NOTES
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[1]
André Billy, « Les propos du samedi », Le Figaro littéraire, 27 janvier 1962.
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[2]
Archives françaises de la Société de Jésus (désormais AFSJ), fonds Auguste Valensin (TVa 52 – I, dossier 0).
-
[3]
Ibid.
-
[4]
Sur Félix Valensin, voir Marie Rougier et Henri de Lubac, Auguste Valensin. Textes et documents inédits (désormais TDI), Paris, Aubier, 1961, pp. 13, 30-32, ainsi que les documents familiaux inédits dans AFSJ, TVa 52 – I, dossier 0.
-
[5]
Theodor Lessing, Der jüdische Selbsthasse, 1930 (La Haine de soi : le refus d’être juif, Paris, Berg, 1991).
-
[6]
Notes autobiographiques, AFSJ, TVa 52 – I, dossier 0.
-
[7]
Note de 1931, citée sans référence in TDI, pp. 13-14.
-
[8]
Notes autobiographiques, AFSJ, TVa 52 – I, dossier 0.
-
[9]
TDI, pp. 28-33.
-
[10]
Note de 1931, citée sans référence in TDI, p. 14.
-
[11]
Note anonyme, s. d. [après 1953], AFSJ, TVa 52 – I, dossier 0.
-
[12]
TDI, p. 32.
-
[13]
Lettre à André Billy, s. d., citée in André Billy, op. cit.
-
[14]
Cette citation et les précédentes sont tirées du carnet de voyage n°1, f° 74-75, ASFJ, TVa 62. Voir aussi TDI, p. 167.
-
[15]
Sur ces aspects, voir TDI, pp. 176-183.
-
[16]
Lettre à sa sœur Marguerite, s.d. [1929], in TDI, p. 181.
-
[17]
Lettre à Andrée Valensin, s.d. [vers 1931-1932], in TDI, p. 188.
-
[18]
Journal, 21 septembre 1932, in TDI, pp. 251-252.
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[19]
Lettre à Andrée Valensin, s.d. [vers 1931-1932], in TDI, p. 190.
-
[20]
Jacques Prévotat, Catholiques français et Action française. Étude de deux condamnations romaines, thèse de doctorat d’État, sous la direction de René Rémond, Université de Paris X – Nanterre, 1994, pp. 704 et 919.
-
[21]
Cité s. d. in TDI, p. 200.
-
[22]
Étienne Fouilloux, « Ébauche d’un philosémitisme catholique », Les Cahiers de la Shoah, sous la direction d’André Kaspi, Paris, Liana Lévi, 1995, pp. 35-50, repris in Les Chrétiens français entre crise et libération (1937-1947), Paris, Éditions du Seuil, 1997, pp. 31-47. Voir également Laurence Deffayet, La Redécouverte des origines juives du christianisme et l’émergence du dialogue judéo-chrétien dans l’Église catholique 1926-1962, thèse de doctorat sous la direction de Philippe Boutry (encore inédite), Université de Paris I – Panthéon-Sorbonne, décembre 2006, chapitre 1 : « Les espoirs déçus des Amis d’Israël (1926-1928) », pp. 16-49.
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[23]
Cette citation et les précédentes proviennent de l’allocution à la Messe pour le retour d’Israël, 24 mai 1927, in TDI, pp. 194-197.
-
[24]
Marc d’Aniel, « Quatre quarts d’heure avec le R.P. Auguste Valensin », Vers l’Avenir, novembre 1927.
-
[25]
Lettre de Raïssa Maritain à Auguste Valensin, 29 octobre 1930, AFSJ, TVa 52.
-
[26]
Cité par Pierre Pierrard, Juifs et catholiques français de Drumont à Jules Isaac (1886-1945), Paris, Fayard, 1970, pp. 252-253.
-
[27]
TDI, p. 199.
-
[28]
Lettre à Andrée Valensin, s.d. [vers 1931], citée in TDI, p. 184.
-
[29]
Lettre de Joseph Bonsirven à Jacques Maritain, 6 avril 1928, cité par Michel Fourcade in Feu la modernité ? Maritain et les maritainismes, thèse de doctorat sous la direction de Gérard Cholvy, Université de Montpellier III – Paul-Valéry, 2000, p. 925.
-
[30]
Lettre de Marguerite Valensin à son frère Auguste, 2 juillet 1936, AFSJ, TVa 50/2.
-
[31]
Carnet de voyage n° 20, f° 26 v., AFSJ, TVa 62.
-
[32]
Voir en particulier Joseph Bonsirven, Juifs et chrétiens, Paris, Flammarion, 1936.
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[33]
Sur ces relations, voir TDI, pp. 184-193.
-
[34]
Lettre à Andrée Valensin, s.d. [vers 1931], cité in TDI, p. 185.
-
[35]
Ibid. p. 187.
-
[36]
Voir Frédéric Gugelot, La Conversion des intellectuels au catholicisme en France (1885-1935), Paris, CNRS-Éditions, 1998, p. 186.
-
[37]
Lettre à Henri Valensin, 6 juillet 1932, TDI, p. 192.
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[38]
Lettre à Andrée Valensin, s. d., [vers 1931-1932], TDI, p. 185.
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[39]
Lettre de Marguerite Valensin à son frère Auguste, 2 juillet 1936, AFSJ, TVa 50/2.
-
[40]
Cf. Stéphane Souliè, « Xavier Léon, philosophe », Archives juives. Revue d’histoire des Juifs de France, n° 39/1, 1er semestre 2006, pp. 143-147 (N.D.L.R.).
-
[41]
Lettre de Jacques Bonsirven au Père supérieur de la résidence de Nice, décembre 1953 (AFSJ, TVa 115/5). Sur le Père Bonsirven, voir Laurence Deffayet-Loupiac, « Le rôle du Père Bonsirven dans le renouveau du dialogue judéo-chrétien dans l’entre-deux-guerres », Revue d’Histoire de l’Église de France, t. 89, n° 222, janvier-juin 2003, pp. 81-103, ainsi que l’article consacré par cet auteur au personnage dans le présent numéro.
-
[42]
Dominique Avon et Philippe Rocher, Les Jésuites et la société française, Toulouse, Privat, 2001, pp. 149-153, et Jean Lacouture, Jésuites. Une multibiographie, t. 2 : Les Revenants, Paris, Éditions du Seuil, collection « Points », 1991, pp. 416-431.
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[43]
Lettre à Gaston Fessard, 25 avril 1936, AFSJ, Fonds Fessard, Pax Nostra, 1/7 – 5.
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[44]
Ibid., 2 juin 1936.
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[45]
Lettre à Maurice Blondel, 31 août 1938, recopiée dans une note d’Henri de Lubac à partir du Journal, AFSJ, TVa 52/2-XI.58, également in TDI pp. 286-287.
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[46]
Cité in Jésuites de l’Assistance de France, 1954, n° 3, p. 32.
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[47]
Cette citation et la suivante proviennent des souvenirs de Gustave Cohen, cités in TDI, pp. 309-310.
-
[48]
Lettre au père Sheehy, 15 juin 1941, AFSJ, TVa 52/2 – XII.62.
-
[49]
Ralph Schor, L’Antisémitisme en France dans l’entre-deux-guerres. Prélude à Vichy, Bruxelles, Éditions Complexe, 2005 (2e édition), p. 102.
-
[50]
Auguste Valensin, « Henri Bergson », L’Éveil de Nice, 11 janvier 1941. Voir aussi TDI, pp. 307-308.
-
[51]
Voir la lettre de Maurice Blondel à Auguste Valensin, 28 janvier 1941, in Maurice Blondel et Auguste Valensin, Correspondance, vol. 3, Paris, Aubier, 1965, p. 212 ; et TDI, p. 310.
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[52]
Victor Fontoynont, « La destinée manifeste du peuple juif, le chapitre 11 de l’épître aux Romains », Rencontre, n° 4, « Le sens chrétien de l’histoire », Lyon, décembre 1941, pp. 105-112.
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[53]
André Thérive, « Le souvenir du Père Auguste Valensin », Ecclésia, n° 163, octobre 1962, p. 50.
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[54]
TDI, pp. 310-311.
-
[55]
André Billy, « Les frères Valensin », Le Figaro, 18 janvier 1962.
-
[56]
Donatien Mollat, s. j., « Le Père Victor Fontoynont », Amis du cœur de Jésus, 1959, pp. 399-409.
-
[57]
L’arrestation et la déportation de Rebecca Margoliès furent rapportées par le Père lui-même à Marie Rougier, AFSJ, TVa 73/4. Cette déportation est confirmée et datée dans Serge Klarsfeld, Les Rafles des Juifs à Nice (1942-1944), Paris, FFDJF-Beate Klarsfeld Foundation, 2003 (2e édition), p. 83.
-
[58]
Roger Martin du Gard, Journal, t. III, Paris, Gallimard, 1993, p. 768. Le romancier, proche du Comité national des écrivains hostile à Vichy, était alors en lien à la fois avec Valensin et l’abbé Girault.
-
[59]
André Billy, « Les propos du samedi », Le Figaro littéraire, 27 janvier 1962. Ce départ est confirmé par d’autres documents, dont une chronologie dressée par Marie Rougier, qui note pour l’été de la Libération : « réfugié à l’Ouliveto », AFSJ, TVa 52.1.
-
[60]
TDI, pp. 310-311. Ces auteurs restent pourtant très discrets sur ces événements, se contentant de huit lignes évasives. On relèvera du reste une inexactitude : la Gestapo n’intervient à Nice qu’à partir de septembre 1943.
-
[61]
Voir Serge Klarsfeld, op. cit.
-
[62]
« Témoignage de Mr Abadi, Directeur Régional de l’Union O.S.E. », octobre 1944, CDJC, CMXCIV-9/1.
-
[63]
Allocution de Moussa Abadi au colloque des « Enfants cachés », Paris, 1995, p. 3, CDJC, CMXCIV-9/1. Sur le rôle important de Mgr Rémond, voir Ralph Schor, Un évêque dans le siècle : Mgr Paul Rémond, Nice, Serre Éditeur, 2003 (2e édition), pp. 116-125.
-
[64]
Serge Klarsfeld, op. cit., pp. 50-65.
-
[65]
Lettre de Gustave Cohen à Auguste Valensin, 28 janvier 1945, AFSJ, TVa 73 [nous soulignons].
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[66]
Nous résumons ici l’analyse tirée des feuillets d’un rapport interne à la Compagnie de Jésus, constitué peu après la fin de la guerre, sur les activités de sauvetage entreprises par les jésuites de France, AFSJ, C.Pa 619. Les informations de ce document sont éclairées par Organisation juive de combat. Résistance/sauvetage, France 1940-1945, Paris, Autrement, n° 85, 2002, et recoupées par Serge Klarsfeld, op. cit., p. 62.
-
[67]
Journal manuscrit, 28 novembre 1944, f° 44, § 2213, AFSJ, TVa 56/2. L’Initiation catholique est un petit opuscule rédigé à l’intention des catéchumènes. Quant au « discours sur Israël », il s’agit de l’homélie de la messe de 1927 célébrée à Notre-Dame de Sion, déjà évoquée.
-
[68]
Cette annotation se trouve au bas d’une fiche sur laquelle Henri de Lubac avait relevé, à partir du Journal de Valensin, la rencontre de celui-ci avec Brener, AFSJ, TVa 52/2-XIII.
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[69]
Sur ces diverses rencontres, voir notamment les carnets de voyage n° 20 (1946), f° 4 v., n° 21 (1947), f° 12-13 et n° 23 (1948) f° 12 r., AFSJ, TVa 62.
-
[70]
Serge Klarsfeld, op. cit., p. 61, et Organisation juive de combat, op. cit., pp. 117-121, 161-162.
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[71]
Lettre de Georges Garel à Moussa Abadi, 27 septembre 1944, Centre de documentation juive contemporaine, CMXCIV-14/12341.
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[72]
Auguste Valensin, Journal manuscrit, 28 (en fait le 29) décembre 1944, f° 55, § 2241, AFSJ, TVa 56/2.
-
[73]
Journal manuscrit, 30 décembre 1944, f° 56-57, § 2244-2245, AFSJ, TVa 56/2.
-
[74]
Ibid.
Le Père Auguste Valensin (1879-1953) vers 1935
Le Père Auguste Valensin (1879-1953) vers 1935
1Auguste Valensin (1879-1953) est une figure aujourd’hui méconnue de la Compagnie de Jésus. Il fut pourtant un acteur de premier plan des conflits qui agitèrent le monde intellectuel catholique de l’entre-deux-guerres, dans le sillage de la crise moderniste qu’il traversa aux côtés de son maître Maurice Blondel. Brillant philosophe, il enseigna au scolasticat de Jersey jusqu’en 1920, puis à la Faculté catholique de Lyon. En 1935, il gagna Nice où il devint, jusqu’à sa mort, un conférencier des plus brillant.
2Né dans une famille catholique de la petite bourgeoisie marseillaise, Auguste Valensin n’avait apparemment aucune prédisposition particulière à faire sienne la cause philosémite. Mais en 1902, alors qu’il s’apprêtait à entrer dans la Compagnie de Jésus, il apprit, dans des conditions pénibles sur lesquelles il faudra revenir, l’origine juive de son père. Cette révélation marqua un tournant dans sa vie intime : il devait désormais rattacher à son expérience quotidienne et à sa vocation de prêtre cette inscription dans une ascendance juive, à l’heure où un antisémitisme virulent stigmatisait cette appartenance jusqu’au sein même de l’Église.
3C’est de la sorte une relation singulière avec le judaïsme qui devait se construire et se manifester. Après avoir analysé les conditions dans lesquelles s’est construite cette identité que nous qualifierons volontiers de « crypto sémite », il faudra éclairer les formes que prit l’engagement philosémite du jésuite au cours de deux moments clés : durant l’entre-deux-guerres tout d’abord, au moment où s’affirment le mouvement philosémite mais aussi un regain d’antisémitisme ; puis autour des années noires, face au régime de Vichy et à l’occupation nazie.
Genèse d’un « crypto sémitisme » catholique
Le « grand secret » de la famille Valensin
4Élevé dans un milieu fort pieux, le petit Auguste ignora longtemps tout de ses origines, au point de partager les préventions antisémites de beaucoup de catholiques de son temps. L’écrivain André Billy, qui côtoya plus tard le religieux à Nice, affirme en effet, à propos des enfants Valensin, qu’avant de découvrir leurs origines, « ils étaient quelque peu antisémites… [1] ». Et, de fait, les ébauches d’une autobiographie qu’il entama (sans la mener à terme) en 1951, à la fin de sa vie, sont sans ambiguïté là-dessus, puisqu’il évoque d’un mot l’« antidreyfusisme » de sa jeunesse [2]. Il est vrai que tout était fait au foyer familial pour étouffer le secret paternel. Le petit Auguste eut tôt fait de s’apercevoir qu’un non-dit planait autour de la famille de son père : « M’étonnais de ne rien savoir de ses parents. On aurait dit qu’il n’en avait pas. Je savais seulement, vaguement, qu’il était né à Livourne. Cela m’intriguait vaguement. Les autres avaient des oncles et des tantes, du côté de leur père : moi pas [3]. » Chaque année, le 15 juillet était jour de fête à la maison, pour une raison qui, là encore, lui échappait.
5Que cachait donc ce père ? Né juif et italien en 1834, Félix Valensin était arrivé en France à la toute fin des années 1850 après des études de médecine. Le positivisme est alors fort répandu ; mais le jeune homme, lui, est tourmenté par une profonde crise spirituelle. À Toulouse, il s’adresse à l’archevêché, où on lui recommande un missionnaire du Sacré-Cœur, l’abbé Rouzaud. Il entame alors avec ce prêtre, non sans atermoiements, un long cheminement vers le baptême, qu’il reçoit le 15 juillet 1863. Cette date – celle-là même qui était célébrée chaque année en famille – fut assurément l’une des plus importantes de son existence. Instruit peut-être de l’exemple des frères Ratisbonne, il envisagea même de devenir prêtre ; plus tard, il poussa son engagement jusqu’à devenir tertiaire de Saint-François [4].
6Comment expliquer alors qu’un homme si bouleversé par sa conversion ait pu en garder un secret aussi jaloux ? Il n’est pas impossible que Félix ait développé une sorte de honte de ses origines, une forme de cette haine de soi que théorisa Theodor Lessing [5]. Sa volonté d’assimilation peut également expliquer ce choix, comme si la gloire était, non dans l’effort de conversion, mais dans une identité catholique presque essentialisée – on verra qu’Auguste prendra position contre cette idée, peut-être précisément pour valoriser l’acte de son père (il écrira beaucoup plus tard : « Je regrette vivement de n’avoir pas rendu justice à mon père de son vivant [6] »). Par la suite en effet, il ne pourra s’empêcher d’admirer « la force de caractère de papa, qui a gardé son secret jusqu’à la dernière heure [7] ».
7Or cette admiration posthume, cet attachement sans faille à la mémoire paternelle tranchent abruptement avec la mésentente qui régna entre eux durant son enfance. Les relations du petit Auguste avec son père, en effet, furent difficiles : s’il ignore encore son ascendance juive, il connaît son origine italienne (Félix ne sera naturalisé français qu’en 1894), qui lui déplait fort, notera-t-il plus tard dans son brouillon autobiographique, tant les Italiens sont alors peu estimés. Il évoquera également, en quelques mots à peine, sa mésentente avec son père, des disputes parfois, des coups de pieds même [8].
8En juin 1902, Félix Valensin fut frappé d’une attaque d’apoplexie. C’est alors, sur son lit de mort, qu’il permit à ses enfants de connaître la vérité sur ses origines juives [9]. Presque trente ans plus tard, Auguste se souviendra encore de ces derniers moments :
Près de mourir, il se fit apporter la cassette fermée à clé où étaient ses papiers, acte de baptême, etc. ; on le vit hésiter… Ferait-il tout brûler ? Puis il se décida, et dit : « Remets-la à sa place. » Et, grâce à cette décision, nous savons quelque chose, nous pouvons rendre grâce, chanter la miséricorde du Père, avoir des entrailles fraternelles pour ceux de sa race [10]…
10Une main anonyme (très probablement celle de Marie Rougier, la secrétaire dévouée et la confidente du Père) compléta plus tard ce récit : « Sur son lit de mort, Félix relisait la vie des frères Ratisbonne. […] Le Père Auguste, qui venait d’apprendre le “secret” de la bouche de sa mère et de sa sœur, prit le livre en mains et dit à son père (pour essayer d’en obtenir une confidence) : “tu lis Ratisbonne ?” (Ou quelque chose comme cela […].) Mais Félix Valensin ne dit rien [11]… »
11Cette mort prématurée, couplée à la révélation du « grand secret », n’a pas manqué de bouleverser la relation entretenue avec la mémoire paternelle, et par là avec le judaïsme. Le fort attachement à la culture italienne et à la « race juive » qu’Auguste manifeste par la suite pourrait donc bien être lié à quelque mouvement psychanalytique. En tout état de cause, c’est bien par des racines familiales que Valensin se trouve confronté à l’héritage du judaïsme, et cela dans des conditions éprouvantes. Ses proches évoquèrent même, plus tard, « le drame intime qui en était résulté [12] ». Il est vrai qu’Auguste et son frère aîné Albert durent alors obtenir de Rome une dispense spéciale pour autoriser leur entrée dans la Compagnie de Jésus, qui était alors fermée à toute personne d’origine juive : les règlements de la Compagnie commandaient qu’à leur tour les membres de la famille maintinssent le secret. Seuls de rares proches en furent informés, comme le Père Fontoynont ou Marie Rougier. Celle-ci raconta avec quelle pudeur Valensin s’en ouvrit à elle : « Un jour à Lyon, il m’a dit : “Ce soir, chez vous, ouvrez saint Paul. Lisez Ad Corinth, II, II, 22-23.” Ce que je fis et je lus : “Hebraei sunt, et ego. Israelitae sunt, et ego. Ministri Christi sunt… plus ego.” [13] » Le choix de cette référence indique assez l’esprit dans lequel le Père devait vivre son ascendance.
La progressive réappropriation d’une identité juive
12Ce n’est que bien plus tard qu’Auguste Valensin entreprit de retrouver les traces de sa famille en Italie. En octobre 1924, au retour d’un colloque tenu à Rome, il se rendit ainsi à Livourne. Il flâna en ville, puis se rendit dans le quartier juif, où il demanda à visiter la synagogue ; conduit par le sacristain, il se fit expliquer l’origine du bâtiment, le fonctionnement du culte… Il n’ose encore avouer le but exact de sa visite, mais tente malgré tout de glaner quelques renseignements. « Je lui dis, écrit-il, que j’ai un ami israélite, du nom de Valensin, né à Livourne… et lui demande s’il y en a encore : il me dit que non. C’est émouvant cette visite dans le ghetto. Une race est là, blottie […] » Au soir de sa visite, il ne peut cacher son émotion ; les quelques mots qui terminent ses notes de voyage en disent long sur les ressorts profonds de son philosémitisme : « Ici a vécu papa. Mon Dieu ! Mon Dieu [14] !.
13Chaque été désormais, au prétexte d’un cours d’italien qu’il a créé en 1927 à la Faculté catholique de Lyon, Valensin se rend en Italie. Ces excursions transalpines lui donneront dès 1928 la joie de retrouver la trace d’oncles et de cousins à Livourne, Pise et Florence ; l’année suivante, il retrouve la tombe de son grand-père, Abraham Valensin [15]. Cette réappropriation de sa généalogie contribue indéniablement à ancrer en lui le sentiment de sa propre judéité et conforte sa conception des liens entre judaïsme et christianisme. La fratrie Valensin semble vivre son ascendance juive comme la manifestation d’une vocation providentielle : leur foi inébranlable (le frère et les deux sœurs d’Auguste sont aussi dans les ordres) vient couronner la branche juive de leur famille, réactualisant en quelque sorte la marche du peuple élu du judaïsme au christianisme :
Quelle merveilleuse fin pour la famille, que celle qui la fait toute aboutir et s’achever dans la religion ! Héritiers d’une longue lignée qui n’a pas aimé Jésus-Christ, il nous faut aimer pour le compte de tous les autres [16].
15Ce dernier jugement laisse également entrevoir que le Père, malgré tout, n’en professait pas moins l’opinion commune du temps selon laquelle les Juifs avaient rejeté le Christ, ce qui précisément fondait depuis des siècles l’antisémitisme chrétien. Certes, il plaît au jésuite d’appartenir à la « race » juive. Mais cette fierté n’est pas sans ambiguïtés, car elle-même repose sur quelques préjugés de l’époque : il évoque souvent la « fièvre cérébrale (spécifique de notre race) » ou cet « orgueil de race » qu’il apprécie fort [17]. À l’inverse, il note le 21 septembre 1932, en un jugement abrupt :
En suite de la lecture d’Israël à New York, livre sur les Juifs écrit par un Juif, je me suis retrouvé dans l’état d’âme d’avant la révélation du secret… Les Juifs me sont apparus comme une race méprisable, où ce qui est digne d’estime et d’admiration fait exception. Comme on passe vite d’une disposition à une autre !
Je ne suis pas encore tout à fait sorti de cet état.
Ce qui m’irrite le plus, et me dégoûte, dans l’ouvrage ci-dessus, c’est qu’il ait été écrit par un Juif. Comment ne s’est-il pas dégoûté lui-même en écrivant, en se peignant [18] ?
17Toute l’ambiguïté de ses sentiments apparaît encore, à la même époque, lorsqu’il écrit à une jeune protégée juive : « c’est seulement en se contredisant, qu’un catholique peut être antisémite. Ne pas confondre, d’ailleurs, l’opposition de principe, la haine de race, – et la méfiance du Juif, que tant de Juifs, hélas ! et si “antipathiques”, justifient amplement [19] ». Sa conviction philosémite repose donc avant tout sur un acte de raison, à l’encontre même de ses réflexes de jeunesse et de la pensée de son temps. Valensin se sentait tenu d’assumer une identité qu’il avait un temps méprisée, mais il pouvait à l’occasion rester sensible à l’image négative des Juifs que lui renvoyait son temps. Aussi bien s’est-il davantage pensé en prêtre qu’en Juif, non sans assumer sa part de judéité dans une perspective providentialiste.
L’engagement philosémite dans l’entre-deux-guerres
La lutte contre l’antisémitisme d’Action française
18Au cours des années vingt, le principal souci pastoral d’Auguste Valensin fut de combattre l’emprise idéologique que l’Action française exerçait sur nombre de catholiques, tant les postulats maurrassiens lui semblaient contraires à l’esprit chrétien. Il partageait d’ailleurs ce souci avec son frère Albert, lui aussi jésuite et intellectuel réputé, qui s’était fait remarquer par une critique transparente du nationalisme intégral lors d’une conférence donnée en 1922, déchaînant l’hostilité des milieux d’Action française. Lorsque ce mouvement fut condamné par Pie XI en 1926 (moins à cause de son antisémitisme que pour des raisons doctrinales), Albert n’hésita pas à écrire, à la demande de Francisque Gay, un petit texte visant à justifier cette condamnation [20].
19Auguste était bien décidé lui aussi à agir pour soutenir la décision pontificale. Il est alors persuadé, non sans exagération, que « la condamnation de l’AF est comme non avenue ; c’est à se demander si l’autorité du pape finira par l’emporter sur l’inertie calculatrice de l’Épiscopat [21]. » Désormais, il entend donc agir pour dessiller les yeux des catholiques. L’angle d’attaque est tout trouvé : il croisera le fer sur la question de l’antisémitisme. Au même moment, en effet, ses progrès dans la recherche de ses racines ont rendu le Père plus sensible aux données de la « question juive » : il pouvait ainsi à la fois apporter sa pierre à la lutte contre l’Action française et manifester, pour la première fois publiquement, ses égards pour le peuple juif.
20L’occasion choisie fut une messe célébrée pour le « retour » d’Israël (c’est-à-dire sa conversion : voir infra) le 24 mai 1927 à Lyon, dans la chapelle Notre-Dame de Sion. Le Père prononça alors un sermon appelant à un regard positif sur les Juifs ; il se borna à une perspective strictement théologique (et non politique ou sociale), mais utilisa des mots forts et sans ambiguïté aucune. Après avoir rappelé la judéité du Christ et sa souffrance de voir dans l’avenir « ses frères selon l’adoption et selon la grâce persécuter ses frères selon la chair », il asséna : « À bien regarder les choses, y a-t-il rien de moins chrétien que l’antisémitisme ? ». Car non seulement les non-Juifs, les Gentils, n’étaient pas les premiers à être appelés à faire partie de l’Église, mais encore c’est « par le ministère d’Israël, par son intermédiaire, qu’ils devaient être admis au christianisme. » Il poursuivit alors, visant plus particulièrement les partisans de Charles Maurras :
Et quand le Chrétien non-Juif méprise le Juif qui n’est pas encore chrétien, il méprise celui dont, plus que tout autre, la tendresse divine attend avec sollicitude le retour, comme faisant partie du peuple choisi. Il méconnaît ce que nous a dit Saint Paul, (et qui va scandaliser ceux d’entre vous qui ne connaissent pas les Écritures ou en voudraient tamiser l’enseignement), il méconnaît que c’est avec les Juifs, les bons Juifs, « vere Israelite », ceux qui vivent pieusement dans l’attente inquiète du Messie, que se font les meilleurs chrétiens.
22Et de conclure fermement : « C’est un devoir pour les Chrétiens qui ne sont point parents de Jésus-Christ selon la chair de ne pas se préférer aux Juifs qui, frères de Jésus-Christ selon la chair, le sont aussi selon la grâce. Saint Paul le leur dit : “Ils n’ont pas à faire les fiers !” » Il est difficile de ne pas voir dans cette dernière remarque une réminiscence de la figure paternelle. Mais il ressort surtout de ce texte que Valensin partage le même esprit novateur que les membres de l’association des Amis d’Israël (1926-1928) : malgré une brève existence cette « pieuse union » avait introduit un ton nouveau dans les relations envers le judaïsme, en prônant notamment l’abandon du terme de conversion pour celui de « passage » ou même de « retour » [22]. Or c’est précisément le même message que le Père développe lorsqu’il explique :
Le Juif est appelé à la profession chrétienne comme une sorte d’épanouissement de lui-même et qui constitue moins une conversion qu’une promotion ; car le Christianisme est dans le prolongement du Judaïsme, il en est (c’est Jésus-Christ qui l’a dit) non le renversement, mais l’achèvement et la perfection [23].
24Cette allocution fit un bel effet. Le 15 novembre suivant, la revue Retour d’Israël en publiait le texte, assurant sa diffusion dans les milieux philosémites tandis que, dans la foulée, le Père réitéra sa condamnation de l’antisémitisme dès le début d’une série d’entretiens qu’il accorda au journal Vers l’Avenir [24]. Quelques années plus tard, Raïssa Maritain, elle-même d’origine juive et convertie au catholicisme, manifestera sa reconnaissance en lui écrivant : « […] votre allocution de mai 1927 m’a vivement émue [25] ». Ce texte semble également avoir été longtemps diffusé auprès de Juifs chez qui l’on désirait abattre de légitimes préventions contre l’Église : le jeune Moussa Abadi, Juif d’origine syrienne que Valensin rencontra à Nice en 1940, lui confiera l’avoir lui-même recopié et médité avec intérêt. Les réactions ne se firent pas attendre non plus dans la presse antisémite, et spécialement dans La Revue internationale des Sociétés secrètes, principal organe de l’antisémitisme catholique. Depuis longtemps cette revue dénonçait avec virulence l’« attrape-nigaud » du philosémitisme, spécialement celui des Amis d’Israël ; aussi, à la lecture du texte de Valensin, l’abbé Colmet, l’une des principales plumes du périodique, s’indigna-t-il contre ce « tissu de contresens théologiques et scripturaires », s’étranglant à l’idée que l’on pût demander de « ne plus parler de “peuple déicide” mais de “peuple privilégié”, ni de “conversion” des Juifs mais de leur “retour” [26] ».
25Depuis plusieurs années, les prises de position des deux frères avaient en effet éveillé la curiosité malveillante des milieux ultra nationalistes : spéculant, au vu de leur nom, sur leur origine juive, les partisans de Maurras s’en prirent violemment à eux, qui furent abreuvés de lettres d’insultes [27]. Aussi le Père jugea-t-il plus prudent de se taire désormais, pour ne pas attirer l’attention sur ses propres origines : « L’Action Française et les autres journaux qui ont, ces dernières années, jeté pour la première fois dans la circulation, pour s’en faire une arme de guerre, l’idée de “l’origine juive des PP. Valensin”, seraient trop contents s’ils avaient où accrocher leurs encore vagues soupçons », écrivit-il pour justifier le secret qu’il observait sur ses ascendances [28].
26Il est vrai que ce « secret » semblait de plus en plus éventé. Dès 1928, écrivant à Jacques Maritain, le Père Bonsirven l’évoquait de manière entendue : « Ce matin je voyais quelqu’un qui désirerait beaucoup vous rencontrer : le P. Auguste Valensin… […] Je puis conjecturer que son désir a deux motifs : non seulement le démon philosophique, mais plus encore son attachement passionné, le cri de la race, pour tout ce qui touche le judaïsme [29]. » En juillet 1936 encore, Marguerite Valensin écrivait à son frère Auguste : « dans une réunion récente, une personnalité israélite a déclaré que les PP. Valensin faisaient le plus grand honneur à la race […]. Je crois bien en effet qu’il n’y a plus d’illusions pour personne quoique notre silence arrête les réflexions trop nettes [30]. » Le Père veilla toujours, pourtant, à détromper ceux qui, même incrédules, avançaient l’hypothèse devant lui. Le samedi 13 juillet 1946, Valensin note ainsi, non sans malice : « Madame Brener m’a demandé s’il était vrai que je fusse, comme on le dit, de race juive… J’ai répondu que ce bruit tenait à ce que le nom était en effet juif, mais que mon père était tertiaire de saint François… “Ça m’aurait étonné”, m’a-t-elle dit [31] ».
Un prosélytisme libéral
27Si Valensin ne s’exprima plus publiquement sur le sujet durant les années 1930, c’est aussi qu’il concentrait l’essentiel de ses efforts sur un prosélytisme individuel plutôt que sur la lutte contre l’antisémitisme. Beaucoup d’apôtres catholiques portaient alors une attention accrue aux Juifs, qui fournissaient un nombre important de convertis, comme en témoignent les nombreux récits et enquêtes qui fleurirent alors [32]. Or c’est précisément en 1931, au plus fort de ce mouvement de conversions, que le Père rencontra une jeune Juive en recherche spirituelle, Andrée Valensin, homonyme mais non parente, qu’il entreprit d’accompagner vers le catholicisme [33]. Aussi cette relation semble-t-elle particulièrement représentative du mouvement général, en particulier quant à l’évolution des formes du prosélytisme catholique envers les Juifs.
28Andrée Valensin était alors étudiante en philosophie à Aix-en-Provence. Le Père prit contact avec elle dans l’idée – déçue – qu’elle eût pu appartenir à une branche de sa famille. Un dialogue spirituel se noua alors entre eux : le religieux entreprit d’abattre d’éventuelles préventions contre l’Église, et entama avec mesure un apostolat de longue haleine, sans brusquerie, exhortant même la jeune femme à la circonspection : « Le jour de votre baptême sera pour moi un bien grand jour. Mais je ne vous baptiserai que lorsque je vous sentirai forte, instruite, invincible. […] Je vous demande d’attendre un peu, que vos convictions soient établies, pour assister à la messe [34]. » Très soucieux de respecter son cheminement spirituel, il écrivit encore : « N’ayez point peur que je me lasse de vos hésitations ou de vos revirements. Je les comprends très bien… et c’est même parce que je les prévoyais que j’ai pris garde de ne rien hâter [35]. »
29Le Père insistait dans ses conseils épistolaires sur la paternité divine et la figure fraternelle de Jésus, des thèmes qui lui tenaient à cœur. Or, ce faisant, il rencontrait le besoin de certains Juifs qui pouvaient voir dans le judaïsme une religion trop ritualisée, desséchée, particulièrement s’ils étaient éloignés de toute pratique religieuse. Pour ceux-là, la découverte de Jésus comme un frère, porteur d’un message neuf et humain, joua souvent un rôle déclencheur dans la conversion [36]. Cependant, comme le Père Bonsirven le notait en 1936, la conversion pouvait être vécue comme un déchirement, voire une trahison, par la famille du converti. Conscient de cette situation, Valensin prit soin de rassurer avec un grand tact le père de la jeune femme face à son évolution religieuse :
Il serait inconcevable que je ne me réjouisse pas de cette évolution, mais j’aurais cru manquer à la loyauté envers vous en exerçant sur votre fille une action délibérée. […] Ce n’est pas probablement sans une souffrance, je le devine, que vous et sa mère aurez suivi l’évolution spirituelle d’Andrée… Du moins ne croyez pas que [cela] doive détacher l’exquise enfant des affections de famille et l’éloigner un tant soit peu de vous [37].
31Ce prosélytisme bienveillant fait écho, là encore, au passé familial du Père. Répondant à une lettre d’Andrée qui l’avait bouleversé, il évoque « tous les souvenirs qu’elle vient de remuer, et telle lettre de mon père à un prêtre, avant sa conversion, à laquelle la vôtre fait écho [38]. » Toute la famille Valensin est d’ailleurs impliquée dans ces relations. Auguste, son frère Albert et sa sœur Marguerite ne se contentent pas de méditer sur leur judéité : ils entendent la rendre féconde. Avec la conviction affirmée d’agir en mémoire de leur père, tous trois s’engagent alors pour obtenir la conversion de la jeune femme : « peut-être toute la famille s’y mettant, écrit Marguerite, arriverons-nous avec la grâce de Dieu, à achever le travail commencé [39]! » Andrée reçut finalement le baptême, mais mourut peu de temps après.
32Dans le même temps, le Père fréquente plusieurs intellectuels juifs, comme Henri Bergson ou Xavier Léon [40]. Il entretient également de nombreuses relations dans les milieux catholiques libéraux ou gagnés au philosémitisme. À Lyon, il côtoie ainsi des personnalités proches de la démocratie chrétienne, comme le philosophe Paul Archambault. Il a l’occasion également de rencontrer à plusieurs reprises le Père Joseph Bonsirven, pionnier du dialogue avec le judaïsme. Tous deux furent assez proches pour que ce dernier déplorât une grande perte pour lui-même lors de la disparition de Valensin, affirmant : « Nous causions intimement [41] ».
33Cette orientation libérale amena tout naturellement Valensin à partager l’éthique des jésuites les plus engagés contre les totalitarismes [42] : Henri de Lubac, Jean Chaillet, Yves de Montcheuil ou Gaston Fessard, tous figurent parmi les confrères que le Père a appréciés, voire patronnés dans leurs travaux. Lorsque Fessard lui envoie un exemplaire de son ouvrage Pax Nostra (1936), qui condamne le nazisme au nom des Droits de la personne, Valensin le « félicite sans réserve de cette belle réussite [43] » et s’emploie alors à diffuser l’opuscule autour de lui, notamment auprès d’Henri Bergson ou de Maurice Blondel [44]. Par ses séjours réguliers outremonts, Valensin put de surcroît mesurer le rapprochement du régime mussolinien avec l’Allemagne nazie. En juillet 1938, le Duce déclencha une violente campagne antisémite. Ce que le jésuite constata durant cet été l’horrifia. Il se dit alors « écœuré du spectacle qu’offre ce pays. D’un an à l’autre, quel changement ! L’Italie est nazifiée […] En même temps, une campagne raciste maladroite qui bientôt ne le cédera en rien à l’hitlérisme [45]. »
Temps d’épreuves, temps d’échanges : de Vichy à la Libération
Face à l’antisémitisme de Vichy (1940-1942)
34Lorsque la guerre éclate, Valensin est depuis quatre ans installé à la résidence jésuite de Nice. Après la débâcle du printemps 1940, l’armistice signé avec l’Italie le 24 juin laisse le département des Alpes-Maritimes en zone libre, sous l’autorité du gouvernement de Vichy. Le Père n’avance guère de jugement politique sur le nouveau régime. Certes, il n’ignore rien des mesures d’épuration qui commencent à pleuvoir. Mais il fait la part de la politique et celle de la religion : son souci est d’ordre pastoral avant tout. En 1942 encore, il écrit : « J’ai mes idées sur la politique, mais je n’en parle pas. Je ne veux pas qu’une âme soit empêchée de recourir à moi du fait de mes opinions politiques. Gaullistes et antigaullistes ont plein accès auprès de moi et nous parlons sans aucune gêne [46]. » Aussi ne voit-il aucun problème à poursuivre ses conférences au Centre universitaire méditerranéen (CUM), pourtant ouvertement repris en main par le nouveau régime. Deux exemples témoignent pourtant de son hostilité publique à la politique antisémite de l’État français.
35Chassé de la Sorbonne en juin 1940 par l’occupation de la zone nord, le grand médiéviste Gustave Cohen officia quelque temps à Nice, où il fit la connaissance du Père Valensin. Lorsque son ami fut exclu de l’Université par le premier statut des Juifs (3 octobre 1940), le jésuite prit ouvertement fait et cause pour lui, non sans panache, profitant du crédit de conférencier réputé qu’il s’était acquis dans la capitale azuréenne :
Lorsque je fus chassé, en exécution des lois raciales […], le P. Valensin me dit : “Monsieur, vous êtes victime d’une grande injustice” et, avec l’autorité qu’il mettait en toutes choses, il m’ordonna de louer la salle Carlonia et d’y continuer le cours public que j’avais commencé sur La Poésie française au Moyen Age et au xvie siècle. Son patronage ostensible me protégeait contre la sinistre légion de Darnand […].
Pas une leçon, pas une réunion où malgré d’absorbantes occupations et de constantes études, il n’assistât [47].
37Devant la multiplication des incidents antisémites, Gustave Cohen dut cependant accepter le poste que lui offrait l’université de Yale aux États-Unis. Le Père organisa alors lui-même son départ via Barcelone en juin 1941 : « Mais ma fille doit passer son baccalauréat ! s’exclama le malheureux proscrit – Pas question de baccalauréat, trancha le Père, je vous mets dans le train. » Soucieux de faciliter le séjour américain de son ami, Valensin le dota même d’une lettre de recommandation à l’intention d’un confrère canadien qui avait naguère passé plusieurs années à Nice. Il y expliquait notamment les mérites du professeur « que les lois racistes amènent à s’expatrier momentanément [48]. »
38Dans le même temps, Valensin se signala par un autre geste symbolique. Le 11 janvier 1941, à l’heure où la presse niçoise versait volontiers dans les tirades antisémites, il fit publier dans le journal catholique de Nice, L’Éveil, un article en hommage à Bergson, qui venait de mourir. Alors même que les milieux antisémites dénonçaient chez Bergson une pensée « plus dissolvante que créatrice [49] », Valensin rappelait ses propres visites auprès du philosophe et célébrait « un théoricien averti de la plus haute spiritualité ». Il souligna surtout que Bergson se montra « ennemi plus que personne de toute publicité, de celle surtout qui se fût attachée à des événements de son âme, inquiet de paraître vouloir se désolidariser d’une race à laquelle il ne se souvenait d’appartenir qu’au moment où il y avait à souffrir d’en être ». Il est vrai que le Père songea aussi opportunément à se placer sous les bons auspices de Jacques Chevalier, alors ministre de l’Instruction publique [50].
39Ce texte fut repris dans La Croix le 26 janvier suivant. Maurice Blondel apprécia l’article et s’empressa de le communiquer au petit cercle de semi-proscrits qui gravitait près de lui – et que Valensin ne dédaignait pas de fréquenter –, où se distinguait particulièrement Léon Brunschvicg, poursuivi pour ses origines juives et caché à Aix sous un nom d’emprunt [51]. Faut-il pour autant voir dans la publication de cet article un acte de résistance passive aussi héroïque que Marie Rougier et Henri de Lubac ont pu l’affirmer ? Ce texte semble en réalité peu de choses par rapport à certaines diatribes qui avaient pu échapper à la censure, comme celle du Père Fontoynont défendant « la destinée manifeste du peuple juif [52] ». Mais il est vrai que les origines juives du Père Valensin exposaient bien davantage sa sécurité.
Au plus fort des persécutions (1942-1944)
40L’évolution du contexte politique et militaire devait en effet accroître le danger. En novembre 1942, après le débarquement allié en Afrique du Nord, l’Italie occupa une grande partie du Sud-est français. Les nouvelles autorités d’occupation s’employèrent certes à contrecarrer la politique antisémite de Vichy ; mais, le 8 septembre 1943, ce furent les Allemands qui prirent le contrôle de la région : les persécutions devaient alors atteindre leur comble. Le Père Valensin semble alors avoir dû faire face à de lourdes menaces. Un de ses proches, André Thérive, se souvient que « après 1940, il eut du mal à faire reconnaître son “aryanisme” [53]. » Marie Rougier et Henri de Lubac vont plus loin en affirmant, non sans exagération peut-être, que les années 1942-1944 furent « deux années de crainte continuelle. À chaque instant ce jésuite de race juive pouvait être reconnu, arrêté, envoyé aux camps d’extermination… Tout ce qui pouvait amener l’attention sur lui risquait d’amener le dénouement tragique [54]. » Nice bruissait alors probablement des bruits relayés depuis plusieurs années par les milieux d’Action française à propos de la judéité du Père. L’affaire alla très loin, semble-t-il. André Billy, écrivain et chroniqueur au Figaro, qui lui aussi connut bien Valensin, se souvient ainsi que « sous l’occupation, Auguste Valensin fut, sur la foi de son nom, dénoncé aux Allemands. Il dut s’enfuir de Nice et se cacher [55]. »
41De quels éléments dispose-t-on pour confirmer cette assertion ? Les pages du journal du Père concernant les années 1941 à 1943 sont lacunaires ou absentes, ce qui peut d’ailleurs constituer un premier indice : il est fort probable qu’elles ont été détruites par précaution. Plusieurs religieux de son entourage avaient d’ailleurs fait de même, comme le Père Fontoynont, qui détruisit ses papiers précisément pour ne pas compromettre son ami [56]. Les signaux d’alarme, il est vrai, ne manquaient pas. Le Père avait naguère lié amitié avec une jeune Juive tuberculeuse, Mme Bernadas, à laquelle il rendit visite régulièrement jusqu’à la mort de celle-ci. Or au début d’octobre 1943, un mois à peine après l’entrée des troupes allemandes dans Nice, la mère de cette jeune femme, Rebecca Margoliès, alors âgée de 73 ans, fut arrêtée par la Gestapo [57]. Touché de près dans ses relations, il est probable que le jésuite sentit alors le péril de la situation pour lui-même. Au printemps 1944, le bruit circula même que la Gestapo disposait d’une liste de personnalités suspectes, destinées à être arrêtées et déportées d’un moment à l’autre [58]. Peut-être l’abbé Girault, résistant notoire que Valensin comptait dans ses relations, lui recommanda-t-il de fuir ? Toujours est-il que le jésuite dut quitter la ville, dans des conditions rocambolesques si l’on doit en croire André Billy : « Deux mois avant la Libération, son supérieur lui ordonna de quitter Nice sans délai. À la barbe des Allemands, une voiture d’ambulance, qui le transportait chez un de ses amis, M. Léopold Dor, passa le pont du Var cinq minutes avant sa destruction par l’aviation anglaise [59]. »
42Le même témoignage précise par ailleurs que, pendant la guerre, le Père « aurait voulu se solidariser publiquement avec les Juifs persécutés. Il commit pour eux mille imprudences. » L’affirmation semble d’ailleurs confirmée par Marie Rougier et Henri de Lubac, qui affirment qu’à partir de 1942, et malgré les risques, il « n’en continuait pas moins, en secret, quelquefois avec peu de prudence, son œuvre charitable auprès des hommes traqués ou emprisonnés par la Gestapo [60]. » Il convient donc de tenter d’approfondir ces affirmations, pour autant que les sources le permettent.
43À l’automne 1940, Gustave Cohen présenta à Valensin l’un de ses élèves, Moussa Abadi, jeune Juif d’origine syrienne qui avait échoué à Nice à la suite des mesures antisémites d’octobre 1940. Le jésuite prit en estime le jeune homme, avec qui il resta en contact régulier. Or Abadi s’alarma particulièrement de la situation de plus en plus intenable des Juifs de France : en juillet 1942, la rafle du Vel’ d’Hiv marqua un tournant dans la politique de Vichy ; dès le 26 août eut lieu la première rafle d’envergure à Nice [61]. C’est alors qu’en juillet 1943 il fut sollicité par Maurice Brener, le délégué clandestin du Joint (ou American Jewish Joint Distribution Committee, le principal organisme de financement de la résistance juive), pour organiser un réseau de sauvetage des enfants juifs en prévision d’une occupation allemande qui semblait inévitable [62]. Abadi s’ouvrit de ce projet au Père Valensin, qui fut l’entremetteur indispensable à la mise sur pied du réseau. « Il est allé voir Monseigneur Rémond, et il m’a fait savoir qu’il me recevrait le lendemain. Mais il ne lui avait pas dit pourquoi je voulais le voir [63]. » Lors de cet entretien, Abadi reçut le soutien total de l’évêque, qui lui donna une couverture au sein de l’évêché sous le nom de Monsieur Marcel : le « réseau Marcel » était né.
44Il n’était que temps : le 8 septembre 1943, les troupes allemandes s’emparaient de la région : les dizaines de milliers de Juifs français et étrangers qui s’y étaient réfugiés se trouvaient pris au piège. Dès le 10 septembre, la Gestapo commençait sa besogne à Nice [64]. Quelle part Valensin a-t-il alors pris personnellement à ces sauvetages ? Une lettre de Gustave Cohen, écrite après la tourmente, laisse ouvertes les conjectures : « Je vous remercie encore de tout ce que vous avez fait pour moi pendant mon séjour à Nice de novembre 1940 à juin 1941, de vos conseils, de vos visites, de votre amitié, de votre protection et de l’avoir prolongée sur mon très cher disciple Moussa Abadi-Marcel, sur mon bien-aimé Paul Bonfante et sur tous les persécutés [65]. » De tels mots laissent entendre que Valensin ne s’est pas contenté de mettre en relation Moussa Abadi et Mgr Rémond, mais qu’il aurait également accompagné son action et serait venu en aide à des « persécutés ». Mais ce point est difficile à éclaircir : on l’a dit, les documents de première main sur ces aspects ont vraisemblablement disparu.
45Il est cependant établi que la résidence jésuite de Nice fut un centre actif d’aide aux Juifs persécutés [66]. Dès 1940, les Pères viennent en aide aux Juifs mis en difficulté matérielle par les statuts antisémites. À partir de 1942, leur implication croît encore. Entrés en relation avec le Joint, ils prennent contact, dès l’automne 1943, avec deux importants réseaux de protection des Juifs persécutés : le Groupe d’action contre la déportation ou « Service André », puis le mouvement des Éclaireurs israélites de France (EIF), encore appelé la Sixième. Il semble même que, forte de ces liens, la résidence devînt l’un des centres de fabrication de faux papiers pour les Juifs de Nice, tout comme l’évêché. La Gestapo fut amenée à placer la résidence sous surveillance et même à y intervenir (le chef local des EIF, Claude Gutmann, fut ainsi arrêté alors qu’il sortait du bâtiment). Compte tenu de ce degré d’implication, il est impossible que tous les Pères de la résidence n’aient pas été collectivement engagés dans ces activités, y compris Valensin. S’il est difficile d’apporter la preuve de son implication personnelle dans ces réseaux, une forte présomption existe donc en ce domaine.
Les nouveaux contacts de l’après-guerre
46Il est certain en revanche que Valensin fréquenta des responsables de premier plan de la résistance juive après la Libération. C’est par l’intermédiaire de Moussa Abadi que, le 27 novembre 1944, Valensin fit la connaissance de Maurice Brener, qui avait dirigé le Joint pendant la guerre. Très ouvert au catholicisme, Brener avait déjà lu avec émotion, sur les conseils d’Abadi, l’un des ouvrages de spiritualité du Père Valensin. Aussi le jésuite nota-t-il après cette première rencontre : « Il me semble que Brener est fortement travaillé et penche vers le catholicisme… J’ai détruit un certain nombre d’idées fausses et de préjugés… Si bien que, ce matin, j’ai porté à l’hôtel de Brener mon Initiation en même temps que le discours sur Israël dont Abadi avait dit qu’il l’avait autrefois recopié [67]. »
47Les deux hommes restèrent dès lors liés. On sait, par une discrète annotation de Marie Rougier, que c’est le Père qui célébra, dans une chambre de l’hôtel Ruhl, le mariage de Maurice Brener avec une convertie au catholicisme, la sculptrice Nour-Zadé (le choix de ce lieu incongru témoignant d’ailleurs d’une évidente volonté de discrétion) [68]. Les Brener vécurent ensuite à Paris, mais restèrent assez longtemps en relation avec le jésuite, qui rendit visite à ces amis « charmants et fidèles » lors de chacun de ses séjours parisiens. Par leur intermédiaire, Valensin fréquenta d’autres Juifs de la capitale, en particulier Edmond Fleg qu’il rencontra en mai 1948, trois mois à peine après que ce dernier contribua à la création de l’Amitié judéo-chrétienne [69]. Cependant, même si une perspective apologétique à long terme n’est pas absente, le Père cherche moins à provoquer les conversions qu’à porter un témoignage spirituel bienveillant de la part des catholiques envers les Juifs et les néo-convertis.
48Peu après la Libération, Valensin eut l’occasion de manifester une dernière fois en public son philosémitisme. Le 29 décembre 1944, le religieux reçut la visite d’Harry Stein-Evan, responsable local du Mouvement des jeunesses sionistes (MJS), l’un des mouvements juifs clandestins qui s’étaient illustrés pendant la guerre [70]. Il est possible que quelques membres du MJS aient fréquenté la résidence jésuite pendant la guerre, à moins que ce ne soit Moussa Abadi, désormais en charge de l’assistance aux Juifs du Sud-est et côtoyant donc de nombreux responsables de la résistance juive [71], qui ait recommandé son ami. Le jeune visiteur discuta longuement avec le Père et l’invita à prononcer deux conférences lors du prochain congrès national du MJS, ce qui témoigne du prestige que le jésuite pouvait avoir dans la communauté juive [72]. Le lendemain, Valensin se rendit au local des Jeunesses sionistes pour présenter « Aragon, poète de la résistance ». Il fut accueilli avec une liesse qui le ravit ; les jeunes gens entonnèrent des chants hébraïques : « Tous chantent avec entrain… Et c’est beau. À ma droite, j’ai Abadi. Puis le chef me présente, comme un ami et une lumière. […]. Toute cette jeunesse, venue en congrès des quatre coins de la France, représente plusieurs nations, et diverses classes sociales. Mais tout cela est fondu [73]. »
49Le lendemain après-midi, il donne une conférence sur « L’Église et les Juifs », adaptée d’un projet sur « L’Église et le racisme ». Cette fois, la salle est « disposée pour une séance d’études. Longues tables. Tout le monde a des papiers pour prendre des notes. Pas de présentation. Après la conférence, des questions. C’est très animé [74]. » Cette dernière remarque, aussi laconique qu’énigmatique, laisse entendre que ses propos n’ont pas été nécessairement bien accueillis par tous. S’agissait-il d’un plaidoyer pour le rapprochement des deux religions ou d’un exposé tendancieux sur le rôle des institutions chrétiennes auprès des Juifs pendant la guerre ? Il est difficile de le dire, puisque le texte de cette intervention semble ne pas avoir été conservé. Cette dernière intervention publique suffit en tout cas à illustrer l’intérêt porté par le jésuite au peuple dont il portait, en partie, l’héritage.
50Au terme de sa vie, Valensin consentit à lever son « grand secret » face à la postérité : sur son lit de mort, il confia ses origines juives au Supérieur de la résidence de Nice et lui demanda désormais de les faire connaître. Il mettait ainsi un terme à la discrétion imposée par son statut de jésuite qui l’avait contraint à ne s’engager publiquement qu’en de rares occasions au nom du philosémitisme – non sans un certain courage parfois, comme pendant l’Occupation. Contrairement au P. Bonsirven, il ne s’est guère intéressé à la religion juive, préférant le contact direct avec les personnes juives. Il avait ainsi cultivé avec soin de nombreux liens privés – non sans perspective apologétique – avec plusieurs Juifs, fameux ou anonymes.
51Le cas d’Auguste Valensin éclaire ainsi deux types d’engagement philosémite : d’une part, œuvrer en direction des chrétiens pour améliorer l’image des Juifs ou du judaïsme ; d’autre part agir en direction des Juifs pour abattre leurs préventions envers l’Église et le christianisme, et favoriser le dialogue en vue d’une conversion future. C’est d’ailleurs cette dernière attitude qui fut prédominante chez lui, même s’il ne constitua pas de véritable réseau de conversion, comme on pourrait en trouver autour des Maritain. Tout en illustrant bien l’évolution du regard catholique envers les Juifs, Valensin a fait de ses relations avec le judaïsme une affaire avant tout familiale et intime, manifestant une forme originale de philosémitisme, éminemment personnelle, tout à la fois novatrice dans sa conception religieuse et discrète dans ses manifestations publiques.
NOTES
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[1]
André Billy, « Les propos du samedi », Le Figaro littéraire, 27 janvier 1962.
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[2]
Archives françaises de la Société de Jésus (désormais AFSJ), fonds Auguste Valensin (TVa 52 – I, dossier 0).
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[3]
Ibid.
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[4]
Sur Félix Valensin, voir Marie Rougier et Henri de Lubac, Auguste Valensin. Textes et documents inédits (désormais TDI), Paris, Aubier, 1961, pp. 13, 30-32, ainsi que les documents familiaux inédits dans AFSJ, TVa 52 – I, dossier 0.
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[5]
Theodor Lessing, Der jüdische Selbsthasse, 1930 (La Haine de soi : le refus d’être juif, Paris, Berg, 1991).
-
[6]
Notes autobiographiques, AFSJ, TVa 52 – I, dossier 0.
-
[7]
Note de 1931, citée sans référence in TDI, pp. 13-14.
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[8]
Notes autobiographiques, AFSJ, TVa 52 – I, dossier 0.
-
[9]
TDI, pp. 28-33.
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[10]
Note de 1931, citée sans référence in TDI, p. 14.
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[11]
Note anonyme, s. d. [après 1953], AFSJ, TVa 52 – I, dossier 0.
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[12]
TDI, p. 32.
-
[13]
Lettre à André Billy, s. d., citée in André Billy, op. cit.
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[14]
Cette citation et les précédentes sont tirées du carnet de voyage n°1, f° 74-75, ASFJ, TVa 62. Voir aussi TDI, p. 167.
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[15]
Sur ces aspects, voir TDI, pp. 176-183.
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[16]
Lettre à sa sœur Marguerite, s.d. [1929], in TDI, p. 181.
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[17]
Lettre à Andrée Valensin, s.d. [vers 1931-1932], in TDI, p. 188.
-
[18]
Journal, 21 septembre 1932, in TDI, pp. 251-252.
-
[19]
Lettre à Andrée Valensin, s.d. [vers 1931-1932], in TDI, p. 190.
-
[20]
Jacques Prévotat, Catholiques français et Action française. Étude de deux condamnations romaines, thèse de doctorat d’État, sous la direction de René Rémond, Université de Paris X – Nanterre, 1994, pp. 704 et 919.
-
[21]
Cité s. d. in TDI, p. 200.
-
[22]
Étienne Fouilloux, « Ébauche d’un philosémitisme catholique », Les Cahiers de la Shoah, sous la direction d’André Kaspi, Paris, Liana Lévi, 1995, pp. 35-50, repris in Les Chrétiens français entre crise et libération (1937-1947), Paris, Éditions du Seuil, 1997, pp. 31-47. Voir également Laurence Deffayet, La Redécouverte des origines juives du christianisme et l’émergence du dialogue judéo-chrétien dans l’Église catholique 1926-1962, thèse de doctorat sous la direction de Philippe Boutry (encore inédite), Université de Paris I – Panthéon-Sorbonne, décembre 2006, chapitre 1 : « Les espoirs déçus des Amis d’Israël (1926-1928) », pp. 16-49.
-
[23]
Cette citation et les précédentes proviennent de l’allocution à la Messe pour le retour d’Israël, 24 mai 1927, in TDI, pp. 194-197.
-
[24]
Marc d’Aniel, « Quatre quarts d’heure avec le R.P. Auguste Valensin », Vers l’Avenir, novembre 1927.
-
[25]
Lettre de Raïssa Maritain à Auguste Valensin, 29 octobre 1930, AFSJ, TVa 52.
-
[26]
Cité par Pierre Pierrard, Juifs et catholiques français de Drumont à Jules Isaac (1886-1945), Paris, Fayard, 1970, pp. 252-253.
-
[27]
TDI, p. 199.
-
[28]
Lettre à Andrée Valensin, s.d. [vers 1931], citée in TDI, p. 184.
-
[29]
Lettre de Joseph Bonsirven à Jacques Maritain, 6 avril 1928, cité par Michel Fourcade in Feu la modernité ? Maritain et les maritainismes, thèse de doctorat sous la direction de Gérard Cholvy, Université de Montpellier III – Paul-Valéry, 2000, p. 925.
-
[30]
Lettre de Marguerite Valensin à son frère Auguste, 2 juillet 1936, AFSJ, TVa 50/2.
-
[31]
Carnet de voyage n° 20, f° 26 v., AFSJ, TVa 62.
-
[32]
Voir en particulier Joseph Bonsirven, Juifs et chrétiens, Paris, Flammarion, 1936.
-
[33]
Sur ces relations, voir TDI, pp. 184-193.
-
[34]
Lettre à Andrée Valensin, s.d. [vers 1931], cité in TDI, p. 185.
-
[35]
Ibid. p. 187.
-
[36]
Voir Frédéric Gugelot, La Conversion des intellectuels au catholicisme en France (1885-1935), Paris, CNRS-Éditions, 1998, p. 186.
-
[37]
Lettre à Henri Valensin, 6 juillet 1932, TDI, p. 192.
-
[38]
Lettre à Andrée Valensin, s. d., [vers 1931-1932], TDI, p. 185.
-
[39]
Lettre de Marguerite Valensin à son frère Auguste, 2 juillet 1936, AFSJ, TVa 50/2.
-
[40]
Cf. Stéphane Souliè, « Xavier Léon, philosophe », Archives juives. Revue d’histoire des Juifs de France, n° 39/1, 1er semestre 2006, pp. 143-147 (N.D.L.R.).
-
[41]
Lettre de Jacques Bonsirven au Père supérieur de la résidence de Nice, décembre 1953 (AFSJ, TVa 115/5). Sur le Père Bonsirven, voir Laurence Deffayet-Loupiac, « Le rôle du Père Bonsirven dans le renouveau du dialogue judéo-chrétien dans l’entre-deux-guerres », Revue d’Histoire de l’Église de France, t. 89, n° 222, janvier-juin 2003, pp. 81-103, ainsi que l’article consacré par cet auteur au personnage dans le présent numéro.
-
[42]
Dominique Avon et Philippe Rocher, Les Jésuites et la société française, Toulouse, Privat, 2001, pp. 149-153, et Jean Lacouture, Jésuites. Une multibiographie, t. 2 : Les Revenants, Paris, Éditions du Seuil, collection « Points », 1991, pp. 416-431.
-
[43]
Lettre à Gaston Fessard, 25 avril 1936, AFSJ, Fonds Fessard, Pax Nostra, 1/7 – 5.
-
[44]
Ibid., 2 juin 1936.
-
[45]
Lettre à Maurice Blondel, 31 août 1938, recopiée dans une note d’Henri de Lubac à partir du Journal, AFSJ, TVa 52/2-XI.58, également in TDI pp. 286-287.
-
[46]
Cité in Jésuites de l’Assistance de France, 1954, n° 3, p. 32.
-
[47]
Cette citation et la suivante proviennent des souvenirs de Gustave Cohen, cités in TDI, pp. 309-310.
-
[48]
Lettre au père Sheehy, 15 juin 1941, AFSJ, TVa 52/2 – XII.62.
-
[49]
Ralph Schor, L’Antisémitisme en France dans l’entre-deux-guerres. Prélude à Vichy, Bruxelles, Éditions Complexe, 2005 (2e édition), p. 102.
-
[50]
Auguste Valensin, « Henri Bergson », L’Éveil de Nice, 11 janvier 1941. Voir aussi TDI, pp. 307-308.
-
[51]
Voir la lettre de Maurice Blondel à Auguste Valensin, 28 janvier 1941, in Maurice Blondel et Auguste Valensin, Correspondance, vol. 3, Paris, Aubier, 1965, p. 212 ; et TDI, p. 310.
-
[52]
Victor Fontoynont, « La destinée manifeste du peuple juif, le chapitre 11 de l’épître aux Romains », Rencontre, n° 4, « Le sens chrétien de l’histoire », Lyon, décembre 1941, pp. 105-112.
-
[53]
André Thérive, « Le souvenir du Père Auguste Valensin », Ecclésia, n° 163, octobre 1962, p. 50.
-
[54]
TDI, pp. 310-311.
-
[55]
André Billy, « Les frères Valensin », Le Figaro, 18 janvier 1962.
-
[56]
Donatien Mollat, s. j., « Le Père Victor Fontoynont », Amis du cœur de Jésus, 1959, pp. 399-409.
-
[57]
L’arrestation et la déportation de Rebecca Margoliès furent rapportées par le Père lui-même à Marie Rougier, AFSJ, TVa 73/4. Cette déportation est confirmée et datée dans Serge Klarsfeld, Les Rafles des Juifs à Nice (1942-1944), Paris, FFDJF-Beate Klarsfeld Foundation, 2003 (2e édition), p. 83.
-
[58]
Roger Martin du Gard, Journal, t. III, Paris, Gallimard, 1993, p. 768. Le romancier, proche du Comité national des écrivains hostile à Vichy, était alors en lien à la fois avec Valensin et l’abbé Girault.
-
[59]
André Billy, « Les propos du samedi », Le Figaro littéraire, 27 janvier 1962. Ce départ est confirmé par d’autres documents, dont une chronologie dressée par Marie Rougier, qui note pour l’été de la Libération : « réfugié à l’Ouliveto », AFSJ, TVa 52.1.
-
[60]
TDI, pp. 310-311. Ces auteurs restent pourtant très discrets sur ces événements, se contentant de huit lignes évasives. On relèvera du reste une inexactitude : la Gestapo n’intervient à Nice qu’à partir de septembre 1943.
-
[61]
Voir Serge Klarsfeld, op. cit.
-
[62]
« Témoignage de Mr Abadi, Directeur Régional de l’Union O.S.E. », octobre 1944, CDJC, CMXCIV-9/1.
-
[63]
Allocution de Moussa Abadi au colloque des « Enfants cachés », Paris, 1995, p. 3, CDJC, CMXCIV-9/1. Sur le rôle important de Mgr Rémond, voir Ralph Schor, Un évêque dans le siècle : Mgr Paul Rémond, Nice, Serre Éditeur, 2003 (2e édition), pp. 116-125.
-
[64]
Serge Klarsfeld, op. cit., pp. 50-65.
-
[65]
Lettre de Gustave Cohen à Auguste Valensin, 28 janvier 1945, AFSJ, TVa 73 [nous soulignons].
-
[66]
Nous résumons ici l’analyse tirée des feuillets d’un rapport interne à la Compagnie de Jésus, constitué peu après la fin de la guerre, sur les activités de sauvetage entreprises par les jésuites de France, AFSJ, C.Pa 619. Les informations de ce document sont éclairées par Organisation juive de combat. Résistance/sauvetage, France 1940-1945, Paris, Autrement, n° 85, 2002, et recoupées par Serge Klarsfeld, op. cit., p. 62.
-
[67]
Journal manuscrit, 28 novembre 1944, f° 44, § 2213, AFSJ, TVa 56/2. L’Initiation catholique est un petit opuscule rédigé à l’intention des catéchumènes. Quant au « discours sur Israël », il s’agit de l’homélie de la messe de 1927 célébrée à Notre-Dame de Sion, déjà évoquée.
-
[68]
Cette annotation se trouve au bas d’une fiche sur laquelle Henri de Lubac avait relevé, à partir du Journal de Valensin, la rencontre de celui-ci avec Brener, AFSJ, TVa 52/2-XIII.
-
[69]
Sur ces diverses rencontres, voir notamment les carnets de voyage n° 20 (1946), f° 4 v., n° 21 (1947), f° 12-13 et n° 23 (1948) f° 12 r., AFSJ, TVa 62.
-
[70]
Serge Klarsfeld, op. cit., p. 61, et Organisation juive de combat, op. cit., pp. 117-121, 161-162.
-
[71]
Lettre de Georges Garel à Moussa Abadi, 27 septembre 1944, Centre de documentation juive contemporaine, CMXCIV-14/12341.
-
[72]
Auguste Valensin, Journal manuscrit, 28 (en fait le 29) décembre 1944, f° 55, § 2241, AFSJ, TVa 56/2.
-
[73]
Journal manuscrit, 30 décembre 1944, f° 56-57, § 2244-2245, AFSJ, TVa 56/2.
-
[74]
Ibid.