Couverture de AG_725

Article de revue

La redécouverte des quartiers coloniaux en Indonésie

Pages 31 à 63

Notes

  • [1]
    Devenue aujourd’hui, Jalan Medan Merdeka Utara.
  • [2]
    Palais de l’Indépendance.
  • [3]
    Ces allées sont devenues aujourd’hui les avenues Hayam Wuruk et Gadjah Mada.
  • [4]
    Kriswandhono, 2011, 2012.
  • [5]
    Widjaja Martokusumo, 2002.
  • [6]
    Grahadwiswara et alii, 2014.
  • [7]
    Budiharjo Eko, 1997.
  • [8]
    Coté Joost, 2002.
  • [9]
    Roosmalen Pauline, 2003, 2006, 2013.
  • [10]
    Gill Ronald, 1995, p. 65.
  • [11]
    Cabaton Antoine, 1910, p. 38-39.
  • [12]
    Gill, Ronald, 1995, p. 81.
  • [13]
    Leushuis Émile, 2014, p. 80-83 ; Merrillees Scott, 2000-2010, p. 188-211.
  • [14]
    Il est vrai que plusieurs d’entre elles avaient déjà été démolies et remplacées par des bâtiments officiels dans les années 1920.
  • [15]
    Merrillees Scott, 2012, p. 58-147.
  • [16]
    Anciennes résidences des gouverneurs généraux.
  • [17]
    Merrillees Scott, 2000-2010, p. 160-187 ; Leushuis Émile, 2014, p. 84-85.
  • [18]
    Décret du gouverneur, n° 457/1993.
  • [19]
    Règlement administratif, n° 9/1999 sur la protection du patrimoine.
  • [20]
    Toute cette politique est financée par des prêts étrangers : l’hôtel Indonesia est construit avec des fonds japonais, le complexe sportif de Senayan grâce à un prêt soviétique, et l’échangeur du même nom avec le concours des États-Unis. Abeyasekere Susan, 1987, p. 170 et 178.
  • [21]
    Giebels Lambert J., 1986, p. 102.
  • [22]
    Heuken Adolf, 2014, p. 47.
  • [23]
    Thysse Jac. P., 1950, dans Budihardjo Eko, 1987, p. 71.
  • [24]
    Romondt V. R. van, 1950, p. 34, dans Budihardjo Eko, 1987, p. 72.
  • [25]
    De Mello & al., 2004, p. 30-37.
  • [26]
    Olly, 1985, dans Wijanarka, 2006, p. 14-22.
  • [27]
    « Projects such as the Asian games, the National Monument, Independance Mosque, the Jakarta By-pass, and so on, are examples of « Nation – Building » (...) of the whole Indonesian people striving to recover our national identity. » Sœkarno, 1963, Ambeg Parama Aria, Jakarta, Jajasan Prapantja, cité dans Jacques Leclerc, 1993, p. 51.
  • [28]
    Roosmalen Pauline K. M., 2013, p. 6-7.
  • [29]
    Yuswadi Saliya, 1998, p. 126.
  • [30]
    Institute of Indonesian Architects.
  • [31]
    Sukada Budi A., 1998, p. 133 ; Tjajhono Gunawan, 1998, p. 135.
  • [32]
    Les emprunts se limitent le plus souvent à la forme des toitures traditionnelles. Voir à ce sujet Sukada Budi A., 1998, p. 132-133.
  • [33]
    Abdhurahman Wahid dit « Gus Dur », Megawati Sœkarnoputri, fille du premier président, Bambang Yudoyono, avant l’actuel président Joko Widodo appelé familièrement « Jokowi ».
  • [34]
    www.Inboundtourism-nbtc.nl, consulté le 17/08/2017.
  • [35]
    Comme, par exemple, l’ouvrage très célèbre à Jakarta, réédité de nombreuses fois de A. Heuken, 1982, Historical Sites of Jakarta, Jakarta, Cipta Loka Caraka.
  • [36]
    Yulianto Sumalyo, Arsitektur Kolonial Belanda di Indonesia, Yogyakarta, Gadjah Mada University Press, 1993, traduction d’une thèse de doctorat au titre similaire soutenue Paris, à l’EHESS en 1988.
  • [37]
    Emile Leushuis, Panduan Jelajah Kota-kota Pusaka di Indonesia, Yogyakarta, Ombak, 2014, ouvrage réalisé grâce à un programme de coopération entre le Badan Pelestarian Pusaka Indonesia et le Program Shared Heritage Funds du ministère des Affaires étrangères néerlandais.
  • [38]
    À l’angle actuel des avenues Veteran et Modjopahit.
  • [39]
    Merrillees Scott, 2000, p. 122.
  • [40]
    Roosmalen Pauline K. M., 2003, p. 127 et 2013, p. 10-12.
  • [41]
    Law n° 5/1992 regarding Cultural Heritage (UU n° 5 tahun 1992, Tentang Benda Cagar Budaya)
  • [42]
    Roosmalen Pauline K. M., 2013, p. 11.
  • [43]
    UU 5/1992 Benda Cagar Budaya, (The Republic of Indonesia Law n° 5, regarding Cultural Heritage), loi révisée en 2010 (UU 11/2010 Benda Cagar Budaya) dans Budihardjo Eko, 1997, Appendix, p. 137-147 ; Roosmalen Pauline K. M., 2013, note 21, p. 23.
  • [44]
    Dinas Kebudayaan dan Permuseuman Provinsi Daerah Khusus Ibukota Jakarta, 2007, p. 2.
  • [45]
    Supriyati/Ani H, « Jakarta City told to revise regulations on cultural heritage protection », VOI/RRI World Service Voice of Indonesia, 3 juin 2012, disponible sur le site : http://en.voi.co.id/voi-news/1691-jakarta-city-told-torevise-regulations-on-cultural-heritage-protection consulté le 21/11/2016.
  • [46]
    Rulistia Novia D., « Menteng heritage house lies in ruins », The Jakarta Post, 29 novembre 2011, disponible sur le site : www.thejakartapost.com/news/2011/11/29menteng-heritage-house-lies-ruins. html, consulté le 21/11/2016.
  • [47]
    Arditya Andreas D., « Menteng heritage site renovation legal : Jakarta administration », The Jakarta Post, 9 juin 2012, disponible sur le site : www.thejakartapost.com/news/2012/06/09menteng-heritage-site-renovation-legal-jakarta-administration.html.
  • [48]
    Merrillees Scott, 2012, p. 155.
  • [49]
    Leushuis Émile, 2014, p. 70-71.
  • [50]
    Passchier Cor, 1998, p. 125.
  • [51]
    Leushuis Émile, 2014, p. 169.
  • [52]
    Le kraton Surakarta Hadiningrat construit dans la première moitié du XVIIIe siècle est toujours habité par le sunan Pakubuwono XIII. Ce dernier est aujourd’hui toutefois dépourvu de toute fonction officielle.
  • [53]
    Le kraton Ngayoyakarta Hadiningrat a été bâti à partir de 1756. C’est à la fois la résidence officielle du sultan Hamengkubuwono X et un haut lieu touristique.
  • [54]
    À Solo (Surakarta), une seconde demeure princière, plus modeste (un puro et non un kraton), a été érigée pour un prince rebelle, le Mangkunegaraan. Cette vaste demeure est toujours occupée par le prince Mangkunegara IX.
  • [55]
    Le Puro Pakualaman, construit en 1813, pour une branche cadette de la famille princière, est lui aussi toujours habité par le Pakualam X.
  • [56]
    Les influences locales sont particulièrement lisibles dans la structure même des palais : les deux premiers sont constitués d’un ensemble de cours, séparées par des portails monumentaux en accord avec la cosmologie javanaise. Les influences occidentales sont toutefois manifestes dans la structure des bâtiments, des pavillons et des divers kiosques construits dans les cours, ainsi que dans la décoration et le mobilier. En dehors de Java, les influences occidentales sont également sensibles, par exemple à Medan, sur la côte orientale de Sumatra, dans l’Istana Maimun, palais de style « mauresque », propriété du sultan de Deli, construit dans le dernier quart du XIXe siècle avec l’argent tiré des plantations de tabac. À Kalimantan, elles le sont tout autant dans le palais du sultan de Tenggarong reconstruit en béton dans les années 1930 par un architecte néerlandais. Il n’y a guère que dans les palais des sultans de la côte nord de Bornéo, à Pontianak, à Mempawa et à Singkawang, qu’elles le sont moins. Dans ces grandes demeures à planchers hauts, construites en bois, les influences malaises sont plus évidentes.
  • [57]
    Knapp Ronald G., 2010, p. 146-155.
  • [58]
    Hottin Christian, 2014, p. 9.
  • [59]
    Ooi Keat Gin, 2016, p. 190.
  • [60]
    King Victor T., 2016, p. 157.
  • [61]
    Dale Ole Johan, 1999, p. 121-126 et note 21, p. 157.
  • [62]
    URA, 1995, p. 15-26.
  • [63]
    Wong Tai-Chee, Yap Lian-Ho Adriel, 2004, p. 25.
  • [64]
    Christopher Silver, 2008, p. 176-177.
  • [65]
    Widjaja Martokusumo, 2002, p. 384.
  • [66]
    Dinas Kebudayaan dan Permuseuman, Provinsi DKI, Jakarta, 2007, p. 2.
  • [67]
    Robertson Ashley et al., 2014, p. 6-8.
  • [68]
    Dinas Kebudayaan dan Permuseuman, Provinsi DKI, Jakarta, 2007, p. 2.
  • [69]
    Idem, p. 3.
  • [70]
    Luar Batang signifie « au-delà de la poutre », en référence à la poutre qui barrait le chenal la nuit aux XVIIe siècle, Heuken A., 1982, p. 25.
  • [71]
    Au XVIIe siècle, le quartier était occupé par des Indiens Khojas, d’où le nom de « pekojan », puis, au siècle suivant, il s’est transformé en quartier arabe, « The lost of Kampong Arab Pekojan », Oud Batavia, Jakarta, 2013, vol. 2, p. 7 (article non signé).
  • [72]
    Pecinan : quartier chinois.
  • [73]
    Île fortifiée pour protéger l’entrée du port.
  • [74]
    Robertson Ashley et al., 2014, p. 11.
  • [75]
    Idem, p. 12-13.
  • [76]
    Dinas Kebudayaan dan Permuseuman, Provinsi DKI, Jakarta, 2007, p. 5- 9.
  • [77]
    Interviews de MM. Gathut Dwihastoro (Kepala Unit) et Norviadi S. Husodo (Kasie Pengembangan), Unit Pengola Kawasan Kota Tua, Dinas Pariwisata dan Kebudayaan Provinsi DKI Jakarta, du 2 août 2013.
  • [78]
    Dinas Kebudayaan dan Permuseuman, Provinsi DKI, Jakarta, 2007, p. 9-12.
  • [79]
    Construite en 1741 mais reconstruite en 1890 à la suite d’un incendie.
  • [80]
    L’ensemble de ces informations historiques est tiré de Jongkie Tio, 2007-2013.
  • [81]
    « The Little Netherland », l’ancienne oudestad, ou Klein Holland, pour reprendre des expressions couramment utilisées dans la littérature indonésienne..
  • [82]
    Les données législatives qui suivent sont tirées de Kriswandhono, 20011, p. 3-4.
  • [83]
    BAPPEDA : Badan Perencanaan dan Pembangunan Daerah, structure administrative en charge de la planification et de l’aménagement.
  • [84]
    Surat Keputusan Walikota KDH Tk II Semarang n° 646/50/Tahun 1992.
  • [85]
    Peraturan Daerah KDH Tk II Semarang n° 1/1999, n° 2/1999, n°.4/1999 ; Peraturan Daerah Kota Semarang n° 8/2003.
  • [86]
    Peraturan Walikota n° 12/2007.
  • [87]
    Badan Pengola Kawasan Kota Lama.
  • [88]
    Peraturan Daerah Kota Semarang Nomor 3, Pasal 25, dans Agastya Grahadwiswara et alii, 2014, sans pagination.
  • [89]
    Ibidem.
  • [90]
    Coté Joost, 2002, p. 126-130.
  • [91]
    Cette coopération entre les deux pays a connu des hauts et des bas, notamment à la suite des massacres de Dili qui, en 1991, ont entrainé pour un temps la rupture des relations diplomatiques.
  • [92]
    Roosmalen Pauline K. M., 2013.
  • [93]
    Stichting Comité Cadeau Indonesië.
  • [94]
    Roosmalen Pauline K. M., 2013, p. 15-16.
  • [95]
    Tarekat Hasti, et alii, 2015.
  • [96]
    Galeri Rehabilitasi.
  • [97]
    « Kissing Sleeping Beauty alive, A story for Kota Lama », april 2016, disponible sur le site : https://semarangkotalama.nl/wp-content/uploads/2016/04/Shared-Vision-Kota-Lama-Semarang.pdf consulté le 02/12/2017.
  • [98]
    Quatre biens culturels et quatre biens naturels.
  • [99]
    Informations disponibles sur les sites http://whc.unesco.org/fr/etatsparties/id et htpp ://whc.unesco.org/en/tentativelists/state=id, consultés le 28/11/2017.
  • [100]
    Tarekat Hasti, et alii, 2015.
  • [101]
    Idem, p. 35.
  • [102]
    Budiharjo Eko, 1997.
  • [103]
    Idem, p. 77-83.
  • [104]
    Le cas indonésien n’est pas unique : chez les voisins, notamment à Singapour, la mise ne valeur du patrimoine britannique est mise au service de la cohésion nationale et participe de l’écriture du « roman national ». Le lecteur intéressé se reportera à O. Sevin, 2013.
  • [105]
    Le Global Power City Index place Jakarta en 41e position en 2017 : « mori-m-foundation.or.jp/pdf/GPCI2017_en.pdf », consulté le 25/08/2018.
  • [106]
    Le lecteur peu informé se reportera utilement à Saskia Sassen, 2001, en particulier aux chapitres 9 et 10.
  • [107]
    Tjokrosaputro Teddy, 2011, p. 138-139 et p. 116-117.
  • [108]
    Louis-Philippe a, par exemple, plus encore que ses prédécesseurs, profondément remanié le palais au début du XIXe siècle.
  • [109]
    En moyenne, 1808,53 US$ par visite pour les Belges, voire 1497,46 US $ pour les Français, pour ne citer que ces exemples, contre 675,81 US $ pour les Singapouriens ou 676,60 US$ pour les Malaysiens sur la période 2010-2014. Indonesie, 2015, tabl. 9.4, p. 344.
  • [110]
    Logan William S., 2002, p. XVI.
  • [111]
    Coté Joost, 2002, p. 128.

1 On assiste en Indonésie depuis quelques années à un regain d’intérêt pour le legs architectural néerlandais. Se multiplient les projets de réhabilitation d’anciens quartiers coloniaux, notamment à Jakarta et à Semarang. Il s’agit là d’un phénomène relativement nouveau. Jusqu’à ces dernières années, la protection du patrimoine culturel se limitait soit aux héritages très anciens relevant de la période indienne de l’histoire indonésienne tels que les sanctuaires de Borobudur, de Prambanan, ou les temples de Java oriental soit, lorsqu’il s’agissait de bâtiments plus récents, d’ensembles étroitement corrélés au passé musulman des sociétés indonésiennes comme, par exemple, les mosquées, les tombeaux des « saints » responsables de la propagation de l’islam, ou les palais des différents sultans (kraton). Lorsque des constructions érigées par les colonisateurs étaient préservées, c’était quasiment toujours, soit des édifices cultuels (cathédrales, temples), soit des édifices qui incarnaient l’État comme, par exemple, l’ancienne résidence du gouverneur général sur Koningsplein Noord [1], devenue l’Istana Merdeka [2], résidence officielle du Président de la République, ou bien l’Hôtel de Ville de Jakarta, l’ancien siège de la VOC. Très peu de bâtiments ayant appartenu à des particuliers étaient conservés et, lorsqu’ils l’étaient, ils menaçaient ruine.

2 Depuis l’indépendance, et ce jusqu’à la fin des années 1990, on assistait bien plutôt à la destruction de quartiers entiers. C’est ainsi que les villas néerlandaises bâties le long des allées qui longeaient le canal Molenvliet [3] avaient presque toutes été rasées, de même que l’ensemble des compartiments chinois édifiés en application des règlements d’urbanisme coloniaux, de Glodok ou de Senen. Lorsque des quartiers d’habitations coloniaux subsistaient comme par exemple, Gondangdia ou Menteng à Jakarta, on assistait au fil des années à la destruction des anciennes villas des colons et à leur remplacement par des constructions nouvelles au goût du jour. Priorité était donnée à la percée de nouvelles voies dans le prolongement de la ville coloniale, comme les avenues Thamrin, Sudirman ou Rasuna Said à Jakarta, et à la création de nouveaux quartiers à l’instar de Kebayoran Baru, le « Nouveau Kebayoran » construit à l’ouest de Kebayoran.

3 Ce changement d’attitude vis-à-vis du legs architectural colonial est déjà en partie documenté, que ce soit par des chercheurs indonésiens ou par des chercheurs européens. Parmi les nombreuses publications des premiers, citons par exemple, les articles de Kriswandhono [4] ou bien d’A. Grahadwiswara, Z. Hidayat, de Widjaja Martokusumo [5] et H. Nurcahyanto [6], ainsi qu’un ouvrage collectif de synthèse dirigé par Eko Budiharjo [7]. En ce qui concerne les seconds, il y a notamment les écrits de Joost Coté [8] et de Pauline van Roosmalen [9]. Tous ces travaux dressent un constat, inventorient les biens à préserver, analysent des exemples concrets de constructions détériorées à jamais, ou bien au contraire réhabilitées, et font un certain nombre de recommandations. Peu d’entre eux néanmoins expliquent ce regain d’intérêt en interrogeant la notion de patrimoine, les raisons pour lesquelles tel bâtiment ou bien tel ensemble architectural dédaigné jusque-là est un jour « patrimonialisé », si ce n’est en invoquant la nécessité de développer le tourisme et de faire rentrer des devises.

4 L’objectif de cet article est de tenter de comprendre les raisons de ce changement d’attitude en refusant d’adopter une conception que l’on pourrait qualifier d’« essentialiste » du patrimoine qui supposerait d’admettre que le patrimoine existe en tant que tel de toute éternité. L’objectif est de s’interroger sur les fondements du choix que constitue la patrimonialisation en ne se contentant plus de considérer que certains bâtiments méritent d’être préservés simplement parce qu’ils sont anciens mais en poussant le raisonnement plus loin : en analysant les choix sociaux et politiques, ainsi que le regard porté par la société, à l’origine même de la notion de patrimoine. C’est donc au regard des évolutions récentes de la société et de la vie politique en Indonésie que la question de la redécouverte des vieux quartiers coloniaux et du patrimoine bâti indonésien sera posée.

1 La redécouverte du patrimoine bâti néerlandais est un phénomène récent

5 Au moment de l’indépendance, la perception qu’ont les autorités indonésiennes du passé architectural néerlandais est très négative pour au moins trois raisons. La première est qu’elles souhaitent rompre avec un passé honni, la seconde est qu’elles sont animées d’une idéologie modernisatrice qui l’emporte largement sur la notion de conservation, enfin la troisième est que le gouvernement, qui ne dispose de toute façon ni des moyens techniques ni des moyens financiers indispensables pour entretenir le legs architectural, a d’autres priorités. Ce n’est qu’à partir des années 1990 que le regard porté sur le bâti colonial commence à changer.

1.1 Jusqu’à la fin des années 1990, une bonne partie de ce patrimoine était vouée à la destruction

6 À Batavia, par exemple, le vieux quartier de Kota, au nord de la ville, à l’embouchure du Ciliwung, est totalement laissé à l’abandon. Certes, cette décrépitude ne date pas d’hier. Dans les premières années du XXe siècle le quartier est déjà entré en déshérence, en particulier à cause de son insalubrité et, dans les années 1920, nombre de demeures anciennes sont détruites et remplacées par des bâtiments commerciaux [10]. A. Cabaton en témoigne dès 1910 : « les colons se sont décidés à délaisser les maisons XVIIIe siècle à pignons et en briques rouges qui mettaient un coin de Hollande sous ses ombrages exotiques ; les touristes y vont encore les y admirer, mais elles ne sont plus occupées que par des bureaux ou habitées par des Chinois, des indigènes dont les kampongs (sic) s’entassent dans le fouillis le plus pittoresque et le plus malodorant, autour de ces demeures déchues et près de palétuviers d’un rivage mouvant, d’où montent sans cesse des fièvres dangereuses » [11].

7 La détérioration du quartier progresse toutefois fortement après l’indépendance. Le Grand canal (Kali Besar), creusé en 1631, s’est transformé en véritable égout à ciel ouvert depuis qu’il ne sert plus à la navigation. De part et d’autre, nombre de bâtiments sont détruits, moins des habitations, dans la mesure où le quartier ne possédait pas le caractère résidentiel du Tijgersgracht, que des bâtiments industriels ou des entrepôts [12], et ceux qui subsistent menacent ruine. La comparaison de deux photographies, la première prise en 1928 et la seconde en 2000 souligne l’ampleur des destructions (fig. 1). Seuls 8 bâtiments coloniaux qui apparaissent sur la photo prise en 1928, subsistent toujours en 2000 : l’Hôtel de Ville, le Palais de justice, le Bureau de poste, le Café Batavia construit dans la première moitié du XIXe siècle, les bâtiments de la Nederlandsche Handel Maatschappij, de la Nerderlandsch Indische Escompto, de la Chartered Bank et de la North Borneo Company.

Fig. 1

La place de l’Hôtel de Ville (Taman Fatahillah) au cœur du « Vieux Jakarta » City Hall Square in the heart of Jakarta’s Old Town

figure im1

La place de l’Hôtel de Ville (Taman Fatahillah) au cœur du « Vieux Jakarta » City Hall Square in the heart of Jakarta’s Old Town

8 Quatre kilomètres plus au sud, de l’ancien quartier de Weltevreden construit sur instruction du Gouverneur-Général Daendels à partir de 1808, il ne subsiste plus que les bâtiments officiels qui bordent le Lapangan Banteng (l’ancienne Waterlooplein) et le Lapangan Medan Merdeka (l’ancienne Koningsplein), voire quelques rares bâtiments le long des Jalan Hayam Wuruk et Gadjah Mada (fig. 2). Demeure ainsi, sur le flanc est du Lapangan Banteng, le bâtiment qui abrite le ministère des Finances, construit de 1808 à 1828 en style Empire ; sur le flanc nord, subsistent l’ancien théâtre ouvert en 1821, devenu le Gedung Kesenian, le bureau de poste de Pasar Baru qui date de 1913, le couvent des Ursulines bâti en 1859, la cathédrale construite en 1901, de style néogothique, ainsi que la loge maçonnique construite en 1858, dont le bâtiment appartient désormais à la société Kimia Farma, mais le club Concordia fondé en 1833 pour les officiers hollandais, a été détruit en 1960 [13]. Autour du Lapangan Medan Merdeka, toutes les villas coloniales construites au milieu de vastes jardins arborés dans la seconde moitié du XIXe siècle, notamment au sud, ont totalement disparu au début des années 1960, détruites sur injonction de Sœkarno [14]. Il en a été de même pour le bureau de poste, pour celui du téléphone, pour le cinéma Deca Park, l’hôtel Koningsplein, et le club de sport [15]. Les seuls bâtiments qui subsistent aujourd’hui sont, à l’ouest le musée construit dans les années 1860, à l’est la Willemskerk, consacrée en 1839 et rebaptisée Gereja Imanuel en 1948, ainsi que les deux bâtiments qui constituent le complexe présidentiel au nord de la place [16], construits en 1796 et en 1879 [17].

9 Plus au sud, le quartier de Gondangdia-Menteng, planifié dans les années 1910 subit peu à peu le même sort. Conçu sur le modèle des cités-jardins de Ebenezer Howard par P.A.J. Moojen et destiné à une clientèle européenne aisée qui apprécie les larges avenues ombragées et les parcs, à une époque où le monde colonial baigne dans une atmosphère « hygiéniste », il perd en homogénéité au fil des destructions. Pourtant, bâtiments officiels et villas noyées dans la verdure construites par des architectes reconnus comme Ghijsels ou J.F.L. Blankenberg, sont officiellement protégés, notamment depuis 1993 [18] et 1999 [19].

10 Depuis les années 1960, la destruction de quartiers entiers pèse peu au regard de la priorité donnée au percement de grandes artères de circulation et au développement de nouveaux quartiers édifiés sur une base moderne. De fait, Sœkarno s’inscrit dans la tradition initiée par Daendels au début du XIXe siècle et favorise la croissance de la ville vers le sud en perçant de vastes avenues. C’est le cas notamment de la Jalan Thamrin destinée à accueillir les nouveaux buildings, les grands magasins du Sarinah et l’hôtel Indonesia (le premier de classe internationale construit après l’indépendance), afin de donner une image moderne de la capitale. Cette avenue Thamrin est prolongée par la Jalan Sudirman qui file vers le sud en direction du nouveau quartier de Kebayoran, et est doublée à l’est par la Jalan Rasuna Said, plus communément appelée Kuningan. Dans le même temps, Sœkarno lance une politique de grands travaux avec la construction du complexe sportif de Senayan, de l’échangeur routier en forme de trèfle du même nom, du Planétarium du Taman Ismail Mazurki et du parc d’attraction d’Ancol etc. [20].
Fig. 2

Weltevreden en 1874 et en 2016 Weltevreden in 1874 and 2016

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Weltevreden en 1874 et en 2016 Weltevreden in 1874 and 2016

11 Pour répondre aux besoins du moment, priorité est donnée à l’offre de logements. Surgissent ainsi de nouveaux quartiers dont le plus emblématique est Kebayoran Baru (« Nouveau Kebayoran »), dont la construction est entreprise en octobre 1951 par le ministère de Travaux Publics et de l’Énergie récemment fondé. Le quartier, dont les plans ont été élaborés à la fin de la période coloniale, [21] est conçu sur le modèle des villes nouvelles, censées associer espaces résidentiels, centre commerciaux et bâtiments administratifs, le tout dans un cadre verdoyant et aéré par M. Sœsilo [22]. Prévu au départ pour accueillir 100 000 personnes, il est conçu de manière à permettre des extensions futures [23]. Entre les rivières Grogol et Krukut, le quartier est traversé par une voie express qui assure la liaison avec la vieille ville. Il est construit selon un plan censé s’inspirer des conceptions urbanistiques en vigueur dans le centre de Java avant l’arrivée des Européens, c’est-à-dire autour d’une vaste esplanade centrale qui évoque l’alun alun des anciennes cités agraires javanaises, avec des quartiers d’habitations formant autant de « pétales » [24].

1.2 Une idéologie modernisatrice

12 Durant les années 1950, les élites des pays nouvellement indépendants sont souvent animées d’une volonté modernisatrice. Au Brésil, en 1957, dans son « message d’Anápolis », le Président Kubitschek propose le nom de Brasilia pour la nouvelle capitale du pays dont il vient de décider la création. Au Pakistan, en 1959, Islamabad, ville nouvelle, est élevée au rang de nouvelle capitale [25]. L’Indonésie échappe d’autant moins à la règle que Sœkarno, qui a reçu une formation d’ingénieur, s’est toujours intéressé de près aux questions d’urbanisme et d’architecture. Il est sorti diplômé en 1926 de la Technische Hogeschool de Bandung et a participé à la création de plusieurs cabinets d’architectes, en 1928 et en 1931. En 1957, il est par ailleurs à l’origine de la création de la ville nouvelle de Palangkaraya dans le centre de Kalimantan [26]. Sœkarno fait de la rupture avec le passé colonial une priorité. Il justifie dans ses discours la construction de bâtiments « iconiques » afin de permettre au peuple indonésien de se forger une identité [27]. À partir de 1957, ce sont donc essentiellement des cabinets d’architectes indonésiens, tel celui de Friedrich Silaban, aidés éventuellement de quelques associés, qui sont chargés de la réalisation des principaux projets urbanistiques comme la construction de la mosquée Istiqual, de l’hôtel Banteng/ Borobudur [28]. Fonctionnalisme et « style international » guident alors les pas des architectes [29].

13 Les conceptions urbanistiques évoluent après 1965 et la prise du pouvoir par le général Suharto, dans un contexte politique et idéologique radicalement différent. Faute de reposer sur une base démocratique, le régime de l’Ordre nouveau fonde sa légitimité sur les succès obtenus dans le domaine économique, sur la prospérité retrouvée et l’amélioration du niveau de vie des populations, avec pour corollaire le développement à marche forcée du pays. L’un des objectifs du nouveau pouvoir est par ailleurs de promouvoir une nouvelle identité nationale. En septembre 1984, à l’occasion du séminaire organisé par l’IAI [30], est défendue l’idée d’une nouvelle image de la ville. L’objectif est alors de revisiter les préceptes architecturaux occidentaux en les adaptant aux réalités et aux besoins locaux, et en y intégrant progressivement des éléments de la culture indonésienne [31]. En réaction au style international, un style « régionaliste » dont les emprunts à l’architecture locale sont par ailleurs modestes, se développe [32]. L’époque n’est donc toujours pas à la préservation de l’héritage architectural colonial et les destructions continuent.

1.3 Le ton change à partir des années 1990

14 Dans les années 1990, le rapport au passé évolue, la chute du Général Suharto en 1998, accélérant le processus. Si dans un premier temps les élites politiques sont assez peu renouvelées, l’ancien vice-président B. J. Habibie succédant à son mentor, lui-même étant ensuite remplacé par d’anciens opposants, toutefois toujours proches des anciens cercles du pouvoir [33], une fois la démocratie installée et la puissance de l’ancien parti officiel (GOLKAR) battue en brèche, une nouvelle génération d’hommes politiques, plus jeunes et n’ayant ni connu la période coloniale, ni vécu la lutte pour l’indépendance, accède à des postes à responsabilité.

15 Par ailleurs, une fois la crise monétaire de la fin des années 1990 surmontée, le développement de l’économie, l’enrichissement d’une partie de la population et l’essor des classes moyennes font que de plus en plus d’Indonésiens voyagent à l’étranger et portent un nouveau regard sur le monde. De nombreux Indonésiens visitent dorénavant musées et villes chargées d’histoire, en Asie du Sud-Est (Malacca, Singapour, Hoian etc.) comme en Europe (Londres, Paris, sans oublier Amsterdam etc.). Pour ne prendre qu’un exemple, en 2015, le nombre de touristes indonésiens aux Pays-Bas a atteint 47 000 [34]. Certes, tous les touristes ne pratiquent pas un tourisme patrimonial, mais on peut penser que la mise en tourisme de quartiers historiques patrimonialisés commence à susciter l’intérêt des élites locales.

16 Les ouvrages concernant le patrimoine architectural indonésien se multiplient et changent de nature. Alors que dans les années 1980, ils s’adressaient essentiellement à une clientèle étrangère venue visiter l’Indonésie et étaient tous écrits et publiés en anglais en général par des étrangers amoureux du pays [35], nombre d’entre eux sont dorénavant écrits par des Indonésiens et, sinon directement publiés en indonésien, du moins toujours traduits en indonésien pour le public local. En la matière, la coopération internationale a joué son rôle : plusieurs ouvrages sont issus de thèses de doctorat comme celui de Yulianto Sumalyo sur l’architecture coloniale néerlandaise en Indonésie [36], tandis que d’autres sont nés d’un programme de coopération international comme celui d’Émile Leushuis sur les quartiers « patrimonialisés » des métropoles indonésiennes [37], ou que d’autres encore portent sur le patrimoine d’une ville, tel celui écrit par Jongkie Tio sur Semarang etc.

17 La prise de conscience de l’intérêt présenté par le patrimoine colonial est bien évidemment progressive. Dès la fin des années 1980, la modernisation à marche forcée du pays commence à être interrogée. À cet égard, en 1985, la démolition du Club Harmonie, haut lieu de la sociabilité coloniale, dans le simple but d’améliorer la circulation, a servi de révélateur. Construit dans le quartier de Rijswik, à l’angle de la Rijswikstraat et de la Noord Rijswik [38] sur injonction de Herman Willem Daendels en 1809, et inauguré en 1815 par Thomas Stamford Raffles [39], le bâtiment néoclassique, construit en style Empire constituait un marqueur majeur du paysage au point de donner son nom au quartier. La démolition, sans concertation aucune, de ce bâtiment emblématique, a servi de point de départ à plusieurs études et publications et a favorisé la naissance d’associations de sauvegarde du patrimoine. La première, Paguyuban Pelestarian Budaya Bandung, fondée à Bandung en 1986, est l’œuvre d’un citoyen américain. L’année suivante a été fondée à Jakarta, la première association nationale, Pusaka Indonesia à laquelle a succédé quelques années plus tard le Badan Pusaka Indonesia. Puis, à partir du début du IIIe millénaire, les associations se sont multipliées : Jaringan Pelestarian Pusaka Indonesia (JPPI) en 2000, Sahabat Museum et Pusat Dokumentasi Arsitektur en 2002, Badan Pelestarian Pusaka Indonesia (BPPI) en 2004, Jaringan Kota Pusaka Indonesia (JKPI) en 2008 etc. Les unes relèvent du réseau informel comme le JPPI, d’autres sont des ONG comme le BPPI, tandis que d’autres encore, tel que le JKPI, réseau animé par des gouvernements locaux, ont un statut plus officiel [40].

18 L’année 1992 constitue un tournant avec l’adoption d’une loi concernant la protection du patrimoine [41]. Certes, cette loi demeure très imparfaite : c’est essentiellement la mise à jour d’un vieux texte colonial de 1931, le Monumenteordonnantie[42]. D’ailleurs, la définition du bien culturel dont la protection est envisagée demeure extrêmement générale : le texte parle de « productions humaines de plus de 50 ans ou de sites naturels dont la valeur historique, scientifique ou culturelle est significative » sans que soient précisés les critères qui permettent de déterminer cette valeur. La loi insiste toutefois sur la notion de protection, ainsi que sur le rôle de l’État, et envisage aussi bien le cas des biens publics que celui de ceux appartenant à des particuliers. Le transport éventuel des biens culturels est interdit qu’il s’agisse d’exportation ou de simple transfert d’une région à une autre, de même que leur démembrement, leur altération et, bien évidemment leur commercialisation [43].

19 Il convient toutefois de ne pas surestimer la portée de cette loi pourtant déclinée au niveau local dans les années qui suivent. L’exemple de la capitale en témoigne. À Jakarta, le Règlement Local (Peraturan Daerah) n° 9 de 1999 définit trois niveaux de sauvegarde des bâtiments protégés : A, B et C [44]. Le premier (A) interdit toute modification aussi bien de l’aspect extérieur qu’intérieur, le second (B) n’autorise qu’une reprise de l’intérieur, l’aspect extérieur devant être préservé ou restauré à l’identique, et le troisième (C), n’autorise les reprises architecturales qu’en accord avec le projet originel et sans rompre l’harmonie d’ensemble du quartier [45]. Dans le quartier de Gondangdia-Menteng, une liste de 216 bâtiments à préserver a été ainsi établie. Pourtant, en dépit de cela, de nombreuses villas datant de l’époque coloniale ont été soit totalement détruites, soit sérieusement endommagées. Parmi les dernières en date, la belle villa de 350 m2 construite en 1932 sur un terrain de près de 900 m2 à l’angle des rues Teuku Cik Di Tiro et Mangusarkoro, en partie démolie après avoir été vendue en 2010 à un politicien en vue, puis partiellement sauvée de la destruction suite à un mouvement d’opinion [46], pour finalement être totalement détruite. Les bâtiments publics ne sont guère plus épargnés. Le central téléphonique (Telefoongebouw) de la rue Cilacap, construit en 1923, dont le bâtiment sur rue était pourtant classé en catégorie B et le bâtiment arrière en catégorie C, a été partiellement démoli lors de sa transformation en hôtel [47].

2 Des sauvegardes sélectives

20 Le regain d’intérêt pour la préservation du patrimoine colonial s’accompagne d’une profonde évolution de la nature même des biens préservés. Dans les premières années de l’indépendance, les bâtiments coloniaux sont peu préservés et, lorsqu’ils le sont, ce sont en général des édifices publics : édifices cultuels ou symboles du pouvoir régalien, voire bâtiments culturels emblématiques comme le musée de Jakarta. Très peu de constructions privées sont entretenues ou restaurées, la « Maison des archives » de l’avenue Gadjah Mada constituant une exception. En règle générale, les rares bâtiments ayant appartenu à des particuliers qui subsistent menacent ruine, tels ces entrepôts du vieux Batavia, le long du Grand canal. Il faut attendre le tournant du siècle, pour que des résidences privées soient jugées dignes d’intérêt et que des quartiers coloniaux entiers soient « patrimonialisés ».

2.1 Durant les premières années de l’indépendance, la grande majorité des bâtiments préservés sont des bâtiments officiels ou semi-officiels

21 C’est sans doute pour des raisons purement fonctionnelles, faute d’avoir les moyens de les remplacer, qu’un certain nombre des bâtiments officiels ont été conservés dans les premières années de l’indépendance. C’est ce qui explique que leur fonction originelle ait été souvent maintenue. C’est le cas des nombreux bâtiments ministériels édifiés sur le pourtour de la place Merdeka à Jakarta : palais édifié en 1879 avec ses dépendances pour servir de résidence au gouverneur-général (Hotels van den Gouvr General) et devenu résidence du Président de la République (Istana Merdeka), maison du Résident de Batavia (Residentie huis), devenu Mairie de Jakarta (Balai Kota Jakarta), Willemskerk, rebaptisée église Saint-Emmanuel (Gereja Imanuel) etc. Les bâtiments des gares ont également été conservés : gare de Kota à Jakarta, construite en 1929 par Frans Ghijsels [48], gare de Semarang (stasiun Tawang) etc.

22 Certains bâtiments ont toutefois changé d’affectation. C’est le cas, par exemple, du Gedung Tua, l’ancien hôtel de ville de la VOC, construit de 1707 à 1712 sous les gouvernorats de Joan van Hoorn et d’Abraham van Riebeeck. Le bâtiment, qui a servi d’hôtel de ville jusqu’en 1913 mais qui, à partir de 1925, a accueilli les bureaux du gouverneur de la province de Java-Ouest, a été affecté aux forces armées indonésiennes après l’indépendance. Depuis 1974, il abrite le musée de l’histoire de Jakarta. Il en va de même pour l’ancien palais de justice construit entre 1866 et 1870 transformé en musée des Beaux-Arts et de la Céramique en 1976 [49].

23 Les bâtiments qui appartenaient à de grandes sociétés coloniales sont peu nombreux à avoir été préservés et, lorsqu’ils l’ont été, c’est parce qu’ils représentaient un capital qui méritait d’être sauvegardé. C’est le cas, par exemple, de quelques hôtels emblématiques comme le Savoy Homann construit en 1939 à Bandung dans le style art déco par l’architecte néerlandais A.F. Aalberts. Construit à partir d’un squelette en acier selon des techniques très modernes pour l’époque, il a été rénové en 1989 [50]. On peut citer également le cas de l’hôtel Candi Baru, dans le quartier du même nom à Semarang : construit en 1919, lui aussi dans le style art déco, il s’est d’abord appelé hôtel Bellevue, puis Sakura avant de prendre son nom actuel en 1961 [51]. Dans le même ordre d’idées, à Medan, le bâtiment Juliana qui abritait le siège de la société de plantations britannique Harrissons & Crossfields, demeure toujours le siège d’une société de plantations (PT London-Sumatra).

2.2 Hormis les palais, très peu de résidences privées

24 La conservation a par contre longtemps très peu concerné les habitations privées ayant appartenu à des Européens. Lorsque des demeures coloniales ont été protégées, c’est souvent, soit parce qu’elles étaient occupées par des familles apparentées aux anciennes maisons régnantes, soit parce qu’il s’agissait de la résidence d’anciens notables « indigènes ». Au final, très peu d’habitations ayant été occupées par des colons néerlandais ont été conservées.

25 Les palais (kraton) des différents souverains demeurés à la tête des petites principautés, que ce soit à Java ou bien dans les îles extérieures, sont en règle générale en bon état de conservation et, le plus souvent toujours habités, ce qui ne les empêche pas de constituer des lieux de visite et de recevoir quotidiennement des touristes. D’une certaine manière, ce sont des constructions coloniales, non seulement parce qu’ils ont été édifiés avant l’indépendance, mais parce que leur architecture est en grande partie coloniale : ils ont été édifiés dans un style colonial, selon des plans dessinés par des architectes européens. De fait, à Solo comme à Yogyakarta, les deux palais du Susuhunan[52] et du Sultan [53] ainsi que, dans une moindre mesure, le Mangkunegaraan[54] et le Puro Pakualaman[55], sont des constructions « métisses » où se mêlent influences javanaises et occidentales [56].

26 Outre les palais, quelques résidences ayant appartenu à des notables « indigènes » ont été préservées. Le plus bel exemple est sans doute le manoir construit en 1852 en style néo-gothique, à Batavia, dans le quartier de Cikini, pour le peintre Raden Saleh. Mais ce bâtiment a été presque conservé « par accident ». Sa transformation en hôpital en 1897 l’a sauvé. La bâtisse fait aujourd’hui partie intégrante de l’hôpital de Cikini ! Autre exemple, la maison ayant appartenu aux deux frères Tjong Yong Hian et Tjong A Fie, construite à Medan entre 1895 et 1900. Cette vaste demeure, la première de Medan à avoir reçu l’électricité, illustre aussi à sa manière, avec son porche imposant, sa véranda à colonnades et ses larges baies vitrées, l’hybridation culturelle qui s’est opérée dans l’Oostkust au tournant du XIXe et du XXe siècles, entre influences occidentales et influences chinoises. Elle aussi n’a été sauvée de la destruction que de justesse. La maison, qui tombait en ruines, a été restaurée par les descendants des fondateurs avec l’aide du Sumatra Heritage Trust, dans les premières années du XXIe siècle et est ouverte au public depuis 2009 [57].

3 Un changement de paradigme depuis le début des années 2000

27 Depuis la fin des années 1990 et le début des années 2000, les conceptions indonésiennes en matière de conservation du patrimoine architectural colonial ont considérablement évolué. Alors que jusque-là, lorsque des constructions étaient préservées, il ne s’agissait toujours que de bâtiments isolés, jamais d’ensembles architecturaux constitués, dorénavant, des quartiers coloniaux entiers, ou du moins ce qu’il en subsiste, commencent à être réhabilités et mis en valeur. Il convient bien sûr s’interroger sur les raisons d’un tel bouleversement.

3.1 L’Indonésie s’inscrit dans un mouvement plus général qui débute dans les années 1980 dans les pays voisins

28 Depuis le début des années 2000, un certain nombre de quartiers historiques situés au cœur des grandes agglomérations de Java font l’objet de plans de réhabilitation, sur fond de remise en état de la voirie, de reprise des plans de circulation, d’amélioration de la desserte, de restauration des bâtiments coloniaux, et de revitalisation de l’activité économique. En la matière, l’Indonésie s’engage dans un vaste mouvement qui a débuté plus tôt, c’est-à-dire dans les années 1960 en Europe occidentale et dans la seconde moitié des années 1980, chez les voisins, notamment en Malaisie et à Singapour.

29 Pour ne prendre que l’exemple de la France : les lois de protection de 1887 et de 1913 ne concernaient que des monuments isolés reconnus pour leur valeur nationale. Il a fallu attendre 1943 pour que soit adoptée la première loi qui institue un périmètre de protection de 500 m autour d’un monument historique, et 1962 avec la loi sur les secteurs sauvegardés, pour que des quartiers entiers, comme celui du Marais à Paris, soient efficacement protégés [58].

30 Dans les pays voisins de l’Indonésie, le gouvernement malaisien a été le premier à s’être livré à ce type d’opération à Malacca et à George Town, inscrites sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO en janvier 2008. L’expérience a débuté à George Town : en 1987, un périmètre de conservation du « Vieux George Town » a été défini. Des mesures ont été prises pour inventorier les constructions qui présentaient un intérêt historique et pour préserver l’aspect architectural de plusieurs quartiers. En 2005, la municipalité de George Town a publié un document intitulé Guidelines for Conservation Areas and Heritage Buildings[59]. À Malacca, le Preservation and Conservation of Cultural Heritage Enactment for the State of Melaka a été promulgué dès 1988 et l’année suivante, la ville a été déclarée Malaysia’s Historic City. Enfin, en 2001, le « Vieux Malacca » a été classé en Grade One Conservation Zone, c’est-à-dire considéré comme périmètre protégé dans sa globalité, subventions et amendes devant permettre de conserver et d’entretenir le bâti dans le centre historique [60].

31 À Singapour, les premières mesures de conservation ont été prises dans le cadre du Conservation Master Plan de 1989. Dans les premières années de l’indépendance, les destructions s’étaient multipliées, priorité étant donnée à la disparition des taudis et au relogement de la population dans des grands ensembles. La recommandation faite par Erik Lorange, consultant des Nations Unies, dans le rapport qu’il avait remis au gouvernement en juillet 1962, de conserver autant que possible les bâtiments anciens qui faisaient l’âme de Singapour, n’avait pas été suivie d’effet. En effet, nombre de ces bâtiments appartenaient à des propriétaires privés qui n’avaient ni le goût, ni les moyens financiers de les restaurer en l’absence d’aides gouvernementales et de crédits spécifiques, et les destructions s’étaient multipliées [61].

32 À la fin des années 1980, alors que le gouvernement, réorientant sa politique économique, faisait le choix de « l’économie de la connaissance », la promotion des activités culturelles et le développement d’une véritable filière touristique devenaient des priorités. Préserver ce qui subsistait du bâti colonial afin de retenir et de transformer en touristes les visiteurs d’un jour, devenait alors indispensable. C’est dans ce contexte que la trame coloniale, voulue par T.S. Raffles et planifiée par le Town Committee en 1822, a fait l’objet d’un plan de conservation en juillet 1989 [62]. Dans le cadre du Central Area Development Guide Plan (DGP), il a alors été décidé de préserver et de restaurer les compartiments chinois, un certain nombre de bâtiments publics ainsi que les édifices cultuels au sein de la ville historique. L’objectif était de rendre leur personnalité aux quartiers chinois (Chinatown), de la « Petite Inde » (Little India), malais (Kampung Glam) et européen, ce dernier devenant le quartier gouvernemental (Civic District) [63].

33 Avec un décalage de quelques années, l’Indonésie s’inscrit dans le même mouvement. À Jakarta, les premières mesures de protection du vieux Batavia sont prises dès les années 1970 par le gouverneur Ali Sadikin. Elles concernent notamment la place Fatahillah, le musée maritime, le marché aux poissons, le port de Sunda Kelapa, ainsi que les quartiers de Glodok et de Menteng. En 1972, sur 700 bâtiments réputés anciens répertoriés, 224 sont classés comme bâtiments historiques et protégés, mais seulement 18 le sont par le ministère de l’Éducation et de la culture, les autres n’étant protégés que par un simple décret du gouverneur. À l’époque, il ne s’agissait toutefois que de mesures ponctuelles et les résultats sont demeurés modestes [64]. Le manque de financement et la faible coordination entre les différentes autorités locales constituent les explications qui sont généralement avancées [65].

34 Il a fallu attendre 2007, pour que plusieurs projets globaux de réhabilitation soient mis en place. Quatre quartiers dont la personnalité est bien affirmée sur le plan culturel et qui témoignent chacun d’une période précise et marquante du développement de la ville ont alors été sélectionnés. Le premier concerne la partie la plus ancienne de la ville édifiée aux XVIIe et XVIIIe siècles (Kota Tua Jakarta), le second, le dernier quartier européen à avoir été développé durant l’entre-deux-guerres (Menteng), le troisième, la ville nouvelle de Kebayoran Baru planifiée dans les premières années de l’Indépendance et le dernier, Situ Babakan, le quartier des Betawi, réputés premiers habitants non européens de Batavia, au sud de la ville [66].

35 Le projet de réhabilitation du « Vieux Jakarta » (fig. 3) est lancé dès le début des années 2000 : mise en place d’un Master Plan couvrant 846 ha en 2004, début des travaux trois ans plus tard suite à l’impulsion donnée par le gouverneur Sutyioso [67]. Tout comme à Singapour, le projet de réhabilitation est étroitement circonscrit au premier noyau urbain et ne concerne pas les extensions ultérieures, même celles qui relèvent d’un développement colonial, d’où l’utilisation de l’expression Kota Tua Jakarta (photo 1). Le projet s’articule sur l’opposition qu’opéraient les colonisateurs aux XVIIe et XVIIIe siècles entre la ville fortifiée et ses faubourgs immédiats. Il est donc constitué de deux noyaux qui, ensemble, s’étendent sur 334 ha. Le premier, qui s’organise autour du Fort Jacatra, correspond à la ville intra-muros dans laquelle s’abritaient les commerçants bataves. Il est limité à l’est par le fleuve Ciliwung, à l’ouest et au sud par l’ancien canal Stadt Buiten Gracht (l’actuelle rivière Krukut du côté ouest, et les rues Jembatan Batu et Asemka au sud) (photo 2), et au nord par le vieux port de Sunda Kelapa [68]. C’est dans ce premier périmètre que se concentrent aujourd’hui la majorité des bâtiments historiques, notamment dans une zone centrale d’une superficie de 87 ha [69]. Le second ensemble correspond aux anciens faubourgs « hors les murs » : Kampung Luar Batang [70], Pekojan [71], Pecinan [72], Île Onrust [73], selon les anciennes divisions coloniales [74].

36 L’occupation du sol est relativement équilibrée entre le logement, la petite industrie et les espaces dévolus au commerce et aux services. Les habitations se situent plutôt dans la partie septentrionale du périmètre préservé, notamment vers Penjaringan où les maisons de pêcheurs faites de matériaux végétaux sont nombreuses ; les commerces sont bien représentés de part et d’autre du grand canal (Jalan Kali Besar) (photo 3), autour de la place Fatahillah (Taman Fatahillah), ainsi que dans les quartiers de Tambora et de Taman Sari, de même que les restaurants, les hôtels et les cafés. Peu de bâtiments anciens ont toutefois été correctement entretenus et préservés : dans leur écrasante majorité ils ont été transformés sans souci de leur authenticité par des propriétaires désireux de rendre leur logement plus moderne et plus confortable, voire leur restaurant, leur café ou leur commerce plus attrayant. Nombre de bâtiments ont donc été défigurés [75].
Fig. 3

Le réaménagement du Vieux Jakarta The rehabilitation of Jakarta’s Old Town

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Le réaménagement du Vieux Jakarta The rehabilitation of Jakarta’s Old Town

Photo 1

Kota Lama Jakarta (cliché de l’auteur). Kota Lama Jakarta

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Kota Lama Jakarta (cliché de l’auteur). Kota Lama Jakarta

Les entrées du périmètre préservé sont matérialisées par des portes. Le pont basculant reconstitué fait référence au Hoenderpasarbrug, le « pont du marché aux poulets » construit au XVIIe siècle, qui constitue l’une des principales attractions.
37 Les divers bâtiments sont répertoriés et classés en cinq types : bâtiments coloniaux de type européen (de style néoclassique, Art Déco ou Art Nouveau) ; constructions chinoises (typiques de la Chine du Sud ou de style sino-colonial) ; maisons « indigènes » (Colonial Indische) ; bâtiments indonésiens modernes (International Style). Le cœur du périmètre est par ailleurs divisé en trois ensembles hiérarchisés selon leur importance patrimoniale. Le premier rassemble les bâtiments dont la valeur architecturale est la plus importante autour du Taman Fatahillah et de la rue Cengkeh (l’ancienne Prisen Straat), dans ce qui fut le cœur politique de la cité. Dans ce périmètre, outre des actions de restauration de bâtiments historiques, il est prévu des opérations de destruction puis de reconstruction de bâtiments nouveaux dans un style ancien afin de redonner au quartier sa personnalité. Le second ensemble, se situe de part et d’autre du Grand canal. Ici, les bâtiments de grande valeur architecturale sont moins nombreux. Subsistent cependant, d’anciens entrepôts et quelques constructions du XIXe siècle susceptibles d’être convertis en espaces commerciaux, en restaurants, voire en appartements. Le dernier ensemble est constitué de deux entités : la première, le long du Ciliwung à l’est, et la seconde, à l’ouest, le long du Krukut. Les constructions anciennes sont ici peu nombreuses. Les opérations de rénovation devraient donc être plus ambitieuses, l’objectif étant de reconstruire des immeubles de faible hauteur [76].
Photo 2

Vestige d’un canal hollandais dans le quartier de Pekojan (cliché de l’auteur). Vestiges of a Dutch canal in Pekojan old town

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Vestige d’un canal hollandais dans le quartier de Pekojan (cliché de l’auteur). Vestiges of a Dutch canal in Pekojan old town

Nettoyer les canaux et aménager les berges à des fins touristiques sur le modèle de la Singapore River constituent des priorités.
Photo 3

Le Grand canal à Jakarta (cliché de l’auteur). The Grand Canal in Jakarta

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Le Grand canal à Jakarta (cliché de l’auteur). The Grand Canal in Jakarta

Peu de bâtiments coloniaux sont véritablement anciens. La plupart de ceux qui subsistent remontent au XIXe siècle. Terrasses et restaurants devraient être aménagés sur les berges.

38 En matière de réaménagement, les expériences réussies de Malacca et de Singapour ont inspirés les promoteurs du projet [77]. Au sein du périmètre réhabilité, deux ensembles devraient être clairement privilégiés et rendus piétonniers. Au centre, l’esplanade (Taman Fatahillah) qui fait face au Gedung Tua, l’ancien Hôtel de Ville légué par la V.O.C, devrait se transformer en espace de prestige et accueillir les manifestations publiques de haut niveau intéressant l’ensemble de la métropole, sur le modèle des Padang de Singapour et de Kuala Lumpur. De part et d’autre du grand canal, un véritable waterfront devrait être aménagé avec, sur la rive orientale, des restaurants sur le modèle de Boat Quay à Singapour, et sur la rive occidentale, une esplanade réservée aux expositions artistiques bordée par une rangée de commerces (fig. 4).

39 Des espaces jugés moins prioritaires, devraient également être aménagés de manière moins prestigieuse. Dans le prolongement des avenues Gadjah Mada et Hayam Wuruk, la Jalan Pintu Besar Utara devrait être transformée en artère commerciale, et être jalonnée de commerces, de galeries d’art, de restaurants et de cafés, tandis que la Jalan Cengkeh devrait conserver ses voitures et rester dédiée à la circulation. Par contre, au nord du périmètre, la Jalan Tiang Bendera, devrait être transformée en coulée verte [78].

40 À Semarang, la ville coloniale se compose de cinq entités, les quatre premières de part et d’autre du Kali Semarang, et la dernière au sud de la ville. Le quartier le plus ancien, qui remonte à la fondation de la ville par les Hollandais, est le vieux centre administratif colonial, à l’emplacement de l’ancienne forteresse édifiée par la V.O.C. en 1705, sur la rive droite du fleuve, au nord de la ville, à proximité immédiate de l’ancien port depuis longtemps ensablé et aujourd’hui disparu, donc à plusieurs kilomètres du rivage actuel. Le Kauman, le quartier musulman qui gravite autour de la Grande Mosquée [79] est également un quartier très ancien construit sur la rive opposée à l’ombre de la forteresse. Pecinan est le nom donné au quartier chinois qui s’est également développé hors les murs, sur le flanc méridional de la citadelle. Kampung Koja ou Pekojan est le quartier indien, peuplé majoritairement d’immigrants venus du Gujrat. C’est un quartier qui s’est développé un peu plus tardivement, à l’extrême fin du XVIIIe siècle, au nord du quartier chinois, sur injonction des colonisateurs qui ont défriché la forêt et déplacé le cimetière chinois plus au sud, mais qui a fini par se confondre avec le Pecinan. Enfin, Candi Baru constitue la cinquième et dernière entité. C’est le dernier quartier résidentiel hollandais. Il s’est développé à partir de 1909, au sud de la ville, sur une colline d’une centaine de mètres d’altitude, en accord avec les préoccupations hygiénistes de l’époque [80].
Fig. 4

L’aménagement des berges du Grand Canal Banks rehabilitation along the Grand Canal

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L’aménagement des berges du Grand Canal Banks rehabilitation along the Grand Canal

41 Aujourd’hui, seule la plus ancienne partie de la ville coloniale, celle que l’on appelle les « Petits Pays-Bas [81] », fait l’objet d’un réaménagement et d’un plan de conservation sur un périmètre qui s’étend sur une quarantaine d’hectares, compris entre la gare de Tawang au nord, le fleuve Semarang à l’ouest, la Jalan Cendrawasih, à l’est et la Jalan Sendowo, au sud (fig. 5). Le projet a débuté à peu près à la même époque qu’à Jakarta, c’est-à-dire à la fin des années 1990 et au début des années 2000 [82]. Certes, la réalisation d’un corpus photographique des vieux édifices remonte à 1978 et a été suivie en 1985-1986 d’un inventaire des bâtiments anciens réalisé par le BAPPEDA [83] de la ville. Il est vrai également que dès 1992, la municipalité a émis une directive concernant la protection et la conservation de 101 bâtiments historiques [84]. Il faut cependant attendre la fin des années 1990 et le début des années 2000, pour que trois directives concernant la planification urbaine ainsi qu’une directive portant spécifiquement sur le périmètre de la vieille ville de Semarang soient émises [85]. Enfin, ce n’est qu’en 2007 [86] qu’a été créée une agence spécialement dédiée à la protection et à la conservation du « Vieux Semarang », le BPK2L [87]. Par ailleurs, en 2010, la municipalité de Semarang a enjoint à chaque habitant le devoir de protéger et d’entretenir chaque objet susceptible de présenter un intérêt touristique [88].

42 Le périmètre protégé comporte 245 constructions mais il est prévu de n’en conserver que 105. Sur ces 245 bâtiments, 177 appartiennent à des particuliers et 68 à des entreprises. Par ailleurs, seuls 130 possèdent un statut juridique clairement défini. De part et d’autre de l’artère principale, la Jalan Letjen Suprapto, il est prévu de procéder à la restauration de l’ensemble des façades, d’installer des lampadaires décoratifs, de faire disparaître toutes les constructions réputées illégales, c’est-à-dire l’ensemble des constructions « informelles » et d’aménager le parc Srigunting. Face à la gare de Tawang construite entre 1911 et 1914, elle-même restaurée, le bassin de rétention des eaux appelé « polder de Tawang », doit être nettoyé et ses berges embellies : une fontaine doit être construite tandis que sur le pourtour, des espaces doivent être aménagés pour les petits vendeurs de rue. Enfin, il est prévu de drainer le Kali Semarang, d’en aménager les berges, de restaurer les bâtiments qui le bordent et de développer une promenade sur plusieurs kilomètres avec diverses échoppes [89].

3.2 Quels outils pour quels objectifs ?

43 Les raisons d’une telle mutation dans la manière d’envisager le passé colonial sont en partie obscures. Certaines pistes peuvent toutefois être avancées. Outre l’arrivée aux affaires d’une nouvelle génération de responsables déjà évoquée, il y a peut-être aussi une part de jeu politique dans les dernières années de la présidence Suharto. On peut en effet interpréter l’intérêt porté au legs architectural néerlandais au niveau local comme un moyen de se démarquer des prises de position officielles en faveur d’un nouveau style régionaliste, un moyen de prendre ses distances par rapport à un pouvoir central réputé affairiste. Ce point de vue est clairement exprimé à propos de la politique de préservation des bâtiments coloniaux menée à Semarang dans les années 1990 par Joost Coté [90]. Mais il y a aussi et surtout l’impulsion donnée par l’ancienne puissance coloniale désireuse d’améliorer son image, sans oublier la volonté clairement affichée de développer le tourisme et d’augmenter les revenus qu’il génère. Enfin, il y a sans doute aussi le projet de faire des métropoles indonésiennes des villes « globales » et, ce faisant, la nécessité de les réinsérer dans l’histoire du monde.
Fig. 5

Le réaménagement du « Vieux Semarang » The rehabilitation of Semarang’s Old Town

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Le réaménagement du « Vieux Semarang » The rehabilitation of Semarang’s Old Town

Photo 4

Le « Vieux Semarang » Old Semarang

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Le « Vieux Semarang » Old Semarang

Rendre le quartier piétonnier pour attirer les touristes fait partie des projets.
cliché de l’auteur

3.2.1 La première impulsion est donnée par l’ancienne puissance coloniale

44 Depuis les années 1980 environ, le gouvernement néerlandais, et quelques entreprises, ont redoublé d’intérêt pour le legs architectural colonial, sa conservation et sa mise en valeur, vraisemblablement autant pour des raisons d’image que pour des raisons économiques. Ce qu’il faut bien appeler la « diplomatie culturelle » a eu dès lors vocation à renforcer des liens économiques un peu atones entre les Pays-Bas et son ancienne colonie [91]. L’histoire des différentes opérations menées, dressée par Pauline K. M. van Roosmalen en témoigne [92]. Sans revenir sur les détails des rencontres, des séminaires et des projets, rappelons simplement que la première réalisation concrète a été, en 1993, la restauration de l’ancienne résidence du gouverneur général Reignier de Klerk à Batavia via une fondation néerlandaise [93]. L’objectif était alors de remettre en état cette résidence de campagne du XVIIIe siècle construite le long du canal Molenvliet, et utilisée par les Archives nationales indonésiennes, pour l’offrir au gouvernement indonésien à l’occasion de la célébration du cinquantième anniversaire de l’indépendance [94].

45 Depuis lors, l’intérêt des Pays-Bas ne s’est pas démenti. Expertises et rapports se sont multipliés comme en témoignent ces quelques exemples : en octobre 2014, le ministère néerlandais de l’Éducation, de la Culture et de la Science, par l’intermédiaire de l’Agence pour le patrimoine culturel, a publié un rapport intitulé Public Interest, Private Initiative, PPP for Heritage Conservation in Indonesia, dans lequel ont été évoquées des pistes pour conserver, réhabiliter et mettre en valeur les quartiers historiques de Semarang, de Yogyakarta et de Jakarta. De manière très instructive, ce rapport se termine par une étude de la restauration du « Vieil Amsterdam » réalisée par une fondation de statut privé, le Stadherstel [95]. L’année suivante, en 2015, l’ambassade des Pays-Bas à Jakarta a chargé une équipe de consultants néerlandais, The Missing Link, d’élaborer un projet de sauvegarde et de revitalisation de la vieille ville de Semarang. Cette équipe, dont la méthode consiste à combiner expertise culturelle, stratégies de marketing et projets d’aménagement s’est aussitôt mise au travail, en organisant des ateliers participatifs tel celui qui s’est tenu le 5 avril 2016 dans la « Galerie de la Réhabilitation » [96] installée dans un bâtiment de la vieille ville de Semarang [97].

3.2.2 La mise en tourisme et les revenus qui en découlent

46 Ces projets de sauvegarde et de réhabilitation de quartiers anciens s’inscrivent dans une perspective plus large d’inscription sur la liste des sites du patrimoine mondial de l’UNESCO suite à la signature d’une convention entre cet organisme et l’Indonésie le 6 juillet 1989. En 2017, huit sites indonésiens sont d’ores et déjà inscrits sur la liste du patrimoine mondial [98]. Quatre ont été inscrits en 1991 (temples de Borobudur et de Prambanan, parcs naturels de Komodo et d’Ujung Kulong), un en 1996 (site des premiers hommes de Sangiran), un autre en 1999 (parc national de Lorentz), ainsi que deux autres dans les années 2000 (forêts ombrophiles de Sumatra en 2004 et système des subak de Bali, au titre des « paysages culturels » en 2012). Depuis, 2005, 19 sites font par ailleurs l’objet d’une demande d’inscription dont, depuis janvier 2015, le « Vieux Jakarta/Batavia » et le « Vieux Semarang » [99].

47 Parmi les objectifs poursuivis par le gouvernement indonésien, il y a le développement du tourisme. La réhabilitation des vieux centres urbains coloniaux est en effet toujours envisagée dans le cadre de différents partenariats public-privé, ce qui rend la dimension économique des projets évidente. Pour preuve, le rapport intitulé Public Interest, Private Initiative, réalisé en 2015 pour le compte du ministère de l’Éducation, de la Culture et de la Science, des Pays-Bas [100]. Il insiste sur la nécessaire mise au point d’un business model adapté à chaque cité, sur l’indispensable intervention d’acteurs privés aux côtés des investisseurs institutionnels, et sur l’urgence à définir de nouvelles fonctions pour les bâtiments restaurés afin d’assurer un retour rapide sur investissement [101].

48 L’un des principaux soucis du gouvernement indonésien est de réorienter en partie les flux touristiques. Son ambition est de suggérer aux touristes étrangers pour qui Jakarta n’est que la porte d’entrée du pays, et qui ignorent les villes de Java (hormis Yogyakarta), de passer quelques nuits dans la capitale et de séjourner dans une ville de province comme Semarang avant de se diriger vers Bali. Dans l’ouvrage collectif intitulé Preservation and Conservation of Cultural Heritage in Indonesia, rédigé par des universitaires indonésiens, et publié à Yogyakarta en 1997 [102], le chapitre V, rédigé par Eko Budiharjo porte un titre sans ambiguïté : « Marketing Cultural Heritage » [103]. Il y est question de marché (market research), de développement de ce marché (expanding the market), d’avoirs cachés (hidden assets), et d’outils de marketing (marketing devices).

3.2.3 Un pays en quête d’unité dont la capitale se rêve en ville « globale »

49 Limiter les ambitions indonésiennes à la promotion du tourisme est toutefois très réducteur. Comme toujours en matière de protection du patrimoine, aux objectifs économiques clairement affichés se surimposent d’autres motivations plus ou moins subliminales. Cela est dû au fait que le patrimoine n’existe pas de manière immanente, qu’il n’est pas « donné au monde », qu’il ne possède aucune existence en lui-même. « Patrimonialiser » consiste à choisir entre une multitude d’objets ceux qui vont faire l’objet d’une conservation, et ceux qui vont être laissés à l’abandon, voire détruits. C’est le regard que porte la société sur un objet et c’est l’arbitrage le concernant qui le transforment un objet patrimonial. Le patrimoine est avant tout une construction sociale.

50 Partant, si c’est le regard bienveillant porté sur un bâtiment ancien qui, en lui conférant une certaine qualité esthétique, le rend digne d’être transmis de génération en génération, l’émotion ressentie lorsqu’il est contemplé devient alors indissociable du jugement porté sur la société qui l’a produit ainsi que sur le contexte historique dans lequel il a été édifié. « Patrimonialiser » n’est donc pas seulement un choix social, mais également un choix politique [104]. Dès lors, ce choix, en conférant de la valeur à un objet, en l’occurrence un bâtiment construit durant la période néerlandaise, traduit implicitement une modification du regard porté sur la société coloniale. Bien comprendre, le changement d’attitude des autorités indonésiennes vis-à-vis du legs architectural colonial implique donc d’analyser le contexte politique, économique et social dans lequel ce renversement s’est opéré.

51 L’Indonésie a toujours constitué une construction politique fragile du fait de son émiettement insulaire et de l’extrême diversité culturelle de ses populations. C’est la raison pour laquelle les différents gouvernements qui se sont succédé à Jakarta ont toujours cherché à transcender les différents clivages ethniques et cherché à développer un sentiment national. Pour faciliter l’éclosion de ce sentiment unitaire, ils ont à maintes reprises cherché à gommer l’impression, répandue dans les îles dites « extérieures », que les Javanais, groupe dominant démographiquement, cherchaient à imposer leur modèle sociétal à l’ensemble du pays. La politique de décentralisation entreprise à l’orée des années 2000, et connue sous le nom d’« autonomie régionale » s’inscrit dans cette démarche. Ceci étant, cette politique comporte des risques : ferments de division, voire risques sécessionnistes, d’où la nécessité de simultanément insister sur les liens qui unissent les différents peuples de l’archipel afin de parachever l’État-Nation.

52 Mais l’État-Nation est le fruit d’une aventure collective, l’incarnation d’une communauté de destins. Et celle-ci ne peut reposer que sur un passé commun. Il ne peut exister de nation sans « roman national », sans une histoire qui fait sens pour l’ensemble de la population et non plus simplement pour tel ou tel groupe. Or l’héritage colonial présente l’avantage de ne pas être propre à telle ou telle île, voire à telle ou telle population, mais d’être commun à l’ensemble des peuples de l’archipel. D’où l’intérêt de le mettre en valeur. Par ailleurs, réhabiliter le centre historique de Batavia/Jakarta et de Semarang avec leurs différents quartiers, européens, mais également, chinois et « indigènes », constitue un bon moyen d’honorer toutes les composantes de la société sans en privilégier aucune.

53 Jakarta se rêve en outre en ville « globale à l’image des grandes métropoles occidentales, voire de Singapour, la voisine enviée [105]. Dès lors, la ville se doit d’attirer des talents du monde entier. Elle doit notamment leur offrir une offre culturelle riche et un cadre de vie agréable dont participe la rénovation des quartiers anciens. Elle doit également réussir à se « mettre en scène », pour mieux susciter un désir et séduire les élites. Pour cela, il faut parler à leur imaginaire ce qui n’est possible qu’en s’appropriant les codes et les référents culturels qui régissent les sociétés occidentales [106].

54 Ainsi en va-t-il du regard porté sur les bâtiments anciens que l’on songe dorénavant à restaurer. Traditionnellement, en Indonésie, comme sans doute dans une bonne partie de l’Asie, la rénovation l’emportait sur la restauration. À Bali, par exemple, reconstruire un temple en mauvais état a toujours constitué une marque de dévotion envers les dieux. C’est la raison pour laquelle nombre de sanctuaires présentent l’aspect du « neuf » et que peu d’entre eux sont marqués de la patine du temps. De fait, quantité d’artisans qui sculptent bois ou pierre sont installés le long des routes ; ils ne manquent pas de commandes.

55 À Java, la situation est du même ordre. Sur la côte nord, qui s’est progressivement islamisée à partir du XVe siècle, beaucoup de mosquées ont une histoire très ancienne. Pourtant, les édifices actuels n’ont que peu à voir avec les constructions originelles. La mosquée de Tuban, par exemple, construite dans la seconde moitié du XVe siècle a été quasiment reconstruite à trois reprises, en 1894, 1985 et 2004, au point que son architecture actuelle évoque plus le XIXe que le XVe siècle. Le constat est le même à Kudus. La mosquée, construite au milieu du XVIe siècle a été profondément rénovée en 1918, en 1933, en 1960 et durant les années 1977-1980. On pourrait également citer l’exemple de la mosquée de Demak et bien d’autres [107]. La comparaison avec la situation européenne, pour ne prendre que cet exemple, est très significative : certes nombre de restaurations ont eu lieu, certaines pouvant même être jugées excessives parce que non réversibles, mais une cathédrale comme Notre-Dame de Paris, par exemple, bien que fortement restaurée par Viollet le Duc au XIXe siècle, n’a jamais été dénaturée.

56 Le constat est le même en matière d’architecture civile. Ce ne sont plus les constructions d’origine qu’admirent aujourd’hui les touristes lorsqu’ils visitent les palais (kraton) de Yogyakarta et de Solo. À Solo, le Kraton Surakarta Hadiningrat, édifié au milieu du XVIIIe siècle, a été profondément altéré dans les années 1910. Il a été en outre, totalement reconstruit après le gigantesque incendie de 1985. À Yogyakarta, le Kraton Ngayogyakarta Hadiningrat, construit lui aussi à peu près à la même époque, a fait l’objet de nombreuses reprises, notamment dans les années 1920, tant et si bien que ce n’est plus du tout le palais originel que visitent aujourd’hui les touristes, mais un ensemble marqué du sceau de l’architecture coloniale. Certes, on rétorquera une fois encore que cet état de fait n’est pas propre aux palais javanais et que dans le monde entier, les palais ont subi ce genre d’infortune, le seul exemple de Versailles le prouve [108]. Il n’empêche que le château n’a pas été transfiguré et que le Versailles de Louis XIV a survécu en dépit de multiples reprises et remaniements.

57 Pour séduire les Européens qui, certes ne sont pas les touristes les plus nombreux à visiter le pays, mais qui sont ceux qui y dépensent le plus à l’occasion de chaque séjour [109], la patine du temps est devenue indispensable. Restaurer les bâtiments plutôt que les reconstruire est dorénavant devenu une nécessité. Dès lors que le gouvernement indonésien a fait le choix de faire de Jakarta une ville globale, le voyageur occidental doit pouvoir y trouver à la fois le dépaysement, voire l’étrangeté, qu’il recherche et un sentiment de sécurité et de confort intellectuel que seuls peuvent lui procurer des paysages urbains jalonnés de marqueurs qui lui sont familiers. Il doit pouvoir être à la fois être surpris, et rassuré en relisant dans la ville une partie de sa propre histoire. On retrouve là l’une des caractéristiques de la ville globale qui est d’être connectée au reste du monde, en particulier au monde occidental, non seulement au plan matériel mais aussi au plan symbolique, par un passé qui n’est plus étroitement circonscrit au plan local, mais qui l’inscrit dans l’histoire du monde.

4 Conclusion

58 Depuis le début du troisième millénaire, les conceptions indonésiennes en matière de conservation du patrimoine architectural néerlandais ont considérablement évolué. Alors que la rupture venait d’être consommée avec l’ancienne puissance coloniale, la priorité a d’abord été donnée au développement à marche forcée du pays. Pour les nouvelles autorités, le legs architectural colonial n’offrait guère d’intérêt et elles lui déniaient toute valeur, ce qui explique bien des destructions. Dans un second temps, quelques bâtiments emblématiques qui avaient été miraculeusement préservés ont été entretenus sans que l’on puisse vraiment faire la part entre le véritable intérêt patrimonial et la simple nécessité de conserver le bâtiment faute de pouvoir disposer d’un autre. En règle générale, il s’agissait toutefois de bâtiments fonctionnels mais isolés, jamais d’ensembles architecturaux constitués. La situation n’a évolué radicalement qu’à partir de la fin des années 1990 et du début des années 2000. Des quartiers coloniaux entiers, ou du moins ce qu’il en subsistait, ont été alors réhabilités et mis en valeur. Ces quartiers chargés d’histoire font dorénavant intégralement partie du patrimoine national indonésien. Les raisons de cette mutation sont complexes. On pourrait certes évoquer « une plus grande maturité de la part des dirigeants politiques, capables dorénavant de réévaluer la signification de l’héritage européen » [110], voire même de la population [111], mais ce serait indiscutablement faire preuve d’une certaine condescendance néocoloniale. Il vaut donc mieux y voir, outre un intérêt financier, une démarche politique destinée à asseoir l’unité du pays et à inscrire les métropoles indonésiennes dans le réseau des villes « globales ».

59 Au-delà de l’entreprise matérielle, la réhabilitation de ce legs architectural colonial laisse toutefois entrevoir un changement d’attitude des autorités indonésiennes face au passé colonial, de la guerre d’indépendance et de la brouille avec l’ancienne métropole. L’implication du gouvernement des Pays-Bas et des bureaux d’études néerlandais n’est bien évidemment pas étrangère à ce renversement de situation, tant et si bien qu’on est amené à s’interroger sur le jeu de pouvoir entre puissances que trahit cette mutation. Par certains côtés, on peut se demander s’il ne s’agit pas là d’une forme d’impérialisme renouvelé ? Les Occidentaux, par Néerlandais interposés, en imposant leur conception du patrimoine et leurs normes en matière de conservation et de réhabilitation, ne sont-ils pas en train de convaincre les anciens peuples colonisés du bien-fondé de leur vision du monde, passé et à venir, et des rapports qu’il convient d’entretenir entre nations ?

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Mots-clés éditeurs : patrimoine, héritage architectural colonial, « Vieux Semarang », Indonésie, « Vieux Batavia »

Mise en ligne 26/02/2019

https://doi.org/10.3917/ag.725.0031

Notes

  • [1]
    Devenue aujourd’hui, Jalan Medan Merdeka Utara.
  • [2]
    Palais de l’Indépendance.
  • [3]
    Ces allées sont devenues aujourd’hui les avenues Hayam Wuruk et Gadjah Mada.
  • [4]
    Kriswandhono, 2011, 2012.
  • [5]
    Widjaja Martokusumo, 2002.
  • [6]
    Grahadwiswara et alii, 2014.
  • [7]
    Budiharjo Eko, 1997.
  • [8]
    Coté Joost, 2002.
  • [9]
    Roosmalen Pauline, 2003, 2006, 2013.
  • [10]
    Gill Ronald, 1995, p. 65.
  • [11]
    Cabaton Antoine, 1910, p. 38-39.
  • [12]
    Gill, Ronald, 1995, p. 81.
  • [13]
    Leushuis Émile, 2014, p. 80-83 ; Merrillees Scott, 2000-2010, p. 188-211.
  • [14]
    Il est vrai que plusieurs d’entre elles avaient déjà été démolies et remplacées par des bâtiments officiels dans les années 1920.
  • [15]
    Merrillees Scott, 2012, p. 58-147.
  • [16]
    Anciennes résidences des gouverneurs généraux.
  • [17]
    Merrillees Scott, 2000-2010, p. 160-187 ; Leushuis Émile, 2014, p. 84-85.
  • [18]
    Décret du gouverneur, n° 457/1993.
  • [19]
    Règlement administratif, n° 9/1999 sur la protection du patrimoine.
  • [20]
    Toute cette politique est financée par des prêts étrangers : l’hôtel Indonesia est construit avec des fonds japonais, le complexe sportif de Senayan grâce à un prêt soviétique, et l’échangeur du même nom avec le concours des États-Unis. Abeyasekere Susan, 1987, p. 170 et 178.
  • [21]
    Giebels Lambert J., 1986, p. 102.
  • [22]
    Heuken Adolf, 2014, p. 47.
  • [23]
    Thysse Jac. P., 1950, dans Budihardjo Eko, 1987, p. 71.
  • [24]
    Romondt V. R. van, 1950, p. 34, dans Budihardjo Eko, 1987, p. 72.
  • [25]
    De Mello & al., 2004, p. 30-37.
  • [26]
    Olly, 1985, dans Wijanarka, 2006, p. 14-22.
  • [27]
    « Projects such as the Asian games, the National Monument, Independance Mosque, the Jakarta By-pass, and so on, are examples of « Nation – Building » (...) of the whole Indonesian people striving to recover our national identity. » Sœkarno, 1963, Ambeg Parama Aria, Jakarta, Jajasan Prapantja, cité dans Jacques Leclerc, 1993, p. 51.
  • [28]
    Roosmalen Pauline K. M., 2013, p. 6-7.
  • [29]
    Yuswadi Saliya, 1998, p. 126.
  • [30]
    Institute of Indonesian Architects.
  • [31]
    Sukada Budi A., 1998, p. 133 ; Tjajhono Gunawan, 1998, p. 135.
  • [32]
    Les emprunts se limitent le plus souvent à la forme des toitures traditionnelles. Voir à ce sujet Sukada Budi A., 1998, p. 132-133.
  • [33]
    Abdhurahman Wahid dit « Gus Dur », Megawati Sœkarnoputri, fille du premier président, Bambang Yudoyono, avant l’actuel président Joko Widodo appelé familièrement « Jokowi ».
  • [34]
    www.Inboundtourism-nbtc.nl, consulté le 17/08/2017.
  • [35]
    Comme, par exemple, l’ouvrage très célèbre à Jakarta, réédité de nombreuses fois de A. Heuken, 1982, Historical Sites of Jakarta, Jakarta, Cipta Loka Caraka.
  • [36]
    Yulianto Sumalyo, Arsitektur Kolonial Belanda di Indonesia, Yogyakarta, Gadjah Mada University Press, 1993, traduction d’une thèse de doctorat au titre similaire soutenue Paris, à l’EHESS en 1988.
  • [37]
    Emile Leushuis, Panduan Jelajah Kota-kota Pusaka di Indonesia, Yogyakarta, Ombak, 2014, ouvrage réalisé grâce à un programme de coopération entre le Badan Pelestarian Pusaka Indonesia et le Program Shared Heritage Funds du ministère des Affaires étrangères néerlandais.
  • [38]
    À l’angle actuel des avenues Veteran et Modjopahit.
  • [39]
    Merrillees Scott, 2000, p. 122.
  • [40]
    Roosmalen Pauline K. M., 2003, p. 127 et 2013, p. 10-12.
  • [41]
    Law n° 5/1992 regarding Cultural Heritage (UU n° 5 tahun 1992, Tentang Benda Cagar Budaya)
  • [42]
    Roosmalen Pauline K. M., 2013, p. 11.
  • [43]
    UU 5/1992 Benda Cagar Budaya, (The Republic of Indonesia Law n° 5, regarding Cultural Heritage), loi révisée en 2010 (UU 11/2010 Benda Cagar Budaya) dans Budihardjo Eko, 1997, Appendix, p. 137-147 ; Roosmalen Pauline K. M., 2013, note 21, p. 23.
  • [44]
    Dinas Kebudayaan dan Permuseuman Provinsi Daerah Khusus Ibukota Jakarta, 2007, p. 2.
  • [45]
    Supriyati/Ani H, « Jakarta City told to revise regulations on cultural heritage protection », VOI/RRI World Service Voice of Indonesia, 3 juin 2012, disponible sur le site : http://en.voi.co.id/voi-news/1691-jakarta-city-told-torevise-regulations-on-cultural-heritage-protection consulté le 21/11/2016.
  • [46]
    Rulistia Novia D., « Menteng heritage house lies in ruins », The Jakarta Post, 29 novembre 2011, disponible sur le site : www.thejakartapost.com/news/2011/11/29menteng-heritage-house-lies-ruins. html, consulté le 21/11/2016.
  • [47]
    Arditya Andreas D., « Menteng heritage site renovation legal : Jakarta administration », The Jakarta Post, 9 juin 2012, disponible sur le site : www.thejakartapost.com/news/2012/06/09menteng-heritage-site-renovation-legal-jakarta-administration.html.
  • [48]
    Merrillees Scott, 2012, p. 155.
  • [49]
    Leushuis Émile, 2014, p. 70-71.
  • [50]
    Passchier Cor, 1998, p. 125.
  • [51]
    Leushuis Émile, 2014, p. 169.
  • [52]
    Le kraton Surakarta Hadiningrat construit dans la première moitié du XVIIIe siècle est toujours habité par le sunan Pakubuwono XIII. Ce dernier est aujourd’hui toutefois dépourvu de toute fonction officielle.
  • [53]
    Le kraton Ngayoyakarta Hadiningrat a été bâti à partir de 1756. C’est à la fois la résidence officielle du sultan Hamengkubuwono X et un haut lieu touristique.
  • [54]
    À Solo (Surakarta), une seconde demeure princière, plus modeste (un puro et non un kraton), a été érigée pour un prince rebelle, le Mangkunegaraan. Cette vaste demeure est toujours occupée par le prince Mangkunegara IX.
  • [55]
    Le Puro Pakualaman, construit en 1813, pour une branche cadette de la famille princière, est lui aussi toujours habité par le Pakualam X.
  • [56]
    Les influences locales sont particulièrement lisibles dans la structure même des palais : les deux premiers sont constitués d’un ensemble de cours, séparées par des portails monumentaux en accord avec la cosmologie javanaise. Les influences occidentales sont toutefois manifestes dans la structure des bâtiments, des pavillons et des divers kiosques construits dans les cours, ainsi que dans la décoration et le mobilier. En dehors de Java, les influences occidentales sont également sensibles, par exemple à Medan, sur la côte orientale de Sumatra, dans l’Istana Maimun, palais de style « mauresque », propriété du sultan de Deli, construit dans le dernier quart du XIXe siècle avec l’argent tiré des plantations de tabac. À Kalimantan, elles le sont tout autant dans le palais du sultan de Tenggarong reconstruit en béton dans les années 1930 par un architecte néerlandais. Il n’y a guère que dans les palais des sultans de la côte nord de Bornéo, à Pontianak, à Mempawa et à Singkawang, qu’elles le sont moins. Dans ces grandes demeures à planchers hauts, construites en bois, les influences malaises sont plus évidentes.
  • [57]
    Knapp Ronald G., 2010, p. 146-155.
  • [58]
    Hottin Christian, 2014, p. 9.
  • [59]
    Ooi Keat Gin, 2016, p. 190.
  • [60]
    King Victor T., 2016, p. 157.
  • [61]
    Dale Ole Johan, 1999, p. 121-126 et note 21, p. 157.
  • [62]
    URA, 1995, p. 15-26.
  • [63]
    Wong Tai-Chee, Yap Lian-Ho Adriel, 2004, p. 25.
  • [64]
    Christopher Silver, 2008, p. 176-177.
  • [65]
    Widjaja Martokusumo, 2002, p. 384.
  • [66]
    Dinas Kebudayaan dan Permuseuman, Provinsi DKI, Jakarta, 2007, p. 2.
  • [67]
    Robertson Ashley et al., 2014, p. 6-8.
  • [68]
    Dinas Kebudayaan dan Permuseuman, Provinsi DKI, Jakarta, 2007, p. 2.
  • [69]
    Idem, p. 3.
  • [70]
    Luar Batang signifie « au-delà de la poutre », en référence à la poutre qui barrait le chenal la nuit aux XVIIe siècle, Heuken A., 1982, p. 25.
  • [71]
    Au XVIIe siècle, le quartier était occupé par des Indiens Khojas, d’où le nom de « pekojan », puis, au siècle suivant, il s’est transformé en quartier arabe, « The lost of Kampong Arab Pekojan », Oud Batavia, Jakarta, 2013, vol. 2, p. 7 (article non signé).
  • [72]
    Pecinan : quartier chinois.
  • [73]
    Île fortifiée pour protéger l’entrée du port.
  • [74]
    Robertson Ashley et al., 2014, p. 11.
  • [75]
    Idem, p. 12-13.
  • [76]
    Dinas Kebudayaan dan Permuseuman, Provinsi DKI, Jakarta, 2007, p. 5- 9.
  • [77]
    Interviews de MM. Gathut Dwihastoro (Kepala Unit) et Norviadi S. Husodo (Kasie Pengembangan), Unit Pengola Kawasan Kota Tua, Dinas Pariwisata dan Kebudayaan Provinsi DKI Jakarta, du 2 août 2013.
  • [78]
    Dinas Kebudayaan dan Permuseuman, Provinsi DKI, Jakarta, 2007, p. 9-12.
  • [79]
    Construite en 1741 mais reconstruite en 1890 à la suite d’un incendie.
  • [80]
    L’ensemble de ces informations historiques est tiré de Jongkie Tio, 2007-2013.
  • [81]
    « The Little Netherland », l’ancienne oudestad, ou Klein Holland, pour reprendre des expressions couramment utilisées dans la littérature indonésienne..
  • [82]
    Les données législatives qui suivent sont tirées de Kriswandhono, 20011, p. 3-4.
  • [83]
    BAPPEDA : Badan Perencanaan dan Pembangunan Daerah, structure administrative en charge de la planification et de l’aménagement.
  • [84]
    Surat Keputusan Walikota KDH Tk II Semarang n° 646/50/Tahun 1992.
  • [85]
    Peraturan Daerah KDH Tk II Semarang n° 1/1999, n° 2/1999, n°.4/1999 ; Peraturan Daerah Kota Semarang n° 8/2003.
  • [86]
    Peraturan Walikota n° 12/2007.
  • [87]
    Badan Pengola Kawasan Kota Lama.
  • [88]
    Peraturan Daerah Kota Semarang Nomor 3, Pasal 25, dans Agastya Grahadwiswara et alii, 2014, sans pagination.
  • [89]
    Ibidem.
  • [90]
    Coté Joost, 2002, p. 126-130.
  • [91]
    Cette coopération entre les deux pays a connu des hauts et des bas, notamment à la suite des massacres de Dili qui, en 1991, ont entrainé pour un temps la rupture des relations diplomatiques.
  • [92]
    Roosmalen Pauline K. M., 2013.
  • [93]
    Stichting Comité Cadeau Indonesië.
  • [94]
    Roosmalen Pauline K. M., 2013, p. 15-16.
  • [95]
    Tarekat Hasti, et alii, 2015.
  • [96]
    Galeri Rehabilitasi.
  • [97]
    « Kissing Sleeping Beauty alive, A story for Kota Lama », april 2016, disponible sur le site : https://semarangkotalama.nl/wp-content/uploads/2016/04/Shared-Vision-Kota-Lama-Semarang.pdf consulté le 02/12/2017.
  • [98]
    Quatre biens culturels et quatre biens naturels.
  • [99]
    Informations disponibles sur les sites http://whc.unesco.org/fr/etatsparties/id et htpp ://whc.unesco.org/en/tentativelists/state=id, consultés le 28/11/2017.
  • [100]
    Tarekat Hasti, et alii, 2015.
  • [101]
    Idem, p. 35.
  • [102]
    Budiharjo Eko, 1997.
  • [103]
    Idem, p. 77-83.
  • [104]
    Le cas indonésien n’est pas unique : chez les voisins, notamment à Singapour, la mise ne valeur du patrimoine britannique est mise au service de la cohésion nationale et participe de l’écriture du « roman national ». Le lecteur intéressé se reportera à O. Sevin, 2013.
  • [105]
    Le Global Power City Index place Jakarta en 41e position en 2017 : « mori-m-foundation.or.jp/pdf/GPCI2017_en.pdf », consulté le 25/08/2018.
  • [106]
    Le lecteur peu informé se reportera utilement à Saskia Sassen, 2001, en particulier aux chapitres 9 et 10.
  • [107]
    Tjokrosaputro Teddy, 2011, p. 138-139 et p. 116-117.
  • [108]
    Louis-Philippe a, par exemple, plus encore que ses prédécesseurs, profondément remanié le palais au début du XIXe siècle.
  • [109]
    En moyenne, 1808,53 US$ par visite pour les Belges, voire 1497,46 US $ pour les Français, pour ne citer que ces exemples, contre 675,81 US $ pour les Singapouriens ou 676,60 US$ pour les Malaysiens sur la période 2010-2014. Indonesie, 2015, tabl. 9.4, p. 344.
  • [110]
    Logan William S., 2002, p. XVI.
  • [111]
    Coté Joost, 2002, p. 128.
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