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Article de revue

Dysmorphophobie, pubertaire et processus adolescent

Pages 801 à 818

Notes

  • [1]
    Birraux, 1995, p. 119.
  • [2]
    On rappellera que P. Janet définissait la dysmorphophobie comme « honte de son propre corps ».
  • [3]
    Nous entendons sous le terme de sexuation un processus propre au temps adolescent par lequel se nouent assomption de l’identité sexuée et sexualisation des rapports aux autres.
  • [4]
    Ceci rejoint la problématique de la clinique du dévisagement, où dans les expériences de rupture dans le lien au visage, le « Je » semble se délier de l’image. Nous renvoyons au travail de S. Le Poulichet (2003).
  • [5]
    Considérons les deux sens de ces deux homophones : voile au masculin et voile au féminin.
    Le voile est ce qui cache, recouvre, enlève au regard, ce qui en ce procès même constituera une direction, une intention de retrouver ou de trouver. Mais aussi la voile est ce qui recevant le souffle du vent se gonflera pour faire avancer un navire, ce qui fera partir. Ainsi mettre les voiles peut aussi bien viser le recouvrement nécessaire à la mise en place d’un secret, d’un contenu à protéger, que signifier « foutre le camp », « les mettre » pour reprendre des formules triviales mais qui contiennent d’heureuses connotations sexuelles. Espace de construction interne et mouvement dans l’espace sont ici désignés comme enjeux de la disposition du fantasme.
  • [6]
    Melman, 1989, p.107.
  • [7]
    L’adolescent se regarde regardé faisant jouer le corps où « collapsent » investissement narcissique et investissement objectal.
  • [8]
    Nous nous permettons de renvoyer à notre article : E. Bidaud, O. Ouvry (2007).
  • [9]
    Cf. la démarche spécifique des jeunes de banlieue.
  • [10]
    La dimension paradoxale du phénomène dysmorphophobique qui est de situer sur le corps propre un lieu à la fois rejeté et érotisé trouve un destin ultime dans le fétichisme. Cette thèse a été très largement défendue par A. Birraux.
  • [11]
    Nous renvoyons à l’article de L. Goldsztaub et S. Dupont (2006).
  • [12]
    Goldsztaub, Dupont, 2006, p. 310.
  • [13]
    Gutton, 1983, p. 439.
  • [14]
    Bourcet, Tyrode, 2004, p. 57.
  • [15]
    Lacan, 1960, p. 256.
  • [16]
    Paveau, Zoberman, 2009, p. 9.
    Aussi il convient de faire jouer ensemble deux registres : celui du voilement et celui de l’écriture du corps. Les tatouages, par exemple, inscrivent sur le corps un site à recouvrir, une localité « érogène » si l’on peut dire, jouant du montré et du caché. Ils provoquent du regard, suscitent donc un acte de voir, en même temps qu’ils poussent à un acte de lecture et, partant, un acte de savoir. Voilement et écriture nouent les deux dimensions du désir et de l’interdit : voir et savoir.
  • [17]
    Ouvry O. (1998). Le concept de « complémentarité des sexes » : intérêt pour une spécificité métapsychologique de l’adolescence. Thèse de Doctorat en psychologie. Paris : Université Paris VII - Denis Diderot.
  • [18]
    L’ensemble des textes de ce recueil reprend, avec une insistance significative tant cela suscitait de résistances de la part des psychanalystes contemporains de Freud (Ernest Jones, Mélanie Klein, Karen Horney…), les thèmes déjà présentés dans les Trois essais sur la théorie sexuelle (Freud, 1905) : que le vagin n’est découvert, en tant qu’organe pris dans le génital, qu’à l’adolescence ; qu’il n’y a de libido que masculine.
  • [19]
    Thèse indiquée dès les Trois essais sur la théorie sexuelle (Freud, 1905), repris tout au long de son œuvre jusque dans le dernier texte La féminité ayant trait à la « vie sexuelle » (Freud, 1933). Nous situons cette insistance de Freud en parallèle à celle appliquée à un autre point, également défendu tout au long de sa vie en dépit des résistances importantes qu’il a pu susciter. Il s’agit de la libido de nature masculine. Or celle-ci renvoie à la question de la nouveauté pubertaire. Si, de fait, il n’y a de libido que masculine, n’est-ce pas parce qu’il n’y a que du phallique dans l’Infantile, et donc d’inscription repérable que de ce côté ? Définir une libido féminine reviendrait à définir un « parcours » spécifiquement féminin, ce qui ne se retrouve pas dans les textes freudiens : la voie prise par la petite fille se définit par rapport à celui du garçon, en termes de décrochage (et non de parcours propre).
  • [20]
    On retrouve le principe de cette absence d’inscription dans les aphorismes de J. Lacan, tels : « il n’y a pas de signifiant pour le sexe de la femme » ; ou « l’écriture de La (barré) femme » – d’où découle, logiquement, le : « il n’y a pas de rapport sexuel ».
  • [21]
    Structure, au sens de ce qui organise les éléments constitutifs d’un système. C’est à partir de ce point qu’il nous a paru possible d’avancer que le temps pubertaire pourrait correspondre à la mise en place d’une pensée obéissant aux règles définissant le structuralisme. Nous renvoyons le lecteur à notre article : O. Ouvry (2008).
  • [22]
    Ces rapports sociaux sont régis par les règles de l’échange, le don et la dette, articulés à l’interdit de l’inceste.

1L’histoire du terme et du statut psychopathologique de la dysmorphophobie montre d’incessants déplacements en rendant impossible une unité de sens. M. Schachter (1971) et C. Koupernik (1962) ont pu associer les dysmorphophobies à la problématique de la psychose et aux idées délirantes. V. Mirabel (1992) et Y. Thoret (2003) ont pu en décrire le socle paranoïaque. J. de Ajuriaguerra (1980), D. Marcelli et A. Braconnier (2000) les ont rapprochées de la névrose obsessionnelle et de la catégorie « floue » des idées obsédantes. Ph. Jeammet (2004) les relie avec les états dépressifs. A. Birraux (1994) a développé sa recherche dans le sens d’une problématique fétichique de cette catégorie de symptômes.

2Le terme de dysmorphophobie s’est maintenu dans la littérature malgré quelques tentatives de changement. La présence de la « phobie » dans cette appellation peut, de fait, poser problème dès lors que ce trouble ne relève pas nécessairement de l’économie habituellement décrite du champ des phobies – qui suppose un plan de projection à l’extérieur de soi de l’objet d’angoisse, permettant ainsi des conduites de fuite et d’évitement. Ici l’objet d’angoisse se situe sur le corps propre, en un tracé du corps qui délimite un « site étranger » au sujet lui-même qui, en quelque sorte, est exilé d’une partie de lui-même. Aussi comme le formule A. Birraux, pour qui les dysmorphophobies rentrent dans la catégorie des phobies de la limite, des phobies du corps ou d’une partie du corps : « Ici, monde interne et monde externe se confondent dans l’épaisseur du corps, et témoignent d’une différenciation incertaine, souvent ponctuelle, de l’espace psychique » [1].

3Ce que nous privilégierons dans l’événement dysmorphophique du corps adolescent est la dimension de crise du rapport au regard. Le site phobique du corps dépose le regard à sa bordure, lorsque le sujet lui-même ne se regarde plus, ou se regarde trop jusqu’à être dans la haine d’une partie de son corps vécu comme honte du corps. La dysmorphophobie rend compte de cette crise du corps dans un rapport au regard qui s’impose en un événement de mise en abîme de la honte, de la déréliction d’un partiel du corps qui prendra valeur d’un creux à recouvrir.

Adolescence et dysmorphophobie

4Les phénomènes dysmorphophobiques de l’adolescent pourraient constituer un axe particulier permettant de situer une clinique de la honte [2]. Ces phénomènes, courants à l’adolescence, intéressent les deux sexes et sont classiquement définis comme dépendants des transformations pubertaires et du processus de sexuation [3]. S’ils peuvent concerner toutes les parties du corps les plus intéressées par ces transformations (pilosités, poitrine…), nous devons reconnaître, cependant, que le visage constitue le siège des préoccupations les plus importantes. Ils traduisent la hantise du sujet quant aux transformations du corps supposées tombées sous le regard de l’autre (et nous pouvons dire : déchoir dans le champ du regard). Nous dirons que le corps adolescent s’éprouve en un sentiment diffus de défiguration. Il est l’objet insistant du regard du sujet en une « contemplation » anxieuse. Ce qu’il voit sur lui-même, c’est la laideur, la difformité. Mais ce regard est aussi celui de l’autre, ce qui traduit une certaine communion des regards. La honte du corps se soutient dans l’espace du sujet à l’autre, par un regard qui unit les deux parties : un seul regard pour deux.

5Ce qui conditionne une certaine chute du sujet en ce phénomène de honte du corps propre est que le regard (objet a dans l’algèbre lacanienne) vienne à occuper une place, une seule, comme un point de vérité à partir duquel le sujet se sait regardé. J. Lacan a bien montré que le Moi ne se maintient que pour autant que l’objet a, ici le regard, ne soit pas quelque part, que l’on soit dans l’ignorance ou le doute de sa place. Autrement dit, que l’on ne sache pas d’où l’on est regardé. Le symptôme dysmorphophobique porte précisément témoignage d’un regard que « je » vois de l’autre et qui pointe une partie du corps qui se dissout dans la honte. Le « je » voudrait dérober au regard de l’autre ce lieu ressenti comme honteux, mais cette honte ne cesse de fasciner ce regard. C’est une partie du corps qui s’offre dans une persistante et obscène nudité, le hors-champ du désir. C’est ainsi ce qui ne peut rentrer dans aucune transaction, aucun échange. Le corps est dans une compacité qui n’ouvre aucun espace de déploiement du fantasme.

6Ce que nous poserons est que ce réel du corps fixe un point qui se résorbe au moins dans sa formulation phobique et les créations esthétiques de recouvrement. Ce réel du corps est la marque de la nouveauté pubertaire, en tant qu’avènement du Féminin tel que nous le développerons plus loin dans l’article.

Phobie et créations esthétiques

7Surgissant comme événement du corps, la phobie signe toute situation de passage comme solution à l’irruption d’un réel du corps, en l’occasion le réel génital. Celui-ci, contrairement à ce qui se passe dans l’infantile, ne trouvera pas d’écho dans le phallique hérité de l’enfance. Cette portion du corps phobique est comme mise à découvert, « obscènisée », sortie de la scène du fantasme. La crise du corps témoigne d’une chute partielle de la dimension imaginaire, vacance de la fonction spéculaire, qui fait vaciller le sujet au devant du regard de l’autre.

8

Aline est une jeune femme de quinze ans que je reçois pour la première fois. Elle regarde longuement le fauteuil où elle doit s’asseoir. Lentement, elle se « pose » enfin sur le bord du fauteuil, car c’est en effet comme une « pose » qu’elle nous donne à voir : droite, figée, le visage légèrement tourné, un visage barré sur presque toute une moitié d’une longue mèche de cheveux dont elle semble surveiller la bonne tenue. Elle pourra nous dire : « Il y a une partie de mon visage que je ne dois pas montrer… Je ne sais pas. Quand je me regarde dans la glace, cette zone (elle me montre l’endroit de la mèche), c’est trop. » Aline en dira davantage : « Ce qui est important, c’est qu’il y ait une limite, là, à ne pas dépasser. » Les mots utilisés par Aline, « je ne dois pas montrer », « c’est trop », « la limite à ne pas dépasser », « la zone » (un lieu qui n’en est pas tout à fait un), visent cet impossible à voir autant qu’à montrer et qui est là en pleine face, en excès comme une chair à vif. C’est ce que nous cherchons à dire sous ce que nous nommons le « corps obscènisé » de l’événement phobique. Ce qui s’approche alors est ce chaos de la chair, l’évanouissement des figures, ce qui tend à ne plus ressembler à rien, ou alors à quelque chose qui n’a plus de nom, se déforme et se dé-nomme [4].

9En opposition à la culpabilité, qui est d’ordre objectal, la honte est un émoi fondamentalement narcissique. C’est-à-dire qu’il engage l’être même en un sentiment envahissant d’effondrement ou de chute subjective. De cette honte du corps, indignité de son image, le sujet n’en fait pas un discours. Il veut la taire et ne la constitue pas comme une plainte, mais comme le terrain mouvant d’une dépressivité muette. Il y a honte de la honte dans une poursuite presque en abîme d’un point de fuite qui l’épingle. Il y va, en cette expérience de la honte, d’une angoisse qui isole et qui comporte un risque de néantisation.

10Nous voudrions montrer que face à ce sentiment diffus et difficilement nommable, le sujet adolescent va devoir s’inventer un espace de création qui trouve matière sur le corps propre, afin de se départir de la dimension anéantissante du regard. Ce dispositif esthétique, comme cosmétique du corps, voile du corps [5], va rendre possible une nouvelle disposition des regards en faisant « éclater » ce point fixe du regard. Nous partons de ce que nous avons établi dans notre travail sur le visage (Bidaud, 2009), comme processus rendu possible par le stade du miroir : la relation au visage propre et à celui de l’autre procède de ce que les regards ne peuvent faire rencontre. Le visage ne se constitue comme organisation de l’espace du visible et de la relation à l’autre que pour autant qu’il procède de la discontinuité des regards, d’un écart qui marque l’impossible de la complémentarité des regards. C’est de l’impossible rencontre des regards que procède la mise en place des visages comme un accord incertain de rencontre.

11Le visage règle le rapport possible à tout regard dans/de l’autre. Le regard ne peut trouver sa place que dans la capture signifiante que constitue le visage. Le rapport au visage permettant seul de soutenir le regard. Nous admettrons ainsi que le visage est un espace construit par où s’arrange l’impossible rencontre des regards. Comme effet et travail pubertaire du « rejoue » du stade du miroir, le symptôme dysmorphophobique porte témoignage d’une crise du visage du corps, de l’expression localisée d’un dé-visage du corps. Le site phobique du corps est un lieu « dé-visagé », un lieu qui échappe à l’organisation « visagée » de toute relation à l’Autre, dès lors qu’il est pointé, hanté par un regard qui semble surgir de l’espace de l’entre-deux sujets. « À partir du moment où l’objet a émerge, de sujet il n’y en a plus : il est soufflé ; il se produit ainsi une chute de la dimension de l’imaginaire, puisque cette dimension ne se maintient que dans la mesure où la fenêtre du fantasme reste tendue, que son cadre reste dressé » [6].

12C’est la dissolution du fantasme qui accompagne cette présentification du regard dans l’entre-deux-sujets. Cette partie du corps, non pas désignée au regard de l’autre, mais possédée par le regard, est soudain retirée au jeu du fantasme. Il devient un réel, un creux du corps inoccupable. C’est celui-là même que nous qualifions d’avènement du Féminin, marque de la nouveauté pubertaire. Toute opération de voilement et de mise en perspective esthétique du corps vise à rendre envisageable la relation sexuée à l’Autre en produisant une occultation du regard comme condition de la relance du cadre du fantasme.

Dysmorphophobie et processus de sexuation

13Les craintes dysmorphophobiques renvoient aux appréhensions de ce qu’une position sexuée du côté féminin ou masculin peut évoquer d’un engagement impossible à tenir au devant du regard des autres. C’est à partir d’une conviction de contenir en un creux imaginaire du corps une négativité honteuse que l’adolescent, ou l’adolescente, se ressent exclu(e) du jeu social et de tout registre de la séduction, et se fait un refuge de cette condition de proscrit(e) en se mettant en vacance de l’épreuve de sexuation. Nous entendons dans le discours d’un adolescent ce : « je n’ai pas ce qui fait la normalité sexuée du corps des autres ». Ce que sont les signes de la sexuation : la poitrine, les hanches, les formes pour une jeune fille, ou le torse, les épaules, la voix pour le garçon, tout cela est ressenti comme « n’étant pas » ou insuffisamment là. C’est sur le fond de leur absence que ces objets en négatif vont occuper une place singulière, un non-lieu paradoxal d’être ce par quoi le sujet reconnaît, non pas un manque, mais un creux du corps, comme la place vide d’un puzzle désignant le contour de la pièce qui viendra la combler.

14Ainsi telle pièce de vêtement, tel objet élu collé au corps, prennent-ils statut provisoire d’être un bouchon sur un vide à recouvrir. Autrement dit, ces objets, ou contours phobiques du corps, présentifient l’absence et la masquent à la fois, manifestant la continuité souvent relevée entre objet contraphobique et objet fétiche. Mais s’agit-il surtout d’une position en attente, d’un arrêt sur image plus que d’une posture contemplative, d’une relation figée au cadre d’un vide ? Aussi nous souscrivons à l’hypothèse défendue par L. Goldszaub et S. Dupont (2006) de mise en suspens de l’identité sexuée, mise en suspens du rapport sexuel à l’autre soutenue par l’événement dysmorphobique. Cet arrêt sur image sur un site du corps constituera le plan d’une création, d’une écriture du corps, en tant qu’il sera le cadre d’une disposition de traits, de griffes et de marques, d’un dispositif de re-signification du corps. Nous défendons ainsi l’idée que l’épreuve phobique de l’adolescent comme « événement du corps » est le lieu même de la reconstruction de l’espace du fantasme qui rend possible le positionnement sexué psychique. C’est dans un certain travail sur le corps que le sujet s’assumera comme regardant et regardé [7], aimant et aimable. Nous désignons ici le passage de l’objet contraphobique en sa fonction d’étayage du Moi aux objets esthétiques de voilement, comme le parcours original pour chaque sujet du processus de sexuation lié au pubertaire.

Adolescence et processus de « visagéification »

15L’adolescence, en tant qu’elle marque une reprise du stade du miroir (Rassial, 1996), c’est-à-dire un « rejoue » de l’échange des regards, engage le sujet à se poser (à trouver sa pose) dans son rapport à son image propre et à l’image de l’Autre. L’adolescence est ce moment où, dans l’après-coup du stade du miroir, le sujet va devoir se réapproprier une image du corps transformée, et ceci sous le regard de l’Autre. Nous voulons dire que le sujet ne peut éviter, dès lors, la question du « regardable » et de l’esthétique de ce « regardable » : que suis-je, peut-il penser, sous le regard de l’Autre, et qu’est-il, cet Autre, sous mon regard ? Un objet attrayant, un objet de désir, ou, à l’inverse, un objet sans attrait tirant du côté du risible, du honteux et plus encore de la laideur ?

16Aussi, toute une problématique du voilement situera l’adolescent vers ce que nous pouvons nommer sa « revisagéification » nécessaire comme réponse à son questionnement dans le champ de l’échange des regards [8]. Le voilement de l’adolescent, ou processus esthétique de résolution, inclut aussi bien l’importance que celui-ci accorde au vêtement, comme parure ou parade, que le souci de l’esthétique du corps, de l’art de la coiffure au maquillage, en allant jusqu’à l’inscription et l’ornementation sur le corps propre : tatouage et piercing. La mode et le style de l’adolescent jouent sur un partage entre le bon et le mauvais goût, l’ordre et le désordre, le beau et le laid. Ils courent au devant du regard pour le capter, le provoquer, le questionner et, également, l’apaiser à travers la codification, la ritualisation et l’uniformisation des modalités d’habillement des adolescents. C’est enfin le corps tout entier dans son rapport à l’espace qui fait jeu du geste et du mouvement à inventer : la danse, la démarche, le rythme, qui traduisent la chorégraphie du corps en quête d’une nouvelle visibilité dans le champ de l’Autre [9]. Ce que nous entendons sous la notion de « visagéification » du sujet désigne ce jeu de découvrement-recouvrement du corps propre comme nécessaire médiation dans la rencontre des regards. L’adolescence engage, en effet, une rencontre et une invention de l’Autre de l’autre sexe comme altérité vraie, sujet et objet du désir, rencontre que nous spécifions comme rencontre des regards. Aussi, par invention de ce dernier, nous indiquons ce par quoi l’autre de l’Autre est trouvé-retrouvé, ce par quoi s’opère la « revisagéification » de son corps, c’est-à-dire son voilement.

17Cette idée de construction du visage à l’adolescence peut être comprise comme cet espace où se joue et s’assume la revisite du stade du miroir, en particulier du côté du regard et de son appropriation, permettant de mettre en place les nouveaux montages entre le sujet et l’objet pour construire une relation génitalisée à l’autre sexe. Par le voilement, dans le sens que nous avons donné à ce terme, le corps prend visage, il s’envisage dans son rapport à l’Autre, il se construit comme regardable et s’invente comme désirable. Cette partie du corps, que tel sujet regarde comme détestable et honteux, va devenir dans la construction esthétique du voilement un lieu paradoxalement désigné au regard de l’autre. Il va faire appel et devenir un enjeu de la relation sexuée ; ainsi, le terrain même de la honte du corps va devenir un enjeu d’érotisation, une voie nouvelle d’invocation de l’Autre [10]. La mèche de cheveux de notre jeune patiente qui venait à couvrir ce « trop », cet impossible à montrer, a permis dans l’avancée du transfert de faire passer ce qui n’était que la désignation muette d’un lieu du corps à un « tenant lieu » de paroles vivantes, de paroles « adressées ».

18Aussi, la logique phobique dans son rapport au corps est de désigner un lieu qui dans la honte même qu’il enferme va être un point de captation, mais aussi d’interrogation du regard. Ce point phobique du corps se caractérise par sa division d’être à la fois exhibé et phallicisé, et, dans le même temps, voilé et rejeté [11]. « L’adolescent cache ces parties de son corps comme des horreurs, mais aussi comme des signes de richesses, comme des trésors fortement érotisés. Il arrive même que cette fonction de voile soit mise en abîme par certains adolescents qui cherchent à cacher qu’ils cachent leurs corps […]. Bien sûr, dans ce jeu de voiles et de voilements, s’entremêlent désir de masquer au regard des autres, mais aussi de suggérer, de montrer, de titiller, de susciter » [12]. Apparaît, dans ce jeu de « vêture » et de parade, ce qui spécifie la singularité de ce que l’on doit entendre sous la notion de transaction fétichique.

Stratégie fétichiste, le beau

19La stratégie fétichique, analysée par de nombreux auteurs, est un effet de structure qui ne doit pas, dans la clinique de l’adolescent, être référée à une pente pathologique et à une organisation fétichiste vraie. La survenue d’un rapport fétichique au corps manifeste un temps transitoire de pose ou de repli face à l’étrangeté de l’événement pubertaire, ce que Ph. Gutton a pensé sous la notion de « transaction fétichique » [13]. Si, cependant, la stratégie fétichique est un temps d’attente, un « suspens » du processus du sexuation, elle contient une dynamique essentielle de création et d’invention qui décidera de la mise en place de nouveaux montages entre le sujet et l’objet pour construire une relation génitalisée à l’autre de l’Autre sexe. « En effet, l’objet fétiche devient un symbole qui permet à l’adolescent de véhiculer un sens qu’il propose aux autres. Il est pour le sujet un signal envoyé à autrui. Il est un gage de ce que le sujet propose. Il est le langage qui va permettre au sujet adolescent de s’inscrire, à partir de la reconnaissance de certains signes, dans un nouveau statut sexuel » [14]. Ce que nous décrivons est ce lien de continuité, et le travail au sein même de ce lien, entre le site phobique du corps, les mécanismes fétichiques associés et ce que nous nommons les formations esthétiques de résolution. Le corps se construit alors comme regardable dans la mesure où il acquiert un visage pour l’Autre, un visage-homme ou un visage-femme, s’inscrivant et s’identifiant au registre de la sexuation. C’est le corps tout entier qui est ramassé comme visage dans les traits imaginaires du contour de l’appréhension phobique du jeune adulte.

20Nous dirons donc que : phénomènes phobiques et formations esthétiques forment les deux pôles structurels du processus de sexuation. Si la fixation phobique sur un point du corps constitue comme un « arrêt sur image », un « suspens » du processus, les formations esthétiques ouvrent un espace de création identitaire qui rend possible la rencontre des regards. Le souci adolescent du beau dans son rapport au visage-corps marque la nécessité de faire limite à cet « évidement » du corps impliqué par l’événement phobique. Il renvoie à l’idée de barrière devant le surgissement du réel pubertaire. On rappellera que J. Lacan proposait que le fait esthétique soit ce qui retient contre le flux destructeur de la jouissance : « La vraie barrière qui arrête devant le champ innommable du désir radical, pour autant qu’il est le champ de la destruction absolue, c’est à proprement parler le phénomène esthétique » [15]. À concevoir l’idéal du beau dans son lien au visage, nous avons à le penser comme une couverture, une pudeur sur un en deçà destructeur. Le visage participe toujours de ce rapport à ce qui doit faire limite à ce qui le déconstruit.

Écriture du corps

21Nous proposons ici de donner à la notion d’écriture de corps le sens d’être ce par quoi est privilégié le registre du « découvrement-recouvrement » du corps propre et les effets de traces. Nous désignons ainsi sous la notion d’écriture de corps tout mouvement de « traçage » par lequel le corps est délimité par le sujet lui-même, qui se désigne et se représente au champ de l’Autre. Du corps, le sujet en fait, par exemple, le contour par les trouvailles de ses investissements vestimentaires ; il peut également « pointer » un lieu du corps, l’inscrire d’un sceau privé par l’inscription du tatouage, jusqu’à le raturer dans les coupures des scarifications. Il s’agirait de faire l’hypothèse, et d’explorer, la scripturalité du corps, non plus comme un objet extérieur au texte, mais comme un de ses constituants. Tout un ensemble de processus propre au temps pubertaire produit une véritable forme langagière, textuelle et sémiotique des corps, que certains chercheurs, dans le champ littéraire et de la linguistique, ont désigné sous le terme de corpographèse (Paveau, Zoberman, 2009).

22Ce terme renvoie aussi bien aux significations posturales et gestuelles, qu’à la constitution littéraire, picturale, scénique de corps signifiants. « Toute une série de situations et de procédures plus ou moins clairement institutionnalisées favorisent en effet des marquages corporels qui sont de l’ordre de la corpographèse : militarisation du corps par les entraînements et les exercices, inscription de la religion par l’ascèse qui sculpte le corps comme l’exercice spirituel forme la pensée (processus éventuellement achevé par l’adoption d’une manière spécifique de se vêtir), modifications corporelles volontaires par adoption du “ système de la mode ” (habillement, coiffure, démarche, voire amaigrissement et modifications chirurgicales) » [16].

L’autre de l’autre sexe

23Le prolongement de cette construction esthétique de présentification de l’adolescent aux jeux sociaux et au regard de l’autre a pour finalité la trouvaille de ce qui viendra stabiliser cette épreuve de l’effraction qui caractérise le temps pubertaire initial. Ils permettent la « présentation » de l’adolescent dans le jeu social pour s’exposer à la rencontre de l’autre, notamment l’autre de l’Autre sexe, clef résolutive de ce qui peut être appelé le processus adolescent succédant au temps pubertaire initial. Nous avons déjà travaillé [17] à spécifier ce qui définit ce temps – radicalement nouveau auprès de ce qui constituait l’Infantile (centré exclusivement sur le phallique). La nouveauté se marque d’un réel pubertaire, au sens de l’irruption d’une nouveauté que rien ne venait laisser présager dans l’Infantile, et qui, surtout, ne trouve pas d’inscription dans le matériel légué par celui-ci. Elle est à situer dans ce qui se profile de la puberté dans la plupart des textes de Freud constituant le recueil de La vie sexuelle (Freud, 1907-1931) [18] : à savoir l’avènement de l’Autre sexe, repéré par Freud en termes de déplacement de la zone érogène du clitoris au vagin [19]. Nous avons proposé d’appeler cette nouveauté pubertaire : le Féminin (Ouvry, 2001). Par définition, cette nouveauté échappe au phallique c’est-à-dire au symbolique dans lequel un seul sexe existe [20]. Elle ne trouve pas d’inscription dans ce référentiel – ce qui explique que l’Autre sexe et le Féminin soient écrits avec une majuscule. Elle vient bousculer la différence des sexes, telle qu’elle s’était mise en place dans l’enfance. C’est en ce sens que l’on peut parler d’effraction pubertaire, voire de violence pubertaire. La nouveauté pubertaire vient, de fait, rendre caduc le référentiel de l’Infantile, en en changeant la nature même. Les souvenirs qui en resteront n’auront plus d’autres valeurs que celles de traces, aussi inopérantes que des vestiges d’une civilisation passée dont on a perdu les principes organisationnels. Il manquera le contexte qui viendra leur donner vie et signification.

24Formalisée par l’opérateur logique que constitue le complexe d’Œdipe, cette différence entre les sexes est, en effet, dans l’Infantile exclusivement centrée sur le phallique. Il y a un seul référentiel pour deux sexes, ce qui conduit à une répartition naturelle selon le mode de l’avoir ou de ne pas l’avoir. La différence se fait alors selon une valence purement quantitative, correspondant à un positionnement de part et d’autre du miroir. Il n’y a donc pas d’altérité vraie, au sens où ce qui vient différencier les deux sexes ne repose pas sur une différence de nature ou d’essence (une différence qualitative), mais bien sur une comparaison – avoir ou ne pas avoir la même chose – c’est-à-dire, au bout du compte, sur un même. Cette centration sur le référentiel phallique avant la puberté intervient dans l’organisation de la représentation, et donc du monde. Cette représentation se trouve, en effet, centrée par et sur un seul référentiel dont on peut trouver une analogie en peinture dans le point de perspective, tel qu’il est introduit dans la peinture du quattrocento, où un point structure l’espace de la figuration en fixant les ordonnées, les abscisses et un point de fuite. Cette organisation historique de l’espace, où un axe vient ordonner l’image et coordonner ses différentes parties (Panofsky, 1975), peut être rapprochée de ce que J. Lacan décrit comme stade du miroir, permettant l’introduction d’une figuration dans l’image, au sens de ce qui vient faire identité. Cette figuration vient recouvrir le manque originel de toute organisation psychique et permettre au statut de l’imaginaire de tenir et de « représenter » (au sens de personnifier). On y retrouve l’effet de voile sur le manque structurel (soit le non rapport sexuel) de toute figuration.

25À l’adolescence, cette perspective perd cette centralité en se condensant autour de l’évidement que vient inscrire le réel pubertaire, conséquence de la nouveauté pubertaire. Par son avènement, le Féminin, défini comme réel pubertaire sans assignation dans le phallique de l’Infantile, réorganise de fait cet espace en y introduisant le manque dans l’interstitiel de ce qui le constitue. Ainsi y a-t-il passage et forçage d’une spatialité euclidienne centrée sur un point de perspective (monisme phallique de l’Infantile), à une spatialité organisée sur le principe de cohésion interne des différents éléments le constituant et où aucun n’a plus de priorité sur les autres. D’une organisation centrée par un point de fuite, il y a transposition en un volume constitué d’entités différenciées, liées entre elles par un jeu de force et d’équilibre réciproques. Chaque élément devient alors nécessaire à la stabilisation de l’ensemble et aucun ne prend la place d’organisateur central. Nous y voyons un espace organisé selon les principes mis en valeur par le structuralisme [21].

26Tel devient l’espace social, où la famille n’est plus la référence et se dilue dans le groupe des autres (en général) qui est le nouveau lieu de référence. Ce sera le lieu d’une rencontre possible d’un autre qui pourra s’interposer entre soi et la nouveauté pubertaire, venant la recouvrir d’une représentation faisant barrage à cet abîme du réel, tout en l’intégrant dans le jeu social par la différence des sexes telle que nouvellement installée. Car cette différence des sexes n’a plus de point commun avec celle de l’Infantile. Elle n’est plus inscrite dans une valence quantitative, mais une valence qualitative, venant différencier les positions féminine et masculine en termes d’altérité vraie, radicale, et substituer l’« autre » sexe de l’Infantile par l’« Autre » sexe de la maturité. Cet Autre sexe, comme nous l’avons déjà dit, ne trouve pas d’inscription dans l’Infantile. La représentation de la différence des sexes qu’il intègre ne fonctionne plus. Il n’y a plus de voile opérant et disponible à apposer en face de cette nouveauté qui ne trouve pas de place au sein du système œdipien phallique. Ou, pourrions-nous dire alors, le masque de cette valence quantitative n’opère plus. Rien ne vient donc faire écho dans le symbolique à cet Autre sexe. Il y a à inventer une nouvelle configuration pour le contenir.

27Dans ce processus d’invention, les temps inauguraux dont nous parlions en début de cet article (dysmorphophobie et recouvrement esthétique du corps) constituent la première étape d’intégration de la nouveauté pubertaire. La deuxième consiste en l’ouverture rendue alors possible de l’adolescent au jeu social. La troisième est la rencontre d’un autre de l’Autre sexe dans cet espace social. Cette dernière étape est sous-tendue par l’intégration du Féminin (réel pubertaire) à un schéma social suffisamment fiable et stabilisé. La pacification et l’apaisement de l’effraction pubertaire en sont la condition. Celle, également, d’une adolescence dite « normale » (le trouble psychopathologique peut être défini comme un aléa de ce processus) ou de sa fin possible (rencontre de l’autre de l’Autre sexe). Pour ce faire, le Féminin doit trouver dans l’autre de l’Autre sexe une figuration, venant par là-même conjuguer une inconsistance, trace de ce réel pubertaire, avec une consistance (qui pourrait alors faire voile à ce réel pubertaire). La différence des sexes, telle que nouvellement instituée par la puberté et qui porte la trace d’une altérité vraie ou Autre, prête à cela.

28Car le schéma social opérant encore à l’adolescence est celui hérité de l’enfance. Il s’agit du schéma œdipien. La nouveauté pubertaire, par le fait qu’elle échappe à toute inscription dans le symbolique, ne peut générer de nouvelles organisations sociales et modalités d’échange dans les rapports sociaux [22]. Il y a donc nécessité de créer une articulation entre le schéma œdipien de l’Infantile et la nouveauté pubertaire. Sans cela, le Féminin en resterait au stade de réel pubertaire, c’est-à-dire d’un impossible. Cette articulation est le fait de la collusion de ces deux dimensions selon un mécanisme qui trouve dans un jeu optique une métaphore approchante. Elle consiste en l’accommodation du cadre organisateur fonctionnel œdipien sur ce réel pubertaire pour offrir une « figuration » possible au Féminin. Cet artifice est la condition de l’intégration de cette nouveauté pubertaire dans le jeu social sous un mode pacifiant et opérant, c’est-à-dire résolutif du processus adolescent. Pour assurer cette collusion, il y a nécessité à ce qu’un élément vienne faire articulation, accroche entre le Féminin et l’autre de l’Autre sexe, soit entre un impossible, un manque et un vide dans l’autre, ouvrant à sa rencontre. La différence des sexes, telle que nouvellement instituée par la puberté, permet cette articulation et inscrit ce que nous avons appelé altérité vraie ou radicale. L’autre de l’Autre sexe contient cette part de réel du corps que nous avons situé comme constituant la nouveauté pubertaire – par son sexe Autre. Le référentiel de sa rencontre reste le même que celui de l’Infantile : le référentiel œdipien. Ainsi, le Féminin (qui, par définition, y échappe) trouve-t-il dans l’autre de l’Autre sexe une modalité d’échange fonctionnant dans le social. C’est en tant que tel que le Féminin peut prendre existence et consistance – sans cela, il échappe à tout repérage possible. De la différence des sexes de l’Infantile (avoir ou ne pas avoir) est ainsi conservé le cadre formel, pour introduire l’Autre sexe en termes d’altérité vraie dans le jeu social.

29La psychopathologie adolescente trouve son principe dans les aléas de cette figuration du Féminin qui peut conduire le sujet adolescent à l’exclusion du jeu social. Tous les succédanés peuvent, de fait, prendre la place de l’autre de l’Autre sexe, aux premiers rangs desquels les objets addictifs : le « rien » de l’anorexie mentale, l’objet toxique voire l’objet de consommation, porteurs de l’illusion de la rencontre avec un objet de la réalité exigeant et source de jouissance, conduisant l’adolescent aux impasses subjectives de ces fausses solutions.

Le processus adolescent

30À travers cet écrit, a été défini un parcours qui pourrait se dessiner selon un cercle dont les deux bords ne se rejoignent pas, formant une spirale ascendante : le point de départ est le réel du corps, l’évidement initial du pubertaire, ressentis comme Autre sexe (le Féminin), puis l’éprouvé de la honte, la dysmorphophobie et la création de l’objet esthétique de recouvrement de cet éprouvé du vide, d’où résulte la présentification et l’intégration de l’adolescent dans les jeux sociaux centrés sur l’interdit de l’inceste (schéma œdipien), pour permettre la rencontre de l’autre de l’Autre sexe – qui intègre en soi l’évidement initial.

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Mots-clés éditeurs : visage, honte, réel, dysmorphophobie, pubertaire

Date de mise en ligne : 23/01/2012

https://doi.org/10.3917/ado.078.0801

Notes

  • [1]
    Birraux, 1995, p. 119.
  • [2]
    On rappellera que P. Janet définissait la dysmorphophobie comme « honte de son propre corps ».
  • [3]
    Nous entendons sous le terme de sexuation un processus propre au temps adolescent par lequel se nouent assomption de l’identité sexuée et sexualisation des rapports aux autres.
  • [4]
    Ceci rejoint la problématique de la clinique du dévisagement, où dans les expériences de rupture dans le lien au visage, le « Je » semble se délier de l’image. Nous renvoyons au travail de S. Le Poulichet (2003).
  • [5]
    Considérons les deux sens de ces deux homophones : voile au masculin et voile au féminin.
    Le voile est ce qui cache, recouvre, enlève au regard, ce qui en ce procès même constituera une direction, une intention de retrouver ou de trouver. Mais aussi la voile est ce qui recevant le souffle du vent se gonflera pour faire avancer un navire, ce qui fera partir. Ainsi mettre les voiles peut aussi bien viser le recouvrement nécessaire à la mise en place d’un secret, d’un contenu à protéger, que signifier « foutre le camp », « les mettre » pour reprendre des formules triviales mais qui contiennent d’heureuses connotations sexuelles. Espace de construction interne et mouvement dans l’espace sont ici désignés comme enjeux de la disposition du fantasme.
  • [6]
    Melman, 1989, p.107.
  • [7]
    L’adolescent se regarde regardé faisant jouer le corps où « collapsent » investissement narcissique et investissement objectal.
  • [8]
    Nous nous permettons de renvoyer à notre article : E. Bidaud, O. Ouvry (2007).
  • [9]
    Cf. la démarche spécifique des jeunes de banlieue.
  • [10]
    La dimension paradoxale du phénomène dysmorphophobique qui est de situer sur le corps propre un lieu à la fois rejeté et érotisé trouve un destin ultime dans le fétichisme. Cette thèse a été très largement défendue par A. Birraux.
  • [11]
    Nous renvoyons à l’article de L. Goldsztaub et S. Dupont (2006).
  • [12]
    Goldsztaub, Dupont, 2006, p. 310.
  • [13]
    Gutton, 1983, p. 439.
  • [14]
    Bourcet, Tyrode, 2004, p. 57.
  • [15]
    Lacan, 1960, p. 256.
  • [16]
    Paveau, Zoberman, 2009, p. 9.
    Aussi il convient de faire jouer ensemble deux registres : celui du voilement et celui de l’écriture du corps. Les tatouages, par exemple, inscrivent sur le corps un site à recouvrir, une localité « érogène » si l’on peut dire, jouant du montré et du caché. Ils provoquent du regard, suscitent donc un acte de voir, en même temps qu’ils poussent à un acte de lecture et, partant, un acte de savoir. Voilement et écriture nouent les deux dimensions du désir et de l’interdit : voir et savoir.
  • [17]
    Ouvry O. (1998). Le concept de « complémentarité des sexes » : intérêt pour une spécificité métapsychologique de l’adolescence. Thèse de Doctorat en psychologie. Paris : Université Paris VII - Denis Diderot.
  • [18]
    L’ensemble des textes de ce recueil reprend, avec une insistance significative tant cela suscitait de résistances de la part des psychanalystes contemporains de Freud (Ernest Jones, Mélanie Klein, Karen Horney…), les thèmes déjà présentés dans les Trois essais sur la théorie sexuelle (Freud, 1905) : que le vagin n’est découvert, en tant qu’organe pris dans le génital, qu’à l’adolescence ; qu’il n’y a de libido que masculine.
  • [19]
    Thèse indiquée dès les Trois essais sur la théorie sexuelle (Freud, 1905), repris tout au long de son œuvre jusque dans le dernier texte La féminité ayant trait à la « vie sexuelle » (Freud, 1933). Nous situons cette insistance de Freud en parallèle à celle appliquée à un autre point, également défendu tout au long de sa vie en dépit des résistances importantes qu’il a pu susciter. Il s’agit de la libido de nature masculine. Or celle-ci renvoie à la question de la nouveauté pubertaire. Si, de fait, il n’y a de libido que masculine, n’est-ce pas parce qu’il n’y a que du phallique dans l’Infantile, et donc d’inscription repérable que de ce côté ? Définir une libido féminine reviendrait à définir un « parcours » spécifiquement féminin, ce qui ne se retrouve pas dans les textes freudiens : la voie prise par la petite fille se définit par rapport à celui du garçon, en termes de décrochage (et non de parcours propre).
  • [20]
    On retrouve le principe de cette absence d’inscription dans les aphorismes de J. Lacan, tels : « il n’y a pas de signifiant pour le sexe de la femme » ; ou « l’écriture de La (barré) femme » – d’où découle, logiquement, le : « il n’y a pas de rapport sexuel ».
  • [21]
    Structure, au sens de ce qui organise les éléments constitutifs d’un système. C’est à partir de ce point qu’il nous a paru possible d’avancer que le temps pubertaire pourrait correspondre à la mise en place d’une pensée obéissant aux règles définissant le structuralisme. Nous renvoyons le lecteur à notre article : O. Ouvry (2008).
  • [22]
    Ces rapports sociaux sont régis par les règles de l’échange, le don et la dette, articulés à l’interdit de l’inceste.

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