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Article de revue

Jeunes de rue et trafic de stups

Pages 90 à 101

Notes

  • [1]
    Mauger, 1984.
  • [2]
    Kokoreff, 2000.
  • [3]
    À ce sujet, voir par exemple Missaoui, Tarrius, 1999.
  • [4]
    Pour plus de détails, voir Sauvadet, 2006.
  • [5]
    Au sujet du lien entre milieux précaires et foyers matricentrés, voir notamment « Familles et figures paternelles » dans l’enquête de Pascale Jamoulle (2005, pp. 133-192).
  • [6]
    Aziz a cinq frères (une dizaine d’années d’écart avec les plus grands, trois ans avec le plus jeune) et six sœurs. Ses parents sont issus du monde rural maghrébin et n’ont pas été scolarisés. Sa mère se consacre à la sphère domestique et parle avec difficulté le français. Son père était ouvrier. Il reçoit aujourd’hui une pension d’invalidité. Aziz prendra la relève de ses frères à la fin des années 1990.
  • [7]
    Issu d’une famille nombreuse de nationalité française, René, smicard et ouvrier du bâtiment, a été séduit par le train de vie de son frère, un trafiquant d’héroïne. Il a suivi son exemple.
  • [8]
    La « vie de rue » correspond ici à l’ensemble des interactions entre « jeunes de rue » de la cité étudiée.
  • [9]
    Au début de l’actuelle décennie, nous remarquons cependant l’émergence d’un petit trafic de cocaïne effectué par une poignée d’usagers-revendeurs.
  • [10]
    Le profil de la famille de Grand Farouk correspond à celui de la famille d’Aziz : famille nombreuse, immigrée, père (ex-)ouvrier, mère au foyer.
  • [11]
    Par ailleurs, pour certains héroïnomanes des années 1980, le besoin de « se shooter » primait sur n’importe quelle autre considération (solidarité familiale ou amicale, respect de la loi du silence propre au « bizness », etc.).
  • [12]
    Pierrat, 2003, pp. 379-384.
  • [13]
    Sur les mafias italiennes, voir notamment Arlacchi, 1986.
  • [14]
    En ce qui concerne le blanchiment d’argent effectué par l’intermédiaire des réseaux familiaux, voir Guenfoud, 2003.
  • [15]
    Sur la conflictualité des relations entre jeunes de rue, voir Sauvadet, 2006.
  • [16]
    Cette analyse s’inspire de la recherche de Norbert Elias et John L. Scotson de 1965 (Elias, Scotson, 1997).
  • [17]
    Mon approche se voulait la plus informelle possible afin de ne pas inquiéter Aziz. Je n’ai utilisé aucun moyen d’enregistrement. La retranscription s’est effectuée de mémoire juste après l’entretien.
  • [18]
    À l’instar de beaucoup d’autres jeunes de rue, Aziz respecte certaines coutumes musulmanes, mais tient à distance l’islam rigoriste, voire extrémiste.

1D’attributs contre-culturels propres à la jeunesse hippie des nouvelles classes moyennes, la vente et la consommation de stupéfiants deviennent dans les années 1980 un fléau social en se prolétarisant et en se conjuguant à la crise de l’emploi [1]. Elles concernent dorénavant aussi les classes populaires, en particulier la jeunesse désœuvrée, des villes-centres puis des banlieues pauvres.

2Michel Kokoreff [2] constate que deux types de terrain ont été particulièrement observés en région parisienne. D’un côté, les « scènes », c’est-à-dire des places de vente et de consommation de stupéfiants localisées dans la capitale, et qui se sont développées à partir de la fin des années 1970. De l’autre, les cités de banlieue, vers lesquelles se sont déplacés les trafics de cannabis et d’héroïne à partir de la fin des années 1980, du fait de la répression policière croissante exercée sur les « scènes » et, comme nous le verrons sur notre terrain d’enquête, suite au développement de la vente et de la consommation de stupéfiants dans les cités.

3Le trafic de stupéfiants comprend de multiples niveaux et intermédiaires, divers réseaux qui vont du microlocal au régional, du régional à l’international, et peuvent impliquer des personnes issues de milieux sociaux très différents [3]. Au bas de l’échelle, ces réseaux sont en général faiblement stabilisés, coordonnés et supervisés. C’est pourtant à ce niveau que nous entendons montrer une certaine structuration du trafic, du moins sur le terrain étudié.

Présentation du terrain d’enquête et des enquêtés

4Cet article s’appuie sur une recherche socio-ethnographique réalisée principalement entre 2000 et 2003 au sein d’une cité de 3 000 habitants située dans une banlieue populaire du sud de Paris [4]. Nous l’appellerons « Paris Sud » pour assurer l’anonymat de mes informateurs et des personnes que leurs propos impliquent. Leurs noms ont dû être modifiés.

5Les informations recueillies reposent sur les liens de confiance que j’ai réussi à nouer avant même d’entreprendre ma recherche, en habitant sur place et grâce à un réseau de pairs qui m’avait mis en relation, il y a une quinzaine d’années, avec la plupart des enfants, adolescents et jeunes adultes qui traînaient en bandes dans les rues de ce quartier, soit une centaine de personnes de sexe masculin au total. Leur connaissance du terrain me permet aujourd’hui de retracer une partie de l’histoire des trafics effectués dans cet espace par les différents groupes de « jeunes de rue » qui s’y sont succédé depuis les années 1980.

6Ces jeunes que nous qualifions de « jeunes de rue » tendent à s’approprier l’espace public, du moins à certains moments et à certains endroits de la cité, alors que les autres résidents du même âge évitent cet espace, en particulier les filles. « La rue, c’est chez moi (ou chez nous) », disent les premiers, alors que pour les seconds, la rue représente un lieu inintéressant et/ou dangereux (vol, insulte, agression), symbole de marginalité sociale (déscolarisation, chômage, délinquance, drogue), ou bien simplement un espace interdit par le contrôle parental, voire plus largement par le contrôle familial (grands frères, cousins, etc.).

7La plupart des jeunes de rue ont été avant cela des « enfants de rue ». Dès 6-7 ans, ils envisagent et utilisent cet espace comme un lieu de vie, où ils jouent, mangent, discutent, se reposent et s’ennuient. Ces enfants sont issus des familles les plus pauvres du quartier : mère divorcée avec plusieurs enfants à charge, famille nombreuse (jusqu’à une douzaine d’enfants) avec une mère au foyer et un père ouvrier parfois contraint à l’inactivité suite à une maladie ou à un accident du travail, parents analphabètes, mère allocataire du RMI et père incarcéré, etc. Beaucoup d’entre eux ont un père violent, ce qui explique leur fuite dans la rue dès que l’occasion se présente. Le manque d’affection et de distraction au sein du foyer, la surpopulation au domicile familial incitent à choisir et à valoriser la rue.

8Loin du contrôle parental, les « garçons de rues » s’associent ou s’opposent, forment des groupes de copains (de deux à une demi-douzaine d’individus), puis des bandes (d’une demi-douzaine à une vingtaine d’individus) au recrutement plus large et moins électif. Ils découvrent ensuite l’autorité des jeunes adultes qui squattent au bas des tours. Ces derniers les éprouvent, les conseillent et les utilisent pour de petites corvées (acheter des canettes de soda à l’épicerie du coin, etc.), leur attribuent des surnoms et récompensent leur bravoure (par des bonbons, des balades en scooter, des gestes affectueux). Le modèle fourni par ceux qu’ils appellent les « grands du quartier » concurrence l’autorité parentale, soit en surclassant temporairement la figure du père, soit en représentant momentanément la figure paternelle qui manque aux foyers matricentrés [5].

9La massification scolaire ne concerne pas directement les jeunes de rue, seuls quelques-uns atteignent le niveau du baccalauréat. Après une scolarité courte et agitée, l’intérim, les stages de formation sous-payés et le travail non déclaré offrent quelques opportunités sans lendemain grâce auxquelles les jeunes découvrent les mécanismes d’exploitation propres au marché légal de l’emploi (indifférence envers les stagiaires, heures supplémentaires impayées, entorses au droit du travail, accidents, etc.). Le « bizness » (comme l’écrivent les enquêtés) donne à certains l’espoir d’échapper au désœuvrement ou au salariat précaire pour enfin entreprendre et surtout consommer. Quelques-uns parmi eux parviennent à développer des projets délinquants à moyen, voire à long terme. Pour les autres, l’insouciance juvénile se conjugue à la précarité socio-économique et produit « une vie au jour le jour », sans réel espoir en l’avenir et à l’affût du plaisir immédiat. Pour toutes ces raisons, l’autonomie financière tarde. Le passage de la famille parentale à la famille conjugale se fait attendre (jusqu’à 30-35 ans pour certains).

Histoire du trafic de stupéfiants

10Polo connaît les rouages du trafic local de stups, il les a vus évoluer, en tant que consommateur, petit revendeur et fils unique du premier grossiste du quartier. Lorsqu’il a bu et qu’il est entouré par des amis ou des personnes de confiance, il lui arrive de raconter l’histoire des « zness du tierquar » (des business du quartier). La reconstitution suivante lui doit beaucoup.

11Le trafic d’héroïne, et dans une moindre mesure de cannabis, s’est développé au début des années 1980. À cette époque, les quatre grands frères d’Aziz [6], âgés d’une petite vingtaine d’années, « se piquent » à l’héroïne. Ils achètent leur drogue sur Paris puis « se shootent » dans les rues (et les caves) de leur quartier. Trouver l’argent nécessaire à « la défonce » quotidienne n’est pas une mince affaire. Ils volent des autoradios. Progressivement, ils abandonnent cette activité et optent pour le deal : en achetant quelques doses et en les revendant dans leur cité, ils s’assurent une consommation personnelle en prenant moins de risques.

12Ils sont mobiles et savent se faire respecter par les voyous qu’ils rencontrent, voire sont mobiles parce qu’ils savent se faire respecter. Dans leur quartier, ils intimident facilement les jeunes qu’ils fréquentent et en conséquence, ces derniers n’ont pas les moyens de les voler, de les escroquer, de les racketter ou de les remplacer. Du fait de leur capacité à trouver des fournisseurs et de la crainte qu’ils inspirent à une clientèle locale plus ou moins captive, ils s’imposent comme les principaux dealeurs des environs et se familiarisent avec un registre nouveau de réflexion et d’action : celui du « bizness » et des « biznesseurs ».

13Pour développer et sécuriser leur trafic, ils recherchent un fournisseur plus accessible, plus efficace et plus discret que les dealeurs de rue des « scènes » parisiennes. Ils veulent un grossiste, capable de proposer un rapport quantité/qualité/prix compétitif, et le trouveront au café de la cité en la personne de René [7], le père de Polo.

14À la fin des années 1980, l’organisation commerciale des frères d’Aziz prospère. Les clients extérieurs au quartier sont fidélisés et de plus en plus nombreux, mais certains incidents provoqués par des clients « captifs » de la « vie de rue [8] » plombent la rentabilité du « bizness ». Désespérés, certains héroïnomanes surendettés volent la fratrie d’Aziz, en découvrant et en cambriolant l’endroit où elle cache ses marchandises, ou l’escroquent, en ne payant par leurs dettes. Pour échapper aux représailles, ils s’enfuient à l’autre bout de la France. Errance, toxicomanie, incarcération, maladie grave, etc., auraient conduit certains vers la clochardisation, selon les informations délivrées, dix ans après les faits, par leurs petits frères.

15La fratrie d’Aziz accuse le coup : plusieurs centaines de milliers de francs se seraient volatilisées de cette façon.

16Les quatre frères diversifient leurs pratiques délinquantes en organisant un trafic de voitures volées, sous la houlette de René, peut-être pour rembourser ce dernier. Des tensions apparaissent entre le créancier et ses débiteurs. Une nuit, des coups de feu résonnent ; personne n’est tué. Peu de temps après, les frères d’Aziz seraient tombés dans un guet-apens, auraient été assommés puis abandonnés au milieu d’une forêt des alentours, selon les rumeurs relayées par les jeunes de rue les mieux informés. René reste le « boss », les frères font profil bas.

171990 : la police chamboule l’ordre (r)établi. Un matin, tôt, elle enfonce la porte du domicile de René. Verdict : quatre ans de prison. Depuis, la mère de Polo mélange alcool et antidépresseurs. De son côté, Polo, âgé d’une quinzaine d’années, traîne davantage dans les rues de son quartier, où il croise régulièrement les frères d’Aziz. La cohabitation se passe aussi bien que possible. On ne remarque pas d’agressivité, ni d’un côté, ni de l’autre.

181992 : l’un des frères meurt d’overdose. Les trois autres se désintoxiquent, se spécialisent dans la vente de cannabis et achètent un pavillon et deux petits commerces de proximité. Leur ascension atteint néanmoins ses limites, pour plusieurs raisons :

  • La pression policière se durcit et deux frères écopent de quelques années de prison, le troisième se fait discret.
  • Beaucoup de leurs amis et de leurs associés de la vie de rue ne sont plus là pour les aider : ils « se sont rangés » en devenant pères, sont décédés ou incarcérés, ou bien sont devenus des ennemis et se sont enfuis.
  • Aziz et son petit frère ne souhaitent pas succéder à leurs aînés, et dealer pour leur compte dans les rues de la cité ; la relève familiale n’est pas assurée.
Face à toutes ces difficultés, l’emprise des frères d’Aziz sur le trafic local décline.

19Une nouvelle génération de consommateurs et de dealeurs de stupéfiants arrive à « maturité » et prend progressivement les rênes de la vie de rue. Consciente des dégâts engendrés par l’héroïne, elle se limite à la consommation d’alcool et de cannabis [9]. Aucun dealeur local ne peut satisfaire la totalité de la nouvelle demande de cannabis et les jeunes les plus téméraires s’aventurent dans les cités des environs pour s’approvisionner, puis consomment et revendent dans les rues de leur quartier.

20À la fin des années 1990, Aziz médite sur le parcours de ses grands frères et s’intéresse de plus en plus au trafic de « shit ». Pour des raisons strictement financières, il décide d’entrer dans le « bizness » et s’impose comme le dealeur le plus compétent des alentours. Ses frères lui assurent une protection physique et un approvisionnement fiable et compétitif, capable de répondre à l’ensemble de la demande locale. Parallèlement Aziz s’est associé avec Grand Farouk [10], un jeune craint et respecté qu’il connaît depuis une quinzaine d’années. Il a réussi à le convaincre de se lancer dans le deal.

21Avec l’arrivée d’Aziz et de Grand Farouk sur le marché, le trafic local de cannabis prend une autre dimension et de nombreux clients extérieurs à la cité font leur retour.

22En 1999, Grand Farouk aurait trafiqué la comptabilité commune et aurait ainsi empoché 15000 francs. Aziz ne lui accorde plus sa confiance. Deux clans rivaux, composés d’une petite dizaine de jeunes adultes, se forment et obligent les petits dealeurs de rue à choisir leur camp. Au bout de quelques mois, les tensions s’atténuent et le « bizness » reprend malgré les contentieux (nous n’en saurons pas plus).

Analyse de la structuration du trafic de stupéfiants

23Depuis une vingtaine d’années, la fratrie d’Aziz représente l’acteur majeur de l’organisation délinquante à laquelle participent à différents degrés la plupart de mes enquêtés en âge de le faire. En vingt ans, beaucoup de choses ont changé pour elle et pour les jeunes de rue qui l’entourent.

24Dans un premier temps, l’approvisionnement en stupéfiants est lointain et incertain. Le rapport quantité/qualité/prix des drogues revendues par les grands frères d’Aziz n’intéresse qu’une clientèle locale plus ou moins « captive ». Attirés par la compétitivité croissante du « bizness » local, des clients extérieurs au quartier font ensuite leur apparition. Cette évolution passe par René : un contact de proximité capable de fournir ce qu’il faut au prix qui convient. Pour gagner la confiance de René et de ses successeurs, plusieurs évolutions ont été nécessaires, dont l’acquisition de compétences indispensables au « bizness ».

La maîtrise de soi comme prédisposition à la maîtrise des autres

25Les grands frères d’Aziz ont jugulé leur addiction à l’héroïne pour se présenter devant René comme des partenaires crédibles. Le développement de leurs affaires en dépendait. La mort par overdose de l’un d’eux a servi de déclic, sortant les trois autres de l’amateurisme propre aux usagers-revendeurs. Sous l’emprise de la drogue, ces derniers réduisent ou abandonnent leurs pratiques sportives, jusqu’à ne plus pouvoir relever les défis physiques du « bizness » (courses-poursuites, bagarres, etc.). De plus, les drogues consommées handicapent la vivacité et/ou la justesse de leurs jugements (paranoïa, excès de confiance, paresse, négligence, etc.) et de leurs actions (vertige, essoufflement, tremblement, etc. [11]). Enfin, le coût financier de la consommation de drogues pèse sur les capacités d’investissement. Aziz a rapidement pris conscience de ce qui sépare les amateurs des professionnels. À l’instar de son (ex-)associé Grand Farouk, il ne consomme pas le produit, il ne fait que le vendre et se concentre sur cet objectif.

26Durant les années 1980 (pour l’héroïne et le cannabis) et durant la plus grande partie des années 1990 (pour le cannabis), les jeunes qui souhaitaient acheter des stupéfiants dans les rues de leur cité allaient obligatoirement à la rencontre d’un usager-revendeur. Ce n’est plus le cas actuellement. S’ils s’adressent à Aziz ou à Grand Farouk, voire à l’un des adolescents qui les prennent pour modèles, ils se trouvent en face d’un individu qui se présente comme un homme d’affaires et qui n’a aucune expérience personnelle des problèmes qui découlent de l’addiction à la drogue. Cette évolution a favorisé la structuration du trafic local : pour certains dealeurs, le rapport aux stupéfiants apparaît comme purement commercial. Le deal devient un métier avec des perspectives de carrière et au moins deux règles à suivre : cultiver sa forme physique et garder l’esprit clair. La maîtrise de soi prédispose à la maîtrise des autres, ce qui s’avère indispensable dans le monde de l’illégalité.

L’accumulation économique

27L’accumulation économique représente la deuxième évolution nécessaire. Le « bizness » obéit aux mêmes grandes règles que celles du business. Plus la quantité achetée augmente, plus le prix au gramme baisse. Lorsqu’Aziz prend la place de ses frères, il bénéficie immédiatement d’un rapport quantité/qualité/prix concurrentiel grâce au « prix de gros » obtenu par ses grands frères. La facilité avec laquelle il a redonné de la valeur au trafic local provient du capital économique accumulé par ses aînés. Ils ont investi ce qu’il fallait, ils disposaient des moyens nécessaires.

28De plus, la solidité de ce capital permet à Aziz de vendre à crédit, d’avancer par exemple 7000 euros de marchandises et d’attendre plusieurs semaines pour être remboursé. Les dealeurs de rue des années 2000, s’ils gagnent la confiance d’Aziz, bénéficient de possibilités d’emprunt relativement importantes en comparaison de leurs homologues des années 1980-1990, des possibilités que le système économique légal n’est souvent pas en mesure de leur accorder à des conditions aussi avantageuses.

Le capital relationnel du banditisme

29Cette nouvelle configuration a consolidé le capital relationnel délinquant d’Aziz et de ses grands frères, en fortifiant la confiance et l’intérêt de René et de ses successeurs. Grâce à cette accumulation, un jeune de rue d’aujourd’hui souhaitant devenir un dealeur professionnel ne cherche pas ceux qui lui permettront d’obtenir (parfois à crédit) une importante quantité de stupéfiants à un rapport qualité/prix compétitif. Il les croise tous les jours dans les rues de son quartier et les connaît parfois depuis son enfance. La vie de rue de Paris Sud offre à présent un accès direct aux prix de gros concurrentiels du milieu du banditisme. Le « milieu », aux multiples activités (braquage, trafic d’armes et de stupéfiants, machines à sous, prostitution, etc.), se compose de nos jours de trois grands types de réseaux criminels : les réseaux corses, ceux des gens du voyage et, en bas de l’échelle, ceux des anciens « jeunes de cité » qui ont réussi leur carrière délinquante [12]. Ces réseaux, composés d’hommes âgés de 30 à 60 ans, ne constituent pas une mafia française. Ils cohabitent, s’associent et se dissocient régulièrement. Ils sont généralement ancrés à l’échelle départementale ou régionale mais se déplacent parfois sur l’ensemble du territoire français, exceptionnellement à l’étranger. Par ailleurs les régions françaises les plus prospères (Île-de-France, Provence-Alpes-Côte d’Azur, etc.) sont le terrain d’activité de véritables mafias (chinoise, russe, etc.) dont les dirigeants se trouvent à l’étranger (Chine, Russie, etc.). Ces mafias correspondent à des organisations criminelles multinationales, multigénérationnelles (jusqu’au troisième âge), historiques (jusqu’à plusieurs siècles d’existence) et hautement corruptrices (policiers, juges, banquiers, journalistes, hommes politiques d’envergure locale ou nationale, entrepreneurs et actionnaires figurent sur leur tableau de chasse [13]). Le fonctionnement mafieux se singularise par sa cruauté : en cas de trahison, toute la famille du mafioso renégat en subit les conséquences. Dans le milieu du banditisme français, cela ne semble pas systématique. Dans le milieu des jeunes de rue, la famille n’est que très rarement menacée de mort (elle semble ne l’avoir jamais été sur mon terrain d’enquête). Elle n’est pas tenue responsable et ne subit pas de représailles. Ainsi Polo et les petits frères des héroïnomanes surendettés qui ont volé la fratrie d’Aziz n’ont pas été agressés, ni même exclus. Utiliser le terme de mafia pour qualifier les réseaux de trafic des jeunes de rue de Paris Sud, ou même ceux du banditisme français, serait bien sûr totalement abusif.

Diverses compétences techniques

30De nombreuses compétences techniques ont été acquises par les grands frères d’Aziz, la plus importante d’entre elles étant sans doute la capacité à « blanchir l’argent sale », comme en témoigne en 1992 l’achat de commerces et d’un pavillon.

31L’argent sale n’a aucune existence légale, ce qui complique les achats visibles et importants. Difficile à dépenser, il est aussi périlleux de le thésauriser. Les perquisitions de la police se conjuguent à la convoitise des braqueurs et des racketteurs de tous bords et ruinent les espoirs de réussite. Enrichissement rime avec blanchiment. Aziz bénéficie des compétences accumulées par ses grands frères dans ce domaine [14].

32Il bénéficie également d’autres savoir-faire : comment déjouer la surveillance policière (les « écoutes », les « planques », les « filatures », les « indics », etc.), comment organiser les lieux de deal (règles imposées aux clients pour les contraindre à une certaine discrétion, choix d’un lieu stratégique d’observation pour guetter l’arrivée d’une patrouille de police, etc.), comment échapper aux racketteurs du « milieu », comment repérer les clients et les associés dignes de confiance, comment « couper », découper, camoufler, conserver, transporter et entreposer le cannabis, etc.

La transmission des compétences délinquantes et ses limites

33En s’associant avec Aziz, Grand Farouk est passé du vol au deal, puis s’est professionnalisé dans ce domaine d’activité, jusqu’à devenir autonome après 1999. La plupart de ses amis sont devenus des associés, des clients fidèles qui dé - pendent de son approvisionnement comme lui dépend de leur chiffre d’affaires. Lorsqu’il doit réinvestir, il récupère l’argent de ses partenaires, achète en gros et répartit la marchandise. Si un associé est en retard, s’il n’a pas encore écoulé son stock, alors c’est toute l’équipe qui se trouve pénalisée. Elle doit attendre ou investir sans lui et donc obtenir un prix de gros moins intéressant. La réussite économique des uns détermine celle des autres. De ce fait, nous constatons une solidarité qui renvoie parfois moins à l’amitié qu’à l’interdépendance économique, moins à l’affect qu’au calcul. Cette solidarité oblige Grand Farouk à transmettre à ses associés une partie des savoir-faire qu’Aziz lui a transmis, après les avoir lui-même hérités de ses grands frères.

34Les associés concernés sont en contact direct avec les petits revendeurs, en général également usagers. Là aussi nous constatons de l’interdépendance. Le fournisseur a intérêt à ce que son client demeure fidèle et à ce qu’il ne lui arrive rien de fâcheux. Ainsi Brice, associé de Grand Farouk, interpelle un adolescent et lui fait la leçon : « Pourquoi tu vends dans ce hall ? C’est trop con ça mec ! Tous les gars avec nous le savent non ? Si les keufs arrivent, ils arrivent forcément par là et toi, de ton hall, tu les vois pas arriver mec ! »

35Il existe toute une chaîne d’interdépendances favorables à la transmission des compétences délinquantes relatives au deal. Cette transmission s’opère par la discussion et les explications d’un jeune qui sait faire, et/ou par l’observation et le mimétisme. Elle relève de différents niveaux d’intentionnalité : le jeune qualifié peut effectuer la transmission de son plein gré (par exemple en expliquant quelque chose à quelqu’un) ou à son insu (en étant observé), ou même agir sous la contrainte (chantage, menace, intimidation).

36Retraçons maintenant l’évolution de cette transmission de compétences délinquantes au sein des réseaux de trafic de la vie de rue :

  • à l’origine, nous trouvons une transmission à caractère multigénérationnel et familial : elle s’opère dans la fratrie d’Aziz ;
  • dans un deuxième temps, la transmission s’effectue par l’intermédiaire des réseaux de pairs, les copains et associés d’Aziz, dont Grand Farouk faisait partie au départ ;
  • nous découvrons, dans un troisième temps, une transmission intergénérationnelle à plus grande échelle, qui ne concerne pas uniquement la fratrie d’Aziz mais aussi l’ensemble des relations entre d’un côté Aziz, Grand Farouk et leurs associés, et de l’autre les « adolescents de rue » engagés dans le deal.
Plus nous nous éloignons de la fratrie d’Aziz, plus il existe de la déperdition, l’héritage s’appauvrit. D’abord, les capitaux économiques transmis dans le cadre de la fratrie concernée demeurent en son sein, même si tous les dealeurs de rue en profitent indirectement (prix de gros compétitifs, marchandises vendues à crédit). Ensuite, à chaque étape de transmission, nous pouvons constater de la rétention d’informations ou de la désinformation (sans compter les omissions), car les associés et clients s’avèrent parfois être des amateurs ou des (futurs) concurrents. Dans les deux cas, il serait imprudent de les informer dans le détail des rouages du trafic local. Ils devront apprendre certaines choses par eux-mêmes, ou savoir observer de manière discrète et furtive. L’amateurisme de nombreux dealeurs de rue et le caractère conflictuel et concurrentiel du « bizness » local et de la vie de rue en général (rapports de force, contentieux, etc., dont témoigne l’évolution de la relation entre Aziz et Grand Farouk) représentent deux grandes limites de la transmission des compétences délinquantes au sein des réseaux de trafic de la vie de rue [15]. Trois autres limites doivent être prises en compte :
  • Les ruptures provoquées par la répression policière : répression qui, au début des années 1990, a réduit l’emprise de la fratrie d’Aziz sur la vie de rue du quartier. La prison étant un haut lieu de professionnalisation délinquante, cette répression ne peut être efficace qu’à court ou moyen terme, sauf en cas de très longues peines d’incarcération.
  • Le fonctionnement du milieu du banditisme : les plus grands délinquants de la vie de rue évoluent sous le menace du « milieu » (rackets, vols à main armée, assassinats, dénonciations à la police). Celui-ci peut à tout moment décapiter l’organisation délinquante propre à la vie de rue (financièrement et même physiquement), comme cela aurait été le cas si les associés de René ne s’étaient pas contentés d’assommer les grands frères d’Aziz.
  • Enfin, nous constatons un processus de différenciation entre established et outsiders qui rompt la chaîne de transmission [16]. Ce processus est lié au renouvellement de la population qui réside dans le quartier. Celui-ci affecte la composition de la vie de rue : des jeunes de rue quittent définitivement la cité pendant que d’autres y font leur apparition, ce mouvement étant plus ou moins important en fonction des évolutions du turn-over résidentiel et en fonction des caractéristiques des nouveaux habitants (plus ils sont pauvres, plus il y a de chances que leurs enfants cherchent leur place au sein de la vie de rue et au sein de ses réseaux de trafic). Les nouveaux « entrants », en particulier ceux engagés dans une carrière délinquante, s’opposent parfois aux jeunes de rue qui habitent le quartier depuis plus longtemps et aux dealeurs qui contrôlent le marché des stupéfiants, limitant de cette façon la transmission des compétences délinquantes entre dealeurs de rue et la rentabilité du « bizness » local.
La « bande à Embre » (comme ils l’appellent) en est une bonne illustration : elle se compose d’une douzaine de nouveaux « entrants », des adolescents turbulents. En plus de son homogénéité socio-économique (familles pauvres et nombreuses), voire ethnico-religieuse (parents musulmans originaires d’Afrique subsaharienne), cette bande s’est formée sur la base d’une opposition aux « établis » de la cité. Entre 2000 et 2003, seul un jeune de rue sur cinq habite dans la cité depuis moins de dix ans, les autres se proclament « natifs des lieux » et s’attribuent des privilèges grâce à la force du nombre. Celle-ci découle de leur connaissance du terrain et des liens de proximité qu’ils ont eu le temps de nouer, notamment avec les plus âgés, et en particulier avec Aziz, Grand Farouk et leurs associés. Ces derniers ont vite pris la mesure des « gars » de la « bande à Embre » : leur combativité et leur débrouillardise conjuguées à leur dénuement matériel et à leurs difficultés familiales et scolaires les font apparaître aux yeux de tous comme les dealeurs de demain les plus craints. Seraient-ils des partenaires ou des rivaux de plus en plus entreprenants ?

37Face à l’autoritarisme des « établis », la « bande à Embre » n’a pas tardé à se rebiffer. En 2002, l’un de ses leaders a vandalisé la voiture du bras droit de Grand Farouk (peinture de carrosserie rayée, pneus crevés). Depuis, répression d’un côté (agression physique, insulte, injonction, exclusion, etc.) et provocation de l’autre (geste méprisant, moquerie, fausse indifférence, etc.) : les conflits n’en finissent pas et l’on voit mal comment il pourrait en être autrement dans un avenir proche.

Les conditions de la transmission, le cas d’Aziz

38En 1999, alors que je commençais mes recherches, Aziz m’a présenté quelques éléments de son parcours, lors d’une courte discussion en tête-à-tête dans un lieu public [17] : « Mon petit frère et moi, on est les derniers garçons de la famille et on a vu les choses différemment. Déjà pour nos parents, et puis aussi pour nous. On était plus discrets. On réussissait mieux à l’école, on faisait plus d’efforts pour ça. Je voulais être différent de mes grands frères. Mais au bout d’un moment, ça marchait de moins en moins. J’étais respecté dans le quartier grâce à mes frères et grillé à l’extérieur à cause de mes frères. Vers 13-14 ans, j’ai stressé, je ne supportais plus qu’un prof fasse une réflexion sur ma famille. Dès que le prof, au début de l’année, il tombait sur mon nom de famille, il pensait à mes frères et j’étais catalogué d’office, genre comment se débarrasser de la vermine. On touche pas à la famille, et c’est parti en clash entre l’école et moi. J’ai essayé de me ressaisir et d’esquiver les potes de la cité, parce que tu vois, être solidaire avec eux, ça mettait encore plus le bordel dans ma vie. Mais le problème, c’est qu’en dehors, y avait pas un gars comme il faut qui voulait traîner avec moi, et moi aussi, même si à l’époque je faisais des efforts, je voyais bien que ça collerait jamais entre nous, sont trop racistes et fils ap [fils à papa], ils n’aiment pas les jeunes des cités, les arabes, tout ça, sont trop coincés. Après mon CAP, j’ai lâché les cours et j’ai cherché du boulot. J’ai décroché quelques jobs, entre-temps je pointais à l’ANPE et j’ai vu que ça collerait pas non plus. Je voulais être quelqu’un, pas un smicard. J’ai compris la cité, j’ai adhéré au projet. »

39Avant-dernier de sa fratrie, Aziz cherchait à se différencier de ses grands frères. En stigmatisant ses « origines » (familiales, et/ou « ethniques », et/ou de « classe »), les insinuations de certains professeurs et les stratégies d’évitement des élèves « comme il faut » l’ont fait douter de sa capacité à se différencier. La précarité du marché légal de l’emploi et la reconnaissance dont il bénéficiait dans la vie de rue ont fini par le convaincre d’accepter l’héritage de ses frères. La carrière délinquante lui est apparue comme le meilleur moyen d’occuper une position enviée dans une société libérale et hédoniste. L’illégalité a été associée au sens de l’entreprise et aux plaisirs de notre société de spectacle et de consommation.

40Tenue vestimentaire à la mode, voiture de sport, vacances à l’étranger, conquêtes féminines, sorties au restaurant et en discothèque, etc., c’est ce qui fait à ses yeux la « belle vie », tout ce qu’un jeune homme sain de corps et d’esprit devrait selon lui désirer. « Le reste, c’est du baratin », dit-il. Profiter de sa jeunesse signifie consommer, ne serait-ce qu’en effectuant de façon compulsive des petits achats (cafés, sodas, chewing-gums, chips, jeux d’argent et de hasard, etc.) et en s’autorisant le luxe d’un rapport destructeur aux objets (accélérer en freinant jusqu’à brûler la gomme des pneus d’une moto, arracher un panier de basket-ball en smashant de façon spectaculaire, etc.).

41Pour Aziz, être différent ne doit surtout pas être synonyme de pauvreté matérielle. Celle-ci correspond à un stigmate qu’aucune idéologie politique ou religieuse [18] ne permet plus de supporter et encore moins de renverser. Les signes extérieurs de richesse représentent le plus sûr étalon commun en ce qui concerne la mesure de la réussite sociale, la seule valeur collective absolument certaine, en France ou ailleurs : « C’est le système que tu le veuilles ou non, l’argent, c’est universel, c’est la logique des choses en France, au bled ou aux States. Et presque tout le monde le sait », expliquait-il en 2002 à un auditoire de hall d’immeuble qui a immédiatement approuvé son argumentation. Une « logique des choses » qui sous-tend le « bizness », un brouillon illicite, peut-être, du business.

Bibliographie

  • Arlacchi P., Mafia & Cies : l’éthique mafiosa et l’esprit du capitalisme, Presses universitaires de Grenoble, coll. « Influences », Grenoble, 1986.
  • Elias N., Scotson J. L., Logiques de l’exclusion, Fayard, coll. « Agora », Paris, 1997.
  • Guenfoud K., Le « business » : organisation et vie familiale – recherche sur l’installation dans l’illégalité, thèse de sociologie, université Paris-VII, Paris, 2003.
  • Jamoulle P., Des hommes sur le fil : la construction de l’identité masculine en milieux précaires, La Découverte, coll. « Alternatives sociales », Paris, 2005.
  • Kokoreff M., « Faire du business dans les quartiers : éléments sur les transformations sociohistoriques de l’économie des stupéfiants en milieux populaires – le cas du département des Hauts-de-Seine », Déviance et société, n° 4, décembre 2000, pp. 403-423.
  • Mauger G., « L’apparition et la diffusion des drogues en France (1970-1980) : éléments pour une analyse sociologique », Contradictions, nos 40-41, décembre 1984, pp. 131-148.
  • Missaoui L., Tarrius A., Naissance d’une mafia catalane ? Les jeunes de « bonnes familles » locales dans les trafics de drogues de Barcelone à Perpignan, Montpelier et Toulouse, Trabucaire, coll. « Recherches en cours », Perpignan, 1999.
  • Pierrat J., Une histoire du milieu : grand banditisme et haute pègre en France de 1850 à nos jours, Denoël, coll. « Documents actualité », Paris, 2003.
  • Sauvadet T., Le capital guerrier : concurrence et solidarité entre jeunes de cité, Armand Colin, coll. « Sociétales », Paris, 2006.

Date de mise en ligne : 02/11/2012

https://doi.org/10.3917/agora.048.0090

Notes

  • [1]
    Mauger, 1984.
  • [2]
    Kokoreff, 2000.
  • [3]
    À ce sujet, voir par exemple Missaoui, Tarrius, 1999.
  • [4]
    Pour plus de détails, voir Sauvadet, 2006.
  • [5]
    Au sujet du lien entre milieux précaires et foyers matricentrés, voir notamment « Familles et figures paternelles » dans l’enquête de Pascale Jamoulle (2005, pp. 133-192).
  • [6]
    Aziz a cinq frères (une dizaine d’années d’écart avec les plus grands, trois ans avec le plus jeune) et six sœurs. Ses parents sont issus du monde rural maghrébin et n’ont pas été scolarisés. Sa mère se consacre à la sphère domestique et parle avec difficulté le français. Son père était ouvrier. Il reçoit aujourd’hui une pension d’invalidité. Aziz prendra la relève de ses frères à la fin des années 1990.
  • [7]
    Issu d’une famille nombreuse de nationalité française, René, smicard et ouvrier du bâtiment, a été séduit par le train de vie de son frère, un trafiquant d’héroïne. Il a suivi son exemple.
  • [8]
    La « vie de rue » correspond ici à l’ensemble des interactions entre « jeunes de rue » de la cité étudiée.
  • [9]
    Au début de l’actuelle décennie, nous remarquons cependant l’émergence d’un petit trafic de cocaïne effectué par une poignée d’usagers-revendeurs.
  • [10]
    Le profil de la famille de Grand Farouk correspond à celui de la famille d’Aziz : famille nombreuse, immigrée, père (ex-)ouvrier, mère au foyer.
  • [11]
    Par ailleurs, pour certains héroïnomanes des années 1980, le besoin de « se shooter » primait sur n’importe quelle autre considération (solidarité familiale ou amicale, respect de la loi du silence propre au « bizness », etc.).
  • [12]
    Pierrat, 2003, pp. 379-384.
  • [13]
    Sur les mafias italiennes, voir notamment Arlacchi, 1986.
  • [14]
    En ce qui concerne le blanchiment d’argent effectué par l’intermédiaire des réseaux familiaux, voir Guenfoud, 2003.
  • [15]
    Sur la conflictualité des relations entre jeunes de rue, voir Sauvadet, 2006.
  • [16]
    Cette analyse s’inspire de la recherche de Norbert Elias et John L. Scotson de 1965 (Elias, Scotson, 1997).
  • [17]
    Mon approche se voulait la plus informelle possible afin de ne pas inquiéter Aziz. Je n’ai utilisé aucun moyen d’enregistrement. La retranscription s’est effectuée de mémoire juste après l’entretien.
  • [18]
    À l’instar de beaucoup d’autres jeunes de rue, Aziz respecte certaines coutumes musulmanes, mais tient à distance l’islam rigoriste, voire extrémiste.

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