On connaît la formule de Proudhon : « La propriété, c’est le vol. » Pour Murray Rothbard (1926-1995), philosophe et économiste libertarien (comprendre « très libéral »), la propriété est, au contraire, le fondement de tout droit. Figure de proue de l’anarcho-capitalisme, Rothbard est partisan d’un libéralisme intégral. Cet auteur américain prolixe mais plutôt méconnu en France a ses partisans inconditionnels et ses détracteurs rapides. Il faut dire qu’il ne fait pas dans la demi-mesure : « L’État est l’ennemi éternel du genre humain. » Il s’explique. La propriété légitime de l’homme, vis-à-vis de son corps et de son travail, ne saurait résulter de la coercition. Or l’État opère par « parasitisme coercitif » (l’impôt, la police, les tribunaux). Pour Rothbard, l’État est une organisation criminelle (la plus grande qui soit). Son analyse n’est pas uniquement une méditation (avec tout de même son Robinson Crusoé qui choisit ses champignons). C’est aussi une argumentation assise sur des cas pratiques (le monopole de la vente de frites comme métaphore de l’État, ou les priorités d’attribution des places dans un canot de sauvetage).
Sa théorie des droits naturels de propriété n’est ni morale ni métaphysique (en tout cas elle se prétend ainsi). Elle débouche sur la condamnation de l’intervention publique et de tous les parasites qui ne produisent ni n’échangent, en particulier ceux qu’il nomme les « hommes de l’État » (les élus et les fonctionnaires). Il faut le lire pour le croire : on peut être pour l’abolition totale de l’État, pour le désarmement nucléaire, contre les droits des animaux (e…