À la fin des années 1980, l’histoire sud-africaine amorce une phase de réécriture. L’histoire de l’art, quant à elle, devient inclusive, restituant aux “artistes négligés” la place qui leur revient. C’est dans ce contexte que Gérard Sekoto (1913-1993), exilé à Paris depuis 1947, est réintroduit dans son pays, à l’occasion d’une exposition qui a donné matière à un discours critique qui domine encore aujourd’hui. Retour sur son exil et sur la présumée “perte de son identité africaine”.
D’opinion générale, la carrière de Gérard Sekoto connaît deux pics de créativité. Le premier a lieu en Afrique du Sud dans les années 1940 et correspond à sa description de la vie des Noirs dans les townships. Le second se manifeste en 1949, lors d’un mois d’internement à Sainte-Anne, au cours duquel il crée une série de portraits. Ce que l’on apprécie avant tout, c’est l’empathie dont fait alors preuve l’artiste : sa capacité à s’identifier aux sujets peints, c’est-à-dire les Noirs, les habitants des townships et, à Paris, plus précisément à Sainte-Anne, les aliénés. L’authenticité de son travail reposant sur son expérience directe du contexte ou de l’environnement dépeint, en l’occurrence, un monde marginal.
Hormis cela, sa période parisienne (1947-1989) semble être caractérisée par la perte de son identité africaine, l’adoption infortunée des abstractions de l’École de Paris (1910-1940), ainsi qu’un mélancolique et distant souvenir de scènes sud-africaines.
Or, cette interprétation hégélienne de la carrière de Sekoto est limitative…