Couverture de ARSS_148

Article de revue

Hiérarchie de la crédibilité et autonomie de la recherche

L'impensé des analyses des relations universités-entreprises

Pages 74 à 82

Notes

  • [1]
    Dans le cas de la France, on peut trouver un exemple récent de cette perspective dans L. Alary-Grall et F. Pijaudier-Cabot, « Pour une meilleure coopération recherche-industrie », in Cahiers Industries, 74, février 2002, p. 11-22.
  • [2]
    Voir, entre autres, S. Slaughter et L. Leslie, Academic Capitalism. Politics, Policies and the Entrepreneurial University, Baltimore, Johns Hopkins University Press, 1997, 276 p.
  • [3]
    L. Fiset, M.-P. Ippersiel, Y. Martineau et M. Trépanier, Institution du savoir et PME : développer des synergies. Synthèses des écrits et bilan des problèmes et besoins des intervenants québécois, Montréal, INRSUrbanisation, octobre 1999.
  • [4]
    J. Walton, « Making the Theoretical Case », in What is a Case ? Exploring the Foundations of Social Inquiry, C. C. Ragin et H. S. Becker (éds), Cambridge, Cambridge University Press, 1992, p. 121-138.
  • [5]
    Pierre Bourdieu, « La spécificité du champ scientifique et les conditions sociales du progrès de la raison », in Sociologie et sociétés, 7 (1), 1975, p. 91-118.
  • [6]
    H. S. Becker, Les Ficelles du métier. Comment conduire sa recherche en sciences sociales, Paris, La Découverte, 2002, p. 153.
  • [7]
    Ibid., p. 152-153.
  • [8]
    P. Bourdieu, « Méthode scientifique et hiérarchie sociale des objets », in Actes de la recherche en sciences sociales, 1, 1975, p. 5.
  • [9]
    H. Zuckerman, « Theory Choice and Problem Choice in Science », in Sociological Inquiry, 48 (3/4), 1978, p. 65-95.
  • [10]
    T. Gieryn, « Problem Choice and Problem Change in Science », in Sociological Inquiry, 48 (3/4), 1978, p. 96-115.
  • [11]
    J. M. Ziman, « The Problem of Problem Choice », in Minerva, 25 (1/2), 1988, p. 92-106.
  • [12]
    P. Bourdieu, Science de la science et réflexivité, Paris, Raisons d’agir, 2001, p. 95.
  • [13]
    Y. Gingras et R. Dalpé, « Recherche universitaire et priorités nationales : l’effet du financement public sur la recherche en énergie solaire au Canada », in Revue canadienne de l’enseignement supérieur, vol. 20, 2, 1990, p. 27-44 ; R. Dalpé et M.-P. Ippersiel, « Réseautage et relations avec l’industrie dans les nouveaux matériaux et l’optique », in Sociologie et sociétés, XXXII (1), 2000, p. 107-134 ; B. Godin, M. Trépanier et M. Albert, « Des organismes sous tension : les conseils subventionnaires et la politique scientifique », in Sociologie et sociétés, XXXII (1), 2000, p. 17-42.
  • [14]
    H. S. Becker, Les Ficelles du métier…, op. cit., p. 118.
  • [15]
    Ces cas peuvent porter sur des industries, des institutions et/ou des entreprises précises. Voir, entre autres, W. W. Powell, « Learning from Collaboration : Knowledge and Networks in the Biotechnology and Pharmaceutical Industries », in California Management Review, 40 (3), 1998, p. 228-240 ; L. E. Nimtz, W. C. Coscarelli et D. Blair, « University-Industry Partnerships : Meeting the Challenge with a High Tech Partner », in SRA Journal, 1995, p. 9-17 ; L. P. Randazzese, « Exploring University-Industry Technology Transfer of CAD Technology », in IEEE Transactions on Engineering Management, 43 (4), 1996, p. 393-401.
  • [16]
    Voir, entre autres, J. S. Faiweather, « The University’s Role in Economic Development : Lessons for Academic Leaders », in SRA Journal of the Society of Research Administrators, 1990, p. 5-11 ; E. Geisler, A. Furino et T. J. Kiresuk, « Toward a Conceptual Model of Cooperative Research : Patterns of Development and Success in University-Industry Alliances », in IEEE Transactions on Engineering Management, 38 (2), 1991, p. 136-145 ; R. V. Bloeden et D. Stokes, « Making University/Industry Collaborative Research Succeed », in Research Technology Management, 37 (2), 1994, p. 44-51.
  • [17]
    Voir, entre autres, E. Geisler et A. H. Rubenstein, « University-Industriy Relations : a Review of Major Issues », in Cooperative Research and Development : the Industry-University-Government Relationship, A. N. Link et G. Tassey (éds), Boston, Kluwer Academic Publishers, 1989, p. 43-62 ; H. Buchbinder et J. Newson, « Corporate-University Linkages in Canada : Transforming a Public Institution », in Higher Education, 20, 1990, p. 355-379 ; E. R. J. Bell, « Some Current Issues in Technology Transfer and Academic Industrial Relations : a Review », in Technology Analysis & Strategic Management, 5 (3), 1993, p. 307-321 ; F. Meyer-Krahmer et U. Schmoch, « Science-Based Technologies : University-Industry Interactions in Four Fields », in Research Policy, 26, 1998, p. 325-335.
  • [18]
    M. Luger et H. Goldstein, Technology in the Garden : Research Parks and Regional Economic Development, Chapel Hill, University of North Carolina Press, 1991, 242 p.
  • [19]
    Bien sûr, il est possible que des travaux étudiant des cas dans d’autres pays aient été publiés sans pour autant figurer dans les banques bibliographiques (Current Contents et ABI Inform) que nous avons utilisées. Ces deux bases de données ne recensent pas toutes les revues et elles conservent uniquement les travaux publiés en anglais. Cela dit, leur couverture est néanmoins très large et elles contiennent les revues qui dominent le domaine de recherche dont il est question ici. Aussi, si les travaux portant sur les relations entre les institutions de recherche et les entreprises ailleurs que dans les pays du « peloton de tête » ne figurent pas dans les banques de données que nous avons utilisées, il s’agit probablement d’un indice sûr de leur place relativement marginale dans la littérature et d’un effet de la hiérarchie de la crédibilité dont nous avons parlé plus haut.
  • [20]
    La littérature institutionnelle analysée provient surtout de l’OCDE et présente le plus souvent l’expérience de plusieurs pays, ce qui explique pourquoi nous l’avons écartée de ce comptage.
  • [21]
    N. H. Abramson et al., Technology Transfer Systems in the United States and Germany. Lessons and Perspectives, Washington (DC), National Academy Press, 1997, 425 p.
  • [22]
    E. S. Robert et D. E. Malone, « Policies and Structures for Spinning off New Companies from Research and Development Organizations », in R & D Management, 26 (1), 1996, p. 17-48 ; N. S. Argyres et J. P. Liebeskind, « Privatizing the Intellectual Commons : Universities and the Commercialization of Biotechnology », in Journal of Economic Behavior & Organization, 35 (4), 1998, p. 427-454 ; W. W. Powell et J. Owen-Smith, « Universities and the Market for Intellectual Property in the Life Sciences », in Journal of Policy Analysis and Management, 17 (2), 1998, p. 253-277.
  • [23]
    H. F. Moed, M. Luwell, J. A. Houben, E. Spruyt et H. Vandeberghe, « The Effects of Changes in the Funding Structure of the Flemish Universities on their Research Capacity, Productivity and Impact during the 1980’s and early 1990’s », in Scientometrics, 42 (3), 1998, p. 231-255.
  • [24]
    Y. Lee et R. Gaertner, « Translating Academic Research to Technological Innovation », in Y. Lee, Technology Transfer and Technology Policy, Westport (CN), Quorum Books, 1997, p. 110-124 ; L. Macbryde, « Commercialization of University Technology : a Case in Robotics », in Technovation, 17 (1), 1997, p. 39-46 ; F. Meyer-Krahmer et U. Schmoch, « Science-Based Technologies… », art. cit.
  • [25]
    Pour le Canada, voir Y. Gingras et B. Godin, « Impact of Collaboration on Academic Research », in Science and Public Policy, 27 (1), 2000, p. 65-73. Pour la France, voir le texte de Michel Grossetti et Béatrice Milard dans ce numéro.
  • [26]
    Les Petites et les Moyennes Entreprises : technologie et compétitivité, Paris, OCDE, 1993 ; Diffusing Technology to Industry : Government Policies and Programmes, Paris, OCDE, 1997.
  • [27]
    Les PME à forte croissance, P. A. Julien (éd.), Sainte-Foy, Presses de l’université du Québec, 2002. Voir aussi Y. Lee, « Technology Transfer and the Research University : a Search for Boundaries of University-Industry Collaboration », in Research Policy, 25 (6), 1996, p. 843-863.
  • [28]
    A. Arora et A. Gambardella, « Complementary and External Linkages : the Strategies of the Large Firms in Biotechnology », in Journal of Industrial Economics, XXXVIII (4), 1990, p. 361-379.
  • [29]
    I. Feller, « Universities as Engines of R & D-based Economic Growth : they think they can », in Research Policy, 19 (4), 1990, p. 335-348.
  • [30]
    H. Buchbinder et J. Newson, « Corporate-University Linkages in Canada… », art. cit. ; E. Geisler, A. Furino et T. J. Kiresuk, « Toward a Conceptual Model of Cooperative Research… », art. cit. ; R. V. Bloeden et D. Stokes, « Making University/Industry Collaborative Research Succeed », art. cit. ; G. Reid, « Improving University-Industry Relations », SRA Journal, 26 (1), 1994, p. 23 ; E. Mansfield et J. Y. Lee, « The Modern University : Contributor to Industrial Innovation and Recipient of Industrial R & D Support », in Research Policy, 25 (7), 1996, p. 1047-1058 ; R. M. Cyert et P. S. Goodman, « Creating Effective University-Industry Alliances : An Organizational Learning Perspective », in Organizational Dynamics, 25 (4), 1997, p. 45-57 ; J. B. Burnham, « Evaluating Industry/University Research Linkages », in Research Technology Management, 40 (1), 1997, p. 52-55 ; T. I. D. Campbell, « Public Policy for the 21st Century : Addressing Potential Conflicts in University-Industry Collaboration », in Review of Higher Education, 20 (4), 1997, p. 357 ; D. G. Rea, H. Brooks, R. M. Burger et R. Lascala, « The Semiconductor Industry – Model for Industry/University/Government Cooperation », in Research Technology Management, 40 (4), 1997, p. 46-54 ; S. Slaughter et L. Leslie, Academic Capitalism : Politics, Policies and the Entrepreneurial University, Baltimore-Londres, Johns Hopkins University Press, 1997, 280 p.
  • [31]
    E. Geisler et A. H. Rubenstein, « University-Industry Relations… », art. cit. ; R. J. W. Tijssen et J. C. Korevaar, « Unravelling the Cognitive and Interorganisational Structure of Public/Private R & D Networks : A Case Study of Catalysis Research in the Netherlands », in Research Policy, 25 (8), 1997, p. 1277-1293 ; E. Mansfield et J. Y. Lee, « The Modern University… », art. cit. ; J. B. Burnham, « Evaluating Industry/University Research Linkages », art. cit. ; F. Meyer-Krahmer et U. Schmoch, « Science-Based Technologies… », art. cit. ; H. Etzkowitz et C. Kemelgor, « The Role of Research Centres in the Collectivisation of Academic Science », in Minerva, 36 (3), 1998, p. 271-288 ; A. Webster, « Bridging Institutions : The Role of Contact Research Organizations in Technology Transfer », in Science and Public Policy, 21 (2), 1994, p. 89-97 ; W. L. Baldwin et A. N. Link, « Universities as Research Joint Venture Partners : Does Size of the Venture Matter ? », in International Journal of Technology Management, 15 (8), 1998, p. 895-913.
  • [32]
    B. Godin, M. Trépanier et M. Albert, « Des organismes sous tension… », art. cit.
  • [33]
    J. Senker et P. Senker, « Implications of Industrial Relationships for Universities : A Case Study of the UK Teaching Company Scheme », in Science and Public Policy, 24 (3), 1997, p. 173-182, et de TCD, Teaching Company Directorate (1991-1996), TCS Annual Reports 1991-1996, Farington, UK, TCD.
  • [34]
    F. Meyer-Krahmer et U. Schmoch, « Science-Based Technologies… », art. cit. ; Tijssen et Korevaar, « Unravelling the Cognitive… », art. cit.
  • [35]
    N. H. Abramson et al., Technology Transfer Systems, op. cit.
  • [36]
    L. Alary-Grall et F. Pijaudier-Cabot, « Pour une meilleure coopération recherche-industrie », art. cit.
  • [37]
    Entre autres, E. Geisler, A. Furino et T. J. Kiresuk, « Toward a Conceptual Model of Cooperative Research… », art. cit.
  • [38]
    R. V. Bloeden et D. Stokes, « Making University/Industry Collaborative Research Succeed », art. cit. ; E. R. J. Bell, « Some Current Issues in Technology Transfer… », art. cit.
  • [39]
    A. Bonaccori et A. Piccaluggo, « A Theoretical Framework for the Evaluation of University-Industry Relationship », in R & D Management, 24 (3), 1994, p. 229-248.
  • [40]
    C. C. Ragin, « Introduction : Cases of “What is a Case ?” », in C. C. Ragin et H. S. Becker (éds), What is a Case ? Exploring the Foundations of Social Inquiry, Cambridge, Cambridge University Press, 1992, p. 1-17.
  • [41]
    J. Walton, « Making the Theoretical Case », art. cit.
  • [42]
    J. Hamel, « The Case Study in Sociology : The Contribution of Methodological Research in French Language », in Canadian Review of Sociology and Anthropology, 30 (4), 1993, p. 498.
  • [43]
    R. Dalpé et M.-P. Ippersiel, « Réseautage et relations avec l’industrie… », art. cit. ; B. Godin, M. Trépanier et M. Albert, « Des organismes sous tension… », art. cit. ; S. Slaughter et L. Leslie, Academic Capitalism…, op. cit.
  • [44]
    H. S. Becker, Les Ficelles du métier…, op. cit., p. 153.
  • [45]
    Ibid., p. 147-164.

1Dans ce qu’il est maintenant convenu d’appeler « l’économie du savoir », les activités scientifiques et technologiques, ainsi que les compétences qui leur sont associées, sont plus que jamais reconnues comme des ressorts importants du développement économique. Les gouvernements tentent de mobiliser ces ressources à des fins économiques et misent sur la diffusion et l’utilisation de la connaissance scientifique en milieu industriel [1]. Que ce soit ou non en réponse à cette pression, les entreprises se tournent de plus en plus vers les institutions de recherche, c’est-à-dire les universités, les institutions d’enseignement technique, les laboratoires gouvernementaux et les centres de transfert technologique, pour y puiser les connaissances et la main d’œuvre nécessaires au développement de nouveaux produits et procédés qui, à leur tour, permettent d’être plus compétitif. De la même façon, les institutions de recherche intensifient leurs collaborations avec le milieu industriel afin d’obtenir des ressources financières supplémentaires dans une conjoncture où le financement public de la recherche stagne [2].

2Dans ce nouveau contexte, les notions de « réseau » et d’interaction entre les acteurs de la recherche, de l’industrie et de l’innovation technologique prennent une importance centrale dans les travaux des chercheurs qui s’intéressent à l’innovation. Pour ceux-ci, les relations qui se nouent entre ces acteurs tiennent souvent le rôle de variable explicative pour rendre compte des caractéristiques de l’innovation technologique et des succès (ou des échecs) d’une société en cette matière. À un autre niveau, l’étude des relations entre les acteurs de l’innovation s’avère intéressante dans la mesure où elles peuvent avoir un effet sur la nature même des institutions impliquées, institutions qui retiennent d’ailleurs depuis fort longtemps l’attention des chercheurs en STS (science, technologie et société).

3L’examen des principales caractéristiques d’un corpus de travaux portant sur les relations entre les institutions de recherche et les entreprises soulève des interrogations méthodologiques – choix des objets, capacité de généraliser à partir de ceux-ci – qui, ellesmêmes, permettent de jeter un regard critique sur le processus de production des connaissances en sciences sociales [3]. Ces travaux révèlent une nette tendance à choisir des objets de recherche proches, les chercheurs retenant très majoritairement des cas de réussite qui impliquent un nombre restreint d’acteurs peu représentatifs de l’ensemble des pratiques. Par ailleurs, dans la mesure où cette littérature scientifique s’inscrit dans un contexte où les gouvernements misent sur les relations entre les différents acteurs de l’innovation pour assurer la diffusion et l’utilisation de la connaissance scientifique en milieu industriel, son examen permet également d’aborder la question de l’utilisation des résultats des recherches dans la formulation des politiques publiques.

Le choix des objets

4Que ce soit pour un chercheur individuel ou une équipe, le choix d’un objet empirique, d’un « cas » spécifique, représente une décision importante qui affecte non seulement la capacité d’aborder adéquatement l’objet de recherche retenu [4] mais aussi la carrière de l’individu ou de l’équipe. Les cas disponibles n’ont pas tous le même statut dans une discipline ou dans un domaine de recherche : pour améliorer ou maintenir sa position au sein du champ scientifique [5], il vaut mieux miser sur des objets empiriques qui sont centraux et prestigieux et qui, pour cette raison, augmentent les chances et le niveau de reconnaissance par les pairs.

ÉCHANTILLON ET GRILLE D’ANALYSE

Cette enquête s’appuie sur une revue de la littérature réalisée pour l’Observatoire de développement économique du Canada en 1999. L’échantillon retenu regroupe à la fois les textes parus entre 1995 et 1999 dans les revues scientifiques et ceux qui ont été publiés par des organismes gouvernementaux (tels les conseils consultatifs sur la politique scientifique) ou internationaux (tel l’OCDE). La grille utilisée vise à déterminer : 1) l’identification et la caractérisation des partenaires (le type d’entreprise ou d’institution de recherche, le secteur d’activité, le pays étudié), des liens et des échanges; 2) l’identification des motivations, des avantages et des désavantages, des freins; l’identification des facteurs de réussite ; 3) l’identification des pratiques exemplaires.
Bien que relativement brève, la période couverte par la revue de littérature permet néanmoins de bien cerner les caractéristiques récentes de la production de connaissances sur le sujet. Elle est suffisamment longue pour éviter d’attribuer à l’ensemble de la production des traits qui seraient imputables à un événement exceptionnel ou ponctuel, par exemple des publications rapportant les résultats d’une enquête de grande envergure, faisant suite à l’évaluation d’un programme de soutien financier à la collaboration recherche-industrie, ou analysant un cas exemplaire et fortement médiatisé d’affrontement sur la propriété intellectuelle des résultats d’une recherche réalisée pour le compte d’une entreprise. Outre les textes parus dans les revues scientifiques ou publiés par les organismes gouvernementaux ou internationaux, le corpus analysé comprend également certains ouvrages de référence plus anciens. Les écrits de nature scientifique ont été repérés dans deux grandes bases de données: Current Contents (ISI) et ABI-Inform (UMI-Proquest Direct). La première dépouille les revues scientifiques les plus importantes en sciences humaines et sociales et en sciences administratives. La seconde met surtout l’accent sur le secteur de l’administration et du management, ce qui permet de repérer les recherches portant sur les entreprises et, plus spécifiquement, sur la gestion et l’impact des relations que ces dernières entretiennent avec les différentes institutions de recherche.
Les travaux pertinents ont été repérés à l’aide d’une série de mots clés dont la présence a été vérifiée dans les titres et les descripteurs des articles. Les mots clés ont été utilisés de façon que la couverture soit la plus large possible. La recherche bibliographique a permis d’identifier 435 titres: 195 titres touchaient de près ou de loin à notre objet de recherche et, de ceux-ci, les 105 titres les plus pertinents ont été analysés. Pour les écrits de nature institutionnelle, la banque de données OLIS de l’OCDE a été complétée par des documents gouvernementaux et para-gouvernementaux figurant dans les bibliographies des écrits scientifiques. 23 documents ont ainsi été identifiés : 15 touchaient de près ou de loin à l’objet de recherche et, parmi ceux-ci, les 10 documents les plus pertinents ont été analysés.

5Pour décrire cette dynamique dans le cas des sciences sociales, Becker parle de la « hiérarchie de la crédibilité » : si, très souvent, les sociologues n’analysent pas la gamme complète des phénomènes, c’est parce que les gens qui gèrent l’organisation étudiée définissent certaines des choses qui devraient être incluses dans l’échantillon de cas et de sujets comme des choses ne requérant pas l’analyse [6]. Il s’ensuit que, le plus souvent, les chercheurs en sciences sociales n’étudient pas tout le spectre des différentes formes que peut prendre un phénomène parce que les acteurs sociaux qui occupent les positions dominantes dans les systèmes analysés écartent de l’échantillon des cas qu’ils jugent non pertinents alors que, d’un point de vue heuristique, ceux-ci peuvent l’être tout à fait [7].

6Dans le cas de travaux portant sur les institutions de recherche, la hiérarchie de la crédibilité exerce un effet d’autant plus déterminant que les chercheurs participent eux-mêmes au système qu’ils étudient et qu’ils en ont dès lors intériorisé les règles de classement et les hiérarchies. Les chercheurs qui s’intéressent aux institutions de recherche tendent à mettre en œuvre, le plus souvent de manière inconsciente, des critères de choix des objets qui reproduisent les structures objectives du champ [8]. Une fois identifiés les cas les plus prestigieux, il est tentant, pour un chercheur, de s’inscrire dans la suite des travaux existant dans sa spécialité et de prendre des objets empiriques qui apparaissent importants [9]. Les études sociologiques portant sur le choix d’un objet de recherche indiquent que des résultats significatifs sur un cas prestigieux apportent à un chercheur plus de reconnaissance et de ressources que des résultats équivalents sur un objet empirique socialement de moindre importance [10]. On peut également croire qu’un chercheur qui travaille sur un « cas » reconnu par ses pairs peut plus facilement rester dans la « course », en dépit de résultats peu satisfaisants, qu’un autre qui choisit un objet empirique situé en périphérie de son domaine ou de sa spécialité [11].

7À un autre niveau, le degré d’autonomie propre à un champ scientifique peut également influencer le choix des cas retenus par les chercheurs. Dans un champ marqué par un degré d’autonomie élevé, le choix des objets empiriques est peu affecté par les pressions externes, notamment celles de l’État, et répond plutôt à une logique interne elle-même produit du « système de forces qui sont constitutives de la structure du champ [12] ». À l’inverse, c’est-à-dire surtout dans les champs où le degré d’autonomie est relativement faible, les objets empiriques retenus doivent davantage aux demandes et aux priorités qui sont à l’ordre du jour politique ou social.

8Il ne faut toutefois pas oublier que les chercheurs obtiennent l’essentiel de leurs fonds de recherche d’organismes gouvernementaux qui ont leurs propres priorités. Même dans le cas des organismes de subvention qui bénéficient d’une relative indépendance par rapport aux orientations gouvernementales, certains programmes de financement, parmi les mieux dotés, ne sont pas sans subir des pressions en faveur de travaux axés sur les besoins des utilisateurs potentiels et pouvant rapidement contribuer au développement économique ou social [13]. Dans le cas d’un programme de soutien exigeant la participation d’industriels au processus de définition de la programmation scientifique d’un centre universitaire, on peut penser que le choix des objets empiriques risque fort d’être, au moins en partie, déterminé par leur pertinence industrielle ou économique. En somme, les orientations et les priorités des organismes gouvernementaux qui financent la recherche sont un des facteurs qui déterminent le choix des objets d’étude.

9Lorsque des chercheurs acceptent la hiérarchie de la crédibilité qui leur est proposée par les acteurs et les institutions qu’ils se donnent pour mission d’étudier ou répondent « positivement » aux pressions externes qui sont exercées sur eux, ils risquent de produire des connaissances en partie biaisées parce que des pans entiers de la réalité auront été négligés, comme les types de relations qui existent entre les institutions de recherche et les entreprises occupant une position dominée dans le champ scientifique ou dans le champ économique.

10Comme le souligne Becker, « toute entreprise scientifique s’efforce de découvrir quelque chose qui puisse s’appliquer à toutes les choses d’un certain type en en étudiant quelques exemples, le résultat de cette étude étant, comme on dit, « généralisable » à tous les membres de cette classe de choses [14] ». Mais un échantillonnage trop sélectif et trop ciblé risque de déboucher sur une connaissance partielle du phénomène étudié et d’aboutir à une connaissance difficilement généralisable, comme on peut le voir dans le cas des travaux sur les relations entre les institutions de recherche et les entreprises.

Les « gagnants » : les universités et la recherche biomédicale

11De manière générale, les auteurs analysent les relations entre les institutions de recherche et les entreprises à partir de l’examen de cas spécifiques [15]. Que ce soit dans ce type de travaux ou dans des analyses plus générales prenant en considération plusieurs cas, les auteurs mettent l’accent sur la façon d’améliorer les transferts de l’université vers l’industrie [16] ou encore recensent les formes d’interaction, les motivations et les désavantages caractéristiques des relations entre les entreprises et les institutions universitaires [17].

12Dans ces travaux, force est de constater la propension à considérer presque uniquement les cas de réussite à partir desquels sont ensuite dégagées des pratiques exemplaires. Les différents facteurs de succès sont mis en évidence dans le but de trouver la recette qui permettrait de multiplier les relations fructueuses et, par là, de favoriser le développement économique. C’est ainsi, par exemple, que les rôles légendaires de l’université Stanford et du Massachusetts Institute of Technology (MIT) dans le développement technologique de la Silicon Valley et de la route 128 ont été étudiés à maintes reprises mais aussi récupérés par les pouvoirs politiques. Dans ces deux champs, le politique et le scientifique, les deux universités et les deux « régions » sont devenues des exemples de dynamisme entrepreneurial et technologique résultant, en partie, des réseaux de relations établis entre les milieux académique et industriel. Alors que les travaux relatant ces deux succès sont nombreux, on ne retrouve pas ou peu de traces des échecs, c’est-à-dire des cas pourtant plus nombreux où les relations entre les universités et les entreprises sur lesquelles avaient parié des régions ou des municipalités n’ont pas donné des résultats aussi fructueux [18]. Les caractéristiques de ces travaux mettent en lumière deux des causes citées plus haut pour expliquer le choix des objets empiriques. Non seulement les chercheurs retiennent des cas considérés comme prestigieux à l’intérieur même du champ étudié, mais, en outre, les cas empiriques retenus s’inscrivent très bien dans les orientations gouvernementales qui visent à maximiser l’utilisation de la recherche scientifique par les acteurs du champ économique.

13Si les États-Unis occupent une place prépondérante dans notre corpus de travaux, ce n’est donc pas le résultat d’un biais d’échantillonnage. Cela correspond à l’état effectif de la production scientifique et institutionnelle sur le sujet [19]. Ainsi, sur les 105 articles scientifiques analysés, nous avons relevé 67 mentions d’un pays spécifique : dans plus de la moitié des cas (37 sur 67), il s’agissait des États-Unis, l’Europe ne faisant l’objet que de 22 mentions (dont 8 pour l’Angleterre) ; le reste du monde se partageant les 9 mentions restantes [20]. Comme on peut le constater, cette répartition de l’attention correspond assez bien à la hiérarchie des puissances mondiales en matière de science. Un échantillon au sein duquel on accorde autant de place à ces pays aura, par exemple, pour effet de centrer l’attention sur des systèmes universitaires et industriels développés où les acteurs impliqués disposent de ressources financières, scientifiques et techniques qui déterminent un certain type très spécifique de relations : présence d’entreprises de haute technologie, demande industrielle pour des connaissances de pointe, disponibilité d’équipements scientifiques de pointe dans les universités, etc. Ces conditions ne peuvent être généralisées, les relations que les universités entretiennent avec les entreprises étant différentes, dans d’autres pays, du fait qu’elles impliquent des acteurs qui n’ont pas les mêmes ressources.

14L’institution de recherche dont il est question le plus souvent est l’université : 49 mentions au sein de notre échantillon de 105 articles. Les travaux consultés sont relativement muets sur les autres institutions de recherche pouvant jouer un rôle dans la diffusion et l’utilisation des connaissances techniques et scientifiques dans les entreprises : les laboratoires gouvernementaux reçoivent quatre mentions, les collèges et les universités peu impliqués en recherche ne sont jamais mentionnés, pas plus d’ailleurs que les centres de transfert. Selon ces travaux, les universités seraient au cœur du système de transfert de technologie mis en place et soutenu par l’État alors que d’autres institutions de recherche, comme les laboratoires gouvernementaux, ont des responsabilités en matière de « transfert ». Mais, en raison de ressources humaines et financières relativement restreintes et probablement du fait d’une position moins forte dans le champ scientifique, celles-ci sont sous-représentées dans la littérature [21].

15La taille des universités ne semble pas influer sur leur chance d’être retenues comme cas d’étude ; les petites comme les grandes universités font l’objet d’analyses. Ce qui, en revanche, distingue les universités retenues comme objets empiriques est leur forte implication dans la recherche. Les études portent le plus souvent sur des universités de recherche très actives en sciences biomédicales [22]. De plus, on remarque que ces universités ont une production scientifique importante, tant en quantité qu’en qualité, et que les ressources financières dont elles disposent pour la recherche sont considérables [23]. Souvent, il s’agit d’institutions de réputation internationale ou, à tout le moins, d’universités qui sont dominantes sur la scène nationale. Bien que ce soit en moins grande proportion, il existe également des études sur des universités ayant des programmes de formation et des activités de recherche en génie. Lorsque celles-ci s’impliquent dans des projets plus pratiques qui répondent à des besoins spécifiques au sein de l’entreprise [24].

16Les universités qui retiennent l’attention des chercheurs ne semblent donc pas vraiment représentatives de l’ensemble du système universitaire : les collèges et les universités axés surtout sur la formation (peu impliqués en recherche), comme les universités où les équipes de recherche ne font pas partie du « peloton de tête », ou les universités « régionales », ne sont pas pris en compte et étudiés. De toute évidence, ces universités composent un échantillon fort peu diversifié qui a peu de chances de couvrir toutes les variantes possibles du phénomène étudié. On observe ainsi une focalisation sur quelques secteurs spécifiques, notamment le secteur biomédical et des biotechnologies. Sur les 105 articles analysés, les sciences biomédicales (incluant les spécialités de la chimie, pertinentes à l’industrie pharmaceutique) et les biotechnologies font l’objet de 38 mentions sur un total de 107 pour ce secteur. D’autres secteurs, en particulier les technologies de l’information et les télécommunications (17 mentions), le génie des matériaux (16 mentions) ainsi que l’électronique (13 mentions), sont eux aussi abordés, alors que les sciences sociales et les sciences administratives attirent très peu l’attention (4 mentions).

17Le type de secteur choisi est, lui aussi, peu représentatif de la diversité des situations possibles et doit surtout à la hiérarchie de la crédibilité dont nous avons parlé plus haut. En effet, les travaux sur les collaborations intersectorielles, par exemple, montrent que, si les disciplines des sciences biomédicales sont les plus actives dans ces relations, les domaines du génie, de la chimie et de la physique sont eux aussi impliqués avec des partenaires non universitaires [25]. Compte tenu de cette situation, la focalisation sur les sciences biomédicales introduit un biais d’échantillonnage qui débouche sur une connaissance partielle du phénomène étudié.

Grandes entreprises et PME de haute technologie

18Les entreprises qui retiennent le plus l’attention des chercheurs sont les grandes entreprises actives en recherche-développement (16 mentions) ou les PME de haute technologie (8 mentions). Les travaux sur les relations recherche-industrie contiennent donc peu d’information sur la PME traditionnelle de faible et de moyenne intensité technologique. Hormis certains travaux de l’OCDE [26] qui leur font référence, ce silence sur les PME « traditionnelles » est d’autant plus étonnant que ce type d’entreprise, souvent en manque de ressources internes en matière scientifique et technique, bénéficie largement de relations avec les institutions de recherche [27].

19Les études font surtout état de relations entre des universités et des entreprises disposant d’un large éventail de ressources internes de recherche-développement. À cet effet, la capacité de recherche-développement des entreprises leur permet d’interagir plus facilement avec d’autres acteurs impliqués en recherche. Elle facilite aussi l’évaluation et l’utilisation de l’information et des connaissances produites [28] en plus de multiplier les avantages tirés de ces interactions [29]. Cette concentration de l’attention sur deux catégories d’entreprises (grande entreprise active en recherche-développement et PME technologique) exclut d’autres catégories d’entreprises telles les PME traditionnelles ou toute entreprise n’effectuant pas de recherche-développement. Or, dans tous les pays industrialisés, y compris aux États-Unis, les entreprises de ce type sont de loin les plus nombreuses et jouent un rôle important dans le champ économique. On observe également que les travaux sur les relations université-entreprise portent surtout sur les activités de recherche donnant lieu à des relations formelles qui impliquent des transactions monétaires [30]. Bien que les chercheurs reconnaissent l’importance des relations informelles dans le transfert de technologie, leurs analyses y accordent peu d’attention et insistent plutôt sur le fait que les gouvernements désirent accélérer et accroître le transfert en soutenant financièrement la mise en place de relations entre les universités et les entreprises, ce qui, évidemment, implique une formalisation des relations entre les partenaires.

20Si les initiatives récentes (qui prennent la forme de partenariats université-entreprise, recherche en collaboration, alliances stratégiques, joint-ventures, etc.) ont reçu une attention particulière de la part des chercheurs [31], c’est qu’elles mobilisent des ressources financières considérables et que, potentiellement du moins, elles entraînent des changements significatifs dans les pratiques universitaires. Ces initiatives figurent dans les priorités de plusieurs organismes gouvernementaux de soutien à la recherche qui y voient un moyen « direct » et « efficace » de stimuler le développement économique grâce à la recherche scientifique [32]. Inversement, peu d’attention est accordée aux relations université-entreprise axées sur la formation [33], les échanges de personnel [34] ou encore les services technologiques, autant de types de relations qui ont des caractéristiques très différentes des relations de recherche.

Effets d’échantillonnage et idéal-type de la relation recherche-industrie

21L’idéal type de la relation entre une institution de recherche et une entreprise qui se dégage de l’analyse de notre corpus de travaux peut être décrit comme suit : une équipe de chercheurs de haut niveau travaillant dans le secteur biomédical et appartenant à une université américaine «prestigieuse » qui poursuit des activités de recherche pour ou en collaboration avec une grande entreprise ou une PME de haute technologie du même domaine et qui possède le personnel et les expertises nécessaires à une relation fructueuse ainsi qu’à l’utilisation optimale des résultats obtenus. Or cet idéal type ne permet pas de penser adéquatement les relations entre les institutions de recherche et les entreprises ou, en d’autres termes, les relations entre les différents acteurs de l’innovation. La façon dont travaillent les chercheurs qui s’intéressent aux relations entre les institutions de recherche et les entreprises les conduit souvent à une série de généralisations abusives. Par une première synecdoque, l’université devient l’« institution de recherche ». Ce faisant, le système de transfert et d’échange scientifique et technologique entre les institutions de recherche et les entreprises est ramené aux relations université-entreprise. Or il existe des pays dans lesquels les PME ont des relations fréquentes et suivies non pas avec des universités mais avec des institutions spécifiques, par exemple les Fraunhofer Institutes en Allemagne, dont le mandat, les ressources et les pratiques sont mieux adaptés aux besoins et aux caractéristiques des PME traditionnelles [35]. C’est le cas également de la France qui a récemment créé une vingtaine de réseaux régionaux de développement technologique axés sur les besoins des PME [36] Dans une deuxième synecdoque, l’équipe de chercheurs de haut niveau travaillant dans le secteur biomédical et appartenant à une université américaine prestigieuse devient « l’université ». Puis, troisième synecdoque, la grande entreprise ou la PME de haute technologie devient « l’entreprise ». Enfin, la relation de recherche devient « la relation université entreprise ».

22Ici encore, on peut parler de généralisation abusive et identifier quelques problèmes. Par exemple, dans le domaine biomédical et en biotechnologie, le lien entre la recherche fondamentale et l’application commerciale est souvent plus évident que dans d’autres secteurs. La nouvelle molécule ou le gène efficace dans le traitement d’une maladie sont des produits de recherche fondamentale dont le potentiel d’application est facilement et rapidement identifiable. Cette situation tend à faciliter les relations entre les partenaires. De plus, les deux partenaires ont en commun un bagage de connaissances et de façons de faire résultant de leur implication en recherche-développement. Les différences dans les habitus étant moindres, les partenaires trouvent plus facilement un terrain d’entente et offrent des « produits » qui intéressent l’autre partie tout en maintenant à peu près intactes leurs propres pratiques. Ainsi, l’idéal type implicite qui guide la recherche sur les relations entre les institutions de recherche et les entreprises tend à sous-estimer les obstacles qui freinent la mise en place de relations effectives. De la même manière, le fait de fonder le « modèle » sur des entreprises actives en recherche-développement tend à faire oublier que la mise en place de telles relations exige des prérequis que la majorité des entreprises, notamment les PME de faible et moyenne technologie, ne possèdent pas. La pertinence d’un tel modèle pour les universités dont la production scientifique est faible et pour un milieu industriel où dominent les PME de faible et moyenne intensité technologique est très rarement examinée alors qu’elle apparaît plutôt faible.

23Dans plus du tiers des études, les auteurs analysent une entreprise générique, c’est-à-dire sans préciser de quel type d’entreprise il est question. Mais la description de cette dernière donne toujours à penser qu’implicitement il est fait référence à la grande entreprise active en recherche-développement ou à la PME de haute technologie. Il suffit, par exemple, de penser aux articles qui ne nomment pas le type d’entreprise analysée, mais qui font référence aux chercheurs industriels [37], aux managers de la recherche-développement ou au département de recherche-développement [38] ou même à la programmation de recherche de l’entreprise [39]. Il est alors clair que les auteurs font référence à une entreprise qui possède des capacités internes de recherche et qui est en mesure d’absorber les résultats issus d’une collaboration avec une institution de recherche. Les « leçons » qui se dégagent de l’ensemble de ces travaux ne peuvent donc concerner qu’un nombre limité d’entreprises alors qu’elles sont souvent généralisées à tous les types d’entreprise par le simple fait de désigner le partenaire privé du terme générique « entreprise ».

Les effets politiques d’un idéal-type

24Dans le contexte des discours économiques sur « l’économie du savoir », les travaux analysés ici trouvent souvent une oreille attentive dans les officines gouvernementales, les responsables de dossiers économiques et technologiques comptant sur l’instauration de relations entre les différents acteurs de l’innovation pour assurer et améliorer l’utilisation des connaissances scientifiques dans le champ économique. Or, compte tenu des choix d’échantillonnage des chercheurs, les relations recherche-industrie et, de façon plus large, le système de transfert et d’échange scientifique et technologique sont pensés en fonction des caractéristiques, des besoins et des intérêts de quelques acteurs seulement.

25Certains acteurs importants qui sont laissés pour compte dans le « modèle » que nous venons de présenter, le sont aussi dans les interventions gouvernementales qui s’en inspirent. Ces recherches biaisées ne contribuent pas à la mise en place de ce que l’on pourrait appeler un véritable système de transferts scientifiques et technologiques qui, à la manière de ce qui a cours en Allemagne et, dans une moindre mesure, en France, impliquerait tous les acteurs de l’innovation et permettrait une meilleure intégration des mesures visant à accroître le nombre et l’efficacité de leurs relations. Ainsi, dans ces deux pays, le système prend en compte l’hétérogénéité des acteurs de l’innovation en créant et en soutenant une grande diversité d’organismes dont la mission est de relier les agents entre eux et de faire circuler les connaissances et les technologies. Or, dans beaucoup de pays de l’OCDE, on a plutôt concentré les efforts à mettre sur pied de nombreux programmes qui concernent uniquement les relations entre les universités prestigieuses et les grandes entreprises ou les PME de haute technologie.

26L’idéal type qui prévaut tend aussi à exclure certaines interventions. Par exemple, en raison de l’insistance sur la science de pointe et l’entreprise de haute technologie, l’innovation mineure (ou diffuse) est délaissée au profit de l’innovation radicale. De même, les initiatives visant à mettre en place des services technologiques (plutôt que des relations axées sur la recherche) sont laissées dans l’ombre et trouvent plus difficilement les ressources financières et la légitimité dont elles auraient besoin pour se développer et assumer plus efficacement leur rôle dans un véritable système de transfert et d’échanges scientifiques et technologiques. Le même raisonnement vaut pour les relations axées sur la formation. En somme, la prédominance d’un idéal type partiel et simpliste débouche sur des interventions politiques aux visées universelles, mais en fait trop spécifiques et mal adaptées tant à la réalité de la plupart des systèmes nationaux de l’innovation qu’aux objectifs de développement économique poursuivis par les gouvernements.

Méthodologie et autonomie

27On peut se demander comment des synecdoques aussi irréalistes parviennent néanmoins à convaincre et à être considérées comme scientifiquement valables. Le premier volet de l’explication est d’ordre méthodologique, mais un second réside dans le faible degré d’autonomie des sciences sociales et dans la propension des chercheurs à accepter la hiérarchie des objets légitimes qui leur est proposée par les organisations auxquelles ils s’intéressent.

28Sur le plan méthodologique, plusieurs études justifient leur objet empirique particulier comme moyen d’illustrer un phénomène plus général [40]. Il en va ainsi, par exemple, de travaux où la décision de s’attacher aux relations entre les universités américaines et les entreprises multinationales dans le secteur biomédical est justifiée en soulignant que l’objet empirique est pertinent pour étudier les relations université entreprise puisque ces dernières y sont de plus en plus nombreuses et importantes en termes financiers. On les juge exemplaires dans la mesure où elles soulèvent certains des « problèmes » qu’entraînent les relations université-entreprise : le partage de la propriété intellectuelle, l’établissement des règles entourant la publication des résultats, l’implication des étudiants, le calendrier des activités, les difficultés de communication, etc. D’autres travaux abordent la question d’un point de vue plus théorique et la justification méthodologique des objets empiriques retenus s’appuie alors sur le fait qu’ils permettent d’aborder des questions théoriques importantes [41] : le rôle de l’interaction entre les acteurs de la recherche et de l’industrie dans l’innovation technologique ; les mécanismes assurant cette interaction lorsqu’elle implique des acteurs dont les cultures d’appartenance et les logiques de fonctionnement sont différentes ; les mécanismes de transformation d’une institution au contact d’une autre, etc. Les cas retenus ont alors une valeur stratégique eu égard à la validation ou au développement d’une théorie sociologique ou économique [42].

29Dans un type de justification comme dans l’autre, l’article parvient à convaincre de la pertinence de son propos : la plupart des publications analysées permettent effectivement d’aborder la question des relations recherche-industrie. Ce qu’ils ne permettent pas, on l’a vu, c’est la production d’une connaissance générale du phénomène. Si le problème de la généralisation abusive des résultats n’apparaît pas toujours clairement à la lecture d’un seul article, il en va autrement lors d’une lecture intensive des travaux consacrés à ce thème, celle-ci laissant l’impression très nette de retrouver les mêmes « cas » alors que les chercheurs prétendent construire une théorie « générale » de l’innovation. Si l’étude des relations entre l’université X et l’entreprise Y permet de faire un pas en avant dans la compréhension des relations entre les acteurs de l’innovation en dégageant d’un cas de figure pertinent des propriétés qui pourraient être des caractéristiques génériques du phénomène, l’examen répété des mêmes cas conduit à n’examiner qu’un seul aspect de l’objet de recherche. Dans ce contexte, l’explication du phénomène risque fort de demeurer partielle dès lors que les combinaisons qui ne retiennent pas l’attention ont des propriétés différentes de celles qui sont étudiées de façon répétitive.

30On peut se demander pourquoi les chercheurs ne semblent pas percevoir ce problème. Prosaïquement, on peut souligner qu’il est peu fréquent qu’un chercheur lise dans un laps de temps très court plus d’une centaine de textes portant sur le même objet. En prenant connaissance des travaux au fur et à mesure de leur parution, le chercheur ne perçoit pas facilement le retour fréquent des mêmes objets empiriques. D’un point de vue sociologique, il semble bien que la hiérarchie de la crédibilité ou, comme le dit Pierre Bourdieu, la hiérarchie des objets légitimes pèse lourd dans le choix d’un objet empirique. Comme nous l’avons vu, les objets retenus mettent en scène des acteurs qui occupent le plus souvent des positions dominantes dans les univers étudiés. Ces choix ont pour corollaire que certains cas jugés non pertinents par les acteurs de l’univers étudié sont marginalisés dans les travaux des chercheurs. Le fait que les chercheurs étudient un univers dont ils sont eux-mêmes les acteurs vient amplifier le problème dans la mesure où la hiérarchie des objets légitimes est intériorisée.

31Par ailleurs, le faible degré d’autonomie du champ des sciences sociales n’est pas sans conséquences. Pour trouver les fonds nécessaires à leurs recherches, les chercheurs ont intérêt à porter leur attention sur des objets empiriques qui intéressent les pouvoirs publics, tels que les histoires de succès, le secteur biomédical et la biotechnologie, les universités de pointe, etc. L’étude de ces objets s’inscrit alors « naturellement » dans les préoccupations gouvernementales pour la haute technologie et le développement économique axé sur la recherche-développement et la mise en réseau des principaux acteurs de l’innovation. Cette inclination est d’autant plus forte qu’elle prend forme dans un contexte plus large où les États encouragent les universités et les laboratoires gouvernementaux à trouver du financement auprès des utilisateurs des résultats de recherches [43] de sorte que les chercheurs se voient placés dans une position où les besoins et les demandes industrielles et gouvernementales doivent être pris en compte dans le choix des objets empiriques. Ainsi, en vertu de leur capacité à financer des travaux de recherche et de leur capacité à identifier ce qui compte en matière d’innovation, les acteurs qui occupent une position dominante dans les champs scientifique, économique et politique sont en mesure de peser sur les choix d’objets empiriques que font les chercheurs.

Les limites du volontarisme méthodologique

32Dans Les Ficelles du métier, Becker souligne, de façon un peu volontariste il est vrai, que le problème pour les chercheurs en sciences sociales n’est pas la hiérarchie de la crédibilité en tant que telle mais plutôt le fait de l’accepter et d’y succomber [44]. Pour aider les chercheurs à garder une certaine indépendance, il propose une série de « trucs » qui devraient leur permettre de mieux couvrir les phénomènes qui les intéressent parce qu’ils sont susceptibles de leur donner accès à une plus grande diversité de situations telles que bâtir un échantillon qui maximise les chances de voir se manifester le cas bizarre, le cas négatif qui s’éloigne de ce qu’indique la théorie, douter systématiquement de ce que dit une personne en position de pouvoir dans l’organisation ou l’« univers » à étudier, surtout lorsqu’elle vous identifie – ce qui mérite attention – ou encore porter attention aux cas marginaux et à ceux qui ne sont pas à la «mode [45] ».

33En somme, nous dit Becker, les chercheurs en sciences sociales se présentent sur le « terrain » avec des catégories étroites qui sont trop souvent celles des acteurs, de leurs collègues ou de leurs clients. Ce qui les amène souvent à juger que certains cas empiriques ne méritent pas d’être étudiés alors qu’il faudrait justement le faire parce qu’ils sont susceptibles de faire avancer la réflexion scientifique et même les politiques publiques. Si, dans le corpus de travaux que nous avons examinés, les conseils de Becker ne semblent pas avoir été suivis, c’est que la décision de privilégier un objet empirique plutôt qu’un autre n’est pas une simple question de préférence ou de volonté individuelles. Cette décision s’inscrit en réalité plutôt dans une sphère de pratiques dont les règles, les enjeux, la structure et les relations avec d’autres domaines de pratiques sont autant de contraintes (ou d’opportunités) auxquelles le chercheur individuel est soumis – elle ne peut donc être modifiée par la seule volonté de suivre un conseil méthodologique pourtant fort à propos.

Notes

  • [1]
    Dans le cas de la France, on peut trouver un exemple récent de cette perspective dans L. Alary-Grall et F. Pijaudier-Cabot, « Pour une meilleure coopération recherche-industrie », in Cahiers Industries, 74, février 2002, p. 11-22.
  • [2]
    Voir, entre autres, S. Slaughter et L. Leslie, Academic Capitalism. Politics, Policies and the Entrepreneurial University, Baltimore, Johns Hopkins University Press, 1997, 276 p.
  • [3]
    L. Fiset, M.-P. Ippersiel, Y. Martineau et M. Trépanier, Institution du savoir et PME : développer des synergies. Synthèses des écrits et bilan des problèmes et besoins des intervenants québécois, Montréal, INRSUrbanisation, octobre 1999.
  • [4]
    J. Walton, « Making the Theoretical Case », in What is a Case ? Exploring the Foundations of Social Inquiry, C. C. Ragin et H. S. Becker (éds), Cambridge, Cambridge University Press, 1992, p. 121-138.
  • [5]
    Pierre Bourdieu, « La spécificité du champ scientifique et les conditions sociales du progrès de la raison », in Sociologie et sociétés, 7 (1), 1975, p. 91-118.
  • [6]
    H. S. Becker, Les Ficelles du métier. Comment conduire sa recherche en sciences sociales, Paris, La Découverte, 2002, p. 153.
  • [7]
    Ibid., p. 152-153.
  • [8]
    P. Bourdieu, « Méthode scientifique et hiérarchie sociale des objets », in Actes de la recherche en sciences sociales, 1, 1975, p. 5.
  • [9]
    H. Zuckerman, « Theory Choice and Problem Choice in Science », in Sociological Inquiry, 48 (3/4), 1978, p. 65-95.
  • [10]
    T. Gieryn, « Problem Choice and Problem Change in Science », in Sociological Inquiry, 48 (3/4), 1978, p. 96-115.
  • [11]
    J. M. Ziman, « The Problem of Problem Choice », in Minerva, 25 (1/2), 1988, p. 92-106.
  • [12]
    P. Bourdieu, Science de la science et réflexivité, Paris, Raisons d’agir, 2001, p. 95.
  • [13]
    Y. Gingras et R. Dalpé, « Recherche universitaire et priorités nationales : l’effet du financement public sur la recherche en énergie solaire au Canada », in Revue canadienne de l’enseignement supérieur, vol. 20, 2, 1990, p. 27-44 ; R. Dalpé et M.-P. Ippersiel, « Réseautage et relations avec l’industrie dans les nouveaux matériaux et l’optique », in Sociologie et sociétés, XXXII (1), 2000, p. 107-134 ; B. Godin, M. Trépanier et M. Albert, « Des organismes sous tension : les conseils subventionnaires et la politique scientifique », in Sociologie et sociétés, XXXII (1), 2000, p. 17-42.
  • [14]
    H. S. Becker, Les Ficelles du métier…, op. cit., p. 118.
  • [15]
    Ces cas peuvent porter sur des industries, des institutions et/ou des entreprises précises. Voir, entre autres, W. W. Powell, « Learning from Collaboration : Knowledge and Networks in the Biotechnology and Pharmaceutical Industries », in California Management Review, 40 (3), 1998, p. 228-240 ; L. E. Nimtz, W. C. Coscarelli et D. Blair, « University-Industry Partnerships : Meeting the Challenge with a High Tech Partner », in SRA Journal, 1995, p. 9-17 ; L. P. Randazzese, « Exploring University-Industry Technology Transfer of CAD Technology », in IEEE Transactions on Engineering Management, 43 (4), 1996, p. 393-401.
  • [16]
    Voir, entre autres, J. S. Faiweather, « The University’s Role in Economic Development : Lessons for Academic Leaders », in SRA Journal of the Society of Research Administrators, 1990, p. 5-11 ; E. Geisler, A. Furino et T. J. Kiresuk, « Toward a Conceptual Model of Cooperative Research : Patterns of Development and Success in University-Industry Alliances », in IEEE Transactions on Engineering Management, 38 (2), 1991, p. 136-145 ; R. V. Bloeden et D. Stokes, « Making University/Industry Collaborative Research Succeed », in Research Technology Management, 37 (2), 1994, p. 44-51.
  • [17]
    Voir, entre autres, E. Geisler et A. H. Rubenstein, « University-Industriy Relations : a Review of Major Issues », in Cooperative Research and Development : the Industry-University-Government Relationship, A. N. Link et G. Tassey (éds), Boston, Kluwer Academic Publishers, 1989, p. 43-62 ; H. Buchbinder et J. Newson, « Corporate-University Linkages in Canada : Transforming a Public Institution », in Higher Education, 20, 1990, p. 355-379 ; E. R. J. Bell, « Some Current Issues in Technology Transfer and Academic Industrial Relations : a Review », in Technology Analysis & Strategic Management, 5 (3), 1993, p. 307-321 ; F. Meyer-Krahmer et U. Schmoch, « Science-Based Technologies : University-Industry Interactions in Four Fields », in Research Policy, 26, 1998, p. 325-335.
  • [18]
    M. Luger et H. Goldstein, Technology in the Garden : Research Parks and Regional Economic Development, Chapel Hill, University of North Carolina Press, 1991, 242 p.
  • [19]
    Bien sûr, il est possible que des travaux étudiant des cas dans d’autres pays aient été publiés sans pour autant figurer dans les banques bibliographiques (Current Contents et ABI Inform) que nous avons utilisées. Ces deux bases de données ne recensent pas toutes les revues et elles conservent uniquement les travaux publiés en anglais. Cela dit, leur couverture est néanmoins très large et elles contiennent les revues qui dominent le domaine de recherche dont il est question ici. Aussi, si les travaux portant sur les relations entre les institutions de recherche et les entreprises ailleurs que dans les pays du « peloton de tête » ne figurent pas dans les banques de données que nous avons utilisées, il s’agit probablement d’un indice sûr de leur place relativement marginale dans la littérature et d’un effet de la hiérarchie de la crédibilité dont nous avons parlé plus haut.
  • [20]
    La littérature institutionnelle analysée provient surtout de l’OCDE et présente le plus souvent l’expérience de plusieurs pays, ce qui explique pourquoi nous l’avons écartée de ce comptage.
  • [21]
    N. H. Abramson et al., Technology Transfer Systems in the United States and Germany. Lessons and Perspectives, Washington (DC), National Academy Press, 1997, 425 p.
  • [22]
    E. S. Robert et D. E. Malone, « Policies and Structures for Spinning off New Companies from Research and Development Organizations », in R & D Management, 26 (1), 1996, p. 17-48 ; N. S. Argyres et J. P. Liebeskind, « Privatizing the Intellectual Commons : Universities and the Commercialization of Biotechnology », in Journal of Economic Behavior & Organization, 35 (4), 1998, p. 427-454 ; W. W. Powell et J. Owen-Smith, « Universities and the Market for Intellectual Property in the Life Sciences », in Journal of Policy Analysis and Management, 17 (2), 1998, p. 253-277.
  • [23]
    H. F. Moed, M. Luwell, J. A. Houben, E. Spruyt et H. Vandeberghe, « The Effects of Changes in the Funding Structure of the Flemish Universities on their Research Capacity, Productivity and Impact during the 1980’s and early 1990’s », in Scientometrics, 42 (3), 1998, p. 231-255.
  • [24]
    Y. Lee et R. Gaertner, « Translating Academic Research to Technological Innovation », in Y. Lee, Technology Transfer and Technology Policy, Westport (CN), Quorum Books, 1997, p. 110-124 ; L. Macbryde, « Commercialization of University Technology : a Case in Robotics », in Technovation, 17 (1), 1997, p. 39-46 ; F. Meyer-Krahmer et U. Schmoch, « Science-Based Technologies… », art. cit.
  • [25]
    Pour le Canada, voir Y. Gingras et B. Godin, « Impact of Collaboration on Academic Research », in Science and Public Policy, 27 (1), 2000, p. 65-73. Pour la France, voir le texte de Michel Grossetti et Béatrice Milard dans ce numéro.
  • [26]
    Les Petites et les Moyennes Entreprises : technologie et compétitivité, Paris, OCDE, 1993 ; Diffusing Technology to Industry : Government Policies and Programmes, Paris, OCDE, 1997.
  • [27]
    Les PME à forte croissance, P. A. Julien (éd.), Sainte-Foy, Presses de l’université du Québec, 2002. Voir aussi Y. Lee, « Technology Transfer and the Research University : a Search for Boundaries of University-Industry Collaboration », in Research Policy, 25 (6), 1996, p. 843-863.
  • [28]
    A. Arora et A. Gambardella, « Complementary and External Linkages : the Strategies of the Large Firms in Biotechnology », in Journal of Industrial Economics, XXXVIII (4), 1990, p. 361-379.
  • [29]
    I. Feller, « Universities as Engines of R & D-based Economic Growth : they think they can », in Research Policy, 19 (4), 1990, p. 335-348.
  • [30]
    H. Buchbinder et J. Newson, « Corporate-University Linkages in Canada… », art. cit. ; E. Geisler, A. Furino et T. J. Kiresuk, « Toward a Conceptual Model of Cooperative Research… », art. cit. ; R. V. Bloeden et D. Stokes, « Making University/Industry Collaborative Research Succeed », art. cit. ; G. Reid, « Improving University-Industry Relations », SRA Journal, 26 (1), 1994, p. 23 ; E. Mansfield et J. Y. Lee, « The Modern University : Contributor to Industrial Innovation and Recipient of Industrial R & D Support », in Research Policy, 25 (7), 1996, p. 1047-1058 ; R. M. Cyert et P. S. Goodman, « Creating Effective University-Industry Alliances : An Organizational Learning Perspective », in Organizational Dynamics, 25 (4), 1997, p. 45-57 ; J. B. Burnham, « Evaluating Industry/University Research Linkages », in Research Technology Management, 40 (1), 1997, p. 52-55 ; T. I. D. Campbell, « Public Policy for the 21st Century : Addressing Potential Conflicts in University-Industry Collaboration », in Review of Higher Education, 20 (4), 1997, p. 357 ; D. G. Rea, H. Brooks, R. M. Burger et R. Lascala, « The Semiconductor Industry – Model for Industry/University/Government Cooperation », in Research Technology Management, 40 (4), 1997, p. 46-54 ; S. Slaughter et L. Leslie, Academic Capitalism : Politics, Policies and the Entrepreneurial University, Baltimore-Londres, Johns Hopkins University Press, 1997, 280 p.
  • [31]
    E. Geisler et A. H. Rubenstein, « University-Industry Relations… », art. cit. ; R. J. W. Tijssen et J. C. Korevaar, « Unravelling the Cognitive and Interorganisational Structure of Public/Private R & D Networks : A Case Study of Catalysis Research in the Netherlands », in Research Policy, 25 (8), 1997, p. 1277-1293 ; E. Mansfield et J. Y. Lee, « The Modern University… », art. cit. ; J. B. Burnham, « Evaluating Industry/University Research Linkages », art. cit. ; F. Meyer-Krahmer et U. Schmoch, « Science-Based Technologies… », art. cit. ; H. Etzkowitz et C. Kemelgor, « The Role of Research Centres in the Collectivisation of Academic Science », in Minerva, 36 (3), 1998, p. 271-288 ; A. Webster, « Bridging Institutions : The Role of Contact Research Organizations in Technology Transfer », in Science and Public Policy, 21 (2), 1994, p. 89-97 ; W. L. Baldwin et A. N. Link, « Universities as Research Joint Venture Partners : Does Size of the Venture Matter ? », in International Journal of Technology Management, 15 (8), 1998, p. 895-913.
  • [32]
    B. Godin, M. Trépanier et M. Albert, « Des organismes sous tension… », art. cit.
  • [33]
    J. Senker et P. Senker, « Implications of Industrial Relationships for Universities : A Case Study of the UK Teaching Company Scheme », in Science and Public Policy, 24 (3), 1997, p. 173-182, et de TCD, Teaching Company Directorate (1991-1996), TCS Annual Reports 1991-1996, Farington, UK, TCD.
  • [34]
    F. Meyer-Krahmer et U. Schmoch, « Science-Based Technologies… », art. cit. ; Tijssen et Korevaar, « Unravelling the Cognitive… », art. cit.
  • [35]
    N. H. Abramson et al., Technology Transfer Systems, op. cit.
  • [36]
    L. Alary-Grall et F. Pijaudier-Cabot, « Pour une meilleure coopération recherche-industrie », art. cit.
  • [37]
    Entre autres, E. Geisler, A. Furino et T. J. Kiresuk, « Toward a Conceptual Model of Cooperative Research… », art. cit.
  • [38]
    R. V. Bloeden et D. Stokes, « Making University/Industry Collaborative Research Succeed », art. cit. ; E. R. J. Bell, « Some Current Issues in Technology Transfer… », art. cit.
  • [39]
    A. Bonaccori et A. Piccaluggo, « A Theoretical Framework for the Evaluation of University-Industry Relationship », in R & D Management, 24 (3), 1994, p. 229-248.
  • [40]
    C. C. Ragin, « Introduction : Cases of “What is a Case ?” », in C. C. Ragin et H. S. Becker (éds), What is a Case ? Exploring the Foundations of Social Inquiry, Cambridge, Cambridge University Press, 1992, p. 1-17.
  • [41]
    J. Walton, « Making the Theoretical Case », art. cit.
  • [42]
    J. Hamel, « The Case Study in Sociology : The Contribution of Methodological Research in French Language », in Canadian Review of Sociology and Anthropology, 30 (4), 1993, p. 498.
  • [43]
    R. Dalpé et M.-P. Ippersiel, « Réseautage et relations avec l’industrie… », art. cit. ; B. Godin, M. Trépanier et M. Albert, « Des organismes sous tension… », art. cit. ; S. Slaughter et L. Leslie, Academic Capitalism…, op. cit.
  • [44]
    H. S. Becker, Les Ficelles du métier…, op. cit., p. 153.
  • [45]
    Ibid., p. 147-164.
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