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Article de revue

Zone euro : nouveaux débats allemands

Pages 5 à 11

Notes

1 Les débats politiques européens sur l’avenir de la zone euro semblent toujours marqués par le clivage entre le gouvernement allemand, gardien du temple du pacte de stabilité et de la consolidation budgétaire, et les leaders d’autres pays comme la France, pourfendeurs de l’austérité qui serait imposée par l’Allemagne et apôtres d’une politique de croissance. Il est vrai que les visions dominantes des deux pays à l’égard de l’Europe économique et monétaire ne sont pas les mêmes [1], et que la période récente a été marquée par un dialogue des sourds assez stérile : En France, on a tendance à penser que dans la situation économique dégradée, la réduction des déficits n’est pas vraiment la priorité ; certains estiment même que « ce n’est pas le moment » de faire des réformes ; enfin, on se désespère de l’attitude du gouvernement allemand qui se refuse de relancer l’économie allemande et européenne alors qu’elle en aurait les moyens. En Allemagne, on se tient aux obligations européennes de consolider les finances publiques, et on critique la France de ne pas tenir ses engagements depuis des années. En ce qui concerne la croissance, le gouvernement fédéral refuse une relance keynésienne, qui ne serait qu’un feu de paille qui augmenterait la dette sans produire les effets souhaités, et il prône une politique de l’offre qui seule pourrait augmenter le potentiel d’une croissance saine et durable. Dans ce contexte, on se désespère des blocages qui empêchent les réformes structurelles qui s’imposent.

2 Or, si ce clivage semble toujours pertinent pour décrire les positions des deux gouvernements et des courants d’opinion dominants dans nos deux pays, cela ne saurait masquer le fait que les débats scientifiques et politiques sont plus riches, plus diversifiés tant en France qu’en Allemagne. [2] Par ailleurs, ces débats ne sont pas figés : Ils évoluent, et ils commencent à sortir de leurs cadres strictement nationaux. L’objectif de ce texte est de rendre compte de cette évolution du débat allemand, à partir d’un certain nombre de publications parues récemment en Allemagne, et de s’interroger sur l’impact possible sur la politique allemande. Il s’agit tant de textes proprement scientifiques que d’analyses visant plus directement les décideurs politiques qu’on qualifie de policy papers, ou encore de rapports plus politiques. Le choix des textes ne prétend pas à la représentativité ; il se concentre sur des publications qui soutiennent des positions « hétérodoxes » par rapport à la position allemande « officielle », et qui peuvent témoigner ainsi de la richesse et diversité des discussions qui traversent l’Allemagne. Si l’impact politique de ces positions est pour l’instant limité on verra que leurs auteurs sont loin d’être marginaux, et qu’ils commencent à se mettre en réseau.

3 Une bonne partie des textes présentés émane du laboratoire économique DIW (Deutsches Institut für Wirtschaftsforschung à Berlin), qui fait partie du groupe restreint des laboratoires qui nourrissent l’opinion et les pouvoirs publics de leurs analyses et rapports.

4 Dans un ouvrage volumineux publié par le DIW dans le cadre de sa série scientifique, une bonne dizaine d’auteurs portent des regards critiques sur « La politique européenne de consolidation financière durable – chances et défis ». [3] Une première série de contributions se penche sur la crise financière internationale et les tentatives de régulation dans ce secteur. Ainsi le rôle des banques dans la crise financière est-il analysé, en utilisant des approches théoriques variées et en arrivant à des conclusions différentes quant à une « bonne » régulation des banques : Par exemple, faut-il abandonner le système de la banque universelle au profit d’une séparation entre banques de dépôts et d’investissements ? Une contribution cherche à analyser les chances de banques fondées sur des principes éthiques et/ou écologiques. Elle estime un gain d’intérêt public pour le développement durable, qui encourage ces banques, mais renvoie d’autre part sur des inconnues qui pourraient les freiner. Un autre texte traite de la responsabilité des organismes de rating, « faillibles et dépassés » comme le formule le titre de la contribution, dans la crise financière. Les auteurs estiment qu’il faudrait relativiser leur rôle, par exemple en renforçant leur régulation, en favorisant l’émergence d’agences européennes et surtout en réduisant le nombre de normes légales qui s’appuient directement sur les notations des agences. Par ailleurs, le contrat de gouvernement de la grande coalition de 2013 va dans cette direction. Seul texte directement politique émanant d’acteurs politiques, le long extrait du rapport de la commission d’enquête du Bundestag « Croissance, bien-être et qualité de vie », publié en mai 2013, étale une série de propositions concernant la régulation des marchés financiers. Il permet de prendre la mesure du consensus politique large entre les députés sur la nécessité d’une régulation plus stricte, mais aussi les champs de controverses, marqués surtout par des avis minoritaires de la part des députés de gauche.

5 Une deuxième série d’articles est consacrée aux effets des mesures de consolidation budgétaire en Europe. Le regard des auteurs est très critique à cet égard. Une contribution souligne que l’effet multiplicateur des mesures de consolidation (on entend par là les incidences des mesures budgétaires sur l’activité macroéconomique) est particulièrement fort quand l’économie se trouve en période de récession. Par conséquent, les politiques d’austérité imposées aux pays en surendettement auraient produit des effets très négatifs sur la croissance et l’emploi, dont l’économie européenne souffrira encore longtemps. Cela vaut également pour les inégalités des revenus : Dans un texte sur le rapport entre « distribution des revenus, financialisation et déséquilibres macroéconomiques », les auteurs arrivent à la conclusion qu’une inégalité croissante des revenus renforce l’endettement des ménages et les déficits extérieurs d’un pays. Ceci amène les responsables de ce numéro spécial à poser le problème de l’équité sociale des politiques de consolidation budgétaire, qui a été négligé notamment par les mesures imposées aux pays surendettés du sud de l’Europe par la « troïka » (experts du Fonds monétaire international, de la Commission européenne et de la Banque centrale européenne). Et de conclure : « La conception d’une politique européenne de consolidation crédible, consistante et durable s’avère plus urgente que jamais. » (p. 12)

Propositions pour l’avenir de l’Union monétaire

6 La lecture des textes rassemblés dans cet ouvrage, qui s’adresse à un public scientifique spécialisé, n’est pas facile, et parfois même aride pour un lecteur non initié. Mais la publication est significative de la vitalité du débat et de la dynamique de la mouvance critique dans les sciences économiques, qui conteste une bonne partie de la doxa officielle allemande. Par ailleurs, le débat sur la bonne politique à mener dans la zone euro ne se limite pas aux arcanes des chercheurs spécialisés. Il gagne en ampleur, et il commence à occuper la place publique. Restons au DIW : Dans sa série DIW-Wochenbericht, qui s’adresse à un public averti mais assez large (décideurs, média), les économistes du laboratoire ont entamé une série d’articles touchant « L’avenir de l’Union monétaire » [4] Cette série est ouverte par un article programmatique signé par le président du DIW, Marcel Fratzscher, et trois de ses collègues, qui propose une crise pour mieux armer la zone euro pour l’avenir. [5]

7 Les auteurs constatent que malgré les succès dans la lutte contre la crise de la zone euro, celle-ci n’est pas finie : les « fautes de construction fondamentales » dans l’architecture de l’Union économique et monétaire (UEM) subsistent ; faute de les réparer l’UEM sera menacé de nouvelles crises pouvant provoque jusqu’à sa rupture. Dans un climat allemand marqué par la persistance de l’euroscepticisme, ils mettent en garde contre les coûts d’un éclatement de l’euro, y compris pour l’économie allemande. Ils se prononcent pour une stratégie de renouvellement de l’UEM qui comprendrait trois champs : les marchés financiers, les finances publiques, et l’économie réelle. D’abord il s’agit d’éviter des crises systémiques dans le domaine des marchés financiers. Les auteurs soulignent l’importance de l’Union bancaire mais proposent de réformes supplémentaires afin de la rendre plus robuste. Ils se prononcent pour la création d’obligations et d’emprunts communs, ou d’eurobonds, qui devraient pourtant être conçus en évitant toute mutualisation de la dette. En plus, le rôle de la Banque centrale européenne (BCE) comme « créditeur de la dernière instance » devrait être renforcé, ce qui passe par une clarification de son mandat mais aussi par des garanties fiscales qui lui donnent la crédibilité indispensable et lui permettent de jouer pleinement son rôle à l’instar des autres banques centrales dans le monde. Deuxième axe de réformes proposé : les finances publiques. Les auteurs reconnaissent la baisse des déficits publics grâce aux efforts des gouvernements mais aussi des « mesures non conventionnelles » de la BCE coupant court aux spéculations et calmant les marchés financiers. Pourtant, les dettes cumulées n’ont cessé d’augmenter. Certes, on a paré aux insuffisances du pacte de stabilité et de croissance en votant le pacte fiscal, qui renforce les règles et les sanctions, mais le doute persiste quant à leur efficacité et à la crédibilité des sanctions. Les auteurs se prononcent pour une coordination renforcée des politiques fiscales, notamment par la création d’une « capacité fiscale » : des ressources communautaires qui pourraient servir à amortir des chocs macroéconomiques. Alternativement, la création d’un système de transfert automatique est évoquée : par exemple une assurance chômage européenne, proposition en cours depuis un certain temps déjà. [6] Mais le levier central pour faire baisser durablement les dettes publiques réside dans le retour à une croissance plus forte et durable, troisième axe du plan proposé.

8 La croissance, mais comment ? Les auteurs risquent de décevoir tous ceux, notamment en France, qui entendent par là une relance keynésienne, donc une stimulation de la demande financée par des déficits publics. Les auteurs adoptent au contraire une stratégie de l’offre : Mobiliser des capitaux privés et des investissements étrangers afin d’investir dans les capacités de production, seules capables d’augmenter le potentiel de croissance ; améliorer la compétitivité-coût par la « dévaluation fiscale » (baisse des coûts de production par la refonte de la fiscalité). Par ailleurs, un autre article de la série propose « un agenda d’investissement pour l’Europe ». [7] Là encore ils se positionnent clairement contre une augmentation des dépenses publiques au profit d’un renforcement des investissements privés et du fonctionnement des marchés : une politique stimulant la concurrence et par là les investissements et la croissance ; une fiscalité de l’entreprise favorable aux investissements ; enfin la création, pour un temps limité, d’un fonds d’investissement de l’Union européenne censé de soutenir l’investissement des petites et moyennes entreprises.

Une tonalité européenne

9 L’ensemble de ces propositions, dont certaines sont détaillées et discutées plus en profondeur par des contributions spécifiques du DIW Wochenbericht, reste bien entendu largement compatible avec l’approche allemande : contrôle des finances publiques et consolidation budgétaire, politique de l’offre, souci de la compétitivité. Mais on ne saurait pas ignorer les ouvertures, avec des pistes qui dépassent la position actuelle du gouvernement allemand, prudente et souvent défensive, et qui mettent en cause certains tabous érigés par la politique officielle (à titre d’exemple, l’évolution du rôle de la BCE, la création d’une capacité fiscale propre à l’Union et d’emprunts communautaires, ou encore le pacte d’investissement européen). Surtout, ils tranchent par leur tonalité résolument européenne : aux discours ambiants un peu mous et presque toujours défensifs, pour ne pas parler de l’euroscepticisme exploité par le nouveau parti AfD (Alternative für Deutschland), ils opposent un argumentaire basé sur des analyses profondes et différenciées. Ne cachant rien des difficultés des choix proposés, posant le pour et le contre, ils pointent aussi les coûts énormes d’un éclatement de la zone euro avec lequel flirtent bon nombre d’eurosceptiques.

10 Ces positions du DIW, qui appellent le gouvernement fédéral à une politique plus active et plus ouverte pour renforcer l’Union économique et monétaire, sont relayées par d’autres institutions et auteurs. Un seul exemple : En septembre 2013, Daniela Schwarzer (qui dirigeait alors le groupe de recherche Europe au sein du think tank du gouvernement, Stiftung Wissenschaft und Politik) et Guntram Wolff (directeur du think tank économique Bruegel à Bruxelles) se sont adressés au gouvernement de la grande coalition, alors en formation, pour lui proposer de nouvelles initiatives européennes. [8] Ils l’invitent à une triple ouverture afin de contribuer à réduire les instabilités dans la zone euro : Premièrement, une réorientation de la politique économique allemande qui devrait pousser les investissements publics notamment en matière d’éducation et de recherche, améliorer les conditions d’accueil pour les immigrants cherchant un travail, et libéraliser le secteur des services. Ainsi, espèrent-ils, l’Allemagne pourrait redevenir le moteur de croissance dont l’Europe a besoin. Deuxièmement, la réalisation de l’union bancaire « complète », qui aurait besoin un fonds de résolution européen. Enfin, soutenir activement une initiative européenne pour la croissance et pour l’emploi des jeunes, en mobilisant des ressources en faveur d’un fonds européen de la formation des jeunes qui pourrait être piloté par la Banque européenne d’investissement. Au-delà, les auteurs se prononcent en faveur d’une véritable union fiscale, dont un premier élément serait un budget propre de la zone euro, qui pourrait stabiliser les cycles économiques et faciliter les réformes structurelles nationales, qui s’avèrent souvent difficiles pendant les phases de récession économique. Enfin, les instances et procédures communautaires devraient être renforcées au détriment de la méthode intergouvernementale qui a dominé jusqu’à maintenant et qui fait des gouvernements les maîtres du jeu.

11 C’est encore le DIW qui est à l’origine d’une prise de position récente très médiatique. Son président Marcel Fratzscher a signé un livre intitulé Die Deutschland-Illusion (signifiant l’illusion de l’Allemagne qui serait forte toute seule). [9] S’appuyant fortement sur les travaux collectifs du DIW cités ci-dessus, ce livre a fait l’effet d’une bombe médiatique. Il s’emploie d’abord à démontrer les failles qui se cachent derrière le dynamisme apparent de l’économie allemande, en pointant que le pays s’est mal préparé aux défis qui l’attendent, notamment parce qu’il a laissé fléchir les investissements. Cette argumentation s’inscrit dans un débat politique qui s’est amplifié depuis la rentrée en 2013, portant sur le vieillissement des infrastructures faute d’avoir investi suffisamment (Investitionslücke). Mais surtout, ce livre est une contribution au débat européen en Allemagne, voulant démontrer « pourquoi nous surestimons notre économie et pourquoi nous avons besoin de l’Europe » comme le signale son sous-titre. Avec discernement, mais aussi une plume agréable et le sens de la formule, Marcel Fratzscher s’en prend aux jugements de café de commerce selon lesquels l’Allemagne, maître-payeur européen et victime de la politique de la BCE, n’aurait besoin ni de l’Europe ni de l’euro. Enfin, il esquisse les contours d’une « vision allemande pour l’Europe » et d’un « agenda européen pour l’Allemagne ». Il détaille comment l’Allemagne devrait reprendre l’initiative en Europe : redevenir la locomotive économique de l’Europe à travers un programme d’envergure d’investissements publics et privés, proposer un agenda européen d’investissements, accomplir l’union bancaire et poser les bases d’une union fiscale, œuvrer pour une politique étrangère et de sécurité commune, conclure un traité de l’euro, avec un gouvernement économique et un parlement de la zone euro… On voit bien que Marcel Fratzscher, sans perdre le sens des réalités, pousse le bouchon européen bien plus loin que ne veut l’admettre la politique actuelle, mais aussi une bonne partie de l’opinion publique. Ce faisant, il prend le contre-pied d’un autre économiste très médiatique, Hans Werner Sinn (président de l’institut IFO à Munich), qui avait jusqu’alors occupé la scène avec ses thèses eurosceptiques et qui propose notamment de mettre fin aux mesures de sauvetage des pays surendettés, d’arrêter les achats de dettes publiques par la BCE et d’organiser la sortie, ne serait-elle temporaire, de ces pays de la zone euro [10]. Le livre de Marcel Fratzscher est une contribution importante pour mener (enfin !) un grand débat public sur l’Europe, l’avenir de l’Union monétaire et les solutions concrètes utiles ou nécessaires. Car si une bonne partie des citoyens allemands se sent dépassée par la crise, déboussolée face l’avenir de la zone euro, et prêt à suivre les sirènes des eurosceptiques, c’est aussi faute d’avoir mené ce débat pourtant vital sur l’avantage et les coûts de la monnaie unique et des politiques pour stabiliser la zone euro.

Des réseaux en formation

12 Marcel Fratzscher et ses collègues ne sont pas les seuls à porter un nouveau regard, plus optimiste mais aussi plus exigeant, sur la zone euro. En fait, le patron du DIW fait partie du groupe de Glienicke, une association de onze économistes, politistes et juriste qui s’est fait remarquer en 2013 par un manifeste public. [11] Ce groupe est intervenu dans le débat allemand en appelant responsables politiques et citoyens à assumer pleinement le choix européen et à en tirer les conséquences politiques, à savoir un engagement pour chercher une sortie résolument européenne de la crise actuelle. Il se compose de personnes influentes : Outre le président du DIW, y figurent le président du laboratoire ZEW de Mannheim, Clemens Fuest, le directeur du think tank économique européen Bruegel (Bruxelles), Guntram Wolff, Daniela Schwarzer (qui a quitté la SWP pour diriger le programme européen du think tank German Marshall Fund), ainsi que d’autres chercheurs souvent présents dans les débats spécialisés. Parmi eux, notons une nouvelle génération de chercheurs relativement jeunes, souvent marqués par des parcours professionnels européens ou internationaux. La constitution du groupe et la publication de son manifeste dans l’hebdomadaire Die Zeit témoignent d’une stratégie de réseau d’influence, qui commence à porter ses fruits à travers des interventions multiples (publications, colloques, interviews) de ses initiateurs. Le manifeste a également trouvé un écho en France, par la constitution du groupe Eiffel réunissant un certain nombre de personnalités (par exemple, la députée européenne libérale Sylvie Goulard, l’ancien secrétaire général de l’Élysée, Jean-Louis Bianco, le directeur du think tank Notre Europe, Jean-Yves Bertoncini, ou l’économiste Agnès Bénassy-Quéré, présidente déléguée du Conseil d’analyse économique), qui se propose de répondre à l’appel de Glienicke et d’engager un débat franco-allemand sur l’Europe. [12] Par ailleurs, les réseaux franco-allemands se multiplient et se renforcent : Ainsi, Henrik Enderlein, professeur à la Hertie School of Governance, a-t-il pris la tête du bureau Berlinois du think tank Notre Europe fondé par Jacques Delors. La politique commence à s’y intéresser : Le ministre social-démocrate de l’économie, Sigmar Gabriel – qui, tout en étant lié à la solidarité gouvernementale, ne cache pas ses préférences pour une politique davantage tournée vers la croissance – a confié à Marcel Fratzscher la présidence d’un comité de réflexion sur la relance des investissements en Allemagne ; le même ministre a, de concert avec son collègue socialiste Emmanuel Macron, chargé Henrik Enderlein et Jean Pisani-Ferry (président de France Stratégie) d’une mission de réflexion sur les réponses à donner à la dégradation de la croissance, sur une meilleure politique de réformes en France et en Allemagne et sur les possibilités d’une coopération dans ce domaine. [13] Signalons également l’initiative de recherche franco-allemande lancée début 2014 par les deux ministères des finances et réalisée par France Stratégie et le Deutsch-Französisches Institut de Ludwigsburg. Dans le cadre de cette initiative, quatre séminaires ont réuni des chercheurs en économie et en sciences sociales des deux pays et au-delà, pour débattre des questions de politique économique et sociale en Europe, permettant de dégager des champs de recherche qui pourraient faire l’objet de coopérations ultérieures. [14]

13 S’il est encore trop tôt pour mesurer l’impact de ses nouveaux débats allemands sur la politique du gouvernement fédéral, l’ouverture d’esprits qu’ils marquent est en soi un fait important. Mieux que les pressions politiques venant de Paris, de Rome ou de Bruxelles, les propositions présentées ici pourront faire bouger les acteurs politiques. Car tout en poussant vers un renouvellement, ils renoncent aux discours de rupture faciles et aux solutions toutes faites, pour élaborer des pistes sérieuses pour la politique européenne qui tiennent compte des principes fondamentaux et des référentiels dominants en Allemagne. À titre d’exemple, toutes les propositions respectent le principe du sérieux budgétaire, cherchant d’autres moyens pour relancer l’économie en Allemagne et en Europe. Ce réalisme, cette modération affichés par les principaux auteurs, sont des conditions favorables pour être entendus par les acteurs politiques, surtout dans une période où maintes certitudes se trouvent ébranlées. Quant aux relations franco-allemandes, il est à espérer que l’ouverture des esprits sera mutuelle, et que les réseaux qui se tissent pourront aider à rehausser le débat, qui a été figé trop souvent par des oppositions stériles et mises en accusations mutuelles. Chercher ensemble de nouvelles voies, ne pas faire la leçon au partenaire mais comprendre ses contraintes internes, s’aider mutuellement à sortir des impasses ce chacun, tels seraient les qualités d’un débat franco-allemand, afin de recréer la confiance mutuelle qui trop souvent fait défaut.

Notes

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