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Article de revue

Le management pédagogique de proximité

Pages 79 à 86

Notes

  • [1]
    Les chiffres de ce paragraphe ne donnent que des ordres de grandeur. Pour plus de précisions les lecteurs sont invités à se reporter à la nouvelle édition du Système éducatif français et son organisation (SEF).
  • [2]
    Association nationale des directeurs et coordonnateurs territoriaux de l’éducation des villes.
  • [3]
    Voir Administration & Éducation n° 138 (2/2013), « La GRH de proximité ».

Évoquer le management pédagogique de proximité exige en premier lieu de préciser ce dont il s’agit, définir quels sont les objets et les acteurs concernés. Il se distingue du management public pratiqué au niveau macro c’est-à-dire, en France, celui qualifié de « national », où l’on considère les comparaisons internationales, où s’arrête la politique publique d’éducation, où se décident les structures, où se fixent les programmes, les horaires, les diplômes, les examens, les nouveaux dispositifs pédagogiques, l’évaluation et enfin où s’arrête la formation et le recrutement des enseignants et des cadres. À lire cette longue liste, on pourrait croire qu’il ne reste aucune marge de manœuvre au terrain. Pourtant, le niveau méso, celui des académies, des bassins de formation et des circonscriptions de premier degré, détermine les stratégies pédagogiques territoriales. Enfin, au niveau dit micro (ce n’est pas un jugement de valeurs), celui des établissements scolaires et des classes, se conçoivent, se construisent et s’assurent les actions pédagogiques effectives, le contact direct avec les élèves et leurs familles, la mesure des résultats obtenus. Dans ce texte consacré au terrain, après quelques considérations sur la conduite du changement puis sur les stratégies pédagogiques, nous précisons les types de management public non marchand susceptibles d’être pratiqués dans les établissements scolaires et les circonscriptions, avant d’énoncer quatre principes d’action pour le management pédagogique de proximité, pour enfin terminer par des remarques sur le croisement des compétences professionnelles.

La conduite du changement

1On peut s’intéresser au management pédagogique de proximité dans différentes perspectives. Ici, nous le faisons en le considérant comme un élément essentiel de la conduite des changements et du pilotage au sein de l’éducation nationale. La thèse que nous soutenons est simple à énoncer : depuis deux décennies au moins, malgré ses nombreux problèmes, le système scolaire français fonctionne encore ; menacé, il ne s’effondre pas, en grande partie grâce à ses cadres de proximité. Pourtant, ils sont un peu les oubliés des considérations ministérielles ces dernières années, ce qui les blesse beaucoup, sans entamer une légendaire loyauté et un sens des responsabilités appréciés des recteurs. Ils occupent une place essentielle mais très inconfortable. Les 850 000 [1] enseignants, pratiquement sans liens horizontaux entre eux, constituent en termes d’organisation vue par les sciences de gestion ce que les Québécois nomment parfois « une galette », une vaste galette horizontale. Sur celle-ci repose une relativement petite pyramide hiérarchique (avec, en gros, quatre niveaux) composée de 20 000 cadres dont environ 14 000 chefs d’établissements et adjoints. Qui s’interroge sur les liens entre cette pyramide et la galette ? Comment se font les interactions descendantes et ascendantes ? Par quels liens chacune d’elles peut agir sur l’autre ? Je ne suis pas loin de partager le récent propos de Philippe Tournier lorsqu’il affirmait que les chefs d’établissements secondaires se voient attribuer « une délégation locale de la gestion des complications ». Comment pourrait-on affirmer le contraire si l’on observe que les responsabilités et surtout les tâches qu’ils ont à exercer sont de plus en plus nombreuses, diverses, délicates, redoutables de complexité, truffées de paradoxes, voire de contradictions et néanmoins assorties de stricts rendus de comptes ? L’une de leurs responsabilités les plus visibles concerne la gestion des ressources humaines qui devrait être par essence de proximité, dont ils tentent d’assurer le peu qu’ils peuvent, enfermés et contraints par un redoutable carcan bureaucratique entre les seules mains de l’administration centrale, très solide car appuyée par les organisations syndicales qui se repaissent de normes nationales, de réglementations et de circulaires plus tatillonnes les unes que les autres. Comme le diable de Goethe, elles vont dans les moindres détails (pour exister, il faut bien que chaque bureau ait sa ligne ou son paragraphe !), traquant tous les espaces où les initiatives pourraient se développer, niant l’idée même de responsabiliser les acteurs locaux dépourvus à leurs yeux des compétences dont ils seraient les seuls détenteurs.

2Pourtant, depuis la création des EPLE, les responsables de proximité, avec ce précieux loyalisme qui les caractérise, se sont inscrits dans les demandes de rendus de comptes qui s’accroissent chaque jour un peu plus de la part de leurs deux tutelles, étatique et territoriale. Tout se passe comme si l’administration centrale ne voulait ou ne pouvait pas se défaire de sa longue tradition jacobine de productions d’injonctions, comme si elle ne savait pas pratiquer des contrôles a posteriori. Puisque tout le monde peut apprendre, on peut rêver qu’un jour verra la technostructure évoluer dans ses pratiques et qu’elle placera enfin les cadres de proximité dans une situation propice à l’exercice de leurs lourdes responsabilités, permettant à leur tour aux équipes d’enseignants d’innover, d’expérimenter et de pratiquer le retour d’expériences.

3Les cadres de proximité ont à donner du sens à l’action pédagogique collective pour favoriser le partage de compétences professionnelles et les co-constructions. Dans le contexte actuel où les rapports humains sont difficiles, tendus, sourcilleux, soupçonneux, à l’éducation nationale comme dans les autres secteurs de la société civile, ils ont à se montrer exemplaires en termes d’éthique, de transparence et de rigueur, en limitant, autant que faire se peut, les écarts entre ce qu’ils disent et ce qu’ils font. Ceci vaut, bien sûr, pour tout le management public non marchand, donc aussi et en premier lieu pour celui des établissements scolaires et des circonscriptions du premier degré. Toutefois la mise en œuvre d’une telle posture n’est pas simple : il faut tenir compte des paradoxes qui traversent le milieu pédagogique français. En particulier la difficile articulation de trois caractéristiques qui le concerne, connues de tous et presque antinomiques : une forte présence d’altruisme individuel, une inébranlable solidarité de corps (« l’esprit CAMIF » et la prédominance de redoutables corporatismes) et une incroyable autarcie pédagogique collective. Pour dire vrai, en dehors de petits groupes innovants comme ceux proches des Cahiers pédagogiques, on observe peu de coopérations de proximité : la proximité fait peur ! De plus, et cela peut surprendre le reste de la société civile qui observe sévèrement notre École, les enseignants s’interrogent rarement sur la qualité de leur action : ils ne cherchent pas à la mesurer, ils s’y refusent même, déclarant ne pas en voir l’intérêt, et les pratiques d’autoévaluation sont encore exceptionnelles en France, absentes des formations, aussi bien de celles des enseignants que des cadres.

4Enfin, et ce point est essentiel pour les décideurs, qu’ils soient au niveau national ou sur le terrain, les écoles et les EPLE ne demandent pas de changement ; ils souhaitent seulement des améliorations de détails et s’attachent à la seule défense du statu quo, ce qui est lourd de conséquences en matière de management, fût-ce de proximité. Les tensions créées par le récent projet de réforme du collège illustrent cela. Il s’ajoute à de nombreux autres exemples de réformes, toutes contestées, comme le rapporte Antoine Prost dans ses écrits.

Stratégies pédagogiques

5Le management pédagogique de proximité repose sur une vision stratégique pédagogique soucieuse d’efficacité, à condition qu’elle soit partagée par les acteurs, ce qui requiert certaines qualités du responsable en matière de leadership. Une telle vision permet de construire une planification pédagogique et d’engager de l’ingénierie, pratique banalisée en formation continue des adultes depuis quatre décennies. Cela s’accompagne du repérage et de l’organisation des ressources disponibles, qu’elles soient humaines, intellectuelles ou matérielles. Cela permet aussi au management de proximité de donner des impulsions et l’invite à pratiquer un leadership pédagogique partagé, accompagné des mécanismes de régulation nécessaires. Bref, c’est bien de pilotage pédagogique qu’il s’agit.

6Les pratiques managériales effectives sur le terrain s’inscrivent dans un continuum qui va de la classique administration jusqu’au management public contemporain. D’un côté, les pratiques administratives développées au siècle dernier se nourrissent de normes, de règles, de circulaires, invitent à des démarches mécaniques prévues dans le moindre détail, assorties de contrôles de conformité a priori. Elles le font dans un esprit essentiellement bureaucratique au sens wébérien du terme, obsédées par les rapports au pouvoir et aux pouvoirs, ce qui s’avère démotivant pour la majorité des acteurs, sauf pour ceux qui s’en repaissent, bien sûr. Ils feignent de ne pas se sentir concernés par ce qu’ils qualifient de « combats des chefs », même s’ils sont une partie prenante essentielle à travers leurs représentants qui, de fait, en sont complices (on parle parfois « d’alliances objectives » ; l’expression n’est pas excessive). À l’autre extrémité du continuum de pratiques, le management public non marchand s’appuie sur des valeurs, propose une vision, privilégie le sens, fait formuler un projet par les acteurs et les équipes concernés, avec des objectifs complétés d’indicateurs, et il promeut des interactions entre les acteurs et les équipes. Il accorde une place majeure aux savoirs, théoriques et pratiques (en termes de compétences professionnelles), ce qui peut se montrer gratifiant pour tous. Le rôle fondamental du manager pédagogique de proximité est donc de traduire et faire traduire une vision collective partagée en une stratégie pédagogique d’ensemble. Pour cela, il doit faire coopérer les uns et les autres, notamment dans le but de développer de l’intelligence pédagogique collective. Cela dans un milieu professionnel qui ne veut reconnaître que l’autonomie pédagogique individuelle et qui se complaît dans des pratiques autarciques. Pour les cadres de proximité, il ne s’agit pas seulement de gérer ces paradoxes, ce serait simple, mais de tenir compte de fortes oppositions de conception des métiers, où les « avantages acquis » (selon les termes communément employés) et le maintien du statu quo pèsent infiniment plus que l’intérêt des élèves, malgré les discours convenus qui affirment le contraire : il suffit d’observer la réalité pour s’en convaincre. Et surtout, comme le disent certains enseignants : « n’évoquons pas les familles, le métier est déjà bien compliqué ! ». On saisit pourquoi le rôle du chef d’établissement connaît une difficile évolution, sans compter ce qui tient aux transformations du système politique avec trois vagues de décentralisation en trente ans. Notons par exemple que l’ANDEV [2], en 2013, déclarait que « la collectivité locale est légitime dans le registre pédagogique » ; ainsi se développent de nombreuses plate-formes de soutien scolaire à l’initiative de collectivités territoriales. Elle déclarait également vouloir « marquer une rupture avec une certaine autarcie de l’éducation nationale » ; je constate que je ne suis pas le seul, hélas, à avoir cette vision de l’école française.

7Un cadre pédagogique de proximité est donc « un passeur » entre plusieurs milieux qui veulent s’ignorer mais qui, pourtant, gagneraient à collaborer. Il lui revient de pousser les équipes à la pratique de coconstructions. Il se doit de veiller à la coéducation et pour cela pratiquer une gouvernance pédagogique territoriale pour laquelle de nombreux outils existent. C’est avant tout une affaire de volonté et de courage car, nous l’avons dit plus haut et chacun le sait, sur le terrain, les évolutions ne sont ni souhaitées, ni attendues, voire plutôt systémiquement repoussées : rien ne vaut le statu quo aux yeux de beaucoup qui pourtant s’en défendent en niant l’évidence.

Quel type de management pratiquer ?

8Cette question est naturelle pour tout responsable d’un collectif humain. La réponse dépend de ses choix éthiques et de ses compétences professionnelles personnelles. Pour ne pas sombrer dans la facilité apparente de « l’administration administrante » – car il faut reconnaître que la bureaucratie peut sembler rassurante et même confortable aux yeux de certains ; c’est pour cela qu’elle perdure –, un responsable de proximité peut puiser dans une palette de types de managements publics assez différents les uns des autres, parfois même antagonistes. Nous n’en citerons que quatre parmi les plus pratiqués à l’heure actuelle.

  • Le management par les processus, souvent appelé reengineering. Par exemple, le CNDP l’a employé, et l’emploie encore car l’entreprise est longue à mener à son terme, pour devenir Canopé, un nouvel établissement public national, digérant les 30 CRDP et tous les CDDP, en redéfinissant toutes ses productions. C’est un management injonctif, descendant et très formalisé.
  • Le management de projet est lui participatif. Bien connu depuis 30 ans dans les EPLE, il repose sur des valeurs, une vision collective partagée et des logiques de co-constructions. C’est une forme de management participatif.
  • Le management de réseau, peu formalisé est multiforme et en développement. Il fait un usage intense et croissant du numérique.
  • Le management cognitif ou par les connaissances (knowledge management) fait appel aux compétences des acteurs comme celles des équipes et d’experts externes. Son attention est focalisée sur les résultats et il accorde une importance première aux régulations.

9Sur le terrain, dans les établissements scolaires, les pratiques effectives de management, le plus souvent, mixent tant bien que mal et pas toujours de façon cohérente, ces différents types de conduite de l’action collective.

10Par essence, le management pédagogique de proximité a dans sa ligne de mire les apprentissages cognitifs et autres des élèves. C’est son but principal, sa visée. Tel qu’il se pratique, sans chercher à tout prix à vouloir le faire entrer dans une catégorie managériale précise, on peut citer quelques-unes de ses caractéristiques les plus visibles. Plaçant l’élève au centre comme la loi Jospin le préconisait, il pratique une sorte de « pilotage par l’aval », au moins au niveau de la rhétorique. Il procède pour tous les acteurs à une explicitation de normes, construit ses indicateurs de pilotage et se dote de tableaux de bord. Il encourage la responsabilité collective et facilite les légitimes rendus de comptes encore trop exceptionnels de la part des équipes pédagogiques. Il fait preuve de rigueur dans l’utilisation des ressources et dans l’évaluation des résultats. Reste pour lui le plus difficile : préciser les liens entre stratégie pédagogique, résultats obtenus et ressources utilisées (matérielles et humaines). Les progrès sont à ce prix. Enfin, par l’usage de comparaisons, il tente d’apprécier le niveau de performance de l’établissement ou de la circonscription.

11Ces pratiques managériales rodées ou en cours de rodage ne sont pas sans poser des problèmes : questions de territoires ; d’expertises et de croisement de compétences ; d’appartenance à des réseaux multiples ; d’identités ; de communication interne aux différents réseaux. Mais aussi des problèmes d’efficacité et de coûts des coordinations ; d’importance croissante de l’usage du numérique pour le management, pour l’administration et pour la pédagogie ; de capitalisation et de partage des connaissances et des compétences professionnelles, tout en s’orientant parfois (on peut rêver) vers une perspective d’établissement scolaire apprenant.

12Pour le management pédagogique de proximité cela pose une série de questions clés que chaque responsable pédagogique doit se poser : quels sont les objets concernés ? Quels sont les acteurs et les réseaux impliqués ? Quel est le rôle des uns et des autres ? Quelles sont les diverses parties prenantes ? Quels sont les outils disponibles, notamment numériques, pour le management pédagogique ? Quelle plus-value en attendre ? Dans chaque cas particulier – car il n’y a que des cas singuliers –, et dès que la réponse à ces questions est obtenue, la mise en œuvre efficace des projets et des actions doit reposer sur quelques principes d’actions ; nous en citons quatre qui nous semblent importants.

Quatre principes d’action

13Le premier principe d’action dans les établissements scolaires, comme dans la majorité des organisations contemporaines, c’est de « penser réseaux ». Pour cela, il s’agit de repérer les liens existants entre les acteurs et les entités, distinguer la nature et les modalités des échanges. Enfin, il faut discerner les nœuds des réseaux car c’est là où l’action du management peut avoir un impact. Le deuxième principe d’action c’est de pratiquer un management pédagogique cognitif, c’est-à-dire reposant sur le croisement d’expertises et de compétences professionnelles, de préférence internes mais pas exclusivement, au contraire même. Le troisième principe, c’est de développer des lieux d’intelligence pédagogique collective, avec des moments spécifiques et forts, propices à la production d’une plus-value intellectuelle collective, dans une logique que nous avons qualifiée ailleurs de « pilotage intellectuel de l’action ». Il est essentiel pour cela de disposer de lieux ad hoc. Si, dans les EPLE, les conseils pédagogiques sont susceptibles d’en être un, rien de tel n’existe pour les circonscriptions du premier degré, ni pour les bassins de formation, ni même, sauf exception, pour les académies. Enfin, quatrième principe : distinguer et articuler les rôles des différents cadres de proximité (dont la proximité est certes très relative !) : chefs d’établissements, inspecteurs pédagogiques et IA-DASEN. Le tableau ci-dessous précise les rôles. Il montre qu’aucun de ces acteurs, seul, ne suffit à la conduite intelligente de l’action, que chacun a, plus ou moins, sa contribution à apporter et que le système sera renforcé par les synergies.

Le croisement des compétences

14Croiser les compétences professionnelles des acteurs revient à pratiquer une intelligente GRH de proximité, en réalité la seule réelle GRH possible comme nous l’avons écrit ailleurs [3]. Ceci en dit long sur le rôle du chef d’établissement, puisque cela suppose qu’il repère les diverses compétences (individuelles et collectives), qu’il les distingue, puis les fasse reconnaître par tous les acteurs (ce qui est loin d’être le plus facile car le dogme du milieu pédagogique nie toute différence individuelle entre les enseignants : seul compte le statut), qu’il les oppose dans des débats scientifiques pour les articuler ensuite, les valider, les capitaliser et enfin les partager. Ce « vaste programme » peut être la source d’une réelle plus-value pédagogique. Ainsi, le chef d’établissement pédagogue est-il un ingénieur en pédagogie et un architecte. Ou pour employer une autre métaphore, c’est un chef d’orchestre symphonique qui veille à l’harmonie d’un ensemble composé de musiciens qui sont tous de bons instrumentistes, mais qui risqueraient de n’entendre que leur partition, sans réel souci de la qualité de l’ensemble. Combien de fois a-t-on vu un grand chef, comme Herbert von Karajan, arriver à la tête d’un orchestre déjà réputé, composé de solistes remarquables, je pense à l’orchestre philharmonique de Berlin, et le métamorphoser au fil des mois ?

tableau im1
Chef d’établissement Inspecteurs pédagogiques IA-DASEN Multiplier les rétroactions sur les résultats (retours d’expériences) XXX X XX Rendre le travail pédagogique plus réflexif XX XXX X Accroître l’intelligence du système pédagogique XX XX XX Organiser globalement la pédagogie XXX XX X

15Le management pédagogique cognitif accorde une grande importance au registre fonctionnel : le « comment ? » est pour lui essentiel. Peut-être est-il révolutionnaire ? Il encourage l’innovation et surtout la pratique du retour d’expériences, point faible actuel dans notre système éducatif, on peut même dire quasiment absente. Il doit aussi veiller à dépasser les freins au travail collectif, nombreux et variés, parmi lesquels l’individualisme, les craintes de pertes d’identité professionnelle, les corporatismes, les refus de transparence et de rendus de comptes, une éthique insuffisante, les routines défensives ou encore le regard critique des autres : si d’aucuns le sollicitent (ou disent le souhaiter), la majorité le redoute.

16Des temps et des lieux ad hoc facilitent ces évolutions. Par exemple, les circonscriptions du premier degré comme les bassins de formation pour le second degré peuvent offrir des opportunités pour favoriser des pratiques instrumentées d’audits croisés entre écoles ou entre équipes de direction d’établissements scolaires voisins. En effet, il ne faudrait pas substituer des équipes fermées sur elles-mêmes aux actuelles pratiques individuelles isolées : des liens entre acteurs, équipes et entités sont nécessaires. Il ne suffit pas de déplacer les barrières, il faut les faire tomber. La réflexivité est donc nécessaire à la fois, au niveau des personnes, des équipes, des établissements scolaires, des circonscriptions, des bassins de formation…

17Nous pouvons conclure ce texte en invitant les cadres de proximité à manager la pédagogie en parcourant, sur plusieurs années (il faut bien cela !), l’axe de l’intelligence pédagogique collective tel que nous le faisons apparaître sur le dessin ci-dessous.

tableau im2
Régulation des régulations Pertinence globale Performances Régulations Processus Résultats Projets Procédures Tâches

18Alors que le colloque national de l’AFAE portait sur la question de l’autonomie des établissements scolaires, à la lecture de ces lignes, certains lecteurs peuvent peut-être se demander : « et l’autonomie dans tout cela ? ». Certes, volontairement, je n’ai guère employé ce terme ambigu et galvaudé, ce mot valise source de polémiques hypocrites et stériles qui ne ravissent que ceux qui aiment la polémique pour elle-même (selon notre tempérament méditerranéen) et excellent en ce genre. En fait, je n’ai abordé que ce sujet ! Il n’y a pas d’autonomie sans responsabilités collectives et sans intelligence collective, et l’intelligence collective est un construit. Une relecture de ce texte muni de cette clé confirmera mon affirmation et permettra de discerner ma volonté d’aborder ce sujet en des termes les plus éloignés possibles de l’esprit et de l’habituelle culture bureaucratie wébérienne.


Date de mise en ligne : 01/05/2017

https://doi.org/10.3917/admed.147.0079

Notes

  • [1]
    Les chiffres de ce paragraphe ne donnent que des ordres de grandeur. Pour plus de précisions les lecteurs sont invités à se reporter à la nouvelle édition du Système éducatif français et son organisation (SEF).
  • [2]
    Association nationale des directeurs et coordonnateurs territoriaux de l’éducation des villes.
  • [3]
    Voir Administration & Éducation n° 138 (2/2013), « La GRH de proximité ».

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