Notes
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[1]
L’aire urbaine de Toulouse regroupe environ 945 000 habitants répartis dans 342 communes, elle est caractérisée par un important étalement urbain et par une forte segmentation socio-spatiale comme a pu le montrer M.-C. Jaillet dans ses travaux sur la sécession urbaine (Jaillet, 1999).
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[2]
Les enquêtes, réalisées dans le cadre de la préparation d’un doctorat de géographie urbaine soutenu en 2005 sur les usages ludo-sportifs des espaces publics dans l’agglomération toulousaine, sont basées sur des observations, sur la passation de 300 questionnaires et la réalisation de 40 entretiens dans ces lieux.
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[3]
La Rando Roller a aussi été étudiée à partir d’observations, de 100 questionnaires et d’une vingtaine d’entretiens. Une étude des city stades des quartiers d’Empalot et du Mirail a été menée à partir d’observations et d’entretiens (Escaffre, à paraître).
-
[4]
Nous ne retenons ici que les résultats des 300 questionnaires réalisés dans les six lieux cités.
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[5]
Le « dunk » est une manière de marquer un panier au basket. Elle se caractérise par sa dimension volontairement spectaculaire qui se concrétise généralement par le fait que le joueur marquant ainsi reste quelques instants accroché au panier.
1 Le développement massif des pratiques ludo-sportives urbaines comme le skate, le roller, le jogging ou les sports de rue, invite à observer ces usages particuliers des espaces publics pour identifier le rôle qu’ils jouent aujourd’hui dans le renouvellement des formes d’expression de l’urbanité (Augustin, 1999). Celle-ci, définie comme « les relations que les êtres humains doivent entretenir entre eux quand ils habitent en ville et qu’ils doivent coexister dans cet espace » (Monnet et Capron, 2000), implique de mettre en évidence les spécificités des rapports aux autres, mais aussi aux espaces, dans un contexte urbain caractérisé par l’importance de la dimension publique des usages du quotidien, dont une bonne part a lieu dans les espaces publics.
2 L’investissement direct de la ville inhérent à ces usages ludo-sportifs des espaces publics est porteur de nouvelles spatialités (Augustin, 2007) caractérisées par des lectures spécifiques des formes et des ambiances urbaines. Il renvoie ainsi à des représentations socio-spatiales contrastées parfois contradictoires, variables selon les pratiques et les pratiquants, allant de la condamnation de la ville et de ses pollutions et dangers, à l’affirmation d’une identité qui ne peut être qu’urbaine (Escaffre, 2005). Pour compléter cette analyse, cette contribution souhaite aborder plus précisément la question des relations aux autres, telle qu’elle peut être posée à partir de l’observation des « usages sportifs de la ville » (Adamkiewicz, 1998).
1 Les usages des espaces publics, une base du « vivre-ensemble » en ville
3 L’enjeu lié à cette interrogation découle de ce qu’elle renvoie fondamentalement au rôle des espaces publics et de leurs usages dans le « faire société » en ville. M.-C. Jaillet (1997) présente ainsi les spécificités de la construction du lien social et des modes de socialisation en ville : « La ville est avant tout ce lieu de la densité, du côtoiement, du “frottement” social, ce lieu également où plus qu’ailleurs, la société, dans sa diversité, se met en scène. Elle donne à chacun la possibilité de nouer des relations, d’élargir ses réseaux tout en rendant possible l’anonymat » (Jaillet, 1997). Elle en déduit que la ville permet une double expérience, celle de « l’affranchissement » et celle de « l’altérité ». S’affranchir par l’expérience de la ville consiste à ne plus être soumis au contrôle communautaire correspondant à l’appartenance à un groupe d’individus de taille réduite, liés par des relations stables établies dans le temps long. De cette manière, la ville a été le creuset du « faire société » aussi longtemps que la croissance industrielle lui a permis d’attirer et d’employer des populations nombreuses aux origines géographiques variées (Donzelot, 1999 et 2004). Le développement d’un chômage massif consécutif à la crise du modèle industriel a transformé la situation. Depuis, « la ville se morcelle [...], organisant dans une extrême contiguïté géographique la constitution d’alvéoles socialement différenciées [...] [faisant perdre à] l’espace urbain sa capacité à ordonner les rapports sociaux, à ouvrir un espace “partageable” » (Jaillet, 1997).
4 Ce rappel du rôle primordial des villes dans le « faire société » renvoie directement à la place qu’y occupent les espaces publics et leurs usages. En effet l’expérience libératrice et socialisante de la ville se conjugue avec l’existence et l’usage des espaces publics. S’ils sont, en tant que lieux de coprésence aléatoire élargie, des espaces de frottement social, c’est que leurs formes en font des supports de déplacements que l’on emprunte nécessairement. C’est aussi parce que leur statut juridique en garantit l’accès à tous. Les évolutions économiques et sociales qui remettent en question le modèle de la ville comme creuset du « faire société » questionnent donc les espaces publics. Le développement extrême des déplacements automobiles interroge aussi quant à un éventuel éclatement de la ville, il transforme, en plus, largement les modalités de la coprésence dans les espaces publics. D’interactions interindividuelles directes impliquant une mise en jeu des regards et des corps, on passe à des contacts lointains et furtifs dans lesquels le micro-espace individuel qui correspond désormais à l’habitacle de la voiture s’agrandit et se ferme.
5 Or, en rendant visibles les unes aux autres, directement ou potentiellement, les diverses composantes de la société urbaine, les espaces publics participent à sa constitution et à son fonctionnement. Cette mise en visibilité traduit en fait l’existence de situations de coprésence dans un contexte public qui constituent de véritables situations d’interactions interindividuelles produisant certaines formes de liant social : « C’est le premier niveau où la coprésence peut être considérée comme possédant une substance sociétale (et pas seulement sociale) » (Lévy et Lussault, 2003). Ce mode d’organisation spécifique des relations sociales fait circuler de manière diffuse du politique dans l’espace public, il participe à l’existence d’une sphère publique, au sens politique de J. Habermas (1978).
6 Les espaces publics représentent donc un enjeu primordial pour la ville, dans la mesure où il semble aujourd’hui crucial « de permettre que les villes autorisent encore une manière “d’être ensemble” » (Jaillet, 1997). Pour étudier le rôle des usages sportifs des espaces publics dans la constitution du lien social en ville, nous considérons qu’ils tendent à renouveler les comportements et les compétences citadines mises en évidence par G. Simmel (1989). Il propose en effet une interprétation des interactions dans les lieux publics des grandes métropoles à partir de la notion de « réserve » (Simmel, 1989) qui lui permet de définir un type d’attitude propre aux habitants des grandes villes en dépassant le constat de leur comportement blasé. Simmel montre ainsi comment ces habitants sont amenés à adopter une attitude réservée lorsqu’ils sont dans des lieux publics tels que les rues, les places ou le métro. Celle-ci découle de la multitude des contacts sociaux qui s’offrent à eux dans ces lieux où se côtoient un très grand nombre d’individus. Ne pouvant pas s’engager dans des relations approfondies avec toutes les personnes croisées, les citadins adoptent une « réserve » qui leur permet de conserver une certaine distance vis-à-vis de la foule. Ainsi, les interactions dans les lieux publics des grandes villes prennent la forme de comportements d’accommodement dus à la multiplicité des individus et à la dimension aléatoire des rencontres. Ce type de conduite ne marque pas une absence de relation mais une forme de contact dans laquelle l’expansivité est réduite au minimum.
7 Les interactions dans les lieux publics revêtent en effet une part d’incertitude et de danger : « le conflit et la violence constituent un volet essentiel [...] une sorte de symétrique de la cohabitation harmonieuse des contraires et du dialogue » (Picon, 2001). Ainsi, les croisements entre les usagers sont autant d’occasions de micro-conflits découlant de la dialectique entre la maîtrise d’une trajectoire et la protection de l’intégrité d’un espace personnel. Mais, plus fortement encore, en rendant visibles les uns aux autres les différents constituants du corps social urbain, les espaces publics « donnent à voir les différences économiques et culturelles dans un dessein qui n’a rien d’intégrateur » (Picon, 2001, 24). Même si une telle conception est à nuancer, les interactions interindividuelles dans les espaces publics urbains traduisent bien des tensions. La forme agressive qu’elles prennent parfois révèle la complexité des relations sociales en public, entre affirmation de soi, confrontation et/ou négation de l’autre. La compréhension de ces interactions ne doit donc pas se réduire à la lecture affadie qui les conçoit seulement dans un « idéal de plénitude » (Picon, 2001, 23).
8 En retenant la grille de lecture simmelienne des comportements urbains et en l’enrichissant des apports de la microsociologie (Goffman, 1973 et 1974), il va être question d’affiner le regard porté sur les usages ludo-sportifs des espaces publics afin de mieux dessiner les contours de l’urbanité sportive qu’ils expriment.
9 Ainsi, comme l’enquête réalisée le montre, le jugement porté sur les relations aux autres sportifs et aux autres usagers des espaces publics est largement positif. Mais que signifie concrètement cette convivialité affirmée, que cache-t-elle en terme de comportement, d’attitude, de geste ? Comment cette convivialité s’accommode-t-elle de la mise en scène de soi inhérente aux comportements en public et donc aux usages sportifs des espaces publics ? Enfin, comment prendre la juste mesure du niveau de cette ambiance conviviale et y replacer les conflits qui malgré tout s’y déroulent ? Avant d’apporter des éléments de réponse à ces interrogations, il convient de préciser de quels espaces publics il est ici question et de présenter le contexte d’étude et l’enquête conduite dans l’agglomération toulousaine.
2 Méthodologie et terrains d’étude dans l’agglomération toulousaine
10 Dans l’agglomération toulousaine de nombreux lieux publics ont été aménagés ou sont devenus, du fait des usages qui s’y sont installés, des espaces de pratique ludo-sportive autonome. Ces lieux correspondent assez bien aux trois types d’espaces permettant de comprendre l’organisation socio-spatiale de Toulouse [1]. Certains sont situés en centre-ville, d’autres dans les quartiers de la « relégation » (Donzelot, 2004) et la plus grande partie dans l’espace périurbain. Les espaces de pratique se trouvent ainsi dans des environnements urbains variés tant du point de vue formel que social. C’est dans cet environnement segmenté que se répartissent les espaces publics accueillant des pratiques ludo-sportives autonomes. Ils peuvent être rassemblés en trois catégories établies selon les caractéristiques de leur aménagement et de leurs usages (Vigneau, 1998). Ainsi, certains lieux sportifs comme les skateparcs ou les « city stades » sont en fait des équipements aménagés spécifiquement pour accueillir des pratiques libres. D’autres, comme les bases de plein air et de loisirs, en particulier, sont des espaces réservés aux loisirs dont une large partie de la superficie n’est pas affectée à une pratique particulière. Enfin, et ce sont les plus nombreux, certains espaces de pratique ludo-sportive autonome sont des lieux qui ne sont ni réservés ni affectés à ce type d’usage. C’est le cas notamment des places utilisées par les adeptes des glisses urbaines pour s’adonner à la pratique du roller ou du skateboard.
11 L’étude des usages ludo-sportifs des espaces publics est basée sur des enquêtes [2] qui se sont principalement centrées sur six lieux dans l’agglomération toulousaine : la base de loisirs de La Ramée au sud-ouest de Toulouse ; le canal de Brienne, le skateparc des Ponts-Jumeaux et la place de l’Europe dans le péri-centre de Toulouse ; le canal du Midi à la sortie sud est de la ville et enfin les abords du Stadium de Toulouse sur l’île du Ramier [3].
12 Ces différents espaces ont été choisis parce qu’ils permettent d’observer un large panel d’activités ludo-sportives, mais aussi parce qu’ils offrent la possibilité d’étudier ces pratiques dans des environnements urbains différenciés par leurs paysages, leurs formes et leurs localisations dans la ville. Les questionnaires [4] réalisés permettent ainsi de mettre en évidence des pratiques dominantes dans chacun de ces lieux.
13 Ils apportent aussi des indications quant à la répartition par âge, par sexe et par catégorie socio-professionnelle des sportifs urbains. Ainsi, à l’instar des tendances nationales (Mignon, 2004), les sportifs rencontrés sont majoritairement jeunes, 48 % ont entre 16 et 25 ans et 42 % sont des collégiens, des lycéens ou des étudiants. Par contre, l’échantillon des personnes interrogées ne correspond pas à deux évolutions récentes du fait sportif observées nationalement : l’allongement du temps de pratique et l’accroissement de la pratique féminine. En effet, seuls 3 % des sportifs interrogés ont plus de 56 ans et les femmes ne représentent que 20 % des interviewées. Enfin, en ce qui concerne les CSP, il est notable que si les étudiants sont les plus nombreux (28 %), le groupe constitué par la catégorie des cadres et chefs d’entreprise est le deuxième par ordre d’importance avec 16 %. Ceci se retrouve d’ailleurs si l’on considère le niveau de diplôme puisque 35 % des sportifs ont effectué au moins trois ans d’étude après le baccalauréat. Ces tendances générales méritent toutefois d’être nuancées. D’abord, compte tenu des effectifs concernés, mais aussi du fait de la technique de passation du questionnaire retenue, consistant à aller interroger les sportifs dans les lieux de pratique, elles sont plus indicatives que représentatives. Enfin, ces tendances connaissent des variations importantes en fonction des lieux et des pratiques. Ainsi, si sur les terrains de basket du Stadium et sur le skateparc des Ponts-Jumeaux, les 16-25 ans représentent respectivement 80 % et 64 % des utilisateurs, ils ne constituent que 22 % et 24 % de ceux de La Ramée et du canal du Midi. De la même manière, les glisseurs urbains sont majoritairement des jeunes (58 % de 16-25 ans, 21 % de 26-35 ans et seulement 1 % des plus de 56 ans), alors qu’on retrouve des individus en moyenne plus âgés dans les pratiques déambulatoires (34 % de 16-25 ans, 33 % de 26-35 ans et 5 % des plus de 56 ans). Ces brèves indications statistiques, qui montrent les principales lignes de différenciation des pratiques ludo-sportives urbaines, permettent notamment d’insister sur leur inégale répartition dans l’espace urbain. Celle-ci découle d’abord des spécificités propres à chaque activité en matière d’espace sportif, elles interrogent aussi quant à leurs relations avec la division sociale de l’espace urbain et à son influence sur les interactions sociales se déroulant dans les lieux étudiés.
La répartition différentielle des pratiques ludo-sportives à Toulouse The distribution of sport-related recreational practices in Toulouse
Course à pied | Vélo | Roller | Skateboard | BMXa | Basket |
Autre (tennis, marche...) | |
Base de loisirs de la Ramée | 46 % | _ | 30 % | – | – | 8 % | 16 % |
Terrains de basket du Stadium | – | – | – | – | – | 100 % | – |
Canal du Midi | 48 % | 22 % | 28 % | – | – | – | 2 % |
Skateparc des Ponts-Jumeaux | – | – | 32 % | 32 % | 34 % | – | 2 % |
Canal de Brienne | 100 % | – | – | – | – | – | – |
Place de l’Europe | – | – | 60 % | 18 % | 18 % | – | 4 % |
La répartition différentielle des pratiques ludo-sportives à Toulouse The distribution of sport-related recreational practices in Toulouse
a. Version cycliste du moto-cross, le BMX est apparu dans les années 1960 en Californie. Il se pratique sur un petit vélo et a évolué en différentes activités dont les principales sont les courses pratiquées sur des pistes de terre et la réalisation de figures à l’arrêt ayant généralement lieu sur des places ou des esplanades.3 Les rapports aux autres : neutralité, convivialité et mises en scène de soi
3.1 La neutralité habituelle des relations dans les espaces publics
14 Dans l’échantillon des sportifs interrogés, l’attitude réservée est souvent décrite, comme dans ces extraits d’entretiens avec deux joggers pratiquant sur les bords du canal de Brienne : « les relations sont inexistantes, chacun est dans sa bulle » ; « les relations sont impersonnelles, un signe de la tête, un bonjour mais ça s’arrête là »
15 On retrouve des descriptions similaires dans les autres lieux étudiés mais de manière moins fréquente, en particulier pour le skateparc des Ponts-Jumeaux, la place de l’Europe et les terrains de basket du Stadium qui, rassemblant de nombreuses personnes se connaissant préalablement, accueillent des relations sociales moins distantes et réservées.
16 Comment interpréter ces attitudes ? L’explication par la réserve protectrice des personnalités individuelles dans un contexte de multiplication des interactions sociales peut-elle être appliquée ? Les comportements décrits ne marquent-ils pas au contraire une réelle indifférence vis-à-vis de la présence d’autrui et ainsi n’accréditent-ils pas les idées défendues pas G. Lipovetsky (1993) quant à l’individualisme contemporain et à sa capacité à faire le « vide » autour de lui ? La réserve décrite ici renvoie plutôt à une forme de neutralité qu’à une attitude indifférente. La nuance est mince entre ces deux types de comportement mais existe bel et bien. L’indifférence correspond à l’état d’une personne qui n’est ni intéressée ni touchée par ce qui l’entoure. La neutralité ne marque pas une distance aussi grande, elle correspond plus au fait de s’abstenir de s’engager.
17 Ainsi, de même que les sportifs urbains ne sont pas indifférents aux formes et à l’environnement de leurs lieux de pratique, ils sont touchés et intéressés par tous ceux qui les y entourent. Ils choisissent seulement de conserver leurs distances : « on ne va pas là pour chercher des amis » (jogger, canal du Midi) ; « on discute, mais chacun reste libre, c’est très important » (roller, La Ramée)
18 Cela peut aussi signifier cantonner les conversations au domaine sportif. Ainsi par exemple, place de l’Europe et sur l’espace dédié aux rollers de la base de loisirs de La Ramée, de nombreuses interactions observées semblent avoir pour origine soit la demande, soit l’offre de conseils d’apprentissage. Des rollers de niveaux différents se retrouvent là et ceci profite aux uns comme aux autres pour entreprendre des discussions tout en restant réservés et en conservant un degré de neutralité relativement important. Si les contacts entre sportifs et avec les autres usagers sont caractérisés par la neutralité plus que par de l’indifférence, cette neutralité n’est pas totale au sens où si elle marque bien un refus de s’engager trop loin avec des inconnus, elle ne se traduit pas par un refus de prendre parti. L’anonymat complet de la rue est ainsi partiellement rompu pour laisser place à une attitude teintée de neutralité et de bienveillance.
3.2 La convivialité des pratiques sportives, des lieux et des temps de loisirs
19 La neutralité bienveillante se mue chez de nombreux sportifs urbains en une impression générale de convivialité lorsqu’on leur demande de décrire leurs relations aux autres usagers des espaces publics qu’ils fréquentent. Cette description est une caractéristique commune à tous les lieux étudiés mais des variations sont perceptibles selon les espaces et les pratiques. Tout d’abord, il convient de relever que dans les espaces de forme linéaire si l’ambiance générale est jugée bonne, les allusions à des conflits d’usage sont plus nombreuses. Ceci découle du fait que dans ces lieux, le canal de Brienne, le canal du Midi et dans une moindre mesure la base de loisirs de La Ramée, se localisent plus d’activités individuelles, en particulier des pratiques déambulatoires. Ces pratiques renvoient à des recherches de sensations et à des itinéraires différents. Certains sportifs réalisent de longs parcours linéaires, d’autres utilisent des espaces plus limités. Certains viennent dans un souci d’isolement, d’autres sont davantage en quête de rencontres. Quelles que soient ces différences, ces usagers sportifs déambulant se trouvent ainsi impliqués dans des relations de coprésence assez largement limitées aux temps de croisement ainsi qu’à ceux de préparation (habillement, étirements) et de fin de l’activité (étirements, rangement du matériel). Néanmoins, même dans de tels espaces les relations sont souvent jugées conviviales et certains sportifs affirment même qu’à force de fréquenter un lieu et d’y croiser les mêmes pratiquants, il est possible d’y nouer des relations amicales.
20 Dans les espaces de formes surfaciques accueillant des pratiques plus « collectives » ou du moins plus « groupales », la convivialité est encore plus ressentie. Même si elle n’exclut pas certains conflits, elle induit un jugement très positif voire enthousiaste des sportifs interrogés. Ici, c’est-à-dire place de l’Europe, sur le skateparc des Ponts-Jumeaux, sur les terrains de basket du Stadium mais aussi sur le plateau roller de La Ramée, les sportifs sont souvent des habitués. Ils constituent des petits groupes relativement stables mais tout de même ouverts. La convivialité des rapports découle d’une relation d’interconnaissance plus ou moins approfondie allant de la fréquentation récurrente mais toujours assez distante à des formes de liens amicaux. Ces comportements renvoient assez bien à la notion de « tribu », appliquée par M. Maffesoli à la compréhension des évolutions de l’individualisme contemporain (Maffesoli, 2000). Il convient ici de souligner que dans des lieux comme le skateparc des Ponts-Jumeaux ou les terrains de basket du Stadium, ces groupes d’interconnaissance sont homogènes du point de vue du genre dans la mesure où ils rassemblent très majoritairement des garçons.
21 Les situations décrites tendent à différencier de manière certainement un peu trop tranchée deux catégories de relations conviviales en fonction des lieux et des pratiques ludo-sportives. Si elles décrivent des atmosphères différentes, il n’en demeure pas moins que des formes de regroupement affinitaire s’observent dans des lieux comme le canal de Brienne et le canal du Midi et qu’inversement des pratiquants seuls sont présents dans les autres lieux étudiés.
22 Si la convivialité domine sous des formes différenciées les relations entre sportifs, elle est aussi apparemment présente dans les rapports aux usagers non sportifs des espaces publics. Ce qui est mis en évidence par les sportifs, c’est plus l’attention des non sportifs que leurs gênes. Au total, les autres usagers des espaces publics sont considérés comme participant d’une ambiance générale plutôt agréable, faîte de « respect mutuel » et de « bon esprit ». Ceci semble devoir beaucoup à la dimension plus ludique que compétitive des pratiques urbaines étudiées mais aussi au fait que les interactions sociales dont il est ici question ont souvent lieu durant des temps libres consacrés aux loisirs.
4 Les mises en scène sportives de soi
4.1 Les marqueurs de la mise en scène : corps, tenues vestimentaires et attitudes
23 Comme M. Ségalen (Ségalen, 1994) le relève à propos de la course à pied, la pratique sportive en ville peut être observée du point de vue du corps (Augustin, 2002). Courir dans l’espace public c’est exposer son corps partiellement dénudé au regard d’autrui. Mais c’est aussi avoir des attitudes jugées inconvenantes dans de nombreuses autres situations : se moucher avec sa manche ou cracher par exemple. Tout ceci se produit à la vue de tous dans un lieu public et en quelque sorte cela permet d’y prendre place pleinement, avec un minimum de retenue dans la mesure où l’activité sportive rend plus acceptables ces attitudes ou ces gestes. Bien qu’il puisse être parfois décrit comme réalisé à des fins de provocation, ce type de comportement n’a jamais été observé dans les espaces publics étudiés.
24 La tenue vestimentaire est un autre élément de la mise en scène des sportifs urbains. Lors des observations réalisées, nombre de coureurs à pied arboraient des tee-shirts des courses auxquelles ils avaient participé. Dans le domaine des glisses urbaines ainsi que chez les pratiquants du basket de rue, les vêtements ont aussi une grande importance. Si par là transparaît la marchandisation importante de ces activités, on peut aussi y déceler quelques-uns des univers de référence de ces sportifs. Chez les glisseurs urbains, qu’il s’agisse de pratiquants du skate, du BMX ou du roller dans sa version « agressive », la tenue est caractérisée par des couleurs relativement peu voyantes et par des vêtements à la coupe ample. Derrière cette apparence se cache semble-t-il une volonté de s’insérer dans la ville et donc de ne pas en apparaître isolé par une tenue qui traduit trop explicitement que l’on est en train de faire du sport. Pour les basketteurs de rue, la logique est différente, presque inverse, dans la mesure où ils arborent des tenues colorées, elles aussi très amples mais qui indiquent clairement qu’ils sont des sportifs et qu’ils apprécient le basket.
25 Au comportement et à la tenue vestimentaire s’ajoute l’attitude des sportifs comme marque individuelle participant à leur mise en scène. Les coureurs à pied sont bien souvent concentrés sur leur effort et ont donc une attitude relativement retenue. Les glisseurs urbains choisissent souvent une attitude blasée qui comme leur tenue est censée traduire leur détachement vis-à-vis de la pratique ludique à laquelle ils s’adonnent. Les basketteurs de rue, mais plus largement les joueurs de sports de ballon, sont beaucoup plus exubérants. Les matchs auto-arbitrés sont autant d’occasions de discussions animées qui tiennent plus souvent lieu de l’affrontement surjoué que de la véritable dispute.
4.2 Scènes et coulisses
26 L’espace joue aussi un rôle dans ces différentes formes de mise en scène. E. Goffman a souligné comment, en situation de coprésence, les lieux étaient occupés de manière différenciée, certains faisant office de scène pendant que d’autres fonctionnent comme des « coulisses » (Goffman, 1973). Les mises en scène individuelles et collectives variant au gré des passages entre ces deux lieux complémentaires. Dans le cas des usages ludo-sportifs des espaces publics on retrouve une forme de distinction assez similaire. Certains lieux où certaines parties de lieux publics fonctionnent comme des coulisses dans la mesure où ils font office de lieux d’entraînement ou de préparation. C’est le cas par exemple des parkings proches du canal du Midi et de ceux de la base de loisirs de La Ramée. Là, les sportifs s’échauffent, s’étirent ou encore s’habillent. Certains, notamment pour ce qui est de l’habillement, utilisent même leur voiture comme un moyen de renforcer leur intimité.
27 Pour les terrains de basket proches du Stadium le partage entre scène et coulisses s’opère grâce à la distinction entre les terrains occupés par des joueurs débutants et celui qui accueille les rencontres des plus aguerris. Les premiers servent de coulisses parce qu’ils permettent parfois aux bons joueurs de s’échauffer en jouant une ou deux rencontres plus faciles. Jouer sur des terrains proches de la scène principale de déroulement des meilleurs matchs, c’est ainsi se rapprocher peu à peu des bons joueurs et, qui sait, peut-être un jour être invité à jouer avec eux. Si ce partage scène-coulisses s’effectue dans un même lieu de pratique, il permet aussi de différencier les lieux à l’intérieur du réseau d’espaces de jeu existant pour chaque activité. Ainsi la place de l’Europe est considérée par certains skaters non comme une scène d’exposition de leurs meilleures figures mais comme un lieu d’entraînement dans lequel ils répètent laborieusement leurs gammes avant d’aller montrer leur progrès au grand jour dans l’un des hauts lieux du skate toulousain comme le skateparc de Rangueil par exemple.
28 Les mises en scène des ludo-sportifs urbains se réalisent donc principalement en jouant sur leur corps, leur tenue, leur attitude et sur une organisation codifiée des lieux qu’ils utilisent. Dans le climat convivial qui a été décrit, elles donnent parfois lieu à des critiques mais sont le plus souvent plébiscitées comme un élément intrinsèque de la pratique sportive en ville.
4.3 Des mises en scène sportives dénoncées ou affirmées
29 Les réserves apportées sur les mises en scène des sportifs urbains par les pratiquants rencontrés sont relativement rares. Il apparaît tout de même intéressant de s’y attarder dans la mesure où elles traduisent un état d’esprit largement observé dans le monde des pratiques ludo-sportives urbaines. Globalement ces dénonciations portent sur l’ostentation excessive, selon l’avis des interviewés, dont font preuve certains sportifs urbains. Celle-ci se traduit différemment en fonction des lieux et des pratiques, mais elle renvoie à l’idée qu’il ne sert à rien d’exposer des attributs de compétence sportive si l’on n’est pas effectivement d’un bon niveau. On retrouve par là, dans un milieu très marqué par la marchandisation et par la succession des modes, une condamnation récurrente de la part des sportifs confirmés. Ainsi rien ne sert d’avoir un vélo dernier cri pour rouler sur le skateparc des Ponts-Jumeaux si l’on n’impressionne pas les autres.
30 La mise en scène excessive est aussi dénoncée quand elle émane d’individus ne respectant pas les lieux sportifs appropriés de longue date par des groupes assez bien définis. Qu’un skater vienne sur le skateparc des Ponts-Jumeaux approprié par les pratiquants du BMX pour s’y faire photographier en train de réaliser des acrobaties qui attestent de son talent et sa présence donne lieu à condamnation. Les choses se passent de manière assez similaire sur le plateau roller de La Ramée où comme l’indique un habitué : « pour se faire une place ici il faut être humble au début ».
31 Mises à part ces dénonciations, les mises scène sportives dans les lieux publics sont le plus souvent présentées comme un plaisir et comme une forme de communication avec les usagers non-sportifs.
32 Se montrer dans un lieu public en train de faire du sport semble particulièrement important pour les pratiques ludo-sportives qui peuvent être rattachées aux glisses urbaines mais aussi pour certaines de celles qui relèvent des sports de ballon. Ainsi les skaters et les pratiquants du BMX inteviewés reconnaissent apprécier lorsque les autres pratiquants, mais aussi des usagers non-sportifs, les regardent. L’attention que se portent les pratiquants du BMX par exemple est très importante. Ils s’observent en train de tenter et parfois de réussir des acrobaties et, les échecs comme les réussites, donnent lieu à des réactions qui vont de la moquerie aux applaudissements. Ceux qui s’élancent sur le skateparc sont conscients de l’attention qui leur est accordée et essaient de la satisfaire. Mais au-delà de ces mises en scène destinées aux connaisseurs, les « BMXers » rencontrés affirment aussi faire attention aux regards des passants ou des parents accompagnant leurs jeunes enfants sur le skateparc. Ce que ces observateurs leur donnent ne relève pas tant de l’importance que d’une forme de légitimation de leur activité trop fréquemment considérée, selon les pratiquants, comme une pratique transgressive. Ces regards d’usagers des espaces publics compensent en quelque sorte les invectives voire les insultes qui accompagnent parfois les pérégrinations voltigeuses de ces sportifs urbains.
33 Place de l’Europe la situation est différente dans la mesure où ce lieu n’est pas un équipement spécifique et qu’il est, à certaines heures du moins, relativement passager. Les mises en scène sportives destinées aux sportifs y occupent une grande place surtout lorsque le lieu est principalement utilisé comme support pour des pratiques de glisse, le dimanche par exemple. Mais à d’autres moments, en fin d’après-midi en semaine ou le samedi, les mises en scène sportives sont semble-t-il autant destinées aux connaisseurs qu’aux passants empruntant la place.
34 Les terrains de basket du Stadium mais aussi les city stades des quartiers d’Empalot et du Mirail servent quant à eux de supports à des mises en scène spectaculaires prioritairement destinées aux autres pratiquants. La cause principale de cette situation est l’enclavement dont souffrent ces terrains confinés sous un pont et entourés de multiples grilles, pour les premiers, et installés au cœur de quartiers de grands ensembles, au pied des immeubles, pour les seconds. Dans ces conditions, les mises en scène sont à destination du groupe des joueurs et elles expriment l’habileté technique mais aussi parfois la force ou encore la détermination des pratiquants. Se mettre en scène dans l’activité consiste ici à être capable de s’envoler au-dessus des autres pour réussir un « dunk [5] » rageur ou à enchaîner une série de dribbles et à marquer un but en affichant une déconcertante facilité (Travert, 2003).
35 Enfin, les lieux principalement utilisés pour les déambulations sportives (le canal de Brienne et le canal du Midi) et la Rando Roller constituent des espaces de mises en scène particulières dans la mesure où celles-ci sont simultanément destinées aux pratiquants sportifs de la même activité et à l’ensemble des autres usagers. On retrouve ce même fonctionnement dans les espaces réservés aux déambulations ludo-sportives de la base de loisirs de La Ramée. Ces lieux accueillent une fréquentation nombreuse et très variée. ils offrent donc plus que les autres de multiples potentialités de situation de coprésence permettant des mises en scène différenciées. Les pratiques déambulatoires (marche, vélo, course à pied, roller, etc.) qui les occupent n’ont pas une dimension spectaculaire aussi affirmée que les activités qui viennent d’être étudiées ou du moins celle-ci ne passe-t-elle pas par les mêmes canaux. La gestuelle est moins mobilisée mais le rôle des tenues et du matériel n’en revêt alors que plus d’importance. Ceci induit des mises en scène moins dirigées vers les seuls spécialistes, plus ouvertes sur les autres usagers de ces lieux.
5 Des conflits d’usage et leurs gestions
36 Se montrer, échanger des regards, des gestes ou des paroles dans une ambiance conviviale semble donc correspondre à la situation décrite par la plupart des sportifs urbains. Si cette description des interactions sociales dans les lieux publics de pratique ludo-sportive s’ajuste avec les résultats de l’étude statistique, elle est nuancée par les observations réalisées et par certains entretiens. Des conflits d’usage se produisent en effet dans les lieux de pratique étudiés. Ils sont assez peu nombreux au regard de l’intensité des usages ludo-sportifs de certains lieux, mais ils existent néanmoins. Avant d’en dresser une typologie, il va être question de s’arrêter sur les modes d’appropriation sportive différenciés en fonction des pratiques et des lieux étudiés. Des liens étroits unissent en effet les constructions micro-territoriales plus ou moins exclusives qui découlent de ces appropriations et certains des conflits d’usage présentés.
5.1 Des modes d’appropriation sportive différenciés
37 À un premier niveau, l’appropriation de l’espace peut être définie comme « une prise de possession d’une étendue de terrain » (Brunet, 1992). Cette définition renvoie directement à une acception qui implique le marquage de l’espace et peut aller « du simple bornage [jusqu’aux] frontières » (Brunet, 1992). Ainsi l’appropriation est l’acte fondamental de création d’un territoire entendu comme « [l’] étendue d’un espace approprié par un individu ou une communauté » (Merlin et Choay, 2000). Ce premier sens des mots appropriation et territoire renvoie aux sciences juridiques autant qu’à l’éthologie (Tizon, 1996), l’affirmation d’une géographie sociale l’a fait évoluer et, par conséquent, a transformé aussi les manières de concevoir l’appropriation de l’espace. Elle en est venue à désigner « les conduites qui assurent aux humains un maniement affectif et symbolique de leur environnement spatial » (Merlin et Choay, 2000), ce qui a permis à G. Di Méo par exemple de définir le territoire « comme une construction produit de l’histoire que reconstitue et déforme, au fil de ses pratiques et de ses représentations, chaque acteur social » (Tizon, 1996).
38 P. Tizon note que si « pour les organisations, la lecture des territoires et des comportements territoriaux s’avère facile », il n’en est pas de même pour « la territorialité des habitants, individus et groupes restreints » (Tizon, 1996, 23). Les considérer à partir des usages ludo-sportifs des espaces publics conduit à être nuancé quant à l’entièreté de la publicité de ces lieux. Ceux-ci, en s’intégrant dans les pratiques quotidiennes des individus, notamment leurs pratiques ludosportives, sont plus ou moins utilisés, par des individus plus ou moins variés en fonction de caractéristiques aussi différentes que, par exemple, leur lieu de résidence ou les activités qu’ils réalisent dans l’espace public ou encore les catégories socio-professionnelles ou les groupes d’âge auxquels ils appartiennent.
39 Ainsi le skateparc des Ponts-Jumeaux est fréquemment utilisé par le même groupe de pratiquants du BMX. De même, l’espace réservé au roller dans la base de loisirs de La Ramée est un lieu de rassemblement pour certains pratiquants du roller. Dans ces deux cas l’appropriation des lieux est relativement étroite. Elle se marque par un certain nombre de comportements spatiaux significatifs tel que l’entretien des lieux, la définition des formes d’usage dominantes et leur spatialisation ou encore le contrôle des lieux d’observation privilégiés. Cette appropriation nette, n’est en aucun cas exclusive, puisque le partage des lieux est toujours garanti, mais dans les pratiques comme dans les discours elle apparaît assez fortement.
40 Dans des conditions de localisation particulières cette appropriation par l’usage peut apparaître plus problématique. Ce peut être le cas des city stades situés au cœur des quartiers du Mirail et d’Empalot (Escaffre, 2007). Ces terrains prévus pour être des lieux de socialisation fonctionnent en fait surtout sur la base de communautés structurées sur la proximité du lieu de résidence et sont presque uniquement utilisés par les garçons. Installés au pied des immeubles, ils ne permettent pas la confrontation aléatoire avec une altérité élargie.
41 Tous les espaces publics accueillant des pratiques ludo-sportives ne donnent pas lieu à des formes aussi nettes d’appropriation. La place de l’Europe est un lieu dans lequel les usagers sportifs, même s’ils sont forts nombreux, voient une large partie de la gestion de la place leur échapper. En effet, cette place est souvent utilisée par le service des « fêtes et manifestations » de la mairie de Toulouse qui y localise les manifestations ne pouvant être accueillies sur la place du Capitole. La variété des usages ludo-sportifs y est aussi plus grande et il ne se dégage pas une pratique dominante mais plutôt un partage co-déterminé de l’espace disponible entre les skaters (le centre de la place et les sorties du parking souterrain), les rollers (le tour de la place) et les pratiquants du BMX (la partie proche du monument aux morts, devant la pelouse). On retrouve aussi une appropriation faible dans des lieux comme La Ramée, le canal de Brienne ou le canal du Midi. Les sportifs y circulent et y partagent l’espace sans que l’on voie émerger une pratique ou un groupe de pratiquants qui domine.
42 Cette compréhension des degrés et des modes d’appropriation différenciés des espaces publics par des pratiques ludo-sportives permet de mieux mettre en perspective l’analyse des conflits pour l’usage des lieux.
5.2 Les principaux types de conflits d’usage
43 Parmi les conflits d’usage dans les lieux publics de pratique ludo-sportive, il est possible d’isoler deux catégories principales. La première regroupe des conflits habituels dont il semble possible de dire qu’ils opposent des groupes constitués selon un principe d’appariement électif à des fins de divertissement mais renvoyant aussi à des différenciations plus profondes de nature socio-économique et/ou territoriale notamment. La seconde catégorie est constituée à partir de conflits moins récurrents découlant de situations de tension occasionnelles et plus localisées.
44 Ces deux types d’affrontements dans les lieux publics sportifs ont pour point commun d’être des conflits mettant directement en confrontation des usagers pour l’utilisation de ces espaces. De telles oppositions mettent donc en jeu les corps, les regards autant que les paroles. Elles impliquent des règlements immédiats qui garantissent à chacun selon les termes d’E. Goffman la capacité de « sauver la face » (Goffman, 1973). Arrêtons-nous ici plus particulièrement sur les relations difficiles qu’entretiennent différents types de « tribus » urbaines.
45 Une ligne de fracture assez nette partage les sportifs les plus jeunes plaçant d’un côté ceux qui se retrouvent derrière la culture glisse et de l’autre ceux qui se revendiquent plutôt d’un univers très marqué par l’imaginaire du ghetto urbain américain et donc par les sports de rue tels que le basket, en partie remplacé en France par le football.
46 Ce conflit récurrent renvoie à une différenciation plus profonde des modes de vie, ceux qui se reconnaissent dans les sports de glisse ont une culture musicale et des vêtements qui leur sont propres et qui diffèrent du modèle construit autour des sports de ballon et de la musique rap. Cette opposition semble aussi découler assez largement de différences sociales et économiques qui caractérisent les jeunes gens s’identifiant à l’un ou l’autre groupe. On peut affirmer que ces conflits se jouent sur le mode de la condamnation réciproque et éventuellement sur celui de la contestation de territoire. Des « BMXers » ont ainsi quitté la place du Capitole car selon leur propos, ils y étaient volontairement dérangés par des « racailles ». Ce type d’affrontement a aussi été signalé au skateparc des Ponts-Jumeaux : « Maintenant ça va mieux, parce que c’était un peu chaud avant, mais on a fait ce qu’il fallait, il n’y a plus de racailles qui viennent... »
47 Il convient aussi d’invoquer cette opposition pour comprendre que, comme le montrent les analyses statistiques des questionnaires courts réalisés auprès des participants à la Rando Roller, c’est dans la zone éloignée du centre-ville qu’ils apprécient le moins de passer, surtout ont-ils généralement précisé, s’il s’agit de quartiers « de banlieue », de cités. Ils craignent, certains pour l’avoir selon leurs dires déjà vécu, que leur cortège y soit mal accueilli. Cette opposition entre ceux qui peuvent être rapidement définis comme « skaters » et « rappers » doit toutefois être contextualisée et élargie dans la mesure où elle participe d’un climat social général qui produit comme figure principale de l’insécurité dans les lieux publics l’image « du jeune de banlieue », « sauvageon » (Begag et Rossini, 1999) incontrôlable et agressif. Ainsi, si cette image se retrouve parfois chez certains glisseurs urbains, elle est aussi présente chez d’autres pratiquants interrogés qui la minimisent comme ce roller rencontré à La Ramée : « [Certaines personnes] ne viennent pas ici, car pour eux il y a trop de Maghrébins, trop de casquettes Nike. Ils préfèrent les lieux plus sélectifs. Moi, les casquettes Nike, je m’en fous, je fais ma vie et eux la leur, ils me posent pas de problème tant qu’ils ne m’embêtent pas. »
48 Bien que très différent, un second type de conflit récurrent peut être présenté en s’appuyant sur les recherches menées par R. Marconis (1981) sur l’histoire du canal du Midi. Comme l’a montré N. Haschar-Noé (2004) qui étudie les usages sportifs de cette voie d’eau, nous avons aussi pu mettre en évidence l’existence renouvelée de « mondes clos » séparant les gens de l’eau des gens de la terre. Les gens de l’eau, en particulier les pénichards c’est-à-dire ceux qui résident dans une péniche amarrée aux berges du canal, constituent un groupe souvent opposé au gestionnaire du canal, en l’occurrence Voie navigable de France, mais aussi assez hostile aux usagers ludo-sportifs. Ils leur reprochent en effet le non-respect de leur lieu d’habitation. Ils mettent autant en cause les empiétements sur des parties de berges qu’ils se sont appropriés qu’une attitude irrespectueuse de leur tranquillité et de leur sécurité. À l’instar de nombreux périurbains recherchant un peu de « tranquillité » en s’éloignant de la ville, ces pénichards vivent mal ce côtoiement contraint qui leur est imposé par l’importante fréquentation de la piste cyclable qui longe le canal. À travers ces usages c’est en quelque sorte la ville et ses nuisances qui les rattrapent.
49 Ces types de conflit peuvent être définis comme récurrents dans la mesure où s’ils ont été abordés à partir de lieux publics particuliers, ils renvoient à des oppositions plus larges ayant d’autres formes d’expression et observables ailleurs. Il existe aussi des conflits plus occasionnels, plus dépendants des particularités de leur lieu d’apparition et qui renvoient plus directement à la logique du simple conflit d’usage. Quoi qu’il en soit des différences entre ces deux types de conflit, ils se recoupent partiellement dans la mesure notamment où un conflit récurrent à des déclinaisons occasionnelles et localisées.
50 Les conflits qui viennent d’être esquissés rendent compte de situations fort complexes caractérisées par un enchevêtrement des usages dont découlent parfois des conflits. S’il convient, comme nous le notions précédemment, de ne pas avoir une vision enchantée des espaces publics, il est tout aussi indispensable de ne pas les considérer seulement comme des lieux de tension. Des solutions à ces conflits sont en effet trouvées par les usagers eux-mêmes témoignant ainsi du fait que ce niveau premier de la vie publique donne lieu à des prises de décision et à des formes de gestion qui pour être créatrices et originales n’en appellent pas moins l’attention voire l’implication des acteurs publics seuls garants de l’accessibilité au plus grand nombre des espaces publics.
5.3 Les différentes gestions possibles des conflits d’usage
51 Dans les lieux publics sportifs étudiés, la solution la plus fréquemment adoptée pour prévenir ou résoudre les conflits d’usage correspond à un partage implicitement négocié appliqué à l’étendue spatiale de ces lieux mais aussi à l’organisation temporelle de leur fréquentation. Ces deux formes de partage ne donnent pas lieu à une négociation explicite car elles découlent de l’ajustement in situ des usagers les uns par rapport aux autres. C’est ici encore la dimension de contact direct avec l’altérité propre aux espaces publics qui est mobilisée. Ainsi plusieurs lieux comme, les terrains de basket du Stadium ou l’espace roller de La Ramée permettent-ils clairement d’observer le partage spatial d’un lieu public par des usagers sportifs. Il s’y organise généralement soit en fonction des niveaux de pratique des sportifs soit parce que des groupes déjà formés d’individus se connaissant y pratiquent. La première possibilité s’observe, comme cela a déjà été souligné, sur les terrains de basket près du Stadium. Sur l’espace roller de La Ramée cette organisation se retrouve dans la mesure où les adeptes du slalom ne se sont approprié qu’une partie seulement du praticable, matérialisant leur emprise par des traçages au sol sur lesquels ils disposent les plots nécessaires à leur activité. Ces différentes situations montrent comment ces « équipes » (Goffman, 1973) gèrent leurs relations de coprésence dans des lieux publics en se les appropriant. Même si certaines de ces organisations spatiales perdurent, aucune ne correspond à une appropriation définitive et excluante des lieux publics étudiés. Moyen pour prévenir ou parfois pour régler les conflits d’usage, le partage de l’espace, quand il peut avoir lieu assez aisément, apparaît comme relativement efficace pour limiter les tensions dans les lieux publics sportifs. Il pose la question de la propension plus ou moins grande des espaces publics sportifs à être partagés ce qui implique notamment de s’interroger sur leurs dimensions et sur leurs formes.
52 Le second type de partage implicitement négocié renvoie à l’organisation temporelle des usages des lieux publics sportifs. À la différence des équipements sportifs traditionnels dont l’emploi du temps est géré par le service municipal des sports, les usages ludo-sportifs des espaces publics impliquent qu’une autorégulation des temporalités individuelles et collectives se mette en place. Aucun créneau horaire n’est jamais totalement garanti comme un temps d’exclusivité. Comme pour le partage spatial des lieux de pratique, le partage temporel implicite est un moyen de limiter les conflits d’usage. Il prend différentes formes suivant les lieux et les pratiques étudiés mais est étroitement lié aux temps sociaux de référence que sont le temps scolaire et le temps de travail (Paquot, 2001).
53 Quand le partage spatial ou temporel est rendu difficile par des oppositions trop importantes entre pratiquants ou lorsqu’il exacerbe ces tensions, une autre solution est appliquée par les usagers ludo-sportifs des espaces publics, elle consiste à mettre de la distance entre eux ou avec les autres usagers.
54 Si l’espace public a été analysé comme un espace de relations aléatoires élargies avec l’altérité, il peut aussi être présenté comme un lieu permettant la séparation. Ainsi, en ville les espaces publics séparent physiquement les constructions qui les bordent, mais ils éloignent aussi des usages différents et sont enfin, pour certains d’entre eux, compte tenu de la division sociale des villes, très marqués par leur environnement social. Cette logique de prise de distance est parfois mise en acte par les usagers eux-mêmes.
55 Le premier exemple concerne le choix de non-fréquentation des bases de loisirs de Toulouse fait par plusieurs de nos interlocuteurs. Un jogger préfère courir au bord du canal de Brienne malgré les nuisances sonores et olfactives car il désire se tenir à distance de certains individus qui, selon lui, fréquentent les bases de loisirs les rendant peu sûres. Pour la base de loisirs de la Ramée, c’est la proximité avec le quartier d’habitat social du Mirail qui fait craindre le côtoiement des « jeunes », qu’un des interviewés déjà cité appelle les « casquettes Nike ». Celle de Sesquières est quant à elle décriée car elle implique un risque de rencontre avec des gens du voyage qui résident en nombre sur des terrains situés non loin de là. Cet éloignement volontaire se retrouve aussi dans les propos de ce cycliste répondant à notre questionnaire sur les bords du canal du Midi, qui affirme venir faire du vélo à cet endroit car il habite un logement social dans la petite cité HLM de la Juncasse et qu’il considère que faire du sport aux Argoulets (une base de loisirs jouxtant cette cité), c’est risqué d’être trop souvent dérangé : « Nous, on vient de quartier où ça craint, ce qu’on apprécie ici c’est le calme. Aux Argoulets il y a toujours des jeunes, des gris, qui viennent t’emmerder. »
56 Dans les différents exemples qui viennent d’être cités, l’éloignement consiste à se séparer d’usagers bien ciblés dont le côtoiement est jugé problématique parfois à partir d’expériences désagréables vécues mais bien souvent en fonction de représentations sociales et spatiales véhiculées à partir de rumeurs. Toutefois, la mise à distance ne concerne pas seulement ce type de relations, elle peut avoir lieu aussi à l’intérieur même d’une des familles des pratiques ludo-sportives urbaines. Le partage des skateparcs toulousains entre les différentes pratiques qui composent les glisses urbaines en est l’exemple même. En effet au sein de cette partie des pratiques urbaines, les relations sont parfois conflictuelles et les solutions de partage spatial et temporel des lieux ne suffisent pas toujours. Ainsi, certains skateparcs « appartiennent » aux pratiquants du BMX, c’est le cas de celui des Ponts-Jumeaux mais aussi par exemple de celui de la commune périurbaine de Saint-Lys quand d’autres, ceux de Rangueil et de la commune de L’Union sont principalement utilisés par des skaters. Les propos recueillis soulignent bien que les relations inter-pratiques sont conflictuelles et combien l’éloignement réciproque évite les conflits : « Je vous dis, j’ai essayé, j’en ai essayé quelques-uns [des skateparcs de l’agglomération toulousaine]. Je suis allé à L’Union, mais le problème de L’Union c’est qu’il y a vraiment... c’est vraiment skaters et têtes de cons là-bas, il y en a vraiment beaucoup » (BMX, Ponts-Jumeaux) ; « On a bien mis les choses au clair, c’est Ponts-Jumeaux vélo et Rangueil skate, déjà on a tout... déjà il y a des séparations comme ça qui sont faites, voilà c’est surtout ça » (BMX, Ponts-Jumeaux)
57 L’éloignement est donc, dans différentes situations, un moyen de gérer les conflits c’est-à-dire de les éviter ou d’en diminuer l’intensité. Mais, de même que les partages spatiaux et temporels d’un même lieu ne suffisent pas toujours à éviter la prise de distance choisie ou subie d’avec certains usagers, la possibilité d’éloignement ne permet pas toujours d’empêcher que des conflits surviennent. Ils débouchent alors parfois sur une des issues possibles d’un conflit : l’affrontement ouvert.
58 Dans les lieux étudiés, si les micro-conflits sont relativement nombreux, ils dégénèrent rarement en affrontements ouverts. Il arrive néanmoins que de tels affrontements se produisent et que des disputes éclatent. L’existence de ces altercations est parfois rapportée par les sportifs rencontrés soit parce qu’ils en ont été les acteurs soit parce qu’ils en ont entendu parler. Néanmoins, lors des observations réalisées, aucun échange de ce type n’a été relevé. Il convient donc de faire la part des choses au sujet de ces affrontements en les considérant comme une issue certes toujours possible des conflits d’usage observés mais très rarement atteinte.
Conclusion
59 Les lieux publics urbains constituent donc des supports non neutres pour les relations sociales qui se développent autour des pratiques de loisir sportif. Leur situation, leurs formes, leurs usages et les représentations leur étant appliquées ou portant sur leurs usagers impactent la tournure qu’y prennent les interactions sociales. Si ces principes s’appliquent à l’ensemble des usages des espaces publics comme aux usages ludo-sportifs, ces derniers en proposent néanmoins une interprétation spécifique caractérisée par des attitudes souvent conviviales bien que généralement réservées.
60 Les pratiques ludo-sportives urbaines débouchent ainsi sur des formes de réappropriation et/ou d’animation des espaces publics dont nous avons essayé de montrer qu’elles induisent du frottement social. En ce sens, elles sont porteuses d’urbanité. Elles s’inscrivent cependant dans des espaces urbains où les processus de fragmentation socio-spatiale s’approfondissent et les influencent. Certains sportifs limitent leurs activités à des espaces de jeu de quartier pour des raisons de proximité mais en exprimant aussi des formes de repli. D’autres organisent leurs activités en évitant de fréquenter certaines parties de la ville et certaines populations.
61 Les logiques socio-spatiales sur lesquelles repose l’urbanité sportive permettent ainsi d’éclairer la construction des rapports que les individus entretiennent avec les espaces publics. L’analyse des interactions sociales se déroulant autour des pratiques ludo-sportives invite quant à elle à mesurer la fragilité et la perpétuelle remise en question de l’équilibre des usages des espaces publics.
Bibliographie
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Mots-clés éditeurs : usages, urbanité, sports, espaces publics, loisirs
Mise en ligne 17/08/2011
https://doi.org/10.3917/ag.680.0405Notes
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[1]
L’aire urbaine de Toulouse regroupe environ 945 000 habitants répartis dans 342 communes, elle est caractérisée par un important étalement urbain et par une forte segmentation socio-spatiale comme a pu le montrer M.-C. Jaillet dans ses travaux sur la sécession urbaine (Jaillet, 1999).
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[2]
Les enquêtes, réalisées dans le cadre de la préparation d’un doctorat de géographie urbaine soutenu en 2005 sur les usages ludo-sportifs des espaces publics dans l’agglomération toulousaine, sont basées sur des observations, sur la passation de 300 questionnaires et la réalisation de 40 entretiens dans ces lieux.
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[3]
La Rando Roller a aussi été étudiée à partir d’observations, de 100 questionnaires et d’une vingtaine d’entretiens. Une étude des city stades des quartiers d’Empalot et du Mirail a été menée à partir d’observations et d’entretiens (Escaffre, à paraître).
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[4]
Nous ne retenons ici que les résultats des 300 questionnaires réalisés dans les six lieux cités.
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[5]
Le « dunk » est une manière de marquer un panier au basket. Elle se caractérise par sa dimension volontairement spectaculaire qui se concrétise généralement par le fait que le joueur marquant ainsi reste quelques instants accroché au panier.