L’histoire et l’ethnologie se complètent et dialoguent, écrit Raymond Jamous en guise de propos introductif à son ouvrage et ce sont les travaux des historiens du Maroc qui servent ici de « terrain de recherche ». Cet essai d’anthropologie historique propose d’analyser les raisons de la pérennisation de la dynastie alaouite régnante depuis plus de quatre siècles. En effet, quel est le secret de sa longévité ? Il y a là un véritable mystère politique dont l’auteur offre de lever le voile.
Son hypothèse est qu’il existe une reconnaissance mutuelle entre le pouvoir central, le « Makhzen », et les sociétés locales (le « local tribal », p. 14). L’auteur nuance l’opposition un temps paradigmatique entre le « Bled el-makhzen » (de l’arabe dialectal littéralement « pays, territoire soumis à l’autorité du sultan ») et le « Bled el-siba » (territoire qui ne reconnaît pas l’autorité du sultan, par extension : insoumis) que nombre d’anthropologues avaient revisité. Ainsi, déjà en 1979, Germain Ayache évoquait « un système stable de violence continue » (« La fonction d’arbitrage du makhzen », Bulletin économique et social du Maroc, 138, p. 6) et invitait également à nuancer le propos, en insistant non plus seulement sur la contrainte exercée par le Makhzen, mais aussi sur ses fonctions d’arbitrage.
Les sultans issus des tribus ne parviennent pas à s’inscrire dans la durée. C’est à cette histoire que la première partie de l’ouvrage, « Grandeur et déclin des premières dynasties marocaines », est consacrée…