Sociolinguiste, Cyril Trimaille se penche sur les processus qui ont fait émerger des parlers jeunes dits « de banlieue », et décrypte l’évolution des représentations sur ces formes de langages depuis les années 1980. Plutôt que d’établir des « frontières là où l’on trouve davantage de continuums », l’enseignant-chercheur valorise les dynamiques du langage dans la société française post-migratoire et post-coloniale. Il souligne par ailleurs les limites d’une société qui, historiquement, « se veut monoculturelle » tout en éclairant les processus de banalisation des nouvelles pratiques langagières par les médias et Internet, sans que pourtant cela vaille « légitimation ».En tant que sociolinguiste vous vous intéressez aux pratiques linguistiques « déviantes » du français standard et notamment aux façons de parler spécifiques en banlieues. Par quels processus se sont développées ces formes de langages, souvent portées par des jeunes issus de l’immigration et que nous disent-elles de notre société ?
Il faut être prudent à la portée symbolique dans notre manière de nommer les choses. Pour avoir étudié ces pratiques langagières et pour les étudier en relation avec les pratiques d’autres adolescents qui ne sont pas banlieusards ou issus de l’immigration, on voit de la continuité plutôt que de la rupture. Parfois une situation de concentration sociale et spatiale va nous amener à percevoir telle façon de parler comme vraiment « autre » que la nôtre. Mais je serais prudent sur cette notion de « parler » qui risque d’établir des frontières là où l’on trouve davantage de continuums…