Notes
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[1]
Alphonse L.E. VERHEYDEN, Vilvoorde, internationaal repressiecentrum en brandpunt van het zestiendeeuws protestantisme, Vilvoorde, 1972.
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[2]
Alphonse L.E. VERHEYDEN, Le Conseil des Troubles. Liste des condamnés (1567-1573), Bruxelles, 1961. Alphonse L.E. VERHEYDEN, Le Conseil des Troubles, traduit du néerlandais par Urbain Dewaele, dans Collection Histoire du Protestantisme en Belgique et au Congo Belge, tome 11, Flavion-Florennes, 1981.
-
[3]
Paulo CHARRUADAS, Stéphane DEMETER, Michel DE WAHA, Vincent HEYMANS et Philippe SOSNOWSKA, « Cepi incendioque delevi… Enjeux politiques et réalité matérielle des destructions architecturales intentionnelles en Brabant méridional (XIIe-XVIIe siècles) », dans David ENGELS, Didier MARTENS et Alexis WILKIN (dir.), La destruction dans l’histoire, Pratiques et discours, Bruxelles, 2013, p.185-213.
-
[4]
Louis Prosper GACHARD, Correspondance de Philippe II sur les affaires des Pays-Bas [1558-1577] publiée d’après les originaux conservés dans les archives royales de Simancas, Librairie ancienne et moderne, 1848, p.533 : Lettre de la duchesse de Parme au Roi, écrite d’Anvers, le 8 mai 1567 : avertie par le comte d’Arenberg dans une lettre, écrite de Harlingen, le 5 mai 1567, elle annonce la prise de 120 hommes ; elle a donné l’ordre au comte d’Arenberg de faire faire le procès aux deux frères de Battembourg et aux deux gentilhommes frisons (il y en avait trois : Suert Beyma, Herman Van Galama et Guillaume de Bouwema) et d’envoyer à Vilvorde Andelot, Wingle et Maximilien de Blois, dit Cock. Par la suite, les Battembourg sont envoyés également à Vilvorde.
-
[5]
A.J. VAN DER AA., Biographisch woordenboek der Nederlanden, Deel 1, 1852.
-
[6]
Michel BAELDE, De collaterale raden (1531-1578), dans Verhandelingen van de Koninklijke Academie voor Wetenschappen, Letteren en Schone Kunsten van België, Klasse der Letteren, Verhandeling nr 60, Bruxelles, 1965, p.310.
-
[7]
Guillaume Philidor VAN DEN BURGGRAAF, Collection des anciennes portes de Bruxelles, 1823, p.4-5.
-
[8]
Michel PASTOUREAU, “Histoire de l’Ordre de la Toison d’Or. Un nouvel ordre de chevalerie”, dans Pierre COCKSHAW, et Christiane VAN DEN BERGEN-PANTENS (réd.), L’ordre de la Toison d’or, de Philippe le Bon à Philippe le Beau (1430-1505) : idéal ou reflet d’une société ?, Bruxelles, 1996, p. 66; voir aussi : Wim BLOCKMANS et Walter PREVENIER, De Bourgondiërs, de Nederlanden op weg naar eenheid 1384-1530, Amsterdam, 2000.
-
[9]
Pour les Granvelle, voir : M. VAN DURME, Antoon Perrenot, bisschop van Atrecht, kardinaal van Granvelle, minister van Karel V en van Filips II {1517-1586), dans Verhandelingen van de Koninklijke Academie voor Wetenschappen, Letteren en Schone Kunsten van België, Klasse der Letteren, Verhandeling nr. 18, Bruxelles, 1953, et Krista DE JONGE et Gustaaf JANSSENS (réd.), « Les Granvelle et les anciens Pays-Bas », Liber doctori Mauricio van Durme dedictatus, Louvain, 2000.
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[10]
Pour l’Egmont historique et pour le déroulement des événements des années 1560, un bon aperçu récent : Luc DE BOTH et Olivier VAN RODE, « Het bewogen leven van graaf Lamoraal van Egmond (1522-1568) » dans Zottegems Genootschap voor Geschiedenis en Oudheidkunde, Handelingen, XVIII, Zottegem, 2017(Themanummer Graaf Lamoraal van Egmond (1522-1568) deel 1).
-
[11]
Luc DE BOTH et Olivier VAN RODE, op.cit., p. 117.
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[12]
Ibidem, p. 120, 124.
-
[13]
Ibidem, p. 128.
-
[14]
Ibidem, p. 132.
-
[15]
Ibidem, p. 147.
-
[16]
Ibidem, p. 149.
-
[17]
Ibidem, p. 153, 159.
-
[18]
Ibidem, p. 162.
-
[19]
Ibidem, p. 165.
-
[20]
M. De Bavay, procureur général, Le procès du comte d’Egmont, avec pièces justificatives, d’après les manuscrits originaux trouvés à Mons, Bruxelles, 1853, p. 93 : Pièces justificatives, Libel accusatoire du procureur général maître Jean du Bois, notifié au comte d’Egmont, le 11 janvier 1568.
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[21]
Pour l’Egmont légendaire, voir : VAN NUFFEL Herman, « Lamoraal van Egmont in de Geschiedenis, Literatuur, Beeldende Kunst en Legende », dans Anciens Pays et Assemblées d’Etats, XLVI, 1968, et très recent : Rengenier RITTERSMA, « Mytho-poetics at Work: A Study of the Figure of Egmont, the Dutch Revolt and its Influence in Europe », dans Brill’s studies in intellectual history, Volume 266, 2018.
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[22]
VAN NUFFEL, op.cit., p. 79.
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[23]
Ibidem, p. 86.
L’utilité de l’histoire des contestations
1La loi des chiffres ronds oblige : cinquante ans après les contestations de mai ‘68 à Paris, Bruxelles et Louvain, l’année 2018 se doit d’être une année de (la commémoration de) la contestation. Mais l’affaiblissement de la référence historique dans l’enseignement et dans la culture générale risque de faire oublier que cinquante ans, ce n’est pas le seul anniversaire possible. En effet, l’année 1568 qui fête maintenant ses quatre-cent-cinquante ans est infiniment plus importante dans l’histoire de la contestation à Bruxelles que 1968, année des occupations du Palais des Beaux-Arts (futur Bozar) et de l’U.L.B.
2Les débats de l’année en cours démontreront si nous sommes déjà capables aujourd’hui de considérer mai 1968 avec la distance critique nécessaire pour dresser un bilan équilibré. La réalité est toujours plus complexe et nuancée que la mythologie qui se greffe dessus. Ainsi mai 1968 connut surtout une grande percée de l’individualisme. Le démantèlement d’un ordre social désuet inaugurait sans doute la libération sexuelle (surtout pour les hommes) mais ce fut probablement aussi le début d’une offensive néolibérale. Le rejet de toute autorité a ébranlé les réflexes collectifs d’une gauche classique qui ne s’est plus jamais remise de ce choc.
3En milieu universitaire, le résultat le plus concret de mai ‘68 était la victoire du séparatisme linguistique. Sans ça, l’Université Catholique de Louvain serait aujourd’hui l’université la plus importante d’Europe…Et du côté laïque ce n’est pas mieux, puisque l’Université Libre de Bruxelles a tout simplement suivi l’exemple séparatiste de Louvain. Non sans succès, le recteur Aloïs Gerlo a inauguré la transformation de la Vrije Universiteit Brussel en une Vlaamse Universiteit Brussel, appuyé dans sa démarche par une génération d’académiciens dont bon nombre devait sa carrière à cette séparation. Heureusement, certains rectifient le tir depuis lors.
4Voilà donc un bilan bien mitigé qui, dans une large mesure, reste encore à faire. Rien n’empêche d’ailleurs de l’inverser. Le bourgmestre d’Anvers et chef du plus grand parti de Belgique n’admire dans mai ‘68 que les gains du mouvement flamand. Pour le reste, il estime que le nihilisme a battu l’idéalisme, que la consommation a battu la culture et que depuis, le postmodernisme nie toute identité collective.
5En ce qui concerne 1568, le recul dix fois plus important (cinq siècles) facilite peut-être une lecture des événements qui permet de faire la part des choses. Ainsi l’analyse du passé lointain pourrait peut-être inspirer une lecture nuancée du passé proche et du présent.
La répression de 1568
6Déjà dans la célèbre « Histoire de la ville de Bruxelles » d’Alexandre Henne et Alphonse Wauters, la première histoire scientifique moderne de la ville publiée en 1845, Henne qui s’occupe du XVIe siècle dont il est le grand spécialiste, fait l’inventaire de la vague répressive qui déferle sur Bruxelles au printemps de 1568 :
- le 2 avril, dix exécutions : des condamnés accusés de pillages d’églises
- le même jour, trois Bruxellois arrêtés, mais relâchés sous fortes cautions
- le 6 avril, sept autres exécutions
- le 24 avril, encore sept exécutions
- le 22 mai, un prédicant brûlé vif
- le 28 mai, l’hôtel de Culembourg condamné à être abattu de fond en comble
- le 1er juin, dix-huit gentilshommes décapités au Sablon
- le 2 juin, trois autres exécutions au Sablon (en fait, quatre)
- le 5 juin, l’apogée : la décapitation des comtes d’Egmont et de Hornes sur la Grand-Place
8Henne cite aussi plusieurs exécutions le 2 juin 1568 au château de Vilvorde, dont Antoine van Straelen, seigneur de Merksem et ancien bourgmestre d’Anvers, et Jean Casembroot, seigneur de Beckerzeel, selon lui secrétaire du comte de Hornes. En réalité, Casembroot est le secrétaire du comte d’Egmont et van Straelen et lui ne sont interrogés que le 24 septembre 1568 à la prison de Vilvorde, où ils sont décapités par la suite. En effet, certains prisonniers importants sont transférés de Bruxelles à cette prison où ils sont accusés, torturés, condamnés et exécutés [1].
Quelles sont les origines d’autant de violence judiciaire ?
9En octobre 1565, puis en juillet 1566, Philippe II, roi des Espagnes et souverain des anciens Pays-Bas bourguignons, écrit à la Casa del Bosque de Segovia les fameuses « lettres des bois de Ségovie » qu’il adresse à sa demi-sœur Marguerite de Parme, régente des Pays-Bas. Ses lettres font suite à un courrier de Marguerite de juillet 1565 et aux ambassades à Madrid du comte d’Egmont en 1565 et du marquis de Bergues et du baron de Montigny (Florent de Montmorency, frère du comte de Hornes Philippe de Montmorency) en 1566. Toutes ces démarches plaident pour un allègement des ordonnances condamnant l’hérésie et des peines déjà prononcées.
10Le refus de toute concession de la part du roi ne règle rien sur le terrain, au contraire. Un grand nombre de petits nobles constituent une alliance et, le 5 avril 1566, ils sont 300 à remettre une pétition à la régente. C’est le « Compromis des Nobles ». En août 1566 se déclenche le mouvement iconoclaste dans le “Westkwartier” (le sud-ouest du comté de Flandre, c’est à dire la région de Furnes, Ypres, Warneton, Bailleul, Bergues, Cassel et Bourbourg). Si le mouvement prend la forme d’une contestation religieuse par la destruction d’images religieuses (tableaux, statues, châsses, retables, etc.), il s’explique tout autant par la crise économique et surtout sociale provoquée par les mauvaises récoltes. De ce fait, il s’agit d’un conflit d’un tout autre type que celui qui secoue les élites politiques à Bruxelles. Par son rôle de centre politique, la ville devient le centre d’une répression qui répond à des contestations bien différentes.
11Fin 1566, Philippe II décide de trancher entre la politique modérée prônée par le prince d’Eboli, Rui Gomes da Silva, et la politique de confrontation prônée par le duc d’Albe, Ferdinand Alvare de Tolède. Albe reçoit l’ordre de monter d’Italie vers les Pays-Bas avec les troupes d’élite espagnoles, les fameux tercios, les special troops de l’époque, pour y mettre de l’ordre. Il entre à Bruxelles le 22 août 1567 et y installe dès septembre un tribunal d’exception : le Conseil des Troubles, chargé de la répression des troubles religieux. Huit mois plus tard, Bruxelles devient le théâtre des premières exécutions, suivies de plus de mille condamnations à mort et de plus de douze mille bannissements avec saisie des biens. Les sentences et notamment les saisies n’ont pas toutes été réalisées avec la même rigueur, mais les chiffres restent impressionnants.
Qui est condamné et pourquoi ?
12Les suppliciés du mois d’avril sont condamnés pour leur implication dans le mouvement iconoclaste. La principale victime du mois de mai est un bâtiment et les exécutions de début juin concernent surtout des nobles qui n’ont rien à voir avec l’iconoclasme [2].
L’hôtel de Culembourg
13Cet hôtel est condamné à la démolition le 28 mai [3]. C’est de là que les nobles sont partis pour présenter leur « Compromis » à la gouvernante et c’est là qu’ils se sont retrouvés par la suite pour le « Banquet » où ils ont décidé de se réapproprier le terme de dédain « gueux » pour en faire un titre d’honneur qu’ils portent fièrement. En réalité, les nobles ont rencontré la gouvernante à trois reprises et plusieurs banquets ont eu lieu en ce début d’avril 1566.
14Le bâtiment et son emplacement sont emblématiques à tel point que par la suite, ils ne laissent plus personne indifférent. L’hôtel est rasé jusqu’à la dernière pierre. Du sel est semé à son emplacement. Les vainqueurs connaissent leurs classiques et savent que selon Tite-Live les Romains ont fait de même à Carthage ! À l’emplacement de l’hôtel, une colonne commémorative est érigée avec un texte expiatoire en quatre langues (français, latin, néerlandais et espagnol) : « Sous le règne du roi Philippe II et du temps du duc d’Albe, gouverneur des Pays-Bas en son nom, on ordonna que la maison de Floris de Pallant, conte de Culenbourg seroit rompue jusques au fond, en mémoire de l’exécrable conspiration faicte en icelle contre la Religion de l’Église Catholique et Romaine, contre le Roy et contre ses Païs. L’an MDLXVIII, le 28 de may. ». Dès que les États-Généraux prennent le pouvoir, la colonne est détruite. Après le retour du pouvoir catholique, un couvent de Carmes déchaussés voit le jour au même endroit. Aucun ordre n’est plus représentatif du triomphe de la contre-réforme espagnole.
15Une étude attentive de l’iconographie et des sources écrites permet de supposer que seule l’aile du bâtiment côté rue a été entièrement rasée et que par la suite les ruines de l’hôtel de Culembourg ont été transformées en bâtiments conventuels pour les Petits Carmes.
16Aujourd’hui, une pierre placée à gauche de la troisième porte à gauche des casernes Albert, rue des Petits Carmes, commémore les événements : « Ici s’élevait au XVIe siècle l’hôtel de Culembourg, où se tint le 6 avril 1566 le Banquet des Gueux. Le Conseil des Troubles le fit raser en 1568, pour flétrir les défenseurs de la liberté de conscience. Afin d’honorer leur mémoire, le Conseil Communal a décrété le placement de cette pierre commémorative ». Au-dessus, un croissant est orné de l’inscription « Liever Turcx dan Pausch » et en bas se trouvent « Jusques à porter la besace et Libertas vita carior ». La plaque posée en 1885 était bien visible sur les murs de la prison des Petits-Carmes. Replacée après la construction de la caserne, elle est maintenant à une hauteur qui la rend illisible. Se peut-il que son contenu ait dérangé quelqu’un ? Et si elle se trouve bien à la bonne caserne, c’est à côté de la mauvaise porte. En effet, Culembourg était voisin d’Egmont et se trouvait à hauteur de la première porte à droite de la caserne, plutôt que de la troisième porte à gauche.
Les partisans de Bréderode
17Le premier dirigeant de l’opposition armée au roi Philippe II est Henri, comte de Bréderode, dit « le Grand Gueux ». C’est lui qui présente le « Compromis des Nobles » à la gouvernante. Fin 1566, il se retranche dans sa ville de Vianen d’où il mène campagne à Utrecht et dans le comté de Hollande. La défaite des rebelles à Oosterweel au nord d’Anvers le 13 mars 1567 et la reconquête catholique de Valenciennes le 24 mars 1567 décident Bréderode de quitter les Pays-Bas. Il meurt en exil le 15 février 1568.
18Après la bataille d’Oosterweel, un groupe de 120 partisans de Bréderode ne réussit pas à le rejoindre et essaye d’atteindre la Frise Orientale. Trahis par le capitaine de leur bateau, ils sont arrêtés à Harlingen le 7 mai 1567 [4]. La moitié des dix-huit gentilshommes décapités au Sablon le 1er juin font partie du groupe arrêté à Harlingen : Gisbert et Théodore de Bronckhorst, seigneurs de Batenburg, Pierre d’Andelot, Philippe Van Winghe, Maximilien de Blois dit Cocq de Neringen, Jean de Blois de Treslong et les Frisons Suert Beyma, Herman de Galama et Willem de Bauwema.
19Ils ont été amenés au château de Vilvorde pour interrogation sous torture, notamment pour les y confronter avec d’autres prisonniers dont Artus de Boudechon et Jacques d’Elpendam, chambellan et secrétaire de Bréderode, qui partagent leur triste sort le 1er juin. Puisque le Grand Gueux a échappé à ces souffrances par son exil et son décès, on pourrait dire que, par le supplice de ses partisans, les exécutions du 1er juin au Sablon sont le règlement des comptes du régime avec la première résistance armée qu’il a dirigée en 1567-1568.
20L’exécution de Pierre d’Andelot est un moment particulièrement pénible de cette phase de la répression. À quatre reprises le bourreau doit s’y reprendre avant qu’il ne réussisse à séparer sa tête de son corps [5].
21Le 2 juin suivent quatre autres exécutions au Sablon : Jean de Montigny, seigneur de Villers et Philippe, sire de Dhuy, bâtard de la Maison de Namur, arrêtés tous les deux après leur défaite à Dalhem en avril 1568 ; Quentin Benoit, bailli d’Enghien et Corneille van Meen, un prédicant calviniste.
22Le choix du Sablon comme lieu des supplices du 1er et du 2 juin n’est pas dû au hasard. Il fait partie d’une grande mise en scène spectaculaire. Derrière Notre-Dame du Sablon se trouve aujourd’hui un hôtel qui occupe l’emplacement d’une résidence prestigieuse habitée successivement par Charles Tisnacq, président du Conseil Privé de 1569 à 1573, son beau-fils, Jean de Sainte-Aldegonde-Noircarmes, et le fils de ce dernier Philippe de Saint-Aldegonde, seigneur de Noircarmes, membre du Conseil des Troubles (à ne pas confondre avec Philippe de Marnix de Saint-Aldegonde, le principal conseiller de Guillaume le Taciturne) [6]. Les exécutions ont lieu devant cet hôtel et c’est de là que Noircarmes et ses collègues du Conseil des Troubles assistent au spectacle. Par considération pour leurs familles, on enterre les deux Batenburg, d’Andelot et Cocq de Neringen derrière la chapelle des lépreux à Schaerbeek « dans une fosse sans tombeau, en une terre non sacrée ». Ceux qui se sont confessés reçoivent une sépulture au Coudenberg et les cadavres des autres sont attachés à des potences dressées sur la hauteur de Schaerbeek « jusques à ce qu’ils furent tout consumés » [7].
Une lame de fond politique
23Par assimilation de la dissidence religieuse au crime de lèse-majesté, le Conseil des Troubles est rendu compétent pour les persécutions religieuses. Mais sa répression ne se limite pas là. L’aspect politique est au moins aussi important, si pas plus. Dans les Pays-Bas, le roi Philippe II est l’héritier des ducs de Bourgogne. Philippe le Bon, le plus grand de ces ducs, a créé en 1430 l’Ordre de la Toison d’Or. Avec lui, les idéaux de chevalerie et de courtoisie ont atteint leur apogée et en même temps leur aboutissement. Des tournois grandioses illustrent le pouvoir du duc et de son entourage. Les chevaliers de la Toison d’or constituent une élite noble et fermée qui monopolise le pouvoir. Dans leur discours officiel, ils flirtent encore avec les idéaux des croisés. En réalité, ils constituent le premier ordre de mérite au sens moderne du terme, regroupé autour d’une maison princière. Les troupes qu’ils dirigent disposent de l’artillerie la plus puissante de leur époque. Ils sont déjà trop modernes pour être encore des vassaux médiévaux, mais encore trop médiévaux pour être déjà des courtisans modernes [8].
24Ce qui était en avance sur son temps en 1430, constitue un frein pour les nouveaux développements de la deuxième moitié du XVIe siècle. La haute noblesse réunie dans l’Ordre de la Toison d’Or considère le souverain comme un primus inter pares qui doit exercer son pouvoir en concertation permanente avec elle. Philippe II et son entourage s’inspirent de l’idéologie absolutiste que les humanistes ont redécouverte dans l’histoire des empereurs romains. Et il y a plus. La noblesse est une caste militaire héréditaire. La société européenne devient de plus en plus complexe et le profil de cette ancienne noblesse d’épée ne suffit plus pour en assurer la direction tout seul. Un nouveau type de dirigeants se manifeste. Ce sont des gens qui ont une formation universitaire et qu’on appellera par la suite la noblesse de robe d’après leur toge universitaire. Ils n’héritent pas de leur position, ils sont nommés par le prince et peuvent donc être destitués par lui. Par conséquent, ils entretiennent avec lui un lien de fidélité et d’obéissance tout autre que la noblesse ancienne. Si Philippe II veut se maintenir dans les Pays-Bas, il doit casser les privilèges de la haute noblesse et ce choc entre pouvoir ancien et moderne atteint une phase nouvelle avec la répression dont est chargé le duc d’Albe.
Les préalables
25Quand Philippe II quitte les Pays-Bas en 1559, il installe sa demi-sœur Marguerite de Parme comme gouvernante-générale. Antoine Perrenot de Granvelle, évêque d’Arras, devient le principal conseiller de Marguerite et l’homme de confiance du roi à Bruxelles [9]. Les Granvelle sont un exemple type des nouveaux dirigeants qui apparaissent et gagnent en importance au fil du XVIe siècle. Nicolas Perrenot, le père d’Antoine, était déjà le conseiller principal de Marguerite de Savoie, la tante de Charles Quint. Anobli en 1518 quand il entre dans le parlement de Franche-Comté, sa région d’origine, il achète en 1527 la seigneurie de Granvelle et ajoute ce nom au sien. En 1530, année du décès de Marguerite de Savoie et du chancelier Gattinara, le titre de ce dernier disparaît mais ses compétences sont réparties entre son protégé Nicolas et le grand commandeur de Leon, Los Cobos.
26La haute noblesse ne manque pas de faire allusion aux origines des Granvelle, dont un ancêtre était forgeron à Besançon. Mais ils n’arrivent pas à bloquer l’ascension de la famille. La carrière d’Antoine, fils aîné de Nicolas, est encore plus fulgurante. Il embrasse la carrière ecclésiastique, mais est préparé pour succéder à son père comme ministre. En 1538, après le décès d’Eustache de Croij, évêque d’Arras, Antoine est désigné comme son successeur. Il est sacré en 1542 à Valladolid en Vieille Castille, lors d’un des séjours de Charles Quint dans la péninsule ibérique. Il ne fait son entrée à Arras qu’en 1545. Mais monsieur d’Arras comme on l’appelle consacre son énergie quasi exclusivement à sa tâche de collaborateur, puis successeur de son père.
27En 1561, Antoine devient cardinal et fait son entrée solennelle comme premier archevêque de Malines. Dorénavant, on l’appelle le cardinal de Granvelle. Les Habsbourg ont négocié avec la papauté une réorganisation des évêchés devenus plus petits et plus nombreux, avec des frontières correspondant aux frontières politiques. Un nouvel archevêché avec siège à Malines couronne la nouvelle structure qui doit permettre aux nouveaux évêques de mieux contrôler leurs diocèses et de combattre plus efficacement les hérésies. Pour financer cette réforme coûteuse, il est décidé de donner en commende aux évêques des abbayes importantes situées sur leurs territoires respectifs. Les évêques qui touchent des revenus d’abbé commanditaire ne peuvent revendiquer un deuxième revenu en tant qu’évêque.
28Ainsi Granvelle, le nouvel archevêque de Malines, devient abbé commendataire de la grande abbaye brabançonne d’Affligem. Ce n’est qu’en 1569 que son vicaire général, Maximilien Morillon, prend officiellement possession de l’abbaye en son nom. Mais cet arrangement religieux a aussi des conséquences politiques. En tant qu’abbé d’Affligem, le cardinal a le droit de siéger aux côtés de la gouvernante aux États de Brabant.
29La haute noblesse prend très mal cette évolution. Après la tante et la sœur de Charles Quint, c’est sa fille bâtarde qui se voit confier la responsabilité de gouverneur général. Rien ne permet de freiner l’ascension des Granvelle, ces descendants d’un forgeron de Besançon. Au contraire, la position politique du cardinal de Granvelle se voit considérablement renforcée par les réformes ecclésiastiques.
Des nobles pas contents du tout
30Le 5 avril 1561, Philippe II désigne Granvelle comme archevêque de Malines et le 23 juillet, le prince d’Orange et le comte d’Egmont adressent une première lettre de protestation au roi contre le pouvoir à leur avis exorbitant du cardinal [10]. Fin de l’année, les grands nobles boudent ostensiblement l’installation de Granvelle à Malines. Au début de 1562, ils constituent une ligue dirigée par le prince d’Orange et les comtes d’Egmont et de Hornes [11].
31Au cours de la même année, les grands nobles se réunissent d’abord sans la gouvernante à Breda et décident ensuite avec elle d’envoyer le baron de Montigny, frère du comte de Hornes, en ambassade à Madrid. L’échec de cette démarche ne fait qu’envenimer les choses [12].
32En 1563, la grande histoire publique a rendez-vous avec la petite histoire privée. La gouvernante, Marguerite de Parme, est une fille bâtarde de Charles Quint. Elle est mariée à Ottavio Farnèse, duc de Parme, fils d’un bâtard du pape Paul III. Leur fils Alexandre a donc une ascendance doublement bâtarde, une fois impériale et une fois papale. Le grand souci de ses parents est de lui trouver une partenaire de qualité. Dans un premier temps, Philippe II charge le cardinal de la négociation d’un projet de mariage avec une fille de la branche autrichienne des Habsbourg. Mais le projet n’aboutit pas et la gouvernante perd sa confiance en Granvelle. De plus en plus, elle est tentée de céder aux pressions des grands nobles.
33Le 11 mars 1563, le prince d’Orange et les comtes d’Egmont et de Hornes [13] adressent une deuxième lettre de protestation au roi. Celui-ci répète son refus de toucher aux prérogatives de Granvelle, mais invite un représentant des nobles en ambassade à Madrid [14]. Le comte d’Egmont veut répondre à cette invitation, mais les autres grands nobles refusent et décident d’un boycott du Conseil d’État, une arme à laquelle ils ont déjà fait appel. Après une nouvelle pétition des nobles à la gouvernante et une troisième lettre au roi, Marguerite décide d’envoyer son secrétaire Armenteros à Madrid pour plaider contre le cardinal. Quand Philippe II tarde à répondre aux nobles, la tension monte [15]. Finalement, le roi fait parvenir deux lettres à la gouvernante à l’intention du comte d’Egmont. Une qui l’invite à Madrid, une autre qui prône que ce voyage n’est pas opportun dans les circonstances données. À elle de trancher… Début 1564, le roi renvoie Granvelle à Besançon, prétextant la maladie de sa mère. Armenteros retourne à Bruxelles avec des instructions sans concessions à l’intention de Marguerite. Une visite royale aux Pays-Bas est envisagée, mais pas immédiatement [16].
34Marguerite décide de déconseiller le voyage du comte d’Egmont ; un nouveau courrier royal ordonne aux nobles de revenir au Conseil d’État et le 13 mars 1564, Granvelle quitte Bruxelles. C’est le triomphe des grands nobles qui subordonnent le Conseil Privé et le Conseil des Finances au Conseil d’État où ils retournent [17]. Fin 1564, il est enfin décidé que le comte d’Egmont fera le voyage de Madrid [18].
35Début 1565, Egmont part à Madrid [19] où il défend feu et flamme les intérêts des grands nobles et demande d’atténuer la persécution religieuse. Philippe II le reçoit et lui donne l’impression de l’écouter, du moins sur l’aspect politique de ses demandes. Dès le mois d’avril, Egmont retourne à Bruxelles avec dans ses bagages le fils de Marguerite de Parme, Alexandre Farnèse. Ce jeune prince est éduqué par son oncle à Madrid. En fait, il y est pris en otage pour garantir la fidélité de ses parents au roi. Pour son mariage, il doit regagner la résidence de sa mère, Bruxelles.
Un banquet princier très politique
36En effet, les négociations au sujet du mariage d’Alexandre Farnèse ont enfin abouti. Marie de Portugal, une princesse de la maison d’Aviz, fera bien l’affaire. Fin 1565, plein de beau monde se retrouve au palais de Bruxelles, chez la gouvernante Marguerite : son fils venant de Madrid, son mari d’Italie, sa future belle-fille de Lisbonne … et l’ensemble des élites nobles venant de partout dans les Pays-Bas bourguignons. Belle illustration du carrefour politique européen que Bruxelles est à cette époque. Les festivités se prolongent de novembre 1565 à janvier 1566 et elles ont des conséquences inattendues. Les nobles, frustrés par leur perte d’influence et mécontents de la politique religieuse rigoureuse, profitent des festivités qui les réunissent pour se concerter. Au mois d’avril de l’année suivante, un manifeste politique, le fameux Compromis des Nobles, est présenté à la gouvernante. S’en suit le tout aussi fameux Banquet des Gueux.
37Les grands nobles ne participent ni au Compromis, ni au Banquet. Mais ils rejoignent les contestataires pour leur dire que tout s’arrangera suite à l’ambassade d’Egmont à Madrid. C’est là que le comte d’Egmont se trompe lourdement. Il s’imagine qu’il a convaincu ses interlocuteurs à Madrid, mais le roi Philippe II a décidé définitivement de casser la puissance de la vieille noblesse des Pays-Bas. Son meilleur lieutenant, le duc d’Albe, reçoit l’ordre de diriger les tercio’s espagnols de Naples à Bruxelles. En août 1567, d’Albe fait son entrée à Bruxelles pour y mettre de l’ordre. Le prince d’Orange s’enfuit, les comtes d’Egmont et de Hornes sont arrêtés et la gouvernante Marguerite de Parme démissionne. Le 5 juin 1568, les comtes d’Egmont et de Hornes sont décapités sur la Grand-Place de Bruxelles.
Un procès très politique
38Si le duc d’Albe est redouté dans la mémoire collective de nos régions pour ses persécutions religieuses, il ne s’agit là que d’un aspect de son intervention dans les anciens Pays-Bas. Philippe II l’a chargé aussi d’un règlement de comptes éminemment politique envers les grands nobles. L’acte d’accusation principal que le procureur général, maître Jean du Bois, a dressé contre le comte d’Egmont illustre bien ce fait. Voyons ce que le procureur reproche concrètement au comte [20].
39L’acte comprend quatre-vingt-trois points. Aucun ne parle de convictions ou de pratiques hérétiques puisque le comte était irréprochable de ce point de vue.
40Le premier point rappelle la position privilégiée du comte « favorisé et décoré des plus grands honneurs que soit à la cour et province du souverain » ainsi que les responsabilités importantes qui lui sont confiées « chevalier de l’ordre de la Toison d’or, étant du Conseil d’Etat de Sa dite Majesté, aussi capitaine dudit château de Gand et gouverneur et capitaine général de Sa dite Majesté ès pays de Flandres et Artois, et capitaine d’une bande d’hommes d’armes des ordonnances, pour lesquels états et chacun d’eux il a presté le serment de bien y verser et faire ce que y conviendrait ». Par conséquent le comte est, plus que quiconque « par droit divin et humain tenu d’être fidèle et loyal à son prince souverain, de lui donner aide de paroles et de fait où l’occasion se présente », ce qu’il a négligé de faire en commettant « les fautes, crimes et délits tant grands et détestables ci-après contre lui décrits ».
41Le deuxième point accuse le comte, ainsi que « le prince d’Orange, les comtes de Hornes, de Hoogstraten, Louis de Nassau, feu le marquis de Berghes, les seigneurs de Montigny, Brederode et quelques autres » d’avoir voulu « déjeter le propre roi et prince de ces Pays-Bas » pour « s’en saisir, et après les départir entre eux ».
42Les neuf points suivants (de 3 à 11) parlent de la façon dont les grands nobles se sont débarrassés d’un adversaire sans préciser le nom de l’intéressé. Il leur est reproché qu’il « leur a semblé convenir de faire sortir et exterminer des Pays-Bas un principal personnage du Conseil d’État de Sa Majesté, lequel savait fort bien entendre et recueillir les menées et pratiques desdits seigneurs » ;
43ils ont refusé de fournir des preuves concrètes contre « ledit personnage » alors que celui-ci « avait toujours fait tous bons offices au gré et contentement de Sa Majesté, repos et tranquillité de ses dits pays, comme est notoire » ;
44« ils ont d’ailleurs en maintes manières fait plusieurs démonstrations de mauvaise volonté contre ledit personnage, pour le faire retirer desdits pays », accusation que le procureur illustre avec la décision des nobles de faire porter des livrées décorées de têtes de fou, ensuite de flèches par leurs serviteurs, provocations dont tout le monde comprenait qui était visé ;
45« devant leurs menaces, le roi « pour ne perdre le fruit du bon et fidèle service dudit personnage, le fit retirer en Bourgogne » ;
46toutes ces « inventions et actions » étaient « dressées et mises dessus plus contre le Roy, que contre ledit personnage » ;
47après l’éviction de celui qui les gênait tant, les nobles n’ont pas rétabli l’ordre comme ils avaient promis, tout au contraire, ils n’ont fait que semer le désordre ;
48ils ont proposé de soumettre le Conseil des Finances au Conseil d’État « afin qu’ils eussent la main aux deniers… » ;
49ils ont proposé la même chose pour le Conseil Privé ;
50leur but étant que leur pouvoir « se trouva grand, et celui du Roy diminué, pour plus assurément mener à fin leur dite conspiration faite contre Sa Majesté ».
51Même si son nom n’est pas cité, il est évident qu’il s’agit du cardinal de Granvelle. L’acte d’accusation commence donc par la confrontation entre les grands nobles et le cardinal, parce que c’est l’enjeu principal d’un conflit qui est politique plus que religieux. En effet, le roi identifie son sort avec celui de son fidèle collaborateur (« toutes ces inventions et actions dressées et mises dessus plus contre le Roy, que contre ledit personnage »).
52Les douze points suivants (de 12 à 23) parlent du Compromis des Nobles. Au mois de mars 1565, les grands nobles se sont réunis à Breda et ensuite à Hoogstraten. « Le seigneur de Brederode et plusieurs autres seigneurs confédérés » y sont venus leur communiquer le projet de « compromis des nobles … chose tant pernicieuse, et dont sont venus les inconvénients, maux, ruines, et destructions que chacun sait » ; à cette occasion, Orange, Egmont et Hornes ont accepté l’appui des nobles confédérés. Pour le procureur, par l’initiative de Brederode et de ses partisans, « l’honneur et service de Dieu a été grandement offensé, et s’y trouve le Roi en plusieurs points et articles trop atrocement injurié … ce sont des propos infâmes et indignes d’être pensés, et encore plus d’être dits, écrits ou soussignés par un sujet contre son souverain … de proposer par jurement que l’inquisition contient en soi tyrannie surpassant toute barbarie ».
53Voilà enfin, au point 13 de l’accusation, la première référence explicite à la religion et plus particulièrement à l’inquisition. Elle ne concerne pas Egmont et les grands nobles, mais Brederode et ses partisans. Et si « l’honneur et service de Dieu a été grandement offensé », le Roi de son côté est « trop atrocement injurié ». Le compromis contient « conspiration et ligue de rébellion contre Sa Majesté, prince souverain de ceux ayant fait ladite ligue et signé ledit compromis ». Le procureur constate aussi que les confédérés ont mobilisé vingt ou trente mille hommes et qu’Egmont et d’autres étaient au courant de ce fait.
54Parmi les signataires du compromis se trouvent trois serviteurs d’Egmont : Bekkerzeel, Leefdaal et Maximilien de Blois, dit Le Cocq. Averti par Bekkerzeel de la venue des confédérés à Bruxelles le 5 avril 1566, Egmont n’a informé ni le roi, ni la gouvernante, omission que le procureur qualifie de crime de lèse-majesté. À partir d’ici, cette notion devient récurrente dans l’acte d’accusation puisque c’est elle qui motive le refus de respecter les privilèges que revendique le comte en tant que chevalier de la Toison d’Or.
55Egmont a retenu à son service Bekkerzeel et lui a confié plusieurs missions, ce qui démontre « que avec une connivence ledit défendeur approuvait lesdites requête et compromis ». La notion de connivence est essentielle pour prouver la culpabilité d’Egmont et devient aussi récurrente que celle de crime de lèse-majesté. Si le comte n’a pas participé au compromis des Nobles, aux prêches des « sectaires » ou au mouvement iconoclaste, il était au courant et il a laissé faire.
56Egmont est accusé d’avoir intimidé la gouvernante. Orange, Egmont et Hornes auraient menacé de quitter Bruxelles « pour délaisser Son Altesse destituée d’aide, du conseil et secours, dont leur devoir la pouvait et devait assurer contre l’audace, témérité, conspiration et rébellion desdits confédérés, et de leurs complices et adhérents ». Le 5 avril, le jour de la présentation de la requête, Egmont refusa d’organiser la résistance aux confédérés et de leur fermer les portes de Bruxelles. Le 10 avril, il visite avec le prince d’Orange et le comte de Hornes la maison du comte de Culembourg. Encore un crime de lèse-majesté, puisque ce crime « se commet non-seulement par actes et faits, mais aussi par connivence, et tombe au même crime, qui boit et converse avec ennemis ou conspirateurs contre le prince, tels qu’étaient lesdits confédérés ».
57Les onze points suivants (24 à 34) évoquent les assemblées des confédérés à Saint-Trond (juin 1566) et à Duffel (juillet 1566). Egmont permit à Bekkerzeel d’aller à Saint-Trond et d’assurer les confédérés en son nom ; Orange, Egmont et Hornes étaient présents à Duffel et y « prirent et reçurent en leur protection et sauvegarde les confédérés, consistoriaux et marchands » ce qui « est droit régalien et de souveraineté qui n’appartient pas à ceux qui sont sujets au souverain ». Puisque « la sauvegarde a été octroyée à conspirateurs et rebelles contre Sa Majesté », il s’agit d’un crime de lèse-majesté de plus, suivi de deux autres : ils n’ont « averti Sa Majesté ni son Altesse » et ils ont promis aux confédérés que « moleste ni recherche ne leur serait faite … pour le fait de la religion », ainsi ils assumaient et usurpaient l’autorité du souverain ».
58Deux points (35-36) rappellent le refus du comte de « par force résister auxdits sectaires et gens de telle farine » ainsi que son refus de « prester nouveau serment de fidélité » ; il a fait dresser par Bekkerzeel une requête afin d’obtenir pardon pour les consistoriaux d’Oudenaarde, Pamel et Renaix (37). Il a qualifié les placards de « fort rigoureux » alors qu’il n’en connaissait pas le contenu (38). Il était au courant des contacts des « confédérés et consistoriaux » avec des Allemands et des Français, et « il ne donna de ce avertissement », encore un crime de lèse-majesté (39). Il a toléré que ses serviteurs Leefdaal et Maximilien de Blois soient « desdits confédérés et sectaires » (40-41).
59Viennent ensuite les accusations de laxisme à égard des « consistoriaux » et donc de connivence avec eux à Ypres (42 à 47). Le mot laxisme ne figure pas comme tel dans le texte. Il s’agit notamment d’une interprétation extensive de l’autorisation de prêcher, du refus d’assister les autorités qui veulent s’opposer aux « sectaires », de tolérer que « ceux de la nouvelle religion fissent le baptême à leur mode » …
60En janvier 1566, Orange, Hornes, Hoogstraten et Egmont se trouvent à Termonde (48-49), où est décidé « de lever gens de guerre et prendre les armes si le roi voulait venir avec armes en ses Pays-Bas ». Egmont n’a donné aucun avertissement de cette conspiration et au lieu de la contrarier, il y a consenti. Encore un crime de lèse-majesté.
61Deux points (50-51) concernent le projet de réunir les États-Généraux pour les faire statuer sur la question religieuse alors que « par telle étrange et oblique pratique les vassaux et sujets donneraient loi à leur souverain ». De cette façon Orange, Hornes et Egmont ainsi que les « confédérés et adhérents d’iceux emporteraient l’effet de leurs désirs, savoir, l’entière abolition desdites inquisition et placards et usurpation des principauté et souveraineté de Sa Majesté es dits Pays-Bas, même serait permis à un chacun quant au fait de la religion, de impunément et comme lui plairait vivre sans bride de loi ni de raison, ce que lesdits confédérés abusivement appellent vivre en liberté de conscience ».
62Les points 53 à 59 concernent le laxisme d’Egmont à Gand. Par son comportement, il « n’a pas seulement usé de connivence à l’endroit des sectaires et confédérés, mais a directement contrevenu à ses dits serments et auxdites lettres de Son Altesse, voire à l’accord d’icelle fait avec les confédérés et en sa présence, par où tel exercice ne se trouve permis ».
63Suivent les accusations de laxisme à Oudenaarde (60-64), Deinze (65-67), Bailleul (68), Bergues-Saint-Winoc (69-70), dans le Veurne‑Ambacht (71-72) et dans la châtellenie de Courtrai (73).
64Les papiers trouvés chez Bekkerzeel sont évoqués comme preuve à charge d’Egmont (74). Le comte a menacé de quitter les Pays-Bas si l’inquisition est introduite (75). Il a refusé de persécuter les « sectaires d’Armentières … ville à lui en justice … » et leur a permis d’ériger un temple ; ainsi « il a fait comme le berger qui jette ses ouailles à la gorge du loup » (76-80). Il a incité et soutenu le seigneur de Brederode dans sa lutte contre l’inquisition (81).
65L’accusation conclut que le procureur est « suffisamment informé de tous lesquels crimes et délits » et que le défendeur « a commis crime de lèse-majesté », qu’il doit être « privé de tous lesdits états, offices et honneurs », qu’il doit être condamné « au dernier supplice » et que tous ses biens doivent être « confisqués, et par droit de confiscation appartenir à Sa Majesté » (82-83).
66En ce qui concerne le XVIe siècle, on peut conclure que les grands nobles tels que Egmont et Hornes représentent une contestation conservatrice. Ils défendent avant tout leurs propres privilèges hérités du passé contre un système politique nouveau qui tend vers l’absolutisme. Mais dans leur contestation, ils s’opposent aussi à la persécution religieuse, ce qui permettra par la suite de les considérer comme des défenseurs de la liberté de conscience et d’expression et du refus du recours à la violence dans les questions religieuses.
Comment le XVIIIe siècle réinvente le XVIe siècle
67Déjà en 1595, dans le chapitre sept du premier livre de ses essais « Que l’intention juge nos actions », Michel de Montaigne évoque Egmont et Hornes. En attaquant le roi d’Angleterre Henri VII, il oppose le comportement de celui-ci à l’attitude exemplaire du comte d’Egmont : « Dernièrement, en cette tragédie, que le duc d’Albe nous fit voir à Bruxelles concernant les comtes de Horne et d’Egmont, il y eut plein de choses remarquables, et entre autres que le comte d’Egmont, sous la foi et l’assurance duquel le comte de Horne était venu se rendre au duc d’Albe, requit avec grande instance qu’on le fit mourir le premier, afin que la mort l’affranchisse de la promesse qu’il avait fait au comte de Horne. Il semble que la mort n’ait pas déchargé le premier de sa foi donnée, et que le second en aurait été quitte, même sans mourir »... « Ainsi le comte d’Egmont, tenant en son âme et sa volonté liées à sa promesse, bien que la possibilité de la tenir ne fût pas entre ses mains, était sans doute absous de son devoir, quand il eut survécu au comte de Horne ».
68Mais c’est au siècle des lumières qu’Egmont deviendra le héros qu’il n’a jamais été de son vivant [21]. Dans le huitième chant de l’Henriade (1723), Voltaire décrit l’aide que le fils de Lamoral d’Egmont apporte en 1590 aux ligueurs dans leur lutte contre Henri IV. Parlant du père, Voltaire dit que lui « qu’aveugla l’amour de la patrie, mourut sur l’échafaud pour soutenir les droits des malheureux Flamands opprimés par leurs Rois ». Quand on évoque ce père, le fils répond : « Ne parlez pas de lui, il méritait la mort, c’était un rebelle ». Voltaire commente : « Paroles d’autant plus condamnables, que c’était à des rebelles qu’il parlait, et dont il venait défendre la cause ».
69Dans le chapitre CLXIV « Fondation de la république des Provinces-Unies » de son Essai sur les mœurs et l’esprit des nations, Voltaire dit au sujet du Conseil des Troubles : « Le nouveau tribunal établi à Bruxelles jeta les peuples dans le désespoir. Les comtes d’Egmont et de Horn, avec dix-huit gentilhommes, ont la tête tranchée ; leur sang fut le premier ciment de la république des Provinces-Unies ».
70Dans la transition du classicisme au romantisme, les grands auteurs allemands Friedrich Schiller et Johann Wolfgang Goethe continuent la réinvention d’Egmont entamée par Voltaire. De 1775 à 1787, Goethe travaille – par intervalles – à sa tragédie « Egmont ». Il avoue lui-même dans ses mémoires « … je dus transformer le caractère de mon héros et lui attribuer des qualités qui conviennent mieux à un jeune homme qu’à un homme d’âge mûr, à un célibataire qu’à un père de famille, à un personnage indépendant qu’à celui qui, avec le plus grand amour de la liberté, est entravé par les multiples nécessités de sa situation ». Pour Goethe le mouvement national, la lutte contre le despotisme et pour la liberté ainsi que le héros qui défend les intérêts du peuple deviennent moins importants. Le caractère du héros, le conflit existentiel qu’il vit et qui détermine son attitude tragique, voilà ce qui intéresse Goethe avant tout.
71Schiller ne partage pas du tout l’approche de son ami Goethe. Pour lui, Egmont est une figure dramatique par son âge adulte et par ses responsabilités envers sa famille nombreuse. En le rendant jeune, insoucieux et avide de plaisir, Goethe lui enlève ses traits les plus nobles. En 1788, Schiller publie sa « Geschichte des Abfalls der Vereinigten Niederlande » [22]. Pour lui, un des événements les plus remarquables de l’histoire du monde est la victoire sur la violence des princes et sur le despotisme au XVIe siècle. Egmont est le héros par excellence. Meilleur soldat mais moins bon politicien qu’Orange, son seul point faible est sa naïveté et sa confiance illimitée. Contrairement à Goethe, Schiller reprend et renforce ainsi la lecture de Voltaire.
72Bien que Goethe défende son approche, il accepte qu’en 1796 Schiller retravaille sa tragédie avec August Wilhelm Iffland, son acteur préféré. C’est donc Schiller qui a le dernier mot [23].
73En 1809-1810, Ludwig van Beethoven compose son opus 84, une musique de scène constituée d’une ouverture et de neuf parties pour soprano, récitant et grand orchestre, destinée à la pièce de Goethe. L’ouverture devient une des compositions les plus connues de Beethoven. Ainsi s’achève la création d’un Egmont légendaire qui partage avec son modèle historique son opposition à la persécution religieuse. La différence, c’est que l’Egmont du XVIe siècle défend ses privilèges hérités du passé, alors que celui du XVIIIe siècle devient un symbole de la lutte contre l’Ancien Régime. Si le premier combat un absolutisme qui se pointe, le deuxième combat un absolutisme qui vit ses derniers jours.
Egmont et Bruxelles
74Au XIXe siècle, l’Académie royale de Belgique redécouvre les comtes d’Egmont et de Hornes dans sa quête de héros nationaux pour la nouvelle patrie en manque de références historiques. En 1859, l’Académie propose au gouvernement de statufier les deux comtes sur la Grand-Place de Bruxelles où ils ont été décapités. Le gouvernement qui est libéral ne se soucie pas trop du fait que les comtes sont victimes d’un régime très catholique et adhère à cette proposition qu’il adresse aux autorités communales.
75Et là, les problèmes commencent… Le bourgmestre de Brouckère est un libéral politique, précurseur des radicaux. Il n’aime pas les deux comtes. Selon lui, d’autres nobles ont été beaucoup plus inébranlables dans l’opposition des Pays-Bas au roi Philippe II. Ils méritent donc bien plus une statue. Mais un petit néophyte appelé Jules Anspach siège également au collège des échevins. C’est un libéral économique, doctrinaire. Il apprécie les deux comtes précisément pour leur modération. Le conseil communal suit son avis et donne tort au bourgmestre de Brouckère meurt en 1860. En 1864, quand la statue d’Egmont et de Hornes est inaugurée sur la Grand-Place devant la Maison du Roi, Anspach est le bourgmestre en fonction. Il insiste dans son discours de circonstance sur l’importance de tels monuments. Tout le monde n’a pas accès à la littérature historique, mais le peuple a besoin de symboles pour alimenter son amour de la liberté et de la patrie. C’est la raison d’être de ces statues.
76Entre-temps, la conviction qu’il est possible de rendre à la Grand‑Place son lustre d’antan, gagne du terrain. La Maison du Roi est reconstruite et la statue des comtes qui se trouve devant le bâtiment encombre la vue. En 1879, elle est transférée vers le Petit Sablon, devant le palais d’Egmont. Quatre ans plus tard, Charles Buls, un libéral très radical, devient bourgmestre. Pour lui, les deux comtes ne racontent qu’une partie de l’histoire de l’opposition à Philippe II. Les puissants de l’époque, les Habsbourg et leurs partisans fidèles, ne méritent pas d’être honorés. Mais d’autres méritent bien une statue.
77Autour d’Egmont et de Hornes, on installe dix héros nationaux qui ont ouvert la voie à la modernité. Parmi eux, les insurgés Guillaume d’Orange, Henri de Bréderode et Philippe de Marnix de Sainte-Aldegonde. À peine soixante ans après la rupture avec les Pays‑Bas, des statues sont élevées à Bruxelles pour honorer leur combativité dans les Pays-Bas du XVIe siècle. Reçoivent également une statue, les architectes Louis Van Bodeghem et Corneille De Vriendt dit Floris, le peintre Bernard Van Orley, le botaniste Rombaud Dodonée, les cartographes Gérard Mercator et Abraham Ortelius, et enfin Jean de Locquenghien, le bourgmestre qui est le père spirituel du canal de Willebroek. Une galerie de dirigeants politiques, d’artistes et d’hommes de science témoigne d’une humanité qui n’attend pas Dieu, mais qui prend son sort en mains.
78Le square est inauguré en 1890. Dans son discours de circonstance, le bourgmestre Buls fait la part des choses : « Le peuple se soucie peu de la sèche vérité historique ; il va chercher ses héros préférés parmi les figures les plus sympathiques de son histoire, les place au premier rang, parce que leurs malheurs en font la personnification de ses propres souffrances, puis il demande à la poésie et à la légende de leur donner l’auréole que l’impartiale histoire pourrait leur marchander. Nous avons donc pu ranger autour d’Egmont et de Hornes, symboles de notre protestation contre la sanglante répression du patriotisme, les héros qui furent les véritables acteurs de la sombre tragédie de notre XVIe siècle. C’est Guillaume d’Orange, « la tête et le bras » ; c’est Marnix de Sainte‑Aldegonde « l’âme et l’idée », de ce combat de géants ».
Conclusion
79Le but de ce modeste essai était de contester suffisamment la contestation pour mériter une place dans un numéro à thème des Cahiers Bruxellois consacré à la contestation. Espérons que ce but soit atteint. La perspective historique permet de nuancer bien des choses, aussi dans le domaine de la compréhension des mouvements contestataires.
Notes
-
[1]
Alphonse L.E. VERHEYDEN, Vilvoorde, internationaal repressiecentrum en brandpunt van het zestiendeeuws protestantisme, Vilvoorde, 1972.
-
[2]
Alphonse L.E. VERHEYDEN, Le Conseil des Troubles. Liste des condamnés (1567-1573), Bruxelles, 1961. Alphonse L.E. VERHEYDEN, Le Conseil des Troubles, traduit du néerlandais par Urbain Dewaele, dans Collection Histoire du Protestantisme en Belgique et au Congo Belge, tome 11, Flavion-Florennes, 1981.
-
[3]
Paulo CHARRUADAS, Stéphane DEMETER, Michel DE WAHA, Vincent HEYMANS et Philippe SOSNOWSKA, « Cepi incendioque delevi… Enjeux politiques et réalité matérielle des destructions architecturales intentionnelles en Brabant méridional (XIIe-XVIIe siècles) », dans David ENGELS, Didier MARTENS et Alexis WILKIN (dir.), La destruction dans l’histoire, Pratiques et discours, Bruxelles, 2013, p.185-213.
-
[4]
Louis Prosper GACHARD, Correspondance de Philippe II sur les affaires des Pays-Bas [1558-1577] publiée d’après les originaux conservés dans les archives royales de Simancas, Librairie ancienne et moderne, 1848, p.533 : Lettre de la duchesse de Parme au Roi, écrite d’Anvers, le 8 mai 1567 : avertie par le comte d’Arenberg dans une lettre, écrite de Harlingen, le 5 mai 1567, elle annonce la prise de 120 hommes ; elle a donné l’ordre au comte d’Arenberg de faire faire le procès aux deux frères de Battembourg et aux deux gentilhommes frisons (il y en avait trois : Suert Beyma, Herman Van Galama et Guillaume de Bouwema) et d’envoyer à Vilvorde Andelot, Wingle et Maximilien de Blois, dit Cock. Par la suite, les Battembourg sont envoyés également à Vilvorde.
-
[5]
A.J. VAN DER AA., Biographisch woordenboek der Nederlanden, Deel 1, 1852.
-
[6]
Michel BAELDE, De collaterale raden (1531-1578), dans Verhandelingen van de Koninklijke Academie voor Wetenschappen, Letteren en Schone Kunsten van België, Klasse der Letteren, Verhandeling nr 60, Bruxelles, 1965, p.310.
-
[7]
Guillaume Philidor VAN DEN BURGGRAAF, Collection des anciennes portes de Bruxelles, 1823, p.4-5.
-
[8]
Michel PASTOUREAU, “Histoire de l’Ordre de la Toison d’Or. Un nouvel ordre de chevalerie”, dans Pierre COCKSHAW, et Christiane VAN DEN BERGEN-PANTENS (réd.), L’ordre de la Toison d’or, de Philippe le Bon à Philippe le Beau (1430-1505) : idéal ou reflet d’une société ?, Bruxelles, 1996, p. 66; voir aussi : Wim BLOCKMANS et Walter PREVENIER, De Bourgondiërs, de Nederlanden op weg naar eenheid 1384-1530, Amsterdam, 2000.
-
[9]
Pour les Granvelle, voir : M. VAN DURME, Antoon Perrenot, bisschop van Atrecht, kardinaal van Granvelle, minister van Karel V en van Filips II {1517-1586), dans Verhandelingen van de Koninklijke Academie voor Wetenschappen, Letteren en Schone Kunsten van België, Klasse der Letteren, Verhandeling nr. 18, Bruxelles, 1953, et Krista DE JONGE et Gustaaf JANSSENS (réd.), « Les Granvelle et les anciens Pays-Bas », Liber doctori Mauricio van Durme dedictatus, Louvain, 2000.
-
[10]
Pour l’Egmont historique et pour le déroulement des événements des années 1560, un bon aperçu récent : Luc DE BOTH et Olivier VAN RODE, « Het bewogen leven van graaf Lamoraal van Egmond (1522-1568) » dans Zottegems Genootschap voor Geschiedenis en Oudheidkunde, Handelingen, XVIII, Zottegem, 2017(Themanummer Graaf Lamoraal van Egmond (1522-1568) deel 1).
-
[11]
Luc DE BOTH et Olivier VAN RODE, op.cit., p. 117.
-
[12]
Ibidem, p. 120, 124.
-
[13]
Ibidem, p. 128.
-
[14]
Ibidem, p. 132.
-
[15]
Ibidem, p. 147.
-
[16]
Ibidem, p. 149.
-
[17]
Ibidem, p. 153, 159.
-
[18]
Ibidem, p. 162.
-
[19]
Ibidem, p. 165.
-
[20]
M. De Bavay, procureur général, Le procès du comte d’Egmont, avec pièces justificatives, d’après les manuscrits originaux trouvés à Mons, Bruxelles, 1853, p. 93 : Pièces justificatives, Libel accusatoire du procureur général maître Jean du Bois, notifié au comte d’Egmont, le 11 janvier 1568.
-
[21]
Pour l’Egmont légendaire, voir : VAN NUFFEL Herman, « Lamoraal van Egmont in de Geschiedenis, Literatuur, Beeldende Kunst en Legende », dans Anciens Pays et Assemblées d’Etats, XLVI, 1968, et très recent : Rengenier RITTERSMA, « Mytho-poetics at Work: A Study of the Figure of Egmont, the Dutch Revolt and its Influence in Europe », dans Brill’s studies in intellectual history, Volume 266, 2018.
-
[22]
VAN NUFFEL, op.cit., p. 79.
-
[23]
Ibidem, p. 86.