Dans le grand regain d’intérêt, voire de fascination pour les violences de guerre qu’ont connu les sciences sociales depuis les années 1990, la Grande Guerre tient une place importante : on qualifie souvent ses violences de « matricielles » ou d'« inaugurales », annonçant des basculements ou des franchissements de seuils décisifs pour l’ensemble du xxe siècle . On le comprend aisément pour le versant technique et matériel de la guerre, avec le progrès des capacités de destruction des armements et en particulier de l’artillerie. Mais, de façon plus surprenante, c’est fréquemment le combat individuel, à l’arme blanche, au corps à corps, qui est mis en avant comme l’élément central d’une « brutalisation » supposée des hommes et de la guerre . Les textes d’Ernst Jünger, le J’ai tué de Blaise Cendrars ou le couteau de tranchées deviennent ainsi des récits et des objets emblématiques d’un discours sur la guerre et la violence combattante qui s’est largement imposé dans l’historiographie et au-delà . C’est pourquoi il a paru utile de donner à lire – et de commenter brièvement – un document primaire illustrant les réalités du combat aux tranchées en 1914-1918 , pour en montrer, en-deçà des images ou des idées reçues, les dimensions ordinaires et ordonnées.
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Le sous-secteur de la Faux, théâtre de ce coup de main exécuté par le 3e bataillon du 103e RI, se situe sur les coteaux de la partie est du front de Champagne. En cet été 1916, après avoir accueilli certaines des grandes offensives françaises de l’année 1915, ce secteur du front de Champagne est plutôt calme, comparé à la bataille qui fait rage depuis février à Verdun une trentaine de kilomètres à l’est…
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