Je m’interroge depuis très longtemps, sur ce qu’Ernst Bloch, le philosophe allemand, appelait la question essentielle ou encore la question absolue : la question en soi du « nous »
LORSQUE, IL Y A QUELQUE TEMPS, la région Guadeloupe m’a demandé de rejoindre l’équipe qui travaille à l’élaboration du Mémorial ACTe, et lorsqu’il s’est agi de faire l’acquisition d’œuvres contemporaines pour sa collection permanente, cette question du « nous » est immédiatement apparue. Et il m’a semblé essentiel, afin de pouvoir construire un « nous » viable, de travailler sur l’individuation, chère à Jung, et d’essayer de faire en sorte que le « nous » ne soit pas une espèce de ventre mou, mais qu’il soit constitutif de forces. Des forces qui n’iraient pas nécessairement dans le même sens. Des forces contradictoires. Des forces complexes. Car c’est de l’énergie que naît l’avancée. C’est de l’énergie que peut naître une production positive. Il m’a semblé essentiel, par exemple, d’établir un lien afin de parler de la mémoire et non pas de l’esclavage. Parler de l’esclavage est une chose qui, personnellement m’intéresse peu. Il y a des spécialistes.
Ce qui m’intéresse ici et maintenant, est de voir quelles sont les conséquences de cet avatar de l’histoire et ce que l’on peut en faire, non plus comme un poids mais comme une force, ce qui était cher à Césaire. Parce qu’après tout, il y a eu un tas de peuples bien plus malheureux, si tant est qu’on puisse établir une échelle du malheur, que le peuple noir…