L’engagement des écrivains africains contre la barbarie peut conduire jusqu’à la mort quand ce n’est pas l’exil forcé. Dans leur écrasante majorité, ils ont trempé et continuent de tremper leur plume dans l’encre de la résistance. Ce n’est pas un hasard si la littérature apparaît comme l’expression majeure de la liberté en Afrique. Hommage à quelques figures disparues qui témoignent de cette étonnante résistance.
« … Que tous ceux qui ont des oreilles m’entendent : au Nigeria, un écrivain est condamné à mort parce qu’il veut vivre une vie meilleure pour son peuple. Il s’appelle Ken Saro-Wiwa, et il est mon ami. ». Le 31 octobre 1995, après un procès monté de toutes pièces par la junte militaire au pouvoir, l’auteur entre autres de Si je suis encore en vie… (éd. Stock, 1996), dernière phrase prémonitoire de son Journal de détention écrit un an auparavant, est condamné à la peine capitale. Il est accusé du meurtre de quatre « sages » politiciens ogonis lors d’un meeting tenu un an plus tôt.
Dans le quotidien britannique The Guardian, son compatriote et célèbre écrivain Ben Okri lançait ce cri d’alarme en demandant à l’opinion internationale d’ouvrir les oreilles. Un cri vain : d’autant plus que quelques jours plus tard, le 10 novembre, à onze heures et demie du matin, sur les ordres du général dictateur Abacha, réinstallé de force aux commandes du pays à la suite des élections présidentielles de 1993 où l’opposant Moshood Abiola fut pourtant reconnu vainqueur, l’écrivain nigérian âgé de cinquante-quatre ans a été pendu dans la prison de Port-Harcourt, à l’Est du Nigeria…