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Article de revue

La comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité : 18 mois d'application à Montpellier (1er octobre 2004 – 1er avril 2006)

Pages 109 à 134

Notes

  • [1]
    Oppetit Bruno, Philosophie du droit, Dalloz, coll. Précis, 1999, p.31.
  • [2]
    Loi n°2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, Journal Officiel du 10 mars 2004, p.4567. Loi commentée par LAMY (de) Bertrand, Loi n°2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, Partie I, D. 2004, chron. p.1910-1918, Partie II, D. 2004, chron. p.°1982-1990. Le Guhenec Francis, Loi n°2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité. Première partie, Semaine juridique (J.C.P.), 2004 (14), p. 597-601, Deuxième partie : adaptation et diversification des réponses pénales, Semaine juridique (J.C.P.), 2004 (15), p. 657-660, Troisième partie : Achèvement de la réforme de l’application des peines, Semaine juridique (J.C.P.), 2004 (16-17), p.°713-725. Pradel Jean, Vers un « aggiornamento » des réponses de la procédure pénale à la criminalité. Apport de la loi n°2004-204 du 9 mars 2004 dite Perben II. Première partie, JCP éd. Gen, 2004, doct. 132, p.821-828, Seconde partie, JCP éd. Gén, 2004, doct. 134, p.881-887.
  • [3]
    Pin Xavier, La privatisation du procès pénal, Rev. Sc. Crim. 2002, p.257.
    Une loi du 4 janvier 1993 (Loi n°93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale, JO 5 janvier 1993, p.215) offre au ministère public la possibilité de sortir de la dichotomie traditionnelle entre classement sans suite et poursuite, en instaurant la médiation pénale. Le procureur peut ainsi, recourir à une médiation entre l’auteur de l’infraction et la victime en vue d’obtenir une réparation du dommage, de mettre fin au trouble issu de l’infraction, ou de contribuer au reclassement de l’auteur des faits (art. 41-1 C. pr. pén.). Cette même loi insère dans l’ordonnance du 2 février 1945, relative à l’enfance délinquante, des dispositions permettant de proposer une mesure ou une activité d’aide à l’égard de la victime ou dans l’intérêt de la collectivité (art. 12-1). Fin 1994, le législateur devait permettre au procureur d’éteindre l’action publique après avoir adressé au délinquant une injonction pénale. Le Conseil constitutionnel censura une telle disposition en constatant l’absence d’intervention d’un magistrat du siège lors de cette procédure et l’atteinte à la séparation des fonctions de poursuite et de jugement (CC décision n°95-360 DC du 2 février 1995 JO 7 février 1995, p.2097). Le législateur a donc été amené à envisager une autre alternative aux poursuites pour pallier le fort nombre de classements sans suite et l’« engorgement » des juridictions correctionnelles. Une loi du 23 juin 1999 (Loi n°99-115 du 23 juin 1999 renforçant l’efficacité de la procédure pénale JO du 24 juin 1999 p.°9247), prenant en compte les remarques du Conseil constitutionnel, institua la composition pénale. Figurant aux articles 41-2 et 41-3 du Code de procédure pénale, elle permet au parquet de proposer au délinquant qui reconnaît avoir commis l’infraction l’une des mesures énumérées par la loi ; en cas d’accord, le procureur saisit le président du tribunal aux fins de validation. La loi du 9 septembre 2002 élargit le champ d’application de l’ordonnance pénale aux délits prévus par le Code de la route. Enfin, une loi du 9 mars 2004 intègre la CRPC à notre système juridique.
  • [4]
    Pereira Brigitte, Justice négociée : efficacité répressive et droits de la défense ?, D. 2005, Chron., p.°2041.
  • [5]
    Le plea bargaining, permettant à l’agent de discuter tant la qualification que la sanction, s’applique à toutes les infractions, faisant ainsi tourner le procès autour du plea initial. A l’inverse, la CRPC est cantonnée à certains délits et l’intéressé ne peut négocier la qualification juridique des faits. L’impérieuse nécessité de gagner du temps semble très affirmée, et ce sont d’ailleurs ces exigences temporelles et financières qui ont entraîné l’émergence de cette procédure aux Etats-Unis (Garapon Antoine, Papadopoulos Ioannis, Juger en Amérique et en France, Odile Jacob, Paris, 2003, p.°70). La procédure lourde, coûteuse et aléatoire du jury devient rare (Salas Denis, La volonté de punir. Essai sur le populisme pénal, Hachette Littératures, 2005, p.116-117). Le législateur français n’a pas souhaité pousser si loin la négociation par souci d’une efficacité supplémentaire et car l’échec d’une procédure de CRPC, du fait de son champ d’application limité, entraîne une simple audience correctionnelle et non la mise en œuvre d’un grand procès avec un jury.
  • [6]
    Le « plaider-coupable » dérive du système accusatoire ; et donc imposer une telle procédure dans les pays de tradition romano-germanique, très marqués par l’inquisitoire, peut surprendre. Ce sont deux conceptions différentes du procès. La procédure inquisitoire renvoie à l’idée de faute, la recherche de la vérité constituant l’objet fondamental du procès. La procédure accusatoire renvoie à l’accusation, argumentation logique d’une supposition (Montanari Bruno, La « faute » et l’« accusation » : réflexions sur la vérité dans le procès, Revue Internationale de Droit Pénal, 1997, vol.68, p.44). Dans cette dernière hypothèse, le « plaider-coupable » se justifie car il est fondé sur la liberté individuelle d’une personne développant une argumentation.
    La Recommandation n° R (87) 18, du Comité des ministres du Conseil de l’Europe du 17 septembre 1987, concernant la simplification de la justice pénale préconise une procédure de guilty pleas (anglaise) « chaque fois que les traditions constitutionnelles et juridiques le permettent ».
    De surcroît, en pratique, l’instauration d’une telle procédure de « plaider-coupable » est surprenante puisque lorsque les charges sont évidentes et que la culpabilité ne fait pas de doute, les avocats admettent la culpabilité de leur client devant la Cour d’assises ou le Tribunal correctionnel.
  • [7]
    Le plea constitue la porte d’entrée du procès. Papadopoulos Ioannis, (dir.), « Plaider-coupable ». La pratique américaine. Le texte français, Paris, PUF, coll. Droit et justice, 2004, p.17.
  • [8]
    Pereira Brigitte, Justice négociée : efficacité répressive et droits de la défense ?, D. 2005, Chron., p.°2041.
  • [9]
    A la différence du juge des pays de common law, le magistrat du siège français ne dispose que d’une alternative : celle d’homologuer ou non, il ne peut modifier l’accord intervenu entre le procureur et la personne mise en cause.
  • [10]
    Recommandation n° R (87) 18, du Comité des ministres du Conseil de l’Europe du 17 septembre 1987, concernant la simplification de la justice pénale. Commission Justice Pénale et Droits de l’Homme, La mise en état des affaires pénales, Rapport préliminaire, novembre 1989, p.°57-58. Delmas-Marty Mireille, dir., Procédures pénales d’Europe, PUF, coll. Thémis droit privé, Paris, 1995, p.°565. Saas Claire, De la composition pénale au plaider-coupable : le pouvoir de sanction du procureur, Rev. Sc. Crim. 2004, p.°828.
  • [11]
    Les débats parlementaires ont été intenses sur ce point. En effet, si le Sénat souhaitait que l’audience d’homologation soit publique (Sénat, séance du 8 octobre 2003 : JO Sénat, débats parlementaires, 2003, p.°6408 et s.), l’Assemblée Nationale privilégiait une audience en chambre du conseil (Assemblée Nationale, séance du 22 mai 2003 : JO Assemblée Nationale, débats parlementaires, 2003, p.°4174 et s.). La Commission Mixte Paritaire optera pour le point de vue de l’Assemblée Nationale arguant du fait que l’ordonnance d’homologation serait lue en public. Robert Badinter exprimera ses regrets en affirmant que la publicité des débats est une garantie fondamentale de l’Etat de droit et une protection du justiciable, et que l’on crée ainsi une zone d’ombre dans notre justice (Sénat, séance du 5 février 2004 : JO Sénat, débats parlementaires, 2004, p.°1279 et s.). Et nul besoin d’attendre la condamnation de la Cour européenne des droits de l’homme annoncée par Jean-Pierre Sueur au Sénat lors de la séance du 5 février 2004 (Sénat, séance du 5 février 2004 : JO Sénat, débats parlementaires, 2004, p.°1279 et s. Jean-Pierre Sueur, sans contester la nécessité de procédures plus rapides, estime qu’il importe de respecter les règles qui garantissent un procès équitable, sans quoi, La France sera sans doute condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme), puisque le Conseil constitutionnel a censuré cette disposition tant controversée. En effet, dans sa décision en date du 2 mars 2004, il estime qu’au regard des articles 6, 8, 9 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen le jugement d’une affaire pénale pouvant conduire à la privation de liberté doit, sauf circonstance particulière nécessitant le huis clos, faire l’objet d’une audience publique (CC Décision n°2004-492 DC, du 2 mars 2004, relative à la loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité : JO 10 mars 2004, p.°4637, considérants n°117-118). L’audience d’homologation revêtant le caractère de décision juridictionnelle et pouvant amener à une privation de liberté doit donc se dérouler en public. La publicité constitue l’un des principes fondamentaux de la justice pénale et appartient au droit au procès équitable de l’article 6 de la CESDH. Il semble alors difficile d’admettre que pour ne pas nuire à la suite de la procédure en cas de refus d’homologation la publicité de l’audience puisse être supprimée. D’autant plus que cette homologation survient après un accord secret entre le Parquet et le prévenu. Sans l’intervention du Conseil constitutionnel, suite à cet accord, l’homologation se serait déroulée à huis clos et seule l’ordonnance d’homologation aurait été lue en public, probablement rapidement au début ou à la fin d’une audience correctionnelle. Les parlementaires avaient ainsi institué une procédure presque intégralement secrète contrevenant à un principe fondamental de la procédure pénale. Or la publicité est une garantie protégeant les droits de la défense et permettant de renforcer le crédit des décisions de justice, ce principe ne souffre que de certaines exceptions limitativement énumérées. En ce sens, il importe que la vérification de cet accord opérée par un magistrat du siège se déroule en public pour assurer toute la légitimité nécessaire à une décision juridictionnelle. La justice n’est pas secrète, et à l’heure où le dogme de la transparence règne en maître au sein de l’institution judiciaire, il est difficile de concevoir que la justice puisse se passer de la publicité quand bien même elle se trouverait gouvernée par un impératif de célérité.
  • [12]
    En effet, si la CRPC paraît présenter un avantage certain pour les juridictions importantes, pour celles de plus petite taille, elle peut avoir un effet néfaste. Ainsi la CRPC pourrait participer à la disparition d’audiences correctionnelles qui permettaient jusqu’à présent de maintenir en place certains magistrats.
  • [13]
    D’ailleurs, dans son rapport d’évaluation quant à la mise en place de la CRPC, la Direction des Affaires Criminelles et des Grâces place le Tribunal de grande instance de Montpellier dans le groupe 2 au sein d’une classification en comprenant quatre et dont le premier est dévolu aux juridictions qui connaissent la masse contentieuse la plus importante. DACG, La comparution sur reconnaissance de culpabilité, octobre 2005. Régulièrement la DACG présente des statistiques relatives à l’emploi de la CRPC. Suite à l’évaluation du nombre d’affaires traitées en CRPC, elle opère un classement des juridictions au sein de chaque groupe.
  • [14]
    CC Décision n°2004-492 DC, du 2 mars 2004, relative à la loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité : JO 10 mars 2004, p.°4637, considérant n°107, JCP éd. Gén 2004, Jurisp. 10048, p.619-625, note Zarka. Décision commentée par Dobkine Michel, La constitutionnalité de la loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, D. 2004, Chron., p.°956-958. Lazerges Christine, Le Conseil constitutionnel acteur de la politique criminelle. A propos de la décision 2004-492 DC du 2 mars 2004, Rev. Sc. Crim. 2004, p.°725-736. Schoettl Jean-Eric, La loi « Perben II » devant le Conseil Constitutionnel, Gaz. Pal. 2004, doct., p.°893-913.
  • [15]
    Lazerges Christine, Le Conseil constitutionnel acteur de la politique criminelle. A propos de la décision 2004-492 DC du 2 mars 2004, Rev. Sc. Crim. 2004, p.°725-736.
  • [16]
    Circulaire Crim-04-12-E8 du 2 septembre 2004, présentant les dispositions de la loi n°2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité relatives à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.
  • [17]
    A l’image de la composition pénale, même en l’absence d’accord explicite entre les magistrats du parquet et ceux du siège, après quelques mois d’application et suite à certains refus d’homologation, le procureur connaîtra les exigences du juge du siège pour qu’il homologue et pourra ainsi adapter ses propositions.
  • [18]
    Statistiques du Ministère de la justice. Cité par M. Lemoine, avocat général, dans ses conclusions avant l’avis de la Cour de cassation du 18 avril 2005.
  • [19]
    Circulaire CRIM-AP N°04-18. D2 Tome III, du 3 mars 2006, relative à la mise en œuvre de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité. Cela confirme le taux de réussite de la procédure de CRPC de plus de 85 % avancé dans une circulaire en date du 29 juil. 2005. Circulaire CRIM 2005-19 E8 du 29 juil. 2005, relative à la loi n°2005-847 du 26 juil. 2005 précisant le déroulement de l’audience d’homologation de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, Bulletin Officielle, n°99, 1er juil. – 30 sept. 2005.
  • [20]
    Bastuck Nicolas, A Sarreguemines, la pratique s’est déjà banalisée (à propos de la CRPC), Le Monde, 20 mai 2005. Guibert Nathalie, Le plaider-coupable s’installe dans une grande confusion, Le Monde, 20 mai 2005.
  • [21]
    Circulaire CRIM 04-12-E8 du 2 sept. 2004, présentant les dispositions de la loi n°2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité relatives à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.
  • [22]
    En réponse au questionnaire d’évaluation de la Direction des Affaires Criminelles et des Grâces, vingt-quatre parquets ont indiqué ne pas recourir à la CRPC lorsqu’une peine privative de liberté est encourue. DACG, La comparution sur reconnaissance de culpabilité, octobre 2005, p.°10.
  • [23]
    Cette répartition peut parfois soulever quelques difficultés. Ainsi, en matière de conduite en état alcoolique, il peut arriver qu’un conducteur, pris en état de récidive, voit son cas traité par une ordonnance pénale, alors qu’un délinquant primaire pourrait faire l’objet d’une CRPC. Cependant, quant à cette hypothèse précise d’ordonnance pénale, le magistrat du siège montpelliérain ne suivra pas les réquisitions du procureur de la République.
  • [24]
    Danet Jean, Justice pénale, le tournant, Gallimard, coll. Folio le Monde actuel, 2006, p.°246.
  • [25]
    Ces audiences ont lieu deux mercredis par mois.
    Pour les juridictions les plus importantes, le nombre d’audiences mensuelles de CRPC peut atteindre dix. DACG, La comparution sur reconnaissance de culpabilité, octobre 2005, p.°13.
  • [26]
    Dans la période qui s’étend d’octobre 2004 à septembre 2005, l’ensemble des tribunaux mettant en œuvre la CRPC, le font par convocation pour 95.2 %, et 4.8 % par déferrement. DACG, La comparution sur reconnaissance de culpabilité, octobre 2005, p.°11.
  • [27]
    En effet, si les audiences de CRPC permettaient de supprimer uniquement une audience à juge unique, cela ne présenterait aucun intérêt.
  • [28]
    Circulaire CRIM-AP N°04-18. D2 Tome III, du 3 mars 2006, relative à la mise en œuvre de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.
  • [29]
    Circulaire CRIM 2005-19 E8 du 29 juil. 2005, relative à la loi n°2005-847 du 26 juil. 2005 précisant le déroulement de l’audience d’homologation de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, Bulletin Officielle, n°99, 1er juil. – 30 sept. 2005.
  • [30]
    Circulaire CRIM 2005-19 E8 du 29 juil. 2005, relative à la loi n°2005-847 du 26 juil. 2005 précisant le déroulement de l’audience d’homologation de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, Bulletin Officielle, n°99, 1er juil. – 30 sept. 2005.
    Circulaire CRIM-AP N°04-18. D2 Tome III, du 3 mars 2006, relative à la mise en œuvre de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.
  • [31]
    Il en va ainsi en cas de refus par l’agent de la sanction proposée par le procureur ou de non homologation par le juge du siège. Il en va de même si l’intéressé ne se présente pas lors de l’audience d’homologation ; dans les juridictions qui convoquent à heure fixe l’agent pour homologuer l’accord intervenu avec le procureur, cela impose au juge du siège d’attendre vingt minutes que la personne suivante se présente. A Montpellier, l’agent une fois sorti du bureau du procureur se présente aussitôt devant le juge aux fins d’homologation ; cela permet d’éviter ce genre de désagrément. Cependant, certains agents n’ayant pas nécessairement bien compris le mécanisme de la procédure quitte le tribunal suite à l’audience avec le procureur ; le magistrat du siège alors peut devoir attendre que le prévenu suivant quitte le bureau du procureur.
  • [32]
    Circulaire Crim-04-12-E8 du 2 sept. 2004, présentant les dispositions de la loi n°2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité relatives à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité. Bulletin Officiel n°95, 1er juil. – 30 sept. 2004.
  • [33]
    Cass., avis, 18 avril 2005, n°0050004P : D.2005, IR p.1114 ; D.2005, Jurisp. p. 1200-1201 note Pradel ; JCP G. 2005, Jurisp. 232.
  • [34]
    Circulaire du 19 avril 2005, relatif à l’avis de la Cour de cassation en date du 18 avril 2005 concernant la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité : présence du ministère publique à l’audience où est lue l’ordonnance d’homologation.
  • [35]
    CE, ord. Réf., 11 mai 2005, n°279833. CE, ord. Réf., 11 mai 2005, n°279834 : D.2005, IR p.°1379.
  • [36]
    Les juges du Conseil d’Etat remarquent que le législateur du 9 mars 2004 a précisé les prérogatives du Garde des Sceaux et du procureur au sein des articles 30, 35 et 36 du Code de procédure pénale sans modifier l’article 32 du même code qui doit donc recevoir une pleine application. En effet, la loi du 9 mars 2004 instaure la CRPC comme une nouvelle procédure de jugement des délits et la place dans le Code de procédure pénale au sein du Titre II intitulé « du jugement des délits », cette procédure doit donc respecter les principes généraux de l’audience et notamment la publicité et la présence du procureur.
  • [37]
    Il est à noter également que dans le cadre de la procédure de comparution immédiate, les avocats parfois admettent la culpabilité de leur client devant le juge, essayant alors d’obtenir une sanction appropriée au délinquant et moins sévère. Cela permet notamment au juge de s’attarder sur le choix de la peine qui correspond le mieux à la personnalité du délinquant.
  • [38]
    Guibert Nathalie, Le plaider-coupable s’installe dans une grande confusion, Le Monde, 20 mai 2005.
    En effet, si le procureur se contentait de recevoir l’accord et la signature de l’agent quant à la proposition qu’il a formulée, le gain de temps serait manifeste. Mais à Montpellier, le procureur recueille la reconnaissance des faits par l’agent, ses explications, et veille à ce qu’il comprenne les conséquences de ses actes et la sanction proposée. Cette attitude est d’autant plus louable que l’impératif de célérité posé par cette procédure aurait pu laisser penser que le procureur allait faire des propositions de sanctions relativement faibles pour que l’acceptation de l’agent ne fasse pas de difficulté ; attitude que seul un contrôle véritable du juge du siège lors de l’homologation aurait permis d’éviter.
  • [39]
    Danet Jean, Justice pénale, le tournant, Gallimard, coll. Folio le Monde actuel, 2006, p.°133.
  • [40]
    Pradel Jean, Le ministère public doit-il être présent à l’audience d’homologation dans le cadre de la procédure de plaider coupable ?, note sous Cass., avis, 18 avril 2005, n°0050004P : D.2005, Jurisp. p.°1200-1201.
  • [41]
    Loi n°2005-847 du 26 juil. 2005, précisant le déroulement de l’audience d’homologation de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité : JO n°173 du 27 juil. 2005, p.°12224.
  • [42]
    CC, décision n°2005-520 DC, du 22 juil. 2005 : JO n°173 du 27 juil. 2005, p.°12241 ; Gaz. Pal. Tri-hebdomadaire, n°215-216, 3-4 août 2005, p.°6-12, note Schoettl.
  • [43]
    Si le principe de l’article 32 du Code de procédure pénale selon lequel le ministère public doit être présent auprès de chaque juridiction répressive et qu’il assiste aux débats est absolu, il existe cependant certaines exceptions. En effet, il est expressément prévu que dans l’hypothèse où, après avoir statué sur l’action publique, le tribunal correctionnel renvoie l’affaire à une date ultérieure pour statuer sur l’action civile, la présence du ministère public à l’audience sur intérêts civils n’est désormais plus obligatoire (art. 464 C. pr. pén.).Cette règle est applicable devant la chambre des appels correctionnels (art. 512 C. pr. pén.). Il a, également, été admis que la présence du ministère public n’était pas obligatoire lors du tirage au sort de la liste de session de la cour d’assises (Cass. crim., 23 oct. 1985 : Bull. crim. 1985, n°326).
    Désormais, la procédure de CRPC ajoute une exception supplémentaire au principe selon lequel le ministère public doit être représenté devant les juridictions répressives.
  • [44]
    « Les personnes se trouvant dans des conditions semblables et poursuivies pour les mêmes infractions doivent être jugées selon les mêmes règles ».
  • [45]
    CC Décision n°2004-492 DC, du 2 mars 2004, relative à la loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité : JO 10 mars 2004, p.4637, considérants n°114.
  • [46]
    Egalement, à Montpellier, s’il s’avère important d’entendre un témoin, l’audience correctionnelle traditionnelle semble privilégiée.
  • [47]
    Sénat, séance du 8 oct.2003 : JO Sénat, 2003, débats parlementaires, p.°6415.
    Coujard Dominique, Maisonneuve Patrick et Riberolles Armand, Loi Perben : une réforme dangereuse, Le Monde 12 avril 2003.
  • [48]
    Sénat, séance du 8 octobre 2003 : JO Sénat, 2003, débats parlementaires, p.°6416.
    Circulaire Crim-04-12-E8 du 2 sept. 2004, présentation des dispositions de la loi n°2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité relatives à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, Bulletin Officiel n°95, 1er juil. – 30 sept. 2004. « Elle (la loi) ne prévoit pas en revanche de « négociation » sur la peine entre l’avocat et le procureur de la République ».
  • [49]
    Circulaire Crim-04-12-E8 du 2 sept. 2004, présentant les dispositions de la loi n°2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité relatives à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, Bulletin Officiel n°95, 1er juil. – 30 sept. 2004.
  • [50]
    Toutefois, il importe de souligner que la négociation peut revêtir un intérêt particulier. Les procédures de conciliation et de médiation ont prouvé leur efficacité. Mais dans ces hypothèses, la négociation se déroule entre l’auteur de l’infraction et la victime. Pour la CRPC, comme pour la composition pénale, l’accord a lieu entre l’agent et l’institution judiciaire.
  • [51]
    Benabent Alain, Droit civil. Les obligations, Montchrestien, Paris, 10e éd., 2005, p.°54.
  • [52]
    Ainsi, une victime qui aurait un ressentiment trop important envers l’agent n’est pas admise à assister à l’audience devant le procureur. Elle ne sera présente que lors de l’audience d’homologation.
  • [53]
    Delmas-Marty Mireille, dir., Procédures pénales d’Europe, PUF, coll. Thémis droit privé, Paris, 1995, p. 566.
  • [54]
    Cela porte atteinte aux droits de la défense et peut entraîner certaines dérives. Ainsi, l’agent peut être sanctionné du seul fait de son aveu, ne bénéficiant pas d’un réel droit de la preuve. Et quand bien même il serait véritable coupable de l’infraction, il est alors sanctionné de manière aménagée ce qui ne répond pas à l’exigence de la proportionnalité des peines et aux nécessités répressives.
  • [55]
    L’audience d’homologation doit rester un instant solennel. Il importe de ne pas banaliser l’instant de justice.
  • [56]
    Salas Denis, La volonté de punir. Essai sur le populisme pénal, Hachette Littérature, 2005, p.°165.
  • [57]
    Toutefois, il est à noter que le projet de loi initial prévoyait déjà la présence de l’avocat à chaque étape de la procédure.
  • [58]
    Danet Jean, Le droit pénal et la procédure pénale sous le paradigme de l’insécurité, APC n°25, 2003, p.°37-38.
  • [59]
    Lazerges Christine, La défense sociale nouvelle a 50 ans. L’actualité de la pensée de Marc Ancel, Rev. Sc. Crim., janvier-mars 2005, p.°168.
  • [60]
    Molins François, Le procureur, nouveau pivot de la justice pénale ?, in Journées d’études Dalloz, Le nouveau procès pénal après la loi Perben II, Paris, Dalloz, 8 mars 2004, p.°365-383.
  • [61]
    Pin Xavier, La privatisation du procès pénal, Rev. Sc. Crim. 2002, p.°260.

1« Le droit est médiation entre le juste et le raisonnable, entre l’individuel et le social, entre le consensus et le conflit »[1]. La loi du 9 mars 2004 [2], qui a vu se soulever contre elle l’ensemble des professions judiciaires estimant entre autre qu’elle ne prêtait aucune attention aux droits de la défense, compte parmi ses dispositions phares la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC). Cette nouvelle procédure de jugement des délits constitue un maillon supplémentaire dans le processus de privatisation du procès pénal se traduisant notamment par l’apparition d’une justice consensuelle coexistant avec la justice pénale impérative [3]. La justice négociée n’est plus uniquement la voie médiane entre le renvoi en jugement et le classement sans suite, mais semble comprendre la phase de jugement elle-même [4].

2De nombreuses voix se sont élevées contre ce nouveau mode de jugement des délits. Parmi les critiques les plus souvent formulées, tout d’abord celle selon laquelle le législateur importait en France, la procédure américaine du plea bargaining. Malgré certaines différences [5], ces deux procédures se fondent sur un socle commun : l’aveu de culpabilité. Or, transposer un tel mécanisme procédural en France peut surprendre car cela suppose une vision différente du procès pénal qui n’appartient pas à notre culture juridique [6]. En France, le procès pénal vise à faire émerger la vérité, or avec la CRPC, la vérité en elle-même n’a plus d’intérêt, seul compte l’usage que l’on fait d’un aveu, à savoir le quantum de la peine. A l’inverse, le procès anglo-saxon privilégie cette démarche : se fonder sur la position que prend la personne mise en cause (coupable, non coupable ou sans contestation) pour ensuite discuter des circonstances, de la personnalité de l’agent et de la sanction éventuelle [7]. Avec CRPC, la preuve pénale est fragilisée ; or elle constitue l’objet principal du procès [8]. Il a pu être répondu à cela que la procédure pénale française connaît déjà un dispositif se fondant sur l’aveu de culpabilité du prévenu : la composition pénale. Cependant, celle-ci, à la différence de la CRPC qui constitue un jugement et qui peut entraîner à l’encontre du prévenu un emprisonnement, n’est qu’une alternative aux poursuites permettant de transiger sur l’action publique. Ensuite, la CRPC a été analysée comme modifiant considérablement le rôle du juge. En effet, dans le cadre de cette procédure, la décision véritable n’émane pas du juge, ce dernier se contentant de l’homologuer [9]. La CRPC retire au magistrat la prérogative de juger pour lui substituer celle d’homologuer, de donner son assentiment à un accord survenu antérieurement. Ainsi, la CRPC dénature véritablement la fonction du magistrat du siège qui ne conserve qu’une possibilité de contrôle. Or, si une simplification procédurale a été recommandée par le Comité des ministres du Conseil de l’Europe en 1987 et par la Commission « Justice pénale et droits de l’homme » en 1990 dans l’hypothèse où l’individu reconnaît sa culpabilité, c’était sous réserve que la juridiction de jugement dispose d’un rôle central [10] garantissant ainsi le respect des principes fondamentaux de la procédure pénale. Enfin, l’une des difficultés essentielles de cette procédure nouvelle consiste en la négociation entre le procureur et l’agent. Or la loi n’est pas faite pour transiger ; elle doit s’appliquer. Il semble difficile de concevoir qu’il appartienne désormais au représentant de la société dont l’objectif est l’application de la loi, de discuter, voire de « marchander », en échange d’un aveu de culpabilité. Un tel comportement affaiblit considérablement l’autorité judiciaire.

3Selon les dispositions législatives, entrées en vigueur au 1er octobre 2004, la CRPC est réservée aux personnes majeures et concerne les délits dont la peine encourue est inférieure ou égale à cinq ans d’emprisonnement. Cette procédure permet au procureur de la République, soit d’office, soit à la demande de l’intéressé, de proposer une ou plusieurs peine(s) au prévenu qui reconnaît les faits qui lui sont reprochés (art. 495-7 C. pr. pén.). Ce dernier, assisté de son avocat, comparaît devant le procureur qui constate son identité, lui communique les faits reprochés, recueille la reconnaissance de culpabilité de l’agent et lui propose une sanction. L’emprisonnement ne peut excéder un an ni la moitié de la peine encourue, le montant de l’amende ne peut être supérieur au maximum de l’amende encourue (art. 495-8 C. pr. pén.). Le procureur informe le justiciable qu’il a la possibilité de demander à bénéficier d’un délai de dix jours avant de faire connaître sa réponse. Une fois la proposition acceptée, le prévenu est aussitôt présenté devant le magistrat du siège saisi par le procureur d’une requête en homologation. Le juge, en audience publique [11], doit alors entendre la personne et son avocat, il vérifie la réalité des faits et leur qualification juridique, puis décide d’homologuer ou non la proposition du procureur (art. 495-9 C. proc. pén.). L’ordonnance d’homologation a l’effet d’un jugement de condamnation immédiatement exécutable ; elle peut faire l’objet d’un appel (art. 495-11 C. proc. pén.). En cas d’échec de la CRPC, le procureur de la République recouvre l’opportunité des poursuites, et aucune des parties ne peut évoquer cette procédure devant la juridiction de jugement (art. 495-14 C. proc. pén.). La victime, informée de l’emploi de la CRPC, est invitée à comparaître en même temps que l’auteur des faits devant le juge homologateur (art. 495-13 C. proc. pén.).

4Si la CRPC peut, de façon théorique, contrevenir à certains principes fondamentaux de la procédure pénale, il appartient aux juridictions de mettre en place et de s’approprier cette nouvelle procédure. Montpellier semble être un terrain d’étude particulièrement intéressant quant à l’application pratique de la CRPC. En effet, le Tribunal de grande instance de Montpellier reste soumis à des difficultés semblables à celles des autres juridictions, et tenant à la nouveauté, voire au caractère révolutionnaire, de cette procédure. De plus, sa taille moyenne, lui permettant d’éviter la masse contentieuse que connaissent les grandes agglomérations ou au contraire le faible nombre d’affaires de certains tribunaux [12], lui confère un statut de « miroir » national quant à la mise en place de la CRPC [13].

5La première difficulté relative à l’application de la CRPC a été d’ordre humain. Ainsi, chacun des protagonistes trouvait difficilement sa place au sein de cette nouvelle procédure. Le procureur de la République et l’avocat, traditionnellement opposés lors du procès correctionnel, doivent désormais s’entendre pour trouver la sanction la plus adaptée au délinquant ; chacun des protagonistes étant inquiet de se voir freiné ou restreint dans l’exercice de son rôle traditionnel. Le magistrat du siège entérine l’accord survenu et risquait de devenir une « machine à homologuer », perdant ainsi tout pouvoir d’appréciation, puisqu’une réponse à l’acte infractionnel aura été apportée en amont (sous réserve d’homologation). Inévitablement, une telle mutation des rôles et des fonctions nécessite un temps d’adaptation. Il importe que chacun trouve la place qui lui est dévolue. Quel comportement doit adopter le procureur de la République ? Doit-il être le ferme représentant de la société ou se conduire davantage comme un conciliateur ? En effet, le procureur représente la société et se doit d’exiger l’application de la loi, il n’a pas à négocier. L’avocat doit-il demander la sanction la plus faible possible ou essayer de rester raisonnable face à la proposition du parquet ? L’avocat se doit de défendre au mieux son client en lui évitant une sanction trop sévère ; dans le cadre de cette nouvelle procédure, la fonction traditionnelle de défenseur se transforme en un devoir de conseil envers le justiciable.

6Le Conseil constitutionnel viendra clarifier le rôle du juge homologateur en émettant une réserve d’interprétation constituant un premier coup d’arrêt à la mise en œuvre pratique de cette procédure. Le juge constitutionnel, dans sa décision du 2 mars 2004, estime que le président du Tribunal de grande instance peut refuser l’homologation de la peine proposée, non seulement s’il estime que la nature des faits, la personnalité de l’intéressé, la situation de la victime ou les intérêts de la société justifient une audience correctionnelle ordinaire, mais également si les déclarations de la victime apportent un éclairage nouveau sur les conditions de commission de l’infraction ou sur la personnalité de son auteur [14]. Le Conseil constitutionnel attend de cette audience d’homologation qu’elle respecte les principes directeurs du procès pénal et souhaite rendre au juge certaines de ses prérogatives fondamentales. Ecarté du débat sur le fond de l’affaire qui se déroule en secret avec le procureur, il importe que le juge du siège ait la vue la plus complète de tous les éléments factuels et procéduraux pour décider d’homologuer ou non. Cette réserve d’interprétation est également justifiée du point de vue de la victime. Si celle-ci est informée de l’emploi de la CRPC, elle comparait pour la première fois lors de l’audience d’homologation ; elle doit donc être entendue, et si ses dires apportent un éclairage nouveau sur l’affaire il incombe au juge d’en tenir compte. Mais de la sorte, ce que l’audience d’homologation gagne quant au respect des principes fondamentaux de la procédure pénale, elle le perd en célérité. Ainsi, la procédure conçue initialement comme rapide devient plus complexe [15]. A Montpellier, le magistrat du siège prend le temps de revenir sur les faits, la personnalité du délinquant et d’entendre les explications avancées. Il joue pleinement son rôle de juge.

7Quant aux fonctions précises que doivent tenir respectivement le procureur et l’avocat lors de la mise en œuvre concrète de la CRPC, il semble désormais qu’à Montpellier chacun ait pris la mesure du rôle qu’il doit tenir lors des différentes étapes de cette procédure. Même les avocats, perçus initialement comme fortement opposés à la CRPC, tendent à « prendre leur marques ». Connaissant le procureur qui se trouve face à eux lors de la discussion sur la peine, ils savent quels sont les arguments à avancer, et les seuils de sanction en dessous desquels il ne descendra pas. Le procureur de la République a désormais pris la mesure de son nouveau rôle et sait moduler son attitude entre fermeté et consensus en fonction de l’agent qui se présente face à lui et des faits reprochés.

8Cependant, cette nouvelle distribution des rôles lors du procès pénal constitue le fil conducteur de l’application pratique de la CRPC. Au-delà de la mutation des fonctions des intervenants dans le procès pénal, cette procédure impose une véritable collaboration entre les différents acteurs judiciaires. Si la CRPC a fait l’objet de nombre de critiques au plan théorique avant son entrée en vigueur, une application pratique intelligente ne peut-elle pas donner à cette procédure une ampleur véritable ? En ce sens, il importe d’analyser cette procédure au regard des intérêts qui justifient aux yeux du législateur un écart quant aux principes fondamentaux de la procédure pénale française, à savoir l’allègement des audiences correctionnelles (I), le gain de temps (II) et la meilleure acceptation de la peine (III).

I – L’impact peu concluant de la CRPC sur l’allègement des audiences correctionnelles

9L’allègement des audiences correctionnelles nécessite en contrepartie le développement de la CRPC. Ce dernier passe par une coopération entre les différents acteurs de cette procédure (A) et surtout par l’augmentation des moyens dont dispose la justice (B).

A – Une coopération entre les acteurs de cette procédure

10Une coopération entre les différents protagonistes était recommandée pour déterminer les modalités d’application de la CRPC au sein de la juridiction. Ainsi, magistrats du siège, du parquet, greffiers et avocats doivent fixer ensemble les règles relatives à la mise en œuvre de la nouvelle procédure. Et, c’est un accord entre le parquet et le barreau qui a permis à Montpellier d’écarter la CRPC dès lors que le procureur pense devoir proposer une peine privative de liberté. Mais cette coopération des acteurs du procès pénal doit impérativement se prolonger pour que la nouvelle procédure perdure. Il appartient au parquet de proposer une telle procédure, aux avocats d’en accepter le système et au magistrat du siège de ne pas bloquer ces initiatives en refusant l’homologation. La Chancellerie, en exigeant des parquets des statistiques relatives à la mise en œuvre de la CRPC, les incite très fortement à employer cette procédure. La collaboration des avocats, quant à elle, reste suspendue aux propositions de peines qui seront faites par le procureur. En effet, s’il souhaite que les justiciables, guidés par leurs avocats, s’orientent vers cette procédure, il doit proposer des peines qui justifient véritablement que le prévenu reconnaisse sa culpabilité.

11La circulaire en date du 2 septembre 2004 précise que pour mettre en place cette procédure de CRPC, il est nécessaire, comme cela a été le cas pour la composition pénale, qu’il y ait une discussion préalable entre le parquet et les magistrats du siège, pouvant porter notamment sur la nature et les critères de choix des peines proposées [16]. Cela peut difficilement se traduire autrement que par l’établissement d’un barème ; et, sauf éclairage nouveau sur l’affaire, il semble inimaginable qu’une fois survenu un tel accord, le juge puisse refuser d’homologuer une peine qui le respecte [17]. Alors, si le ministère public se plie à l’échelle des sanctions mathématiquement posée, le magistrat du siège devrait se transformer en « machine à homologuer ». Les premières statistiques avancées par le Ministère de la justice en attestent : le taux d’homologation s’élève à 81.7% et même 94.4% une fois déduits les refus d’homologation dus à l’absence du prévenu qui ne s’est pas représenté au terme du délai de réflexion dont il avait demandé à bénéficier [18]. Dans sa circulaire du 3 mars 2006, la Direction des affaires criminelles et des grâces précise que depuis le 1er octobre 2004, 29 308 procédures de CRPC ont été initiées avec un taux de succès de 86.7% [19]. La pratique de certains tribunaux confirme cette tendance et, traduisant la parfaite entente entre le procureur et le magistrat du siège, le taux d’homologation lors d’une journée consacrée à la CRPC peut atteindre les 100% [20]. Au vu de ces éléments, c’est bien le parquet qui décide, le juge du siège devant se contenter principalement d’un rôle vérificateur. L’audience d’homologation constitue une garantie du regard d’un juge du siège sur la procédure, mais celle-ci semble extrêmement mince et le contrôle du magistrat du siège risque d’être d’une utilité superficielle.

12Si dans les textes, le juge du siège est libre d’homologuer ou non, en pratique, actuellement à Montpellier, cette liberté d’appréciation est restreinte. En effet, s’il refuse l’homologation, il détruit l’initiative du parquet. Au 15 avril 2006, il n’y avait eu qu’un refus d’homologation depuis la mise en œuvre de la CRPC à Montpellier. L’absence d’homologation est rare car le magistrat du siège « joue le jeu », il ne veut pas nuire aux initiatives du parquet quant à la mise en place du système ; cela ne signifiant pas pour autant qu’il homologue « aveuglément » toutes les propositions faites. Les faibles moyens humains dont dispose le parquet induisent un nombre de dossiers traités en CRPC relativement restreint. Donc en pratique, le magistrat du siège se doit d’homologuer s’il ne veut pas bloquer le développement de cette procédure et les initiatives du parquet qui pourrait lui reprocher son refus d’homologuer. Une fois la procédure davantage installée, le juge du siège aura plus de latitude et pourra refuser d’homologuer sans paralyser cette procédure. Mais pour l’heure, sauf proposition manifestement excessive ou au contraire pas assez sévère, il paraît difficilement concevable que le magistrat du siège refuse l’homologation. Il perd, ainsi, presque tout pouvoir d’appréciation, et se trouve motivé par des impératifs purement administratifs et non judiciaires.

13Pour que la CRPC ait un véritable impact, il faut des moyens. L’avenir de cette procédure appartient au parquet qui doit avoir les moyens humains et matériels pour la mettre en œuvre. La CRPC doit se développer en association avec le barreau, ce qui impose notamment que les peines proposées soient véritablement atténuées pour inciter les avocats à orienter leurs clients vers cette procédure ; et en collaboration avec les magistrats du siège qui doivent, pour l’heure, consentir à un pouvoir relativement restreint qui va croître avec l’augmentation de la masse contentieuse dévolue à cette procédure.

B – Un manque de moyens faisant obstacle à l’allègement des audiences correctionnelles

14Selon les dispositions législatives, la procédure de CRPC est réservée aux personnes majeures et concerne les délits dont la peine encourue est inférieure ou égale à cinq ans d’emprisonnement. La circulaire d’application du 2 septembre 2004 conseille une mise en place progressive de la procédure. Celle-ci devra tout d’abord être réservée aux infractions sans victime et pour lesquelles le procureur ne compte pas proposer une peine privative de liberté. Ensuite, la CRPC a vocation à être mise en œuvre pour toutes les infractions qui entrent dans son champ d’application [21]. Les magistrats du parquet montpelliérain réservent la CRPC à des affaires ne posant pas de difficultés. Le champ d’application de la nouvelle procédure permet d’y inclure notamment l’abus de biens sociaux, le blanchiment, l’escroquerie ou le recel alors que ces infractions complexes nécessitent une recherche des preuves élaborée. A Montpellier, la présence d’une victime n’exclut pas nécessairement l’emploi de la CRPC. Cela ne va pas sans difficulté. En effet, en cas de retard ou d’absence du prévenu, la victime accepte mal cette désinvolture dont elle-même et la justice font l’objet. Egalement, les procureurs montpelliérains dans le cadre de la CRPC se refusent à proposer des peines d’emprisonnement [22]. Et selon toute vraisemblance, ils comptent rester à cette étape première, et n’envisagent pas par la suite de donner à la CRPC sa pleine ampleur en l’employant pour l’ensemble des infractions qui entrent dans son champ d’application. Le Bâtonnier et le parquet se sont mis d’accord pour qu’il ne soit pas recouru à cette procédure si le procureur de la République compte proposer une peine d’emprisonnement. Dans cette hypothèse, les avocats craignaient une emprise trop importante du procureur. En effet, si une peine d’emprisonnement est proposée, l’audience devant le procureur diffère puisque la catégorie de délinquant à laquelle s’adresse la procédure n’est plus la même, la peine proposée consiste en un emprisonnement et non en une simple amende ou une suspension de permis. Le magistrat du parquet se doit d’adopter un comportement autre en retrouvant une certaine sévérité, l’avocat voyant alors son rôle de défenseur se compliquer. Enfin, si l’emprisonnement paraît constituer la réponse pénale la plus appropriée, une véritable audience au sein d’une salle correctionnelle semble préférable quant à l’impact qu’elle peut avoir sur le justiciable, et qui ne se retrouve pas lors d’un entretien au sein d’un bureau avec un membre du parquet suivi d’une homologation dans une salle « déserte » du tribunal. Ces raisons ont incité le parquet montpelliérain à écarter l’emprisonnement des sanctions proposées dans le cadre de la CRPC. Cependant, l’accord survenu entre le barreau et les membres du parquet n’a rien de définitif. En effet, si les magistrats en charge de la CRPC au parquet venaient à changer, ils pourraient tout à fait recourir à cette procédure en proposant des peines d’emprisonnement ferme. La mise en œuvre pratique de cette procédure tient beaucoup à la personnalité des magistrats.

15Les dispositions législatives nouvelles rendent parfois difficilement lisibles les règles relatives à la procédure pénale. Ainsi, la loi du 9 mars 2004, en même temps qu’elle institue la CRPC, a développé le champ d’application de la composition pénale ; ces deux procédures, dont les objectifs sont différents, peuvent s’appliquer désormais aux mêmes infractions. Les impératifs de clarté et de pédagogie de la loi pénale auraient dû conduire à une meilleure répartition de ces procédures en fonction des infractions commises ou des peines encourues. Ce sont les exécutants de ces politiques législatives qui vont devoir orienter les différentes infractions commises vers les réponses pénales qui leur semblent les plus appropriées. Ainsi, à Montpellier, le parquet choisit librement de recourir à l’une ou l’autre de ces procédures, en tenant compte notamment des circonstances, de la personnalité de l’agent et de l’infraction commise. Des barèmes ont été dressés pour permettre une meilleure répartition des infractions en fonction des procédures. En matière de délinquance relative à l’alcool au volant, le parquet montpelliérain a établi des barèmes permettant d’orienter le délinquant vers une ordonnance pénale, une composition pénale ou une CRPC [23]. Cette répartition se fonde sur une politique « intelligente » du parquet de Montpellier consistant à se référer aux textes, certes, mais également à en avoir une interprétation souple, et ne pas considérer qu’il existe entre ces procédures un cloisonnement rigide. Cette répartition est d’autant plus importante que la composition pénale et la CRPC ayant le même champ d’application, il pourrait facilement en résulter une situation d’inégalité entre les justiciables selon que le procureur transige sur l’action publique ou préfère employer le nouveau mode de jugement des délits. A titre d’exemple, un vol à l’étalage peut faire l’objet d’un emprisonnement d’un mois avec sursis devant le tribunal correctionnel, d’une peine atténuée lors d’une CRPC ou d’un simple rappel à la loi. Si la composition pénale consiste en une alternative aux poursuites, la CRPC est un jugement et « concurrence » directement l’audience correctionnelle. La sanction différera selon que la procédure de CRPC sera ou non employée. Cela induit deux conséquences majeures. Tout d’abord, une absence d’homogénéité dans la jurisprudence du tribunal qui pour une même infraction sanctionnera différemment. Ensuite, la création d’un véritable aléa au sein de la justice pénale en ce que la sanction diffère en fonction de la voie procédurale employée : audience correctionnelle ou CRPC. Alors, si comme le souligne Jean Danet, la CRPC fait disparaître l’aléa judiciaire en ce que cette procédure se fonde sur un accord relatif à la sanction intervenant entre le procureur et la personne mise en cause [24], un nouvel aléa survient en amont et dépend de l’orientation procédurale employée.

16Le Tribunal de grande instance de Montpellier organise chaque mois deux audiences de CRPC [25]. Deux magistrats du parquet alternent, seul le juge du siège ne change pas. Parmi les différents modes permettant de recourir à la CRPC, le parquet de Montpellier, comme la plupart des autres juridictions [26], privilégie la convocation doublée d’une citation à comparaître devant le Tribunal correctionnel, permettant de pallier l’hypothèse selon laquelle un prévenu ne se présenterait pas à l’audience de CRPC. A l’inverse, s’il comparaît, l’affaire est rayée du rôle de l’audience du Tribunal correctionnel. Les intéressés se présentent à partir de 9 h devant une salle du tribunal et attendent que le procureur les reçoive. A partir de 10h30, les audiences d’homologation débutent ; lorsqu’un certain nombre de dossiers a fait l’objet d’un accord entre le prévenu et le procureur, la greffière les transfère au magistrat du siège en vue de leur homologation. D’octobre 2004 à août 2005, 58 dossiers avait été traités en CRPC au Tribunal de grande instance de Montpellier, puis 31 lors des mois de septembre et octobre 2005, 21 en novembre 2005, 8 en décembre 2005 et 18 lors des mois de janvier et février 2006. Ces chiffres situent Montpellier aux alentours des 60e à 70e places parmi l’ensemble des Tribunaux de grande instance de France : ceci semble relativement faible pour une juridiction de cette importance, mais le Tribunal de grande instance de Montpellier participe tout de même d’un mouvement d’utilisation croissante de cette nouvelle procédure. Lors du premier trimestre de l’année 2006, ces audiences bimensuelles comportent chacune dix à quinze dossiers. L’un des objectifs de la CRPC est de « désengorger » les audiences correctionnelles. Il semble qu’avec une trentaine de dossiers traités chaque mois, la CRPC ne puisse répondre à cette exigence. Il en faudrait au moins autant chaque semaine pour espérer pouvoir supprimer une audience et demie, voire deux, à juge unique [27]. Mais, une nouvelle fois, la justice se trouve confrontée à une difficulté déjà évoquée au sein de la magistrature depuis de nombreuses années, à savoir le manque de moyens. Cette procédure nécessite du parquet un effort certain pour la mettre en place : il importe que ses membres consacrent du temps aux différents dossiers. A moyens constants pour le parquet, il semble difficilement envisageable à l’heure actuelle que davantage de dossiers soient traités selon cette procédure. La Direction des affaires criminelles et des grâces a été informée par les procureurs généraux du manque de moyen, elle a répondu dans une circulaire en date du 3 mars 2006, que ces difficultés seraient à moyen terme compensées par un allègement des audiences correctionnelles [28]. Cet objectif paraît difficile à atteindre sans au préalable un accroissement des ressources humaines dont dispose la justice. La circulaire du 3 mars 2006 semble inverser le problème : sans l’octroi de moyens supérieurs tant au parquet qu’au greffe, il paraît difficile d’envisager un développement de cette procédure et en corollaire un allègement des audiences correctionnelles. Le parquet montpelliérain, en mettant en œuvre la CRPC, semble alors davantage appliquer des consignes ministérielles qu’être véritablement convaincu par l’intérêt de cette procédure quant à l’allègement des audiences correctionnelles. En effet, pour inciter les parquets des différentes juridictions à mettre en œuvre la nouvelle procédure, la Chancellerie a exigé que des statistiques lui soient présentées chaque mois. Par des circulaires, la Direction des affaires criminelles et des grâces a expressément demandé à ce que les tribunaux qui emploient cette procédure l’étendent à de nouvelles hypothèses de contentieux et utilisent différents modes de saisine [29], et que ceux qui ne l’ont toujours pas mise en place y recourent dans les meilleurs délais [30]. La subordination hiérarchique des magistrats du parquet tend à imposer aux procureurs de fournir des statistiques à la hauteur des espérances ministérielles. La Chancellerie souhaite ainsi mettre en avant l’efficacité et la modernité de la procédure de CRPC. Cependant, ces éléments comptables restent d’ordre purement quantitatif et ne tiennent pas compte du caractère qualitatif des audiences. Ainsi, il est tout à fait possible pour un représentant du parquet de satisfaire aux exigences ministérielles par une multiplication des affaires jugées en CRPC sans prendre le temps nécessaire pour comprendre la situation du prévenu et lui expliquer la sanction. Or cela paraît constituer le seul atout véritable de cette procédure. Ainsi, plus que l’adaptation de la sanction, ce que recherche le Ministère de la justice c’est une gestion efficace des flux.

17En ce sens, le parquet montpelliérain souhaiterait qu’à l’avenir, vingt dossiers soient traités lors de chaque audience de CRPC. Cela pose deux difficultés. Tout d’abord, le seul intérêt véritable de cette procédure est atteint en ce que la multiplication des dossiers lors d’une audience de CRPC ne permet pas au ministère public de consacrer un temps suffisamment important au justiciable. Ensuite, au-delà de l’octroi au parquet des moyens nécessaires pour remplir au mieux son rôle dans le déroulement de cette procédure nouvelle, il importe également d’aménager l’organisation du travail du greffe. A Montpellier, le nombre de greffiers est insuffisant, et la procédure de CRPC est dévolue à une greffière qui se trouverait face à une charge de travail trop importante si cette nouvelle procédure était davantage employée. Le seuil de vingt dossiers semble constituer un maximum, une fois dépassé, il incombera au greffier en chef de prendre des mesures visant à aménager le travail du greffe quant à la CRPC pour répondre aux impératifs de développement souhaités par le parquet. Actuellement, il semble difficile d’exiger de la justice un développement raisonnable de cette procédure si les pouvoirs publics ne lui octroient pas des moyens à la hauteur de sa mission. Cela consisterait en un accroissement des moyens humains du parquet et en un recrutement de greffiers supplémentaires en vue de répondre aux exigences ministérielles.

18Ainsi, peut-être plus que l’allègement des audiences correctionnelles, l’apport de cette procédure après dix huit mois d’application au sein du Tribunal de grande instance de Montpellier réside en un véritable échange entre les différents intervenants qui tiennent compte des impératifs de chacun. Cette collaboration est indispensable pour que la CRPC se développe, et doit s’accompagner des moyens budgétaires nécessaires. Le législateur doit octroyer à la justice les moyens lui permettant de mener à bien sa mission.

II – Un gain de temps pratique au mépris des principes directeurs du procès pénal

19Le gain de temps n’est envisageable qu’en cas de réussite de la CRPC. En effet, dans l’hypothèse inverse, l’affaire reprend le circuit normal des poursuites, le procureur pouvant saisir la juridiction correctionnelle [31]. Si en pratique, la CRPC dont l’accord survenu entre l’agent et le procureur fait l’objet d’une homologation, permet un gain de temps certain (B), cela ne peut se faire au mépris des principes directeurs du procès pénal (A).

A – L’absence du procureur lors de l’audience d’homologation

20Un premier frein à cet impératif de gain de temps a été posé par la Cour de cassation puis le Conseil d’Etat qui vont pointer du doigt l’absence du procureur de la République lors de l’audience d’homologation. En effet, la circulaire du 2 septembre 2004 estime que le ministère public n’a pas à être présent lors de l’audience d’homologation affirmant qu’il n’y a pas lieu à débat puisque des aveux ont déjà été obtenus et que la présence du procureur pourrait transformer le juge du siège en négociateur [32]. Saisie en application de l’article 706-4 du Code de procédure pénale de trois demandes d’avis formulées par le Tribunal de grande instance de Nanterre posant la question de savoir si le ministère public devait être présent lors de la phase d’homologation de la proposition de peine, la Cour de cassation, allant à l’encontre des conclusions de l’avocat général, a émis un avis défavorable sur ce point le 18 avril 2005 [33]. Elle précise la procédure applicable en cas de CRPC et énonce que le procureur de la République est tenu, conformément à l’article 32 du Code de procédure pénale, d’assister à l’audience d’homologation ; en effet, selon cet article, le ministère public « est représenté auprès de chaque juridiction répressive. Il assiste aux débats des juridictions de jugement ; toutes les décisions sont prononcées en sa présence ». Pour contourner cet avis, le Ministère de la justice émet dès le 19 avril une nouvelle circulaire [34]. Elle rappelle dans un premier temps la valeur non contraignante de l’avis de la Cour de cassation et affirme que le procureur de la République se doit d’être présent lors de la lecture de l’ordonnance d’homologation en audience publique. Enfin, la circulaire précise qu’ainsi il est tenu compte de la décision du Conseil constitutionnel et partiellement de l’avis de la Cour de cassation. C’est alors que le Conseil d’Etat, saisi en référé par le syndicat des avocats de France, ordonne la suspension de la circulaire du 2 septembre 2004, en ce qu’elle n’impose pas au parquet d’être présent lors de l’audience d’homologation, et de la circulaire du 19 avril 2005 au motif que « le moyen tiré de ce que la circulaire méconnaît les dispositions combinées des articles 495-9 et 32 du Code de procédure pénale est propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la circulaire »[35]. Le Conseil d’Etat reconnaît qu’il ne faut pas assimiler l’audience d’homologation de la CRPC à une audience correctionnelle traditionnelle, mais que, comme l’avait souligné la Cour de cassation dans son avis, il s’agit tout de même d’une audience préalable à une prise de décision qui doit donc respecter l’article 32 du Code de procédure pénale imposant au ministère public d’assister aux débats des juridictions de jugement [36].

21L’utilité de la CRPC, quant au gain de temps, est remise en cause. En effet, dès la circulaire du 2 septembre 2004, le Ministère de la justice soulignait que la présence du procureur de la République lors de l’homologation rendrait la CRPC sans effet pratique. L’un des objectifs de cette procédure était de faire gagner du temps [37] ; après un passage dans le bureau du procureur, l’agent pénétrait dans la salle d’audience pour voir l’accord homologué (sans que le procureur ne soit présent), cela permettait sans nul doute de gagner du temps. Cependant, il ressort des premières mises en œuvre de cette procédure que le rendez-vous avec le procureur peut être assez long [38]. Alors, si de surcroît, ce dernier doit être présent à l’audience d’homologation, la CRPC perd de son utilité en terme de gain de temps, et devient même « chronophage » [39]. Ces décisions remettaient en cause l’un des objectifs principaux de cette nouvelle procédure, et pouvaient compromettre ainsi sérieusement l’avenir de la CRPC du fait d’un alourdissement procédural [40].

22Pour contourner ces décisions, le législateur est intervenu le 26 juillet 2005, par un texte comportant un article unique précisant au sein de l’article 495-9 du Code de procédure pénale que « la procédure prévue par le présent alinéa se déroule en audience publique ; la présence du procureur de la République à cette audience n’est pas obligatoire »[41]. Par une décision lapidaire, le Conseil constitutionnel considérera cette loi conforme à la Constitution [42]. Ce texte spécifie davantage ce mode de jugement puisque non seulement il se fonde sur un aveu initial de culpabilité mais de surcroît, le ministère public peut s’abstenir d’être présent lors de l’audience d’homologation [43]. Ainsi, cette procédure porte atteinte au principe du contradictoire puisque l’une des parties principales sera absente lors du jugement, or une audience pénale ne peut se limiter à une confrontation entre le prévenu et la victime. La présence du procureur permettra au magistrat du siège d’exercer pleinement son office en demandant au représentant du ministère public des explications sur la qualification juridique des faits, sur la peine proposée et sur la régularité de la procédure. Pour envisager un véritable contrôle du juge du siège, le parquet se doit d’être présent lors de l’audience d’homologation. De plus, il y a une atteinte au principe d’égalité devant la justice ; en effet en fonction de la voie procédurale privilégiée, l’agent se trouvera soit seul devant le magistrat du siège soit en opposition avec le parquet. Le Conseil constitutionnel n’a pourtant pas estimé qu’il y avait une atteinte au principe d’égalité devant la justice expressément affirmé au sein de l’article préliminaire du Code de procédure pénale [44] ; il affirme en effet que la CRPC n’induit pas de discriminations injustifiées entre les personnes poursuivies pour les mêmes faits selon qu’elles reconnaissent ou non leur culpabilité, et que dans les deux hypothèses, les droits de la défense et la présomption d’innocence sont respectés [45].

23Les prises de positions successives de la Cour de cassation, du Conseil d’Etat puis du législateur ont eu des répercussions en pratique. A Montpellier, dans un premier temps, le procureur n’assistait pas aux audiences d’homologation, puis devant la controverse, un représentant du parquet était présent. Enfin, depuis la loi du 26 juillet 2005, le ministère public n’assiste plus à l’audience d’homologation. Sa présence induisait une véritable charge supplémentaire pour le parquet et ne lui permettait pas de gagner le temps escompté par cette procédure nouvelle. Si en effet, son absence est regrettable au regard des exigences du procès pénal, en pratique la proposition de peine se retrouve par écrit dans le procès-verbal transmis au juge homologateur, et devant la répétition des infractions qui donnent lieu à ce type de procédure, ce dernier connaît parfaitement les motivations du procureur de la République quant à la sanction proposée.

B – Un gain de temps pratique indéniable

24En pratique, le gain de temps semble pouvoir être considéré comme un objectif atteint de cette nouvelle procédure. Les audiences devant le procureur ou le juge homologateur durent entre dix et quinze minutes. La brièveté de l’instruction à l’audience et l’absence de plaidoiries permettent un indéniable gain de temps [46]. Ainsi, le représentant du parquet et le juge du siège consacrent, lors d’une audience de CRPC, un temps inférieur à celui d’une audience correctionnelle traditionnelle. Cependant, en observant les audiences du procureur et du juge homologateur, ce gain de temps peut ne pas sembler flagrant. En effet, le prévenu et son avocat sont contraints par cette procédure de reprendre à deux reprises leur argumentaire. Devant le procureur, l’objectif est d’essayer d’obtenir la sanction la plus clémente possible ; devant le magistrat du siège ils argumentent pour justifier l’accord survenu préalablement. L’audience devant le procureur se rapprochant ainsi pour l’avocat d’une « répétition » préalablement à celle devant le juge homologateur. De même, les deux magistrats se répètent : le premier pour justifier sa proposition, le second pour légitimer son homologation. D’ailleurs, chacun d’eux profite de l’audience pour adopter envers l’agent un ton véritablement paternaliste dont l’emploi est facilité par le caractère informel de cet entretien, lui conseillant de ne pas réitérer de tels actes auquel cas il s’exposerait à des sanctions plus graves. Si un tel comportement peut se comprendre de la part du juge du siège, il semble plus discutable pour le procureur, et traduit véritablement un transfert des rôles pouvant amener une confusion dans l’esprit du justiciable. En effet, le cadre dans lequel se déroule l’audience devant le procureur peut aisément induire ce comportement envers le délinquant. Autour d’une table la discussion s’engage pour justifier d’un côté le comportement, de l’autre la proposition faite ; et inévitablement le procureur se doit de faire prendre conscience à la personne mise en cause des méfaits commis et de l’avertir des conséquences d’une éventuelle récidive. Cependant le glissement des fonctions qui a pu être craint en théorie, se produit nécessairement en pratique. Cela ne contribue pas à une bonne lisibilité de la justice puisque le prévenu ne comprend pas nécessairement quelle est la fonction de celui à qui il s’adresse, quand bien même l’avocat aurait expliqué cette procédure à l’avance à son client. Cette remarque est d’autant plus pertinente que suite à l’accord, une peine est fixée et inscrite sur un procès-verbal de proposition de peine. Preuve de cette difficulté pour le citoyen à lire cette justice : il arrive que pensant l’affaire réglée, il quitte le tribunal une fois l’audience devant le procureur terminée, sans se présenter devant le magistrat homologateur. Comment concevoir l’application d’une procédure incomprise par les justiciables ? Des impératifs de clarté, de transparence et de pédagogie incombent à la justice. Il importe que le justiciable comprenne la procédure engagée contre lui, et ce sur quoi elle peut déboucher. Au sein même d’une salle d’audience, la personne mise en cause ne sait pas nécessairement à qui elle s’adresse, confondant le juge et le représentant du parquet, alors que les places dévolues à chacun des protagonistes constituent un indice de leurs fonctions respectives. En ce sens, comment concevoir qu’en s’entretenant successivement avec deux magistrats, le justiciable puisse connaître le rôle exact de son interlocuteur ? Bien sûr, les avocats informent leur client, même si cela est parfois un peu rapide notamment pour les avocats de permanence qui prennent connaissance tardivement du dossier et dont la conversation avec le prévenu concerne davantage la sanction proposée et la « stratégie » à adopter devant le procureur. A Montpellier, le représentant du parquet se présente au début de l’entretien et explique ses fonctions, il en va de même pour le magistrat du siège. Mais de telles informations restent abstraites pour celui dont les connaissances dans le domaine juridique sont restreintes. Alors, si déjà au sein d’une salle d’audience, l’agent ne sait pas nécessairement de manière exacte à qui il s’adresse, cette confusion est considérablement accrue lors d’un échange quasi informel dans un bureau ou dans une salle d’audience déserte. Cette nouvelle procédure de CRPC ne participe pas d’une meilleure lisibilité de la justice. Or pour que les citoyens aient confiance en l’institution judiciaire, ils doivent la comprendre. Celle-ci doit faire preuve de pédagogie. S’ajoute une difficulté inhérente à la CRPC, en ce qu’il semble difficile de concevoir qu’une personne mise en cause puisse s’entretenir et s’expliquer quant à son acte devant un magistrat dont il ne comprend pas la fonction. Il semble que l’exigence d’égalité des armes dans le procès pénal impose a minima une compréhension claire du rôle et des fonctions de celui à qui le justiciable s’adresse. Il paraît déjà difficile de concevoir que le principe d’égalité des armes soit respecté dans une procédure où l’agent reconnaît sa culpabilité préalablement à tout débat, mais cela est d’autant plus patent s’il ne sait pas exactement à qui il s’adresse et quelles peuvent être les conséquences de ses déclarations. Si une pratique accrue de cette procédure permettrait d’endiguer de telles difficultés, il importe que la justice dispose de moyens en adéquation avec sa mission, sans quoi la CRPC ne pourra être employée et expliquée davantage, et l’incompréhension des justiciables perdurera.

25Pour l’avocat, le gain de temps est indirect. En effet, il doit s’entretenir avec le procureur puis avec le magistrat du siège. Il passe donc deux fois plus de temps que les magistrats sur une même affaire. Cependant, même si la CRPC peut en amont lui demander un travail plus important sur le dossier, l’avocat évite tout de même une procédure correctionnelle classique. Seul l’intéressé, peut-être, se voit retenu longtemps au tribunal dans le cadre de cette procédure. En effet, il doit attendre que le procureur appelle son dossier. Et si ce dernier tient compte des impératifs des avocats ou de la victime (ne voulant pas la faire attendre), ceux de l’agent n’interviennent qu’en dernier.

26Le législateur voulait que cet impératif de gain de temps s’ajoute à celui relatif à une meilleure acceptation de la peine par le délinquant. Or ces deux exigences sont contradictoires. Pour que le prévenu comprenne véritablement la sanction proposée par le procureur et homologuée par le magistrat du siège, il importe de prendre le temps nécessaire pour l’expliquer.

III – Une meilleure acceptation de peine

27L’audience devant le procureur de la République constitue pour la personne mise en cause l’instant le plus important de cette procédure. C’est face à lui qu’il va falloir au mieux argumenter de manière à éviter une sanction trop importante. Cet exercice est tout de même assez nouveau pour le procureur. En effet, la pratique de la composition pénale n’induisait pas un tel échange entre le représentant de la loi et l’agent ; à Montpellier, le procureur consulte le dossier qui fait l’objet d’une composition pénale et fait des recommandations ; et c’est un délégué du procureur qui rencontre le justiciable. Lors de cet entretien, le représentant du parquet s’en tient aux propositions faites en amont par le procureur, et ne peut les modifier suite aux remarques de l’agent. Avec la CRPC, le représentant du parquet s’entretient avec le prévenu pour discuter au sujet de la peine qu’il propose (A) et lui faire comprendre au mieux les raisons de cette sanction (B).

A – La négociation

28L’une des critiques les plus virulentes émise envers la CRPC consiste à dire qu’il s’agit d’une justice de « marchandage » [47]. Mais il a été répondu que le procureur effectue une proposition que l’agent est libre d’accepter ou non, il n’y a en rien discussion sur la peine [48]. Or la circulaire d’application en date du 2 septembre 2004 prévoit explicitement une discussion autour de la peine en précisant que sur le procès-verbal seule figurera la peine proposée au final par le procureur [49]. Ainsi, il est envisageable que suite à une discussion entre le procureur et l’avocat, la peine proposée initialement soit modifiée. L’avocat peut essayer d’obtenir du procureur une proposition de peine moins sévère. Il peut donc bien y avoir négociation sur la sanction proposée, il ne s’agit pas nécessairement d’une proposition unilatérale du procureur. Le ministère public peut adopter deux types d’attitudes devant une personne qui reconnaît sa culpabilité : soit faire une proposition qui est « à prendre ou à laisser », soit ouvrir une discussion autour de la sanction à envisager. Or cette procédure se veut être une nouvelle forme de jugement des délits ; et s’il importe que la sanction soit adaptée à la personnalité du délinquant, en rien elle ne doit être rendue suite à d’âpres marchandages. La justice se prononce, elle ne se discute pas. Une infraction a été commise, l’autorité judiciaire doit y répondre en son âme et conscience, en écoutant les arguments des parties mais non en négociant [50]. Egalement, au titre de l’article 31 du Code de procédure pénale, le procureur de la République exerce l’action publique et requiert l’application de la loi, il n’est en rien question de discussion au sujet de la sanction. Alors, s’il est admissible que devant une culpabilité flagrante et reconnue, le procureur propose une sanction plus légère et adaptée au délinquant pour éviter une procédure plus longue, la CRPC ne doit pas devenir une incitation à l’aveu où chacun « avancerait ses pions » pour défendre ses positions. Et c’est par souci de masquer cette idée que le Ministère de la justice dans sa circulaire prend soin de préciser que seule figurera au procès-verbal la proposition finale du procureur. La justice se distingue des autres services publics par son autorité, et il paraît difficilement concevable que des négociations puissent être admises en son sein. Si la transaction peut être révélatrice d’une justice intelligente et conciliatrice, elle ne peut se transformer en négociation sur la peine entre le procureur et le prévenu.

29Le consentement donné par l’agent dans le cadre d’une CRPC n’est pas tout à fait le même que celui qu’il avance lors d’une conciliation. Si dans cette dernière hypothèse, le consentement est libre et éclairé, dans le cadre d’une CRPC, ayant déjà admis sa culpabilité, le prévenu ne dispose pas d’une liberté pleine et entière de donner son assentiment. L’accord qui survient entre le justiciable et le procureur semble pouvoir se rapprocher du contrat d’adhésion en droit civil ; le représentant du parquet propose et la personne mise en cause donne son accord. Si effectivement en ce sens, il est envisageable de parler de contractualisation de la réponse pénale, le contrat exige tout de même une volonté des parties qui doit être réelle, libre et consciente, à défaut la volonté ne dispose d’aucun contenu véritable et le droit ne lui octroie pas l’effet créateur d’engagement [51]. Or, dans le cadre de la CRPC, le consentement est-il véritablement libre ? Même si elle ne peut s’analyser comme une violence morale au terme du droit civil, la crainte d’une sanction plus importante altère nécessairement le consentement du prévenu. De ce point de vue, les deux parties ne semblent pas à égalité pour s’accorder sur une peine. Cependant, de l’observation de la pratique montpelliéraine, la CRPC se révèle être une procédure qui sous certains aspects se rapproche davantage de la conciliation que du jugement. Les deux parquetiers chargés des audiences de CRPC ont chacun une attitude différente. L’un propose une sanction élevée qu’il est disposé à réduire face aux justifications apportées par le justiciable ou son avocat ; l’autre propose une sanction réduite qui lui paraît la plus appropriée à la situation et à la personnalité du prévenu, mais n’admet que difficilement de la modifier lors de la discussion. Cependant, cela ne signifie pas pour autant que les accords survenus soient extrêmement variables selon le magistrat du parquet qui a à connaître de l’affaire. En effet, ils ont ensemble dressé un barème en fonction des infractions, et notamment quant à celles relatives à la conduite en état alcoolique selon le taux d’alcoolémie relevé. Les deux magistrats adaptent alors leur proposition de sanction en fonction de la personnalité du délinquant qu’ils ont face à eux et des explications fournies par l’avocat. Concernant la peine d’amende, le magistrat s’informe des ressources du justiciable, tenant compte ainsi de l’article 132-24 du Code pénal relatif à l’individualisation de la sanction.

30Un véritable échange s’installe entre la personne mise en cause et le procureur. Ce dernier commence par rappeler les faits et la sanction qu’il propose pour ensuite demander des explications au prévenu. Aidé de son avocat, l’intéressé essaiera de mettre en avant les circonstances qui ont pu entraîner le passage à l’acte ainsi que certains éléments relatifs à sa situation personnelle. Au vu de ces arguments, le procureur peut envisager de réduire la sanction proposée, notamment pour une amende qui pourrait s’avérer élevée par rapport aux revenus de la personne mise en cause, ou au contraire rester ferme. Les suspensions de permis de conduire par exemple ne font l’objet d’aucun aménagement. Cette pratique de la CRPC met en lumière une véritable justice conciliatrice, ce qui ne ressortait pas nécessairement des textes. Le procureur s’intéresse véritablement à la situation de l’agent et aux difficultés éventuelles qui ont pu le pousser à commettre l’acte infractionnel. Il appartient au procureur de « jongler » avec ce souhait de conciliation et les exigences temporelles. En effet, il ne peut prendre de retard dans la matinée réservée au traitement des dossiers de CRPC, cela induirait de surcroît un retard pour l’audience d’homologation. L’application pratique de cette procédure semble révéler une véritable ambivalence. En effet créée initialement pour gagner du temps, sa mise en œuvre induit une exigence de discussion, d’échange difficilement conciliable avec l’impératif de célérité. L’échange informel que permet cette procédure offre tant au représentant du ministère public qu’au juge du siège l’occasion de discuter avec le justiciable, de comprendre les raisons qui l’ont conduit à passer à l’acte. Il semble dès lors difficile de concilier cet aspect humain d’échange avec celui de célérité. A Montpellier, le représentant du parquet a parfaitement conscience des difficultés que connaissent certains prévenus, il en discute avec eux en vue de proposer la peine la plus adaptée, mais il ne peut approfondir parce que la procédure est conçue pour être rapide et que le magistrat du siège attend pour homologuer. Ce dernier aussi perçoit les difficultés que rencontrent certains justiciables, mais une fois encore, le manque de temps fait obstacle à ce que la personne mise en cause bénéficie de toute l’attention nécessaire. Avec des moyens humains plus appropriés, la justice pourrait assumer pleinement sa mission, et concilier au mieux l’adaptation de la sanction au prévenu et l’exigence de célérité. Certes, ce que la procédure de CRPC gagne en humanité, elle le perd en célérité, cependant le fait de prendre le temps nécessaire à ce que le prévenu comprenne l’interdit pénal et la sanction ne constitue-t-il pas le meilleur moyen d’éviter la récidive ?

31D’autres indices traduisent cette volonté d’échange et de compréhension. Ainsi, le parquet de Montpellier fait part à l’avance, au justiciable et à son avocat, de la sanction qu’il compte proposer. Les audiences ont lieu le mercredi, le prévenu et son avocat sont informés le lundi de la sanction que propose le procureur. La démarche n’était pas envisagée tant par la lettre que par l’esprit du texte. Le procureur proposait une sanction à l’agent convoqué aux fins de CRPC qui, aidé de son avocat, pouvait ou non accepter ; la CRPC constituant un nouveau mode de jugement des délits, l’accent n’était pas mis sur la conciliation, quand bien même la peine se trouve négociée. Disposant à l’avance de la proposition du procureur, le prévenu peut au mieux présenter ses arguments en défense, et donc s’expliquer auprès du représentant du parquet. Une telle pratique facilite la communication et l’échange entre les protagonistes, et permet un gain de temps certain puisque l’agent n’a pas la surprise de découvrir la sanction proposée lors de l’audience.

32Egalement, le Tribunal de grande instance de Montpellier n’excluant pas la CRPC pour les infractions ayant causé un préjudice à une victime, celle-ci peut être invitée à assister à l’audience devant le procureur. Une telle décision appartient à ce dernier qui éventuellement peut être éclairé par l’avocat du prévenu [52]. En rien les textes ne prévoient la présence de la victime lors de l’audience devant le procureur. Cela participe d’un souci constant de conciliation, d’une justice mieux comprise par les citoyens. Ainsi, dans le cadre de violences conjugales, le procureur a admis la présence de la victime, le rôle du procureur se situant alors entre le médiateur, le représentant de la loi et le juge de paix. Le magistrat du parquet sort clairement du cadre rigide des textes pour privilégier une justice conciliatrice. En effet, si dans certaines situations, il est préférable que la personne mise en cause et la victime ne se rencontrent pas tant les « blessures » et les rancœurs sont importantes, dans d’autres hypothèses c’est faire montre d’une justice « intelligente » que de dépasser le cadre légal pour proposer une solution véritable au litige. Particulièrement en matière de violences conjugales, et plus généralement pour les petits litiges envers la personne, il semble pertinent de réunir autour d’une table les différents protagonistes ; et quand la personnalité du prévenu et les circonstances le permettent proposer une réponse pénale différente. Indéniablement, la prépondérance de la parole et de l’échange constitue un atout fondamental pour la justice.

B – Une véritable pédagogie de la sanction

33C’était, après la célérité, l’un des arguments avancés pour justifier du bien fondé de l’intégration de cette procédure. Une entrevue avec le procureur proposant une peine moindre si l’agent reconnaît les faits permet au délinquant de mieux comprendre la portée de son acte et ainsi de mieux en accepter les conséquences à savoir la sanction. Nécessairement, pour démontrer la mansuétude dont il fait preuve, le procureur devra évoquer la peine prévue par le Code pénal et la jurisprudence élaborée par le Tribunal correctionnel en la matière. Il mettra ainsi, le prévenu devant une alternative : accepter la proposition ou prendre le risque d’une peine plus élevée. Mais peut-on dire que jouer sur la crainte d’une sanction plus sévère permette de mieux accepter la peine ? Le délinquant risque de donner son accord par crainte d’une part de comparaître devant le juge, il évite ainsi une plus grande publicité et l’atmosphère souvent pénible d’une salle d’audience, et d’autre part de courir le risque d’une sanction plus importante lors d’une audience correctionnelle. L’optique choisie par le législateur est celle d’une pression faite sur l’intéressé pour qu’il convienne d’un accord et permette ainsi la mise en œuvre d’une procédure plus rapide et non d’une pédagogie visant à ce que la peine soit mieux acceptée. Il s’agit d’un échange consistant en la proposition d’une peine plus légère si l’intéressé évite au ministère public d’avoir à apporter la preuve des faits délictueux [53].

34Si l’un des objectifs avancés au soutien de la nouvelle procédure de CRPC consiste en l’obtention d’une peine plus adaptée et donc plus efficace car acceptée par le délinquant, les textes ne semblent pas retranscrire véritablement cette idée. En effet, le procureur se fonde sur la crainte pour que sa proposition soit acceptée, et le délinquant devient calculateur et doit estimer les risques de subir une sanction plus sévère lors d’une audience correctionnelle classique. L’avocat l’aidera dans ces calculs stratégiques. Cela traduit également une mutation dans le rôle joué par l’avocat : la fonction de conseil prime celle de défenseur. Il a connaissance de la jurisprudence du tribunal, et peut ainsi guider l’agent dans sa décision d’accepter ou non la proposition du procureur. Si en effet le droit est extrêmement technique et qu’il importe de maîtriser tous les méandres de la procédure pour obtenir gain de cause lors d’un procès, la justice ne doit pas jouer sur la crainte des justiciables pour sanctionner « l’infracteur », et ce dans l’unique but de gagner du temps [54]. Alors, si bien évidemment, les droits de la défense sont sauvegardés puisque l’avocat se doit d’être présent à chaque étape de la procédure, sa mission se trouve tout de même modifiée. En effet, il a pour rôle celui de conseiller au mieux son client pour lui éviter une sanction trop importante, de l’orienter quant aux choix à opérer, son rôle de défenseur au sens traditionnellement entendu passe au second plan. Il le recouvrera intégralement dans l’éventualité d’un recours pour nullité de procédure. La CRPC occulte également une partie des droits de la défense en ce que le justiciable renonce au droit de la preuve et au droit au silence en admettant sa culpabilité. Il semble difficile d’admettre que l’exigence de célérité puisse se faire au détriment des droits fondamentaux du procès pénal.

35Cependant, une pratique intelligente de la procédure peut contrecarrer les inconvénients textuels. Ainsi, à Montpellier, avant même l’audience devant le procureur, ce dernier peut avertir par téléphone le prévenu que la sanction proposée, en cas d’homologation, est immédiatement exécutable. Cette exécution immédiate de la sanction participe d’une plus grande célérité dans la réponse judiciaire et donc d’une meilleure compréhension de la peine par le délinquant puisque suite à la décision de justice, la sanction s’applique. Ce souci du parquet d’avertir la personne mise en cause à l’avance de l’exécution immédiate de la sanction (dans l’hypothèse où la proposition a été homologuée), a pour objectif d’éviter le désarroi du délinquant devant l’application immédiate de la sanction. De façon concrète, lorsqu’il arrive au tribunal en voiture, il est possible qu’en fin de matinée, s’il se voit sanctionné d’une suspension ou d’une annulation de permis de conduire, il ne puisse reprendre le volant ; prévenu à l’avance, l’agent pourra prendre ses dispositions. De telles précautions incombent à l’avocat. Cependant, un avocat commis d’office peut ne consulter le dossier qu’en début de matinée et ne connaît pas nécessairement l’identité de son client à l’avance. Cela démontre une fois de plus la collaboration existant entre les différents acteurs de cette procédure.

36Lors des audiences tant devant le procureur que devant le juge du siège, il y a un véritable souci pédagogique. Les magistrats expliquent clairement l’interdit à la personne mise en cause et les risques qu’il encourt en cas de récidive, et qui plus est à deux reprises. Il y a une véritable volonté de faire comprendre à l’intéressé ce qui lui est reproché et d’éviter toute réitération des agissements infractionnels. Ainsi, le procureur explique ce qui motive sa proposition, et pourquoi il se refuse à la réduire. Le magistrat du siège rappelle l’interdit et les conséquences du comportement du prévenu sur la victime réelle ou potentielle. Les deux magistrats ont un véritable souci d’expliquer le lien existant entre la commission des faits et la sanction. Cette pédagogie est beaucoup plus flagrante que lors d’une audience correctionnelle traditionnelle. Certes, lors de celle-ci, les juges ne se contentent pas de sanctionner, mais expliquent, motivent leur décision ; mais ce souci didactique semble accru par la proximité et la quasi absence de formalisme que la procédure de CRPC induit. Un tel comportement des magistrats s’explique notamment par le caractère informel de ces audiences. Celle devant le procureur se déroule dans un bureau du Tribunal de grande instance, celle devant le juge homologateur se déroule dans une salle d’audience certes, mais celle-ci est « déserte ». Cela permet plus de souplesse dans le comportement des magistrats ainsi que des explications plus faciles de la part de l’agent. En effet, même si pour une homologation, ce dernier se présente à la barre d’une salle d’audience face à un magistrat en robe [55], il est plus à l’aise du fait de l’absence de public ; à cela s’ajoute l’absence du procureur, d’autres prévenus, de policiers ou de personnes entravées. Cette absence de public et le manque de solennité, ajoutés au gain de temps et à la perspective d’une peine inférieure, constituent les éléments qui attirent le justiciable vers cette procédure. Il est moins impressionné et s’explique alors de façon plus cohérente et rassurée. S’il ne peut qu’être regretté que l’audience pénale perde de sa solennité, cette facilité de communication induit une meilleure compréhension de la sanction dont l’agent fait l’objet puisqu’il a pu présenter sa défense et se voir expliquer la peine infligée. Ainsi, comparée à certaines audiences correctionnelles surchargées où l’examen des faits, l’individualisation de la sanction, la prise en compte des victimes et les délais de jugement sont loin d’être satisfaisants, la procédure de CRPC, bien appliquée peut répondre à certains maux de la justice.

37L’accord survenu entre la personne mise en cause et le procureur est matérialisé par le procès-verbal de proposition de peine qui sera transmis au juge du siège en vue d’une homologation. A Montpellier, ce document est signé par le procureur, le justiciable et son avocat. L’imprimé ne prévoit pas d’emplacement pour la signature de ce dernier ; mais l’avocat devant être présent, les membres du parquet montpelliérain jugent nécessaire que sa signature figure sur le procès-verbal. Cette remarque peut de prime abord paraître anecdotique, cependant elle participe des modifications successives qu’a connues cette procédure. Ainsi, dans le cadre de la CRPC, les garanties fondamentales quant au procès équitable ont été ajoutées a posteriori[56]. A la procédure initialement prévue dans le projet de loi, les débats parlementaires ont intégré l’impossibilité pour la personne de renoncer à son droit à l’avocat [57], le Conseil constitutionnel exige la publicité de l’audience d’homologation et émet une réserve d’interprétation quant aux prérogatives du magistrat homologateur, enfin, la Cour de cassation puis le Conseil d’Etat soulignent la présence nécessaire du procureur de la République lors de l’audience d’homologation, mais la loi du 26 juillet 2005 viendra spécifier cette procédure en permettant au procureur de ne pas assister à cette audience. Désormais, le législateur ne semble plus guidé par le respect des principes fondamentaux du procès pénal, mais privilégie des réformes tournant autour du paradigme sécuritaire [58].

Conclusion

38Si dans les textes cette procédure semble critiquable, l’application qui en est faite par les différents intervenants à Montpellier témoigne d’un souhait véritable de conciliation, d’une justice mieux comprise. Cela donne à cette procédure une dimension autre de celle qui est présentée dans la loi. L’application faite de la CRPC peut, semble-t-il, se révéler particulièrement pertinente ; et cela tient essentiellement à la personnalité des magistrats qui la mettent en place. Par une interprétation souple des textes qui leur étaient proposés, les magistrats montpelliérains semblent tirer cette procédure vers le haut. A ce titre, la proposition du procureur est faite à l’avance, l’agent est prévenu de l’exécution immédiate de la sanction, les audiences laissent une place non négligeable aux échanges entre les parties, la présence de la victime peut s’avérer importante pour comprendre les agissements de l’intéressé. Si à l’heure actuelle, la CRPC reste dans une phase d’observation, la pratique qui en est faite à Montpellier laisse augurer un développement important de cette procédure si le législateur octroie à la justice les moyens nécessaires à son évolution.

39Cependant, ce nouveau mode de jugement des délits bouleverse l’économie du procès pénal et porte en germe un incontestable changement de culture pour le monde judiciaire. Cette procédure déroge aux principes directeurs du procès pénal. L’avocat voit sa mission de conseil supplanter celle de défense. Le ministère public joue un rôle fondamental au détriment du juge du siège, emblème de la justice, ce qui participe à « un brouillage des repères » [59]. La CRPC met clairement en avant le parquet qui constitue le maillon essentiel de cette nouvelle procédure et, en parallèle, elle réduit les pouvoirs du juge du siège. En corollaire, cette procédure tend à remettre en cause la séparation des fonctions de poursuite et de jugement. Le procureur, en choisissant cette voie procédurale, établit une peine avec le prévenu, le juge du siège se contentant d’homologuer. Dans son ensemble, la loi du 9 mars 2004 fait du procureur de la République le nouveau pivot de la procédure pénale française [60]. Les orientations sécuritaires de la politique criminelle actuelle induisent la mise en valeur principalement de deux maillons de la justice : le parquet et la police.

40Et si de prime abord, la CRPC, à l’image de la composition pénale, paraît empreinte de modernité, il semble qu’elle accompagne la procédure pénale dans un véritable bond en arrière avec un retour au culte de l’aveu. Les personnes sont condamnées pour ce qu’elles ont révélé non pour ce qu’elles ont fait. La recherche de l’aveu est privilégiée à la recherche de la vérité qui pourtant doit constituer l’idéal de justice. Or le procès pénal doit tendre à s’écarter de l’aveu pour éviter les incertitudes qui y sont liées, en privilégiant des modes de preuves plus fiables (en témoigne le développement de la police scientifique), et en protégeant les droits de la défense. Si la CRPC a pour objectif de gagner du temps dans le traitement des délits, cela s’opère à l’encontre de l’esprit de la procédure pénale française notamment en reléguant au second plan la recherche de la vérité pour privilégier la négociation [61]. La CRPC participe d’un mouvement de réforme de la procédure pénale uniquement gouverné par les dogmes de gestion des flux et de gain de temps au détriment des principes fondamentaux du procès pénal.

Notes

  • [1]
    Oppetit Bruno, Philosophie du droit, Dalloz, coll. Précis, 1999, p.31.
  • [2]
    Loi n°2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, Journal Officiel du 10 mars 2004, p.4567. Loi commentée par LAMY (de) Bertrand, Loi n°2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, Partie I, D. 2004, chron. p.1910-1918, Partie II, D. 2004, chron. p.°1982-1990. Le Guhenec Francis, Loi n°2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité. Première partie, Semaine juridique (J.C.P.), 2004 (14), p. 597-601, Deuxième partie : adaptation et diversification des réponses pénales, Semaine juridique (J.C.P.), 2004 (15), p. 657-660, Troisième partie : Achèvement de la réforme de l’application des peines, Semaine juridique (J.C.P.), 2004 (16-17), p.°713-725. Pradel Jean, Vers un « aggiornamento » des réponses de la procédure pénale à la criminalité. Apport de la loi n°2004-204 du 9 mars 2004 dite Perben II. Première partie, JCP éd. Gen, 2004, doct. 132, p.821-828, Seconde partie, JCP éd. Gén, 2004, doct. 134, p.881-887.
  • [3]
    Pin Xavier, La privatisation du procès pénal, Rev. Sc. Crim. 2002, p.257.
    Une loi du 4 janvier 1993 (Loi n°93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale, JO 5 janvier 1993, p.215) offre au ministère public la possibilité de sortir de la dichotomie traditionnelle entre classement sans suite et poursuite, en instaurant la médiation pénale. Le procureur peut ainsi, recourir à une médiation entre l’auteur de l’infraction et la victime en vue d’obtenir une réparation du dommage, de mettre fin au trouble issu de l’infraction, ou de contribuer au reclassement de l’auteur des faits (art. 41-1 C. pr. pén.). Cette même loi insère dans l’ordonnance du 2 février 1945, relative à l’enfance délinquante, des dispositions permettant de proposer une mesure ou une activité d’aide à l’égard de la victime ou dans l’intérêt de la collectivité (art. 12-1). Fin 1994, le législateur devait permettre au procureur d’éteindre l’action publique après avoir adressé au délinquant une injonction pénale. Le Conseil constitutionnel censura une telle disposition en constatant l’absence d’intervention d’un magistrat du siège lors de cette procédure et l’atteinte à la séparation des fonctions de poursuite et de jugement (CC décision n°95-360 DC du 2 février 1995 JO 7 février 1995, p.2097). Le législateur a donc été amené à envisager une autre alternative aux poursuites pour pallier le fort nombre de classements sans suite et l’« engorgement » des juridictions correctionnelles. Une loi du 23 juin 1999 (Loi n°99-115 du 23 juin 1999 renforçant l’efficacité de la procédure pénale JO du 24 juin 1999 p.°9247), prenant en compte les remarques du Conseil constitutionnel, institua la composition pénale. Figurant aux articles 41-2 et 41-3 du Code de procédure pénale, elle permet au parquet de proposer au délinquant qui reconnaît avoir commis l’infraction l’une des mesures énumérées par la loi ; en cas d’accord, le procureur saisit le président du tribunal aux fins de validation. La loi du 9 septembre 2002 élargit le champ d’application de l’ordonnance pénale aux délits prévus par le Code de la route. Enfin, une loi du 9 mars 2004 intègre la CRPC à notre système juridique.
  • [4]
    Pereira Brigitte, Justice négociée : efficacité répressive et droits de la défense ?, D. 2005, Chron., p.°2041.
  • [5]
    Le plea bargaining, permettant à l’agent de discuter tant la qualification que la sanction, s’applique à toutes les infractions, faisant ainsi tourner le procès autour du plea initial. A l’inverse, la CRPC est cantonnée à certains délits et l’intéressé ne peut négocier la qualification juridique des faits. L’impérieuse nécessité de gagner du temps semble très affirmée, et ce sont d’ailleurs ces exigences temporelles et financières qui ont entraîné l’émergence de cette procédure aux Etats-Unis (Garapon Antoine, Papadopoulos Ioannis, Juger en Amérique et en France, Odile Jacob, Paris, 2003, p.°70). La procédure lourde, coûteuse et aléatoire du jury devient rare (Salas Denis, La volonté de punir. Essai sur le populisme pénal, Hachette Littératures, 2005, p.116-117). Le législateur français n’a pas souhaité pousser si loin la négociation par souci d’une efficacité supplémentaire et car l’échec d’une procédure de CRPC, du fait de son champ d’application limité, entraîne une simple audience correctionnelle et non la mise en œuvre d’un grand procès avec un jury.
  • [6]
    Le « plaider-coupable » dérive du système accusatoire ; et donc imposer une telle procédure dans les pays de tradition romano-germanique, très marqués par l’inquisitoire, peut surprendre. Ce sont deux conceptions différentes du procès. La procédure inquisitoire renvoie à l’idée de faute, la recherche de la vérité constituant l’objet fondamental du procès. La procédure accusatoire renvoie à l’accusation, argumentation logique d’une supposition (Montanari Bruno, La « faute » et l’« accusation » : réflexions sur la vérité dans le procès, Revue Internationale de Droit Pénal, 1997, vol.68, p.44). Dans cette dernière hypothèse, le « plaider-coupable » se justifie car il est fondé sur la liberté individuelle d’une personne développant une argumentation.
    La Recommandation n° R (87) 18, du Comité des ministres du Conseil de l’Europe du 17 septembre 1987, concernant la simplification de la justice pénale préconise une procédure de guilty pleas (anglaise) « chaque fois que les traditions constitutionnelles et juridiques le permettent ».
    De surcroît, en pratique, l’instauration d’une telle procédure de « plaider-coupable » est surprenante puisque lorsque les charges sont évidentes et que la culpabilité ne fait pas de doute, les avocats admettent la culpabilité de leur client devant la Cour d’assises ou le Tribunal correctionnel.
  • [7]
    Le plea constitue la porte d’entrée du procès. Papadopoulos Ioannis, (dir.), « Plaider-coupable ». La pratique américaine. Le texte français, Paris, PUF, coll. Droit et justice, 2004, p.17.
  • [8]
    Pereira Brigitte, Justice négociée : efficacité répressive et droits de la défense ?, D. 2005, Chron., p.°2041.
  • [9]
    A la différence du juge des pays de common law, le magistrat du siège français ne dispose que d’une alternative : celle d’homologuer ou non, il ne peut modifier l’accord intervenu entre le procureur et la personne mise en cause.
  • [10]
    Recommandation n° R (87) 18, du Comité des ministres du Conseil de l’Europe du 17 septembre 1987, concernant la simplification de la justice pénale. Commission Justice Pénale et Droits de l’Homme, La mise en état des affaires pénales, Rapport préliminaire, novembre 1989, p.°57-58. Delmas-Marty Mireille, dir., Procédures pénales d’Europe, PUF, coll. Thémis droit privé, Paris, 1995, p.°565. Saas Claire, De la composition pénale au plaider-coupable : le pouvoir de sanction du procureur, Rev. Sc. Crim. 2004, p.°828.
  • [11]
    Les débats parlementaires ont été intenses sur ce point. En effet, si le Sénat souhaitait que l’audience d’homologation soit publique (Sénat, séance du 8 octobre 2003 : JO Sénat, débats parlementaires, 2003, p.°6408 et s.), l’Assemblée Nationale privilégiait une audience en chambre du conseil (Assemblée Nationale, séance du 22 mai 2003 : JO Assemblée Nationale, débats parlementaires, 2003, p.°4174 et s.). La Commission Mixte Paritaire optera pour le point de vue de l’Assemblée Nationale arguant du fait que l’ordonnance d’homologation serait lue en public. Robert Badinter exprimera ses regrets en affirmant que la publicité des débats est une garantie fondamentale de l’Etat de droit et une protection du justiciable, et que l’on crée ainsi une zone d’ombre dans notre justice (Sénat, séance du 5 février 2004 : JO Sénat, débats parlementaires, 2004, p.°1279 et s.). Et nul besoin d’attendre la condamnation de la Cour européenne des droits de l’homme annoncée par Jean-Pierre Sueur au Sénat lors de la séance du 5 février 2004 (Sénat, séance du 5 février 2004 : JO Sénat, débats parlementaires, 2004, p.°1279 et s. Jean-Pierre Sueur, sans contester la nécessité de procédures plus rapides, estime qu’il importe de respecter les règles qui garantissent un procès équitable, sans quoi, La France sera sans doute condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme), puisque le Conseil constitutionnel a censuré cette disposition tant controversée. En effet, dans sa décision en date du 2 mars 2004, il estime qu’au regard des articles 6, 8, 9 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen le jugement d’une affaire pénale pouvant conduire à la privation de liberté doit, sauf circonstance particulière nécessitant le huis clos, faire l’objet d’une audience publique (CC Décision n°2004-492 DC, du 2 mars 2004, relative à la loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité : JO 10 mars 2004, p.°4637, considérants n°117-118). L’audience d’homologation revêtant le caractère de décision juridictionnelle et pouvant amener à une privation de liberté doit donc se dérouler en public. La publicité constitue l’un des principes fondamentaux de la justice pénale et appartient au droit au procès équitable de l’article 6 de la CESDH. Il semble alors difficile d’admettre que pour ne pas nuire à la suite de la procédure en cas de refus d’homologation la publicité de l’audience puisse être supprimée. D’autant plus que cette homologation survient après un accord secret entre le Parquet et le prévenu. Sans l’intervention du Conseil constitutionnel, suite à cet accord, l’homologation se serait déroulée à huis clos et seule l’ordonnance d’homologation aurait été lue en public, probablement rapidement au début ou à la fin d’une audience correctionnelle. Les parlementaires avaient ainsi institué une procédure presque intégralement secrète contrevenant à un principe fondamental de la procédure pénale. Or la publicité est une garantie protégeant les droits de la défense et permettant de renforcer le crédit des décisions de justice, ce principe ne souffre que de certaines exceptions limitativement énumérées. En ce sens, il importe que la vérification de cet accord opérée par un magistrat du siège se déroule en public pour assurer toute la légitimité nécessaire à une décision juridictionnelle. La justice n’est pas secrète, et à l’heure où le dogme de la transparence règne en maître au sein de l’institution judiciaire, il est difficile de concevoir que la justice puisse se passer de la publicité quand bien même elle se trouverait gouvernée par un impératif de célérité.
  • [12]
    En effet, si la CRPC paraît présenter un avantage certain pour les juridictions importantes, pour celles de plus petite taille, elle peut avoir un effet néfaste. Ainsi la CRPC pourrait participer à la disparition d’audiences correctionnelles qui permettaient jusqu’à présent de maintenir en place certains magistrats.
  • [13]
    D’ailleurs, dans son rapport d’évaluation quant à la mise en place de la CRPC, la Direction des Affaires Criminelles et des Grâces place le Tribunal de grande instance de Montpellier dans le groupe 2 au sein d’une classification en comprenant quatre et dont le premier est dévolu aux juridictions qui connaissent la masse contentieuse la plus importante. DACG, La comparution sur reconnaissance de culpabilité, octobre 2005. Régulièrement la DACG présente des statistiques relatives à l’emploi de la CRPC. Suite à l’évaluation du nombre d’affaires traitées en CRPC, elle opère un classement des juridictions au sein de chaque groupe.
  • [14]
    CC Décision n°2004-492 DC, du 2 mars 2004, relative à la loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité : JO 10 mars 2004, p.°4637, considérant n°107, JCP éd. Gén 2004, Jurisp. 10048, p.619-625, note Zarka. Décision commentée par Dobkine Michel, La constitutionnalité de la loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, D. 2004, Chron., p.°956-958. Lazerges Christine, Le Conseil constitutionnel acteur de la politique criminelle. A propos de la décision 2004-492 DC du 2 mars 2004, Rev. Sc. Crim. 2004, p.°725-736. Schoettl Jean-Eric, La loi « Perben II » devant le Conseil Constitutionnel, Gaz. Pal. 2004, doct., p.°893-913.
  • [15]
    Lazerges Christine, Le Conseil constitutionnel acteur de la politique criminelle. A propos de la décision 2004-492 DC du 2 mars 2004, Rev. Sc. Crim. 2004, p.°725-736.
  • [16]
    Circulaire Crim-04-12-E8 du 2 septembre 2004, présentant les dispositions de la loi n°2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité relatives à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.
  • [17]
    A l’image de la composition pénale, même en l’absence d’accord explicite entre les magistrats du parquet et ceux du siège, après quelques mois d’application et suite à certains refus d’homologation, le procureur connaîtra les exigences du juge du siège pour qu’il homologue et pourra ainsi adapter ses propositions.
  • [18]
    Statistiques du Ministère de la justice. Cité par M. Lemoine, avocat général, dans ses conclusions avant l’avis de la Cour de cassation du 18 avril 2005.
  • [19]
    Circulaire CRIM-AP N°04-18. D2 Tome III, du 3 mars 2006, relative à la mise en œuvre de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité. Cela confirme le taux de réussite de la procédure de CRPC de plus de 85 % avancé dans une circulaire en date du 29 juil. 2005. Circulaire CRIM 2005-19 E8 du 29 juil. 2005, relative à la loi n°2005-847 du 26 juil. 2005 précisant le déroulement de l’audience d’homologation de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, Bulletin Officielle, n°99, 1er juil. – 30 sept. 2005.
  • [20]
    Bastuck Nicolas, A Sarreguemines, la pratique s’est déjà banalisée (à propos de la CRPC), Le Monde, 20 mai 2005. Guibert Nathalie, Le plaider-coupable s’installe dans une grande confusion, Le Monde, 20 mai 2005.
  • [21]
    Circulaire CRIM 04-12-E8 du 2 sept. 2004, présentant les dispositions de la loi n°2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité relatives à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.
  • [22]
    En réponse au questionnaire d’évaluation de la Direction des Affaires Criminelles et des Grâces, vingt-quatre parquets ont indiqué ne pas recourir à la CRPC lorsqu’une peine privative de liberté est encourue. DACG, La comparution sur reconnaissance de culpabilité, octobre 2005, p.°10.
  • [23]
    Cette répartition peut parfois soulever quelques difficultés. Ainsi, en matière de conduite en état alcoolique, il peut arriver qu’un conducteur, pris en état de récidive, voit son cas traité par une ordonnance pénale, alors qu’un délinquant primaire pourrait faire l’objet d’une CRPC. Cependant, quant à cette hypothèse précise d’ordonnance pénale, le magistrat du siège montpelliérain ne suivra pas les réquisitions du procureur de la République.
  • [24]
    Danet Jean, Justice pénale, le tournant, Gallimard, coll. Folio le Monde actuel, 2006, p.°246.
  • [25]
    Ces audiences ont lieu deux mercredis par mois.
    Pour les juridictions les plus importantes, le nombre d’audiences mensuelles de CRPC peut atteindre dix. DACG, La comparution sur reconnaissance de culpabilité, octobre 2005, p.°13.
  • [26]
    Dans la période qui s’étend d’octobre 2004 à septembre 2005, l’ensemble des tribunaux mettant en œuvre la CRPC, le font par convocation pour 95.2 %, et 4.8 % par déferrement. DACG, La comparution sur reconnaissance de culpabilité, octobre 2005, p.°11.
  • [27]
    En effet, si les audiences de CRPC permettaient de supprimer uniquement une audience à juge unique, cela ne présenterait aucun intérêt.
  • [28]
    Circulaire CRIM-AP N°04-18. D2 Tome III, du 3 mars 2006, relative à la mise en œuvre de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.
  • [29]
    Circulaire CRIM 2005-19 E8 du 29 juil. 2005, relative à la loi n°2005-847 du 26 juil. 2005 précisant le déroulement de l’audience d’homologation de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, Bulletin Officielle, n°99, 1er juil. – 30 sept. 2005.
  • [30]
    Circulaire CRIM 2005-19 E8 du 29 juil. 2005, relative à la loi n°2005-847 du 26 juil. 2005 précisant le déroulement de l’audience d’homologation de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, Bulletin Officielle, n°99, 1er juil. – 30 sept. 2005.
    Circulaire CRIM-AP N°04-18. D2 Tome III, du 3 mars 2006, relative à la mise en œuvre de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.
  • [31]
    Il en va ainsi en cas de refus par l’agent de la sanction proposée par le procureur ou de non homologation par le juge du siège. Il en va de même si l’intéressé ne se présente pas lors de l’audience d’homologation ; dans les juridictions qui convoquent à heure fixe l’agent pour homologuer l’accord intervenu avec le procureur, cela impose au juge du siège d’attendre vingt minutes que la personne suivante se présente. A Montpellier, l’agent une fois sorti du bureau du procureur se présente aussitôt devant le juge aux fins d’homologation ; cela permet d’éviter ce genre de désagrément. Cependant, certains agents n’ayant pas nécessairement bien compris le mécanisme de la procédure quitte le tribunal suite à l’audience avec le procureur ; le magistrat du siège alors peut devoir attendre que le prévenu suivant quitte le bureau du procureur.
  • [32]
    Circulaire Crim-04-12-E8 du 2 sept. 2004, présentant les dispositions de la loi n°2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité relatives à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité. Bulletin Officiel n°95, 1er juil. – 30 sept. 2004.
  • [33]
    Cass., avis, 18 avril 2005, n°0050004P : D.2005, IR p.1114 ; D.2005, Jurisp. p. 1200-1201 note Pradel ; JCP G. 2005, Jurisp. 232.
  • [34]
    Circulaire du 19 avril 2005, relatif à l’avis de la Cour de cassation en date du 18 avril 2005 concernant la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité : présence du ministère publique à l’audience où est lue l’ordonnance d’homologation.
  • [35]
    CE, ord. Réf., 11 mai 2005, n°279833. CE, ord. Réf., 11 mai 2005, n°279834 : D.2005, IR p.°1379.
  • [36]
    Les juges du Conseil d’Etat remarquent que le législateur du 9 mars 2004 a précisé les prérogatives du Garde des Sceaux et du procureur au sein des articles 30, 35 et 36 du Code de procédure pénale sans modifier l’article 32 du même code qui doit donc recevoir une pleine application. En effet, la loi du 9 mars 2004 instaure la CRPC comme une nouvelle procédure de jugement des délits et la place dans le Code de procédure pénale au sein du Titre II intitulé « du jugement des délits », cette procédure doit donc respecter les principes généraux de l’audience et notamment la publicité et la présence du procureur.
  • [37]
    Il est à noter également que dans le cadre de la procédure de comparution immédiate, les avocats parfois admettent la culpabilité de leur client devant le juge, essayant alors d’obtenir une sanction appropriée au délinquant et moins sévère. Cela permet notamment au juge de s’attarder sur le choix de la peine qui correspond le mieux à la personnalité du délinquant.
  • [38]
    Guibert Nathalie, Le plaider-coupable s’installe dans une grande confusion, Le Monde, 20 mai 2005.
    En effet, si le procureur se contentait de recevoir l’accord et la signature de l’agent quant à la proposition qu’il a formulée, le gain de temps serait manifeste. Mais à Montpellier, le procureur recueille la reconnaissance des faits par l’agent, ses explications, et veille à ce qu’il comprenne les conséquences de ses actes et la sanction proposée. Cette attitude est d’autant plus louable que l’impératif de célérité posé par cette procédure aurait pu laisser penser que le procureur allait faire des propositions de sanctions relativement faibles pour que l’acceptation de l’agent ne fasse pas de difficulté ; attitude que seul un contrôle véritable du juge du siège lors de l’homologation aurait permis d’éviter.
  • [39]
    Danet Jean, Justice pénale, le tournant, Gallimard, coll. Folio le Monde actuel, 2006, p.°133.
  • [40]
    Pradel Jean, Le ministère public doit-il être présent à l’audience d’homologation dans le cadre de la procédure de plaider coupable ?, note sous Cass., avis, 18 avril 2005, n°0050004P : D.2005, Jurisp. p.°1200-1201.
  • [41]
    Loi n°2005-847 du 26 juil. 2005, précisant le déroulement de l’audience d’homologation de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité : JO n°173 du 27 juil. 2005, p.°12224.
  • [42]
    CC, décision n°2005-520 DC, du 22 juil. 2005 : JO n°173 du 27 juil. 2005, p.°12241 ; Gaz. Pal. Tri-hebdomadaire, n°215-216, 3-4 août 2005, p.°6-12, note Schoettl.
  • [43]
    Si le principe de l’article 32 du Code de procédure pénale selon lequel le ministère public doit être présent auprès de chaque juridiction répressive et qu’il assiste aux débats est absolu, il existe cependant certaines exceptions. En effet, il est expressément prévu que dans l’hypothèse où, après avoir statué sur l’action publique, le tribunal correctionnel renvoie l’affaire à une date ultérieure pour statuer sur l’action civile, la présence du ministère public à l’audience sur intérêts civils n’est désormais plus obligatoire (art. 464 C. pr. pén.).Cette règle est applicable devant la chambre des appels correctionnels (art. 512 C. pr. pén.). Il a, également, été admis que la présence du ministère public n’était pas obligatoire lors du tirage au sort de la liste de session de la cour d’assises (Cass. crim., 23 oct. 1985 : Bull. crim. 1985, n°326).
    Désormais, la procédure de CRPC ajoute une exception supplémentaire au principe selon lequel le ministère public doit être représenté devant les juridictions répressives.
  • [44]
    « Les personnes se trouvant dans des conditions semblables et poursuivies pour les mêmes infractions doivent être jugées selon les mêmes règles ».
  • [45]
    CC Décision n°2004-492 DC, du 2 mars 2004, relative à la loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité : JO 10 mars 2004, p.4637, considérants n°114.
  • [46]
    Egalement, à Montpellier, s’il s’avère important d’entendre un témoin, l’audience correctionnelle traditionnelle semble privilégiée.
  • [47]
    Sénat, séance du 8 oct.2003 : JO Sénat, 2003, débats parlementaires, p.°6415.
    Coujard Dominique, Maisonneuve Patrick et Riberolles Armand, Loi Perben : une réforme dangereuse, Le Monde 12 avril 2003.
  • [48]
    Sénat, séance du 8 octobre 2003 : JO Sénat, 2003, débats parlementaires, p.°6416.
    Circulaire Crim-04-12-E8 du 2 sept. 2004, présentation des dispositions de la loi n°2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité relatives à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, Bulletin Officiel n°95, 1er juil. – 30 sept. 2004. « Elle (la loi) ne prévoit pas en revanche de « négociation » sur la peine entre l’avocat et le procureur de la République ».
  • [49]
    Circulaire Crim-04-12-E8 du 2 sept. 2004, présentant les dispositions de la loi n°2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité relatives à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, Bulletin Officiel n°95, 1er juil. – 30 sept. 2004.
  • [50]
    Toutefois, il importe de souligner que la négociation peut revêtir un intérêt particulier. Les procédures de conciliation et de médiation ont prouvé leur efficacité. Mais dans ces hypothèses, la négociation se déroule entre l’auteur de l’infraction et la victime. Pour la CRPC, comme pour la composition pénale, l’accord a lieu entre l’agent et l’institution judiciaire.
  • [51]
    Benabent Alain, Droit civil. Les obligations, Montchrestien, Paris, 10e éd., 2005, p.°54.
  • [52]
    Ainsi, une victime qui aurait un ressentiment trop important envers l’agent n’est pas admise à assister à l’audience devant le procureur. Elle ne sera présente que lors de l’audience d’homologation.
  • [53]
    Delmas-Marty Mireille, dir., Procédures pénales d’Europe, PUF, coll. Thémis droit privé, Paris, 1995, p. 566.
  • [54]
    Cela porte atteinte aux droits de la défense et peut entraîner certaines dérives. Ainsi, l’agent peut être sanctionné du seul fait de son aveu, ne bénéficiant pas d’un réel droit de la preuve. Et quand bien même il serait véritable coupable de l’infraction, il est alors sanctionné de manière aménagée ce qui ne répond pas à l’exigence de la proportionnalité des peines et aux nécessités répressives.
  • [55]
    L’audience d’homologation doit rester un instant solennel. Il importe de ne pas banaliser l’instant de justice.
  • [56]
    Salas Denis, La volonté de punir. Essai sur le populisme pénal, Hachette Littérature, 2005, p.°165.
  • [57]
    Toutefois, il est à noter que le projet de loi initial prévoyait déjà la présence de l’avocat à chaque étape de la procédure.
  • [58]
    Danet Jean, Le droit pénal et la procédure pénale sous le paradigme de l’insécurité, APC n°25, 2003, p.°37-38.
  • [59]
    Lazerges Christine, La défense sociale nouvelle a 50 ans. L’actualité de la pensée de Marc Ancel, Rev. Sc. Crim., janvier-mars 2005, p.°168.
  • [60]
    Molins François, Le procureur, nouveau pivot de la justice pénale ?, in Journées d’études Dalloz, Le nouveau procès pénal après la loi Perben II, Paris, Dalloz, 8 mars 2004, p.°365-383.
  • [61]
    Pin Xavier, La privatisation du procès pénal, Rev. Sc. Crim. 2002, p.°260.
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