L’ouvrage dirigé par Didier Lett, fruit d’un colloque qui s’est tenu en 2017, est consacré aux registres de la justice pénale (Libri maleficiorum) dans l’Italie des xiie-xve siècles. Il est révélateur de l’attention renouvelée que les médiévistes portent aux pratiques de l’écrit depuis quelques années. Dès l’introduction, qui dresse un état des lieux précis de l’historiographie italienne en la matière et revient sur le processus d’individualisation de ces registres au fil du temps, D. Lett rappelle à juste titre la nécessité d’étudier ces documents judiciaires non pas comme des isolats, mais comme appartenant à un système documentaire plus global, inscrit dans la longue durée, et de prendre en compte leur porosité avec d’autres écritures publiques (libri iurium, textes législatifs, délibérations communales, registres comptables et fiscaux) ou privées.
Disons-le d’emblée, le mérite de ce volume collectif, auquel ont participé certains des meilleurs spécialistes italiens des pratiques judiciaires, est au moins double : il offre tout d’abord au lecteur (pour peu qu’il lise l’italien) une « géographie des sources » (p. 5) assez variée ainsi qu’une vision panoramique d’une documentation extrêmement disparate, très inégalement conservée et exploitée ; il présente ensuite un condensé des problèmes que celle-ci soulève et des perspectives d’analyse qu’elle permet. Pendant longtemps, les grands centres urbains comme Bologne, Florence ou Sienne ont eu les faveurs de générations d’historiens ; depuis quelques années cependant, un décentrage s’opère en direction des cités plus petites …