Notes
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[1]
CSM, Rapport d’activité 2013, « La contribution des conseils de justice à la séparation des pouvoirs », p. 209 et s. Voir notamment sur ce point l’intervention de M. Vincent Lamanda, p. 215, celle de M. Kees Sterk pp. 286 et s., celle de Mme Pauline Koskelo, p. 299, celle de M. Dominique Rousseau, p. 333 ainsi que la synthèse post colloque « Les enseignements à tirer des débats du 130ème anniversaire pour la réforme du CSM », p. 360 et s.
-
[2]
Les juridictions financières ont bénéficié d’un effort analogue pour installer les chambres régionales des comptes et assumer la mission nouvelle de certification des comptes de l’État confiée à la Cour des comptes.
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[3]
Sur ce point, l’organisation actuelle ne semble guère motiver les candidats pour exercer les fonctions de chef de juridiction (Voir l’avis du CSM du 26 novembre 2014 sur le rôle des chefs de cour et de juridiction et les attentes à leur égard, Rapport d’activité 2014 du CSM, p. 223 et s., notamment p. 249-250 sur le ressenti des intéressés quant à la réduction de leurs marges de manœuvre budgétaires et à l’absence de maîtrise des moyens).
Un pouvoir judiciaire peut-il exister sans disposer d’une marge d’autonomie dans la définition et la gestion des moyens nécessaires à l’exercice de ce pouvoir ?
Un équilibre difficile à trouver dans un régime parlementaire
1La réponse implique de se situer au bon endroit sur le curseur séparation/coopération entre les trois pouvoirs distingués par Montesquieu (cf. l’article de M. Pascal Jan dans ce même numéro). Et en régime parlementaire, qui est celui de la Vème République, la bonne gestion des moyens de la justice (effectifs et budget) impose plutôt une coopération entre les pouvoirs qu’une séparation radicale ou une autogestion de ses moyens par l’institution judiciaire.
2Le Parlement est en effet seul compétent pour prendre les grandes décisions qui impactent le volume des moyens nécessaires à la justice : créer des ordres de juridiction dans le respect des principes constitutionnels, définir le statut de la magistrature, déterminer les crimes et délits… Il vote les crédits alloués au service public de la justice ainsi que ses plafonds d’emplois. Mais la carte judiciaire relève des prérogatives du Gouvernement, tout comme la détermination de la politique pénale. Et les magistrats sont nommés en vertu d’actes signés par l’exécutif.
3Le garde des Sceaux est également responsable devant le Parlement de l’exécution du budget de la justice, qu’il prépare… Bref, les compétences en matière de gestion des moyens sont partagées, principalement entre les pouvoirs exécutif et législatif, et la véritable question posée est celle de savoir s’il ne faut pas renforcer le poids du pouvoir judiciaire dans la détermination et la gestion des moyens alloués à ce service public par les deux autres pouvoirs.
4En ce qui concerne la gestion des effectifs, la séparation/coopération des pouvoirs se traduit par une autonomie et une indépendance de la magistrature par rapport aux autres pouvoirs qui, en Europe, prend le plus souvent la forme d’un conseil de justice. Sous des modalités variées selon les pays, il est généralement chargé de recruter et promouvoir les magistrats dans des conditions qui garantissent cette indépendance par rapport aux autres pouvoirs. Un autre article de ce numéro (cf. l’article de Mme Mireille Imbert-Quaretta) étant consacré au Conseil supérieur de la magistrature (CSM), les propos suivants seront centrés sur la question de l’autonomie budgétaire.
Une question rarement posée en France mais parfois à l’étranger
5Le CSM entré en fonction début 2011 a immédiatement posé la question de son autonomie budgétaire (rapport d’activité 2011, p. 21). Dès son communiqué du 3 février 2011 (rapport d’activité 2011, p. 285), « Le Conseil considère la mise en œuvre effective de cette autonomie comme indispensable à l’exercice de son rôle constitutionnel et au respect de son indépendance ».
6Sa demande n’a toutefois pas été prise en considération, comme ne l’avait pas été en 1946 celle du CSM sous la présidence de Vincent Auriol.
7La loi organique n° 2010-830 du 22 juillet 2010, concrétisant la volonté du législateur de renforcer l’indépendance du CSM, a modifié l’article 12 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994, en prévoyant que « l’autonomie budgétaire du Conseil supérieur de la magistrature est assurée dans les conditions déterminées par une loi de finances ».
8Mais, dans sa décision n° 2010-611 DC du 19 juillet 2010, le Conseil constitutionnel a interprété restrictivement la portée de cet article en jugeant « qu’en conférant au Conseil supérieur de la magistrature, l’autonomie budgétaire, le législateur a entendu confier à la loi de finances le soin de créer un programme permettant de regrouper de manière cohérente les crédits de ce Conseil ».
9Cette réserve d’interprétation a eu pour effet de laisser la France au milieu du gué en ce qui concerne l’autonomie financière de son conseil de justice : si son budget ne dépend plus de celui de la direction des services judiciaires (programme 166) – il est devenu autonome (programme 335) –, le CSM n’a été intégré ni dans la mission « Conseil et contrôle de l’État », où figurent depuis 2005 le Conseil d’État et les juridictions administratives, le Conseil économique, social et environnemental, la Cour des comptes et les juridictions financières ainsi que depuis 1993 la Cour de justice de la République, ni dans la mission « Pouvoirs publics » (rapport d’activité 2011, p. 27 et 31 ; rapport d’activité 2012, p. 13 à 15). La solution apportée en 2011, même si elle marque un progrès, reste imparfaite et contingente et il faudra aller plus loin [1].
10On mesure à travers cet épisode combien, dans la culture politique française, la question de l’autonomie budgétaire est considérée comme secondaire et largement étrangère à l’organisation de la séparation des pouvoirs.
11Elle a pourtant donné lieu en juin 2012 à un rapport du Club des juristes « Pour une administration au service de la justice » qui a notamment suggéré une nouvelle architecture budgétaire pour assurer l’indépendance de la justice (p. 70 et s.). L’architecture proposée créait une nouvelle mission « Autorité judiciaire » au sein de la Mission « Conseil et contrôle de l’État », y intégrait le greffe mais séparait le siège et le parquet, introduisait un nouveau programme « évaluation » et proposait de confier au premier président de la Cour de cassation la fonction de directeur des programmes de la mission.
12Elle pourrait rebondir en 2017 suite à la mise en place par la Cour de cassation en juillet 2016 d’un groupe de travail dédié à l’organisation budgétaire de l’autorité judiciaire, dont les conclusions sont attendues au premier semestre 2017.
13Il n’en va pas de même à l’étranger. La réforme intervenue aux Pays-Bas en 2002 a spécifiquement concerné la gestion budgétaire des juridictions (hormis les cours suprêmes). Selon l’analyse faite dans ce pays, la séparation des pouvoirs implique l’autonomie de gestion des juridictions, l’absence d’intervention directe de l’exécutif dans la répartition des moyens alloués aux juridictions et un dialogue objectivé entre le Conseil de la magistrature, le ministre de la Sécurité et de la Justice et le Parlement pour fixer le budget triennal de la justice. La Suède, sans aller aussi loin, a confié à une agence la gestion des cours et tribunaux et des moyens de la justice.
14L’Espagne illustre un autre modèle de compromis : si le conseil général du pouvoir judiciaire exerce un pouvoir de gestion des tribunaux, le ministère de la Justice et les communautés autonomes restent responsables des moyens budgétaires et immobiliers fournis aux juridictions.
Un exemple original : la gestion de ses moyens par la juridiction administrative
15Depuis le 1er janvier 1989, date à laquelle les cours administratives d’appel (CAA) ont commencé à juger, le Conseil d’État (CE) est chargé de la gestion de la juridiction administrative (JA), à savoir 52 juridictions (42 TA, 8 CAA, la Cour nationale du droit d’asile ou CNDA et le CE) et 3 600 agents, dont 1 200 magistrats actifs en juridiction.
16Le budget de la JA, qui s’élevait à 65 millions d’euros constants en 1990, est passé à 121 millions d’euros constants en 1995, et les effectifs, qui étaient de 1 016 en 1990 sont passés à 2 015 en 1995, témoignant de l’effort qui a accompagné la création des CAA et le transfert de la gestion de la juridiction administrative au CE. Son budget a été de 259 millions d’euros en 2015. Sa gestion est assurée par 440 agents, sous l’autorité d’un secrétaire général-adjoint du CE, chargé de la gestion des TA, des CAA et de la CNDA.
17Le CE recrute, forme et gère les magistrats, avec l’assistance du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel, qui est également consulté sur l’organisation et le fonctionnement des juridictions. Les personnels des greffes des TA et CAA, qui appartiennent du fait de l’histoire à des corps des ministères de l’Intérieur ou de l’Outre-mer (attachés, secrétaires ou adjoints administratifs), sont affectés dans les greffes de la JA par décision du vice-président du CE et rémunérés sur des emplois relevant du budget de la JA. À la différence de ce qui se passe dans les juridictions judiciaires, les agents de greffe sont placés sous l’autorité exclusive du président de juridiction.
18Le vice-président du CE est l’ordonnateur principal de ce budget. À ce titre, il répartit les crédits d’investissement (immobilier et équipement informatique principalement). Les crédits de fonctionnement (entretien courant, fournitures, frais de justice…) sont, pour l’essentiel, délégués aux juridictions, dont les présidents sont ordonnateurs secondaires, mais une partie d’entre eux donne lieu à des marchés négociés au niveau national. La mise en place de l’application Chorus en 2011 s’est toutefois traduite par une recentralisation des opérations de dépense et de comptabilité.
19À partir de 2002, ont été signés des contrats d’objectifs et de moyens avec les CAA précisant les performances à atteindre, les réorganisations à conduire mais aussi les moyens en effectifs et crédits nécessaires à cet effet. Ce système de gestion a été abandonné en 2009 au profit des projets de juridiction pour trois ans mais reste employé pour les juridictions nouvelles ou en difficulté. Une conférence de gestion tenue en fin d’année avec le CE permet de dresser l’état d’avancement du contrat ou du projet et d’ajuster les prévisions budgétaires pour l’année suivante.
20La gestion centralisée a également permis de standardiser toutes les applications informatiques de la JA, en matière de gestion financière et comptable mais aussi métier (saisine des juridictions par voie électronique ; enregistrement et suivi des affaires ; gestion des statistiques, bases de données jurisprudentielles…). Grâce à toutes ces applications, il est désormais possible de suivre l’état des stocks par ancienneté d’affaire et de piloter l’activité juridictionnelle en jugeant en priorité les affaires les plus anciennes et les plus urgentes.
21Il ne faut pas sous-estimer non plus l’importance de la maîtrise complète par le CE du Code de justice administrative qui régit les règles de compétence et de procédure applicables à la JA. Ces règles sont modifiées par lui au fil de l’eau pour accompagner les réformes souhaitées et maintenir à bon niveau la productivité de la JA. Comme elles touchent à des matières sensibles (suppression de l’appel ; traitement des affaires simples par ordonnance des présidents ; dispense de conclusions du rapporteur public ; jugement à juge unique ou en formation restreinte ; durcissement des règles de recevabilité…), elles sont parfois contestées mais n’ont pas soulevé d’opposition majeure jusqu’ici.
22En outre, la JA s’est dotée de règles internes pour optimiser l’activité contentieuse dans l’intérêt des justiciables (règlement des questions de compétence interne à la JA par le président de la section du contentieux du CE ; renvoi pour avis au CE des questions de droit nouvelles se posant dans de nombreux litiges ; traitement des séries…). Depuis les années 1980, le législateur a également doté la JA de procédures d’urgence efficaces et de plus en plus utilisées (astreintes ; référé-suspension et référé-liberté…). Et il n’existe pas au sein de la JA de droit à la rébellion contre les décisions du CE : si des cours et tribunaux font preuve de davantage de créativité que d’autres, toutes les juridictions s’inclinent dès que la Cour suprême s’est prononcée, ce qui assure une cohérence et une prévisibilité relatives à la jurisprudence.
23La gestion des moyens de la JA par le CE a contribué, au plan des principes et dans les faits, à renforcer l’indépendance et l’unité de la JA.
24Au plan pratique, elle a permis au CE, sans passer par l’intermédiaire de la Chancellerie, de mener directement les discussions budgétaires de la JA avec le ministère de l’Économie et des Finances et de sensibiliser les parlementaires à ses besoins, en période de hausse régulière du contentieux administratif. L’inscription du budget dans la Mission « Conseil et contrôle de l’État » ne garantit pas un montant de crédits mais permet d’échapper à la régulation budgétaire et donne de ce fait une meilleure prévisibilité sur les ressources disponibles de l’exercice, qui favorise les redéploiements et la consommation en temps utile des crédits ouverts.
25Tant que la gestion des TA était assurée par le ministère de l’Intérieur, leurs moyens étaient systématiquement sacrifiés au profit de ceux des préfectures et il fallait des années pour obtenir la création d’un nouveau TA. Par contraste, lorsqu’il a fallu désengorger les TA de l’Île-de-France, surchargés, dans les années 2000, il s’est écoulé à peine plus d’une année entre la décision d’ouvrir un TA à Montreuil à l’été 2008 et son ouverture au public en novembre 2009. Le modèle de la gestion intégrée révèle toute son efficacité dans de telles circonstances.
26Depuis 1989, les indicateurs de la JA n’ont pas cessé de s’améliorer : les stocks ont diminué à tous les degrés et les délais de jugement se sont notablement réduits.
27Depuis le début des années 2010, le rythme de progression annuelle des crédits de la JA s’est très nettement ralenti par rapport à celui de la période 2005-2010 : il est de 1,1 % contre 4,3 % pour les juridictions judiciaires. La JA, qui a bénéficié d’un effort soutenu depuis les années 1990 pour accompagner sa nouvelle organisation en trois degrés de juridiction [2] et se porte plutôt bien, y compris selon la Cour des comptes, semble être rentrée dans le rang et ne bénéficie plus d’un effet de rattrapage.
28Mais en la matière, rien n’est jamais définitivement acquis et les choses peuvent à nouveau se dégrader rapidement.
Les difficultés du juge judiciaire
29Par contraste, les juridictions judiciaires sont aujourd’hui en situation difficile.
30La principale difficulté est que le budget des juridictions, élaboré et supervisé par la direction des services judiciaires (DSJ), pèse peu au sein du ministère de la Justice : les principaux budgets en effectifs et en finance sont ceux de l’administration pénitentiaire et de la PJJ (3,4 milliards d’euros chacun en crédits de paiement dans la loi de finances initiale 2016), à comparer au programme 166 (3,1 milliards d’euros). Les arbitrages ont donc souvent été défavorables aux juridictions. L’état des prisons françaises étant régulièrement dénoncé par le Conseil de l’Europe et par des décisions accablantes de la CEDH ou du CE, il n’est pas illogique non plus de chercher à améliorer leur situation…
31Une autre difficulté tient à l’ancienneté des juridictions judiciaires et à la relative rigidité de leur implantation et de leur gestion.
32Quelques ratios comparés avec ceux de la JA illustrent la différence de situation entre un ordre de juridiction ancien et un ordre plus jeune : les magistrats judiciaires sont 7,7 fois plus nombreux que leurs homologues administratifs, les effectifs de non-magistrats sont dans un rapport de 8,8, les budgets de 11,8 et le nombre de juridictions de 16,8.
33La carte judiciaire est considérée comme rigide et la justice judiciaire doit entretenir un parc immobilier de 2,2 millions de m2, dans un état contrasté depuis qu’il a été transféré des collectivités territoriales à l’État en 1987 (le plus récent coexiste avec des tribunaux à la limite de l’insalubrité). Le poids des effectifs et des crédits nécessaires pour assurer le fonctionnement de toutes ces implantations contraint, dans les arbitrages, les possibilités d’investissement (155 millions d’euros en crédits de paiement dans la loi de finances initiale 2016).
34Le ratio non-magistrats/magistrats ressort en 2016 à 2,05 dans les juridictions civiles, à 1,9 dans les juridictions pénales et à 1,6 dans les juridictions administratives. Le couple magistrat/greffier, même s’il ne fonctionne pas de la même manière, est plus rigide dans l’ordre judiciaire.
35Par ailleurs, le principal niveau de gestion depuis 1996 est celui de la Cour d’appel, dont le service d’administration régional (SAR) gère les crédits d’investissement, l’immobilier, l’informatique, les effectifs, les marchés publics, la formation…. Chacune des 36 CA se voit notifier ses crédits par la DSJ et subdélègue à son tour les crédits de fonctionnement alloués entre elle-même et les juridictions de premier ressort.
36Même s’il existe une classification des juridictions en 4 groupes, avec des indicateurs de performance spécifiques, coexistent des cours et des juridictions plus ou moins bien dotées et plus ou moins performantes, le redéploiement entre cours et tribunaux étant difficile compte tenu de ce choix d’organisation.
37Les décisions de gestion ne sont pas non plus faciles à prendre car prévaut dans les cours la dyarchie entre siège et parquet et dans les juridictions une triarchie avec le greffier en chef.
38Les juridictions dépendent également très largement de la disponibilité des services centraux pour conduire leurs projets immobiliers ou informatiques. L’agence publique pour l’immobilier de la justice (APIJ) conduit les premiers et la sous-direction de l’informatique et des télécommunications (SDIT) de la direction des systèmes d’information du ministère gère les 120 applications métiers des juridictions. La réactivité aux besoins n’est pas la même que dans un système de gestion autonome.
39Enfin, les juridictions souffrent d’un mauvais tour joué par Bercy lors de la mise en place de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) de 2001 : les frais de justice, qui étaient auparavant évaluatifs car imprévisibles par nature, sont devenus limitatifs. Les retards de paiement accumulés à l’égard des fournisseurs paralysent le bon fonctionnement de la justice et celle-ci se débat depuis plusieurs années entre insuffisante dotation initiale et mise sous contrôle de l’engagement de ces frais.
40En mettant en place en juillet 2016 le groupe de travail dédié à l’organisation budgétaire de l’autorité judiciaire, le premier président de la Cour de cassation a évoqué à juste titre les défaillances structurelles et les dysfonctionnements du système judiciaire. L’autonomie de gestion ne leur apportera pas une réponse miracle, même si elle peut y contribuer.
41Cette autonomie de gestion soulève en réalité toute une série de questions nouvelles qu’on ne peut pas traiter de manière isolée : l’aptitude et la capacité à concevoir, à décider en temps utile et à appliquer de manière homogène des réformes au sein d’un ordre juridictionnel ; la capacité à concevoir de manière autonome les outils de gestion, de pilotage et d’évaluation de la productivité adaptés au métier de juge ; la faculté d’adapter en souplesse les implantations juridictionnelles ; la formation d’un corps de gestionnaires ou la conservation d’un corps de juges administrateurs ; la capacité à gérer non pas des effectifs et des postes mais des ressources humaines en trouvant le bon équilibre entre spécialistes et généralistes ; la définition du bon niveau de gestion en plaçant le curseur au bon endroit entre centralisation (frustration des chefs de juridiction [3])/décentralisation (frustration des responsables de programmes) ; un système fiable d’évaluation de la performance des juridictions et de la qualité de la justice par les justiciables pour allouer les moyens de manière objective et transparente et non pas en fonction du pouvoir d’influence des premiers présidents ou procureurs généraux…
42Renforcer l’autonomie de gestion du juge judiciaire accroîtrait l’indépendance de l’autorité judiciaire et faciliterait le nécessaire aggiornamento de cet ordre de juridiction que la Chancellerie, empêtrée dans des intérêts contradictoires, peine à conduire.
43Il n’est toutefois pas certain que les pouvoirs législatif et exécutif verraient d’un bon œil ce pas supplémentaire vers l’émancipation des juges.
Notes
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CSM, Rapport d’activité 2013, « La contribution des conseils de justice à la séparation des pouvoirs », p. 209 et s. Voir notamment sur ce point l’intervention de M. Vincent Lamanda, p. 215, celle de M. Kees Sterk pp. 286 et s., celle de Mme Pauline Koskelo, p. 299, celle de M. Dominique Rousseau, p. 333 ainsi que la synthèse post colloque « Les enseignements à tirer des débats du 130ème anniversaire pour la réforme du CSM », p. 360 et s.
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Les juridictions financières ont bénéficié d’un effort analogue pour installer les chambres régionales des comptes et assumer la mission nouvelle de certification des comptes de l’État confiée à la Cour des comptes.
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Sur ce point, l’organisation actuelle ne semble guère motiver les candidats pour exercer les fonctions de chef de juridiction (Voir l’avis du CSM du 26 novembre 2014 sur le rôle des chefs de cour et de juridiction et les attentes à leur égard, Rapport d’activité 2014 du CSM, p. 223 et s., notamment p. 249-250 sur le ressenti des intéressés quant à la réduction de leurs marges de manœuvre budgétaires et à l’absence de maîtrise des moyens).