Couverture de AFCO_222

Article de revue

Intégration régionale dans la CEMAC : des problèmes institutionnels récurrents

Pages 199 à 221

Notes

  • [1]
    Chargé de cours à la Faculté des sciences économiques et de gestion de l’Université de Yaoundé II-Soa (Cameroun) et membre du Centre d’étude et de recherches en économie et gestion (CEREG), ddavom99@ hotmail. com. Nous remercions les deux référés anonymes de la revue Afrique contemporaine, ainsi que Bernadette Nyamouth Zanga, Mireille Etogo Messomo, Angéline Nyassam, Cécile Claude Ikito et Paul Ekoumba pour leurs remarques et commentaires. Toutefois, nous restons selon la formule consacrée entièrement responsable des erreurs et omissions qui peuvent subsister dans le texte.
  • [2]
    Pour un approfondissement des autres conceptions de l’intégration, notamment la conception volontariste défendue par les organisations du Sud telles que la Commission économique des pays de l’Amérique latine (CEPAL) ou la Commission économique de l’Afrique (CEA), voir Hugon (2002). Il est instructif de noter que cette conception n’a jamais été mise en œuvre, sauf dans les économies planifiées comme au Vietnam.
  • [3]
    Communauté économique du charbon et de l’acier.
  • [4]
    Qu’on se souvienne, pour s’en convaincre, du mouvement panafricaniste des années 1960 qui a inspiré les projets de société dirigés par Nkrumah et Houphouët Boigny, pour ne citer que ces deux-là, qui apparaissent comme les plus représentatifs.
  • [5]
    Marché commun du Centre d’Amérique.
  • [6]
    On peut citer le numéro spécial (n° 2-3, septembre 2003) de la Revue d’Économie du Développement, dont l’essentiel des articles porte sur le rôle des institutions dans les stratégies contribuant à rendre efficaces les politiques de lutte contre la pauvreté.
  • [7]
    L’UMOA créée en 1968 a été renforcée par la création d’une union douanière dans le cadre d’un traité plus ambitieux en 1994 qui crée l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). Les pays membres sont : Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo.
  • [8]
    Il convient toutefois de rappeler que le FCFA à l’origine signifiait Franc des colonies françaises d’Afrique, et qu’aujourd’hui, la signification diffère selon les deux unions : Franc de la Communauté financière d’Afrique dans l’UEMOA et Franc de la Coopération financière d’Afrique dans la CEMAC.
  • [9]
    Voir He Yong (1994).
  • [10]
    Selon North (1991) : “Institutions are the humanly divised constrains that structure political, economic and social interaction”.
  • [11]
    Ces trois auteurs ont reçu le prix Nobel d’économie en 2001 pour leurs travaux « sur les marchés avec asymétrie d’information ». Les discours Nobel des trois auteurs résumant leurs apports sont reproduits dans The American Economic Review, vol. 92, n° 3, juin 2002.
  • [12]
    C’est l’asymétrie d’information ex-ante qui survient par exemple sur le marché du crédit lorsqu’une hausse des taux d’intérêt élimine les bons risques.
  • [13]
    C’est la situation où l’on sélectionne un mauvais risque en pensant qu’il est un bon.
  • [14]
    C’est l’asymétrie d’information ex post qui se traduit une fois le contrat signé par le développement des comportements opportunistes de la part des agents économiques.
  • [15]
    Nabli et Nugent (1989).
  • [16]
    Le passager clandestin correspond à une situation où un agent économique souhaite profiter des effets positifs d’une action sans avoir au préalable contribué à sa réalisation.
  • [17]
    L’externalité est un phénomène qui apporte un bénéfice appréciable (externalité positive) ou inflige un préjudice significatif (externalité négative) à une ou plusieurs personnes qui n’ont pas été parties prenantes et consentantes du processus de décision qui a abouti directement à l’effet produit.
  • [18]
    Nouveau Partenariat pour le Développement de l’Afrique.
  • [19]
    C’est l’une des craintes exprimées régulièrement par de nombreux observateurs dans le cas d’une Europe élargie à vingt-cinq membres.
  • [20]
    Le Cameroun a procédé en 1983 et 1984 à deux vagues de recrutement de 1 500 et 1 700 diplômés de l’enseignement supérieur.
  • [21]
    Les États membres n’ont pas payé leurs cotisations respectives. L’école reste certes statutairement ouverte aux étrangers, mais leur admission est autorisée dans la limite des places disponibles et contre le paiement des frais de scolarité qui s’élèvent à un million de FCFA (environ 1 500 euros), contre seulement cinquante mille FCFA (environ 75 euros) pour les nationaux par année de scolarité.
  • [22]
    L’École nationale d’administration et de magistrature, équivalente en France de l’École nationale d’administration (ENA). Une structure similaire existe en RCA, Congo, Gabon.
  • [23]
    Nous pouvons citer à cet effet la Fondation pour l’enseignement supérieur en Afrique centrale à Brazzaville, qui fonctionna jusqu’au début des années 1960 et fut le Centre universitaire commun pour les États d’expression française. Ce centre a permis de former des cadres africains, dont certains ont pris des responsabilités importantes dans leurs pays respectifs au lendemain des indépendances (Gbetnkom, 1995).
  • [24]
    Le Tchad a sérieusement envisagé pendant la phase d’étude de faisabilité le tracé passant par la Libye.
  • [25]
    Ce poste statutairement réservé au Gabonais va certainement être tournant.
  • [26]
    Ce pays bloque également le démarrage des activités de la bourse régionale de Libreville, en refusant de nommer les responsables camerounais au sein de cette structure communautaire.
  • [27]
    Les critères et indicateurs de convergence ont été révisés en août 2001, et se présentent depuis janvier 2002 comme suit : (i) un solde budgétaire de base (hors dons) rapporté au PIB nominal positif ou nul, à l’horizon 2004. Il est calculé en base engagements et représente la différence entre les recettes totales hors dons et les dépenses totales hors investissements financés sur ressources extérieures. Il présente l’avantage de mieux révéler la position budgétaire de l’État ; (ii) un taux d’inflation annuel moyen inférieur ou égal à 3 %, dont l’objectif est d’assurer une convergence des taux d’inflation entre les différents pays de la communauté ; (iii) un taux d’endettement public extérieur inférieur ou égal à 70 % du PIB en 2004, dont l’objectif est de contrôler à terme le problème d’endettement excessif des États ; (iv) la non-accumulation d’arriérés intérieurs et extérieurs sur la gestion de la période courante. Ce critère s’accompagne d’un plan d’apurement sur une période de trois ans, à fin 2004, du stock d’arriérés existant à fin 2000.
  • [28]
    Le Cameroun vient de passer à une année budgétaire allant du 1er janvier au 31 décembre.
  • [29]
    La policy mix désigne, au sens étroit, la combinaison des politiques monétaires et budgétaires. Au sens large, elle caractérise la stratégie de la politique économique poursuivie en prenant en compte la cohérence entre politiques macro-économiques et réformes structurelles.
  • [30]
    Ces dernières années, pour motifs de sécurité et au mépris des règles communautaires, des expulsions des étrangers ressortissants des pays membres se sont multipliées au Gabon. Plus récemment, au début du mois mars 2004, le gouvernement de Guinée équatoriale sous le prétexte d’un coup d’État manqué a expulsé les étrangers, notamment les Camerounais dont le nombre est estimé à près de 1 500. L’ambassadeur du Cameroun à Malabo a été rappelé pour consultation selon la formule consacrée.
  • [31]
    La Guinée-équatoriale contribue actuellement grâce à ses importantes ressources pétrolières pour un peu plus de mille milliards aux réserves de la Banque centrale. Obiang Nguema, chef d’État de la Guinée équatoriale, n’a pas manqué de le rappeler lors du sommet de la CEMAC tenu à Malabo en 2006. Il a reçu un mandat de piloter une étude sur la réforme des institutions dont l’échéance a été fixée en 2008.
  • [32]
    Dans le cadre de la recherche des financements des institutions communautaires, une taxe communautaire d’intégration a été instituée. Elle est entrée en vigueur seulement à partir de janvier 2002. Par exemple, en 2004, les recettes de cette taxe étaient de 13 841 650 597, seulement 5 383 362 207 ont été effectivement versés dans les caisses du secrétariat exécutif de la CEMAC (Source Agent comptable de la CEMAC).

1Depuis le début des années 1980, il est désormais courant dans la littérature théorique portant sur l’intégration économique de faire une distinction assez claire entre l’« ancien » et le « nouveau » régionalisme. Tandis que l’ancien régionalisme couvre les décennies 1960 et 1970, le nouveau en revanche est parti timidement au milieu des années 1980 pour s’emballer pendant la décennie 1990, avec une croissance phénoménale des accords régionaux d’intégration. À titre d’illustration, en 2004 cent cinquante-huit accords à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) étaient considérés comme effectivement appliqués.

2La première vague de régionalisme a largement été dominée [2] par l’analyse statique néoclassique des unions douanières, avec la distinction pionnière de Viner (1950) en termes de « création » et de « détournement » de courant d’échanges. Cette distinction a par ailleurs influencé les travaux théoriques et empiriques qui ont suivi. D’après la théorie néo-libérale, l’intégration économique est une situation où les entraves au libre-échange mondial sont progressivement supprimées, pour assurer la liberté des échanges et les mouvements des facteurs de production, mais aussi pour faciliter une meilleure répartition des activités et une utilisation rationnelle des ressources en travail et en capital. Elle concerne essentiellement les mécanismes de marché et s’attache plus à l’échange qu’à la production. Ainsi, à l’optimum économique, toutes les pertes de force de travail et de capital se trouvent spontanément éliminées, chaque facteur de production étant appelé dans ce contexte à se diriger vers le lieu où il est censé obtenir les meilleurs rendements. L’une des conditions de réalisation de l’intégration par le marché est que les économies à intégrer soient complémentaires. Celle-ci étant appelée à se renforcer au fur et à mesure que le processus d’intégration avance. Cette conception, développée majoritairement par les auteurs anglo-saxons, va dans un premier temps trouver son champ d’application dans la CECA [3] créée à la fin des années 1950, puis progressivement dans d’autres régions du monde, en Afrique et en Amérique latine notamment, et ce malgré les critiques émises par Perroux (1968), qui prédisait déjà l’échec de la théorie traditionnelle des échanges.

3En Afrique plus particulièrement, au cours des années 1960, dans l’euphorie et l’enthousiasme qui ont suivi les indépendances, l’intégration économique régionale avait été présentée par de nombreux observateurs tant africains [4] qu’européens, comme une solution indispensable au décollage économique. L’une des raisons avancées, et qui garde encore toute son actualité est que les économies africaines, généralement de petite taille, souffrent d’un manque de compétitivité. Bien plus, elles sont très souvent exposées à de très fortes variations des prix sur les différents marchés internationaux des matières premières. Ainsi, en l’absence d’économies d’échelle limitées par les débouchés, tous les projets visant à développer les productions destinées au seul marché intérieur sont voués à l’échec.

4Il est apparu plusieurs décennies après la mise en œuvre des premiers accords et de façon quasi unanime, que tous ont largement échoué. Leur impact en matière d’industrialisation et surtout de commerce réalisé est souvent jugé très insuffisant, comparativement à d’autres expériences de régionalisme dans le monde. D’une manière générale, ces échanges ne constituent qu’une faible part du commerce extérieur des pays. Par exemple, selon Guillaumont et Guillaumont (1993), cette proportion s’élevait au début des années 1990 à 14,2 % pour le MCCA [5], et 60 % pour la Communauté économique européenne (CEE) contre une estimation de 8 % pour l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et entre 3 % à 5 % dans la zone CEMAC.

5La deuxième vague de régionalisme coïncide avec la mise en évidence des insuffisances du fameux consensus de Washington développé par J. Williamson (1990 et 2000), et dont les principales critiques sont bien résumées par Ahrens (2002). Elle diffère ainsi fondamentalement de la première à trois niveaux au moins. Tout d’abord, les objectifs sont souvent moins ambitieux. Ensuite, les accords privilégient les relations Nord/Sud par rapport à celles Sud/Sud. Enfin, elle accorde un rôle majeur aux institutions, largement négligées au cours de la première vague. Pourtant, les quelques résultats positifs enregistrés dans le cadre du processus d’intégration de la première vague sont à mettre à l’actif de la coopération institutionnelle, notamment dans les domaines de la monnaie et de l’éducation, avec la création des écoles sous-régionales de formation. Mais l’amélioration soudaine et forte des termes d’échange dans le courant des années 1960 et surtout 1970, en générant les ressources financières suffisantes, a réveillé les vieux démons du nationalisme et de l’affirmation de soi. Il s’est développé ensuite, dans presque tous les pays, une duplication des projets dont le tarissement des crédits, conséquence de la crise économique des années 1980 a tout simplement conduit au mieux au ralentissement drastique, et au pire, à l’arrêt des activités.

6Cette dernière dimension de l’intégration prend désormais appui sur une littérature certes ancienne, mais totalement renouvelée et enrichie dans le cadre de la Nouvelle Économie Institutionnelle [6] (NEI) (North, 1991 ; O. Williamson, 2000). Le rôle des institutions dans le développement est désormais établi (Acemoglu, 2004). Dans cette perspective, l’analyse récente des fondements de l’intégration montre que le renforcement de la coopération à travers la création d’institutions crédibles, et les programmes conjoints de formation par exemple généraient des avantages indéniables qui pourraient à moyen et à long terme avoir un impact significatif sur les courants des échanges (De Melo et al., 1993).

7Les pays de la CEMAC, en s’appuyant sur leur expérience passée, ont ratifié en 1994 un nouveau traité qui proclamait leur volonté de renforcement de la coopération institutionnelle dans les domaines de l’économie monétaire, financière et réelle. Historiquement, la CEMAC est l’un des regroupements sous-régionaux les plus anciens en Afrique. En effet, même si sa première forme institutionnelle la plus achevée apparaît seulement en 1964 avec la création de l’Union douanière et économique de l’Afrique centrale (UDEAC), il convient toutefois de remonter à la période coloniale pour retrouver ses premiers balbutiements dans les regroupements coloniaux. Avec une population estimée aujourd’hui à environ trente millions d’habitants et inégalement repartie sur une superficie de près de trois millions de kilomètres carrés, elle est la plus petite des communautés économiques en Afrique. Son sous-sol est comparativement à celui des autres pays africains extrêmement riche. Par exemple, cinq des six pays qui la composent sont des producteurs de pétrole. Plus important encore, elle représente avec la République Démocratique du Congo (RDC), la deuxième forêt tropicale du monde après l’Amazonie.

8Institutionnellement, la CEMAC est composée de deux unions régies chacune par une convention. Il y a d’une part celle qui crée l’Union monétaire de l’Afrique centrale (UMAC), et d’autre part, celle qui crée l’Union économique de l’Afrique centrale (UEAC). L’UEAC a pour objectif principal le renforcement de la dimension réelle de l’intégration à travers la suppression progressive mais totale des barrières douanières et contingentements. Plus spécifiquement, elle vise par exemple le renforcement de la compétitivité des activités économiques et financières, la convergence des politiques budgétaires nationales avec la politique monétaire commune, ainsi que la réalisation d’une coopération totale dans de nombreux domaines tels que l’industrie, le tourisme, les transports, la formation professionnelle, l’énergie, l’agriculture, etc.

9L’UMAC, quant à elle, forme avec l’Union monétaire ouest-africaine (UMOA) [7], la composante africaine de la zone franc qui apparaît selon les auteurs, comme une coopération originale avec la France, ou bien comme une relique coloniale. Ces deux unions monétaires sont placées sous l’autorité de deux instituts d’émission bien distincts : la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) et la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO). Chacun de ces deux instituts jouit du statut d’établissement public international. Les règles générales de fonctionnement régissant les deux unions monétaires sont très semblables. Ainsi, dans chacune d’elles, un franc CFA [8] circule avec la même parité de change vis-à-vis de l’euro qui s’est substitué depuis 2002 au franc français. Si cette parité est statutairement fixe, elle demeure cependant ajustable comme l’a d’ailleurs montré la décision sans précédent historique du 12 janvier 1994, qui a mis fin à une longue période de spéculation et de débat sur la surévaluation des francs CFA par une dévaluation forte de 50 %. Les deux banques centrales sont en outre tenues de déposer un minimum de 65 % de leurs réserves de change sur un compte d’opérations ouvert dans les écritures du Trésor français. Juridiquement, cette coopération n’est pas incompatible avec le Traité de Maastricht qui laisse en son article 103 la possibilité à tout État de la Communauté européenne de signer les accords de coopération monétaire avec les États tiers. Convient-il enfin d’ajouter que les deux instituts d’émission garantissent à l’intérieur de leur propre zone la convertibilité et la liberté de transfert des capitaux. Pour finir, depuis 1993, ces deux monnaies ne sont plus directement convertibles entre elles.

10L’objectif que se fixe cette contribution est d’évaluer l’ensemble de ces réformes un peu plus de dix ans après leur mise en œuvre, en empruntant une grille de lecture néo-institutionnelle afin de tirer les premières conclusions pour les décideurs communautaires.

11Nous menons notre raisonnement en deux étapes. La première étape définit le cadre théorique qui caractérise et justifie l’importance des institutions dans le processus de développement. La deuxième étape s’appuie, quant à elle, sur cette littérature, notamment le modèle de transmission des effets de l’intégration développé par De Melo et al. (1993), pour mettre en lumière les contraintes qui pèsent sur ces institutions depuis leur mise en œuvre, et qui sont susceptibles de ralentir le processus d’intégration. L’analyse distingue clairement les deux périodes de la coopération institutionnelle : celle avant et celle après les réformes de 1994, pour bien apprécier les évolutions enregistrées. La conclusion dégage les problèmes nés de l’articulation entre les institutions nationales et régionales.

Les institutions comme facteur de développement : quelques enseignements théoriques

12Le succès qu’ont connu les travaux de Viner fondés sur la distinction entre effets de « création » et « détournement » de commerce a occulté pendant au moins une décennie une autre dimension intuitive de ceux-ci : l’existence d’effets positifs de la coopération institutionnelle « administrative advantage » sur les échanges commerciaux. D’abord ignoré, puis minimisé dans l’analyse des premiers économistes de développement [9], le rôle des institutions sera progressivement reconnu et fréquemment mentionné par de nombreux auteurs (Coase, 1960 ; O. Williamson, 1985 ; North, 1986, 1991, 1994 ; Acemoglu et al., 2001). Ainsi, Nabli et Nugent (1989) rapportent les conclusions empiriques intéressantes d’une étude d’Adelman et Morris qui, dès 1967, trouvaient une corrélation positive et significative entre le niveau de développement et les indicateurs sociaux, politiques et institutionnels. Ces résultats seront confirmés par ceux obtenus par Barro (1996) puis de Rodrik (2002), qui montrent l’existence d’une corrélation positive entre la qualité des institutions (ouverture politique, gouvernement par les droits, propriété privée et allocation des ressources) et la croissance économique. D’autres études, notamment celles de Keefer et Knack (1998), corroborent cette corrélation. Par exemple, ces auteurs montrent en s’appuyant sur l’expérience chilienne, que la capacité à protéger les droits de propriété par l’intermédiaire d’institutions solides et crédibles expliquerait en grande partie les bonnes performances économiques de ce pays par rapport aux autres pays de la région. En somme, l’enseignement majeur que dégagent ces études est que les variables « qualitatives » relatives aux institutions donnent de meilleurs résultats que les variables simplement « descriptives » (Avallone et Nicolas, 2002).

13Après avoir rappelé la définition et les caractéristiques des institutions (A), nous allons justifier leur importance dans le processus de développement (B).

Définition et caractéristiques des institutions

14La plupart des définitions économiques des institutions mettent un accent particulier sur la notion de « règles du jeu » devant réguler les comportements des agents économiques. Plus précisément, les institutions sont des contraintes qui facilitent la gestion des rapports humains dans leurs interactions économiques et sociales [10]. Elles sont donc un élément structurant de la vie politique. Les institutions forment à cet effet un cadre réglementaire à l’intérieur duquel se fondent et peuvent se mouvoir les régularités comportementales qui, à leur tour, vont déterminer à la fois leur émergence et leur évolution. Ce cadre réglementaire, écrit ou non, résulte généralement d’un processus d’interactions entre les individus. Il apparaît alors, selon Ahrens (2002), que l’une des caractéristiques des institutions réside dans le fait d’inclure les normes applicables, des règles et des comportements qui servent les objectifs collectifs, structurent et modèlent les interactions sociales. De plus, les institutions devraient fournir des règles contraignantes, prévisibles, cohérentes et appliquées de façon équitable à tous les acteurs (Nabli et Nugent 1989). Bien que les institutions doivent pérenniser un certain degré de stabilité pour garantir leur crédibilité, les changements et les adaptations institutionnels sont nécessaires. Ils le sont d’autant plus que cette adaptabilité permanente aide à s’assurer que les changements dans les préférences sociales, l’évolution technologique, les structures politiques et économiques internes ou externes s’accommodent à la structure des incitations qui reflète la demande des institutions. Elles doivent à cet effet présenter, d’après Acemoglu (2004), trois caractéristiques principales : (i) garantir le respect des droits de propriété à une grande partie de la population en incitant une large proportion d’individus à investir et à participer à la vie économique ; (ii) limiter l’action des élites, des politiciens et autres groupes puissants, en les empêchant de s’approprier les revenus ou investissements d’autrui ou de fausser les règles du jeu ; (iii) promouvoir l’égalité des chances pour de vastes pans de la société, encourageant l’investissement, notamment dans le capital humain, et la participation à la production économique.

15Il est par ailleurs utile de rappeler ici la distinction faite par Yifu Lin (1989) entre arrangement institutionnel et structure institutionnelle. L’arrangement institutionnel renvoie à l’ensemble des règles et comportements qui gouvernent les actions et les relations entre les individus. Il peut être à la fois formel (familles, firmes, hôpitaux, universités, etc.) ou informel (valeurs, coutumes, traditions, etc.). La structure institutionnelle englobe, quant à elle, les arrangements institutionnels formels et informels dans une société. North (1994) puis O. Williamson (2000) vont insister chacun sur le caractère homogène des institutions en montrant qu’au-delà de cette distinction formel/informel, les institutions devraient incorporer aux contraintes formelles les contraintes informelles qui sont très fortes en Afrique pour qu’elles soient efficaces et durables.

Les institutions et le développement économique

16Une fois les institutions définies et caractérisées, de nombreux auteurs se sont attachés à justifier non seulement leur existence, mais surtout leur nécessité dans le processus de développement. Le point de départ de l’ensemble de ces travaux porte sur les critiques adressées aux hypothèses qui fondent la théorie néoclassique. En effet, l’une des hypothèses fortes de celle-ci est bien évidemment la parfaite circulation de l’information et sa disponibilité à moindre coût. Ces deux qualités permettent, selon les auteurs néoclassiques, d’assurer à tout moment un équilibre spontané entre les offres et les demandes sur les différents marchés. Cet équilibre diffusé par le système de prix est de nature dynamique dans le sens où il conduit les agents économiques à réviser continuellement leurs plans, et tranche totalement avec la principale propriété stabilisatrice de la structure sociale des institutions (Allégret et al., 2003). Si l’édifice théorique à la base de l’analyse néoclassique est souvent jugé rigoureux, il est apparu cependant régulièrement contestable dans les faits, car l’hypothèse d’information parfaite, bien que séduisante et plausible pour beaucoup d’auteurs, présente d’importantes difficultés lorsqu’il s’agit d’y apporter une vérification empirique. Ainsi, par exemple, l’information est très loin de remplir ces deux qualités pour au moins deux raisons : elle est coûteuse et inaccessible parce que certains acteurs économiques ont intérêt à la dissimuler. Il est cependant utile de souligner que l’école néoclassique est davantage concernée par le fonctionnement du marché que par son développement. Ainsi, l’hypothèse selon laquelle l’information est parfaite et disponible à moindre coût ne devrait pas être généralisée. Cette situation expliquerait les multiples défaillances enregistrées sur le marché. L’existence des institutions serait alors justifiée par leur capacité à réduire les coûts de transactions (1). Elles facilitent en outre l’action collective des acteurs privés ou publics, qu’une coordination purement marchande ne peut réaliser (2).

L’objectif de réduction des coûts de transactions

17Les difficultés nées de l’application du modèle néoclassique ont largement inspiré les travaux théoriques et empiriques sur les coûts de transactions et d’asymétrie d’information. Le rôle des coûts de transaction dans l’économie des organisations a été mis en avant dans les influents travaux de O. Williamson (1985). Mais le travail initial est l’œuvre de R.H. Coase (1960) qui mit un accent particulier sur l’importance des droits de propriété dans l’émergence des institutions. Il établit en effet, d’une part, que la coordination entre les agents est à l’origine des coûts de transaction, et d’autre part, que le recours au marché est coûteux. En revanche, en supposant ces coûts nuls ou quasi nuls, la notion d’échec de marché n’existe plus et l’intervention de l’État est inappropriée, ou plutôt avantageusement remplacée par une négociation directe entre les agents. L’école des droits de propriété (connue aussi sous l’appellation d’école de Chigaco) prendra progressivement corps avec les travaux de Demsetz (1967), Alchian et Demsetz (1972). Elle a beaucoup argumenté autour du thème central d’une supériorité des formes organisationnelles. Les droits de propriété permettraient de rendre prévisibles les comportements que chaque individu peut attendre de la part des autres membres de la communauté. Les institutions joueraient par conséquent un rôle particulièrement important dans l’allocation des ressources, en réduisant les coûts de transactions. Ainsi, plus ces coûts sont bas et plus la pérennité des institutions est assurée. Ce rôle d’allocation des ressources est d’autant plus déterminant que les institutions constituent un système d’allocation efficace à trois niveaux (Yong, 1994) : (i) elles prédéfinissent les dotations initiales des ressources des individus ou acteurs ; (ii) elles définissent les règles d’agrégation et de pondération des intérêts individuels ; (iii) elles dissuadent et punissent les comportements de violation des règles. Prolongeant son analyse, Coase va mettre en exergue l’idée d’une endogénéisation des institutions pour justifier l’avantage de la firme par rapport aux institutions de marché. L’existence des coûts de transaction élevés d’une part (coût de collecte des informations, d’établissement des contrats, de contrôle et de supervision, etc.) et l’asymétrie d’information d’autre part, donneraient un avantage à la firme par rapport au marché. Les innovations institutionnelles seraient alors induites par la volonté humaine de diminuer les coûts de transaction.

18Le problème de l’information asymétrique est, quant à lui, considéré comme une source importante de coûts de transaction. En effet, depuis les travaux fondateurs de Akerlof (1970), Spence (1973) et Stiglitz (1981) [11], il est de plus en plus admis que, dans le cadre d’un contrat, certains agents économiques détiennent plus d’informations que d’autres. Les apports des notions de « sélection adverse » [12], d’« incitation adverse » [13] et de « hasard moral » [14] sont depuis lors associés à l’asymétrie d’information. Ces différents problèmes seraient amplifiés par les défaillances des marchés. Il existe donc des coûts importants pour réduire cette asymétrie d’information que le marché ne peut pas supporter. Les institutions, en produisant à moindre coût l’information, posséderaient ainsi un avantage comparatif appréciable par rapport au marché dans le contrôle et la mise en œuvre des incitations nécessaires à la réduction de ces asymétries d’information.

L’objectif de facilitation de l’action collective [15]

19Les institutions seraient, d’après cette approche, le résultat d’une action collective visant à éliminer le problème particulier du « passager clandestin » [16] et à réduire les « externalités » [17] négatives des actions individuelles comme la pollution, ou les divergences dans la politique budgétaire pour les pays appartenant à une union monétaire. La théorie de l’action collective permettrait en outre non seulement d’expliquer pourquoi les agents économiques optimisent leur comportement dans le cas d’une absence de coopération, mais aussi d’identifier les conditions à partir desquelles celle-ci peut être réalisée efficacement. Le succès de l’action collective serait conditionné par les caractéristiques du groupe telles que la taille, l’homogénéité, le rôle des incitations, etc.

20La réforme institutionnelle dans la CEMAC initiée au début des années 1990 s’analyse aisément en s’appuyant sur la Nouvelle Économie Institutionnelle. Celle-ci considère l’État et les institutions comme des facteurs endogènes du développement économique. Elle vise à réduire les coûts de transaction générés par la non-coopération, en développant une action collective efficace. En effet, il faut se souvenir du contexte de crise économique dans lequel les réformes ont été engagées. Les institutions de l’ancienne UDEAC étaient totalement dépassées et paralysées, et ne pouvaient par conséquent plus répondre aux exigences qu’imposait le nouveau contexte de globalisation. Les coûts de transaction liés à la non-coopération étaient par conséquent très élevés.

21Elle a été initiée de manière endogène par les chefs d’État et de gouvernement, et avec l’appui des institutions internationales. La nécessité d’une telle réforme apparaissait de plus en plus comme une exigence cardinale, d’autant plus que les différentes politiques nationales d’ajustement structurel n’avaient pas donné les résultats attendus. Mandat avait alors été donné au gouverneur de la Banque centrale de réfléchir sur les modalités de relance de l’intégration sous-régionale. Une équipe d’enseignants d’universités (économie, droit, sociologie, etc.), d’opérateurs économiques, de politiques et de la société civile de chaque pays avait été constituée pour réfléchir sur les modalités de cette relance. Ces réflexions avaient abouti à la rédaction du nouveau Traité de la CEMAC. Dans les démocraties avancées, de telles décisions auraient sans doute nécessité l’adhésion de toute la population communautaire directement par voie référendaire ou indirectement par l’intermédiaire des différents parlements nationaux. Ces pratiques sont encore assez rares en Afrique et expliquent la faiblesse des institutions et surtout le manque ou le peu d’intérêt que les populations portent à tout ce que sont les traités et conventions internationaux. Il peut paraître étonnant que des projets comme celui de la CEMAC ou du NEPAD [18] de par leurs enjeux, parce que la mise en place de certaines dispositions impose des choix fondamentaux en termes d’abandon de souveraineté, n’aient pas fait l’objet d’un débat public. Cette situation explique en partie du moins les difficultés de mise en place de nouvelles institutions communautaires.

La CEMAC et la mutation des institutions communautaires

22La coopération institutionnelle recouvre plusieurs formes, pouvant aller du simple échange d’informations à la coordination des politiques dans les domaines jugés utiles par les parties concernées. Elle peut par exemple concerner la mise en place des services techniques communs dans l’éducation et la formation, la création d’institutions régionales responsables de certains domaines de la politique économique (monétaire, budgétaire, concurrence, prix, etc.).

23En 1993, De Melo et al. soutenaient l’idée selon laquelle la coopération institutionnelle conditionnerait l’efficacité des politiques économiques. Faisant abstraction de la modélisation mathématique qui accompagne le raisonnement, l’hypothèse de base de ce modèle est que la liberté de choix des États, qui sont supposés comme tous les autres agents économiques avoir un comportement économique rationnel, est contrainte par la présence de groupes de pression (lobbies) privés ou publics dont les objectifs diffèrent totalement de ceux des gouvernements en place. Ils mettaient ainsi en évidence les trois effets suivants de la coopération institutionnelle : (i) l’effet de « dilution des préférences » (the preference dilution-effet) : il apparaît à partir du moment où, dès lors que les institutions supranationales sont instituées, celles-ci contribuent à réduire le poids des groupes de pression dans chaque État ; (ii) l’effet de « création institutionnelle » (the institutionnel-design effect) : les États une fois libérés des contraintes historiques ont désormais la liberté de choix dans le modèle institutionnel qu’ils souhaitent appliquer ; (iii) l’effet d’« asymétrie des préférences » (the preference-asymetry effect) : il apparaît lorsque l’arbitrage entre les préférences des différents États implique des compromis plus ou moins favorables à chaque État (par exemple arbitrage entre inflation et croissance).

24Alors que le résultat du dernier effet est ambigu, les deux premiers effets sont en revanche supposés améliorer l’efficacité des politiques économiques nationales et communautaires. Plus la coopération institutionnelle implique un nombre important de pays, plus les deux premiers effets ont des chances d’avoir un impact positif et moins le troisième effet sera positif en raison du compromis rendu difficile à trouver à cause du nombre élevé de participants [19]. De même, plus la coopération institutionnelle est déséquilibrée, c’est-à-dire qu’un ou deux grands pays (en termes de pouvoir économique) dominent une multitude de petits pays, plus les trois effets risquent de jouer dans le mauvais sens. Ces effets de la coopération auraient, selon leurs auteurs, d’autant plus de chances de se manifester dans les pays en développement qu’elle associe les pays industrialisés. Considérons l’impact de ces différents effets sur la coopération institutionnelle avant et après les réformes entreprises depuis 1994.

Les effets de la coopération avant les réformes

25Dans la CEMAC, si les pays ont mené une coopération monétaire assez appréciable, toutefois en raison de la présence stabilisante de la France dans l’ossature institutionnelle de la zone franc, elle a été limitée et très peu fructueuse dans les autres domaines : transport, industrialisation, recherche, agriculture, etc. Guillaumont et Guillaumont (1993) identifient, à partir de ce modèle, les raisons pour lesquelles certains instruments de la coopération n’ont pas fonctionné, et montrent pourquoi certains objectifs n’ont finalement pas été atteints, particulièrement celui du contrôle de la masse monétaire au sein de la CEMAC.

26L’effet de « dilution des préférences » n’a pas joué autant qu’on l’aurait espéré. La Banque centrale n’a pas été plus à l’abri des pressions politiques dans l’expansion du crédit. Elle ne disposait pas non plus de l’indépendance nécessaire pour protester, lorsque les gouvernements respectifs ont par exemple contraint les banques commerciales et de développement à prêter pour des raisons politiques, et sans se préoccuper de la fiabilité et de la rentabilité des projets proposés par les clients (Stasavage, 1996). En effet, l’une des règles régissant la coopération monétaire plafonnait à 20 % les avances de la Banque centrale à l’État, en vue de limiter la monétisation des déficits budgétaires. Elle a été régulièrement détournée par les États. Ils ont par ailleurs profité des conditions de crédits extrêmement favorables qu’offrait le marché international de capitaux dans les années 1970 pour s’endetter à moindre coût, ou via les entreprises publiques et les banques de développement considérées comme des Trésors annexes. De plus, il y a régulièrement eu une collusion d’intérêts particuliers plutôt qu’une neutralisation de ceux-ci. Ainsi, sous la pression des classes urbaines de plus en plus scolarisées, tous les pays ont procédé au cours des décennies 1970 et 1980 à des recrutements importants dans la fonction publique [20], ainsi que dans les entreprises publiques pour lutter contre le chômage. L’influence de la monnaie sur les structures économiques est restée extrêmement limitée, en raison de la nature des activités financées (import/export).

27Pourtant, depuis le début des années 1990, de nombreux auteurs montrent qu’il y a un impact positif de l’utilisation d’une monnaie unique sur le développement des échanges commerciaux et la répartition géographique des industries. Les résultats obtenus par Mc Callum (1995) sont à cet effet assez frappants. L’auteur montre en utilisant la notion d’« effet frontière » que le commerce entre les provinces canadiennes est dix à quinze fois supérieur au commerce entre une province canadienne et les États-Unis en fonction de la présence ou non des effets frontières. En revanche, Rose (2000) est parvenu à montrer que les pays appartenant à une union monétaire commercent trois fois plus. Ces résultats ne sont pas confirmés dans la CEMAC, où l’impact de la monnaie unique sur le développement des échanges est apparu très limité (Avom, 2005). Plusieurs explications, pour la plupart de nature institutionnelle, sont généralement avancées pour justifier cette médiocrité des résultats. Outre les disparités fiscales qui ont introduit de nombreuses distorsions, il y a aussi : (i) l’existence d’une même structure productive qui ne facilitait pas les échanges entre pays, et surtout l’absence de schémas de compensation et de transfert satisfaisants pour les perdants, ou du moins la non-application de ceux-ci lorsqu’ils existaient ; (ii) de longues listes d’exceptions qui empêchaient la fermeture des entreprises non rentables. L’union monétaire dans le cadre de la zone franc est apparue finalement davantage comme un facteur d’intégration avec la métropole qu’entre les pays africains.

28L’effet de « dilution des préférences » n’a pas non plus joué pleinement lorsqu’il fallait assurer le contrôle des activités bancaires. Chaque État avait préféré avoir ses propres structures de contrôle dont les limites sont rapidement apparues peu avant le déclenchement de la crise bancaire. Elles se sont montrées dans tous les États sans exception, incapables d’assurer le contrôle prudentiel des banques et établissements de crédits, alors que l’appartenance à la même union aurait plaidé pour une stratégie commune. De même, il n’a pas non plus joué efficacement au niveau de la coopération industrielle et de la formation.

29Sur le plan de la formation, prenons pour bien illustrer deux exemples avec l’École supérieure internationale de journalisme de Yaoundé au Cameroun (ESIJY) d’une part, et l’école Inter-État de douanes de Bangui d’autre part. L’ESIJY, à sa création, avait une vocation internationale et particulièrement régionale. Elle devait accueillir des étudiants de toutes nationalités et tout particulièrement les ressortissants de la sous-région de l’Afrique centrale. Chaque État était tenu de verser une contribution financière, indispensable au soutien institutionnel de l’école. Les premières années de fonctionnement de cette école ont respecté cette vocation. Aujourd’hui, son caractère international n’est plus qu’un lointain souvenir [21]. L’école Inter-États des douanes située à Bangui en RCA, qui devait assurer la formation et le perfectionnement des cadres des douanes des États membres, n’accueille plus les Camerounais, dont les cadres de douanes sont formés à l’ENAM [22]. La seule école à vocation sous-régionale dans la CEMAC, et qui continue à fonctionner grâce à l’appui de la coopération internationale est l’Institut sous-régional de statistique et d’économie appliquée (ISSEA), basé à Yaoundé au Cameroun, qui forme des cadres dans la collecte et le traitement des données statistiques. Pourtant, l’histoire regorge d’expériences de coopération commune réussies en matière de formation et d’éducation pendant la période coloniale [23].

30Sur le plan de l’industrie et de l’énergie, l’effet de « dilution des préférences » n’a pas non plus joué. En effet, les tentatives passées d’une exploitation sous-régionale des ressources pétrolières entre le Cameroun, le Congo et le Gabon, se sont soldées par un échec. Chaque pays avait opté pour une exploitation nationale. La coopération en cours entre le Cameroun et le Tchad s’appuie plus sur les facteurs naturels. Le transit des exploitations pétrolières tchadiennes par le Cameroun s’explique davantage par son enclavement [24] que par une volonté réelle de coopération. Au sein de la CEMAC, le mécanisme de redistribution des gains et pertes douaniers n’a pas bien fonctionné.

31L’effet de « création institutionnelle » a été également affaibli par le passé colonial commun à ces pays. En effet, la garantie de la convertibilité qu’offre la France dans le cadre de la zone franc a plutôt encouragé un laxisme en matière budgétaire, renforcé par une politique africaine de la France faite de réseaux et d’amitié.

32Enfin, l’effet d’« asymétrie des préférences » a joué un rôle négatif. Considérons deux illustrations. D’une part, le taux de croissance optimal de la masse monétaire a été régulièrement fixé en fonction des taux de croissance des pays dominants de la zone (Cameroun, Gabon), taux non optimaux pour la plupart des autres petits pays de la CEMAC. Cette asymétrie des préférences a été encore plus manifeste lors de la dévaluation du CFA en 1994, où le taux de 50 % qui avait été calculé en référence à l’économie camerounaise n’était que très peu compatible avec les autres économies. Par ailleurs, les deux principaux États qui devaient contribuer au fonds de solidarité (Cameroun et Gabon) ont limité leurs versements afin de réduire leur déficit budgétaire pour respecter les exigences de la communauté internationale, et des problèmes sont également intervenus dans la répartition des quotes-parts devant être reversées à chaque État.

33Au total, l’impact des institutions communautaires a été très peu perceptible avant 1994. Les structures institutionnelles de l’UDEAC étaient incapables de contribuer efficacement au processus d’intégration. Elles sont restées totalement paralysées en raison de l’absence de financement. En plus, dans leur élaboration, elles n’ont pas pris en compte les réalités régionales sur le plan culturel, géographique, etc. (Oyaya, 2001).

34Depuis 1994, ces pays (ceux de l’UDEAC) ont mis en œuvre des réformes (réforme de la politique monétaire, assainissement du système bancaire et financier, surveillance multilatérale des politiques budgétaires, etc.) donnant une nouvelle impulsion à la coopération institutionnelle. Cette nouvelle coopération sous-régionale marque une évolution remarquable tant dans sa formulation que dans son articulation. Elle permet d’espérer sur de nombreux points une plus grande efficacité.

Les effets de la coopération après les réformes

35Pour les besoins de clarté, distinguons les trois dimensions importantes de la réforme pour bien apprécier l’impact des trois effets de la nouvelle coopération.

36Sur le plan monétaire tout d’abord, les effets de « création institutionnelle » et de « dilution de préférence » ont joué favorablement dans la réforme des instruments de la politique monétaire. En effet, la politique monétaire a subi plusieurs modifications importantes. La programmation monétaire d’essence monétariste remplace les anciennes procédures des avances automatiques et de cotes globales. Pour plus de transparence et de crédibilité, elle procède par une préannonce des objectifs de la politique monétaire et lie désormais la croissance de la quantité de monnaie en circulation dans chaque pays directement à la prévision d’évolution des variables réelles (croissance, balance des paiements, des finances publiques, etc.). Le marché monétaire assure désormais, depuis 1996, les demandes de refinancement à court et à moyen terme des banques et des établissements de crédits éligibles. Sa mise en fonction, tout en soulageant la Banque centrale, permettra à celle-ci de se consacrer aux nouvelles missions que lui assigne son statut. Celui-ci lui accorde théoriquement sur le plan institutionnel une certaine indépendance vis-à-vis du politique. Cette indépendance se traduit par la définition claire de l’objectif de la politique monétaire. Sur ce point, il y a une avancée importante car, contrairement aux anciens statuts de la BEAC, où l’objectif de la politique monétaire était peu visible, les nouveaux statuts lui assignent prioritairement la stabilité des prix interne et externe, et sans préjudice à cet objectif le soutien de l’activité économique (croissance et emploi). Sans que cela soit un effet de mode, l’objectif de stabilité des prix s’appuie sur de solides études théoriques (Schiller, 1996), mais aussi sur l’expérience empirique des pays de la CEMAC qui a montré la présence régulière de rythmes d’inflations différents d’un pays à l’autre, facteur de distorsion de prix. De plus, le Conseil d’administration, désormais présidé par le gouverneur de la Banque centrale facilite la prise de décisions et leur exécution rapide. Ainsi, le gouvernement a, en fonction de la conjoncture économique sous-régionale et des pays partenaires, la possibilité de modifier à la hausse comme à la baisse le taux d’intérêt directeur. Cette indépendance va être renforcée dès la mise en œuvre des réformes dites de la deuxième génération, qui prévoit notamment la création d’un comité monétaire composé de six membres, donc un par État. Le gouverneur [25] de la Banque centrale sera nommé pour un mandat de sept ans non renouvelable, alors que les autres membres seront nommés pour six ans, non renouvelable également. Dans le cadre du renforcement des infrastructures, une procédure de sécurisation du système de paiement communautaire est en cours de réalisation, avec la mise en place d’une centrale de bilans qui produira des bilans normalisés des entreprises, la constitution d’une centrale de risque qui enregistrera tous les incidents de paiements afin d’instaurer la confiance. Ces reformes qui marquent un pas important dans le sens d’un renforcement de la coopération institutionnelle sur le plan monétaire, appellent cependant des évolutions supplémentaires allant par exemple vers une grande autonomie des instruments de la politique monétaire.

37Sur le plan financier ensuite, les effets de « création institutionnelle » et de la « dilution des préférences » particulièrement, ont eu un impact significatif et positif dans le cadre de la restructuration du système bancaire et financier. En effet, deux mesures importantes ont été prises au niveau communautaire. Elles concernent d’une part l’harmonisation des conditions d’exercice de l’activité bancaire, et d’autre part la création de la Commission bancaire de l’Afrique centrale (COBAC). Cette institution assure désormais le contrôle prudentiel des banques et établissements de crédits exerçant dans les six États de la CEMAC. Ainsi, de nouveaux ratios de solvabilité et de liquidité ont été définis. Ils sont destinés à préserver la liquidité et la solvabilité des banques, de même que l’équilibre de leurs ressources par rapport aux emplois et à la qualité des engagements qu’elles peuvent souscrire, de manière à préserver la crédibilité de l’ensemble du système. La COBAC a largement contribué à l’assainissement du système bancaire dans la sous-région bien qu’ayant conduit à des paradoxes (Avom et Eyeffa Ekomou, 2007). Son rôle de régulation a été progressivement accepté, malgré les réticences initiales de certains acteurs. Elle accorde et retire des agréments, effectue des contrôles sur place ou sur pièce, selon la réglementation. Cet assainissement des systèmes bancaires a été complété par celui du secteur des assurances, de la micro-finance, des caisses de prévoyance sociale, de la fiscalité et de l’épargne dans le cadre de la réforme fiscalo-douanière. D’autres traités ont concerné l’ensemble des pays de la zone franc, avec notamment ceux instituant la Conférence interafricaine des marchés d’assurance (CIMA) et la Conférence interafricaine de la prévoyance sociale (CIPRES). La « dilution des préférences » a moins bien joué lorsqu’il a fallu choisir le siège du futur marché financier régional. La préférence communautaire étant allée au Gabon, le Cameroun [26] a choisi une option nationale en créant sa propre bourse, dont la première cotation des titres de la société des Eaux minérales du Cameroun a eu lieu le 30 juin 2006. Cette cotation marque ainsi le début effectif de fonctionnement du marché financier camerounais.

38Sur le plan de l’économie réelle enfin, la surveillance multilatérale des politiques budgétaires a été mise en œuvre. Elle s’appuie sur la définition d’indicateurs macro-économiques de convergence [27] qui jouent le rôle de signaux permettant de prévenir tout dérapage et de préserver la discipline communautaire. Cette surveillance multilatérale devrait progressivement aboutir à une véritable coordination des politiques budgétaires (Avom, 2007). Dans cette perspective, il est prévu que les États membres harmonisent, au cours de la première étape de la construction de l’Union économique, leurs législations dans divers domaines (investissements, marché du travail, etc.), ainsi que leurs calendriers budgétaires [28], leurs comptabilités nationales et les données macro-économiques nécessaires à l’exercice de la surveillance multilatérale. Cette harmonisation comptable est supposée permettre une bonne lisibilité des effets des différentes politiques macroéconomiques, ainsi qu’une meilleure comparaison. Pour atteindre le niveau de coordination souhaité, les États doivent, d’après le traité, coopérer à travers un système de surveillance multilatérale bâti autour des arrangements institutionnels. Les mécanismes de la surveillance multilatérale sont concentrés autour de trois objectifs principaux. Il y a d’abord la stabilité de la monnaie commune ensuite la bonne exécution des programmes d’ajustement structurel appuyés par la communauté économique et financière internationale, et particulièrement par le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale (BM), et enfin la nécessité de promouvoir une croissance économique saine et durable, en vue d’améliorer le bien-être des populations communautaires.

39L’effet de « dilution des préférences » a très peu joué à ce niveau. Malgré les efforts et la volonté des gouvernements, rares sont les pays qui depuis leur mise en œuvre ont tous régulièrement respectés les différents pays (Avom et Gbetnkom, 2003). La procédure de sanction pourtant prévue en cas de non-respect n’a été déclenchée contre aucun membre. Il va sans dire que les mesures coercitives sont certes nécessaires pour crédibiliser les réformes, mais les faire appliquer demeure une gageure.

40L’on peut aussi noter avec satisfaction que la capacité institutionnelle d’intervention de la CEMAC a été renforcée avec un certain nombre de dispositifs adoptés récemment et allant dans le sens d’une application du traité. Une Cour de justice communautaire a été créée et est implantée à N’Djamena au Tchad. Elle est composée de deux chambres : la Chambre des comptes et la Chambre judiciaire. Son objectif est de sécuriser l’environnement économique et judiciaire, indispensable au développement harmonieux des affaires. Une Commission interparlementaire (CIP) appelée à se transformer en un Parlement communautaire a été créée. Elle est implantée à Malabo en Guinée équatoriale. Le futur Parlement communautaire comprendra 60 membres à raison de 10 membres par pays.

41Ces réformes sont complétées au niveau régional par l’uniformisation des règles juridiques en matière de droit des affaires et du travail avec la mise en place de juridictions régionales dans le cadre du traité de l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA). Sur le plan de l’éducation, il y a par exemple la formation commune des personnels administratifs des administrations économiques et financières dans le cadre du programme de la Gestion des politiques économiques (GPE) financée principalement par la Banque mondiale. Nous pouvons noter enfin la mise en place d’une cellule d’appui pour la publication et l’harmonisation des statistiques économiques et financières des pays (AFRISTAT).

Conclusion

42Cet article a permis, en s’appuyant sur la nouvelle théorie économique des institutions, d’apprécier les anciens et les nouveaux instruments de l’intégration économique dans la zone CEMAC. Il ressort en effet de cette analyse deux conclusions majeures. D’une part, l’ancien régionalisme n’a pas conduit aux résultats espérés, malgré les avantages de la coopération monétaire. D’autre part, le nouveau régionalisme qui diffère du premier permet d’espérer des résultats assez positifs. Ainsi a-t-on perçu quelques avancées appréciables dans les trois principaux domaines de la coopération. Les instruments de la politique monétaire ont été renforcés par la mise en place de la programmation monétaire et la création d’un marché monétaire. Les activités bancaires sont désormais régulées dans le cadre d’une réglementation communautaire. La surveillance multilatérale, prémisse d’une véritable policy mix[29] permet de rapprocher les préférences communautaires en matière de politique budgétaire afin de limiter les comportements de « passager clandestin » qui sont régulièrement apparus dans le passé. De nombreux points importants de coopération inscrits dans le traité de 1994 ne sont pas encore entrés en vigueur (l’absence d’une politique agricole commune, la coopération industrielle, etc.) ou butent tout simplement sur les préférences et irrédentismes nationaux (marché boursier, liberté des mouvements de personnes et de biens [30]).

43Pour qu’elle soit efficace, la nouvelle coopération institutionnelle devra améliorer la productivité des entreprises, lever les contraintes administratives et l’incertitude des règles juridiques, favoriser la mobilité des facteurs de production et l’investissement. Elle doit aussi pouvoir être en mesure de renforcer les modes de gestion coopératifs permettant une meilleure articulation entre les préférences nationales et communautaires. Il apparaît en dernière analyse que des ajustements sont nécessaires pour maintenir la nouvelle dynamique d’intégration. Ils doivent permettre d’internaliser la résolution des conflits sous-régionaux aux conséquences néfastes, de résoudre les problèmes du financement des institutions et de promouvoir la bonne gouvernance. Ces problèmes sont importants parce que les changements institutionnels entraînent des gagnants et des perdants. Généralement, lorsque ces derniers sont plus nombreux, les changements sont extrêmement lents à se produire en raison de leur grande opposition. En revanche, les évolutions institutionnelles sont souvent favorables lorsque les gagnants sont suffisamment puissants pour imposer aux perdants éventuels des compensations appropriées après les réformes. Dans la CEMAC, les deux pays leaders que sont le Cameroun et le Gabon ne coopèrent pas suffisamment pour impulser les réformes nécessaires. Les blocages régulièrement enregistrés dans le processus d’intégration s’expliquent par cette absence de coopération teintée d’asymétrie d’information. L’impulsion de la deuxième génération réforme viendrait probablement de la Guinée équatoriale. Ce pays revendique en s’appuyant sur l’importance actuelle de ces réserves de changes [31] pour réclamer une refonte en profondeur des institutions communautaires. Cette réforme concernerait aussi bien les statuts de la BEAC que ceux du secrétariat exécutif de la CEMAC. Ainsi, à défaut d’un poste de Gouverneur tournant comme souhaite la Guinée équatoriale, un deuxième poste de vice-gouverneur sera créé et lui sera statutairement attribué, il est également prévu un comité de politique monétaire. De même, le secrétariat exécutif de la CEMAC devra disparaître pour laisser la place à une Commission avec des commissaires comme en Europe et dans l’UEMOA.

44Au total, toutes ces réformes, il va sans dire, exigent des moyens financiers importants dont les contraintes budgétaires nationales peu flexibles rendent difficiles non seulement la collecte mais surtout le transfert des ressources issues de la Taxe communautaire d’intégration (TCI) [32] au secrétariat exécutif. Mais il convient de souligner finalement que, plus que de moyens, la CEMAC souffre singulièrement d’un manque d’ambition politique et de la persévérance dans ses différentes réformes institutionnelles et structurelles.

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Notes

  • [1]
    Chargé de cours à la Faculté des sciences économiques et de gestion de l’Université de Yaoundé II-Soa (Cameroun) et membre du Centre d’étude et de recherches en économie et gestion (CEREG), ddavom99@ hotmail. com. Nous remercions les deux référés anonymes de la revue Afrique contemporaine, ainsi que Bernadette Nyamouth Zanga, Mireille Etogo Messomo, Angéline Nyassam, Cécile Claude Ikito et Paul Ekoumba pour leurs remarques et commentaires. Toutefois, nous restons selon la formule consacrée entièrement responsable des erreurs et omissions qui peuvent subsister dans le texte.
  • [2]
    Pour un approfondissement des autres conceptions de l’intégration, notamment la conception volontariste défendue par les organisations du Sud telles que la Commission économique des pays de l’Amérique latine (CEPAL) ou la Commission économique de l’Afrique (CEA), voir Hugon (2002). Il est instructif de noter que cette conception n’a jamais été mise en œuvre, sauf dans les économies planifiées comme au Vietnam.
  • [3]
    Communauté économique du charbon et de l’acier.
  • [4]
    Qu’on se souvienne, pour s’en convaincre, du mouvement panafricaniste des années 1960 qui a inspiré les projets de société dirigés par Nkrumah et Houphouët Boigny, pour ne citer que ces deux-là, qui apparaissent comme les plus représentatifs.
  • [5]
    Marché commun du Centre d’Amérique.
  • [6]
    On peut citer le numéro spécial (n° 2-3, septembre 2003) de la Revue d’Économie du Développement, dont l’essentiel des articles porte sur le rôle des institutions dans les stratégies contribuant à rendre efficaces les politiques de lutte contre la pauvreté.
  • [7]
    L’UMOA créée en 1968 a été renforcée par la création d’une union douanière dans le cadre d’un traité plus ambitieux en 1994 qui crée l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). Les pays membres sont : Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo.
  • [8]
    Il convient toutefois de rappeler que le FCFA à l’origine signifiait Franc des colonies françaises d’Afrique, et qu’aujourd’hui, la signification diffère selon les deux unions : Franc de la Communauté financière d’Afrique dans l’UEMOA et Franc de la Coopération financière d’Afrique dans la CEMAC.
  • [9]
    Voir He Yong (1994).
  • [10]
    Selon North (1991) : “Institutions are the humanly divised constrains that structure political, economic and social interaction”.
  • [11]
    Ces trois auteurs ont reçu le prix Nobel d’économie en 2001 pour leurs travaux « sur les marchés avec asymétrie d’information ». Les discours Nobel des trois auteurs résumant leurs apports sont reproduits dans The American Economic Review, vol. 92, n° 3, juin 2002.
  • [12]
    C’est l’asymétrie d’information ex-ante qui survient par exemple sur le marché du crédit lorsqu’une hausse des taux d’intérêt élimine les bons risques.
  • [13]
    C’est la situation où l’on sélectionne un mauvais risque en pensant qu’il est un bon.
  • [14]
    C’est l’asymétrie d’information ex post qui se traduit une fois le contrat signé par le développement des comportements opportunistes de la part des agents économiques.
  • [15]
    Nabli et Nugent (1989).
  • [16]
    Le passager clandestin correspond à une situation où un agent économique souhaite profiter des effets positifs d’une action sans avoir au préalable contribué à sa réalisation.
  • [17]
    L’externalité est un phénomène qui apporte un bénéfice appréciable (externalité positive) ou inflige un préjudice significatif (externalité négative) à une ou plusieurs personnes qui n’ont pas été parties prenantes et consentantes du processus de décision qui a abouti directement à l’effet produit.
  • [18]
    Nouveau Partenariat pour le Développement de l’Afrique.
  • [19]
    C’est l’une des craintes exprimées régulièrement par de nombreux observateurs dans le cas d’une Europe élargie à vingt-cinq membres.
  • [20]
    Le Cameroun a procédé en 1983 et 1984 à deux vagues de recrutement de 1 500 et 1 700 diplômés de l’enseignement supérieur.
  • [21]
    Les États membres n’ont pas payé leurs cotisations respectives. L’école reste certes statutairement ouverte aux étrangers, mais leur admission est autorisée dans la limite des places disponibles et contre le paiement des frais de scolarité qui s’élèvent à un million de FCFA (environ 1 500 euros), contre seulement cinquante mille FCFA (environ 75 euros) pour les nationaux par année de scolarité.
  • [22]
    L’École nationale d’administration et de magistrature, équivalente en France de l’École nationale d’administration (ENA). Une structure similaire existe en RCA, Congo, Gabon.
  • [23]
    Nous pouvons citer à cet effet la Fondation pour l’enseignement supérieur en Afrique centrale à Brazzaville, qui fonctionna jusqu’au début des années 1960 et fut le Centre universitaire commun pour les États d’expression française. Ce centre a permis de former des cadres africains, dont certains ont pris des responsabilités importantes dans leurs pays respectifs au lendemain des indépendances (Gbetnkom, 1995).
  • [24]
    Le Tchad a sérieusement envisagé pendant la phase d’étude de faisabilité le tracé passant par la Libye.
  • [25]
    Ce poste statutairement réservé au Gabonais va certainement être tournant.
  • [26]
    Ce pays bloque également le démarrage des activités de la bourse régionale de Libreville, en refusant de nommer les responsables camerounais au sein de cette structure communautaire.
  • [27]
    Les critères et indicateurs de convergence ont été révisés en août 2001, et se présentent depuis janvier 2002 comme suit : (i) un solde budgétaire de base (hors dons) rapporté au PIB nominal positif ou nul, à l’horizon 2004. Il est calculé en base engagements et représente la différence entre les recettes totales hors dons et les dépenses totales hors investissements financés sur ressources extérieures. Il présente l’avantage de mieux révéler la position budgétaire de l’État ; (ii) un taux d’inflation annuel moyen inférieur ou égal à 3 %, dont l’objectif est d’assurer une convergence des taux d’inflation entre les différents pays de la communauté ; (iii) un taux d’endettement public extérieur inférieur ou égal à 70 % du PIB en 2004, dont l’objectif est de contrôler à terme le problème d’endettement excessif des États ; (iv) la non-accumulation d’arriérés intérieurs et extérieurs sur la gestion de la période courante. Ce critère s’accompagne d’un plan d’apurement sur une période de trois ans, à fin 2004, du stock d’arriérés existant à fin 2000.
  • [28]
    Le Cameroun vient de passer à une année budgétaire allant du 1er janvier au 31 décembre.
  • [29]
    La policy mix désigne, au sens étroit, la combinaison des politiques monétaires et budgétaires. Au sens large, elle caractérise la stratégie de la politique économique poursuivie en prenant en compte la cohérence entre politiques macro-économiques et réformes structurelles.
  • [30]
    Ces dernières années, pour motifs de sécurité et au mépris des règles communautaires, des expulsions des étrangers ressortissants des pays membres se sont multipliées au Gabon. Plus récemment, au début du mois mars 2004, le gouvernement de Guinée équatoriale sous le prétexte d’un coup d’État manqué a expulsé les étrangers, notamment les Camerounais dont le nombre est estimé à près de 1 500. L’ambassadeur du Cameroun à Malabo a été rappelé pour consultation selon la formule consacrée.
  • [31]
    La Guinée-équatoriale contribue actuellement grâce à ses importantes ressources pétrolières pour un peu plus de mille milliards aux réserves de la Banque centrale. Obiang Nguema, chef d’État de la Guinée équatoriale, n’a pas manqué de le rappeler lors du sommet de la CEMAC tenu à Malabo en 2006. Il a reçu un mandat de piloter une étude sur la réforme des institutions dont l’échéance a été fixée en 2008.
  • [32]
    Dans le cadre de la recherche des financements des institutions communautaires, une taxe communautaire d’intégration a été instituée. Elle est entrée en vigueur seulement à partir de janvier 2002. Par exemple, en 2004, les recettes de cette taxe étaient de 13 841 650 597, seulement 5 383 362 207 ont été effectivement versés dans les caisses du secrétariat exécutif de la CEMAC (Source Agent comptable de la CEMAC).
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