En 1937, Pierre Herbart, revenu d’U.R.S.S. un an plus tôt, publie un essai au vitriol sur le régime soviétique : En U.R.S.S 1936. Malgré tout, l’intellectuel, qui a vécu dans le pays plus d’un an entre 1935 et 1936, cache dans ce récit la liaison passionnée qu’il a entretenue avec N., un jeune Soviétique. En effet, cette seule révélation peut menacer la vie du jeune homme. Durant cette année de la Grande terreur, l’apostat sait que les homosexuels sont des cibles potentielles : décriminalisée dans le Code pénal de 1922, la « sodomie » a été « repénalisée » en 1933-1934. Ce n’est donc qu’en 1958, dans La Ligne de force, son essai autobiographique, qu’Herbart révèle le drame de sa nuit de départ à la fin de l’été 1936, où il a quitté son amant en étant sûr de ne jamais le revoir.
Les histoires d’amour des Français en U.R.S.S. sont loin d’être toutes aussi dramatiques, mais les voyages, et plus encore les séjours, soulèvent l’enjeu très politique et pas seulement intime, des relations amoureuses « au pays des Soviets ».
Plus de 10.000 Français partent en U.R.S.S. entre les deux guerres mondiales. Parmi eux, des journalistes, des hommes politiques et des fonctionnaires en mission, des spécialistes (« spetz »), des intellectuels invités ; des touristes aussi, qui, dans les années trente, ne restent parfois que quelques jours ; et, des militants politiques, pour la plupart communistes. Ces derniers, confrontés à l’utopie soviétique font partie de délégations professionnelles (majoritairement « ouvrières ») ou participent aux congrès des organismes du Komintern…