« Quelle est la qualité majeure d’un révolutionnaire ? » La réponse à la question, formulée par Che Guevara, et placée en exergue du livre de Micah Alpaugh, surprendra : « l’amour ». On sera moins étonné après avoir lu son livre, l’un des plus révolutionnaires qui soit, au sens étymologique du terme, – « qui bouleverse les principes établis ; qui tend à transformer les modes de pensée », dit le Trésor de la langue française.
Si une chose semble acquise dans l’historiographie nationale et internationale de la Révolution, toutes tendances idéologiques confondues, du xixe siècle à nos jours, c’est le caractère intrinsèquement violent de l’événement, dont la Terreur de l’an II représenterait l’acmé. Cette perspective, plutôt que thèse, le classique Violence et Révolution de Jean-Clément Martin s’est efforcé de la déconstruire ; M. Alpaugh, lui, l’abandonne résolument en proposant une lecture de la Révolution par la non-violence. On saluera le mouvement à rebours des stéréotypes historiographiques qu’il initie. L’auteur s’attache à désembuer l’histoire de la Révolution non pas tant pour mettre en lumière la qualité morale du peuple – cette « longue patience » travaillée par Sophie Wahnich –, qu’afin d’analyser l’intelligence stratégique du peuple face à la violence, instrument de négociation de crise bien davantage qu’émotion disruptive ou incontrôlée.
Mobilisant une documentation rassemblée dans 137 lieux d’archives et bibliothèques d’Europe et d’Amérique, fondées sur la consultation de 1 000 comptes rendus d’événements dans la presse de l’époque, les recherches menées par M…