphérique, dans Guimelli (C.), Structures et transformations des représentations sociales, Neuchâtel, Paris, Delachaux et Niestlé, 1994, p. 73-84.
  • Alchian (Armen A.).– Uncertainty, evolution and economical theory, Journal of political theory, 58, 1950, p. 211-222.
  • Ambedkar (Bhim R.).– Castes in India. Their mechanism, genesis and development, Indian antiquary, 16, Mai 1917.
  • Arroyo (Carmen G.), Zigler (Edward).– Racial identity, academic achievement, and the psychological wellbeing of economically disadvantaged adolescents, Journal of personality and social psychology, 69, 1995, p. 903-914.
  • Badinter (Elisabeth).– Fausse route. Réflexions sur 30 ans de féminisme, Paris, Odile Jacob, 2003.
  • Bem (Sandra).– Probing the promise of androgyny, dans Kaplan (A. G.), Bean (J. P.), Beyond sex-role stereotypes : readings toward a psychology of androgyny, Toronto, Little, Brown et Co, 1976, p. 48-62.
  • Berg (Paul), Singer (Maxine).– Dealing with genes. The language of heredity [1992], trad. fr. Comprendre et maîtriser les gènes, Paris, Vigot, 1996.
  • Blackmore (Susan).– The meme machine [1999], trad. fr. La théorie des mèmes. Pourquoi nous nous imitons les uns les autres, Paris, Max Milo, 2006.
  • Boltzmann (Ludwig).– Première leçon inaugurale de la chaire de Leipzig en novembre 1900, dans Boltzmann (L.), Voyage d’un professeur allemand en Eldorado et autres écrits populaires, Arles, Actes Sud, 1987, p. 44-63.
  • Bramel (Dana).– Attrait et hostilité interpersonnels, dans Moscovici (S.), Introduction à la psychologie sociale, Paris, Larousse, 1972, p. 192-236.
  • Buss (David).– Sex differences in human mate preferences : evolutionary hypotheses tested in 37 cultures, Behavioral and brain sciences, 12, 1989, p. 1-49.
  • Buss (David).– The evolution of desire : strategies of human mating [1994], trad. fr. Les stratégies de l’amour, Paris, InterEditions, 1994.
  • Cardinal (Marie).– Les mots pour le dire [1975], Paris, Le livre de poche, 1977.
  • Chaline (Jean).– Les horloges du vivant. Un nouveau stade dans la théorie de l’évolution, Paris, Hachette, 1999.
  • Chaline (Jean).– Quoi de neuf depuis Darwin ? La théorie de l’évolution des espèces dans tous ses états, Paris, Ellipses, 2006.
  • Chandebois (Rosine).– Pour en finir avec le darwinisme. Une nouvelle logique du vivant, Montpellier, Espaces 34, 1993.
  • Cosmides (Leda), Tooby (John).– From evolution to behavior : evolutionary psychology as the missing link, dans Dupré (J.), The latest on the best : essays on evolution and optimality, Cambridge, The MIT press, 1987, p. 278-306.
  • Dagognet (François).– Rematérialiser. Matières et matérialismes, Paris, J. Vrin, 1985.
  • Darwin (Charles).– On the origin of species by means of natural selection or the preservation of favored races in the struggle for life [1859], trad. fr. L’origine des espèces, Paris, Garnier-Flammarion, 1992.
  • Darwin (Charles).– The descent of man and selection in relation to sex [1871], trad. fr. La descendance de l’homme et la sélection sexuelle, Paris, Éditions Complexe, 1981.
  • Dawkins (Richard).– The selfish gene [1976], trad. fr. Le gène égoïste, Paris, Odile Jacob, 1996.
  • Dawkins (Richard).– The extended phenotype. The long reach of the gene, Oxford, Oxford university press, 1982, 1999.
  • Dawkins (Richard).– Virus of the mind, dans Dahlbom (B.), Dennett and his critics, Oxford, Blackwell, 1993, p. 13-27.
  • Deconchy (Jean-Pierre).– Psychologie sociale. Croyances et idéologies, Paris, Méridiens Klincksieck, 1989.
  • Denton (Michael).– Evolution. A theory in crisis [1985], trad. fr. Évolution. Une théorie en crise, Paris, Londreys, 1988.
  • Désert (Michel), Leyens (Jacques-Philippe).– L’affirmation de soi et du groupe chez les personnes stigmatisées, dans Croizet (J.-C.), Leyens (J.-P.), Mauvaises réputations. Réalités et enjeux de la stigmatisation sociale, Paris, Armand Colin, 2004, p. 235-255.
  • Du Bois (William Edward B.).– The souls of black folk [1903], New York, Bantam, 1989.
  • Du Bois (William Edward B.).– Black reconstruction in America, New York, Atheneum, 1938.
  • Dubois (Laurent).– Avengers of the new world [2004], trad. fr. Les vengeurs du nouveau monde. Histoire de la révolution haïtienne, Rennes, Les Perséides, 2005.
  • Flament (Claude).– From the bias of structural balance to the representation of the group, dans Farr (R. M.), Moscovici (S.), Social representations, Cambridge, Cambridge university press, 1984, p. 269-285.
  • Fleury (Vincent).– De l’oeuf à l’éternité. Le sens de l’évolution, Paris, Flammarion, 2006.
  • Freud (Sigmund).– Esquisse d’une psychologie scientifique [1895], dans Freud (S.), La naissance de la psychanalyse [1950], Paris, Presses universitaires de France, 1956, 1986, p. 307-396.
  • Friedman (Milton).– Essays in positive economics, Chicago, Chicago university press, 1953.
  • Gilroy (Paul).– The Black Atlantic. Modernity and double consciousness [1993], trad. fr. L’Atlantique noir. Modernité et double conscience, Paris, Kargo, 2003.
  • Gould (Stephen J.).– The structure of evolutionary theory [2002], trad. fr. La structure de la théorie de l’évolution, Paris, Gallimard, 2006.
  • Gould (Stephen J.), Lewontin (Richard C.).– The spandrels of San Marco and the Panglossian paradigm : a critique of the adaptationist programme [1979], trad. fr. L’adaptation biologique, La recherche, 39, 1982, p. 1494-1502.
  • Hamilton (William).– The genetical evolution of social behavior, Journal of theoretical biology, 7, 1964, p. 1-16 et p. 17-52.
  • Herrenschmidt (Olivier).– « L’inégalité graduée » ou la pire des inégalités. L’analyse de la société hindoue par Ambedkar, Archives européennes de sociologie, 37, 1996, p. 3-22.
  • Jaffrelot (Christophe).– India’s silent revolution [2003], trad. fr. Inde : la démocratie par la caste. Histoire d’une mutation socio-politique (1885-2005), Paris, Fayard, 2005.
  • Jouxtel (Pascal).– Comment les systèmes pondent. Une introduction à la mémétique, Paris, Le pommier, 2005.
  • Lewin (Kurt).– The conflict between Aristotelian and Galilean modes of thought in contemporary psychology [1931], trad. fr. Le conflit dans les modes de pensée aristotélicien et galiléen dans la psychologie contemporaine, dans Lewin (K.), Psychologie dynamique. Les relations humaines. Paris, Presses universitaires de France, 1967, p. 23-64.
  • Lewontin (Richard C.), Rose (Steven), Kamin (Leon).– Not in our genes. Biology, Ideology and Human Nature, New York, Pantheon, 1984.
  • Lorenzi-Cioldi (Fabio).– Les androgynes, Paris, Presses universitaires de France, 1994.
  • Lorenzi-Cioldi (Fabio).– Les représentations des groupes dominants et dominés : collections et agrégats, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, 2002.
  • Lorenzi-Cioldi (Fabio), Buschini (Fabrice).– Vaut-il mieux être une femme qualifiée ou être qualifiée de femme ? Effets paradoxaux de la catégorisation dans la discrimination positive, dans Sanchez-Mazas (M.), Licata (L.), L’autre. Regards psychosociaux, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, 2005, p. 279-308.
  • Lozès (Patrick).– Nous, les Noirs de France, Paris, Éditions Danger public, 2007.
  • Lumsden (Charles), Wilson (Edward O.).– Genes, mind and culture, Cambridge, Harvard university press, 1981.
  • Malamoud (Charles).– L’Inde brâhmanique. Karman des hommes, Maya des dieux, dans Châtelet (F.), Histoire des idéologies, tome 1 : Les mondes divins jusqu’au VIIIe siècle de notre ère, Paris, Hachette, 1978, p. 67-81.
  • Maurin (Eric).– Le Ghetto français : enquête sur le séparatisme social, Paris, Éditions du seuil, 2004.
  • Mayr (Ernst).– One long argument. Charles Darwin and the genesis of modern evolutionary thought [1991] ; trad. fr. Darwin et la pensée moderne de l’évolution, Paris, Odile Jacob, 1993.
  • Medvedev (Jaurès).– Grandeur et chute de Lyssenko, Paris, Gallimard, 1971.
  • Miermont (Jacques).– Les ruses de l’esprit ou les arcanes de la complexité, Paris, L’harmattan, 2000.
  • Miermont (Jacques).– Émergences, résurgences et rémanences en temps réel, dans Miermont (J.), Ruses de l’humain dans un monde rusé : identités, unité, complexité, Paris, L’harmattan, 2007, p. 175-218.
  • Miller (George A.).– The magical number seven, plus or minus two, Psychological review, 63, 1956, p. 81-97.
  • Moscovici (Serge).– La psychanalyse, son image, son public, Paris, Presses universitaires de France, 1961.
  • Moscovici (Serge).– Introduction : le domaine de la psychologie sociale, dans Moscovici (S.), Psychologie sociale, Paris Presses universitaires de France, 1984, p. 5-22.
  • Omvedt (Gail).– Dalit visions, New Delhi, Orient Longman, 1995.
  • Pasteur (Louis).– Discours prononcé à Douai le 7 décembre 1854, dans Installation solennelle de la faculté des lettres de Douai et de la faculté des sciences de Lille, Douai, A. d’Aubers, 1854.
  • Popper (Karl).– The open society and its enemies [1945], trad. fr. La société ouverte et ses ennemis, Paris, Éditions du Seuil, 1979.
  • Popper (Karl).– Objective knowledge : an evolutionary approach [1972], trad. fr. La connaissance objective, Bruxelles, Éditions Complexe, 1978.
  • Powlishta (Kimberly K.), Serbin (Lisa A.), Doyle (Anna-Beth), White (Douglas R.).– Gender, ethnic and body type biases : the generality of prejudice in childhood, Developmental psychology, 30, 1994, p. 526-536.
  • Rioux (Christian).– Carnets d’Amérique, Montréal, Éditions Boréal, 2006.
  • Rouquette (Michel-Louis).– Sur la connaissance des masses, essai de psychologie politique, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, 1994.
  • Scharnitsky (Patrick).– Les pièges de la discrimination. Tous acteurs, tous victimes, Paris, Éditions de l’archipel, 2006.
  • Sidanius (Jim), PRatto (Felicia).– Social dominance, Cambridge, Cambridge university press, 1999.
  • Simon (Herbert A.).– Administrative behavior. A study of decision-making processes in administrative organization [1947], trad. fr. Administration et processus de décision, Paris, Economica, 1983.
  • Simon (Herbert A.).– The sciences of the artificial [1969], trad. fr. Les sciences de l’artificiel, Paris, Gallimard, 2004.
  • Spencer (Herbert).– Social statics. The essential conditions to human happiness specified, and the first of them developped [1851], Whitefish, Kessinger, 2006.
  • Tajfel (Henri).– La catégorisation sociale, dans Moscovici (S.), Introduction à la psychologie sociale, Paris, Larousse, 1972, p. 272-300.
  • Tougas (Francine), Desruisseaux (Jean-Claude), Desrochers (Alain), St-Pierre (Line), Perrino (Andrea), De La Sablonnière (Roxane).– Two forms of racism and their related outcomes : the bad and the ugly, Canadian journal of behavioural science, 36, 3, 2004, p. 177-189.
  • Trivers (Robert).– The evolution of reciprocal altruism, Quarterly review of biology, 46, 1971, p. 35-36.
  • Trivers (Robert).– Parental investment and sexual selection, dans Campbell (B.), Sexual selection and the descent of man, Chicago, Aldine de Gruyter, 1972, p. 136-179.
  • Trivers (Robert).– Parent-offspring conflict, American zoologist, 14, 1974, p. 249-264.
  • Wilson (Edward O.).– Sociobiology. The new synthesis [1975], trad. fr. La sociobiologie, Monaco, Éditions du Rocher, 1987.
  • Wilson (Edward O.).– On human nature [1978], trad. fr. L’humaine nature, essai de sociobiologie, Paris, Stock, 1979.
  • Wright (Richard).– The Outsider [1956], trad. fr. Le transfuge, Paris, Gallimard, 1979.
  • Wright (Robert).– The moral animal [1994], trad. fr. L’animal moral. Psychologie évolutionniste et vie quotidienne, Paris, Gallimard, 2005.

Date de mise en ligne : 01/02/2012

https://doi.org/10.3917/bupsy.493.0083

Notes

  • [*]
    Université Paul-Valéry, Montpellier-III, route de Mende, 34199 Montpellier Cedex 5.
    <andrel.demailly@wanadoo.fr>
  • [1]
    Longtemps confinée au domaine animal, la biologie des populations s’est peu à peu intéressée à l’homme, avec les travaux fondateurs de Trivers, de Wilson (1975, 1978) et de Dawkins (1976). La psychologie évolutionniste s’est constituée plus récemment (Cosmides, Tooby, 1987), dans le sillage de ces pionniers, en se démarquant de certaines de leurs positions et en évitant, surtout, de reprendre l’intitulé, fort décrié, de « sociobiologie », comme nous le verrons plus loin.
  • [2]
    À l’instar de Dawkins (1982, glossaire), on évitera de qualifier de « néo-darwiniens » les auteurs de cette synthèse, tant il y en a d’autres qui se considèrent comme tels. Par souci de clarté, on parlera de « darwinisme de la synthèse », pour les désigner et de « darwinisme des comportements », pour désigner les courants de la biologie des populations et de la psychologie évolutionniste, dont il sera question ci-dessous.
  • [3]
    Pour expliquer ce comportement, il souligne que les hyménoptères sont haplodiploïdes : les œufs de la reine, qui ne sont pas fécondés donnent des mâles, tandis que les œufs fécondés donnent des femelles, de sorte que celles-ci partagent plus de gènes en commun (3/4) qu’avec les mâles (1/4) ou même leur éventuelle progéniture féminine (1/2).
  • [4]
    Dawkins, comme Lumsden et Wilson, reconnaissent, cependant, que ce dernier leur a ouvert la voie.
  • [5]
    À l’appui de cette thèse, les enquêtes de Buss (1989, 1994) montrent que les hommes craignent plutôt l’infidélité sexuelle de leurs épouses, tandis que les femmes appréhendent davantage l’infidélité affective de leurs conjoints : les premiers tendant à être rassurés quant à leur paternité, les secondes recherchant un partenaire stable pour réaliser leur maternité.
  • [6]
    La question des origines du système de castes reste très controversée. La version que nous en donnons est celle du Mahatma Phule (1827-1890), qui anima un puissant mouvement anti-brahmane au Maharashtra (voir Omvedt, 1995). Le grand meneur intouchable (ou dalit), Ambedkar (1917), reprend cette thèse d’une invention délibérée de ce système. Issu des hautes castes, son contemporain Gandhi (1921 ; cité par Jaffrelot, 2003, p. 26) ne le conteste pas sur ce point, tout en adoptant des accents quasi darwiniens pour en défendre le principe : « D’un point de vue historique, la caste apparaît comme l’expérience d’adaptation sociale tentée par l’homme dans le laboratoire de l’Inde. Si nous pouvons prouver qu’il s’agit d’une réussite, nous pourrons l’offrir au monde comme un levier et comme le meilleur remède contre la compétition sans cœur et la désintégration sociale née de l’avarice et de l’appât du gain ». On notera que Gandhi se fait le pourfendeur d’un libéralisme économique qui se réclame aussi du darwinisme (voir Alchian, 1950 ; Friedman, 1953).
  • [7]
    On notera, toutefois, que Dawkins (1982, 1993) accorde plus d’importance à la question des origines, en s’intéressant davantage aux caractéristiques structurelles (et non au contenu) des « mèmes » dominants. Comme on le verra ultérieurement, c’est ce qui le rapproche le plus de la psychologie sociale expérimentale actuelle, essentiellement axée sur la recherche des invariants psychosociaux des discriminations.
  • [8]
    Ces interventions extérieures relèvent de la régulation sociale et visent à désamorcer les situations les plus explosives. Comme on le verra, elles sont le fait d’élites, qui sont parties prenantes du système en place et n’ont pas intérêt à provoquer son dépérissement total.
  • [9]
    Ambedkar (voir Herrenschmidt, 1996) définit par ce terme l’imitation des hautes castes par les basses castes et, donc, l’intériorisation, par celles-ci, de la doctrine et des rites de « l’inégalité graduée » de celles-là.
  • [10]
    Dans la société industrielle, la polygamie officielle aurait ajouté, à la pauvreté des plus démunis, une misère sexuelle, dont les conséquences auraient été bien plus explosives. Par définition, le prolétaire « possède », quand même, une femme et des enfants.
  • [11]
    À l’appui de cette thèse, on remarquera combien les enfants reprennent et amplifient à l’excès les injures sexistes ou racistes, qu’ils ont entendues dans leur entourage familial ou scolaire (voir Aboud, 1988 ; Powlishta, Serbinn Doyle, White, 1994).
  • [12]
    Chaque Indien est tellement obnubilé par la différence, qu’il ne se repère qu’au travers de sa sous-caste, qui est l’une des multiples ramifications d’une caste bien plus abstraite.
  • [13]
    W. E. B. Du Bois précise, aussi, que cette double conscience doit être féminisée, tant pour exorciser les violences à l’égard des femmes, que pour en reprendre les vertus d’harmonie, de liberté et de réciprocité.
  • [14]
    Lorenzi-Cioldi (2002) souligne que la notion de discrimination positive a pris le pas sur d’autres expressions équivalentes (discrimination inverse, action antidiscriminatoire, traitement préférentiel, égalité d’opportunités d’emploi) et qu’elle a fait partie du vocabulaire politique avant d’être reprise par celui des sciences sociales.
  • [15]
    Gould et surtout Lewontin furent les grands pourfendeurs, au nom de l’antiréductionnisme et du marxisme, des thèses sociobiologiques de Wilson et sont à l’origine du discrédit qui entoure toujours la notion même de sociobiologie.
  • [16]
    Dans le même esprit, Berg et Singer (1992) font valoir que des jumeaux homozygotes, issus des mêmes gènes, n’auront pas le même fonctionnement cérébral ni les mêmes défenses immunitaires.
  • [17]
    Popper (1972) avait évoqué, lui aussi, un « monde des idées », mais en prenant soin de souligner qu’il n’avait d’existence propre qu’à la condition d’être consigné sur des supports matériels (livres et autres médias).
  • [18]
    Allusion à l’aphorisme de Pasteur (1854), selon lequel « dans les champs de l’observation, le hasard ne favorise que des esprits préparés ».
  • [19]
    Dans un registre plus philosophique, on notera que le pragmatisme américain, dont on redécouvre actuellement toute la richesse, est né de la bataille de Gettysburg (Rioux, 2006) : les Américains s’aperçurent qu’ils s’y étaient massacrés au nom d’idées abstraites, d’autant plus violentes qu’elles étaient rationnelles, et qu’on ne les y reprendrait plus ; à partir de là, James et Dewey vont s’attacher davantage à l’utilité des idées qu’à leur rationalité, tandis que Peirce va explorer ce qui relie les signes les plus abstraits aux plus incarnés et les raisonnements les plus heuristiques à leurs sources les plus banales.
  • [20]
    Cet aspect mérite d’être souligné en ce qui concerne les discriminations de caste. Les villages indiens ont longtemps été l’instrument privilégié tant de la ségrégation des activités et des unions que du contrôle des contacts et des échanges. La vie urbaine vient brouiller tout cela, bien que les sports sans contact (cricket) aient toujours peu de chances d’y être évincés par les sports de contact (rugby).

Domaines

Sciences Humaines et Sociales

Sciences, techniques et médecine

Droit et Administration

bb.footer.alt.logo.cairn

Cairn.info, plateforme de référence pour les publications scientifiques francophones, vise à favoriser la découverte d’une recherche de qualité tout en cultivant l’indépendance et la diversité des acteurs de l’écosystème du savoir.

Retrouvez Cairn.info sur

Avec le soutien de

18.97.14.90

Accès institutions

Rechercher

Toutes les institutions