Notes
-
[*]
Doctorante en science politique, Université Paris I-Panthéon-Sorbonne, attachée pour ses recherches à l’Institut d’études éthiopiennes de l’Université d’Addis Abéba et au Centre français des études éthiopiennes (Addis Abéba).
-
[1]
Selon l’expression de Laïdi (1988). Voir également Kuhne (1991). Le continent africain aurait un intérêt moindre depuis la fin de la guerre froide et ne représenterait dès lors plus une priorité dans l’agenda des Nations unies, et ce, malgré l’engagement maintes fois réitéré pour le continent du Secrétaire Général des Nations unies, Kofi Annan, qui a estimé que 60 % de tous les efforts des Nations unies étaient orientés vers les besoins africains.
-
[2]
L'OUA/UA s'est impliquée dans tous les conflits africains (à l'exception de celui apparu au Nord de l'Ouganda), à savoir au Sahara occidental, en Angola, au Mozambique, en Casamance, en Ethiopie-Erythrée, en Somalie, en Côte d'Ivoire, en République démocratique du Congo, en République du Congo, en République centrafricaine, au Burundi, aux Comores, au Libéria et au Soudan.
-
[3]
Il était composé de la troïka (le président sortant, le président en exercice et le président rentrant) et des membres du bureau de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement. Il disposait d’instruments opérationnels tels que le secrétariat général, le Centre de gestion des conflits, le Système d’alerte précoce et le Fonds de la paix. Il fonctionnait au niveau des Chefs d’Etat, des ministres et des ambassadeurs accrédités auprès de l’OUA. Il pouvait être convoqué à la demande du Secrétaire Général ou de n’importe quel Etat membre. Pour les détails, voir OUA (2001), p. 5.
-
[4]
OUA (1993), p. 6.
-
[5]
Ibidem, p. 12-21. A titre d’exemples, il convient de citer la Commission ad hoc sur le différend algéro-marocain qui a fonctionné de 1963 à 1967, le Comité ad hoc sur les différends inter-africains créé en juillet 1977 qui a notamment réglé le conflit entre l’Ouganda et la Tanzanie, le Comité des bons offices des huit sur le différend Somalie-Ethiopie créé par la dixième session ordinaire de la Conférence en mai 1973, la Commission ad hoc présidée par le président Kenyatta envoyée en 1964 au Congo (Léopoldville), au Congo (Brazzaville) et au Burundi, ou encore le Comité permanent sur le Tchad dans les années 1980.
-
[6]
OUA (Secrétariat général) (2001).
-
[7]
Notamment OUA (1994, 1998a, 1998b).
-
[8]
Muyangwa et Vogt (2000), p. 32.
-
[9]
Voir OUA (2002a).
-
[10]
une pression externe exercée par les principaux partenaires de l’Afrique (Etats-Unis, France, Royaume-Uni et ONU) visant à responsabiliser davantage les pays africains dans la gestion de la paix et de la sécurité.
-
[11]
Plusieurs travaux de réflexion ont été menés dans le cadre de l’OUA/UA, en particulier OUA (2002b).
-
[12]
Voir dans ce sens Engberg (2002), p. 26-27.
-
[13]
Ledit protocole est entré en vigueur le 26 décembre 2003, après avoir été ratifié par le nombre requis d’Etats membres, à savoir 27. Au 30 mai 2003, 39 Etats membres avaient signé le protocole et 6 l’avaient ratifié. Mi-mai 2004, 32 Etats membres l’avaient ratifié. Voir UA (2003), p. 26-28.
-
[14]
Président de la Commission de l’Union africaine depuis juillet 2003.
-
[15]
Allocution d’Alpha Oumar Konaré, président de la République du Mali, au XXXVIIe sommet de l’OUA, Lusaka, 9-11 juillet 2001, p. 8-9.
-
[16]
C’est-à-dire notamment le besoin de représentation de toutes les régions du monde pour la gestion d’une sécurité globale, d’où la réclamation d’un siège pour l’Afrique, l’Asie et l’Amérique latine respectivement ou encore la nécessité de prendre en compte les changements intervenus depuis 1945.
-
[17]
Voir aussi Cilliers (2003), p. 6-8. Le module d’alerte précoce est basé sur des indicateurs politiques, économiques, sociaux, militaires et humanitaires clairement définis et acceptés, et les résultats des analyses permettront de déterminer les actions politiques à prendre rapidement par le CPS afin d’éviter que les situations de crise potentielle ne dégénèrent en conflits ouverts. Le « Conseil des sages » pourra jouer le rôle d’un forum rassemblant la force morale de personnalités africaines éminentes dans la prévention et la résolution des conflits (d’anciens chefs d’Etat qui ont montré une direction exemplaire et une intégrité personnelle alors qu’ils étaient en poste, des lauréats du prix Nobel de la paix, des spécialistes des questions continentales, des universitaires et des praticiens de haut niveau).
-
[18]
UA (2004a), partie III : Modalités de sélection des membres.
-
[19]
Idem, partie II : Critères requis.
-
[20]
Il convient de noter la subtilité de langage utilisée dans la mesure où le continent atteste d’un développement démocratique inégal.
-
[21]
La République fédérale islamique des Comores, la Guinée Bissau, la République démocratique du Congo, la République centrafricaine, Sao Tomé et Principe, les Seychelles, la Somalie et le Liberia.
-
[22]
Le choix de deux types de mandat a été fait après consultations et compromis entre chefs d’Etat lors du sommet de Durban en juillet 2002.
-
[23]
Le continent africain est découpé en cinq sous-régions : Afrique du Nord (6 pays : Algérie, Egypte, Libye, Mauritanie, République arabe sahraouie démocratique, Tunisie) ; Afrique de l’Ouest (16 - 1, soit 15 pays : Bénin, Burkina Faso, Cap Vert, Côte d’Ivoire, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée Bissau, Liberia, Mali, Niger, Nigeria, Sénégal, Sierra Léone, Togo) ; Afrique centrale (10 pays : Burundi, Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Rwanda, Sao Tomé et Principe, Tchad) ; Afrique de l’Est (12 pays : Comores, Djibouti, Erythrée, Ethiopie, Kenya, Madagascar, île Maurice, Ouganda, Seychelles, Somalie, Soudan, Tanzanie) ; Afrique australe (10 pays : Afrique du Sud, Angola, Botswana, Lesotho, Malawi, Mozambique, Namibie, Swaziland, Zambie, Zimbabwe). Il convient de préciser que la Mauritanie a demandé son transfert de la région de l’Ouest vers la région du Nord lors de la session ordinaire du Conseil exécutif tenue les 15 et 16 février 2004, demande qui a été entérinée par le Conseil.
-
[24]
Pour mémoire, l’Algérie le 29 janvier 2003 et la Libye le 24 juin 2003. Au 17 février 2004, l’Egypte, la Mauritanie, la Tunisie et la République arabe sahraouie démocratique n’avaient pas encore ratifié ledit protocole. Il convient de noter que le prestige du président Bouteflika et l’expérience accumulée par l’Algérie dans la résolution des conflits (Nord du Mali, Nord du Niger, Tchad/Libye, Ethiopie-Erythrée) ont indubitablement constitué une valeur ajoutée pour ce pays.
-
[25]
A savoir la République centrafricaine, la République démocratique du Congo ainsi que Sao Tomé et Principe (ce dernier ne disposant pas, qui plus est, de représentation diplomatique à Addis Abéba). Le Tchad avait, quant à lui, régularisé ses arriérés courant 2003.
-
[26]
En particulier le sous-comité consultatif des questions administratives, budgétaires et financières ; celui des programmes et Conférences ; le sous-comité chargé des réfugiés ; celui des contributions ; le sous-comité chargé de la gestion du Fonds spécial d’assistance d’urgence pour la sécheresse et la famine en Afrique ; le sous-comité permanent de la coopération afro-arabe ; et celui sur les réformes des structures.
-
[27]
A ne pas confondre avec la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (CEMAC), regroupant exclusivement des Etats émettant le franc CFA d’Afrique centrale.
-
[28]
Le COPAX est un mécanisme de promotion, de maintien et de consolidation de la paix et de la sécurité en Afrique centrale qui a été créé par la décision n° 001 Y/FEV/25/1999 de la Conférence au sommet des Chefs d’Etat et de Gouvernement des pays d’Afrique centrale réunie à Yaoundé le 25 février 1999. Il « a pour but la prévention, la gestion et le règlement des conflits en Afrique centrale, ainsi que les autres actions de promotion, de maintien et de consolidation de la paix et de la sécurité dans la sous-région » (article 2).
-
[29]
Voir note 22. La RDC appartient à l’Afrique centrale et l’île Maurice ainsi que la Tanzanie font partie de l’Afrique de l’Est.
-
[30]
L’Afrique du Sud a de facto bénéficié de ses atouts « classiques », à savoir sa légitimité historique, son potentiel humain, logistique et militaire, sa contribution en troupes au sein de la mission de l’UA au Burundi (MIAB) ainsi que de son rôle de médiateur notamment dans le conflit en République démocratique du Congo, enfin d’une capacité contributive au sein de l’UA située au plafond.
-
[31]
Voir UA (2004b, c).
-
[32]
UA (2004c), p. 9.
-
[33]
En juin 2004, 33 Etats membres de l'UA sur 53 au total avaient ratifié le protocole, au 4 octobre ils étaient 36 à l'avoir fait et en décembre, 37. Les pays qui ne l'ont pas encore ratifié sont les suivants : le Botswana, la République centrafricaine, le Cap Vert, la Côte d'Ivoire, Djibouti, la République démocratique du Congo, l'Egypte, l'Erythrée, la Guinée Bissau, la Guinée, le Libéria, la Mauritanie, les Seychelles, la Somalie, le Swaziland et la Tunisie.
-
[34]
Les présidences du CPS ont été successivement attribuées au Mozambique (mi mars-avril 2004), au Nigeria (mai 2004), au Sénégal (juin 2004) et à l’Afrique du Sud (juillet 2004) suivant l’ordre alphabétique en langue anglaise, se reporter à l’annexe n° 2.
-
[35]
L'UA dispose de bureaux de représentation au Caire, à Conakry, à Lagos, à Lilongwé, à Nairobi, à Yaoundé, auprès des Nations unies à New York et à Genève ainsi qu'auprès de l’Union européenne à Bruxelles. Elle dispose également de bureaux de liaison pour ses missions au Sahara occidental, au Burundi, en Côte d'Ivoire, aux Comores, en Ethiopie, en Erythrée, au Libéria et au Soudan. Voir supra.
-
[36]
Une tendance dans ce sens semble se dégager comme l’atteste la décision prise par certains pays d’Afrique de l’Est le 5 juin 2004, lors du 21e sommet régional sur le Burundi, d’imposer des sanctions au mouvement d’opposition burundais, le Palipehutu/fln, s’il persistait dans son refus de se joindre au processus de paix.
-
[37]
A savoir l’Afrique du Sud, l’Ethiopie et le Mozambique.
-
[38]
L’UA dispose de bureaux de représentation au Caire, à Conakry, à Lagos, à Lilongwé, à Nairobi et à Yaoundé. Elle dispose également de bureaux spécialisés pour ses missions au Burundi, en Côte d’Ivoire, aux Comores, en Erythrée, au Liberia et au Soudan.
-
[39]
MUAS II (en dollars US) : 15 037 593,98 (Canada), 100 604 794,44 (Union européenne), 1 000 000 (Allemagne), 22 080 000 (Royaume Uni), 750 000 (Norvège), 5 020 848,02 (Pays Bas), 40 386 485,05 (Etats Unis d'Amérique), 992 000 (France), 554 000 (Italie). Soit un total de contributions de 186 425 721,49 dollars US. Source : UA
-
[40]
GTID (en dollars US) : 750 000 (Danemark), 250 000 (Norvège), 1 250 000 (Pays Bas), 500 000 (Suède). Soit un total de contributions de 2 750 000 dollars US. Source : UA.
-
[41]
Pourparlers d'Abuja (en dollars US) : 1 069 000 (Union européenne), 312 500 (Royaume Uni), 375 000 (Pays Bas), 125 000 (Suède). Soit un total de contributions de 1 881 500 dollars US. Source : UA.
1 Le courant de pensée partisan de l’« afro-pessimisme », qui se nourrit entre autres du « déclassement international » explicite de l’Afrique [1] et qui se trouve corroboré par un certain découragement des Africains eux-mêmes, a pour alibi la persistance actuelle d’une dizaine de conflits sur ce continent [2]. Or la réponse à cette situation consiste en la prise en charge par l’Afrique elle-même de la résolution de ses propres conflits, la paix constituant une condition préalable à la sécurité et au développement du continent. C’est la raison pour laquelle les Etats africains ont décidé, par la déclaration du Caire de juin 1993, de créer un instrument à l’échelle continentale, le « Mécanisme pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits » de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) dont la direction et la coordination des activités entre les sessions ordinaires de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement était assurée par l’Organe central [3]. Il a été remplacé par le Conseil de paix et de sécurité (CPS) de l’Union africaine (UA), lequel a été officiellement lancé au niveau des Chefs d’Etat à l’occasion de la Journée de l’Afrique, le 25 mai 2004, au siège de l’organisation, et ce, après un long travail conceptuel ainsi que d’intenses consultations entre Etats membres de l’Union.
2 Ces deux étapes qualitatives ont matérialisé une volonté de résolution des conflits qui existait déjà au moment de la création de l’OUA, à travers l’établissement de la « Commission de médiation, de conciliation et d’arbitrage » qui n’a, malheureusement, jamais fonctionné [4] et la mise en place de différents comités ad hoc pour la résolution des conflits. Ces comités qui ont pallié l’absence d’un mécanisme permanent ont, quant à eux, donné la preuve de leur efficacité [5]. Ce n’est pourtant qu’au début des années 1990, avec la prolifération de conflits internes dévastateurs à travers le continent dans le contexte de l’après-guerre froide, que les Etats africains ont décidé de matérialiser cette stratégie en substituant à l’approche ad hoc un cadre permanent opérationnel et structuré.
3 C’est dans le prolongement de cette stratégie que le Mécanisme pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits a été mis en place avec pour objectifs, d’une part, de prévenir le risque d’éclatement de conflits latents ou potentiels et, d’autre part, de réunir les conditions propices à la gestion et à la résolution des conflits. Une telle stratégie devait, selon ses concepteurs, servir de complément à l’objectif de développement du continent qui était constamment entravé par la multiplication des conflits inter et intra-étatiques.
4 Ce nouveau mécanisme, qui a constitué une première sur la scène africaine et internationale, a non seulement permis aux pays africains de donner un contenu concret à la « culture de la paix » qui représente une aspiration forte pour l’ensemble de leurs peuples, mais a surtout donné à l’Afrique l’occasion de capitaliser une expérience non négligeable dans la quête collective de recherche de solutions durables aux conflits.
5 En réalité, la transformation du mécanisme, et en particulier de son Organe central, en Conseil de paix et de sécurité s’inscrit dans le cadre d’une mutation institutionnelle plus large, décidée à Syrte (Libye) en septembre 1999 et visant à transformer l’OUA en UA. En effet, au moment où ils commençaient à s’engager concrètement dans ce processus de transformation, les chefs d’Etat ont, lors du sommet de l’OUA à Lusaka en juillet 2001, adopté une décision visant à conserver dans un premier temps le mécanisme comme un organe de l’Union, conformément à l’article 5.2 de l’Acte constitutif de l’Union africaine. Ils ont toutefois demandé au Secrétaire Général d’initier une réflexion qui devait aboutir en fin de parcours à la révision des structures, des procédures et des méthodes de travail de l’Organe central, y compris la possibilité de modifier son appellation.
6 Cette réflexion a abouti à l'élaboration et à l'adoption du protocole relatif à la création du CPS lors de la première session ordinaire de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Union africaine à Durban (Afrique du Sud) le 9 juillet 2002. Bien que celle-ci ait suscité l’enthousiasme et l’adhésion de l’ensemble des Etats membres, le Conseil a également été source de plusieurs interrogations, notamment celle de savoir en quoi il différait de l’Organe central, s’il représentait un simple prolongement de ce dernier ou s’il pouvait constituer une réplique, ceteris paribus, du Conseil de sécurité des Nations unies.
7 Dès lors, notre propos a pour ambition de faire le point sur les multiples faiblesses structurelles du Mécanisme pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits et les enseignements qui en ont été tirés, avant de définir les principes sur lesquels repose le CPS, le mandat qui lui est assigné et les critères qui déterminent sa composition. Au-delà de ce qui précède, nous procéderons enfin à une évaluation du fonctionnement et des premières activités du Conseil sur le théâtre des conflits.
L’Organe central du Mécanisme pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits de l’OUA : de la faiblesse fonctionnelle à la mutation structurelle
8 Peu de temps après la création de l’Organe central en 1993, le Secrétaire Général de l’OUA, Salim Ahmed Salim, a mené plusieurs réflexions visant à renforcer la capacité de l’organe afin d’en faire un instrument décisionnel et opérationnel efficace, qui serait la clef de voûte d’une nouvelle architecture de paix et de sécurité pour le continent africain.
Faiblesses fonctionnelles et décisionnelles de l’Organe central
9
Les analyses internes du Centre de gestion des conflits de l’OUA ont d’abord déterminé les faiblesses de l’Organe central du mécanisme avant de formuler un certain nombre de suggestions visant à améliorer la capacité opérationnelle de cet instrument [6]. Bon nombre de ces observations ont d’ailleurs été émises et développées par le Secrétaire Général de l’OUA à travers une série de propositions visant à renforcer l’efficacité dudit mécanisme [7]. Ces propositions, qui avaient pour objectif de pallier les insuffisances relevées, peuvent être résumées à travers les points suivants :
- la qualité de membre de l’Organe central n’était pas basée sur des critères établis, mais déterminée à la faveur de l’élection des membres du bureau de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement par le seul jeu de la rotation et de la répartition géographique ;
- les réunions de l’Organe central au niveau des ambassadeurs étaient mal préparées, voire banalisées. Les rares réunions de cet organe au niveau des ministres ou des Chefs d’Etat n’étaient pas convoquées au moment opportun (éclatement d’une crise ou gestion de situations conflictuelles), mais se tenaient presque de manière routinière en marge des sessions ordinaires de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement ou du Conseil des ministres, d’où le manque d’effectivité des réunions ;
- la présence au cours des réunions de l’Organe central des représentants des parties au conflit, voire leur participation au débat, avait pour conséquence de dissuader les membres de cet organe d’évoquer les « questions qui fâchent », quand ils n’étaient pas rappelés à l’ordre pour atteinte aux principes de « souveraineté » et de « non-ingérence » ;
- le manque d’implication effective des Etats membres de l’Organe central traduisait leur incapacité à aborder les questions d’une manière ferme ;
- l’incapacité pour l’Organe central d’intervenir dans une situation conflictuelle sans l’accord des parties concernées avait pour résultat de limiter ses prérogatives et de paralyser son action ;
- le mandat de l’Organe central manquait de clarté en ce qui concerne les opérations de maintien de la paix ;
- l’absence de volonté politique et d’engagements concrets allait de pair avec la faiblesse des moyens (financiers, logistiques, humains) pour faire face aux situations d’urgence. A ce constat s’ajoutait le fait que les puissances extra-africaines qui contribuaient financièrement au Fonds de la paix ou celles qui déployaient des moyens logistiques ou militaires le faisaient sur la base de leur propre agenda, quand n’étaient pas prises en compte des considérations qui ne servaient guère les intérêts et les objectifs de l’OUA ;
- l’implication directe ou sournoise de certains pays membres dans l’émergence et/ou l’exacerbation des conflits ainsi que les interférences des puissances extra-africaines compliquaient considérablement la recherche de solutions aux conflits (Somalie, République démocratique du Congo-RDC et Côte d’Ivoire) ;
- l’occultation de la réalité des faits, les approches démagogiques et les considérations d’intérêt à court terme empêchaient l’Organe central de prendre des décisions objectives, équilibrées et réalistes ;
- le fonctionnement de l’Organe central était aussi caractérisé par une difficulté d’échanges d’informations en temps opportun en raison des obstacles à la communication sur l’ensemble du continent africain et par l’absence d’un réseau crédible de suivi des conflits qui aurait pu, par le biais des points focaux, renforcer l’efficacité du système d’alerte rapide ;
- l’élaboration de rapports peu objectifs, voire orientés, sur les conflits était courante. En effet, ces rapports étaient rédigés de manière à ce qu’ils soient plus conformes aux attentes d’une ambassade donnée et de son Gouvernement et ne reflétaient pas forcément les faits réels des conflits. Cette attitude avait pour impact négatif de détourner l’attention de l’Organe central des vrais problèmes concernant les causes des conflits ainsi que les rôles des différents acteurs dans leur genèse et dans leur évolution ;
- le manque d’efficacité, de crédibilité et d’objectivité des missions d’enquête, d’information ou d’évaluation dépêchées par l’OUA dans les capitales des pays touchés par des conflits internes avait pour conséquence la rédaction de rapports peu équilibrés qui favorisaient les seuls points de vue exprimés par les Gouvernements et qui occultaient ainsi ceux des autres parties aux conflits ;
- de nombreuses difficultés entravaient la mise en œuvre des décisions prises par l’Organe central, à savoir des décisions ambiguës, un manque de moyens, des processus de suivi inadaptés ou encore le reniement par les parties au conflit des engagements auxquels elles avaient souscrits ;
- la faiblesse et le caractère peu incisif des décisions adoptées par l’Organe central faisaient que l’on se limitait à des constats, à des exhortations ou à des appels du fait que le mécanisme n’avait aucun pouvoir de rétention ou de sanction sur les parties réfractaires à la mise en œuvre des accords de paix ;
- la nature ethnique et/ou confessionnelle de certains conflits internes impliquait immanquablement l’émergence de solidarités transfrontalières dans un continent où le sentiment ethnique ou religieux semble souvent plus fort que l’identité nationale ;
- le manque de consensus était clairement établi sur les questions de paix et de sécurité pour au moins trois raisons : la prolifération des conflits, les influences extra-africaines ainsi que l’absence d’un cadre se référant à des valeurs et des normes communes qui pouvaient orienter les travaux de l’Organe central ;
- le manque de règles de procédure appropriées entravait le fonctionnement de l’Organe central, notamment en termes de quorum. C’est ainsi que l’absence régulière de ce dernier a contribué à l’annulation de nombreuses réunions alors que les conflits et les crises sur le continent apparaissaient quotidiennement et que leurs solutions ne pouvaient attendre que le quorum soit réalisé.
- d’une part, que l’OUA était restée un acteur périphérique dans la plupart des conflits du fait de l’ampleur de la tâche, de son manque d’expérience dans le domaine de leur gestion, des contraintes organisationnelles et financières, ainsi que de l’absence de consensus international sur les rôles impartis respectivement à l’Organisation des Nations unies (ONU) et à l’OUA ;
- d’autre part, que les principes consacrés par la charte de l’OUA limitaient son rôle dans la gestion des conflits dans la mesure où le respect de la souveraineté nationale entravait une intervention effective dans les conflits internes.
Evolution doctrinale et mutations structurelles
10
Partant du constat des faiblesses ci-dessus énumérées, le Secrétaire Général de l’OUA a recommandé aux Etats membres le lancement d’une réflexion et l’adoption d’un ensemble de mesures destinées à concrétiser l’objectif de renforcement et de consolidation du mécanisme. C’est dans ce cadre qu’il a prôné :
- la création d’un organe décisionnel et opérationnel avec un nombre de membres limité ;
- l’affirmation par les membres de leur volonté politique de contribuer à la restauration de la paix ainsi que de leur disponibilité à mobiliser des moyens logistiques et des ressources financières pour concrétiser les objectifs de prévention, de gestion et de règlement des conflits ;
- la nécessité d’une cohérence et d’une véritable cohésion dans le processus décisionnel ;
- le renforcement des représentations diplomatiques des pays membres du mécanisme à Addis Abéba, dotées de ressources humaines et de moyens de communication adéquats pour leur permettre à la fois d’être informées en temps réel de toute menace à la paix et à la sécurité sur le continent et de pouvoir contribuer à la promotion de solutions appropriées ;
- la promotion d’une collaboration étroite entre l’UA et les communautés économiques régionales (CER) africaines dans le cadre de la conception d’une architecture de sécurité approfondie pour le continent faisant appel à l’implication de tous les acteurs, et ce, sur le triple plan de la prévention (l’alerte rapide), de la gestion (les forces prépositionnées) ou de la résolution des conflits (notamment dans la phase de reconstruction post-conflit). Les expériences sous-régionales en matière de coopération dans le domaine de la paix et de la sécurité, en particulier celles de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et de la Communauté de développement de l'Afrique australe (South Africa Development Community, SADC), doivent servir la configuration continentale en matière de paix et de sécurité [9] ;
- le renforcement du cadre de coopération entre l’UA et l’ONU par la réaffirmation de la responsabilité première de cette dernière dans la préservation de la paix et de la sécurité ainsi que par une meilleure répartition des rôles ;
- la participation de la société civile africaine, notamment dans la promotion de la « culture de la paix » ;
- l’implication de l’UA sur les théâtres de conflit par l’envoi de missions d’enquête, de reconnaissance, d’observation et d’interposition ;
- la nécessité de prévoir un régime de sanctions contre tout Etat, groupe de pays ou d’individus (les mercenaires ou les auteurs de coup d’Etat) qui menaceraient la paix et la sécurité sur le continent.
-
une pression interne provenant, d'une part, des Etats membres soucieux d'impliquer de manière plus concrète l'organisation dans la restauration et la préservation de la paix en raison de la multiplication de conflits internes à travers le continent dans l'après-guerre froide et, d'autre part, de la Commission elle-même avec la prise de conscience par le Secrétariat des insuffisances de l'Organe central et la conduite consécutive d'une réflexion ayant abouti à une série de rapports qui appelait à la disposition par l'Organisation d'un véritable organe de gestion des conflits [10].
Cette double pression a eu pour conséquence de faire évoluer considérablement la doctrine africaine en matière de paix et de sécurité. C’est dans ce contexte que de nouveaux concepts ont été introduits comme par exemple la remise en cause du principe de non-ingérence dans les affaires internes des Etats membres, la possibilité d’imposer des sanctions en cas de changements anticonstitutionnels et celle de déployer des missions d’appui à la paix.
Le Conseil de paix et de sécurité : principes de fonctionnement, mandat et composition
11 Le CPS dispose de principes de fonctionnement et d’un mandat clairement définis. Sa composition est le résultat de pré-sélections de candidatures opérées au niveau de chacune des sous-régions qui, dans un deuxième temps, n’ont en quelque sorte été qu’« enregistrées » au niveau continental. Le déroulement des premières élections constitue clairement un indicateur supplémentaire des rapports de force actuels au niveau de chaque sous-région.
12 L’essence même du CPS se trouve caractérisée par l’assouplissement de certains principes et par l’apparition de nouveaux concepts. C’est ainsi que l’application stricte du principe de non-ingérence dans les affaires internes des Etats membres, déjà inscrit à l’article III de la charte de l’OUA et repris à l’article 4.g de l’Acte constitutif, représentait le facteur de blocage essentiel et expliquait en grande partie l’impuissance du Mécanisme pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits. Deux facteurs au moins ont, semble-t-il, contribué à l’assouplissement du principe de non-ingérence pour laisser une plus grande place au devoir de non-indifférence ouvrant ainsi la possibilité à l’organisation panafricaine d’intervenir dans les affaires internes des Etats membres dans des conditions strictement définies aux articles 4.h et 4.p de l’Acte constitutif [11]. Ces deux facteurs ont trait à l’affirmation de la notion d’« ingérence humanitaire », qui se justifie notamment, d’une part, par les violations massives des droits de l’homme et, d’autre part, par la démission ou l’impuissance de l’ONU face au génocide rwandais et au conflit somalien [12].
Principes de fonctionnement et mandat assigné
13 La qualité de membre, la durée du mandat, la périodicité des réunions, le niveau de représentation, les règles de convocation ainsi que le mandat assigné ont été clairement définis à la fois dans le protocole relatif à la création du CPS et dans son règlement intérieur [13].
14
Comme tout organe institutionnel, le CPS fonde bien évidemment son action sur des principes. Ceux qui lui ont été attribués par les pays africains sont évoqués à l’article 4 du protocole, à savoir :
- le règlement pacifique des différends et des conflits ;
- la réaction rapide aux situations de crises ;
- le respect de l’Etat de droit et des droits de l’homme ;
- l’interdépendance entre paix, sécurité et développement ;
- le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des Etats membres ;
- la non-ingérence ;
- l’égalité souveraine des Etats ;
- le respect des frontières héritées de la colonisation ;
- le « droit d’ingérence » reconnu à l’Union en cas de violation massive des droits de l’homme ou de menace à la paix.
15
Qui plus est, les fonctions du CPS, clairement énumérées à l’article 6 dudit protocole, peuvent être résumées comme suit :
- la promotion de la paix, de la sécurité et de la stabilité ;
- la prévention, la gestion et le règlement des conflits ;
- la consolidation des processus de paix et la reconstruction post-conflit ;
- l’action humanitaire et la gestion des catastrophes.
- l’anticipation, la prévention et le règlement des conflits ;
- l’intervention dans le cadre d’une opération de maintien de la paix ;
- les sanctions contre toute menace ou atteinte à la paix ;
- la mise en œuvre de la politique de défense commune ;
- la lutte contre le terrorisme ;
- la coopération avec les mécanismes régionaux et les Nations Unies dans la préservation et le maintien de la paix.
16 La tenue des réunions à huis clos et le fait que les pays concernés par le conflit inscrit sur l’agenda de la réunion présentent leur cas au début de la séance, et ce avant de se retirer, permettent aux membres du CPS de débattre et de délibérer en toute liberté et en toute responsabilité (article 8.9 du protocole et 15.1 du règlement intérieur).
17 A cela s’ajoute le fait que le CPS est marqué par le choix de l’absence de membres permanents et d’un pouvoir de veto pour conférer aux décisions prises un caractère consensuel et démocratique.
18 Or, il existe une dimension mimétique importante dans les institutions et les règles de l’Union africaine par rapport à l’Union européenne et aux Nations Unies. Il semble que, dans une certaine mesure, le CPS est de facto d’inspiration onusienne car la double composante « membres permanents/membres non permanents » se reflète d’une certaine manière dans sa composition et son fonctionnement avec la possibilité pratique d’exercer une certaine permanence par la prolongation de la durée d’occupation de son siège.
19 A ce titre, il convient de préciser qu’au cours des consultations préalables, certains Etats, avec pour chef de file le Nigeria, avaient préconisé une composition comprenant cinq membres permanents et dix membres non permanents. C’est à cette occasion que le président de la République du Mali de l’époque, Alpha Oumar Konaré [14], avait proposé la formule d’un « Conseil de médiation et de sécurité, sorte de Conseil de sécurité de l’Union africaine, doté à la fois de membres permanents sans droit de veto et de membres non permanents » au motif que « nous devons reconnaître que, dans toute entreprise commune, il y a une locomotive et des wagons ; il nous faut admettre qu’il y a des pays leaders dont la part dans la répartition des responsabilités devrait être plus grande que celle des autres. Ceci est une réalité. Nous devons envisager cette démarche dans une vision démocratique et non de gendarme, et la traduire en comportement pour avancer vers la réalisation de nos objectifs majeurs [15] ». Les plus petits Etats s’étaient quant à eux ardemment opposés à l’idée de « membre permanent » en alléguant le fait que le partenariat des pays africains dans le domaine de la gestion et du règlement des conflits devait plutôt avoir pour fondement les principes de solidarité, d’égalité et de souveraineté nationale. L’Afrique du Sud a alors proposé un compromis articulé autour de mandats de cinq ans immédiatement renouvelables et de mandats de trois ans basés sur le principe de la rotation, donc non immédiatement renouvelables. La formule finalement retenue lors du sommet de Durban a été des mandats de trois ans et de deux ans fondés sur le principe de rotation. Son avantage réside dans la satisfaction des Etats qui défendaient le principe d’égalité et dans l’assurance pour tout Etat d’une participation au CPS à un moment donné. Son inconvénient, selon les grands Etats, se trouve dans la possibilité de voir le CPS composé exclusivement de pays petits et pauvres, ce qui risquerait d’affaiblir l’organe à cette période donnée.
20 Deux facteurs ont, néanmoins, joué in fine contre l’existence de membres permanents au sein du CPS : premièrement, les pressions actuelles pour une recomposition du Conseil de sécurité des Nations Unies [16] ; deuxièmement, l’opposition vigoureuse des « petits Etats » africains à accepter le statut de membres permanents par crainte de cautionner l’octroi de pouvoirs exorbitants à certains Etats. Les « petits Etats » se montrent, certes, peut-être jaloux du mandat de trois ans qu’ils espèrent pouvoir obtenir un jour, mais ils savent également que ces « grandes puissances » potentielles présentent plus d’une fragilité, en particulier leur absence de consensus politique interne, leur risque de partition ethnique et leur fragilité sur le plan économique.
21 Il est toutefois intéressant de noter que les « grands Etats » africains qui ambitionnaient de manière tacite des sièges de membres permanents ont tous bénéficié d’un siège pour une durée de trois ans. Ce résultat traduit donc le positionnement des « grands » dans les « résidus de la permanence », en d’autres termes dans le bénéfice de la durée du mandat le plus long. Au demeurant, la possibilité offerte par les textes aux Etats de renouveler leur mandat pour une seconde fois et celle qu’ils pourraient s’octroyer en pratique de faire élire leurs propres alliés lorsqu’ils ne sont eux-mêmes pas éligibles renforcent une certaine permanence.
22 Pour autant, cette permanence n’est absolument pas automatique. Les Etats avides d’un tel privilège devront montrer leur capacité à construire un consensus autour de leur vision politique et militaire avec d’autres Etats dans leur sous-région respective, surtout avec leurs alliés. Leur difficulté majeure résidera probablement dans la grande volatilité des alliances à travers l’ensemble du continent.
23 En fait, le choix de l’absence d’un pouvoir de veto relève, au moins, de deux considérations selon lesquelles un tel droit aurait été plutôt dommageable : premièrement, la manipulation à leurs propres fins de ce droit par certains Etats ; deuxièmement, la particularité des conflits du continent, à savoir l’implication de certains pays africains dans les situations conflictuelles de leurs voisins, voire leur complicité dans leur maintien ou leur aggravation.
24
En outre, le mandat du CPS a été clarifié et élargi pour inclure toutes les étapes des situations conflictuelles :
- un système d’alerte des situations de crise potentielles ;
- des activités de prévention, de gestion et de règlement des conflits ;
- la reconstruction post-conflit comprenant le désarmement, la démobilisation et la réintégration des combattants ;
- l’appui à la bonne gouvernance et le soutien aux élections libres.
25 Il est également prévu d’apporter une plus grande attention à la maximisation de l’utilisation des ressources des puissances sous-régionales.
26 Outre l’assistance technique qui lui sera apportée par la Commission de l’UA, le CPS bénéficiera de l’appui des mécanismes opérationnels suivants :
- le « groupe des sages », composé de cinq personnalités africaines nommées, pour une période de trois ans, par la Conférence de l’Union. Il aura, notamment, pour mission de fournir des services consultatifs au CPS et au président de la Commission sur les questions touchant au maintien et à la promotion de la paix, de la sécurité et de la stabilité en Afrique (article 11 du protocole) ;
- le Système continental d’alerte rapide, qui sera constitué d’un centre d’observation chargé de la collecte et de l’analyse des données permettant de mieux suivre l’évolution des conflits sur le continent et de recommander la meilleure action à prendre (article 12 du protocole) ;
- la Force africaine pré-positionnée ou Force africaine en attente qui sera, pour sa part, constituée de cinq brigades, à raison d’une brigade par région, en vue d’un éventuel déploiement rapide (article 13 du protocole). La mise en place progressive de ces brigades devra s’achever, au plus tard, en juin 2010 ;
- le Fonds de la paix, destiné à financer les missions de maintien de la paix, ainsi que toute autre activité opérationnelle liée à la paix et à la sécurité en Afrique. Il sera essentiellement alimenté par des prélèvements sur le budget ordinaire de l’Union, par des contributions volontaires des Etats membres et par d’autres sources africaines et extra-africaines (article 21 du protocole) [17].
Critères de sélection et élection des membres du CPS
27 Lors de la Conférence de Maputo en juillet 2003, les chefs d’Etat et de Gouvernement ont constaté l’impossibilité de respecter le calendrier pour l’adoption des termes du règlement intérieur du CPS, en ce qui concerne les modalités d’élection de ses membres ainsi que pour l’élaboration des textes relatifs à son fonctionnement. Les chefs d’Etat et de Gouvernement africains ont, de ce fait, donné au Conseil des ministres le soin de procéder aux élections des membres du CPS.
28 Ces membres sont présélectionnés au niveau sous-régional, puis les candidatures retenues sont soumises au Conseil exécutif de l’Union africaine pour élection [18]. L’idée sous-jacente à l’adoption du principe de consultations et d’arrangements préalables au niveau des cinq sous-régions peut s’expliquer par le souci des Etats membres de respecter une tradition bien ancrée au niveau des institutions régionales et internationales, de faciliter le processus de sélection des candidats au CPS et de responsabiliser les sous-régions dans les choix retenus.
29 Cette formule de présélection a été timidement combattue par plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest qui ont proposé de ne pas opérer de sélection préalable au niveau des sous-régions et d’organiser directement des élections au niveau continental au motif que, d’une part, les pays remplissant les qualifications spécifiques requises étaient de notoriété publique au niveau sous-régional et que, d’autre part, ces présélections constituaient une perte de temps.
30 Ces « ententes préalables » au niveau sous-régional ont eu pour résultat de faciliter les élections au niveau continental tout en permettant certains « marchandages » dans la mesure où c’est uniquement à ce niveau que les solidarités sont les plus à mêmes de s’exercer car, dans le reste du processus électoral, c’est l’application des principes contenus dans le protocole qui prévaut (vote à bulletin secret). Il semble en tout cas que, dans plusieurs sous-régions, ce soit la négociation des « intérêts nationaux » respectifs qui ait prévalu sur l’intérêt continental lors des premières élections. Certains Etats ont indéniablement besoin d’avoir une prise politique sur les questions qu’ils jugent déterminantes pour leur intérêt national et leur intégrité territoriale. A cet égard, certains pays ont d’ailleurs allégué que des élections directes au niveau continental auraient permis des victoires plus fondées sur le mérite et plus justes car la compétition aurait été plus large. En tout cas, les effets pervers de ces accords préalables n’avaient guère pu être anticipés. Ce n’est finalement que la pratique des premières élections qui a permis d’évaluer les avantages et inconvénients de tels compromis sous-régionaux.
31
La sélection des Etats membres au niveau des sous-régions est déterminée par un certain nombre de critères liés à leur volonté, à leur capacité et à leur disponibilité concernant la restauration de la paix et la préservation de la sécurité. Les critères ouvrant droit à la qualité de membre du CPS sont identiques pour les cinq sous-régions et ont été strictement définis à l’article 5.2 du protocole [19] :
- l’attachement aux principes de l’UA ;
- la ratification du protocole du CPS ;
- l’absence de sanctions dans le cadre de l’UA ;
- la contribution aux initiatives afférentes à la résolution des conflits, aux missions de maintien de la paix et de la sécurité ainsi qu’à leur consolidation aux niveaux sous-régional et continental ;
- la contribution au Fonds de la paix et/ou à un fonds spécial créé pour un but spécifique ;
- le respect de la légalité constitutionnelle ainsi que le respect de l’Etat de droit et la préservation des droits de l’homme [20] ;
- la présence de missions permanentes auprès de l’UA. et de l’ONU bien dotées en personnel et en moyens ;
- l’engagement et la capacité à assumer la qualité de membre du CPS.
32 Théoriquement, les Etats ne disposent pas d’un pouvoir de blocage dans la mesure où le protocole définit un certain nombre de critères. En pratique, néanmoins, même s’il semble difficile d’opposer l’argument de la faiblesse à un pays candidat, rien n’empêche tout pays de la sous-région de mettre en avant l’instabilité et le risque de changement de circonstances pour éliminer la candidature d’un Etat qui ne remplirait pas les critères requis.
33 Deux types de mandat, d’une durée respective de deux et trois ans, pour les 15 membres siégeant au Conseil (article 5.1 et 5.2 du protocole relatif à la création du CPS [22]) ont été institué, d’une part, pour favoriser la continuité et le suivi des dossiers et, d’autre part, pour marquer la différence entre les pays influents et ceux qui le sont moins, tout en respectant les principes de rotation et de répartition géographique équitable. Une telle formule présente également l’avantage d’éviter le changement total des membres du CPS au terme des mandatures.
34
Les consultations et les élections ont ainsi permis de confier un mandat de :
- trois ans pour le Nigeria (Afrique de l’Ouest), l’Algérie (Afrique du Nord), l’Ethiopie (Afrique de l’Est), le Gabon (Afrique centrale) et l’Afrique du Sud (Afrique australe) ;
- deux ans pour le Ghana, le Sénégal et le Togo (Afrique de l’Ouest), la Libye (Afrique du Nord), le Kenya et le Soudan (Afrique de l’Est), le Cameroun et le Congo (Afrique centrale), le Lesotho et le Mozambique (Afrique australe).
35 Les principes d’équité, de rotation et de répartition géographique ont fait l’objet de plusieurs débats. En effet, certains Etats estimaient que chaque sous-région devait être traitée de manière égale avec une allocation de trois sièges à chacune d’entre elles. Cette équité ne devait pas être uniquement mesurée en termes de grandeur géographique de la région, mais également en termes de capacité de contribution. D’autres Etats considéraient, quant à eux, que l’équité devait se mesurer proportionnellement au nombre d’Etat dans chaque sous-région. Cette deuxième catégorie d’Etats alléguait que la pratique au sein de l’organisation était traditionnellement basée sur l’équité régionale qui attribue plus de sièges aux sous-régions comprenant un plus grand nombre d’Etats. Ils ont donc proposé la formule suivante de distribution de 15 sièges : quatre pour l’Afrique de l’Ouest, trois pour l’Afrique centrale, trois pour l’Afrique de l’Est, trois pour l’Afrique australe et deux pour l’Afrique du Nord [23]. Au demeurant, ils ont précisé que cette formule, en conjonction avec le principe de rotation, offrait une opportunité égale pour chacun des Etats membres de participer aux affaires de l’organisation. Nous retrouvons, en l’espèce, le dilemme classique de la plupart des organisations internationales, à savoir la concurrence des égalités qualitative (le poids réel) et quantitative (le nombre). Ainsi est-il loisible de rappeler que les Nations unies ont résolu cette question par le choix de la prédominance du poids au sein du Conseil de sécurité et par celle du nombre dans l’Assemblée générale.
36 Lors des débats relatifs à la composition du CPS, le groupe des pays de l’Afrique de l’Ouest a demandé un assouplissement du principe d’égalité en revendiquant l’octroi d’un siège supplémentaire au motif que l’Afrique de l’Ouest comptait 15 Etats alors que l’Afrique du Nord n’en comptait que 6. Le groupe d’Afrique du Nord a, alors, rétorqué que le principe d’égalité entre les groupes constituait un principe statutaire de l’Union africaine et que les pays composant ce même groupe, en dépit de leur faible nombre, contribuaient à hauteur d’un tiers des contributions. Une concession a finalement été faite par les pays du Nord à ceux de l’Ouest dans l’octroi d’un siège supplémentaire au sein du CPS, soit trois au lieu de deux. Il convient toutefois de noter la vigilance des pays du Nord qui ont insisté sur le fait qu’une telle concession ne pouvait en aucun cas être invoquée comme un précédent.
37 Dans la région d’Afrique du Nord, la présélection sous-régionale s’est déroulée de manière automatique dans la mesure où, au moment de l’élection, seuls deux pays réunissaient les conditions pour être éligibles à la qualité de membre, à savoir l’Algérie et la Libye, pour deux sièges à pourvoir, étant entendu qu’à l’époque, l’Egypte, la Mauritanie et la Tunisie n’avaient pas encore ratifié le protocole et que la République arabe sahraouie démocratique (RASD) n’avait pas exprimé sa candidature au CPS [24].
38 L’Afrique centrale était handicapée par deux types de difficultés : premièrement, l’instabilité chronique de la sous-région ; deuxièmement, la mise sous sanction de trois pays sur neuf au moment des élections [25]. Seuls les pays restant hors sanction étaient en l’occurrence éligibles, c’est-à-dire le Burundi, le Cameroun, le Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale et le Tchad. A cela s’ajoutait le fait que, depuis très longtemps, seuls quatre pays d’Afrique centrale représentaient la sous-région au niveau des Commissions et des comités consultatifs de l’OUA/UA [26] ainsi qu’aux réunions de l’Organe central. Il fut par conséquent proposé de reconduire les pays déjà présents au sein de l’Organe central, à savoir le Cameroun, le Congo et le Gabon. Le Gabon et le Cameroun ont également été élus en raison de leur stabilité par rapport au reste de la sous-région, le rôle de médiateur du président Omar Bongo dans plusieurs conflits, notamment en RDC, ayant constitué un atout supplémentaire pour le premier et la disponibilité de ressources humaines abondantes ayant joué en faveur du second. Le Congo, quant à lui, a bénéficié de la présidence de la Communauté économique des Etats d’Afrique centrale (CEEAC [27]) qui comprend notamment un Conseil de paix et de sécurité de l’Afrique centrale (COPAX) en charge des questions de paix et de sécurité [28].
39 En Afrique de l’Est, la présélection au niveau sous-régional s’est faite sans difficultés en raison du peu de candidats en compétition. Seuls quatre pays avaient adhéré au protocole au moment de la ratification, à savoir l’Ethiopie, le Kenya, le Soudan et le Rwanda. Après quelques consultations au niveau des ambassadeurs à Addis Abéba et des ministres des Affaires étrangères, le Rwanda a accepté de se retirer en contrepartie de l’assurance (certes tacite) de l’obtention d’un siège lors des prochaines élections. En tout cas, il semble que l’Ethiopie et le Kenya se soient entendus au niveau ministériel sur le fait que la première obtiendrait le mandat le plus long et que le second bénéficierait au moins d’un mandat plus court en raison de leur intérêt direct partagé dans les processus de paix somalien et soudanais. En plus du soutien éthiopien, le Kenya aurait obtenu d’autant plus aisément un mandat de deux ans en raison du refus du Soudan de permettre à l’Ouganda d’être élu au motif de la présence d’une base arrière de rebelles ougandais en territoire soudanais.
40 Il convient également de se pencher de manière attentive sur le processus de sélection des membres du CPS qui s’est opéré en Afrique de l’Ouest dans la mesure où il illustre les critères de sélection qui ont été établis et préfigure, ceteris paribus, des difficultés pouvant survenir lors de cette opération. En effet, sept pays étaient initialement candidats pour les quatre sièges à pourvoir au total, soit trois pour un mandat de trois ans à savoir le Nigeria, le Sénégal et le Mali, et quatre pour les trois mandats de deux ans à savoir le Ghana, le Togo, le Burkina Faso et la Gambie. Lors d’une réunion au niveau des ambassadeurs à Addis Abéba, le représentant du Ghana a proposé la candidature du Nigeria pour le mandat de trois ans. Le Mali, quant à lui, a voulu rester en compétition pour ce mandat, ce qui a eu pour résultat de créer une impasse eu égard à l’impossibilité de sélectionner une candidature. Celle du Nigeria a finalement fait l’unanimité, ce pays étant une puissance sous-régionale potentielle traditionnellement impliquée dans le maintien de la paix dans sa sous-région, en particulier dans les conflits du Liberia et de la Sierra Leone, dans le cadre de la CEDEAO. Suite à des contacts de haut niveau, le Sénégal accepta de joindre le groupe des candidats pour le mandat de deux ans. Au moment de la présélection pour ce mandat, cinq pays se sont portés candidat avec pour instruction de leur capitale de « soumettre leur candidature et de ne pas se retirer » de sorte qu’aucune décision ne put être prise au niveau des ambassadeurs. Les cas du Mali et de la Gambie furent, quant à eux, résolus au niveau des ministres de la sous-région (CEDEAO) par souci de flexibilité et de partage par rapport aux postes de la Commission. Ces deux pays détenaient en effet déjà deux postes clés au sein de la Commission de l’Union, à savoir respectivement le poste de président de la Commission (Alpha Oumar Konaré) pour le Mali et celui de commissaire aux affaires politiques (Julia Dolly Joiner) pour la Gambie. Le Ghana restait donc ipso facto le seul pays candidat anglophone parmi les cinq encore en lice, ce qui lui a permis d’être retenu pour le mandat de deux ans. Le Sénégal fut sélectionné à l'issue du premier tour de scrutin. Puis, le Togo l'emporta au tirage au sort, et ce après trois matchs nuls face au Burkina Faso.
41 Enfin, en Afrique australe, la sélection au niveau sous-régional s’est faite sur la base d’un consensus entre Etats concernant la qualité de membre du CPS. La seule difficulté à laquelle les Etats ont dû faire face était celle de l'appartenance à des organisations sous-régionales composées de pays relevant de sous-régions différentes par référence au découpage de l'UA. En effet, trois Etats membres de l'UA appartiennent à la SADC, tout en étant répertoriés dans d'autres sous-régions que l'Afrique australe [29]. Les Etats de la sous-région ont trouvé, au moment des élections, une solution temporaire au problème de cette dualité dans la formation d’une troïka des candidats éligibles à la qualité de membre du CPS qui fut composée de l’Afrique du Sud (en tant que président en exercice de la SADC) [30], du Lesotho (en qualité de prochain président et rapporteur en exercice de cette même organisation) et du Mozambique (en tant que président sortant de la SADC et président en exercice de l’UA). Cette question de dualité d’appartenance à des organisations devra être tranchée au niveau continental pour éviter toute tension inutile au niveau régional. A cet égard, l’UA a prévu d’organiser un débat sur la composition des sous-régions avec les pays concernés afin qu’ils choisissent la région au sein de laquelle ils tireront le plus grand bénéfice.
Une première évaluation de l’action du Conseil de paix et de sécurité
42 Il est certes prématuré d’évaluer l’action du CPS, son installation récente (mai 2004) limite objectivement la portée de l’exercice. En réalité, ce qui compte dans cette perspective, c’est moins les résultats dans l’accomplissement des missions qui lui ont été assignées que les efforts et les initiatives déployés dans le cadre de sa mise en œuvre.
43 L’entrée en vigueur du protocole et son application ont tout de même soulevé diverses interrogations, comme le fait de savoir pourquoi certains Etats ne l’ont pas encore ratifié, comment faire cohabiter les responsabilités qui incombent respectivement au président en exercice de l’Union, au président de la Commission de l’UA et au président du CPS en matière de gestion des conflits ou encore si le débat parallèle sur la défense commune n’est pas de nature à affaiblir le consensus africain sur le rôle du CPS.
Premières activités
44 La première réunion ministérielle du CPS a été convoquée le 15 mars 2004, à l’occasion de la quatrième session ordinaire du Conseil exécutif de l’Union, après l’élection de ses 15 membres. Une vingtaine de réunions ont eu lieu au niveau des ambassadeurs en l’espace de dix mois, auxquelles il faut ajouter une réunion au niveau ministériel (4 juillet 2004) et une autre au niveau des Chefs d’Etat et de Gouvernement (25 mai 2004) [31]. A la demande du président Omar Bongo dont le pays assure la présidence du CPS pour le mois de janvier 2005, une autre réunion au niveau des Chefs d’Etat et de Gouvernement sera tenue à Libreville (Gabon) les 10 et 11 janvier prochain. Il s'agit de la première réunion à ce niveau en dehors de la session inaugurale de mai dernier.
45 Le nombre relativement élevé des réunions du CPS dans un temps relativement court permet de relever que la périodicité prévue dans le protocole a été respectée, ce qui atteste de la détermination des Etats membres de conférer à cet instrument une importance toute particulière.
46
Au-delà de cet attachement au respect de la périodicité des réunions, les membres du CPS ont également marqué leur détermination à contribuer à la restauration de la paix sur le continent :
- en multipliant les initiatives de paix (renouvellement du mandat de la Mission africaine au Burundi -MIAB, envoi d'une mission d'information en RDC, soutien aux efforts visant à relancer le dialogue en Côte d'Ivoire, envoi de forces de protection, d'observateurs militaires et d'instructeurs de police civile au Darfour, pour la Mission de l’Union africaine au Soudan ;
- en montrant une plus grande rapidité dans l’examen des situations par 15 Etats « connus » et facilement mobilisables, qui vise à accélérer autant que faire se peut la prise de la décision ;
- en essayant de « bien faire » compte tenu de leur volonté d’être réélus à l’issue de mandats relativement courts ;
- en favorisant des discussions plus franches qu’au sein de l’Organe central ;
- en désirant prendre des décisions et adopter des résolutions plutôt que de produire de simples communiqués comme dans le passé ;
- en ayant la volonté de donner plus de force et d’impact à ces décisions (il est loisible de citer à titre d’exemple leur insistance à maintenir la pression sur le Gouvernement burundais pour qu’il respecte les échéances électorales fixées) ;
- en organisant des activités pour le soutien à la paix et à la sécurité telle la « retraite » de réflexion des ambassadeurs africains à Addis Abéba et des hauts responsables de la Commission, qui s’est tenue au Cap du 1er au 4 mai 2004, sur le thème du « programme africain de paix et de sécurité ». Cette retraite était organisée autour des thèmes suivants : méthodes de travail du Conseil de paix et de sécurité ; rôle du NEPAD (Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique) dans la consolidation de la paix et du développement en Afrique ; mobilisation des ressources pour le Fonds de la paix de l’UA en vue de soutenir les initiatives africaines de paix et de sécurité ; création de la Force africaine en attente ; alerte rapide et réponse rapide ; relations entre l’UA et les CER, avec une attention particulière à la nouvelle architecture de paix et de sécurité. Un certain nombre de recommandations ont d’ailleurs été formulées sur la voie à suivre pour le renforcement de la capacité du CPS et de l’Union dans la promotion et le maintien de la paix et de la sécurité en Afrique [32] ;
- en mobilisant davantage le soutien financier des partenaires, particulièrement celui de l’Union européenne qui reste le partenaire privilégié de l’UA ;
- en impliquant de manière plus visible l’ONU dans la consolidation des initiatives de paix concernant le continent africain (par exemple, le déplacement de Kofi Annan au Darfour début juillet 2004).
47 Cependant, les tâches sont clairement réparties entre les acteurs, à savoir : le président en exercice de l’Union dispose du pouvoir d’intervention dans n’importe quelle situation conflictuelle ; le président de la Commission de l’UA est en charge de la préparation et de l’organisation des réunions (préparation des briefings et des documents) ainsi que de leur mise en œuvre (rapports) ; enfin, le président du CPS quant à lui « préside » les réunions de cet organe.
48 Enfin s’est déjà posée la question du changement de la présidence du CPS pour une réunion en raison de l’intérêt direct du pays concerné sur l’agenda. C’est ainsi que le Soudan disposait théoriquement de la présidence du CPS pour le mois d’août 2004 [34]. Or l’agenda de la 14e réunion en date du 9 août 2004 – à savoir l’examen de la situation au Darfour – concernait directement le Gouvernement soudanais. L’article 6.8 du protocole prévoit dans ce cas son remplacement par le membre du CPS suivant dans l’ordre alphabétique. En l’espèce, le Togo aurait donc dû se substituer au Soudan pour la tenue de cette réunion. Mais la présidence est finalement revenue à l’Algérie dans la mesure où le Togo n’était à l’époque représenté auprès de l’UA que par un chargé d’affaires, et non par un ambassadeur.
Apories inhérentes au CPS
49 L'une des premières apories semble résider dans le fait que nombre de représentants permanents acquiescent facilement les rapports proposés par la Commission. Les membres du CPS paraissent d'ailleurs particulièrement dépendants des rapports produits par la Commission parce que la plupart des ambassades concernées ne sont pas encore prêtes matériellement pour un suivi très régulier et objectif des conflits africains.
50 En dépit de l'existence de bureaux de représentation et de bureaux de liaison [35], le CPS ne dispose pas encore de tous les moyens pour développer des informations objectives sur le terrain (il s’agit souvent d’informations rapportées soit de la presse internationale, soit des organisations non Gouvernementales, qui ne reflètent pas nécessairement la réalité sur le terrain ou des réalités contradictoires), ce qui ouvre la porte à toutes sortes de manipulations, de désinformations et d’instrumentalisations (par exemple, la reprise des hostilités au Sud-Kivu a été déclenchée à la suite d’allégations courant 2004 selon lesquelles il y aurait eu un nouveau massacre de Banyamulenge).
51 Certains diplomates africains allèguent à leur corps défendant que la convocation en urgence et par téléphone de la plupart des réunions du CPS ne leur donne pas le temps nécessaire pour se préparer convenablement et consulter leur Gouvernement afin d’établir une position ferme pouvant être proposée pour discussion lors de ladite réunion. A cela s’ajoute le fait que la plupart d’entre eux sont des « généralistes » qui ne disposent pas encore d’une connaissance approfondie des conflits concernés.
52 En tout cas, dans la plupart des réunions, le consensus privilégié par les ambassadeurs crée une situation d’apparente sérénité qui ne traduit pas nécessairement une unité de pensée. A cet égard, il est loisible de se demander si le « suivisme politique » de certains ne l’emporte pas sur l’affirmation de propositions objectives et constructives. En effet, les représentants permanents des Etats semblent, sûrement par prudence, hésiter à susciter un réel débat de fond. Ils ont à cet égard certainement hérité d’une « vieille habitude » de l’OUA qui consistait à montrer une solidarité réciproque entre « frères africains » et craignent d’être à leur tour un jour condamnés ». C’est ainsi que les Etats membres du CPS se sont limités à une simple condamnation » de ce qui se passe en Côte d’Ivoire lors de la réunion du 27 mars 2004 ou encore qu’ils n’ont pas utilisé l’article 4.j du Protocole à l’encontre du Gouvernement soudanais dans la situation du Darfour.
53 Pour autant, le CPS semble déterminé à utiliser toutes les voies de recours possibles pour constituer une instance procédant par la persuasion, le dialogue, les échanges et la négociation. Viendra d’ailleurs bien le moment où le CPS devra engager sérieusement et de façon responsable le débat sur l’importante question des sanctions ou du moins sur les instruments à mettre en place pour contraindre les protagonistes à agir dans le sens de l’apaisement des tensions, du rétablissement de la confiance et de la mise en œuvre des engagements auxquels ils ont souscrits [36].
54 Une certaine absence de suivi et de mise en œuvre des décisions est au demeurant déjà visible. C’est ainsi que, lors de la réunion du 25 mai 2004, le CPS avait pris la décision de dépêcher une mission d’informations en Erythrée chargée de vérifier les allégations du Gouvernement soudanais selon lesquelles ce pays soutiendrait les rebelles au Darfour. Or le CPS a relevé, lors de sa réunion du 4 juillet 2004, que cette décision n’avait pas été mise en œuvre. Le risque que les décisions du CPS ne soient « pas prises au sérieux » par les Etats concernées est réel dans la mesure où ces derniers savent pertinemment que l’UA ne dispose pas encore des moyens matériels et financiers pour les exécuter. A cet égard, il convient de mentionner que, lors de la deuxième réunion du CPS, le directeur du département Paix et sécurité de la Commission de l’UA, le Commissaire pour la paix et la sécurité de la Commission de l'UA, Said Djinnit, a déploré que, mis à part les pays contributeurs en troupe [37] et le Sénégal, les autres Etats membres de l’UA, en particulier les membres du CPS, n’avaient apporté aucune contribution à la MIAB en dépit des appels répétés du président de la Commission et de différents organes de l’UA.
55 Certains reprochent en outre au CPS d’agir avec moins de célérité et de profondeur que le Conseil de sécurité des Nations unies. La mise en place du secrétariat du CPS, prévue pour courant 2005, devrait pallier ce type d’insuffisances. Le secrétariat du CPS sera partie intégrante du département Paix et sécurité de la Commission de l’UA. Il sera composé d’analystes chargés de préparer les réunions (notamment en collectant des informations auprès des différents départements de la Commission et auprès des bureaux de l’UA présents sur le continent [38] et à l’ONU), d’attirer l’attention des membres du CPS sur des questions particulières et de tenir les minutes des réunions pour faciliter la rédaction d’un rapport annuel des activités dudit organe.
56 A cela s’ajoute le fait que le manque de capacités d’intervention aux niveaux politique, financier et logistique implique la nécessité d’un renforcement du partenariat avec l’Union européenne et les Nations unies. Le CPS se trouve, pour le moment, subordonné à l’aide financière et logistique de ces deux organisations. Le montage opérationnel et financier de la Commission de cessez-le feu et de la mission d'observation de l'UA au Darfour (MUAS) en constitue le premier exemple concret et servira donc, en quelque sorte d'"opération test". A cet effet, le Fonds de la paix a été obligé de recourir surtout aux ressources extrabudgétaires de l'UA pour l'opération MUAS II [39], le Groupe de travail intégré pour le Darfour-GTID [40] et les pourparlers d'Abuja [41].
Conclusion : Continuité avec l’OUA ou réplique du Conseil de sécurité des Nations Unies ?
57 Incontestablement, on ne peut que se réjouir de la naissance du CPS car ce nouvel acquis institutionnel, s’inscrivant dans le prolongement des idéaux des pères fondateurs de l’OUA, constitue un jalon important et une évolution qualitative dans la formulation d’une doctrine, dans la mise en place d’une architecture ainsi que dans l’élaboration d’une stratégie qui serviraient l’objectif du rétablissement de la paix sur le continent.
58 Cette démarche atteste de la détermination du continent à prendre en charge son destin en consacrant la paix, la sécurité, la stabilité et corrélativement le développement dans son agenda. Ce faisant, l’UA ne se fait pas seulement l’écho de sa propre opinion publique, mais elle prend également en considération les attentes de l’opinion internationale désireuse de voir l’Afrique contribuer substantiellement à la prévention, à la gestion et au règlement de ses conflits.
59 Le CPS constitue de ce fait plus qu’un prolongement de l’Organe central du Mécanisme pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits, et autre chose qu’une simple réplique du Conseil de sécurité des Nations Unies. En effet, le CPS tente de pallier les faiblesses de l’ancien mécanisme sans néanmoins pour l’instant être totalement en mesure de les combler. Peut-il, au demeurant, aller aussi loin que le Conseil de sécurité en termes de mobilisation de moyens, de crédibilité des décisions et d’effectivité des sanctions. En fait, le CPS est encore loin d’y parvenir pour plusieurs raisons : la profondeur des débats n’atteint pas encore celle des sessions du Conseil de sécurité ; ses ressources financières et humaines demeurent limitées ; les dirigeants africains ont choisi de ne le doter ni de membres permanents, ni de pouvoir de veto, ni de mesures coercitives. Le CPS vise indubitablement à travailler en complémentarité avec l’ONU, dans la mesure où la responsabilité de la sécurité collective relève de celle-ci aux termes mêmes de la charte de l’organisation. Il reste que le continent africain veut désormais assumer sa part de responsabilité. A cette fin, il a donc décidé de créer des structures adaptées aux objectifs qu’il s’est fixés.
60 Il est indéniable que les débats plus directs qu’auparavant et l’amélioration de la qualité des discussions au sein du CPS permettront d’aider le groupe africain au sein des Nations unies à formuler une « position africaine unifiée ». En ce sens, le CPS constitue donc une plateforme disposée à favoriser l’émergence d’une « voie collective africaine ».
61 Le CPS semble en réalité procéder d’une démarche à long terme qui s’intègre dans une vision stratégique générale visant à résoudre durablement les conflits sur le continent, mais cette démarche est entravée par les limites structurelles inhérentes à l’état actuel de développement du continent. Le test réel auquel sont soumis les dirigeants africains, et en particulier ceux des pays membres du CPS, est précisément de savoir comment ils vont se comporter face à ces limites et aux nouvelles responsabilités qui leur ont été assignées.
62 En fait, ce sont les moyens déployés et la méthode choisie qui permettront d’écarter ces obstacles. En effet, la scène socio-politique africaine regorge de crises potentielles qui peuvent être déclenchées à tout instant. La vocation du CPS consiste à doter, de manière progressive, le continent africain d’instruments crédibles pour faire face aux menaces à la paix et à la sécurité par le recours à des interventions plus ou moins autonomes du processus de prise de décision du Conseil de sécurité des Nations Unies dans ses activités de maintien de la paix en Afrique.
63 Ceci étant dit, il convient de relever que l’Union africaine a apparemment choisi de traiter les menaces ainsi que les violations à la paix et à la sécurité par le biais d’une stratégie progressive et à long terme qui serait axée principalement sur une doctrine, une volonté politique, un consensus, des instruments d’évaluation, de décision et d’intervention (un système d’alerte rapide, un centre de gestion des conflits, des missions d’observation et d’interposition, des forces pré-positionnées ainsi que des moyens logistiques, financiers et humains). La question se pose de savoir si le continent africain est capable de mener à bien la mise en place et la mise en œuvre des éléments qui participent à l’établissement de ce dispositif. La réalisation de l’ensemble de ces éléments prendra du temps, d’autant que nombre de facteurs qui la conditionnent se trouvent en dehors du contrôle du CPS et de l’UA en tant qu’« organisation mère ».
64 Dans le prolongement de sa quête principale visant à résoudre les conflits, le CPS doit intégrer dans son action à court et long terme des approches et des méthodes qui lui permettraient d’abord d’assurer un traitement approprié des causes profondes et des facteurs favorables au déclenchement des crises, mais aussi de porter une attention particulière aux exigences de la consolidation des processus de paix et de la reconstruction post-conflit. De ce point de vue, le CPS pourrait être perçu comme un excellent outil au service du diptyque « paix et développement » parce qu’il a justement pour tâche d’agir en amont et en aval d’une situation de crise.
65 Le chemin que le CPS serait avisé de prendre pour augmenter son poids sur le long terme résiderait dans une subtile combinaison des méthodes à court et à long terme dans le traitement des questions de paix, de sécurité et de stabilité sur le continent. C’est là toute l’importance et toute l’ampleur du défi que doivent relever les pays africains dans leur ambition collective de bâtir un ensemble communautaire apaisé, fort et crédible.
Liste des réunions du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine
Réunions/dates | Questions examinées |
---|---|
1re réunion – 16 mars 2004 | Adoption du règlement intérieur du CPS |
2e réunion – 25 mars 2004 | Renouvellement du mandat de la MIAB |
3e réunion – 27 mars 2004 | Examen de la situation en Côte d’Ivoire |
4e réunion – 6 avril 2004 | Examen du rapport du président de la Commission sur la préparation de la Conférence internationale sur les Grands Lacs Examen du rapport du président de la Commission sur l’ouverture du bureau de liaison de l’UA au Liberia Echange de vues sur le programme de lancement du CPS (prévu le 25 mai 2004) |
5e réunion – 13 avril 2004 | Examen du rapport du président de la Commission sur la préparation de la Conférence internationale sur les Grands Lacs Examen du rapport du président de la Commission sur l’ouverture du Bureau de liaison de l’UA au Liberia Echange de vues sur le programme de lancement du CPS (suite) Examen du rapport du président de la Commission sur la situation au Soudan (crise dans le Darfour) Examen du rapport du président de la Commission sur la situation en Côte d’Ivoire Examen du rapport du président de la Commission sur la situation en République démocratique du Congo |
6e réunion – 26 avril 2004 | Examen du rapport du président de la Commission sur la situation en Somalie Examen du rapport du président de la Commission sur la situation aux Comores |
7e réunion – 3 mai 2004 | Renouvellement du mandat de la MIAB |
8e réunion – 11 mai 2004 | Discussion formelle du projet d’ordre du jour de la réunion du CPS (prévue le 25 mai 2004) |
9e réunion – 25 mai 2004 | Examen du rapport du président de la Commission sur la mise en place d’une architecture continentale de paix et de sécurité et sur l’état des processus de paix en Afrique Examen et adoption de la déclaration d’engagement en faveur de la paix et de la sécurité en Afrique des Chefs d’Etat et de Gouvernement des Etats membres du CPS |
10e réunion – 25 mai 2004 | Examen de la situation dans la région soudanaise du Darfour, en Somalie et en Côte d’Ivoire |
11e réunion – 3 juin 2004 | Examen de la situation à Bukavu (RDC) |
12e réunion – 4 juillet 2004 | Examen de la situation au Darfour, en RDC, au Burundi et en Côte d’Ivoire |
13e réunion – 27 juillet 2004 | Examen de la situation au Darfour |
14e réunion – 27 août 2004 | Examen de la situation au Burundi |
15e réunion – 17 septembre 2004 | Examen de la situation au Darfour et en Somalie |
16e réunion – 17 septembre 2004 | Examen de la situation au Darfour et en Somalie |
17e réunion – 20 octobre 2004 | Examen du rapport du président de la Commission sur la situation au Darfour |
18e réunion – 25 octobre 2004 | Examen de la situation en Somalie |
19e réunion – 8 novembre 2004 | Examen de la situation en Côte d'Ivoire |
20e réunion – 15 novembre 2004 | Examen de la participation aux réunions du Conseil de sécurité des Nations unies prévues à Nairobi les 18 et 19 novembre 2004 Examen de la possibilité de l'intégration de la force de protection de l'ex-MIAB dans l'Opération des Nations unies au Burundi (ONUB). Examen de la situation en Côte d'Ivoire |
21e réunion – 7 décembre 2004 | Discussion de la situation à l'Est de la RDC et de l'évolution des relations entre la RDC et la Rwanda. |
Calendrier de la présidence du Conseil de paix et de sécurité (mars 2004-mars 2006)
membres du CPS | présidence année 2004 | présidence année 2005 | présidence année 2006 |
---|---|---|---|
Algérie | janvier | ||
Cameroun | octobre | février | |
République du Congo | novembre | mars | |
Ethiopie | décembre | ||
Gabon | janvier | ||
Ghana | février | ||
Kenya | mars | ||
Lesotho | avril | ||
Libye | mai | ||
Mozambique | mars/avril | juin | |
Nigeria | mai | juillet | |
Sénégal | juin | septembre | |
Afrique du Sud | juillet | octobre | |
Soudan | août | novembre | |
Togo | septembre | décembre |
* le prochain calendrier sera élaboré après la prochaine des élections des membres (10 membres pour la durée de 2 ans) en mars 2006.
Références bibliographiques
- Cilliers, Jakkie (2003), « From Durban to Maputo. A Review of 2003 Summit of the African Union », Institute for Security Studies Paper, n° 76, août, Pretoria, ISS.
- Engberg, Katarina (2002), Impact Study of the OAU Mechanism For Conflict Management, Addis Ababa, Swedish Embassy.Kuhne, Winrich (1991), « L’Afrique et la fin de la guerre froide : De la nécessité d’un “nouveau réalisme” », Etudes internationales, vol. XXII, n° 2, juin, p. 287-306.
- Laidi, Zaki (1988), « Le déclassement international de l’Afrique », Politique étrangère, automne, n° 3, p. 667-675.
- Muyangwa, Monde et Margaret A. Vogt (2000), An Assessment of the OAU Mechanism for Conflict Prevention, Management and Resolution, 1993-2000, New York, International Peace Academy, novembre.
- OUA (2002a), OUA/REG.ORG/CPMR, Réunion conjointe OUA/Organisations régionales relative à la coopération dans le domaine de la prévention, la gestion et la résolution des conflits, Addis Abéba, 20-21 mai, 15 p.
- OUA (2002b), Session de réflexion des ambassadeurs de l’Organe central et du Comité de mise en ?uvre du NEPAD, George (Afrique du Sud), 18-22 mars, 7 p.
- OUA (Secrétariat général) (2001), Document de base sur la révision des structures, des procédures et des méthodes de travail de l’Organe central, Addis Abéba.
- OUA (1998a), Central Organ/MEC/AMB/2 (XLIV), Report of the Secretary General on the Enhancement of the Effectiveness of the Mechanism For Conflict Prevention, Management and Resolution of The Central Organ, Forty-Fourth Ordinary Session of the Central Organ of the OAU Mechanism For Conflict Prevention, Management at the Level of Ambassadors, Addis Abéba, 13 février, 14 p.
- OUA (1998b), CM/2064 (LXVIII), Report of the Secretary General on The Enhancement of the Effectiveness of the Central Organ, Sixty-Eigth Ordinary Session of the OAU Council of Ministers, Ouagadougou, 1er-6 juin, 16 p. et annexes, 13 p.
- OUA (Secrétariat général) (1994), Rapport de la session de réflexion sur le Mécanisme de prévention, de gestion et de résolution de l’OUA, « Renforcer l’efficacité du mécanisme de conflit », Addis Abéba, 16 décembre, 22 p.
- OUA (Secrétariat général) (1993), Règlement des conflits en Afrique, Cadres d’acion, Addis Abéba.
- UA (2004a), Modalités pour l’élection des membres du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine.
- UA (2004b), Conseil de paix et de sécurité PSC/A/3(IX), Rapport du président de la Commission sur la mise en place d’une architecture continentale de paix et de sécurité et sur l’état des processus de paix en Afrique, Lancement solennel du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, Neuvième Session, Addis Abéba, 25 mai, 16 p.
- UA (2004c), Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement/UA/2 (III), Conférence de l’Union africaine, Rapport du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine sur ses activités et sur l’état de la paix et de la sécurité en Afrique, Troisième session ordinaire, Addis Abéba, 6-8 juillet, 17 p.
- UA (2003), Peace and Security Department of The African Union, Peace and Security Issues At the Maputo Summit, Addis Ababa, juillet.
Notes
-
[*]
Doctorante en science politique, Université Paris I-Panthéon-Sorbonne, attachée pour ses recherches à l’Institut d’études éthiopiennes de l’Université d’Addis Abéba et au Centre français des études éthiopiennes (Addis Abéba).
-
[1]
Selon l’expression de Laïdi (1988). Voir également Kuhne (1991). Le continent africain aurait un intérêt moindre depuis la fin de la guerre froide et ne représenterait dès lors plus une priorité dans l’agenda des Nations unies, et ce, malgré l’engagement maintes fois réitéré pour le continent du Secrétaire Général des Nations unies, Kofi Annan, qui a estimé que 60 % de tous les efforts des Nations unies étaient orientés vers les besoins africains.
-
[2]
L'OUA/UA s'est impliquée dans tous les conflits africains (à l'exception de celui apparu au Nord de l'Ouganda), à savoir au Sahara occidental, en Angola, au Mozambique, en Casamance, en Ethiopie-Erythrée, en Somalie, en Côte d'Ivoire, en République démocratique du Congo, en République du Congo, en République centrafricaine, au Burundi, aux Comores, au Libéria et au Soudan.
-
[3]
Il était composé de la troïka (le président sortant, le président en exercice et le président rentrant) et des membres du bureau de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement. Il disposait d’instruments opérationnels tels que le secrétariat général, le Centre de gestion des conflits, le Système d’alerte précoce et le Fonds de la paix. Il fonctionnait au niveau des Chefs d’Etat, des ministres et des ambassadeurs accrédités auprès de l’OUA. Il pouvait être convoqué à la demande du Secrétaire Général ou de n’importe quel Etat membre. Pour les détails, voir OUA (2001), p. 5.
-
[4]
OUA (1993), p. 6.
-
[5]
Ibidem, p. 12-21. A titre d’exemples, il convient de citer la Commission ad hoc sur le différend algéro-marocain qui a fonctionné de 1963 à 1967, le Comité ad hoc sur les différends inter-africains créé en juillet 1977 qui a notamment réglé le conflit entre l’Ouganda et la Tanzanie, le Comité des bons offices des huit sur le différend Somalie-Ethiopie créé par la dixième session ordinaire de la Conférence en mai 1973, la Commission ad hoc présidée par le président Kenyatta envoyée en 1964 au Congo (Léopoldville), au Congo (Brazzaville) et au Burundi, ou encore le Comité permanent sur le Tchad dans les années 1980.
-
[6]
OUA (Secrétariat général) (2001).
-
[7]
Notamment OUA (1994, 1998a, 1998b).
-
[8]
Muyangwa et Vogt (2000), p. 32.
-
[9]
Voir OUA (2002a).
-
[10]
une pression externe exercée par les principaux partenaires de l’Afrique (Etats-Unis, France, Royaume-Uni et ONU) visant à responsabiliser davantage les pays africains dans la gestion de la paix et de la sécurité.
-
[11]
Plusieurs travaux de réflexion ont été menés dans le cadre de l’OUA/UA, en particulier OUA (2002b).
-
[12]
Voir dans ce sens Engberg (2002), p. 26-27.
-
[13]
Ledit protocole est entré en vigueur le 26 décembre 2003, après avoir été ratifié par le nombre requis d’Etats membres, à savoir 27. Au 30 mai 2003, 39 Etats membres avaient signé le protocole et 6 l’avaient ratifié. Mi-mai 2004, 32 Etats membres l’avaient ratifié. Voir UA (2003), p. 26-28.
-
[14]
Président de la Commission de l’Union africaine depuis juillet 2003.
-
[15]
Allocution d’Alpha Oumar Konaré, président de la République du Mali, au XXXVIIe sommet de l’OUA, Lusaka, 9-11 juillet 2001, p. 8-9.
-
[16]
C’est-à-dire notamment le besoin de représentation de toutes les régions du monde pour la gestion d’une sécurité globale, d’où la réclamation d’un siège pour l’Afrique, l’Asie et l’Amérique latine respectivement ou encore la nécessité de prendre en compte les changements intervenus depuis 1945.
-
[17]
Voir aussi Cilliers (2003), p. 6-8. Le module d’alerte précoce est basé sur des indicateurs politiques, économiques, sociaux, militaires et humanitaires clairement définis et acceptés, et les résultats des analyses permettront de déterminer les actions politiques à prendre rapidement par le CPS afin d’éviter que les situations de crise potentielle ne dégénèrent en conflits ouverts. Le « Conseil des sages » pourra jouer le rôle d’un forum rassemblant la force morale de personnalités africaines éminentes dans la prévention et la résolution des conflits (d’anciens chefs d’Etat qui ont montré une direction exemplaire et une intégrité personnelle alors qu’ils étaient en poste, des lauréats du prix Nobel de la paix, des spécialistes des questions continentales, des universitaires et des praticiens de haut niveau).
-
[18]
UA (2004a), partie III : Modalités de sélection des membres.
-
[19]
Idem, partie II : Critères requis.
-
[20]
Il convient de noter la subtilité de langage utilisée dans la mesure où le continent atteste d’un développement démocratique inégal.
-
[21]
La République fédérale islamique des Comores, la Guinée Bissau, la République démocratique du Congo, la République centrafricaine, Sao Tomé et Principe, les Seychelles, la Somalie et le Liberia.
-
[22]
Le choix de deux types de mandat a été fait après consultations et compromis entre chefs d’Etat lors du sommet de Durban en juillet 2002.
-
[23]
Le continent africain est découpé en cinq sous-régions : Afrique du Nord (6 pays : Algérie, Egypte, Libye, Mauritanie, République arabe sahraouie démocratique, Tunisie) ; Afrique de l’Ouest (16 - 1, soit 15 pays : Bénin, Burkina Faso, Cap Vert, Côte d’Ivoire, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée Bissau, Liberia, Mali, Niger, Nigeria, Sénégal, Sierra Léone, Togo) ; Afrique centrale (10 pays : Burundi, Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Rwanda, Sao Tomé et Principe, Tchad) ; Afrique de l’Est (12 pays : Comores, Djibouti, Erythrée, Ethiopie, Kenya, Madagascar, île Maurice, Ouganda, Seychelles, Somalie, Soudan, Tanzanie) ; Afrique australe (10 pays : Afrique du Sud, Angola, Botswana, Lesotho, Malawi, Mozambique, Namibie, Swaziland, Zambie, Zimbabwe). Il convient de préciser que la Mauritanie a demandé son transfert de la région de l’Ouest vers la région du Nord lors de la session ordinaire du Conseil exécutif tenue les 15 et 16 février 2004, demande qui a été entérinée par le Conseil.
-
[24]
Pour mémoire, l’Algérie le 29 janvier 2003 et la Libye le 24 juin 2003. Au 17 février 2004, l’Egypte, la Mauritanie, la Tunisie et la République arabe sahraouie démocratique n’avaient pas encore ratifié ledit protocole. Il convient de noter que le prestige du président Bouteflika et l’expérience accumulée par l’Algérie dans la résolution des conflits (Nord du Mali, Nord du Niger, Tchad/Libye, Ethiopie-Erythrée) ont indubitablement constitué une valeur ajoutée pour ce pays.
-
[25]
A savoir la République centrafricaine, la République démocratique du Congo ainsi que Sao Tomé et Principe (ce dernier ne disposant pas, qui plus est, de représentation diplomatique à Addis Abéba). Le Tchad avait, quant à lui, régularisé ses arriérés courant 2003.
-
[26]
En particulier le sous-comité consultatif des questions administratives, budgétaires et financières ; celui des programmes et Conférences ; le sous-comité chargé des réfugiés ; celui des contributions ; le sous-comité chargé de la gestion du Fonds spécial d’assistance d’urgence pour la sécheresse et la famine en Afrique ; le sous-comité permanent de la coopération afro-arabe ; et celui sur les réformes des structures.
-
[27]
A ne pas confondre avec la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (CEMAC), regroupant exclusivement des Etats émettant le franc CFA d’Afrique centrale.
-
[28]
Le COPAX est un mécanisme de promotion, de maintien et de consolidation de la paix et de la sécurité en Afrique centrale qui a été créé par la décision n° 001 Y/FEV/25/1999 de la Conférence au sommet des Chefs d’Etat et de Gouvernement des pays d’Afrique centrale réunie à Yaoundé le 25 février 1999. Il « a pour but la prévention, la gestion et le règlement des conflits en Afrique centrale, ainsi que les autres actions de promotion, de maintien et de consolidation de la paix et de la sécurité dans la sous-région » (article 2).
-
[29]
Voir note 22. La RDC appartient à l’Afrique centrale et l’île Maurice ainsi que la Tanzanie font partie de l’Afrique de l’Est.
-
[30]
L’Afrique du Sud a de facto bénéficié de ses atouts « classiques », à savoir sa légitimité historique, son potentiel humain, logistique et militaire, sa contribution en troupes au sein de la mission de l’UA au Burundi (MIAB) ainsi que de son rôle de médiateur notamment dans le conflit en République démocratique du Congo, enfin d’une capacité contributive au sein de l’UA située au plafond.
-
[31]
Voir UA (2004b, c).
-
[32]
UA (2004c), p. 9.
-
[33]
En juin 2004, 33 Etats membres de l'UA sur 53 au total avaient ratifié le protocole, au 4 octobre ils étaient 36 à l'avoir fait et en décembre, 37. Les pays qui ne l'ont pas encore ratifié sont les suivants : le Botswana, la République centrafricaine, le Cap Vert, la Côte d'Ivoire, Djibouti, la République démocratique du Congo, l'Egypte, l'Erythrée, la Guinée Bissau, la Guinée, le Libéria, la Mauritanie, les Seychelles, la Somalie, le Swaziland et la Tunisie.
-
[34]
Les présidences du CPS ont été successivement attribuées au Mozambique (mi mars-avril 2004), au Nigeria (mai 2004), au Sénégal (juin 2004) et à l’Afrique du Sud (juillet 2004) suivant l’ordre alphabétique en langue anglaise, se reporter à l’annexe n° 2.
-
[35]
L'UA dispose de bureaux de représentation au Caire, à Conakry, à Lagos, à Lilongwé, à Nairobi, à Yaoundé, auprès des Nations unies à New York et à Genève ainsi qu'auprès de l’Union européenne à Bruxelles. Elle dispose également de bureaux de liaison pour ses missions au Sahara occidental, au Burundi, en Côte d'Ivoire, aux Comores, en Ethiopie, en Erythrée, au Libéria et au Soudan. Voir supra.
-
[36]
Une tendance dans ce sens semble se dégager comme l’atteste la décision prise par certains pays d’Afrique de l’Est le 5 juin 2004, lors du 21e sommet régional sur le Burundi, d’imposer des sanctions au mouvement d’opposition burundais, le Palipehutu/fln, s’il persistait dans son refus de se joindre au processus de paix.
-
[37]
A savoir l’Afrique du Sud, l’Ethiopie et le Mozambique.
-
[38]
L’UA dispose de bureaux de représentation au Caire, à Conakry, à Lagos, à Lilongwé, à Nairobi et à Yaoundé. Elle dispose également de bureaux spécialisés pour ses missions au Burundi, en Côte d’Ivoire, aux Comores, en Erythrée, au Liberia et au Soudan.
-
[39]
MUAS II (en dollars US) : 15 037 593,98 (Canada), 100 604 794,44 (Union européenne), 1 000 000 (Allemagne), 22 080 000 (Royaume Uni), 750 000 (Norvège), 5 020 848,02 (Pays Bas), 40 386 485,05 (Etats Unis d'Amérique), 992 000 (France), 554 000 (Italie). Soit un total de contributions de 186 425 721,49 dollars US. Source : UA
-
[40]
GTID (en dollars US) : 750 000 (Danemark), 250 000 (Norvège), 1 250 000 (Pays Bas), 500 000 (Suède). Soit un total de contributions de 2 750 000 dollars US. Source : UA.
-
[41]
Pourparlers d'Abuja (en dollars US) : 1 069 000 (Union européenne), 312 500 (Royaume Uni), 375 000 (Pays Bas), 125 000 (Suède). Soit un total de contributions de 1 881 500 dollars US. Source : UA.